4. Bell a fait valoir que les changements importants qu’ont subis le marché des services de téléappel et le cadre de réglementation depuis la décision 96-14 justifient une révision et une modification de la décision afin que la décision de s’abstenir de réglementer les services de téléappel s’applique également aux services de téléappel fournis par Bell. Celle-ci a également déclaré qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 96-14 dans le contexte actuel.
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5. Bell a soutenu que l’objectif principal de la décision 96-14 était de catégoriser les services sans fil afin d’établir le cadre de réglementation approprié, et que les questions se rattachant à l’abstention de réglementation des services de téléappel fournis [TRADUCTION] « par des entreprises dominantes en place fournissant le service local de base » n’ont pas fait l’objet d’une discussion dans l’instance qui a abouti à la décision 96-14. Bell a fait valoir que la préoccupation du Conseil selon laquelle une compagnie de téléphone pourrait interfinancer les services de téléappel par des revenus provenant du segment Services publics remonte à la décision Télécom CRTC 94-15 du 12 août 1994 intitulé Réglementation des services sans fil (la décision 94-15).
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6. Bell a fait valoir que le Conseil ne s’est pas abstenu de réglementer les services de téléappel fournis par une compagnie de téléphone en place fournissant des services locaux de base uniquement en raison des préoccupations relatives à l’interfinancement. Toutefois, Bell a soutenu que, depuis la décision 94-15, le risque d’interfinancement des services de téléappel a été minimisé par l’introduction de la base tarifaire partagée dans la décision Télécom CRTC 95-21 du 31 octobre 1995 intitulée Mise en œuvre du cadre de réglementation - Partage de la base tarifaire et questions connexes, et par la mise en œuvre de la réglementation par plafonnement des prix, établie dans la décision Télécom CRTC 97-9 du 1er mai 1997 intitulée Réglementation par plafonnement des prix et questions connexes et par la perspective de la concurrence dans la fourniture des services locaux.
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7. Bell a fait valoir que, dans la décision Télécom CRTC 95-16 du 15 août 1995 intitulée Association canadienne d’échange de messages Inc. c. Bell Canada - Mise en marché de services de téléappel (la décision 95-16), le Conseil a conclu que le marché des services de téléappel est trop concurrentiel pour qu’une stratégie d’établissement de prix ciblés ou abusifs de Bell soit rentable. Par conséquent, il n’a pas élargi au marché des services de téléappel les garanties contenues dans la décision Télécom CRTC 87-13 du 23 septembre 1987 intitulée Radio cellulaire - Opportunité des garanties structurelles (la décision 87-13) et la décision Télécom CRTC 92-13 du 29 juin 1992 intitulée Rogers Cantel Inc. c. Bell Canada - Mise en marché du service cellulaire (la décision 92-13).
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8. Bell a fait valoir que la compétitivité dans le marché des services de téléappel ne fait pas de doute, comme le Conseil l’a reconnu dans les décisions 95-16 et 96-14. Elle a également soutenu que le marché des services de téléappel est devenu plus concurrentiel par suite de l’entrée de nouvelles compagnies étrangères ne fournissant que des services de téléappel et de l’arrivée de nouveaux fournisseurs de services de communications personnelles. Bell a déclaré que d’autres nouveaux venus seraient attirés par les taux de croissance rapide prévus pour la demande de services de téléappel. Elle a fait valoir qu’il existe suffisamment de concurrence dans le marché des services de téléappel pour justifier une abstention de sorte qu’elle puisse offrir ses services de téléappel sur la même base que ses concurrents.
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II OBSERVATIONS DES INTERVENANTES
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9. Mobilité a soutenu que le marché des services de téléappel est concurrentiel et que les modifications apportées récemment au cadre de réglementation ont réduit les incitatifs à l’interfinancement et les occasions en ce sens.
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10. Mobilité a fait valoir que toutes les entreprises dans un marché concurrentiel devraient être assujetties au même cadre de réglementation. Elle a soutenu que les dépôts tarifaires alerteraient les concurrents des plans de Bell et que l’abstention est nécessaire pour qu’une compagnie de téléphone puisse offrir des services de téléappel sur la même base que ses concurrents.
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11. Mobilité a soutenu que, conformément au paragraphe 34(2) de la Loi, le Conseil est tenu de s’abstenir de réglementer dans les cas où les marchés sont suffisamment concurrentiels pour protéger les intérêts des utilisateurs. Compte tenu du degré élevé de concurrence dans ce marché, Mobilité a soutenu que le Conseil devrait s’abstenir sans condition de réglementer les services de téléappel.
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12. La Clearnet a fait valoir que Bell s’est incorrectement fondée sur la décision 95-16 pour établir que le marché des services de téléappel est concurrentiel, étant donné que la décision ne portait que sur la distribution de téléavertisseurs par l’entremise des Téléboutiques de Bell, et elle a soutenu que la portée de cette décision est trop restreinte pour servir de précédent afin d’établir s’il existe suffisamment de concurrence pour que le Conseil s’abstienne de réglementer les services de téléappel fournis par Bell.
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13. La Cantel et la Clearnet ont fait valoir que Bell aurait dû présenter une demande visant une abstention de réglementation tel qu’il est établi dans les décisions 94-15 et 96-14. Dans ces décisions, le Conseil a ordonné aux compagnies membres de Stentor en place qui fournissent des services sans fil de proposer des garanties appropriées en matière de calcul du prix de revient et de mise en marché lorsqu’elles demandent une abstention.
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14. De plus, la Clearnet a soutenu qu’une requérante qui propose des garanties sur le plan de la concurrence permettant l’abstention devrait également démontrer que celle-ci est conforme à l’article 34 de la Loi. Elle a fait remarquer que les critères d’évaluation de la concurrence exigés pour l’abstention sont exposés dans la décision Télécom CRTC 94-19 du 16 septembre 1994 intitulée Examen du cadre de réglementation (la décision 94-19) et comportent des renseignements sur les parts de marché et sur les conditions de l’offre et de la demande afin de déterminer si l’entreprise dominante a un pouvoir de marché considérable.
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15. La Cantel et la Clearnet ont soutenu que Bell ne devrait pas pouvoir contourner l’exigence relative à une évaluation de l’état de la concurrence dans le marché des services de téléappel en déposant une demande en vertu de l’article 62 de la Loi.
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16. La Cantel et la Microcell ont fait valoir qu’il n’y a eu aucun changement important de circonstances depuis la décision 96-14. La Cantel a soutenu que Bell a insisté à tort sur les changements qui se sont produits depuis la publication de la décision 94-15, plutôt que sur les changements faisant suite à celle de la décision 96-14. Elle a ajouté que l’éventuelle entrée d’entreprises de services de téléappel américains au Canada a fait l’objet d’une discussion dans l’instance qui a abouti à la décision 96-14.
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17. La Cantel, la Clearnet et la Microcell ont soutenu que le Conseil ne devrait pas s’abstenir de réglementer les services de téléappel de Bell si cette dernière pouvait utiliser sa position dominante dans le marché des services locaux de base pour obtenir un avantage dans le marché des services de téléappel.
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18. La Cantel a soutenu que les compagnies de téléphone demeurent dominantes dans les marchés de services locaux et qu’il y a donc lieu de continuer à réglementer les fournisseurs de services dominants.
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19. La Cantel a également soutenu que l’obligation de déposer des tarifs applicables aux services de téléappel ne désavantagerait pas Bell étant donné que le Conseil a établi un processus ex parte en ce qui a trait à l’approbation de tarifs.
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20. La Microcell a soutenu que le Conseil ne devrait pas s’abstenir de réglementer les services de téléappel de Bell parce que les concurrents locaux ne pourront avant longtemps mettre un frein à la capacité des compagnies de téléphone d’interfinancer les services concurrentiels par des revenus du segment Services publics.
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21. La Cantel, la Clearnet, l’ACTSF et la Microcell ont fait valoir que Bell pourrait jouir d’un avantage sur ses concurrents offrant des services de téléappel en utilisant les renseignements sur les abonnés de services monopolistiques pour la mise en marché des services de téléappel. L’ACTSF a également déclaré que Bell pourrait facturer les services de téléappel dans les états de compte mensuels des abonnés du segment Services publics. Selon ces intervenantes, Bell n’aurait pas ces avantages si elle fournissait des services de téléappel par l’entremise d’une affiliée distincte sur le plan structurel.
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22. L’ACTSF a déclaré que, si les services de téléappel étaient fournis directement par Bell, le Conseil devrait déterminer s’il existe suffisamment de garanties en matière de calcul du prix de revient. Elle a également fait valoir que l’approbation de la demande pourrait signifier qu’un marché concurrentiel redevienne monopolistique.
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III CONCLUSIONS
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23. Dans la décision 95-16, le Conseil a jugé que le marché des services de téléappel est un marché bien établi et concurrentiel comportant peu d’obstacles à l’entrée. Il est d’avis que le marché actuel des services de téléappel au détail est suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des utilisateurs de services de téléappel. En outre, il estime qu’une stratégie d’établissement de prix abusifs pour les services de téléappel de Bell ne pourrait réussir compte tenu de l’état de la concurrence et du peu d’obstacles à l’entrée dans le marché des services de téléappel au détail.
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24. Le Conseil fait remarquer que les intervenantes n’ont pas contesté la déclaration de Bell selon laquelle le marché des services de téléappel est concurrentiel. Compte tenu de ses conclusions antérieures concernant la nature concurrentielle du marché des services de téléappel, le Conseil estime qu’il n’était pas nécessaire que Bell dépose le type de renseignements qu’exige la décision 94-19 au sujet de la compétitivité dans le marché des services de téléappel, aux fins d’établir s’il y a lieu d’accorder une abstention. Le Conseil est d’avis que, dans les circonstances, une demande de révision et de modification de la décision 96-14 est suffisante.
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25. Le Conseil convient avec les intervenantes que Bell pourrait obtenir un avantage au moyen de la mise en marché conjointe de services de téléappel et d’autres services de télécommunications. Toutefois, compte tenu de la nature concurrentielle du marché des services de téléappel au détail, il estime qu’un tel avantage ne serait pas indu. Il fait remarquer, à cet égard, qu’il a jugé dans la décision 95-16 que les garanties relatives à la mise en marché conjointe des services cellulaires exposées dans la décision 87-13 et la décision 92-13 n’étaient pas nécessaires pour les services de téléappel. De plus, il a fait remarquer que l’interdiction relative à la mise en marché conjointe de services sans fil et d’autres services avait récemment été retirée dans la décision Télécom CRTC 98-4 du 24 mars 1998 intitulée Mise en marché conjointe et groupement.
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26. Le Conseil fait remarquer l’argument de la Cantel qu’il est nécessaire d’examiner les incitatifs et la capacité de Bell en ce qui a trait à l’interfinancement de ses services de téléappel. Toutefois, le Conseil est d’avis qu’il existe des garanties adéquates contre l’interfinancement des services de téléappel par les revenus du segment Services publics. Il a mis en œuvre le régime de partage de la base tarifaire conformément auquel les revenus, les investissements et les dépenses se rattachant aux services de téléappel au détail sont attribués au segment Services concurrentiels de la base tarifaire partagée. Le régime de plafonnement des prix dont le Conseil a ordonné la mise en oeuvre il y a moins d’un an constitue un autre désincitatif à l’interfinancement provenant du segment Services publics.
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27. Le Conseil convient avec la Cantel que, fondamentalement, les circonstances du marché des services de téléappel n’ont pas changé depuis la publication de la décision 96-14. À cet égard, il signale ses conclusions dans la décision 95-16 et le fait que la concurrence dans la fourniture des services de téléappel et la compétitivité croissante dans le marché des services de téléappel ont été prises en considération au cours de l’instance qui a abouti à la décision 96-14.
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28. Toutefois, le Conseil estime que, d’après le dossier de l’instance, il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 96-14 pour ce qui est des services de téléappel de détail fournis par Bell. Le Conseil fait remarquer que Bell n’est pas dominante dans le marché des services de téléappel et il estime que, la concurrence d’autres fournisseurs de services de téléappel permettra de contenir les tarifs facturés par Bell pour ces services. Pour cette raison, le Conseil estime qu’il convient de s’abstenir de réglementer les services de téléappel offerts par Bell.
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29. Par conséquent, conformément à l’article 62 de la Loi, le Conseil juge qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 96-14, puisqu’il aurait dû s’abstenir de réglementer les services de téléappel dans le territoire de Bell en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi. Il juge également que le fait de s’abstenir de réglementer les services de téléappel au détail ne nuirait probablement pas au maintien d’un marché des services de téléappel concurrentiel, conformément au paragraphe 34(3) de la Loi.
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30. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil ordonne ce qui suit :
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a) à compter de la date de la présente décision, le Conseil s’abstiendra d’exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi, en ce qui a trait aux services de téléappel de Bell;
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b) conformément au paragraphe 34(4) de la Loi, les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi ne s’appliquent pas aux services de téléappel au détail fournis par Bell; et
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c) il est ordonné à Bell de publier, dans les 15 jours de la date de la présente décision, des pages de tarifs retirant les tarifs applicables aux services de téléappel au détail.
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La secrétaire générale
Laura M. Talbot-Allan
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Ce document est disponible, sur demande, en média substitut.
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