Décision de radiodiffusion CRTC 2018-335

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Références : 2016-225, 2017-429 et 2017-429-1

Ottawa, le 30 août 2018

Dossier public : 1011-NOC2017-0429
Les numéros des demandes sont énoncés dans la décision.

Réexamen des décisions concernant le renouvellement des licences des services de télévision des grands groupes de propriété privée de langue anglaise

En mai 2017, le Conseil a publié des décisions visant à renouveler les licences des services de télévision des grands groupes de propriété privée de langue anglaise. Dans un décret émis en vertu de l’article 28 de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi), le gouverneur en conseil a renvoyé ces décisions au Conseil pour réexamen et nouvelle audience.

Plus précisément, le gouverneur en conseil a demandé au Conseil de réexaminer les aspects des décisions portant sur les dépenses en émissions d’intérêt national (ÉIN), en émissions de musique et en contenu de courte durée.

La présente décision énonce les décisions du Conseil à la suite de ce processus de réexamen.

Émissions d’intérêt national

Les services de Bell et de Corus seront assujettis respectivement à une exigence de dépenses en ÉIN de 7,5 % et de 8,5 % de leurs revenus bruts de l’année de radiodiffusion précédente. Les exigences de dépenses en ÉIN imposées aux services de Rogers seront maintenues à 5 % de leurs revenus bruts de l’année de radiodiffusion précédente.

Émissions de musique

Les groupes devront consacrer 0,17 % des revenus bruts de l’année de radiodiffusion précédente de leurs services à FACTOR. Ce montant pourra être comptabilisé aux fins du respect de leur exigence de dépenses en émissions canadiennes. Cette exigence de dépenses sera temporaire.

Contenus de courte durée

Le Conseil estime qu’il n’est pas nécessaire que les groupes augmentent le financement réservé à la production de contenus de courte durée. Les contributions du Fonds Bell aux contenus de courte durée aident à assurer un soutien adéquat pour leur création malgré la dissolution de l’ancien fonds BravoFACT.

Les conditions de licence modifiées entreront en vigueur le 1er septembre 2018, soit au début de la deuxième année de la période de licence pour les services des groupes qui sont concernés, et s’appliqueront jusqu’à la fin de leur période de licence, soit le 31 août 2022.

En réexaminant ses décisions, le Conseil a pris en considération le décret tout en demeurant attentif à ses obligations en vertu de la Loi et au dossier de la présente instance.

Introduction

  1. Le 15 mai 2017, le Conseil a publié une série de décisions visant à renouveler les licences des services de télévision des grands groupes de propriété privée de langue anglaise et de langue française. Dans le cadre de ce renouvellement, le Conseil a mis en œuvre les politiques mises de l’avant dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-86 et la politique réglementaire de radiodiffusion 2016-224.
  2. Par le décret C.P. 2017-1060 publié le 14 août 2017 (le Décret), le gouverneur en conseil a renvoyé au Conseil certains éléments des décisions énoncées dans les décisions de radiodiffusion 2017-143 à 2017-147 (groupes de propriété de langue française) et 2017-148 à 2017-151 (groupes de propriété de langue anglaise) pour réexamen et nouvelle audience, en indiquant que ceux-ci n’allaient pas dans le sens des objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion énoncés à l’article 3(1) de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi), et en particulier à l’article 3(1)s) de cette loiNote de bas de page 1.
  3. Le gouverneur en conseil a indiqué qu’il serait essentiel que le Conseil étudie comment s’assurer que les groupes de propriété contribuent de façon notable à la création et à la présentation d’émissions d’intérêt national (EIN)Note de bas de page 2, d’émissions de musique, de courts-métrages et de documentaires de courte durée. Il est également indiqué dans le Décret que le Conseil doit « tenir compte du fait que les créateurs d’une programmation canadienne constituent un élément clé du système canadien de radiodiffusion et du fait que, en période de transformation de l’industrie, une programmation canadienne et un secteur créatif dynamique sont essentiels à la compétitivité de ce système et enrichissent l’économie canadienne. »
  4. Le Conseil a demandé à Bell Média inc. (Bell), Corus Entertainment Inc. (Corus) et Rogers Media Inc. (Rogers) (ensemble, les groupes) une mise à jour de leurs demandes de renouvellement de licence et le dépôt de renseignements sur les divers aspects des décisions faisant l’objet du réexamen, y compris de nouvelles données financières. Les documents déposés par les groupes, de même que la correspondance associée, peuvent être consultés aux liens suivants :
  5. Le Conseil a aussi demandé aux groupes de se prononcer sur la possibilité d’appliquer certaines conditions de licence modifiées, dont celles sur certaines exigences de dépenses, sur toute la durée de la période de licence de leurs services, c’est-à-dire du 1 septembre 2017 au 31 août 2022.
  6. Le Conseil a tenu deux phases de consultation et sollicité les commentaires des intervenants sur les répliques des groupes.
  7. Conformément au Décret, et après examen des demandes mises à jour compte tenu des politiques et des règlements et en prenant en considération les interventions reçues et les répliques des titulaires, le Conseil estime que les questions sur lesquelles il doit se pencher sont les suivantes :
    • la date de mise en œuvre des conditions de licence modifiées;
    • les dépenses en ÉIN;
    • les dépenses en émissions de musique; et
    • les dépenses en courts métrages et en documentaires de courte durée.
  8. Le Conseil estime que les questions et propositions soulevées par les intervenants et les groupes et qui ne sont pas directement liées aux sujets évoqués ci-dessus dépassent la portée de la présente instance et du Décret. Le Conseil n’en a donc pas tenu compte dans la présente décision.

Cadre réglementaire

  1. En réglementant et en supervisant tous les aspects du système canadien de radiodiffusion, le Conseil doit chercher à mettre en œuvre la politique de radiodiffusion énoncée à l’article 3(1) de la Loi, tout en tenant compte de la politique réglementaire prévue à l’article 5(2) de la Loi. 
  2. Dans le cas présent, le gouverneur en conseil a déterminé que les décisions précédentes du Conseil n’allaient pas dans le sens des objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion énoncés à l’article 3(1) de la Loi, en particulier l’article 3(1)s) de cette loi. En demandant au Conseil de réexaminer ses décisions, le gouverneur en conseil a précisé que le Conseil devait procéder en prêtant une attention particulière à l’article 3(1)s) de la Loi. Cependant, le Conseil doit demeurer attentif aux objectifs de la politique réglementaire liés à la réglementation et à la supervision du système canadien de radiodiffusion, énoncés à l’article 5(2) de la Loi. Le Conseil a donc réexaminé ses décisions et évalué les preuves déposées au dossier public dans le cadre de la présente instance compte tenu des objectifs de la Loi notés ci-dessus.

Date de mise en œuvre des conditions de licence modifiées

  1. L’article 28 de la Loi prévoit que :

    28 (1) Le gouverneur en conseil peut, par décret pris dans les quatre-vingt-dix jours suivant la décision en cause, sur demande écrite reçue dans les quarante-cinq jours suivant celle-ci ou de sa propre initiative, annuler ou renvoyer au Conseil pour réexamen et nouvelle audience la décision de celui-ci d’attribuer, de modifier ou de renouveler une licence, s’il est convaincu que la décision en cause ne va pas dans le sens des objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion énoncés à l’article 3(1).
    (2) Le décret de renvoi doit exposer en détail toute question pertinente, de l’avis du gouverneur en conseil, en ce qui touche le réexamen.
    (3) Le Conseil réétudie la question qui lui est renvoyée et peut, après la nouvelle audience, soit annuler la décision ou l’attribution — avec ou sans attribution à une autre personne aux mêmes conditions ou à d’autres —, la modification ou le renouvellement qui en découlent, soit les confirmer, avec ou sans changement.

  2. Conformément à l’article 28, le gouverneur en conseil a renvoyé au Conseil pour réexamen les décisions de renouvellement de licences et il a identifié les éléments à revoir. Étant donné que le gouverneur en conseil a décidé de renvoyer ces décisions au Conseil plutôt que de les annuler, ces décisions sont toujours en vigueur depuis le 1 septembre 2017. Le Conseil doit donc déterminer la date la plus appropriée pour la mise en œuvre des conditions de licence modifiées énoncées dans la présente décision.

Positions des parties

  1. Selon les groupes, le Conseil n’a pas le pouvoir en vertu de la Loi d’annuler les décisions de licence ou d’imposer de nouvelles conditions de licence rétroactivement. Ils ont ajouté que si le gouverneur en conseil avait eu l'intention de demander au Conseil de revoir les obligations des groupes pour la première année de la période de licence, il aurait annulé les décisions. Enfin, ils ont soulevé certaines préoccupations quant aux coûts et aux difficultés de gestion liés à la mise en œuvre d’obligations de façon rétroactive, alors qu’une année de licence se serait déjà écoulée et que les commandes de programmation pour l’année de radiodiffusion 2018-2019 sont déjà attribuées.
  2. Blue Ant Media Inc. (Blue Ant) et DHX Media Ltd. (DHX) se sont aussi opposés à l’imposition d’exigences additionnelles sur une base rétroactive en faisant valoir qu’une telle décision minerait la confiance dans le processus réglementaire et créerait de l’incertitude chez tous les titulaires.
  3. La Canadian Media Producers Association (CMPA), la Guilde canadienne des réalisateurs (GCR), On Screen Manitoba et la Writers Guild of Canada (WGC) ont appuyé la mise en œuvre des nouvelles exigences pour tous les groupes à compter du 1  septembre 2017, de sorte que les radiodiffuseurs compenseraient tout manque à gagner pour l’année de radiodiffusion 2017-2018 d’ici la fin de leur période de licence actuelle de cinq ans. Ils ont fait remarquer que les radiodiffuseurs avaient été informés que les exigences de dépenses en ÉIN risquaient d’être augmentées, depuis la publication du Décret le 14 août 2017, soit seulement trois mois après les décisions de renouvellement et avant que ces décisions n’entrent en vigueur le 1  septembre 2017.
  4. La CMPA a de plus souligné que le Conseil a le pouvoir d’imposer des conditions de licence modifiées dès la date d’entrée en vigueur de la licence et que le report de la mise en œuvre des modifications aurait une incidence négative importante sur les créateurs canadiens pour l’exercice 2017-2018. La GCR a partagé cette opinion, ajoutant qu’elle n’avait pas constaté de difficultés majeures dans l’application des nouvelles exigences puisque tous les radiodiffuseurs ont fait valoir qu’en pratique, ils considéraient les exigences de dépenses en ÉIN comme un minimum et non un maximum. De plus, certains d’entre eux ont déclaré qu’ils dépassaient régulièrement les projections et les exigences.
  5. L’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo et la Canadian Independent Music Association (ADISQ/CIMA), dans une intervention conjointe, ont fait valoir que la mise en œuvre de toute nouvelle exigence relative à ce type de programmation devrait être rétroactive au 1 septembre 2017.

Analyse et décision du Conseil

  1. Le Conseil doit assurer une réglementation solide et prévisible, de façon à ce que les titulaires puissent exploiter leurs entreprises dans un environnement réglementaire stable. Imposer l’entrée en vigueur des conditions modifiées à compter du 1 septembre 2017 ne serait pas propice à la réalisation d’un tel environnement. Les titulaires ont déjà engagé des dépenses conformément aux conditions de licence qui leur avaient été imposées pour l’année de radiodiffusion 2017-2018.
  2. Par conséquent, le Conseil estime approprié d’imposer les conditions de licences modifiées énoncées à l’annexe de la présente décision à compter du 1 septembre 2018, soit le début de la seconde année de la période de licence pour tous les services des groupes qui sont concernés.

Dépenses en émissions d’intérêt national

Historique

  1. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2010-167 (la politique par groupe), le Conseil a déclaré qu’il imposerait à chaque groupe de propriété une exigence minimale de dépenses en ÉIN de 5 % des revenus bruts de l’année précédente; il a aussi précisé qu’il pourrait décider d’imposer une exigence plus élevée à un groupe si l’historique de ses dépenses le justifiait. Au moins 75 % des dépenses exigées pour la production d’ÉIN seraient allouées à de émissions produites par des producteurs indépendants.
  2. Par la suite, dans les décisions de renouvellement de licence par groupe publiées en 2011 et 2012, diverses exigences de dépenses en ÉIN ont été imposées à chaque groupe comme suit : Bell et Shaw Media Inc. (Shaw) : 5 %; Corus : 9 %; et Astral Media inc. : 16 %Note de bas de page 3. Une exigence de dépenses en ÉIN de 5 % a été imposée à Rogers en 2014Note de bas de page 4. Dans chaque cas, le Conseil a tenu compte de l’historique des dépenses en ÉIN des services à inclure dans les groupes et a fixé les pourcentages de dépenses en ÉIN en conséquence. Selon le Conseil, cette approche assurerait un financement adéquat des ÉIN au cours de la période de licence, sans nuire indûment aux autres types d’émissions canadiennes ni imposer de fardeaux inutiles aux groupes.
  3. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-86, le Conseil a déclaré que les exigences de dépenses en ÉIN demeurent une mesure utile en vue de garantir que les Canadiens aient accès au plus grand nombre possible d’émissions des catégories d’émissions qui sont d’intérêt national et qui exigent un soutien réglementaire continuel. De plus, en ce qui concerne les groupes de langue anglaise, les exigences en matière d’ÉIN ayant été imposées peu de temps auparavant, le Conseil a estimé prématuré de modifier la politique à ce moment-là.
  4. Dans la décision de radiodiffusion 2017-148, conformément à ses conclusions énoncées dans les politiques réglementaires de radiodiffusion 2010-167 et 2015-86, le Conseil a établi une exigence minimale normalisée de dépenses en ÉIN de 5 % pour tous les services admissibles des groupes Bell, Corus et Rogers. Bien que l’exigence normalisée de dépenses en ÉIN imposée dans les décisions était plus basse dans certains cas que les exigences antérieures des divers services dans les groupes et que leurs dépenses réelles, le Conseil a déclaré qu’il estimait que cette approche permettrait aux groupes et à leurs services de livrer concurrence sur un pied d’égalité et leur donnerait la souplesse requise pour s’adapter à un marché plus compétitif. Cependant, le Conseil a aussi encouragé les groupes à dépasser cette exigence minimale.

Positions des parties

Exigence relative aux dépenses en ÉIN
  1. Lors de la mise à jour de leurs demandes suivant la publication du Décret, Bell et Corus avaient tous deux d’abord proposé pour leurs services une exigence de dépenses en ÉIN de 6%, alors que Rogers préférait la maintenir à 5 %. Au cours de la seconde phase d’observations, Corus a proposé que l’exigence de dépenses en ÉIN pour l’actuelle période de licence soit basée sur l’historique des exigences et non pas sur l’historique des dépenses. Certaines parties ont appuyé ces propositions.
  2. La CMPA, les Documentaristes du Canada (DOC), la GCR et On Screen Manitoba ont fait valoir que les exigences de dépenses en ÉIN devraient être basées sur les pourcentages antérieurs de dépenses (8 % pour Bell, 9 % pour Corus et 5% pour Rogers). Selon Friends of Canadian Broadcasting, il convient de se baser sur les pourcentages antérieurs de dépenses, mais il a proposé des seuils de dépenses en ÉIN de 8 % pour Bell et Corus et de 5 % pour Rogers. Ces parties ont exprimé leur inquiétude que les dépenses en dramatiques et en documentaires canadiens puissent diminuer si le Conseil n’imposait pas des seuils de dépenses en ÉIN basés sur l’historique des dépenses.
  3. À titre subsidiaire, la GCR a fait valoir que si le Conseil souhaitait appliquer une approche normalisée, il devrait fixer l’exigence de dépenses en ÉIN à 9 % pour tous les groupes, sauf Rogers.
  4. D’autres parties ont suggéré des seuils de dépenses en ÉIN plus élevés que ceux des dépenses antérieures. Par exemple, la WGC a proposé une augmentation d’un point de pourcentage par rapport à l’historique des dépenses en ÉIN noté ci-dessus, alors que l’Alliance des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de la radio (ACTRA) a soutenu que Corus et Bell devraient allouer au moins 10 % de leurs revenus aux ÉIN et que Rogers devrait allouer au moins 6 % de ses revenus aux ÉIN.
Utilisation des données de 2016-2017
  1. La CMPA, la GCR et la WGCNote de bas de page 5 ont indiqué que, dans la présente instance, le Conseil ne devrait pas fonder ses décisions sur les données de l’année de radiodiffusion 2016-2017, car ces données n’étaient pas accessibles au public lors de la présentation de leurs interventions. De plus, elles ont allégué que, sans accès aux données détaillées de l’année de radiodiffusion 2016-2017 de tous les groupes de radiodiffusion, les intervenants étaient incapables de déterminer l’exactitude et la fiabilité des données soumises par les groupes.

Analyse et décision du Conseil

  1. En ce qui a trait à l’opposition de certains intervenants à l’utilisation de certaines données, le Conseil note que ces derniers ont eu l’occasion de faire des commentaires sur les données contenues dans les annexes financières déposées par les groupes au cours de la présente instance. Le Conseil estime qu’elles avaient connaissance de suffisamment de données pour préparer leurs interventions; de plus, se référer aux données de l’année de radiodiffusion 2016-2017 ne cause aucun préjudice aux intervenants ou aux radiodiffuseurs.
  2. En outre, le Conseil est d’avis qu’il convient d’utiliser les données les plus récentes compte tenu de la nature changeante de l’industrie de la radiodiffusion. Une analyse de l’historique des dépenses faites pendant l’ensemble de la période de licence précédente, au lieu de celles faites seulement pendant une partie de la période, permet de mieux comprendre la situation financière de chaque titulaire.
  3. Lors de son évaluation des diverses propositions au dossier des dépenses en ÉIN, le Conseil a pris en considération les objectifs énoncés à l’article 3(1)s) de la Loi, tout en demeurant attentif à la politique réglementaire précisée à l’article 5(2) de la Loi. Dans cette perspective, le Conseil a étudié trois options dans le but de s’assurer que le secteur canadien de la radiodiffusion offre au dynamique secteur canadien de la création un solide soutien à la création d’ÉIN :
    • les pourcentages de dépenses en ÉIN proposés par les groupes;
    • les pourcentages de dépenses en ÉIN basés sur l’historique des exigences imposées aux groupes;
    • les pourcentages de dépenses en ÉIN basés sur l’historique des dépenses des groupes.
Exigences de dépenses en ÉIN proposées par les groupes
  1. Tel que noté ci-dessus, les groupes ont initialement proposé des pourcentages de dépenses en ÉIN qui ne différaient pas beaucoup de ceux établis dans les conditions de licence pertinentes des décisions de renouvellement de licences renvoyées au Conseil pour réexamen. Plus particulièrement, Bell et Corus ont tous deux proposé de se conformer à une exigence de dépenses en ÉIN de 6 %, alors que Rogers a proposé de se conformer à une exigence de dépenses en ÉIN de 5%. Selon les projections déposées dans le cadre de la présente instance, le résultat net de l’adoption de ces pourcentages se chiffrerait pour les groupes à une dépense annuelle moyenne de 158,9 millions de dollars pour les années de radiodiffusion 2018-2019 à 2021-2022, c’est-à-dire une diminution probable des dépenses en ÉIN par rapport à la période de licence précédente.
  2. Une partie de cette baisse serait liée à une réduction des revenus des groupes qui, selon leurs prévisions, devraient baisser en moyenne de 9,7 % au cours de la présente période de licence par rapport à la période précédente. Cependant, la majeure partie de cette baisse serait attribuable aux propositions de dépenses en ÉIN. Plus précisément, si l’on tient compte des exigences plus basses au cours de la première année de la présente période de licence, les exigences proposées se traduiraient par des dépenses inférieures aux dépenses de Bell et de Corus au cours de la précédente période de licence.
  3. Les propositions des groupes leur offriraient une certaine souplesse pour faire face aux prévisions de baisse de leurs revenus et de leur rentabilité. Cependant, des trois options, c’est celle-ci qui réduirait le plus le montant des dépenses en ÉIN.
  4. De plus, compte tenu du fait que le gouverneur en conseil a jugé important de tenir compte du fait que les créateurs d’émissions canadiennes jouent un rôle clé au sein du système canadien de radiodiffusion, que l’industrie subit une transformation, et que la programmation canadienne et le maintien d’un secteur créatif dynamique sont essentiels à la compétitivité du système et contribuent à l’économie canadienne, cette proposition ne réglerait pas les préoccupations soulevées dans le Décret. Par conséquent, le Conseil est d’avis que cette proposition ne permettrait pas d’équilibrer adéquatement les objectifs de politique de radiodiffusion de la Loi, étant donné que les contributions des grands groupes de radiodiffusion ne seraient pas suffisantes, compte tenu de leurs ressources financières et autres.
Exigences de dépenses en ÉIN basées sur l’historique des exigences
  1. Selon la deuxième option, les nouvelles exigences de dépenses en ÉIN seraient basées sur l’historique des exigences arrondies imposées aux groupes. Selon les calculs du Conseil, cette approche se traduirait par un seuil minimal de dépenses en ÉIN de 6,5 % pour Bell et Corus et de 5 % pour Rogers.
  2. Selon cette option, d’après les projections de revenus pour la présente période de licence, le minimum requis de dépenses en ÉIN se chiffrerait pour l’ensemble des trois groupes à une moyenne annuelle de 171 millions de dollars pour les années de radiodiffusion 2018-2019 à 2021-2022.
  3. De tels pourcentages ne représenteraient pas un écart significatif  des propositions des groupes et constitueraient un juste milieu entre ces propositions et celles de plusieurs intervenants au dossier de la présente instance. Cette approche offrirait un certain équilibre entre le besoin de soutien des créateurs et la demande de souplesse des groupes dans un environnement de radiodiffusion en évolution. Toutefois, selon cette approche, en raison de l’application de la décision uniquement pour le restant de la période de licence, les exigences de dépenses moyennes en ÉIN pour la période de licence seraient inférieures aux montants historiques des groupes. De plus, la valeur actuelle de ces dépenses en dollars pourrait diminuer proportionnellement aux revenus des groupes si les revenus déclinaient selon les projectionsNote de bas de page 6. En tant que telle, cette proposition ne fournirait pas un niveau de dépenses en ÉIN aussi stable ou durable que l’utilisation de l’historique des dépenses. Par conséquent, le Conseil est d’avis que cette proposition ne garantirait pas que Bell et Corus, en particulier, contribuent à la création et à la présentation d’émissions canadiennes en proportion de leurs ressources financières ou autres, comme le prévoit l’article 3(1)s) de la Loi.
Exigence de dépenses en ÉIN basées sur l’historique des dépenses
  1. C’est cette proposition qui a reçu le plus d’appuis parmi les intervenants. Selon cette option, le pourcentage des dépenses en  ÉIN basé sur les revenus bruts de l’année de radiodiffusion précédente serait maintenu pour la présente période de licence dans des conditions très similaires à celles de la période de licence précédente.
  2. D’après la moyenne arrondie des dépenses en ÉIN des groupes pour les années de radiodiffusion 2012-2013 à 2016-2017Note de bas de page 7, le Conseil estime qu’il convient de fixer l’exigence de dépenses en ÉIN à 7,5 % des revenus bruts de l’année de radiodiffusion précédente pour Bell, à 8,5 % pour Corus et à 5 % pour Rogers. Selon cette option, d’après une projection des revenus des groupes pour la période de licence actuelle, le montant minimal de dépenses exigé en matière d’ÉIN représenterait une moyenne annuelle de 206,8 millions de dollars de 2018-2019 à 2021-2022 pour l’ensemble des trois groupes.
  3. L’établissement d’exigences de dépenses en ÉIN pour chaque groupe en fonction de l’historique de ses dépenses assurerait le maintien de l’investissement global dans les diverses catégories d’ÉIN, ce qui garantirait un financement stable et durable à ce type de programmation. De plus, cette mesure ferait en sorte que les groupes contribuent à la création et à la présentation de programmation canadienne en proportion de leurs ressources financières et autres, comme le prévoit l’article 3(1)s) de la Loi. Finalement cette exigence modifiée établirait un équilibre entre le besoin de soutien du secteur de la création et le besoin de souplesse des groupes dans un environnement de radiodiffusion en évolution.
  4. Alors que cette mesure imposerait à Bell et à Corus d’augmenter leurs dépenses en ÉIN par rapport à leurs projections, les dépenses réelles en ÉIN pourraient quand même baisser si les revenus des groupes déclinaient selon les projections. De plus, étant donné que les dépenses en ÉIN sont une sous-catégorie des dépenses en émissions canadiennes (DÉC), cette proposition n’augmenterait sans doute pas le total des dépenses des groupes. Par conséquent, alors que cette option est la plus avantageuse pour le secteur de la création au Canada, le Conseil estime qu’elle reste aussi sensible à la capacité des groupes à contribuer à une telle programmation étant donné que les revenus prévus de Bell et de Cours pourraient supporter ces exigences. Quant à Rogers, le Conseil estime qu’en raison de sa composition, de sa part de revenus et de ses divers éléments d’actif, la situation de ce groupe est différente de celle des autres. Beaucoup d’intervenants à l’instance ont partagé cet avis. Par conséquent, le Conseil maintiendra l’exigence de dépenses en ÉIN à 5 % pour Rogers.
  5. De l’avis du Conseil, ces niveaux de dépenses en ÉIN établissent un équilibre approprié entre, d’une part, l’importance du secteur de la production au Canada et son rôle essentiel dans l’économie canadienne et, d’autre part, les capacités d’investissement respectives des groupes dans la création de cette programmation. Par conséquent, Conseil énonce à l’annexe de la présente décision, des conditions de licence pour les services de Bell et de Corus qui reflètent des exigences de dépenses en ÉIN modifiées fixées respectivement à 7,5 % et à 8,5 % des revenus bruts de l’année de radiodiffusion précédente, à compter du 1 septembre 2018.

Programmation musicale

Historique

  1. En ce moment, en vertu des décisions de renouvellement de licence de 2017, les groupes de langue anglaise ne sont pas tenus de faire des contributions directes à la programmation musicale. De plus, dans le marché de langue anglaise, la définition d’ÉIN ne comprend pas les émissions des catégories 8 Musique et danse, y compris les vidéoclips, et 9 Variétés, comme c’est le cas dans le marché de langue française. Par conséquent, les groupes de langue anglaise n’ont pas d’incitatif réglementaire à consacrer une partie de leurs dépenses à ce type d’émissions.
  2. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-86, le Conseil a choisi d’éliminer le régime de la protection des genres. Même si cela permettait aux titulaires de bénéficier d’une plus grande souplesse, cela supposait aussi le retrait de conditions de licence à l’égard de la nature du service, y compris celles des services directement associés à la musique, soit Much (autrefois MuchMusic), M3Note de bas de page 8 (autrefois Much More Music) et CMT (autrefois Country Music Television). Par conséquent, les services n’ont plus à produire ou à financer de la programmation d’une catégorie d’émissions en particulier, telles que les émissions de musique.
  3. En renvoyant les décisions de radiodiffusion 2017-148 à 2017-151 au Conseil pour réexamen, le gouverneur en conseil lui a demandé d’étudier comment s’assurer que les groupes contribuent de façon notable à la création et à la présentation d’émissions de musique.

Positions des parties

Demandes des groupes
  1. Bell a proposé d’élargir la définition d’ÉIN dans le marché de langue anglaise pour y inclure les émissions consacrées à la musique. Bell a aussi proposé que les radiodiffuseurs reçoivent un crédit de 25 % à l’égard des DÉC pour soutenir un contenu canadien de musique, alors que Corus a proposé un crédit de 50 %. Rogers a appuyé ces propositions et a suggéré que des fonds pourraient aussi être réattribués par le Fonds des médias du Canada (FMC) et la FACTOR à des émissions de musique et des émissions de courte durée. 
  2. Les groupes, de même que DHX et Blue Ant, ont fait valoir que l’adoption de telles mesures incitatives correspondrait mieux à la nouvelle approche de politique du Conseil, laquelle favorise la normalisation parmi les services et une souplesse de programmation, que l’imposition d’exigences à l’égard de catégories spécifiques de contenu. Rogers a aussi soutenu que toute proposition visant à modifier la manière dont les télédiffuseurs contribuent à la création et à la production d’émissions de musique devrait être traitée à l’occasion d’une large instance de politique, tout en notant que de nouvelles exigences ne s’appliqueraient qu’aux services de télévision linéaires et non aux joueurs numériques non autorisés. Rogers a ajouté que la Loi n’oblige pas chacune des entreprises à soutenir chaque type d’émission et que si une exigence en ce sens était imposée, l’argent présentement consacré à d’autres émissions canadiennes devrait être redirigé vers la production d’émissions de musique, de vidéoclips et d’émissions de courte durée.

Interventions

  1. L’ACTRA, Entertainment One, Friends of Canadian Broadcasters et la GCR ont allégué que les anciennes conditions de licence particulières aux services sur la programmation musicale devraient être imposées de nouveau à Much et à CMT. De plus, l’ACTRA, de même que la CMPA, la GCR, DOC et la WGC, se sont opposés à la proposition d’inclure les émissions de musique dans les ÉIN; ils ont fait valoir que l’ajout d’une nouvelle catégorie aux ÉIN ne garantira pas nécessairement que les groupes de langue anglaise feront des efforts pour la soutenir. La CMPA a aussi fait valoir que si la définition des ÉIN était élargie, les exigences de dépenses en ÉIN devraient être augmentées en vue de garantir que l’inclusion de nouvelles catégories d’émissions ne diminue pas les dépenses à l’égard de la programmation issue de catégories d’émissions pouvant être considérées comme vulnérables.
  2. La CMPA, la GCR et On Screen Manitoba étaient en faveur d’accorder un crédit à l’égard des DÉC pour les émissions de musique, les courts métrages et les documentaires de courte durée, alors que l’ACTRA s’opposait à toute mesure incitative ou à tout crédit.
  3. Pour leur part, l’ADISQ/CIMA ont recommandé qu’une partie des DÉC soit consacrée à un fonds de soutien à la musique et aux vidéoclips. À ce sujet, elles ont calculé qu’en vertu des anciennes exigences à l’égard de MuchMusic, de M3 et de CMT, la contribution annuelle des groupes à ce type d’émissions s’élevait à environ 6 millions de dollars dans le marché de langue anglaise, soit 0,7 % de l’ensemble de leurs DÉC. Par conséquent, elles ont proposé d’exiger que les groupes versent 0,7 % de leurs DÉC à la FACTOR pour compenser la perte au sein du système.
  4. De façon subsidiaire, l’ADISQ/CIMA ont proposé que les contributions des entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) à l’expression locale soient augmentées et que le FMC ou les fonds de production indépendants certifiés (FPIC) instaure un nouveau programme afin de soutenir les vidéoclips. Elles ont ajouté que le Conseil devrait lancer une instance de portée plus large ayant comme objectif d’exiger que les autres services consacrés à la musique, comme Stingray ou les plateformes numériques, contribuent au financement de vidéoclips.

Analyse et décision du Conseil

Exigences de dépenses
  1. En vertu des exigences imposées avant les décisions de renouvellement de licences de 2017, MuchMusic et M3, détenus par Bell, devaient verser respectivement 7 % et 5 % des revenus brutsde leurs services de l’année de radiodiffusion précédente au fonds MuchFACT (voir la décision de radiodiffusion 2011-444). CMT, détenu par Corus, devait consacrer 11 % de ses revenus bruts de l’année de radiodiffusion précédente au développement et à la production de vidéoclips canadiens (voir la décision de radiodiffusion 2016-39).
  2. Le Conseil a examiné les estimations de l’ADISQ/CIMA basées sur les conditions de licence qui s’appliquaient à MuchMusic, à M3 et à CMT avant les décisions de renouvellement de licences de 2017. En se fondant sur les projections de revenus pour l’année de radiodiffusion 2017-2018 de ces trois services, si leurs conditions de licence étaient encore en vigueur, leurs contributions au fonds MuchFACT et au développement et à la production de vidéoclips canadiens s’élèveraient à 4 779 831 dollars pour cette année de radiodiffusion, ou 0,17 % des revenus combinés des groupes de langue anglaise. Compte tenu de la taille du marché canadien de langue anglaise et de l’incidence importante sur ce marché de l’industrie de la musique aux États-Unis, une perte de cette ampleur dans le secteur de la production pourrait entraîner des conséquences importantes à l’égard des créateurs de ce type de contenu.
  3. En ce qui concerne la proposition d’élargir les catégories d’ÉIN, le Conseil craint que l’adoption d’une telle proposition pourrait déséquilibrer le financement des autres catégories d’ÉIN en créant une situation où les groupes pourraient réduire leurs dépenses présentement allouées aux émissions dramatiques et aux documentaires, surtout dans un contexte où les revenus de la télévision sont en diminution. En outre, le Conseil estime qu’il vaut mieux adopter toute modification à des mesures réglementaires importantes concernant les ÉIN dans le cadre d’un examen de politique plus large.
  4. Le Conseil est conscient que les groupes préfèrent des mesures incitatives afin de traiter cet enjeu; cependant, les crédits pourraient s’avérer inefficaces pour traiter les enjeux soulevés dans le Décret parce qu’ils ne représenteraient qu’un incitatif sans pour autant rétablir le financement stable dont l’industrie de la musicale bénéficiait, notamment parce que la programmation présentement diffusée par plusieurs des services des groupes n’est pas liée aux vidéoclips ou à d’autres émissions de musique.
  5. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil est d’avis qu’une exigence de dépenses est un meilleur moyen de compenser les conséquences de la perte de financement subie par le secteur de la programmation musicale et d’assurer un soutien continu à ses créateurs. Comme l’ont noté les groupes, le secteur de la télévision n’est plus le seul à offrir ce type de contenu. Ainsi, un soutien à long terme à l’industrie de la musique ne devrait pas être offert exclusivement par ce secteur. Dans son récent rapport demandé par le gouverneur en conseil, Emboîter le pas au changement : L’avenir de la distribution de la programmation au Canada (le rapport Emboiter le pas au changement), le Conseil a suggéré que le principe selon lequel tous les joueurs qui bénéficient du système canadien de radiodiffusion devraient contribuer de manière appropriée et équitable est essentiel pour créer un marché domestique dynamique.
  6. Le Conseil estime qu’une exigence de dépenses imposée aux titulaires de télévision devrait être une mesure temporaire, en place jusqu’à la fin de leur période de licence actuelle, le temps de permettre à l’industrie de la musique de s’adapter. Le Conseil est aussi d’avis qu’une exigence normalisée pour tous les groupes serait la mesure la plus simple et la meilleure pour soutenir la programmation musicale tout en assurant la parité réglementaire parmi les groupes, conformément à l’élimination des genres. De plus, permettre que ces dépenses soient comptabilisées dans leurs exigences de DÉC offrirait aux groupes une certaine souplesse de dépenses dans la mise en place de cette exigence.
Fonds bénéficiaire
  1. De plus, le Conseil est d’avis qu’il convient d’exiger que ces dépenses soient dirigées vers un fonds existant, comme c’était le cas pour MuchMusic et M3. Que les radiodiffuseurs choisissent de présenter ou non les émissions de musique et les vidéoclips qui en résulteront, cette mesure garantira que les groupes contribueront de façon significative à la création de programmation musicale. Le Conseil a conclut que la FACTOR est le récipiendaire le plus approprié parce que son financement provient tant de sources publiques que privées et que ce fonds possède une infrastructure, un modèle de distribution et des mécanismes de reddition de compte qui ont fait leurs preuves. De plus, la FACTOR offre un soutien à la création et à la production d’émissions de musique, principalement anglophones, conformément aux objectifs de la Loi. La FACTOR offre également un soutien aux communautés de langues officielles en situation minoritaire de langue anglaise au Québec. 
  2. Pour ce qui est des autres exigences de dépenses proposées par l’ADISQ/CIMA, notamment une augmentation des contributions des EDR à l’expression locale en vue d’accroître le soutien aux émissions de musique et aux vidéoclips, de même que la création d’un programme de soutien de ce type d’émissions au sein du FMC, le Conseil est d’avis que ces demandes excèdent la portée du présent réexamen.
  3. Compte tenu de ce qui précède, à l’annexe de la présente décision, le Conseil énonce une condition de licence exigeant que les groupes versent à la FACTOR 0,17 % des revenus bruts de leurs services de l’année de radiodiffusion précédente, et ce, à compter du 1er septembre 2018 et jusqu’au 31 août 2022, la fin de la présente période de licence. Ces sommes peuvent être comptabilisées afin de respecter les exigences en matière de DÉC.

Contenu de courte durée

Historique

  1. Dans le Décret, le gouverneur en conseil a déclaré que le Conseil devrait étudier comment s’assurer que des contributions notables soient faites à la création et à la présentation de courts-métrages et de documentaires de courte durée.
  2. Alors que le Conseil n’a jamais pleinement défini l’expression « courte durée », les émissions de moins de 22 minutes sont généralement considérées de courte durée. Selon la nature et le contenu de l’émission, celle-ci peut être classée dans l’une ou l’autre des catégories d’émissions de télévision établies dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2010-808.
  3. Dans le passé, les émissions de courte durée dont il est question dans le Décret étaient financées par le fonds BravoFACT, auquel Bell, en tant que titulaire de Bravo!, était tenu par condition de licence de verser des contributions. BravoFACT avait été mis en place par Bell afin de financer la création de contenu de courte durée, y compris le contenu diffusé sur la chaîne Bravo!.
  4. Compte tenu de la normalisation des conditions de licence des services facultatifs et de l’élimination de la protection des genres, le Conseil a supprimé l’exigence de Bell de faire des contributions à ce fonds lors du dernier renouvellement de licences des services du groupe Bell (voir la décision de radiodiffusion 2017-149).
  5. À la suite de la publication du Décret, lors de la dissolution de BravoFACT, Bell a annoncé que le FPIC connu sous le nom de Fonds Bell réserverait de l’argent chaque année pour aider à financer le coût de contenu similaire à celui que BravoFACT finançait. Cela comprend le financement de séries numériques de fiction ou de non-fiction de format court. Pour ces deux catégories de contenu de format court, les séries doivent être originales. Les émissions ne doivent pas dépasser 15 minutes par épisode, et compter un minimum de six épisodes. Le contenu interstitiel ou la version segmentée d’une émission de trente minutes sont inadmissibles. En 2017, le Fonds Bell a versé plus de 2,4 millions de dollars à 14 projets dans le cadre de son programme Séries numériques de format court (non-fiction scénarisée), De plus, le Fonds Bell administre un programme de financement de séries numériques de format court (fiction scénarisée) pour lequel il a récemment annoncé un nombre de récipiendaires.

Positions des parties

  1. Comme on l’a mentionné ci-dessus, Bell a allégué qu’à la suite de l’élimination de la protection des genres, le Conseil devrait conserver son approche de politique qui consiste à ne pas favoriser le financement de types particuliers d’émissions. À ce sujet, Corus a demandé au Conseil de ne pas élargir la définition d’ÉIN pour y inclure les émissions de courte durée et de ne pas augmenter les exigences à l’égard des ÉIN s’il décidait d’élargir la définition. Au lieu d’une exigence contraignante, Bell et Corus ont plutôt proposé la mise en place de mesures incitatives, comme un crédit à l’égard des DÉC, afin de soutenir les émissions de courte durée. Rogers a appuyé ces propositions et a proposé que le financement puisse aussi être réattribué par le FMC ou la FACTOR à ce type d’émissions.
  2. Blue Ant et DHX se sont opposés à des exigences de dépenses normalisées pour les émissions de courte durée en alléguant que, compte tenu de l’élimination de la protection des genres et de la création d’un environnement encore plus concurrentiel, les services de programmation doivent être en mesure de consacrer leurs ressources de programmation aux émissions les plus populaires et les plus attrayantes, chacun dans leur type respectif de programmation.
  3. L’ACTRA, Entertainment One, Friends of Canadian Broadcasters et la GCR ont fait valoir que les anciennes conditions de licence particulières au service devraient être imposées de nouveau à Bravo! Alors que DOC était d’avis qu’il était inutile d’imposer de nouveau ces conditions de licence.
  4. La GCR et Entertainment One, de même que la CMPA, ont de plus indiqué être ouverts à l’introduction de crédits à l’égard des DÉC, le cas échéant.
  5. La CMPA a ajouté que l’existence du Fonds Bell ne comble pas le besoin de soutenir le contenu de courte durée, parce que le fonds ne finance pas de courts-métrages ou de documentaires de courte durée à moins qu’ils ne fassent partie d’une série d’au moins six épisodes. La CMPA et On Screen Manitoba ont plutôt suggéré qu’une partie des dépenses des groupes soit versée à un fonds de soutien à la production et à la présentation d’émissions de musique, de vidéoclips et d’émissions de courte durée.

Analyse et décision du Conseil

  1. Compte tenu de l’accent mis dans le Décret sur l’article 3(1)s) de la Loi, le Conseil estime approprié de concentrer son analyse sur la question de savoir si d’autres mesures sont nécessaires en vue de favoriser les objectifs suivants :
    • que des contributions notables soient faites à la création et à la présentation de courts-métrages et de documentaires de courte durée;
    • que les demandes en constante évolution du public canadien soient respectées.
Création et présentation de courts-métrages et de documentaires de courte durée
  1. Le Fonds Bell est un fonds de production indépendant certifié par le Conseil. À ce titre, il doit fonctionner indépendamment de Bell et il est assujetti à des limites strictes au regard des coûts d’administration qui peuvent être associés à son fonctionnement (un maximum de 5 % de ses revenus provenant des contributions des EDR). 
  2. En ce qui a trait aux préoccupations de la CMPA à l’effet que  les enveloppes fournies par le Fonds Bell ne devraient pas être considérées comme un remplacement au fonds BravoFact parce qu’il ne finance que des séries, le Conseil ne partage pas ce point de vue. Le Fonds Bell se conforme à la politique du Conseil sur les FPIC et finance du contenu qui sera vu par les Canadiens et rendu disponible à l’étranger par différents radiodiffuseurs et distributeurs sur une variété de plateformes. À cet égard, selon ses propres états financiers vérifiés, le Fonds Bell cherche [traduction] « à encourager et à augmenter la production de contenu canadien destiné à la radiodiffusion domestique et au marché des nouveaux médias en s’assurant de favoriser les relations entre ces deux secteurs et de produire du contenu interactif qui reflète les pratiques et les besoins de l’industrie existante et de l’industrie émergente. » Selon le Conseil, le fait que le Fonds Bell finance un contenu quelque peu différent de celui qui était financé par BravoFACT devrait être perçu comme  reflétant la tendance du marché en matière de contenu et ne doit pas être vu comme un désavantage.
  3. En se fondant sur les informations à sa disposition, le Conseil considère que les contributions du Fonds Bell au contenu de courte durée se comparent à celles de l’ancien fonds BravoFACT. De plus, à titre de FPIC, le Fonds Bell est ouvert aux autres radiodiffuseurs, et non seulement aux services de Bell, et il doit respecter certains critères opérationnels et administratifs.
  4. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que la création de contenu de courte durée est mieux soutenue maintenant qu’elle ne le serait par l’imposition d’exigences spécifiques à cet égard à Bravo!, Bell ou à l’ensemble des groupes de langue anglaise, et qu’il n’est pas nécessaire d’imposer aux groupes une obligation additionnelle précise de financement de la production de contenu de courte durée.
Répondre aux demandes en constante évolution du public canadien
  1. Le contenu de courte durée est souvent destiné à être vu sur des plateformes numériques et son format  de contenu de courte durée se prête naturellement à un visionnement sur appareil mobile. Il est probable qu’il continuera à être produit pour ce type de plateforme. Cependant, les dépenses consacrées au contenu présenté exclusivement en ligne ne peuvent généralement pas être comptabilisées dans les DÉC des groupes. En d’autres mots, alors que les Canadiens peuvent accorder une valeur à ce contenu et que les radiodiffuseurs peuvent vouloir le financer et le monétiser pour diffusion ailleurs que sur les services traditionnels de télévision, le cadre politique existant, qui date de 1993, ne favorise pas les efforts des groupes en vue de mettre à profit leurs obligations en matière de DÉC pour produire du contenu de courte durée destiné aux plateformes numériques.
  2. Dans son rapport déposé auprès du gouverneur en conseil, Emboîter le pas au changement : L’avenir de la distribution de la programmation au Canada, le Conseil a indiqué qu’il envisageait de mettre à jour la définition de DÉC pour tenir compte de l’environnement numérique. Le Conseil réitère son intention d’examiner de telles modifications.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil confirme les décisions de radiodiffusion 2017-148 à 2017-151, avec les changements annoncés dans l’annexe de la présente décision.

Secrétaire général

Documents connexes

Annexe à la décision de radiodiffusion CRTC 2018-335

Modifications aux décisions de radiodiffusion 2017-149 à 2017-151

Le Conseil confirme les décisions de radiodiffusion 2017-149 à 2017-151, avec les changements annoncés dans l’annexe de la présente décision.

En ce qui concerne les services de télévision qui forment le groupe Bell Média, le Conseil remplace la condition de licence 7 énoncée aux annexes 3 et 4 de la décision de radiodiffusion 2017-149 par la condition de licence suivante :

7. Conformément à l’Approche par groupe à l’attribution de licences aux services de télévision privée, politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2010-167, 22 mars 2010, le titulaire doit, au cours de chaque année de radiodiffusion, consacrer à l’acquisition ou au financement d’émissions d’intérêt national, telles que définies aux paragraphes 71 à 73 de cette politique réglementaire :
a) au moins 5 % des revenus bruts de l’année précédente de l’entreprise au cours de la première année de la période de licence (soit l’année de radiodiffusion 2017-2018); 
b) au moins 7,5 % des revenus bruts de l’année précédente de l’entreprise au cours des autres années de la période de licence.

En ce qui concerne les services de télévision qui forment le groupe Corus, le Conseil remplace la condition de licence 7 énoncée aux annexes 2 et 3 de la décision de radiodiffusion 2017-150 par la condition de licence suivante :

7. Conformément à l’Approche par groupe à l’attribution de licences aux services de télévision privée, politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2010-167, 22 mars 2010, le titulaire doit, au cours de chaque année de radiodiffusion, consacrer à l’acquisition ou au financement d’émissions d’intérêt national, telles que définies aux paragraphes 71 à 73 de cette politique réglementaire :
a) au moins 5 % des revenus bruts de l’année précédente de l’entreprise au cours de la première année de la période de licence (soit l’année de radiodiffusion 2017-2018); 
b) au moins 8,5 % des revenus bruts de l’année précédente de l’entreprise au cours des autres années de la période de licence.

De plus, le Conseil impose la condition de licence suivante aux services de télévision qui forment le groupe Bell Média énumérés à l’annexe 1 de la décision de radiodiffusion 2017-149, aux services de télévision du groupe Corus énumérés à l’annexe 1 de la décision de radiodiffusion 2017-150 et aux services de télévision qui forment le groupe Rogers énumérés à l’annexe 1 de la décision de radiodiffusion 2017-151 :

En ce qui concerne l’année de radiodiffusion 2018-2019 et jusqu’à la fin de la période de licence, le titulaire doit, chaque année de radiodiffusion, verser 0,17 % des revenus bruts de l’année précédente de l’entreprise à la FACTOR. Le titulaire pourra tenir compte de ces dépenses en ce qui concerne son obligation au titre des dépenses en émissions canadiennes.

Date de modification :