ARCHIVÉ - Décision de télécom CRTC 2003-81

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Décision de télécom CRTC 2003-81

  Ottawa, le 2 décembre 2003
 

Demande d'abstention de réglementation des services sans fil mobiles présentée par la Société en commandite Télébec et NorthernTel Limited Partnership

  Référence : 8640-T78-01/02
  Dans la présente décision, le Conseil s'abstient, à certaines conditions, de réglementer les services sans fil mobiles fournis par la Société en commandite Télébec et NorthernTel Limited Partnership. Le Conseil conserve certains pouvoirs à l'égard de la fourniture des services téléphoniques sans fil mobiles raccordés au réseau téléphonique public commuté.

1.

Le Conseil a reçu une demande en vertu de la partie VII des Règles de procédure du CRTC en matière de télécommunications, présentée le 5 juillet 2002 par la Société en commandite Télébec (Télébec), anciennement Télébec ltée, et NorthernTel Limited Partnership (NorthernTel), anciennement Northern Telephone Limited (collectivement, les Compagnies) réclamant que le Conseil s'abstienne, conformément à l'article 34 de la Loi sur les télécommunications (la Loi), de réglementer les services de communications personnelles (SCP) actuels et futurs et d'autres services sans fil mobiles des Compagnies.

2.

O.N.Telcom est intervenue le 9 août 2002 et les Compagnies ont répliqué le 23 août 2002.
 

Historique

3.

Le Conseil tire son pouvoir de s'abstenir de réglementer un service ou une catégorie de services de télécommunication fourni par une entreprise canadienne de l'article 34 de la Loi, qui prescrit ce qui suit :
 

34. (1) Le Conseil peut s'abstenir d'exercer - en tout ou en partie et aux conditions qu'il fixe - les pouvoirs et fonctions que lui confèrent normalement les articles 24, 25, 27, 29 et 31 à l'égard des services - ou catégories de services - de télécommunication fournis par les entreprises canadiennes dans les cas où il conclut, comme question de fait, que son abstention serait compatible avec la mise en oeuvre de la politique canadienne de télécommunication.

 

(2) S'il conclut, comme question de fait, que le cadre de la fourniture par les entreprises canadiennes des services − ou catégories de services - de télécommunication est suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des usagers - ou le sera -, le Conseil doit s'abstenir, dans la mesure qu'il estime indiquée et aux conditions qu'il fixe, d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent normalement les articles 24, 25, 27, 29 et 31 à l'égard des services ou catégories de services en question.

 

(3) Le Conseil ne peut toutefois s'abstenir, conformément au présent article, d'exercer ses pouvoirs et fonctions à l'égard des services ou catégories de services en question s'il conclut, comme question de fait, que cela aurait vraisemblablement pour effet de compromettre indûment la création ou le maintien d'un marché concurrentiel pour leur fourniture.

 

(4) Le Conseil doit déclarer que les articles 24, 25, 27, 29 et 31 ne s'appliquent pas aux entreprises canadiennes dans la mesure où ils sont incompatibles avec toute décision prise par lui au titre du présent article.

4.

La politique canadienne de télécommunication, énoncée à l'article 7 de la Loi, comprend entre autres objectifs :
 

c) accroître l'efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes;

 

f) favoriser le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication et assurer l'efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire;

 

h) satisfaire les exigences économiques et sociales des usagers des services de télécommunication.

5.

Le Conseil a établi un cadre en matière d'abstention dans la décision Examen du cadre de réglementation, Décision Télécom CRTC 94-19, 16 septembre 1994 (la décision 94-19). Dans cette décision, le Conseil a fait remarquer que définir le marché pertinent fait partie de la première étape permettant de décider s'il y a lieu de s'abstenir de réglementer un service. Le marché pertinent est essentiellement le plus petit groupe de produits et la plus petite région géographique dans lesquels une entreprise qui a un pouvoir de marché peut imposer de façon rentable une hausse durable des prix.

6.

Dans la décision 94-19, le Conseil a établi un certain nombre de critères dont il doit tenir compte pour déterminer si le marché est concurrentiel, notamment les parts de marché des entreprises dominantes et concurrentes, les conditions de l'offre et de la demande, la probabilité d'entrée dans le marché, les obstacles à l'entrée dans le marché et une preuve de rivalité.

7.

Dans la décision Réglementation des services sans fil, Décision Télécom CRTC 94-15, 12 août 1994 (la décision 94-15) et la décision Réglementation des services de télécommunications sans fil mobiles, Décision Télécom CRTC 96-14, 23 décembre 1996 (la décision 96-14), le Conseil a conclu que le marché des services sans fil mobiles dans divers territoires géographiques était suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des utilisateurs et il s'est donc abstenu de réglementer les services sans fil mobiles qui n'étaient pas fournis directement par une compagnie de téléphone réglementée. Dans la décision 94-15, le Conseil a déclaré qu'il y aurait lieu de s'abstenir de réglementer les services sans fil mobiles fournis directement par les compagnies de téléphone réglementées lorsque les compagnies auraient élaboré et mis en ouvre des garanties appropriées de mise en marché et des séparations de coûts entre leurs services sans fil et leurs services réglementés.

8.

Par la suite, dans les décisions ci-après, le Conseil a étendu l'abstention à certains services sans fil mobiles fournis directement par les compagnies de téléphone réglementées qui avaient mis en oeuvre des séparations de coûts entre les services sans fil et les services réglementés :
 
  • les services de téléappel fournis par Bell Canada dans la décision Demande de Bell Canada visant la révision et la modification de la Décision Télécom CRTC 96-14, Décision Télécom CRTC 98-15, 2 septembre 1998 (la décision 98-15);
 
  • les services cellulaires et les SCP par NBTel Inc. (faisant maintenant partie d'Aliant Telecom Inc.) dans la décision La NBTel Inc. - Abstention au titre de la réglementation des services cellulaires et de communications personnelles, Décision Télécom CRTC 98-18, 2 octobre 1998 (la décision 98-18);
 
  • les services sans fil mobiles fournis par les compagnies de téléphone appartenant à des municipalités dans la décision Abstention de réglementation des services sans fil mobiles fournis par des compagnies de téléphone appartenant à une municipalité, Décision Télécom CRTC 98-19, 9 octobre 1998 (la décision 98-19);
 
  • tous les services sans fil mobiles fournis par les compagnies ex-membres de Stentor dans l'ordonnance Télécom CRTC 99-991, 13 octobre 1999 (l'ordonnance 99-991).
 

La demande des Compagnies

9.

Les Compagnies ont indiqué que, pour les fins de leur demande, les services sans fil mobiles incluent les services téléphoniques sans fil mobiles raccordés au réseau téléphonique public commuté (RTPC), comme les services cellulaires et les SCP, les services radiotéléphoniques mobiles spécialisés et les services téléphoniques par satellite (les services téléphoniques mobiles publics commutés) de même que tous les autres services sans fil mobiles, y compris les services de téléappel et de données sans fil (autres services sans fil mobiles), tels qu'ils sont définis dans la décision 96-14.

10.

Dans leur demande, les Compagnies ont réclamé que le Conseil s'abstienne d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent les articles 24 (en partie) et 25, les paragraphes 27(1), 27(3) (en partie), 27(5) et 27(6), de même que les articles 29 et 31 de la Loi relativement à leurs services téléphoniques mobiles publics commutés actuels et futurs. Les Compagnies ont également demandé au Conseil de s'abstenir d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi relativement à d'autres services sans fil mobiles que les Compagnies offrent ou peuvent offrir.

11.

Les Compagnies ont indiqué qu'elles avaient offert antérieurement des services sans fil mobiles par l'entremise d'affiliées distinctes, en l'occurrence Télébec Mobilité et Nortel Mobility. Les Compagnies ont ajouté que c'est au cours du deuxième trimestre de 2002 qu'elles ont intégré ces affiliées sans fil dans les activités de Télébec et de NorthernTel respectivement.

12.

Les Compagnies ont fait valoir que dans la décision 96-14, l'abstention que le Conseil a accordée dans le cas des autres services sans fil mobiles a une plus grande portée que les services téléphoniques mobiles publics commutés.

13.

Les Compagnies ont fait remarquer que dans les décisions 98-15, 98-18, 98-19 et dans l'ordonnance 99-991, le Conseil s'était abstenu de réglementer les services sans fil mobiles fournis directement par les compagnies de téléphone réglementées après que ces compagnies avaient mis en ouvre des séparations comptables pour se protéger contre l'interfinancement des services concurrentiels non réglementés par les services publics réglementés.

14.

Les Compagnies ont également fait remarquer que la déclaration du Conseil dans la décision 98-18 concernant la conclusion qu'il a tirée dans la décision 94-15, à savoir que le marché des services sans fil mobiles était suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des utilisateurs, était basée sur un examen des fonctions structurelles générales du marché pour les services sans fil mobiles, et non pas sur une évaluation de la concurrence dans le marché géographique ou le territoire de chaque fournisseur de services sans fil mobiles.

15.

Les Compagnies ont en outre fait remarquer que, dans la décision 98-18 et dans l'ordonnance 99-991 concernant les compagnies de Stentor, le Conseil a déclaré que la réglementation sur la base tarifaire partagée (BTP) et par plafonnement des prix (introduite respectivement dans la décision Mise en oeuvre du cadre de réglementation - Partage de la base tarifaire et questions connexes, Décision Télécom CRTC 95-21, 31 octobre 1995, et la décision Réglementation par plafonnement des prix et questions connexes, Décision Télécom CRTC 97-9, 1er mai 1997) limite l'interfinancement du segment Services concurrentiels par le segment Services publics et réduit la capacité d'une compagnie réglementée de poursuivre une stratégie d'interfinancement anticoncurrentielle de ses services sans fil mobiles concurrentiels et par la même occasion la probabilité qu'elle le fasse.

16.

Les Compagnies ont fait observer que le Conseil a établi un régime relatif à la BTP pour Télébec dans la décision Mise en oeuvre du cadre de réglementation pour Québec-Téléphone et Télébec ltée, Décision Télécom CRTC 97-21, 18 décembre 1997. De plus, les Compagnies ont fait remarquer que le Conseil mettra en ouvre la réglementation par plafonnement des prix pour Télébec conformément à l'avis Mise en oeuvre de la réglementation par plafonnement des prix pour Québec-Téléphone et Télébec, Avis public CRTC 2001-36, 13 mars 2001.
 

Intervention d'O.N.Telcom

17.

Dans son intervention, O.N.Telcom s'est demandée si les Compagnies se sont conformées à la réglementation du Conseil en fournissant des services sans fil, s'il existe une concurrence pour les services sans fil dans les territoires des Compagnies et si les garanties en matière de concurrence sont suffisantes advenant que NorthernTel fournisse des services sans fil faisant l'objet d'une abstention dans le territoire de desserte conjoint des Compagnies.

18.

O.N.Telcom a fait valoir que les Compagnies n'ont pas indiqué dans quelles décisions du Conseil leurs affiliées de services sans fil se sont vu accorder une abstention.

19.

O.N.Telcom a déclaré que le Conseil a fait une analyse de l'état de la concurrence dans le marché des services cellulaires d'O.N.Telcom au cours de l'instance qui a mené à l'ordonnance Le CRTC s'abstient de réglementer la fourniture de services sans fil mobiles d'O.N.Telcom, Ordonnance CRTC 2001-501, 29 juin 2001, dans laquelle il s'est abstenu de réglementer les services sans fil mobiles qu'elle fournit. À son avis, les Compagnies devraient se soumettre à une analyse de marché effectuée par le Conseil dans le cadre de cette instance.

20.

Pour ce qui est des garanties en matière de concurrence, O.N.Telcom a soutenu que comme NorthernTel offre encore des services sans fil directement aux abonnés, elle doit prouver qu'elle a satisfait aux conditions établies dans la décision Cadre de réglementation pour les compagnies de téléphone indépendantes au Québec et en Ontario (sauf la Commission de Transport Ontario Northland, Québec-Téléphone et Télébec ltée), Décision Télécom CRTC 96-6, 7 août 1996 (la décision 96-6). Dans cette décision, le Conseil a exigé qu'une compagnie qui fournit des services téléphoniques monopolistiques et qui désire offrir des services sans fil mobiles faisant l'objet d'une abstention, propose des garanties appropriées en matière d'établissement des coûts et de mise en marché, avec l'option de se conformer aux garanties relatives à la mise en marché conjointe de la décision Radio cellulaire - Opportunité des garanties structurelles, Décision Télécom CRTC 87-13, 23septembre 1987, et la décision Rogers Cantel Inc. c. Bell Canada − Mise en marché du service cellulaire, Décision Télécom CRTC 92-13, 29 juin 1992. O.N.Telcom a soutenu que les Compagnies n'ont pas prouvé que les garanties en matière de concurrence exigées pour fournir les services sans fil faisant l'objet d'une abstention, conformément à la décision 96-6, sont en place dans le territoire de NorthernTel.

21.

De plus, même si les Compagnies ont cité diverses décisions renvoyant à la BTP comme garanties en matière de concurrence, O.N.Telcom a fait valoir qu'il n'y a pas d'indication de la part des Compagnies à savoir si NorthernTel a mis en ouvre la BTP, comme elle était tenue de le faire, dans le cas de l'entrée d'une entreprise de services locaux titulaire (ESLT) dans le marché de l'interurbain, dans la décision O.N.Telcom - Mise en oeuvre de la concurrence dans l'interurbain et questions connexes, Décision CRTC 2001-583, 13 septembre 2001, et si le manuel relatif à la BTP de NorthernTel a été changé pour tenir compte de la fourniture des services sans fil directement par NorthernTel.

22.

O.N.Telcom a également fait valoir qu'autant qu'elle sache, NorthernTel n'a pas de guide de la Phase II approuvé et elle ne peut donc pas se conformer aux règles de groupement mises en ouvre dans la décision Mise en marché conjointe et groupement, Décision Télécom CRTC 98-4, 24 mars 1998 (la décision 98-4).

23.

O.N.Telcom a en outre fait valoir que parce que Télébec et NorthernTel sont des affiliées, le risque d'interfinancement entre les Compagnies est très grand. O.N.Telcom a soutenu qu'il faudrait donc examiner les arrangements entre les Compagnies et mettre en oeuvre des garanties appropriées contre l'interfinancement. O.N.Telcom a fait valoir qu'il faudrait à tout le moins obliger NorthernTel à continuer de déposer des rapports de transactions intersociétés.

24.

Par conséquent, O.N.Telcom a fait valoir que le Conseil devrait rejeter la demande de NorthernTel visant à obtenir une abstention de la réglementation des services sans fil mobiles. O.N.Telcom a soutenu qu'il ne serait pas indiqué de s'abstenir de réglementer les services sans fil mobiles de NorthernTel tant que les questions se rapportant à la BTP de NorthernTel, à son manuel relatif à la BTP et à la conformité avec les garanties de mise en marché énoncées dans les décisions 96-6 et 98-4 n'auront pas été examinées.
 

La réplique des Compagnies

25.

Les Compagnies ont répliqué que leurs services sans fil mobiles, lorsqu'ils sont fournis par des affiliées distinctes, font l'objet d'une abstention de réglementation conformément à la décision 94-15 dans laquelle le Conseil s'est notamment abstenu de réglementer les services sans fil mobiles fournis par des entreprises sans fil autres que les compagnies de téléphone.

26.

En réponse aux demandes de renseignements que le Conseil leur a adressées le 17 octobre 2002, les Compagnies ont déclaré qu'il y a concurrence de la part de Rogers Wireless Inc. (RWI) dans 80 % du territoire de NorthernTel et dans environ 30 % de celui de Télébec. Les Compagnies ont également ajouté qu'elles ont signé des ententes d'itinérance avec Bell Mobilité Inc. et TELUS Mobility. Les clients de NorthernTel et Télébec peuvent se déplacer avec tous les partenaires d'itinérance de Bell Mobilité Inc. Elles ont également indiqué que les clients d'autres entreprises peuvent se déplacer dans les territoires d'exploitation des Compagnies.

27.

Les Compagnies ont fait valoir que dans la décision 98-4, le Conseil a : (a) supprimé les interdictions à l'égard de la mise en marché et de la publicité conjointes; (b) déterminé que des restrictions à l'égard des renvois d'abonnés n'étaient pas nécessaires; (c) conclu que les règles des groupes de services aux entreprises et les Modalités de service des Compagnies protègent suffisamment les renseignements confidentiels sur les clients; et (d) éliminé les garanties distinctes et particulières contre l'interfinancement des services sans fil, étant donné que plus les marchés de télécommunication sont exposés à la concurrence, moins les sources de revenus monopolistiques sont nombreuses.

28.

Les Compagnies ont également fait remarquer que dans les décisions 98-15 et 98-18, le Conseil a dit estimer que la BTP et le régime de plafonnement des prix sont des garanties suffisantes pour empêcher l'interfinancement des services de téléappel par les services publics.

29.

Les Compagnies ont approuvé la conclusion du Conseil dans la décision 98-15, voulant que le régime de comptabilité fondé sur la BTP que les Compagnies ont adopté et le régime de plafonnement des prix offrent une protection suffisante contre l'interfinancement du segment Services concurrentiels par le segment Services monopolistiques, y compris les services sans fil mobiles que les Compagnies offrent ou peuvent offrir.

30.

Les Compagnies ont fait valoir que, compte tenu des décisions 98-4 et 98-18, une abstention de la réglementation des activités sans fil de leur segment Services concurrentiels ne commande pas, comme condition préalable, des garanties supplémentaires et distinctes, p. ex., le manuel de la BTP approuvé, autres que le régime de la BTP et le régime des prix plafonds.
 

Analyse et conclusion du Conseil

 

Application des paragraphes 34(1), (2) et (3) de la Loi

31.

Le Conseil fait remarquer, même si le paragraphe 34(1) de la Loi prévoit qu'il peut s'abstenir de réglementer un service ou une catégorie de services lorsqu'il conclut que cette abstention est compatible avec la mise en oeuvre de la politique canadienne de télécommunication, le paragraphe 34(2) de la Loi prévoit qu'il peut s'abstenir lorsqu'il conclut que le marché pour le service en question est ou sera suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des utilisateurs. Le Conseil fait également remarquer, cependant, qu'en vertu du paragraphe 34(3) de la Loi, le Conseil ne peut s'abstenir s'il conclut que cela aura pour effet de compromettre indûment la création ou le maintien d'un marché concurrentiel pour ce service.

32.

Aux fins de la présente demande, le Conseil estime approprié de définir le marché des services sans fil mobiles dans les territoires de NorthernTel et de Télébec comme englobant tous les territoires de desserte des Compagnies ainsi que d'inclure dans ce marché les services téléphoniques mobiles publics commutés comme les services cellulaires et les SCP, les services radiotéléphoniques mobiles spécialisés et les services téléphoniques par satellite, de même que d'autres services sans fil mobiles, comme les services de téléappel et de données sans fil.

33.

Le Conseil prend note de la preuve produite par les Compagnies selon laquelle dans environ 80 % du territoire de NorthernTel et 30 % de celui de Télébec, les clients de services sans fil mobiles peuvent choisir RWI comme autre entreprise qui exploite ses propres installations, et que tous les clients des services sans fil mobiles des Compagnies peuvent accéder à d'autres entreprises, en se déplaçant. Le Conseil fait également remarquer que RWI est autorisée à fournir des services sans fil mobiles dans tous les territoires des Compagnies.

34.

Le Conseil est d'avis que la concurrence fondée sur les installations et la revente conjuguée à la possibilité d'entrée d'autres fournisseurs sont garantes d'une concurrence suffisante pour protéger les intérêts des utilisateurs si les Compagnies fournissent des services sans fil mobiles faisant l'objet d'une abstention.

35.

Le Conseil aborde ensuite les questions soulevées par O.N.Telcom au sujet de la conformité réglementaire et de la pertinence de garanties en matière de concurrence, en tenant compte également de l'impact de la décision Cadre de réglementation applicable à la deuxième période de plafonnement des prix, Décision de télécom CRTC 2002-34, 30 mai 2002 (la décision 2002-34) et de la décision Mise en oeuvre de la réglementation des prix pour Télébec et TELUS Québec, Décision de télécom CRTC 2002-43, 31 juillet 2002 (la décision 2002-43).

36.

Le Conseil fait remarquer que lorsque les Compagnies offrent des services sans fil mobiles par l'entremise d'affiliées séparées structurellement, la fourniture de ces services fait l'objet d'une abstention de la réglementation conformément aux décisions 94-15 et 96-14. De plus, la demande d'abstention des Compagnies à l'égard des services téléphoniques mobiles publics commutés et d'autres services sans fil mobiles est tout à fait compatible avec des décisions antérieures du Conseil de s'abstenir de réglementer les services sans fil mobiles.

37.

O.N.Telcom a également fait valoir que NorthernTel devrait se conformer à la décision 96-6 avant que le Conseil n'accorde une abstention de la réglementation des services sans fil mobiles. Cependant, le Conseil fait remarquer qu'il a supprimé l'obligation de déposer les résultats de la BTP et de la Phase III dans le cas des grandes ESLT ainsi que dans celui de Télébec et de TELUS Québec, dans les décisions 2002-34 et 2002-43 respectivement.

38.

Le Conseil fait en outre remarquer que dans la décision 98-4, le Conseil a retiré les interdictions explicites contre l'interfinancement des services sans fil mobiles pour presque toutes les entreprises canadiennes, y compris Télébec et NorthernTel.

39.

Dans la décision 98-4, le Conseil a également retiré les interdictions de mise en marché conjointe et il a mis en ouvre les règles relatives au groupement. Ces règles obligent les Compagnies à déposer un tarif si elles désirent grouper des services sans fil mobiles et des services réglementés. Dans le cadre de ce dépôt tarifaire, il incomberait aux Compagnies de prouver que les tarifs pour les services groupés sont conformes aux règles du Conseil relatives au groupement, c.-à-d., que les tarifs recouvrent les coûts appropriés engagés pour fournir les services groupés.

40.

De plus, dans la décision Cadre de réglementation applicable aux petites compagnies de téléphone titulaires, Décision CRTC 2001-756, 14 décembre 2001, le Conseil a établi un régime de réglementation des prix pour les petites ESLT, y compris NorthernTel. À l'instar de la réglementation par plafonnement des prix mise en oeuvre par le Conseil pour Télébec dans la décision 2002-43, et renouvelée pour les grandes ESLT dans la décision 2002-34, ce régime fixe les limites des augmentations de prix maximums pour les services réglementés des ESLT.

41.

Le Conseil fait également remarquer qu'il a supprimé l'obligation pour les entreprises de déposer des rapports de transactions intersociétés.

42.

Le Conseil reconnaît que dans la décision 2002-43, la suppression de l'exigence comptable relative à la BTP pour Télébec soulève la question de savoir si sans cette exigence, il reste suffisamment de garanties contre l'interfinancement des services concurrentiels par les services réglementés.

43.

À cet égard, le Conseil fait remarquer que la réglementation des prix n'empêche pas une compagnie réglementée d'utiliser les profits ou le flux monétaire provenant de la fourniture des services réglementés pour subventionner des services concurrentiels. Toutefois, le Conseil a déclaré dans la décision Quebecor Média inc. - Allégation d'interfinancement anticoncurrentiel de Bell ExpressVu, Décision de télécom CRTC 2002-61, 8 octobre 2002, que les mesures de réglementation des prix garantissent que les tarifs des services réglementés sont justes et raisonnables, et que les profits et le flux monétaire de la compagnie provenant des services réglementés sont obtenus au moyen de tarifs justes et raisonnables.

44.

De plus, l'interfinancement des services concurrentiels offerts par la compagnie de téléphone peut signifier accorder une préférence indue à la compagnie de téléphone, et établir une discrimination injuste à l'endroit des concurrents. Le Conseil fait remarquer que dans des décisions antérieures dans lesquelles il s'est abstenu de réglementer les services téléphoniques mobiles publics commutés, il a conservé les pouvoirs que lui confèrent les paragraphes 27(2), 27(3) (en partie) et 27(4) de la Loi, afin de pouvoir traiter les allégations de préférence indue ou de discrimination injuste.

45.

Par conséquent, et conformément aux conclusions qu'il a tirées à l'égard des services sans fil mobiles dans les décisions mentionnées aux paragraphes 7 et 8 de la présente décision, le Conseil conclut, conformément au paragraphe 34(2) de la Loi, comme question de fait, que la fourniture de services sans fil mobiles dans les territoires des Compagnies est suffisamment concurrentielle pour protéger les intérêts des utilisateurs et pour justifier une abstention dans la mesure indiquée dans la présente décision. Notamment, le Conseil conclut que de nombreux utilisateurs ont au moins un autre fournisseur, et qu'il pourrait y avoir entrée d'autres fournisseurs.

46.

Le Conseil conclut, conformément au paragraphe 34(1) de la Loi, comme question de fait, que s'abstenir d'exercer ses pouvoirs et fonctions, dans la mesure indiquée dans la présente décision, à l'égard des services sans fil mobiles dans les territoires des Compagnies, est compatible avec la mise en oeuvre de la politique canadienne de télécommunication de la Loi.

47.

Le Conseil conclut également, conformément au paragraphe 34(3) de la Loi, comme question de fait, que s'abstenir de réglementer les services sans fil mobiles, dans la mesure indiquée dans la présente décision, ne compromettra probablement pas indûment le maintien d'un marché concurrentiel pour ces services.

48.

Compte tenu de ces conclusions, le Conseil doit déterminer dans quelle mesure il est indiqué de s'abstenir en tout ou en partie, conditionnellement ou inconditionnellement, d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi.

49.

Le Conseil fait remarquer que, comme il n'existe que quelques fournisseurs de services téléphoniques mobiles publics commutés, mais que les fournisseurs d'autres services sans fil mobiles sont nombreux, il estime approprié que la portée de l'abstention diffère entre les deux classes de services sans fil mobiles.
 

Portée de l'abstention : Services téléphoniques mobiles publics commutés

 

Article 24

50.

L'article 24 de la Loi prévoit que :
 

24. L'offre et la fourniture des services de télécommunication par l'entreprise canadienne sont assujetties aux conditions fixées par le Conseil ou contenues dans une tarification approuvée par celui-ci.

51.

Le Conseil estime qu'il y a lieu de conserver les pouvoirs que lui confère l'article 24 de la Loi afin de s'assurer que la confidentialité des renseignements sur les clients continue d'être protégée. Le Conseil ordonneaux Compagnies, comme condition pour fournir des services téléphoniques mobiles publics commutés, de respecter les conditions actuelles concernant la divulgation à des tiers des renseignements confidentiels sur les clients en ce qui concerne les services téléphoniques mobiles publics commutés parce que les Modalités de service des Compagnies, qui garantissent la confidentialité des renseignements sur les clients pour les services réglementés, ne s'appliquent pas aux services faisant l'objet d'une abstention. Comme condition pour fournir les services téléphoniques mobiles publics commutés, le Conseil ordonneégalement aux Compagnies d'inclure dorénavant, lorsqu'il y a lieu, les conditions en vigueur concernant la divulgation à des tiers des renseignements confidentiels sur les clients dans tous les contrats et tout autre arrangement relatif aux services faisant l'objet d'une abstention de la réglementation dans la présente décision.

52.

Finalement, le Conseil estime qu'il est également approprié de conserver les pouvoirs de l'article 24 de la Loi qui lui permettent de spécifier les conditions futures possibles de l'offre et de la fourniture de services téléphoniques mobiles publics commutés.
 

Article 25

53.

L'article 25 de la Loi prévoit que :
 

25. (1) L'entreprise canadienne doit fournir les services de télécommunication en conformité avec la tarification déposée auprès du Conseil et approuvée par celui-ci fixant - notamment sous forme de maximum, de minimum ou des deux - les tarifs à imposer ou à percevoir.

 

(2) Toute tarification commune entérinée par plusieurs entreprises canadiennes peut être déposée auprès du Conseil par une seule d'entre elles avec attestation de l'accord des autres.

 

(3) La tarification est déposée puis publiée ou autrement rendue accessible au public, selon les modalités de forme et autres fixées par le Conseil; celui-ci peut par ailleurs préciser les renseignements devant y figurer.

 

(4) Le Conseil peut cependant entériner l'imposition ou la perception de tarifs qui ne figurent dans aucune tarification approuvée par lui s'il est convaincu soit qu'il s'agit là d'un cas particulier le justifiant, notamment d'erreur, soit qu'ils ont été imposés ou perçus par l'entreprise canadienne, en conformité avec le droit provincial, avant que les activités de celle-ci soient régies par une loi fédérale.

54.

Compte tenu du dossier de cette instance, le Conseil juge opportun de ne plus obliger les Compagnies à obtenir son approbation pour les tarifs applicables aux services téléphoniques mobiles publics commutés. Par conséquent, le Conseil s'abstiendra d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confère l'article 25 à l'égard des services téléphoniques mobiles publics commutés.
 

Article 27

55.

L'article 27 de la Loi prévoit que :
 

27. (1) Tous les tarifs doivent être justes et raisonnables.

 

(2) Il est interdit à l'entreprise canadienne, en ce qui concerne soit la fourniture de services de télécommunication, soit l'imposition ou la perception des tarifs y afférents, d'établir une discrimination injuste, ou d'accorder -- y compris envers elle-même -- une préférence indue ou déraisonnable, ou encore de faire subir un désavantage de même nature.

 

(3) Le Conseil peut déterminer, comme question de fait, si l'entreprise canadienne s'est ou non conformée aux dispositions du présent article ou des articles 25 ou 29 ou à toute décision prise au titre des articles 24, 25, 29, 34 ou 40.

 

(4) Il incombe à l'entreprise canadienne qui a fait preuve de discrimination, accordé une préférence ou fait subir un désavantage d'établir, devant le Conseil, qu'ils ne sont pas injustes, indus ou déraisonnables, selon le cas.

 

(5) Pour déterminer si les tarifs de l'entreprise canadienne sont justes et raisonnables, le Conseil peut utiliser la méthode ou la technique qu'il estime appropriée, qu'elle soit ou non fondée sur le taux de rendement par rapport à la base tarifaire de l'entreprise.

 

(6) Le présent article n'a pas pour effet d'empêcher l'entreprise canadienne de fournir, gratuitement ou moyennant un tarif réduit, des services de télécommunication soit à ses administrateurs, dirigeants, employés et anciens employés soit, avec l'agrément du Conseil, à des organismes de bienfaisance, à des personnes défavorisées ou à toute personne.

56.

Le Conseil estime qu'il est inutile d'assujettir les tarifs établis dans un marché concurrentiel aux normes réglementaires qui s'appliquent aux tarifs « justes et raisonnables ». Par conséquent, le Conseil s'abstiendra d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confère le paragraphe 27(1) de la Loi à l'égard des services téléphoniques mobiles publics commutés.

57.

Le Conseil fait remarquer que les Compagnies n'ont pas réclamé d'abstention de la réglementation en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi. Conformément à des décisions antérieures dans lesquelles il s'est abstenu de réglementer des services téléphoniques mobiles publics commutés, le Conseil conservera les pouvoirs du paragraphe 27(2) qui lui permettront de s'assurer que les Compagnies n'accordent pas de préférence indue ou n'établissent pas de discrimination injuste à l'égard des services téléphoniques mobiles publics commutés.

58.

Le Conseil estime qu'il convient de conserver les pouvoirs que lui confère le paragraphe 27(3) de la Loi en ce qui concerne la conformité avec les pouvoirs et fonctions ne faisant pas l'objet d'une abstention dans la présente décision.

59.

Le Conseil fait remarquer que les Compagnies n'ont pas réclamé non plus d'abstention de la réglementation en vertu du paragraphe 27(4) de la Loi. Conformément à des décisions antérieures, le Conseil juge nécessaire de conserver les pouvoirs que lui confère le paragraphe 27(4) à l'égard de la fourniture de services téléphoniques mobiles publics commutés par les Compagnies, pour s'assurer qu'il incombe à l'entreprise réglementée de continuer à prouver qu'elle n'accorde pas de préférence indue ou qu'elle n'établit pas de discrimination injuste.

60.

Le Conseil s'abstiendra d'exercer les pouvoirs que lui confère le paragraphe 27(5) de la Loi, étant donné que ce paragraphe se rapporte au paragraphe 27(1) à l'égard duquel il s'est abstenu dans la présente décision. Le Conseil s'abstiendra également d'exercer les pouvoirs que lui confère le paragraphe 27(6) de la Loi, étant donné qu'il ne désire pas limiter la tarification des services faisant l'objet d'une abstention.
 

L'article 29

61.

L'article 29 de la Loi prévoit que :
 

29. Est subordonnée à leur approbation par le Conseil la prise d'effet des accords et ententes - oraux ou écrits - conclus entre une entreprise canadienne et une autre entreprise de télécommunication sur soit l'acheminement de télécommunications par leurs installations de télécommunication respectives, soit la gestion ou l'exploitation de celles-ci, ou de l'une d'entre elles, ou d'autres installations qui y sont interconnectées, soit encore la répartition des tarifs et des autres recettes entre elles.

62.

Le Conseil juge approprié que les Compagnies ne soient plus tenues d'obtenir son approbation pour conclure des ententes avec d'autres entreprises de télécommunication concernant les services téléphoniques mobiles publics commutés. Par conséquent, le Conseil s'abstiendra d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confère l'article 29 de la Loi à l'égard des services téléphoniques mobiles publics commutés.
 

Article 31

63.

L'article 31 de la Loi prévoit que :
 

31. La limitation de la responsabilité d'une entreprise canadienne en matière de services de télécommunication n'a d'effet que si elle est prévue par règlement du Conseil ou si celui-ci l'a approuvée.

64.

Le Conseil juge approprié que les Compagnies puissent limiter leur responsabilité à l'égard des services téléphoniques mobiles publics commutés de la même manière que les fournisseurs de services non réglementés. Par conséquent, le Conseil s'abstiendra d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confère l'article 31 de la Loi à l'égard des services téléphoniques mobiles publics commutés des Compagnies.
 

Portée de l'abstention : autres services sans fil mobiles

65.

Comme il existe de nombreux fournisseurs d'autres services sans fil mobiles, le Conseil conclut qu'il y a lieu de s'abstenir d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi en ce qui concerne les autres services sans fil mobiles des Compagnies.
 

Déclaration en vertu du paragraphe 34(4) de la Loi

66.

Compte tenu de ce qui précède, le Conseil déclare que, conformément au paragraphe 34(4) de la Loi, deux semaines à partir de la date de la présente décision, les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi ne s'appliqueront pas aux services téléphoniques mobiles publics commutés des Compagnies, sauf en ce qui concerne :
 
  • les conditions en vertu de l'article 24 de la Loi énoncées dans la présente décision concernant la confidentialité des renseignements sur les clients;
 
  • toute condition future que le Conseil peut imposer, conformément à l'article 24 de la Loi;
 
  • le paragraphe 27(2), exigeant que les entreprises n'accordent pas de préférence indue ou n'établissent pas de discrimination injuste;
 
  • les pouvoirs conférés au Conseil par le paragraphe 27(3) de la Loi à l'égard des pouvoirs et fonctions ne faisant pas l'objet d'une abstention dans la présente décision;
 
  • le paragraphe 27(4) de la Loi, relativement au fait qu'il incombe à l'entreprise d'établir qu'elle n'accorde pas de préférence indue ou qu'elle n'établit pas de discrimination injuste.

67.

Le Conseil déclare en outre que, conformément au paragraphe 34(4) de la Loi, les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi ne s'appliquent pas aux autres services sans fil mobiles des Compagnies.
 

Dépôts des tarifs

68.

Le Conseil ordonneaux Compagnies de publier immédiatement des pages de tarifs révisées, prenant effet deux semaines à partir de la date de la présente décision, qui suppriment les dispositions tarifaires actuelles concernant les services sans fil mobiles.
  Secrétaire général
  Ce document est disponible, sur demande, en média substitut et peut également être consulté sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca

Mise à jour : 2003-12-02

Date de modification :