Décision de telecom CRTC 2018-309

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Ottawa, le 23 août 2018

Dossier public : 8662-T66-201801514

TELUS Communications Inc. – Demande de révision et de modification de l’ordonnance de télécom 2017-424

Le Conseil conclut qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2017-424. Par conséquent, le Conseil approuve la demande de TELUS Communications Inc. visant la révision et la modification de cette ordonnance, et désigne l’Association canadienne des télécommunications sans fil comme intimé.

Introduction

  1. Le Conseil a reçu une demande d’attribution de frais du Centre pour la défense de l’intérêt public (CDIP) pour sa participation à l’instance ayant mené à la décision de télécom 2016-479 (instance principale). Dans l’instance principale, le Conseil a examiné une demande en vertu de la partie 1 présentée par le CDIP concernant l’article 12 de la loi budgétaire du QuébecNote de bas de page 1, demande visant l’obligation pour les fournisseurs de services de télécommunication (FST) au Québec de bloquer l’accès à certains sites Web de jeu.
  2. Dans sa demande d’attribution de frais, le CDIP a indiqué que la responsabilité du paiement des frais devrait être attribuée aux principaux FST exerçant leurs activités au Québec et à l’Association canadienne des télécommunications sans fil (ACTS). Le CDIP a précisé que l’ACTS devrait être tenue de payer 25 % des frais attribués, parce qu’elle a joué un rôle actif dans l’instance principale et que sa demande subséquente auprès de la Cour supérieure du Québec a engendré des complications procédurales pour le CDIP et d’autres parties en ce qui concerne la demande en vertu de la partie 1 présentée au Conseil à cette période.
  3. Dans sa réponse à la demande d’attribution de frais du CDIP, l’ACTS a fait valoir que, bien que la Loi sur les télécommunications (Loi) permette au Conseil d’exiger de toute partie à une instance de payer des frais, elle ne connaît aucun cas lors duquel le Conseil a ordonné à une association de l’industrie de le faire. L’ACTS a également indiqué que le Conseil, dans l’ordonnance de télécom 2013-526, a explicitement évalué si elle devait être un intimé dans les circonstances, et qu’il a conclu qu’elle ne devait pas l’être. Dans l’ordonnance de télécom 2017-424, le Conseil a appliqué la même justification que dans l’ordonnance de télécom 2013-526 et déterminé qu’elle ne désignerait pas l’ACTS comme intimé quant à la demande d’attribution de frais du CDIP. Le Conseil a déclaré que la désignation de l’ACTS à titre d’intimé, en plus de la désignation des FST qui étaient parties à l’instance, pourrait introduire une iniquité dans l’attribution du paiement des frais, c’est-à-dire que certains FST pourraient se voir attribuer deux fois des frais, tout en imposant indirectement des frais à d’autres entités qui n’avaient pas d’intérêt important envers le dénouement de l’instance.
  4. Le Conseil a désigné Shaw Cablesystems G.P. (Shaw) et TELUS Communications Inc. (TCI) en tant qu’intimés dans l’ordonnance de télécom 2017-424 et leur a ordonné de payer le montant des frais attribués au CDIP pour sa participation à l’instance principale. TCI a reçu l’ordre de payer 89,2 % des frais de 14 140,46 $ attribués, et Shaw, l’ordre de payer les 10,8 % restants.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande de TCI, datée du 15 mars 2018, dans laquelle l’entreprise lui demandait de réviser et de modifier l’ordonnance de télécom 2017-424 de façon à désigner l’ACTS comme intimé. TCI a indiqué qu’il existait un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale. Tout d’abord, elle a soutenu que le Conseil a commis une erreur de fait lorsqu’il s’est appuyé sur une décision antérieure pour refuser de faire de l’ACTS un intimé. TCI a indiqué que la justification de la décision antérieure ne s’appliquait pas aux circonstances de l’instance ayant mené à l’ordonnance de télécom 2017-424. Ensuite, TCI a fait valoir que le Conseil a commis une erreur de droit en exerçant son pouvoir discrétionnaire de manière incorrecte. Elle a soutenu que cela a mené à une décision déraisonnable et injuste qui n’était pas cohérente avec les raisons établies dans la décision du Conseil, à savoir l’objet du régime sur l’attribution de frais et la justification établie de la décision.
  2. TCI a fait remarquer qu’elle a déjà versé au CDIP sa part du montant des frais attribués. TCI a signalé que la solution appropriée dans ce cas serait d’ordonner à tout nouvel intimé de lui payer la différence entre le montant qu’elle a déjà payé au CDIP et le montant dont elle devient finalement responsable. À titre subsidiaire, TCI a suggéré que le Conseil pourrait exercer son pouvoir d’annuler l’ordonnance de télécom 2017-424 en vertu de l’article 62 de la Loi et rendre les ordonnances correctives qui sont nécessaires, notamment ordonner au CDIP de retourner les fonds déjà reçus et aux derniers intimés de rembourser le CDIP conformément à la répartition modifiée.
  3. Le Conseil a reçu une intervention concernant la demande de TCI de la part de l’ACTS. TCI a déposé une réplique.

Critères de révision et de modification

  1. Le Conseil a précisé, dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, les critères qu’il utilisera pour évaluer les demandes de révision et de modification présentées en vertu de l’article 62 de la Loi. En particulier, le Conseil a déclaré que les demandeurs doivent faire la preuve qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale, par exemple en raison : i) d’une erreur de droit ou de fait; ii) d’un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision; iii) du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans l’instance initiale; iv) d’un nouveau principe découlant de la décision.

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • Existe-t-il un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2017-424?
    • S’il existe un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2017-424, comment la décision devrait-elle être modifiée?

Existe-t-il un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2017-424?

Positions des parties

  1. TCI a soutenu qu’il existait un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale concernant deux points principaux. Tout d’abord, TCI a argué que le Conseil a commis une erreur lorsqu’il a présumé que les membres FST de l’ACTS se verraient attribuer deux fois des frais alors que ce n’était pas le cas. Ensuite, TCI a soutenu que le Conseil a commis une erreur en évaluant l’intérêt de chaque membre de l’ACTS au lieu d’évaluer celui de l’association dans son ensemble.
  2. Selon TCI, la question de la double attribution de frais n’était pas applicable dans les circonstances de ce cas, car la double attribution ne pouvait se produire que si l’ACTS et ses membres individuels étaient désignés comme intimés.
  3. TCI a indiqué qu’à l’exception de la portion mineure de Shaw dans l’attribution, aucun double recouvrement ne pourrait avoir lieu si le Conseil approuvait la demande de révision et de modification. TCI a fait remarquer qu’elle n’était pas membre de l’ACTS et que, par conséquent, elle ne se verrait pas attribuer deux fois des frais si l’ACTS était aussi désignée comme intimé. En outre, TCI a fait remarquer que les membres plus importants de l’ACTS, tels que Bell Canada, n’ont pas participé individuellement et n’étaient pas désignés comme intimés. Par conséquent, désigner l’ACTS n’aurait pas entraîné une double attribution de frais.
  4. De plus, TCI a noté que le Conseil craignait que la désignation d’une association de l’industrie comme intimé n’aboutisse indirectement à l’imposition de frais à des entités individuelles qui n’ont pas un intérêt important envers le dénouement de l’instance. TCI a indiqué qu’il est logique de présumer que l’ACTS participe à l’instance seulement quand ses membres approuvent l’intervention. TCI était d’avis que le niveau d’intérêt d’un membre individuel envers le dénouement de l’instance n’est pas pertinent pour l’attribution de la responsabilité du paiement des frais étant donné que l’ACTS reçoit de ses membres le mandat de participer.
  5. TCI a également soutenu que la décision ne reflétait pas l’objectif expressément établi par le Conseil dans ses motifs selon lequel il est généralement décidé que les intimés appropriés sont les parties qui ont un intérêt important envers le dénouement de l’instance et qui y ont participé activement. Selon TCI, la demande en vertu de la partie 1 du CDIP était directement pertinente pour tous les FST au Canada, mais l’attribution de la responsabilité du paiement des frais suggère que TCI avait plus en jeu que toute autre partie. Selon TCI, l’ACTS participait activement à l’instance principale et ses membres incluent de nombreuses parties qui ont un intérêt manifeste envers le dénouement de l’instance. TCI a fait valoir qu’en n’incluant pas l’ACTS comme intimé, le Conseil n’est pas parvenu à attribuer la responsabilité du paiement des frais aux parties qui avaient un intérêt envers le dénouement de l’instance principale et qui y participaient par l’entremise d’une association à laquelle elles appartenaient.
  6. Enfin, TCI a précisé que le fait de ne pas désigner l’ACTS comme intimé serait un signe pour les parties qu’elles peuvent éviter la responsabilité du paiement des frais en participant par l’entremise d’une association de l’industrie plutôt qu’à part entière. TCI a soutenu que la conclusion du Conseil dans l’ordonnance de télécom 2017-424 décourage la participation active aux instances, et que les entreprises observeront que la participation aux instances peut avoir des répercussions économiques négatives directes qu’elles peuvent éviter si elles choisissent de ne pas participer.
  7. L’ACTS a répliqué que l’ordonnance de télécom 2017-424, lorsqu’elle est lue en totalité, fournit deux motifs de non-attribution de frais à une association de l’industrie. L’ACTS a soutenu que, même si la préoccupation du Conseil à propos de la double attribution de frais n’est peut-être pas importante dans ces circonstances étant donné que Shaw et TCI n’étaient pas membres de l’ACTS au moment en question, la préoccupation au sujet de l’imposition indirecte de frais à des entités qui n’ont pas un intérêt important envers le dénouement de l’instance est toujours un motif applicable à la conclusion du Conseil. Cependant, en réponse à une demande de renseignements, l’ACTS a indiqué que la question de la double attribution de frais s’appliquerait en fait dans ce cas si la responsabilité du paiement des frais lui était attribuée à la suite d’une demande de révision et de modification de TCI puisque Shaw, après avoir acheté Freedom Mobile Inc. (Freedom Mobile), est maintenant membre de l’ACTS.
  8. L’ACTS a également soutenu que la deuxième préoccupation du Conseil est valide et applicable parce que l’ACTS représente aussi les fabricants de combinés et les développeurs de logiciels qui font partie de ses membres de base, ainsi que des développeurs d’applications, des négociants de téléphonie mobile, des fabricants d’équipement et de dispositifs de sécurité des réseaux, des fournisseurs de services financiers et d’autres associations de l’industrie connexes parmi les sociétés associées et affiliées, qui sont plus de 100. L’ACTS a indiqué que la majorité de ses membres et entités affiliées n’ont pas un intérêt important envers le dénouement de l’instance principale.
  9. En ce qui concerne la participation, l’ACTS a fait valoir que le Conseil l’a expressément exclue du paiement des frais dans le cadre d’ordonnances d’attribution de frais antérieures et qu’il n’y a pas de preuve indiquant que cela a découragé la participation aux instances. L’ACTS a fait remarquer que, dans la plupart des instances où elle produit des observations, ses membres FST en produisent aussi. Par exemple, l’ACTS a participé avec les membres FST aux deux instances du Code sur les services sans filNote de bas de page 2 et à l’instance ayant mené à l’établissement du service d’alertes sans fil au publicNote de bas de page 3.
  10. L’ACTS a indiqué que ses observations portent généralement sur des points qui font le consensus parmi les membres. Elle a argué que cela permet une discussion en vue d’adopter un consensus raisonnable qui peut réduire le fardeau administratif pesant sur le Conseil. L’ACTS a soutenu que l’imposition de frais à son égard minerait sa capacité à fournir des observations à l’échelle de l’industrie au Conseil et pourrait causer un effet dissuasif sur la participation des associations de l’industrie.
  11. Enfin, l’ACTS a soutenu que sa participation à l’instance principale reposait en partie sur le recours à la pratique passée du Conseil consistant à ne pas attribuer la responsabilité du paiement des frais aux associations de l’industrie. L’ACTS a précisé qu’au degré auquel le Conseil décide de modifier sa pratique passée, il doit le faire sur une base prospective, et seulement après avoir donné un avis clair à tous les participants aux futures instances.
  12. Dans sa réplique, TCI a soutenu que, même si une double attribution de frais pourrait se produire avec Shaw, la situation peut être facilement résolue. Selon TCI, Shaw pourrait être retirée à titre d’intimé si elle est membre de l’ACTS, ou même si Shaw est désignée intimé et est membre de l’ACTS, l’ACTS peut attribuer une part de sa responsabilité du paiement des frais à ses autres membres afin d’exclure Shaw de la contribution au paiement des frais de l’ACTS.
  13. TCI a également indiqué que, lorsque l’ACTS intervient dans une instance, elle le fait parce que cela est dans l’intérêt de ses membres. TCI a demandé pourquoi l’ACTS interviendrait dans une affaire du Conseil si cela n’était pas dans l’intérêt de ceux-ci.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Dans l’article 31 de l’ordonnance de télécom 2017-424, le Conseil a décrit son raisonnement pour ne pas désigner l’ACTS à titre d’intimé, comme suit :
    1. Le Conseil a fait remarquer dans des ordonnances de frais antérieures que la désignation de l’ACTS à titre d’intimé, en plus de désigner les FST qui étaient parties à l’instance, pourrait introduire une iniquité dans l’attribution des frais, c’est-à-dire que certains FST pourraient se voir attribuer deux fois des frais tout en demandant indirectement des frais auprès d’autres entités qui n’avaient pas d’intérêt important envers le dénouement de l’instance. Le Conseil estime que le même raisonnement s’applique dans le cas présent.
  2. Ni Shaw ni TCI n’étaient membres de l’ACTS au moment de l’instance principale. Même si Freedom Mobile était membre de l’ACTS au moment de l’instance principale et a été achetée par Shaw en 2016, à la suite de l’achat par Shaw, le Conseil a continué de considérer Shaw et Freedom Mobile comme des entités distinctes pour le paiement des fraisNote de bas de page 4. Par conséquent, une double attribution de frais n’a pas pu survenir en ce qui concerne l’ordonnance de télécom 2017-424 étant donné que Shaw n’était pas membre de l’ACTS au moment en question.
  3. Pour ce qui est de l’intérêt envers l’instance principale, bien qu’il soit possible que certains membres de l’ACTS n’aient pas eu le même niveau d’intérêt envers le dénouement que d’autres membres, l’ACTS a tout de même choisi de participer activement à l’instance. De plus, on compte parmi les membres de l’ACTS plusieurs FST qui auraient certainement été touchés par le dénouement de l’instance et qui, par conséquent, avaient un intérêt envers ce dénouement.
  4. Le Conseil estime qu’il existe une incohérence entre l’affirmation de l’ACTS selon laquelle elle offre des observations à l’échelle de l’industrie au Conseil, et son argument selon lequel la majorité de ses membres n’ont pas d’intérêt envers le dénouement de l’instance, si bien que les frais ne devraient pas leur être imposés.
  5. De même, dans son intervention lors de l’instance principale, l’ACTS a indiqué qu’elle représente les fournisseurs de services sans fil ainsi que des entreprises qui conçoivent et proposent des produits et services pour l’industrie du sans fil, notamment des fabricants de combinés et de matériel, des créateurs de contenu et d’applications et des fournisseurs de services interentreprises, et qu’elle commentait au nom de ses membres. Cependant, aux fins d’attribution des frais, l’ACTS précise désormais qu’elle ne représentait pas les intérêts de tous ses membres dans l’instance principale, puisque certains de ses membres n’avaient pas d’intérêt envers son dénouement.
  6. Le Conseil est d’avis que, si une association de l’industrie participe à une instance au degré auquel l’ACTS a participé à l’instance principale, cette association a un intérêt important envers le dénouement de l’instance. Bien que l’ACTS puisse avoir des membres qui ne participent généralement pas aux instances du Conseil et qui peuvent ne pas avoir le même niveau d’intérêt envers le dénouement de l’instance principale que d’autres membres de l’ACTS, elle ne doit pas se détourner de la participation et de l’intérêt démontrés qu’elle avait dans l’instance au nom de ses membres en général.
  7. L’approche générale du Conseil pour désigner les intimés se fonde sur les critères concernant les parties qui ont un intérêt important envers le dénouement de l’instance en question et qui y ont participé activement. Bien que l’approche générale du Conseil consiste à attribuer la responsabilité du paiement des frais selon les revenus d’exploitation provenant d’activités de télécommunication (RET)Note de bas de page 5 de ces parties, aucune règle n’indique que seuls les FST peuvent être désignés comme intimés. En fait, il y a des cas où le Conseil a explicitement exclu les parties autres que les FST comme intimés, déterminant qu’elles répondaient autrement aux critères susmentionnés. Par exemple, dans l’ordonnance de télécom 2018-42, le Conseil a constaté que, même si certaines organisations gouvernementales locales avaient un intérêt marqué pour le dénouement de l’instance en question et y avaient participé activement, étant donné qu’un large éventail de FST pouvaient être désignés en tant qu’intimés, il était inapproprié qu’il désigne des organismes du secteur public comme intimés. 
  8. Bien que le Conseil ait fourni, dans l’ordonnance de télécom 2017-424, des raisons conformes à sa pratique passée pour ne pas désigner l’ACTS comme intimé, les circonstances précises de ce cas sont telles que cette justification n’était pas applicable. Dans le cas présent, la question de la double attribution de frais n’est pas née des faits, et le degré d’intérêt de chaque membre de l’ACTS envers le dénouement de l’instance principale n’était pas pertinent. Notamment, la préoccupation concernant l’attribution de la responsabilité du paiement des frais à des membres de l’ACTS sans intérêt direct dans l’instance était moins importante étant donné que l’ACTS était un intervenant clé dans l’instance principale, où il n’y a eu aucune autre intervention des membres FST de l’ACTS.
  9. Ceci contraste avec l’instance qui a mené à l’ordonnance de télécom 2013-526, où il y a eu une participation importante et active de nombreux autres FST. En outre, l’éventail de FST intimés potentiels pour l’attribution de la responsabilité du paiement des frais dans le cas présent n’est pas très large, et l’ACTS a des membres FST qui participent généralement aux instances du Conseil à titre individuel et qui seraient autrement responsables du paiement de frais s’ils avaient participé à l’instance principale à part entière plutôt que par l’entremise de l’ACTS. Dans ce cas, Bell Canada et Rogers Communications Canada Inc. (RCCI), qui seraient autrement responsables du paiement de frais si elles avaient participé à part entière plutôt que par l’entremise de l’ACTS, seraient dégagées de la responsabilité du paiement de frais si l’ACTS n’était pas désignée comme intimé. Par conséquent, le fardeau du paiement des frais reposerait de façon disproportionnée sur les parties qui ont participé individuellement.
  10. En ce qui concerne l’argument de TCI selon lequel les parties seraient découragées de participer aux instances si l’ACTS n’était pas désignée comme intimé, et la réponse de l’ACTS indiquant que l’imposition de frais à son égard pourrait causer un effet dissuasif sur la participation des associations de l’industrie, il n’y a pas de preuve substantielle au dossier pour confirmer l’une ou l’autre de ces affirmations.
  11. Pour ce qui est des observations de l’ACTS selon lesquelles le Conseil, s’il décide d’ordonner le paiement des frais à son égard, ne devrait le faire que sur une base prospective après avoir communiqué un avis clair, l’ACTS avait et a saisi pleinement l’occasion de formuler des observations sur les raisons pour lesquelles elle ne serait pas un intimé approprié. De plus, le Conseil détermine les intimés appropriés au cas par cas. Le Conseil n’est pas empêché d’attribuer la responsabilité du paiement des frais à une association de l’industrie dans un cas particulier simplement parce qu’il n’a pas précédemment imposé de frais à cette association. Le Conseil peut s’écarter de la pratique passée dans un cas particulier s’il y a des raisons de justifier cet écart et si la partie à laquelle les frais peuvent être imposés a eu l’occasion de formuler des observations. De plus, les associations de l’industrie devraient savoir que des frais pourraient leur être imposés puisque le Conseil en a déjà imposé précédemment à de telles associations, comme la Canadian Cable Systems AllianceNote de bas de page 6.
  12. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil conclut qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2017-424 pour ce qui est d’exclure l’ACTS en tant qu’intimé.

Comment la décision devrait-elle être modifiée?

Positions des parties

  1. L’ACTS a indiqué que, si le Conseil s’écartait de sa pratique et exigeait qu’elle paye des frais, il devrait déterminer les intérêts relatifs que certains membres de l’ACTS ont à l’égard des instances afin d’établir le pourcentage de frais approprié devant être imposé à l’ACTS par rapport aux autres parties à l’instance. L’ACTS a soutenu que cela n’était pas raisonnablement possible pour le Conseil.
  2. L’ACTS a également soutenu qu’il n’était pas approprié d’attribuer la responsabilité du paiement des frais selon les RET de ses membres FST. Elle a argué que tous les membres qui sont des FST n’ont pas le même niveau d’intérêt, certains décidant de participer à part entière, d’autres se satisfaisant du fait que leur avis est reflété dans les observations de l’ACTS, d’autres étant neutres ou n’ayant aucun intérêt. Elle a soutenu que l’attribution de la responsabilité du paiement des frais à son égard en fonction des RET de ses membres FST l’exposerait potentiellement à une responsabilité des frais disproportionnée, ce qui amènerait les membres FST désintéressés ou neutres à s’opposer à l’intervention de l’ACTS uniquement pour éviter une éventuelle responsabilité du paiement des frais. L’ACTS a fait valoir qu’il n’y avait pas de méthode appropriée pour attribuer équitablement la responsabilité du paiement des frais aux associations corporatives telles qu’elle-même.
  3. L’ACTS a également indiqué que l’attribution de la responsabilité du paiement des frais à son égard et à ses membres créerait un fardeau administratif insurmontable pour elle, car la perspective de devoir attribuer une responsabilité de frais à ses membres en fonction de leur intérêt potentiel dans une instance susciterait des divisions et éroderait probablement sa cohésion.
  4. TCI a précisé que le Conseil n’avait pas besoin d’évaluer l’intérêt de chaque membre de l’ACTS, et que l’organisation devait être traitée comme une entité unique aux fins d’attribution de frais. Selon TCI, il n’y avait pas besoin d’évaluer le degré d’intérêt de chaque membre de l’ACTS, car il n’y avait pas besoin de désigner chaque membre comme intimé distinct.
  5. TCI a également soutenu que la détermination de la part de responsabilité n’a pas besoin d’être l’application mécanique d’une formule, comme utiliser les RET de chaque participant ou ceux des membres FST d’une association de l’industrie. Elle a fait valoir que rien n’empêchait le Conseil d’attribuer la responsabilité du paiement des frais en se basant sur des facteurs autres que les RET ou en dissociant complètement la responsabilité des frais des revenus. Elle a soutenu qu’il n’était pas suffisant pour le Conseil de refuser d’attribuer la responsabilité du paiement des frais à l’ACTS en se fondant sur une allégation selon laquelle une formule particulière pourrait ne pas être appropriée.
  6. En ce qui concerne le fardeau administratif auquel l’ACTS pourrait faire face, TCI a soutenu que, si les frais sont inacceptables pour les membres de l’ACTS, elle n’a pas à participer. Autrement, les membres ayant un degré d’intérêt plus grand peuvent choisir de prendre en charge les frais. Enfin, TCI a suggéré que l’ACTS pouvait utiliser son forum interne pour les débats sur les questions réglementaires de fond afin de discuter de la responsabilité des frais.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Le Conseil attribue généralement la responsabilité du paiement des frais en fonction des RET à titre d’indicateur de la taille et de l’intérêt relatifs des parties participant à l’instance. Étant donné la question principale de la présente instance principale (exigeant que les FST au Québec bloquent l’accès à certains sites Web), il est approprié d’attribuer la responsabilité du paiement à l’ACTS selon les RET des membres FST de l’ACTS qui, autrement, auraient eu à payer des frais s’ils avaient participé à part entière, en prenant en compte le montant minimum de 1 000 $ qu’un intimé devrait être tenu de payerNote de bas de page 7. Par conséquent, les RET de Bell Canada et de RCCI devraient être pris en compte pour déterminer la part de responsabilité du paiement de frais de l’ACTS.
  2. En ce qui concerne l’argument de l’ACTS selon lequel lui demander d’attribuer la responsabilité du paiement des frais parmi ses membres créerait un fardeau administratif insurmontable, alors que le Conseil ne se préoccupe généralement pas de la façon dont une association peut attribuer des frais parmi ses membres, le Conseil estime que l’ACTS pourrait simplement attribuer des frais aux membres qui ont un plus grand degré d’intérêt envers l’instance en fonction, par exemple, de l’approche générale du Conseil consistant à attribuer la responsabilité du paiement des frais selon les RET. De plus, étant donné que l’ACTS a indiqué que ses membres participaient aux discussions sur les positions adoptées pendant les instances du Conseil, ce forum pourrait aussi être utilisé pour discuter de la responsabilité des frais. Le Conseil estime que ces options ne constitueraient pas un fardeau administratif insurmontable comme l’a laissé entendre l’ACTS.
  3. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil détermine que la responsabilité du paiement des frais devrait être modifiée comme suitNote de bas de page 8 :
    Intimé Pourcentage Montant
    ACTS  63 % 8 908,49 $
    TCI 37 % 5 231,97 $
  1. Afin de réduire le fardeau administratif pesant sur toutes les parties, plutôt que d’exiger du CDIP de retourner les fonds déjà reçus et de demander aux intimés de payer le CDIP conformément à l’attribution modifiée ci-dessus, le Conseil ordonne à l’ACTS de payer à TCI le montant de 7 381,32 $ (la différence entre le montant que TCI a payé au départ et le montant de l’attribution de la responsabilité de paiement des frais actuel).
  2. En ce qui concerne le montant initialement attribué à Shaw, étant donné que Shaw est désormais membre de l’ACTS et que le dossier n’indique pas clairement si Shaw a déjà payé ce montant au CDIP, le Conseil ordonne à l’ACTS de payer le montant de 1 527,17 $ au CDIP, mais lui permet de comptabiliser tout paiement déjà effectué par Shaw dans le cadre de ce paiement. Le Conseil laisse à l’ACTS et à Shaw le soin de déterminer comment résoudre la situation.

Secrétaire général

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