Ordonnance de télécom CRTC 2021-57

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Ottawa, le 11 février 2021

Dossier public : Avis de modification tarifaire 34

Shaw Cablesystems G.P. – Introduction du service d’accès Internet haute vitesse de gros 1000

Le Conseil approuve avec modifications, à titre provisoire, la demande de Shaw Cablesystems G.P. (Shaw) en vue d’introduire le service d’accès Internet haute vitesse de gros 1000. Plus précisément, le Conseil approuve un tarif d’accès mensuel de 50,84 $ et rejette les quatre modalités proposées par Shaw.

Contexte

Réglementation des services d’accès haute vitesse de gros par le Conseil

  1. Conformément au paragraphe 27 de la Loi sur les télécommunications (Loi), le Conseil fixe les tarifs que les grandes entreprises de câblodistribution et les grandes compagnies de téléphone (collectivement les titulaires)Note de bas de page 1 sont autorisées à appliquer à leurs concurrents pour les services d’accès haute vitesse (AHV) de gros. Les concurrents utilisent les services AHV de gros pour fournir leurs services Internet de détail.
  2. Lorsque le Conseil exige la fourniture d’un service de gros par les titulaires, comme les services AHV de gros, il exige que les titulaires déposent des propositions de tarifs étayées par des études de coûts associées. Ces études de coûts sont généralement menées à l’aide du cadre d’établissement des coûts de la Phase II.
  3. En l’absence d’une étude de coûts, le Conseil a utilisé une approche de substitution pour fixer des tarifs provisoires. Cette approche consiste à fixer le tarif provisoire pour les nouveaux services AHV de gros à un niveau égal au tarif le plus bas associé au service à la vitesse inférieure la plus proche.
  4. Dans la politique réglementaire de télécom 2010-632, le Conseil a déterminé que les titulaires doivent fournir des services AHV de gros à leurs concurrents à des vitesses équivalentes à toutes celles que les titulaires offrent à leurs clients des services Internet de détail (exigence relative à la vitesse équivalente).

Demandes précédentes de Shaw pour l’introduction de services AHV de gros groupés

  1. Le 10 juillet 2018, le Conseil a reçu l’avis de modification tarifaire (AMT) 26B de Shaw Cablesystems G.P. (Shaw), dans lequel l’entreprise demandait au Conseil d’approuver l’introduction de son service Internet de gros 300 groupéNote de bas de page 2 dans la nouvelle tranche de vitesses 7, avec un tarif d’accès mensuel de 100,84 $.
  2. Dans l’ordonnance de télécom 2018-442, le Conseil a approuvé, à titre provisoire, un tarif d’accès mensuel de 50,84 $ pour le service Internet de gros 300 et la tranche de vitesses 7. Dans cette ordonnance, le Conseil a fait remarquer qu’il avait examiné le caractère raisonnable du tarif d’accès mensuel proposé par Shaw, à savoir 100,84 $, et que ce tarif, en ce qui concerne l’estimation pour l’installation d’accès par fibre coaxiale, reposait sur des méthodes et des hypothèses qui diffèrent de celles utilisées pour établir les tarifs provisoires existants. En outre, le Conseil a souligné qu’il n’avait pas encore approuvé les méthodes et les hypothèses proposées par Shaw.
  3. Le 29 novembre 2018, le Conseil a reçu l’AMT 26C, dans lequel Shaw demandait au Conseil d’approuver l’introduction du service Internet de gros 600 dans la nouvelle tranche de vitesses 8, avec un tarif d’accès mensuel de 112,56 $.
  4. Dans l’ordonnance de télécom 2019-52, le Conseil a approuvé, à titre provisoire, un tarif d’accès mensuel de 50,84 $ pour le service Internet de gros 600 et la tranche de vitesses 8. Dans cette ordonnance, le Conseil a fait remarquer que Shaw ne lui avait pas soumis la version électronique de son modèle d’établissement des coûts à l’appui du tarif d’accès mensuel de 112,56 $ qu’elle proposait. De plus, le Conseil a établi que, s’il ne disposait pas d’une étude de coûts, les tarifs mensuels provisoires pour les nouvelles tranches de vitesses AHV de gros seraient établis en fonction des tarifs des services aux vitesses inférieures les plus proches. En outre, le Conseil a estimé que, jusqu’à ce que son examen des tarifs définitifs du service AHV de gros soit achevé, le tarif du service Internet de gros 600 et de la tranche de vitesses 8 devrait être fixé, à titre provisoire, au même tarif que celui approuvé provisoirement pour le service Internet de gros 300 et la tranche de vitesses 7 dans l’ordonnance de télécom 2018-442.
  5. Le 4 mars 2019, le Conseil a reçu l’AMT 26D en relation avec le service Internet de gros 600 et la tranche de vitesses 8. Shaw a indiqué qu’elle avait inclus la version électronique de son modèle d’établissement des coûts pour permettre au Conseil d’évaluer le caractère raisonnable du tarif d’accès mensuel de 112,56 $ qu’elle proposait. Le Conseil n’a pas encore rendu de décision concernant l’AMT 26D.
  6. Le 27 mai 2020, le Conseil a reçu l’AMT 32 de Shaw, dans lequel l’entreprise proposait d’introduire son service Internet de gros 750 dans la tranche de vitesses 8, avec un tarif d’accès mensuel provisoire de 50,84 $. Shaw a basé le tarif sur le tarif provisoire approuvé pour son service Internet de gros 300 et la tranche de vitesses 7. Le Conseil a approuvé provisoirement l’AMT 32 dans l’ordonnance de télécom 2020-325.

Demande de redressement de Shaw

  1. Le 27 mai 2020 également, le Conseil a reçu une demande de Shaw (ci-après la demande de redressement), dans laquelle l’entreprise demandait un redressement provisoire immédiat de l’exigence relative à la vitesse équivalente en ce qui concerne le nouveau service Internet de résidence 1000 de Shaw, qui offre des vitesses de téléchargement allant jusqu’à 1 gigabit par seconde (Gbps).
  2. Dans sa demande de redressement, Shaw a fait valoir que cinq années se sont écoulées depuis que le Conseil a publié la politique réglementaire de télécom 2015-326, qui impose aux concurrents l’accès aux services de fibre optique jusqu’aux locaux (FTTP)Note de bas de page 3 des entreprises de services locaux titulaires (ESLT), disponibles sur une base dégroupéeNote de bas de page 4.
  3. Toutefois, en raison de l’absence de décision définitive sur l’accès de gros aux installations FTTP à l’échelle nationale, Shaw a argué que les ESLT continuent de bénéficier d’un répit par rapport aux exigences relatives aux services AHV de gros pour l’accès aux installations FTTP et le service à haute vitesse qui lui est associé, tandis que Shaw et d’autres entreprises de câblodistribution doivent faire face à une asymétrie réglementaire en ce qui concerne les offres de vitesse requises sur le marché des services AHV de gros groupés.
  4. En raison de l’exigence relative à la vitesse équivalente, les entreprises de câblodistribution doivent continuer à adapter les gammes de vitesses du marché des services de gros, tandis que les ESLT ne sont tenues d’offrir à leurs clients du marché des services de gros que les vitesses des services de gros pouvant être fournis par des installations en cuivre ou en fibre optique jusqu’au nœud (FTTN). Par conséquent, Shaw a fait valoir que le redressement qu’elle demande est nécessaire de toute urgence pour remédier à l’absence de neutralité sur le plan de la technologie et de la concurrence qui contrevient ainsi au régime des services AHV de gros préconisé par le Conseil.
  5. Le 29 mai 2020, le personnel du Conseil a envoyé une lettre à Shaw dans laquelle il est mentionné que, bien que la demande de redressement soit toujours une instance ouverte devant le Conseil, l’exigence relative à la vitesse équivalente continue de s’appliquer. Par conséquent, le service Internet 1000 offert aux clients des services de détail de Shaw doit être mis à disposition simultanément sur une base de gros. Le personnel du Conseil a demandé à Shaw de déposer un AMT comprenant une proposition de tarif d’accès mensuel pour son nouveau service, conformément aux règles et procédures en vigueur.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande de Shaw (AMT 34), datée du 12 juin 2020, dans laquelle l’entreprise proposait l’introduction du service d’accès Internet haute vitesse de gros 1000, lequel s’inscrit dans la nouvelle tranche de vitesses 9. Le service offre des vitesses allant jusqu’à 1 000 mégabits par seconde (Mbps) en aval (équivalent à 1 Gbps) et 25 Mbps en amont.
  2. Shaw a proposé des tarifs d’accès mensuels provisoires minimal et maximal de 67,79 $ et 84,73 $, respectivement. Ces tarifs ont été calculés à partir de deux tarifs existants en les interpolant pour tenir compte de la vitesse supérieure offerte (ci-après l’interpolation)Note de bas de page 5.
  3. Shaw a également demandé au Conseil de subordonner la disponibilité du service Internet de gros 1000 à certaines modalités, qui sont examinées en détail ci-dessous.
  4. Le Conseil a reçu des interventions concernant l’AMT 34 de la part des Opérateurs de réseaux concurrentiels Canadiens (ORCC) et de TekSavvy Solutions Inc. (TekSavvy).

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente ordonnance :
    • Le Conseil devrait-il examiner simultanément l’AMT 34 et la demande de redressement?
    • Quel serait le tarif provisoire approprié pour le service Internet de gros 1000 et la tranche de vitesses 9?
    • Les modalités proposées par Shaw pour offrir le service Internet de gros 1000 sont-elles raisonnables?

Le Conseil devrait-il examiner simultanément l’AMT 34 et la demande de redressement?

  1. Shaw a indiqué qu’elle ne demande l’approbation de l’AMT 34 que si la demande de redressement est rejetée. En cas de rejet, l’approbation de l’AMT 34 offrira une certaine équité à Shaw grâce à des tarifs et à des modalités provisoires qui lui permettront de continuer à offrir le service Internet de gros 1000 à ses propres clients des services de détail.
  2. Selon Shaw, il n’est donc pas possible d’analyser l’AMT 34 indépendamment de la demande de redressement.
  3. Shaw a ajouté que, si le Conseil rejette la demande de redressement, la seule façon de garantir l’équité réglementaire dans une certaine mesure et la conformité aux Instructions de 2006Note de bas de page 6et de 2019Note de bas de page 7 (collectivement les Instructions) et aux objectifs de la politique de télécommunication établis à l’article 7 de la Loi (objectifs stratégiques) serait d’imposer un accès basé sur des tarifs et des modalités qui garantissent la capacité continue de Shaw à offrir le service Internet 1000. Shaw a argué que, dans cette situation, l’approbation de l’AMT 34 protégerait l’intérêt public, mais dans une moindre mesure que l’approbation de la demande de redressement.
  4. Les ORCC ont fait valoir que la demande de redressement n’a aucune incidence sur l’examen de l’AMT 34 par le Conseil, et ne soulève aucun motif permettant d’excuser Shaw de son obligation de déposer un AMT pour son service Internet de gros 1000.
  5. TekSavvy a indiqué que les préoccupations exprimées par Shaw à l’appui des modalités proposées sont des préoccupations de politique générale sur la façon dont les tarifs devraient être fixés et les services mis à disposition, en fonction d’une consultation en cours qui pourrait avoir une incidence sur ces tarifs ou services. Ces questions de politique générale devraient être abordées dans le cadre de l’instance pour l’examen de l’établissement des tarifs des services de gros lancée par l’avis de consultation de télécom 2020-131, lequel se veut un processus autonome d’examen des méthodes et essais établis par le Conseil.
  6. Dans sa réponse à une demande de renseignements, Shaw a réitéré qu’elle ne demande l’approbation de l’AMT 34 que si la demande de redressement est rejetée. Shaw a répété que l’approbation des tarifs et modalités proposés dont il est question dans l’AMT 34 est essentielle pour compenser l’importante asymétrie réglementaire et l’incertitude entourant l’offre actuelle du service offert à des vitesses en gigabits.
  7. En outre, Shaw a fait valoir que l’AMT 34 a été déposé uniquement pour répondre à la demande du Conseil l’enjoignant à déposer un AMT, et sans préjudice à sa demande de redressement. Shaw a argué que l’approbation de la demande de redressement serait de loin davantage en faveur de l’intérêt public que l’approbation de l’AMT 34.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. La demande de redressement, notamment les questions de politique générale soulevées par la présente demande, comme l’asymétrie de la réglementation, sera traitée lors d’une instance séparée et est encore en cours d’examen par le Conseil.
  2. Jusqu’à ce qu’un changement de politique soit déterminé par le Conseil, Shaw doit se conformer à ses exigences existantes, y compris celle relative à la vitesse équivalente, pour fournir ses services AHV de gros à ses concurrents à des vitesses qui correspondent à toutes les options de vitesse que les titulaires offrent à leurs clients de services Internet de détail.
  3. Le Conseil est d’avis que l’AMT 34 doit être examiné indépendamment de la demande de redressement. Ce faisant, le Conseil cherche à garantir que le service Internet 1000 peut être mis à disposition sur le marché des services de gros dès que possible afin d’éviter d’autres délais qui seraient préjudiciables aux consommateurs et aux concurrents.
  4. Par conséquent, le Conseil rejette la demande de Shaw pour qu’il évalue l’AMT 34 en même temps que la demande de redressement.

Quel serait le tarif provisoire approprié pour le service Internet de gros 1000 et la tranche de vitesses 9?

  1. Shaw s’est fermement opposée à l’obligation de déposer un tarif pour son service Internet de gros 1000. Elle a fait valoir qu’elle n’est pas en mesure de déposer une étude de coûts pour établir des tarifs justes et raisonnables pour ce nouveau service alors que l’examen de la méthode d’établissement des tarifs de gros par le Conseil est en cours, conformément à l’avis de consultation de télécom 2020-131.
  2. Shaw a en outre argué que, lorsque des études de coûts ne peuvent pas être produites lors du lancement d’une nouvelle vitesse de service, la pratique habituelle du Conseil était d’approuver le tarif applicable des vitesses inférieures les plus proches sur une base provisoire, en attendant l’examen d’une étude de coûts à l’appui. Toutefois, dans le cas présent, cette approche est inadaptée et ne répondra pas à l’exigence de tarifs justes et raisonnables (ou d’une estimation de ceux-ci) pour deux raisons essentielles :
    • la tranche de vitesses inférieure suivante assortie de tarifs provisoires approuvés est la tranche de vitesses 7 (250 à 500 Mbps), qui est de 50 à 75 % inférieure à la vitesse du service Internet de gros 1000. L’utilisation des tarifs provisoires de la tranche de vitesses 7 obligerait Shaw à offrir son service Internet de gros 1000 à des tarifs inférieurs au coût, au moins jusqu’à ce que l’examen de la méthode d’établissement des tarifs de gros soit terminé;
    • le tarif provisoire devrait probablement être en place pendant une longue période, compte tenu du calendrier prévu pour l’examen de la méthode d’établissement des tarifs de gros. En outre, les rajustements rétroactifs potentiels et l’incertitude liée à l’ordonnance de télécom 2019-288 et aux contestations judiciaires connexes créent un risque inhérent pour Shaw.
  3. Shaw a fait valoir que, compte tenu des raisons susmentionnées et en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi, et conformément à son argument selon lequel les tarifs du service Internet de gros 1000 devraient actuellement faire l’objet d’une négociation commerciale, les tarifs provisoires appropriés devraient se situer dans une fourchette de tarifs assortie d’un tarif minimal de 67,79 $ et d’un tarif maximal de 84,73 $ par utilisateur final par mois.
  4. Shaw a basé ces tarifs interpolés avec le maximum sur son tarif provisoire actuel de 50,84 $ pour le service Internet de gros 600, tout en calculant le tarif minimal à partir du tarif provisoire actuel de 50,84 $ pour le service Internet de gros 750.
  5. Shaw a fait valoir que l’approche qu’elle propose permet une meilleure estimation d’un tarif basé sur les coûts en permettant une augmentation du tarif d’accès proportionnelle à l’augmentation de la vitesse du service. Shaw a de plus indiqué que toute préoccupation que le Conseil pourrait avoir au sujet de cette approche peut être atténuée par le fait que les tarifs provisoires pour les services Internet 600 et 750 de gros sont dérivés d’un tarif de service inférieur aux coûts – c’est-à-dire le tarif du service Internet de gros 300 de Shaw.
  6. Shaw a ajouté qu’une fourchette tarifaire pour le service Internet de gros 1000 laisse place à la négociation commerciale – qu’elle conduise à des ententes hors tarif ou à une flexibilité dans les ententes pour les services connexes faisant l’objet d’une abstention – ce qui, comme elle l’a soumis dans la demande de redressement, est tout à fait approprié pour les services offerts à des vitesses en gigabits.
  7. Les ORCC ont fait valoir que Shaw n’a pas justifié sa proposition de s’écarter de l’approche générale du Conseil consistant à fixer des tarifs provisoires, laquelle est basée sur le tarif approuvé aux vitesses inférieures les plus proches dans les cas où une étude de coûts n’est pas déposée. Ils ont ajouté que la proposition de Shaw est sans précédent et très préjudiciable aux clients des services AHV de gros et aux consommateurs canadiens de services de détail en aval.
  8. Par conséquent, les ORCC ont demandé au Conseil de rejeter toutes les propositions de Shaw et d’établir plutôt un tarif provisoire pour la tranche de vitesses 9 et le service Internet de gros 1000 basé sur le tarif provisoire du niveau de vitesse inférieur le plus proche, soit 50,84 $ pour la tranche de vitesses 8, comme l’a établi l’ordonnance de télécom 2019-52.
  9. Les ORCC ont ajouté que, lorsque tous les appels concernant l’ordonnance de télécom 2019-288 seront traités et que toutes les suspensions seront levées, les tarifs provisoires pour les tranches de vitesses 8 et 9 devraient être automatiquement rajustés en fonction des tarifs définitifs qui s’appliquent aux vitesses inférieures les plus proches ayant été approuvées comme substituts pour ces services. À ce moment-là, Shaw devrait également être tenue de déposer rapidement, pour le service Internet de gros 1000 et tous ses autres services AHV de gros qui ont été introduits sans études de coûts, des études de coûts conformes à toutes les règles du Conseil et aux déterminations préalables des coûts.
  10. TekSavvy a fait valoir que le Conseil a précisément examiné et rejeté des propositions d’interpolation dans le passé en raison de sa pratique habituelle consistant à fixer des tarifs provisoires sur la base d’un tarif approuvé qui fournit un substitut raisonnableNote de bas de page 8.
  11. TekSavvy a précisé que les tarifs provisoires de Shaw pour la tranche de vitesses inférieure suivante ne peuvent pas constituer un substitut raisonnable pour le service Internet de gros 1000, puisque le Conseil a déjà déterminé, dans l’ordonnance de télécom 2019-288, que ces tarifs ne sont pas justes et raisonnables. De plus, dans la même ordonnance, le Conseil a approuvé, de manière définitive, un tarif d’accès commun de 11,47 $ pour toutes les tranches de vitesses de Shaw.
  12. En conséquence, TekSavvy a fait valoir que le Conseil doit fixer des tarifs provisoires basés sur les coûts pour le service Internet de gros 1000 en utilisant le tarif d’accès juste et raisonnable approuvé de 11,47 $ comme substitut raisonnable.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Tel que discuté précédemment, Shaw n’a pas présenté d’étude de coûts pour le service Internet de gros 1000, et le service ne relève d’aucune des tranches de vitesses existantes de Shaw avec un tarif approuvé. Plutôt, Shaw a proposé des tarifs minimal et maximal interpolés à partir des tarifs provisoires pour les services Internet de gros 600 et 750. En l’absence d’une étude de coûts à l’appui d’une proposition de tarif de gros pour les services AHV, le Conseil a utilisé une approche de substitution pour fixer des tarifs provisoires. Cette approche consiste à fixer le tarif provisoire pour les nouvelles tranches de vitesses à un niveau égal au tarif le plus bas associé à la tranche de vitesses inférieure suivante.
  2. Dans l’instance qui a conduit à l’ordonnance de télécom 2012-706, Rogers Communications Partnership a proposé des tarifs provisoires pour ses nouveaux services AHV de gros qui n’étaient pas basés sur des études de coûts, mais plutôt sur l’approche d’interpolation. Le Conseil a rejeté l’approche d’interpolation, car elle s’écartait des pratiques antérieures.
  3. Dans l’instance qui a mené à la décision de télécom 2016-117, Shaw a également proposé une approche dans laquelle les tarifs des services AHV de gros basés sur les coûts approuvés pourraient être utilisés pour générer de nouveaux tarifs par interpolation. Le Conseil a rejeté cette approche, en indiquant ce qui suit :

    23. [...] l’interpolation a pour effet de traiter tous les coûts comme s’ils variaient en fonction de la vitesse, y compris les coûts non tributaires de la vitesse, qui sont fixes et ne devraient pas changer en fonction de la vitesse. Par conséquent, le Conseil rejette l’utilisation de l’interpolation pour fixer les tarifs.

  4. Pour cette même raison, le Conseil n’estime pas qu’il soit approprié d’utiliser l’approche d’interpolation pour déterminer le tarif du service Internet de gros 1000 de Shaw. L’approche d’interpolation a pour effet de traiter tous les coûts comme s’ils variaient en fonction de la vitesse, y compris les coûts non tributaires de la vitesse, qui sont fixes et ne devraient donc pas changer. Le Conseil estime qu’un tarif mensuel provisoire approprié pour l’accès à ce service serait de 50,84 $, ce qui correspond au tarif de la tranche de vitesses 8Note de bas de page 9.
  5. Par conséquent, le Conseil approuve à titre provisoire, à compter de la date de la présente ordonnance, un tarif d’accès mensuel de 50,84 $ pour le service Internet de gros 1000 de Shaw.
  6. Le Conseil estime que son approche consistant à utiliser la tranche de vitesses inférieure la plus proche pour établir le tarif provisoire permet, dans le cas présent, d’obtenir un tarif juste et raisonnable. Une décision définitive, y compris sur la question des rajustements rétroactifs, comme discuté ci-dessous au sujet de la condition 2 de Shaw, suivra la conclusion de l’instance de révision et de modification relative à l’ordonnance de télécom 2019-288.

Les modalités proposées par Shaw pour offrir le service Internet de gros 1000 sont-elles raisonnables?

  1. Shaw a demandé au Conseil d’approuver l’offre du service Internet de gros 1000 aux modalités suivantes :
    • Condition 1 : Les tarifs d’accès mensuels provisoires minimaux et maximaux (tant pour l’accès que pour la capacité) pour la tranche de vitesses 9 resteront en place jusqu’à ce que le Conseil ait terminé son examen de la méthode d’établissement des tarifs de gros, amorcé par l’avis de consultation de télécom 2020-131, auquel moment un tarif d’accès mensuel juste et raisonnable sera déterminé sur la base des résultats de cet examen.
    • Condition 2 : Les tarifs provisoires (tant pour l’accès que pour la capacité) pour la tranche de vitesses 9 ne feront l’objet d’aucun rajustement rétroactif par rapport aux tarifs définitifs établis pour la tranche de vitesses 7.
    • Condition 3 : Les tarifs provisoires pour la tranche de vitesses 9 ne feront l’objet d’aucun rajustement avant que Shaw ne dépose la preuve nécessaire pour établir les coûts importants liés à la fourniture de sa vitesse de service de prochaine génération, conformément à la méthode d’établissement des tarifs adoptée par le Conseil à la suite de la conclusion de l’instance amorcée par l’avis de consultation de télécom 2020-131.
    • Condition 4 : Compte tenu de l’incertitude importante liée à l’introduction du service Internet de gros 1000 au tarif provisoire proposé, Shaw aura la possibilité de dénormaliser ou de retirer immédiatement le service. À cet égard, Shaw a demandé que le Conseil confirme qu’il renonce à l’exigence énoncée à l’article 37 du bulletin d’information de télécom 2010-455-1, pour laquelle il est établi une période de 60 jours au cours de laquelle un fournisseur de services AHV de gros est tenu de fournir aux clients des services de gros une gamme de vitesse qui n’est pas offerte aux clients des services de détail des fournisseurs de services AHV de gros.
  2. TekSavvy a indiqué que les modalités arbitraires et intéressées proposées par Shaw pour le nouveau service doivent être rejetées dans leur intégralité. L’examen de la méthode d’établissement des tarifs de gros est un processus autonome ayant pour but l’examen des méthodes établies par le Conseil. Les décisions administratives, comme celles demandées dans l’AMT 34, ne peuvent pas être bloquées ou pourvues de modalités nouvelles et unilatérales en attendant les résultats d’autres instances sur une politique qui peuvent prendre des années à être résolues.
  3. TekSavvy a ajouté que les préoccupations exprimées par Shaw à l’appui des modalités proposées sont des préoccupations de politique générale sur la façon dont les tarifs devraient être fixés et les services mis à disposition aux clients des services de gros, en fonction d’un examen en cours de la méthode d’établissement des tarifs de gros qui pourrait avoir une incidence sur ces tarifs ou services à l’avenir. Ces questions de politique générales devraient être abordées dans le cadre de l’instance sur la politique elle-même.
  4. TekSavvy a fait remarquer que l’AMT 34 ne concerne qu’une seule vitesse pour une entreprise de câblodistribution. Si Shaw était autorisée à assortir ce service de ces modalités, ce serait une invitation ouverte à tous les autres titulaires à ajouter également des modalités similaires à leurs nouveaux services. Si le Conseil avait eu l’intention de mettre en veilleuse la concurrence de l’industrie en attendant l’issue de l’instance amorcée par l’avis de consultation de télécom 2020-131, il aurait ordonné à l’avance l’imposition de telles modalités. Au lieu de cela, vraisemblablement dans le cadre de l’examen de la méthode d’établissement des tarifs de gros ou d’une instance connexe de suivi sur l’établissement des coûts, le Conseil entendra les observations et déterminera comment les changements relatifs à la méthode d’établissement des tarifs devraient s’appliquer aux tarifs et services établis, y compris en ce qui concerne les questions de rétroactivité et de dénormalisation ou de retrait de services. Par conséquent, les modalités proposées par Shaw doivent être rejetées.
  5. Les ORCC ont fait valoir que l’exigence de dépôt de 60 jours pour la dénormalisation ou le retrait de services est essentielle :
    • pour veiller à ce que les clients des services AHV de gros, ainsi que leurs clients des services de détail, disposent d’un préavis suffisant pour se préparer à une dénormalisation ou à un retrait des services de gros;
    • pour permettre au Conseil et aux intéressés d’examiner la demande de dénormalisation ou de retrait afin de s’assurer qu’elle est conforme aux exigences applicables et qu’elle ne cause aucun préjudice aux clients des services AHV de gros ou aux consommateurs canadiens des services de détail en aval concernés.
  6. Les ORCC ont fait valoir que Shaw a proposé la suppression de ces importantes mesures de protection sans raison valable.
  7. En réponse, Shaw a fait valoir que les ORCC et TekSavvy ont ignoré la nécessité des modalités qu’elle propose, qui sont nécessaires pour préserver sa capacité à offrir un choix concurrentiel sur le marché des vitesses en gigabits dans l’Ouest canadien, ainsi que pour garantir qu’une certaine certitude et une certaine symétrie réglementaires soient rétablies sur le marché des services de gros.
  8. Shaw a en outre fait valoir que les observations de TekSavvy ne tiennent pas compte de la motivation contextuelle plus large de l’AMT 34 et de la demande de redressement associée. Si l’objectif de Shaw était de réduire progressivement le cadre stratégique par une série de « modalités nouvelles et unilatérales », elle aurait cherché à assortir de modalités similaires son service Internet de gros 750 récemment lancé, ce qu’il n’a pas fait. Les modalités proposées par Shaw sont appropriées sur le marché de l’Ouest canadien pour les services offerts à des vitesses en gigabits de prochaine génération, où Shaw est le seul fournisseur de services AHV de gros tenu de déposer un tarif d’accès de gros.
  9. Shaw a de plus fait valoir que les deux premières modalités qu’elle propose visent à assurer une certaine stabilité réglementaire pendant cette période et à éviter une situation dans laquelle les tarifs seraient modifiés.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. En ce qui concerne la condition 1, qui stipule qu’il ne doit pas y avoir de changement dans les tarifs provisoires pour la tranche de vitesses 9 jusqu’à ce que l’instance amorcée par l’avis de consultation de télécom 2020-131 soit terminée, le Conseil estime qu’il n’est pas approprié de priver les consommateurs des avantages des nouveaux services et des nouvelles vitesses en attendant l’issue d’une instance, qui se veut un examen prospectif de la politique et de la méthode employée. Par conséquent, le Conseil estime qu’il est inapproprié d’approuver cette condition.
  2. En ce qui concerne la condition 2, dans laquelle Shaw déclare qu’il ne devrait pas y avoir de rétroactivité associée au tarif provisoire pour le service Internet de gros 1000, le Conseil fait remarquer que sa pratique consiste à porter des conclusions relatives à la rétroactivité en tenant compte des observations des parties lors de l’établissement du tarif définitif. Le Conseil suit cette pratique pour garantir le maintien de tarifs justes et raisonnables et pour atteindre les objectifs stratégiques selon des renseignements et des méthodes robustes d’établissement des coûts. Le Conseil n’est pas d’avis qu’il faudrait, dans le cas présent, s’éloigner de cette pratique.
  3. En ce qui concerne la condition 3, dans l’ordonnance de télécom 2000-789, le Conseil a déterminé que les tarifs des services d’accès des entreprises de câblodistribution devaient être calculés en utilisant la méthode appropriée d’établissement des coûts de la Phase II. Par conséquent, jusqu’à ce que le Conseil prenne des décisions définitives concernant la méthode d’établissement des tarifs de gros appropriée, les tarifs associés aux nouveaux services AHV de gros doivent être élaborés en utilisant la méthode d’établissement des coûts de la Phase II actuellement approuvée, en suivant et en respectant les Instructions émises par le gouverneur en conseil et la Loi. Comme indiqué ci-dessus, une décision définitive concernant le service Internet de gros 1000 et la tranche de vitesses 9 suivra la conclusion des différentes instances liées à l’ordonnance de télécom 2019-288.
  4. En ce qui concerne la condition 4, dans la décision de télécom 2016-65, le Conseil a proposé d’aligner autant que possible les délais d’intervention et de réponse pour les différents types de demandes afin d’assurer une plus grande cohérence et de lever les incertitudes. Plus précisément, en ce qui concerne le calendrier de dénormalisation ou de retrait d’un service de gros, le Conseil a approuvé l’obligation de déposer les demandes au moins 60 jours civils avant la date d’entrée en vigueur proposée (l’obligation de dépôt dans un délai de 60 jours).
  5. L’obligation de dépôt dans les 60 jours est essentielle pour permettre au Conseil et aux autres parties d’évaluer les demandes de dénormalisation ou de retrait afin de s’assurer qu’elles sont conformes à toutes les exigences applicables. Elle garantit en outre que les concurrents disposent d’un préavis suffisant pour planifier et préparer la dénormalisation ou le retrait d’un service AHV de gros. De plus, il s’agit d’une garantie importante pour les consommateurs afin qu’ils ne perdent pas soudainement leur service et pour qu’ils soient avisés de manière appropriée.
  6. De plus, le Conseil estime qu’une demande tarifaire n’est pas le mécanisme approprié à utiliser pour supprimer l’obligation de dépôt dans un délai de 60 jours. Le Conseil estime qu’il n’existe pas d’incertitude importante concernant le service Internet de gros 1000, de sorte qu’il devrait bénéficier d’un traitement unique en ce qui concerne l’obligation de dépôt dans un délai de 60 jours pour sa dénormalisation ou son retrait.
  7. Par conséquent, le Conseil rejette les quatre modalités proposées par Shaw.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil approuve provisoirement un tarif d’accès mensuel de 50,84 $ pour le service Internet de gros 1000 de Shaw. Le Conseil enjoint à Shaw de publier, dans un délai de 10 jours à compter de la date de la présente ordonnance, des pages de tarif modifiées reflétant les conclusions du Conseil exposées ci-dessusNote de bas de page 10. De plus, le Conseil rejette les quatre modalités proposées par Shaw.

Instructions

  1. Le Conseil réglemente la fourniture de services de télécommunication partout au Canada dans le but de mettre en application les objectifs stratégiques et conformément aux Instructions émises par le gouverneur en conseil.
  2. Les Instructions de 2019 stipulent que le Conseil doit tenir compte de la manière dont ses décisions promeuvent la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation.
  3. Le Conseil a examiné la demande de Shaw en tenant compte des Instructions de 2019 et a étudié ses aspects dans la mesure nécessaire, en utilisant des mesures qui sont efficaces et proportionnées à leur objectif. Le Conseil estime que l’approbation du service Internet de gros 1000 en temps opportun est conforme aux Instructions de 2019, car elle aura un effet positif sur la concurrence et les utilisateurs finals du fait que les clients des services de gros auront accès au service Internet de gros 1000 et pourront offrir des services de détail à leurs propres clients.
  4. En outre, conformément au sous-alinéa 1b)(i) des Instructions de 2006, l’approbation du service Internet de gros 1000 fait progresser l’objectif stratégique énoncé à l’alinéa 7f) de la LoiNote de bas de page 11. Pour garantir l’efficience et l’efficacité de la réglementation, le Conseil estime que les questions d’ordre stratégique et méthodologique telles que celles soulevées par Shaw, notamment l’asymétrie de la réglementation, l’équivalence des vitesses et l’utilisation de l’interpolation comme méthode d’établissement des coûts, devrait être examinée principalement lors d’instances en matière de politique et non lors de l’examen d’AMT. Cela permet à tous les intéressés d’avoir l’occasion de participer et d’assurer que le Conseil traite rapidement les AMT, limitant ainsi les délais liés à la réglementation pour des services introduits sur le marché.

Secrétaire général

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