ARCHIVÉ -  Décision Télécom CRTC 98-4

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Décision

Ottawa, le 24 mars 1998

Décision Télécom CRTC 98-4

MISE EN MARCHÉ CONJOINTE ET GROUPEMENT

Référence : 8620-C12-01/97

I RÉSUMÉ

Dans la présente décision, le Conseil retire, pour les compagnies membres de Stentor du ressort fédéral (les compagnies de Stentor) et les compagnies de téléphone indépendantes, l’interdiction faite à l’égard de la mise en marché conjointe des services sans fil et sur ligne métallique. Il établit en outre les règles à l’égard des compagnies de Stentor pour le groupement des services de télécommunications tarifés avec des services d’une compagnie affiliée ou non affiliée, ou avec des services autres que de télécommunications. L’obligation de permettre la revente du service groupé ne s’appliquera pas à un groupe renfermant des services autres que de télécommunications (par ex., des services de radiodiffusion). Le Conseil amorce également deux instances en vue d’examiner la suppression de la restriction relative au groupement d’équipement terminal avec des éléments de services réseau, de même que le cadre approprié à l’égard des services groupés pour un abonné donné.

II INTRODUCTION

La présente décision porte sur des questions soulevées dans deux avis publics émis par le Conseil : l’avis public Télécom CRTC 97-14 du 25 avril 1997 intitulé Examen des restrictions relatives à la mise en marché conjointe (l’AP 97-14) et l’avis public Télécom CRTC 97-21 du 6 juin 1997 intitulé Examen du groupement et des restrictions relatives à la mise en marché conjointe (l’AP 97-21).

Dans l’AP 97-14, le Conseil a sollicité des observations sur la question de savoir si, compte tenu de l’évolution du marché, il y a lieu de continuer à imposer aux compagnies de Stentor et aux compagnies de téléphone indépendantes les restrictions relatives à la mise en marché conjointe établies dans les décisions Télécom CRTC 87-13 du 23 septembre 1987 intitulée Radio cellulaire - Opportunité des garanties structurelles (la décision 87-13) et 92-13 du 29 juin 1992 intitulée Rogers Cantel Inc. c. Bell Canada - Mise en marché du service cellulaire (la décision 92-13).

Dans l’AP 97-21, le Conseil a déclaré que le moment était venu d’examiner les questions plus générales liées au groupement de services tarifés avec d’autres types de services internes ou avec des services d’autres entités. Il a donc annoncé qu’il élargissait la portée de l’instance amorcée par l’AP 97-14 de manière à y inclure l’examen de ces questions. Plus particulièrement, le Conseil a sollicité des observations sur le groupement d’un service tarifé avec :

1) des services d’une compagnie affiliée;

2) des services d’une compagnie non affiliée; et

3) des services autres que des services de télécommunications offerts à l’interne par la compagnie de téléphone (par ex., des services réglementés en vertu de la Loi sur la radiodiffusion).

Dans l’AP 97-21, le Conseil a également sollicité des observations sur les garanties appropriées sur le plan de la concurrence qui pourraient s’imposer pour prévenir des abus anticoncurrentiels (par ex., interfinancement et prix d’éviction) susceptibles de résulter du groupement par les compagnies de Stentor.

Le Conseil a ajouté dans l’AP 97-21 qu’il n’entendait pas réexaminer les questions concernant le groupement des services de télécommunications fournis à l’interne par les compagnies de Stentor. En effet, ces questions ont été examinées dans les décisions Télécom CRTC 94-19 du 16 septembre 1994 intitulée Examen du cadre de réglementation (la décision 94-19) et 97-8 du 1er mai 1997 intitulée Concurrence locale (la décision 97-8).

Les observations ont été reçues de l’ACC TelEnterprises Ltd. (l’ACC), l’Association des compagnies de téléphone du Québec inc., AT&T Canada Enterprises Inc. (AT&T Enterprises), AT&T Canada Services interurbains (AT&T Canada SI), la Call-Net Enterprises Inc. (la Call-Net), l’Alliance canadienne des télécommunications de l’entreprise (l’ACTE), l’Association canadienne de télévision par câble (l’ACTC), l’Association canadienne des télécommunications sans fil (l’ACTSF), l’Association canadienne des fournisseurs de services Internet (l’ACFSI), la Clearnet Communications Inc. (Clearnet), le Directeur des enquêtes et recherches, Loi sur la concurrence (le DIR), la Microcell Telecommunications Inc. (la Microcell), Mobilité Canada, la Pathway Communications, le Centre pour la défense de l’intérêt public, la Rogers Cantel Inc. (la Cantel), la Rogers Communications Inc. (la RCI), le Centre de ressources Stentor Inc. (Stentor) et Sogetel inc. Des observations distinctes ont également été reçues de The New Brunswick Telephone Company, Limited (la NBTel), la TELUS Communications Inc. (la TCI). La Cable Atlantic Inc., Les Communications par satellite canadien Inc., la fONOROLA Inc. et la TMI Communications n’ont pas déposé d’observations mais ont soumis une réplique.

III HISTORIQUE

Tel que noté dans l’AP 97-14, les restrictions communément appelées « restrictions relatives à la mise en marché conjointe » sont en fait une série de garanties conçues pour empêcher une compagnie de téléphone sur ligne métallique de s’accorder à elle, ou à son affiliée de service cellulaire, une préférence ou un avantage indus, ce qui est contraire au paragraphe 27(2) de la Loi sur les télécommunications (la Loi). Ces garanties comprennent : (1) l’interdiction de faire de la mise en marché et de la publicité conjointes; (2) l’obligation de faire des renvois neutres d’abonnés; (3) l’interdiction d’échanger des renseignements confidentiels sur les abonnés; et (4) l’interdiction d’interfinancer des services cellulaires par des services sur ligne métallique.

Les règles du Conseil relatives à la mise en marché conjointe ont évolué sensiblement depuis les décisions 87-13 et 92-13, en raison surtout de l’évolution de la concurrence dans le marché. Par exemple, la décision Télécom CRTC 95-16 du 15 août 1995 intitulée Association canadienne d’échange de messages Inc. c. Bell Canada - Mise en marché de services de téléappel, le Conseil n’a pas étendu les restrictions relatives à la mise en marché conjointe à la distribution de produits de téléappel par l’entremise des Téléboutiques de Bell Canada (Bell). Dans une lettre du 15 novembre 1996, le Conseil a autorisé Bell à distribuer les téléphones cellulaires Liberti de Bell Mobilité par l’intermédiaire de ses Téléboutiques.

Tel que noté dans l’AP 97-21, le Conseil, dans la décision 94-19, a déclaré que « l'expression groupement désigne généralement une situation selon laquelle un tarif couvre un certain nombre d'éléments de service », et que le groupement s'applique également à des « situations où il pourrait y avoir des éléments tarifaires distincts pour chaque élément de service, mais qu'un certain nombre d'éléments de service sont regroupés aux fins du calcul de rabais au volume, de sorte que le rabais offert est plus grand que si les éléments du service n'avaient pas été regroupés ». Dans la décision Télécom CRTC 97-19 du 18 décembre 1997 intitulée Abstention - Réglementation des services interurbains fournis par les compagnies de téléphone titulaires (la décision 97-19) et la décision Télécom CRTC 97-20 du 18 décembre 1997 intitulée Centre de ressources Stentor Inc. - Abstention de la réglementation des services de liaison spécialisée intercirconscriptions (la décision 97-20), le Conseil a également décrit le groupement comme l’inclusion de différents services ou éléments de service dans une structure tarifaire. Il a fait remarquer qu’il peut s’agir d’une structure tarifaire à tarif simple, ou comportant une série de tarifs pour divers éléments de services et/ou des tarifs pour un ou plusieurs éléments du service qui dépendent de l’ampleur de l’utilisation d’autres services.

Dans la décision 94-19, le Conseil a déclaré que le groupement, par des entreprises de services locaux titulaires (ESLT), d’éléments monopolistiques avec des éléments concurrentiels est généralement approprié, sous réserve de trois conditions :

1) le service groupé doit recouvrer ses coûts, quand l’étude du prix de revient du service groupé comprend :

a) le prix de revient de l’élément ou des éléments goulot, calculé d’après les taux tarifés (y compris, s’il y a lieu, les frais de contribution et de recouvrement des frais d’établissement); et

b) les coûts causals de la Phase II de l’élément ou des éléments non visés en a);

2) les concurrents peuvent offrir leur propre service groupé par l’intermédiaire de composantes goulot tarifées de façon autonome, de concert avec leurs propres éléments concurrentiels; et

3) la revente du service groupé est autorisée.

Dans la décision 97-8, le Conseil a affirmé que les compagnies de Stentor continuent à grouper leurs services publics et autres services de télécommunications conformément à la décision 94-19. Il a également indiqué dans la décision 97-8 que, compte tenu de l’avènement de la concurrence dans le marché local, les modifications suivantes au régime de groupement établi dans la décision 94-19 sont pertinentes :

1) On ne doit pas empêcher les compagnies de Stentor de grouper des services visés par une abstention avec les services locaux des ESLT. Toutefois, lorsqu'un service visé par une abstention est compris dans un nouveau service groupé, on doit déposer les coûts de la Phase II dans le cadre du critère d’imputation et les tarifs portant sur le service groupé pour fins d'approbation par le Conseil; et

2) Si les compagnies de Stentor groupent, à des tarifs inférieurs aux coûts, des services locaux de résidence monolignes avec d'autres services de télécommunications, le Conseil jugera que le coût des services locaux de résidence est égal au taux tarifé pour les besoins du test d'imputation.

IV POSITION DES PARTIES

A. Mise en marché conjointe

Stentor, Mobilité Canada, la NBTel et la TCI ont soutenu que les restrictions relatives à la mise en marché conjointe ne sont plus pertinentes dans le marché des télécommunications sans fil dynamique et concurrentiel d’aujourd’hui, et que les quatre garanties devraient donc être retirées. Ils ont fait remarquer que l’introduction de ces restrictions dans la décision 87-13 repose sur l’opinion voulant que la participation de compagnies de téléphone sur ligne métallique dans le nouveau marché cellulaire entraînerait l’accord d’une préférence indue ou déraisonnable aux affiliées de services cellulaires. Toutefois, selon Mobilité Canada, les objectifs du Conseil à l’égard de la concurrence dans le marché des services sans fil ont déjà été atteints. Stentor et Mobilité Canada ont signalé que le marché des services sans fil a crû considérablement au cours des dix dernières années (environ 30 % par année), et qu’actuellement 4,2 millions d’abonnés ou 29 % des foyers canadiens ont au moins un téléphone sans fil. Selon Mobilité Canada, la Cantel dessert maintenant 1,5 million d’abonnés, fournit la couverture à 90 % de la population canadienne et a implanté un réseau de distribution incluant 3 000 détaillants en plus du réseau de détaillants de la Cantel et de distributeurs affiliés. Stentor, Mobilité Canada, la NBTel et la TCI ont ajouté que le marché des services sans fil devient de plus en plus concurrentiel à mesure que de nouveaux services sans fil comme les services de communications personnelles (SCP), les services radiotéléphoniques mobiles spécialisés évolués (RMSE) et les systèmes de communications multipoints locaux (SCML) sont implantés, et que les consommateurs sont au courant des choix de fournisseurs de services sans fil, des options, des programmes et des produits qui leur sont maintenant offerts dans le cadre de campagnes de publicité fortement médiatisées. Ils ont également souligné que le Conseil, dans la décision Télécom CRTC 94-15 du 12 août 1994 intitulée Réglementation des services sans fil (et plus tard dans la décision Télécom CRTC 96-14 du 23 décembre 1996 intitulée Réglementation des services de télécommunications sans fil mobiles (la décision 96-14)), a conclu que le marché des services cellulaires/SCP est suffisamment concurrentiel pour justifier une abstention.

Stentor a indiqué que les SCP n’ont pas besoin d’être protégés contre la mise en marché conjointe, étant donné que les conditions du marché suivant lesquelles ces services sont implantés diffèrent sensiblement de celles suivant lesquelles le Conseil a jugé opportun d’imposer les restrictions relatives à la mise en marché conjointe en 1987. Il a précisé que le SCP n’est pas une nouvelle technologie ou un nouveau service étranger pour les consommateurs; il s’agit simplement d’une amélioration du service cellulaire mobile qui est bien compris par les consommateurs. Selon Stentor, le nouveau fournisseur de SCP s’est vu déjà accorder certaines protections. Le processus d’attribution de licence pour le spectre interdit aux fournisseurs titulaires de services sans fil d’offrir des SCP de 1,9 GHz tant qu’un des nouveaux fournisseurs de SCP exploite dans la zone d’exploitation du titulaire dans le cadre d’un contrat de revente de services cellulaires et d’appels à portée étendue ou, en l’absence d’un nouveau fournisseur de SCP en exploitation, tant que le service de revente de services cellulaires et d’appels à portée étendue entre un titulaire et le nouveau fournisseur de SCP n’est pas en oeuvre depuis un an.

Stentor, Mobilité Canada et la TCI ont fait valoir que les restrictions relatives à la mise en marché conjointe (et au groupement) sont maintenant devenues un obstacle à la concurrence et au choix des clients. Les clients réclament de plus en plus des solutions intégrées, un guichet unique, la mise en bloc et le groupement, mais ne bénéficient pas des avantages de la tarification, de la mise en bloc ou des services que la mise en marché et le groupement conjoints illimités pourraient offrir. Ces solutions intégrées donneraient lieu à un plus grand choix pour les consommateurs, un plus grand nombre d’innovations et à la prestation plus efficace et plus rentable des services (c.-à-d., les consommateurs se voient privés des avantages des économies d’échelle dans la mise en marché et la distribution).

Stentor, Mobilité Canada et la TCI ont soutenu qu’il n’est plus nécessaire d’exiger que les compagnies de Stentor titulaires fournissent des renvois neutres d’abonnés à des demandes de services cellulaires/SCP. Le marché des services sans fil est concurrentiel et se caractérise par une mise en marché et une publicité agressives, qui se sont intensifiées avec l’entrée d’autres services concurrentiels comme les SCP, et les consommateurs sont au courant des alternatives concurrentielles dans le marché des services sans fil.

Pour ce qui est des restrictions relatives à l’échange de renseignements confidentiels sur les abonnés, Stentor, la TCI et Mobilité Canada ont fait valoir qu’il est inutile d’avoir une disposition distincte pour protéger les renseignements confidentiels portant sur les activités entre les compagnies et leurs affiliées de services cellulaires respectives ou toute autre affiliée. À leur avis, cette clause est superflue parce qu’elle double les articles établis dans les Modalités de service des compagnies à la rubrique « Confidentialité des renseignements sur l’abonné ». La TCI a ajouté que des conditions semblables imposées aux entreprises de services sans fil comme condition d’abstention limitent également l’utilisation des renseignements confidentiels sur les abonnés. De plus, la TCI s’est reportée aux Principes d’Industrie Canada relatifs à la protection de la vie privée pour les services de télécommunications. Mobilité Canada a ajouté que la création de groupes de services aux entreprises (GSE) de compagnies de téléphone assure que les renseignements concernant les rapports des compagnies de téléphone avec les concurrents sont protégés. Mobilité Canada dit ne pas avoir accès à ces renseignements et ne pas chercher non plus à y avoir accès.

Pour ce qui est de l’interdiction explicite relative à l’interfinancement des services cellulaires/SCP par des services sur ligne métallique, Stentor a fait savoir que cette interdiction est superflue, compte tenu des garanties contenues dans la décision Télécom CRTC 95-21 du 31 octobre 1995 intitulée Mise en oeuvre du cadre de réglementation - Partage de la base tarifaire et questions connexes, la décision Télécom CRTC 97-9 du 1er mai 1997 intitulée Réglementation par plafonnement des prix et questions connexes et la décision Télécom CRTC 97-5 du 21 mars 1997 intitulée Examen des politiques, règles et procédures de transactions intersociétés. La TCI a en outre indiqué que le test d’imputation pour les services tarifés prévoit également une protection suffisante contre l’interfinancement.

La TCI a souligné que la domination des compagnies de Stentor ne devrait pas soulever de préoccupations en ce qui concerne la mise en marché conjointe. Elle a fait savoir que tant que les concurrents ont des occasions équivalentes de mise en marché conjointe et que le marché de télécommunications reste ouvert à la concurrence, il ne peut pas y avoir de préférence indue lorsque les compagnies de téléphone commercialisent conjointement leurs services locaux avec d’autres types de services.

Stentor et la TCI ont précisé que les concurrents pouvaient conclure toutes sortes d’arrangements pour fournir un vaste éventail de services de télécommunications. Les concurrents peuvent devenir des entreprises locales dotées d’installations, elles peuvent former des alliances stratégiques avec des compagnies offrant des services complémentaires ou encore revendre des services de Stentor (y compris des services de base résidentiels) dans le cadre de leurs blocs de services.

Stentor a fait observer que la réglementation ne vise pas à tenter d’éliminer les avantages qu’un groupe de concurrents peut avoir; et que les différents concurrents auront différents avantages, affiliations et coûts indirects. Il a soutenu que les tentatives pour atteindre, par voie réglementaire, la parité entre les concurrents nuiraient à la concurrence, parce qu’elles créeraient des avantages et des inconvénients artificiels. La TCI a soutenu que les restrictions actuelles à l’égard de la mise en marché conjointe et du groupement ont pour effet de préserver des segments de marché et des distinctions artificiels, ainsi que d’empêcher le marché d’évoluer naturellement en réponse aux demandes des consommateurs pour un guichet unique et des services intégrés.

De l’avis de la plupart des parties autres que Stentor, il ne faudrait pas retirer les restrictions relatives à la mise en marché conjointe. L’ACC, AT&T Canada SI, AT&T Enterprises, la Call-Net, la Cantel, l’ACTSF, la Clearnet et la Microcell ont préconisé que le Conseil maintienne toutes les restrictions actuelles à l’égard de la mise en marché conjointe. Le DIR et l’ACTE, cependant, ont réclamé le retrait des restrictions en question.

Selon le DIR, bon nombre des préoccupations ayant donné lieu à l’imposition des restrictions relatives à la mise en marché conjointe ne sont plus valables, parce que le marché des télécommunications est maintenant ouvert à la concurrence. Le DIR a souligné que le retrait des restrictions en question ne permettrait probablement pas aux compagnies de téléphone de Stentor ou aux compagnies de téléphone indépendantes de se livrer à des pratiques anticoncurrentielles. Le DIR a ajouté que les progrès technologiques réalisés dans les infrastructures réseau amènent des services et des industries auparavant disparates à converger (par ex., Internet, téléphonie locale et interurbaine, fax, données, satellite de radiodiffusion directe) et crée des occasions d’affaires qui n’existaient pas. La mise en marché conjointe de pareils services permettra des économies, en raison des économies d’échelle et de portée dans la distribution et la mise en marché de ce qui étaient considérés avant comme des technologies et des marchés distincts, offrant ainsi aux consommateurs des avantages directs, comme obtenir un produit nouveau et de plus grande qualité.

L’ACTE a déclaré que les restrictions relatives à (1) la mise en marché et à la publicité conjointes et (2) les renvois neutres d’abonnés ne sont plus nécessaires compte tenu de l’environnement concurrentiel actuel. Elle a recommandé au Conseil de maintenir l’interdiction relative à l’échange de renseignements confidentiels sur les abonnés par les fournisseurs de services sur ligne métallique et leurs affiliées de services sans fil.

L’ACTC n’a pas préconisé la mise en marché conjointe des services locaux avec des services concurrentiels tant que les mêmes occasions ne seraient pas offertes à d’autres participants du marché. Elle a ajouté que, bien que la revente des services locaux de Stentor soit offerte aux concurrents pour complémenter leurs services, la revente n’est pas un substitut à la concurrence basée sur les installations. Elle ne s’est pas opposée à d’autres formes de mise en marché conjointe ou de groupement par les compagnies de Stentor.

Selon AT&T Canada SI, aucune autre libéralisation de la mise en marché conjointe des services sur ligne métallique et sans fil n’est justifiée à ce stade-ci. Elle a proposé que les restrictions en question soient élargies de manière à couvrir tous les services de télécommunications des compagnies de téléphone comme les services de radiodiffusion ou d’affiliées jusqu’à ce que leur domination dans le marché des services sur ligne métallique ait été sensiblement érodée.

La Clearnet a proposé que le Conseil continue de mettre en oeuvre les restrictions actuelles relatives à la mise en marché conjointe jusqu’à ce qu’il se prononce sur la question de savoir s’il doit s’abstenir de réglementer les marchés des télécommunications interurbains ou locaux. À la publication d’une décision relative à l’abstention concernant le marché interurbain, les compagnies de téléphone devraient être autorisées, conjointement à mettre en marché, à grouper, à facturer et à soumettre des offres conjointes pour la fourniture de services interurbains et sans fil. À la publication d’une décision relative à l’abstention concernant le marché local, le Conseil devrait supprimer toutes les restrictions et garanties concernant la mise en marché conjointe ou le groupement de services sur ligne métallique et sans fil.

La Call-Net a proposé d’interdire aux compagnies de Stentor de faire de la mise en marché conjointe et de grouper des services sans fil et sur ligne métallique. La Call-Net ainsi que l’ACC et l’AT&T Enterprises ont fait remarquer que les compagnies de Stentor sont les seules parties à pouvoir se livrer à la mise en marché conjointe d’un éventail complet de services de télécommunications.

L’ACC a affirmé que la mise en marché conjointe et le groupement devraient continuer à être interdits lorsque le résultat final est de conférer une préférence à un service offert par l’entité réglementée. Selon l’ACC, si le Conseil s’abstient de réglementer les services interurbains, les restrictions relatives à la mise en marché conjointe devraient continuer de s’appliquer.

La Microcell et l’ACC ont fait valoir que l’exigence relative aux renvois neutres d’abonnés est nécessaire même si le Conseil décide de supprimer les restrictions à cet égard. AT&T Canada SI, la Cantel et la Microcell ont préconisé le maintien de la restriction relative à la mise en marché conjointe portant sur l’interfinancement. Selon la Clearnet et la Microcell, il ne faudrait pas retirer la restriction relative à l’échange de renseignements confidentiels sur les abonnés.

B. Groupement

Stentor, la TCI et Mobilité Canada ont fait remarquer qu’il existe actuellement des garanties efficaces contre la possibilité d’abus anticoncurrentiels découlant du groupement; en particulier, il n’y a aucune capacité d’interfinancer, d’appliquer une stratégie rentable de prix d’éviction ou autrement de limiter la concurrence dans le marché des télécommunications ou encore aucun incitatif à le faire.

Premièrement, Stentor, la TCI et Mobilité Canada ont fait valoir que la base tarifaire partagée ainsi que les plafonds de prix pour les services du segment Services publics assurent que les revenus provenant du segment Services publics ne peuvent servir à financer les services du segment Services concurrentiels. Ils ont également précisé qu’une protection additionnelle est fournie par le régime de transactions intersociétés qui protège contre l’interfinancement entre le segment Services publics ou les affiliées de services intégrés et affiliées de services non intégrés (y compris les services cellulaires et les SCP) ainsi qu’entre les affiliées de services intégrés et les segments Services publics ou Services concurrentiels.

Deuxièmement, Stentor, la TCI et Mobilité Canada ont indiqué que l’absence d’obstacles à l’entrée dans le marché des télécommunications et l’intensification de la concurrence dans le marché des télécommunications protègent également contre l’établissement de prix anticoncurrentiels et qu’il n’est donc pas nécessaire d’imposer des restrictions explicites pour le groupement. À leur avis, de nombreuses décisions du Conseil établissant les modalités de la récente concurrence font en sorte que les nouveaux venus peuvent entrer dans le marché relativement facilement. Voici des exemples de mesures citées par Stentor : le dégroupement réseau/équipement terminal, la divulgation d’interfaces réseau à équipement terminal et réseau à réseau, l’égalité d’accès pour les autres fournisseurs de services interurbains, les modalités de la co-implantation et de l’accès aux structures de soutènement, les subventions portables et la revente obligatoire des services des compagnies ainsi que le dégroupement des lignes d’abonnés locales et d’autres composantes réseau essentielles.

Troisièmement, Stentor, la TCI et Mobilité Canada ont fait remarquer que les Modalités de service assurent le traitement équitable des abonnés et la protection des renseignements confidentiels sur les abonnés.

Stentor et la TCI ont souligné que les services d’affiliées et les services autres que de télécommunications sont les plus susceptibles d’avoir fait l’objet d’une abstention ou de ne pas être visés par la Loi. Ils ont indiqué qu’il est régressif d’imposer des garanties réglementaires additionnelles au groupement de ces services avec des services tarifés puisque cela signifierait réglementer de nouveau les services qui ont déjà été jugés suffisamment concurrentiels pour faire l’objet d’une abstention ou d’une forme de réglementation des services autres que de télécommunications conformément à la Loi. Voilà pourquoi, de l’avis de la TCI, il n’y a pas lieu d’étendre la règle relative au groupement élaborée dans la décision 97-8.

Pour ce qui est du groupement des services tarifés avec des services autres que de télécommunications internes (comme les services de radiodiffusion), Stentor, Mobilité Canada et la TCI ont souligné que le Conseil devrait adopter la démarche contenue dans la décision Télécom CRTC 97-11/ décision Radiodiffusion CRTC 97-192 du 8 mai 1997 intitulée Bell Canada - Demandes présentées en vertu de la Loi sur la radiodiffusion et de la Loi sur les télécommunications en vue d'obtenir l'autorisation de faire des essais techniques et commerciaux, (la décision 97-11) et dans la décision Télécom CRTC 97-12/décision Radiodiffusion CRTC 97-193 du 8 mai 1997 intitulée TELUS Cable Holdings Inc. - Demandes présentées en vertu de la Loi sur la radiodiffusion et de la Loi sur les télécommunications en vue d’obtenir l’autorisation de faire des essais techniques et commerciaux (la décision 97-12). Dans ces décisions, Bell et la TELUS ont été autorisées, sans avoir à déposer de tarifs, à grouper des services de télécommunications tarifés avec des services autres que de télécommunications sous réserve que le service groupé ne soit pas vendu pour moins que la somme des taux tarifés des services de télécommunications et que le service groupé ne soit pas conçu de manière à se soustraire au tarif de tout service tarifé inclus dans le groupement. Les compagnies ont également été tenues de ventiler les services tarifés sur les états de compte du client et d’assurer que les paiements pour les services groupés étaient affectés d’abord aux services locaux de base et à d’autres services tarifés. De l’avis de Stentor, suivant cette démarche, le Conseil devrait maintenir la surveillance des services tarifés dans le groupe, sans exiger le dépôt de tarifs distincts, ce qui lui éviterait d’avoir à intervenir dans la tarification des services autres que de télécommunications.

De l’avis de la plupart des parties autres que Stentor, les conditions actuelles relatives au groupement ne devraient pas être retirées.

AT&T Canada SI et la Microcell ont fait remarquer que l’assouplissement de la capacité des compagnies de téléphone à grouper les services ne devrait être autorisé que lorsque certains seuils de concurrence sont atteints. AT&T Canada SI a indiqué que le groupement de services interurbains avec des services d’affiliées ou de radiodiffusion ne devrait survenir qu’après que la part des marchés des compagnies de Stentor tombe en dessous de 40 % et certainement pas avant que l’abstention ne soit accordée à l’égard du marché interurbain. AT&T Canada SI a ajouté que le groupement de services d’affiliées ou de radiodiffusion avec des services locaux ne devrait pas être autorisé tant que la domination des compagnies de téléphone dans le marché local n’aura pas diminué considérablement. La Microcell a indiqué que les restrictions relatives au groupement devraient être révisées après que les concurrents dotés d’installations ont atteint 25 % du marché des services locaux.

AT&T Canada SI a également précisé que dans le cas où le groupement est autorisé, la démarche adoptée dans la décision 97-8 devrait être étendue de manière à couvrir les types de groupement envisagés dans l’AP 97-21, mais avec des conditions additionnelles, comme :

(1) la composante télécommunications de tous les services groupés doit être offerte aux concurrents à des taux groupés; (2) l’interdiction actuelle relative au groupement de l’équipement terminal avec des services réseau doit être étendue de manière à interdire le groupement par les compagnies de Stentor de services réseau tarifés ou faisant l’objet d’une abstention avec de l’équipement terminal fourni par une autre entité; (3) une interdiction de grouper des services Internet avec des services locaux, interurbains ou de radiodiffusion; (4) la décision Télécom CRTC 94-6 du 4 mars 1994 intitulée Règle des affiliées devrait demeurer, et devrait être élargie de manière à interdire la revente par les affiliées de compagnies de téléphone de services locaux, qu’il s’agisse de la vente en gros ou de détail; et (5) une interdiction relative à la mise en marché conjointe et au groupement de la publicité dans les pages jaunes par une compagnie de téléphone affiliée avec des services d’une compagnie de téléphone jusqu’à ce qu’il y ait une concurrence suffisante dans le marché des annuaires.

L’ACTC a déclaré que si le groupement est autorisé, le test d’imputation de la décision 97-8 utilisé pour le groupement des services locaux tarifés avec des services internes faisant l’objet d’une abstention doit s’appliquer à toutes les formes de groupement. Selon l’ACC, même si le Conseil décide de réduire les restrictions relatives à la mise en marché conjointe, le test d’imputation pour le groupement devrait être élargi au-delà de ce qui a été autorisé dans les décisions 94-19 et 97-8. L’ACTE a proposé que le groupement soit autorisé, mais que les garanties contenues dans la décision 97-8, y compris le test d’imputation, soient appliquées. Pour sa part, la Call-Net a suggéré que le groupement des services soit assujetti à un test d’imputation et au dépôt de propositions relatives au groupement auprès du Conseil, sans l’obligation de déposer des tarifs.

Le DIR a fait savoir que le groupement comporte de nombreux avantages, notamment : les réductions des coûts de distribution et de mise en marché par la fourniture conjointe de services, le guichet unique offert aux consommateurs (et une facture) et l’augmentation de la concurrence dans les marchés des communications. Le DIR a appuyé le groupement de tous les services de communications. Toutefois, le DIR de même que l’ACTC et l’ACTSF ont proposé que le Conseil fasse preuve de prudence dans l’assouplissement des restrictions relatives au groupement des services téléphoniques locaux de base avec des services concurrentiels jusqu’à ce qu’il soit assuré que les obstacles à l’entrée dans les marchés de télécommunications locaux ont été levés. Les préoccupations du DIR à cet égard sont basées sur le contrôle exercé par les compagnies de Stentor titulaires sur l’accès à leurs réseaux locaux, et leur capacité d’offrir des services locaux à des prix inférieurs à ce que les concurrents auraient à payer s’ils voulaient grouper leurs services par voie de revente de services locaux. Selon le DIR, en attendant la mise en oeuvre de l’interconnexion locale, du dégroupement (d’installations essentielles) et d’initiatives de revente, les titulaires seront les seules firmes à pouvoir grouper un service local avec des services non réglementés. Le DIR (et l’ACTC) ont fait savoir qu’une interdiction de grouper des services téléphoniques locaux de base avec des services concurrentiels inciterait les compagnies de Stentor à contribuer à ouvrir des marchés locaux à la concurrence basée sur les installations.

Opposée au groupement des services monopolistiques et concurrentiels, la RCI a déclaré qu’elle ne croit pas que la revente fournira des occasions équivalentes pour les concurrents de mettre en marché des blocs de services groupés. Le marché de la téléphonie locale n’est pas encore ouvert à la concurrence : l’interconnexion ou les installations dégroupées ne sont pas encore disponibles et la transférabilité des numéros n’a pas encore eu lieu.

AT&T Enterprises a affirmé que seules les compagnies de Stentor pourront fournir la gamme complète des services.

V CONCLUSIONS

A. Mise en marché conjointe

Le Conseil fait remarquer que les restrictions actuelles relatives à la mise en marché conjointe s’appliquent aux compagnies de Stentor et aux compagnies de téléphone indépendantes, tandis que les restrictions relatives au groupement s’appliquent aux compagnies de Stentor et n’ont pas été étendues aux compagnies de téléphone indépendantes. De plus, les restrictions relatives à la mise en marché conjointe et les règles relatives au groupement ne visent pas les entreprises de services locaux concurrentes (ESLC), y compris les câblodistributeurs, qui entrent dans le marché local, étant donné que ces fournisseurs de services ne seraient pas dominants dans le secteur de la téléphonie.

Le Conseil fait également remarquer que ses vues concernant la mise en marché conjointe ont évolué sensiblement, en particulier depuis 1995, lorsqu’il a conclu qu’il était inutile d’étendre les restrictions au marché des services de téléappel, étant donné que ce marché était suffisamment mûr et concurrentiel. Dans un certain nombre de décisions du Conseil depuis 1995, le Conseil a autorisé la mise en marché conjointe des services Internet Sympatico par l’entremise des Téléboutiques de Bell et la mise en marché conjointe de la ligne de téléphones cellulaires Liberti par les Téléboutiques de Bell et les PhoneMarts de la BC TEL. Dans chacun de ces cas, le Conseil a établi que les marchés en question étaient suffisamment concurrentiels pour empêcher que les compagnies accordent une préférence indue ou fassent preuve de discrimination injuste, ce qui est contraire au paragraphe 27(2) de la Loi.

Le Conseil accepte la position des compagnies de Stentor et de Mobilité Canada voulant que le marché des services sans fil ait crû considérablement au cours des dix dernières années, qu’il est dynamique et concurrentiel (et qu’il devient de plus en plus concurrentiel à mesure que de nouveaux services concurrents comme les SCP et les RMSE sont implantés), qu’il existe une grande rivalité entre les concurrents comme le prouvent les blitz publicitaires des médias et les guerres de prix, et que les consommateurs sont au courant des autres fournisseurs de services sans fil.

Le Conseil a également convenu avec le DIR, Stentor et Mobilité Canada que la mise en marché et la publicité conjointes satisfont mieux aux demandes des abonnés pour un guichet unique et des services intégrés et qu’elles permettront de fournir de façon plus rentable des services de télécommunications par voie d’économies d’échelle et de portée.

En ce qui concerne les quatre garanties contenues dans les restrictions relatives à la mise en marché conjointe visant à empêcher les compagnies de téléphone sur ligne métallique de se conférer à elles-mêmes une préférence indue ou d’en conférer à une affiliée de service cellulaire, ce qui est contraire au paragraphe 27(2) de la Loi, les vues du Conseil sont les suivantes.

Le Conseil est d’avis qu’il n’est plus utile d’interdire la mise en marché ou la publicité conjointes des services sur ligne métallique et sans fil. Il estime que le marché des services sans fil est concurrentiel et que le marché des services sur ligne métallique devient de plus en plus concurrentiel. Il juge également que les compagnies de téléphone titulaires n’ont pas de puissance commerciale dans les marchés de la publicité, de la mise en marché et de la distribution, et qu’elles ne pourraient limiter la concurrence dans le marché des télécommunications par le contrôle de la publicité, de la mise en marché ou de la distribution des produits et des services sans fil. Le Conseil estime que la mise en marché et la publicité conjointes des services sur ligne métallique et sans fil n’entraîneraient pas l’accord d’une préférence indue prévue au paragraphe 27(2) de la Loi. Il fait également remarquer que, comme condition d’abstention de réglementer les services sans fil, conformément à la décision 96-14, la fourniture de services téléphoniques mobiles sans fil raccordés au réseau téléphonique public commuté demeurerait assujettie au paragraphe 27(2) de la Loi.

Selon le Conseil, l’obligation de renvois neutres d’abonnés n’est plus utile. La Cantel détient une part importante du marché des services cellulaires, et les fournisseurs de SCP sont entrés dans le marché et ont publicisé agressivement leurs services. De l’avis du Conseil, les consommateurs sont au courant de la disponibilité des services sans fil concurrents qu’offrent d’autres fournisseurs.

Le Conseil estime également qu’une disposition distincte n’est plus utile pour une interdiction relative à l’échange de renseignements confidentiels sur les abonnés de nature délicate du point de vue de la concurrence. Il fait observer que les règles concernant les GSE assurent la protection de l’information concernant les rapports des compagnies de téléphone avec les concurrents. De plus, il existe d’autres garanties, comme celles que renferment les Modalités de service des compagnies et des conditions semblables imposées aux entreprises de services sans fil comme condition d’abstention, qui limitent l’utilisation des renseignements confidentiels sur les abonnés et fournissent une protection suffisante aux consommateurs.

Pour ce qui est de l’interdiction explicite relative à l’interfinancement des services cellulaires par des services sur ligne métallique, le Conseil est d’avis que cette interdiction est superflue. Il fait remarquer qu’à mesure que davantage de marchés des télécommunications deviennent assujettis à la concurrence et que les sources de revenus monopolistiques diminuent, il existe de moins en moins d’incitatifs à l’interfinancement anticoncurrentiel et d’occasions en ce sens.

Le Conseil fait observer que les compagnies de téléphone indépendantes font l’objet de garanties réglementaires relatives au calcul du prix de revient et qu’en outre, vu leur taille relativement petite, les compagnies de téléphone indépendantes ne pourront pas limiter indûment la concurrence dans le marché des services sans fil.

Ainsi, le Conseil conclut que les interdictions relatives à la mise en marché conjointe dans les services sur ligne métallique et sans fil contenues dans les décisions 87-13 et 92-13 devraient être retirées pour Stentor et les compagnies de téléphone indépendantes.

B. Groupement

Le Conseil signale que certaines parties ont proposé d’interdire le groupement des services monopolistiques locaux avec des services concurrentiels, tandis que d’autres ont proposé que les règles actuelles relatives au groupement pour les services locaux et concurrentiels soient maintenues et étendues, de manière à couvrir les services faisant l’objet de l’AP 97-21. Les compagnies de Stentor et Mobilité Canada ont proposé que les règles relatives au groupement soient assouplies considérablement et, en particulier, que le Conseil n’étende pas ses règles de manière, en fait, à réglementer les services autres que de télécommunications ou à réglementer de nouveau des services de télécommunications faisant l’objet d’une abstention.

De l’avis du Conseil, le cadre établi ci-dessous pour grouper des services tarifés et autres établit un équilibre approprié entre les préoccupations des concurrents en ce qui concerne la possibilité d’abus de prix anticoncurrentiels et celles des compagnies de Stentor concernant leur capacité de fournir des solutions intégrées rentables. Selon lui, le cadre donne aux compagnies de Stentor une souplesse suffisante pour répondre aux demandes des consommateurs pour un guichet unique et pour exploiter des économies d’échelle et de portée pour fournir ces services.

Le Conseil a conclu dans la décision 94-19 qu’il convient généralement de grouper des services monopolistiques et concurrentiels, et dans la décision 97-8, qu’il y a lieu de grouper des services locaux tarifés avec des services détarifés, sous réserve des conditions contenues dans les deux décisions. À son avis, ces solutions demeurent valables. Il n’est d’accord ni avec le DIR ni avec l’ACTC pour dire que les critères relatifs à la concurrence devraient être remplis avant de permettre le groupement des services locaux et concurrentiels ou encore avec AT&T Canada SI, qui a donné des seuils de concurrence devant être atteints avant que le groupement de divers types de services concurrentiels ne soit autorisé.

Le Conseil ne juge pas opportun d’ordonner l’application générale des règles relatives à la tarification du groupement établies dans les décisions 97-11 et 97-12 pour les essais commerciaux alors à l’étude. Suivant la règle de tarification établie dans ces décisions, les compagnies de Stentor pourraient tarifer à zéro les services autres que de télécommunications (ou dans le cas présent, faisant également l’objet d’une abstention). De l’avis du Conseil, cela créerait la possibilité d’établir des prix anticoncurrentiels inférieurs aux coûts et une discrimination injuste dans la fourniture d’éléments de services tarifés dans le groupe. Il souligne également que ces décisions ont spécifiquement stipulé que la règle relative à l’établissement des prix groupés visait les essais commerciaux en question.

Tel qu’indiqué précédemment, le Conseil a jugé opportun dans la décision 97-8 de permettre le groupement de services faisant l’objet d’une abstention avec des services locaux offerts par les ESLT. Même si les intervenants se sont opposés au groupement par les compagnies de Stentor de services tarifés avec des services visés par l’AP 97-21, en raison de la domination des compagnies de Stentor dans les marchés des services sur ligne métallique, le Conseil conclut, conformément à la décision 97-8, que les compagnies de Stentor ne devraient pas être empêchées de grouper les services tarifés à des services visés par l’AP 97-21, en l’occurrence les services d’une compagnie affiliée, les services d’une compagnie non affiliée et les services autres que de télécommunications offerts à l’interne par la compagnie de téléphone.

Conformément à ce qui précède, pour les services groupés incluant un ou plusieurs éléments du service tarifé et des services visés par l’AP 97-21, le service groupé doit recevoir l’approbation préalable du Conseil. En outre, pour empêcher une tarification anticoncurrentielle, le test d’imputation doit accompagner la demande d’approbation du service groupé.

Comme il en est question ci-dessus, la décision 94-19 établit un test d’imputation pour les services groupés suivant lequel le service groupé doit couvrir ses coûts, tandis que l’étude de coûts du service groupé comprend les composantes goulot établies aux taux tarifés (y compris, le cas échéant, le recouvrement des coûts de premier établissement, les frais de commutation et de regroupement ainsi que de contribution) et les coûts de la Phase II pour les autres composantes du service.

De plus, dans la décision 94-19, le Conseil a établi qu’il conviendrait de donner une souplesse accrue sur le plan de la tarification pour les arrangements s’appliquant à un abonné donné, sous réserve de garanties contre une discrimination injuste. À cet égard, il a établi un test d’imputation pour le service groupé pour un abonné donné comprenant des éléments provenant des tarifs généraux. Ce test exige que la valeur actuelle des revenus pour le service pour un abonné donné égale ou excède la somme de la valeur actuelle des revenus aux taux du Tarif général pour les éléments de service offerts suivant le Tarif général et la valeur actuelle des coûts de la Phase II pour les éléments non couverts par les taux du Tarif général.

Comme il est précisé ci-dessus, le test d’imputation pour les services groupés a été modifié dans la décision 97-8, de sorte que pour grouper le service local d’une ESLT avec un service faisant l’objet d’une abstention, les tarifs du service faisant l’objet de cette abstention doivent être établis au moyen des coûts de la Phase II et, à moins que le service local ne soit un service local de résidence monoligne au-dessous du prix coûtant, le tarif du service local doit être établi de manière que le prix coûtant des installations essentielles soient aux taux tarifés avec d’autres composantes locales aux coûts de la Phase II.

Pour le test d’imputation à l’égard du service groupé incluant un ou plusieurs éléments de services tarifés et des services visés par l’AP 97-21, le Conseil estime que le coût des services essentiels (pour les fins de la présente décision inclut ceux qui sont mentionnés comme services « goulot » dans la décision 94-19) utilisés dans la fourniture du service groupé doit être établi aux taux tarifés. Conformément à la décision 97-20, les services de liaison spécialisée intercirconscriptions doivent être établis aux taux tarifés, pour les routes qui demeurent tarifées. Le coût du service de résidence monoligne au-dessous du prix coûtant doit être établi aux taux tarifés. Les autres composantes et éléments de services doivent également être tarifés au moyen des coûts de la Phase II. En dernier lieu, les coûts d’acquisition d’un élément de service dans le groupe acquis d’une affiliée ou d’une compagnie non affiliée doivent être inclus dans le test d’imputation.

Le Conseil estime également qu’une des conditions du groupement contenues dans la décision 94-19, en particulier, que « la revente du service groupé soit autorisée » devrait également continuer de s’appliquer. Le Conseil fait valoir que les parties n’ont pas examiné spécifiquement cette question. Toutefois, il ne juge pas que cette exigence à l’égard de la revente devrait s’appliquer aux cas de groupement de services de télécommunications tarifés et de services autres que les télécommunications (par ex., les services de radiodiffusion). Selon lui, les compagnies de Stentor ne sont pas dominantes dans la fourniture de services autres que de télécommunications et que d’autres fournisseurs de services seront en mesure de grouper des services autres que de télécommunications avec leurs services de télécommunications respectifs. Il souligne également qu’en vertu du Règlement sur la distribution de radiodiffusion, DORS/97-555, entré en vigueur le 1er janvier 1998, la revente de services à large bande est autorisée mais pas exigée.

Le Conseil signale que, contrairement aux vues exprimées par Stentor et la TCI, l’obligation de faire approuver au préalable les tarifs des services groupés incluant un ou plusieurs éléments de services de télécommunications tarifés avec d’autres éléments de services ne constitue pas une réglementation des services non tarifés. Il précise qu’on peut s’attendre que les compagnies de Stentor aient une puissance commerciale en ce qui concerne les services qui demeurent tarifés. Conséquemment, on peut s’attendre que les compagnies de Stentor aient une puissance commerciale dans la fourniture de services groupés contenant des éléments tarifés. L’approbation préalable obligatoire garantit qu’aucune préférence indue n’est accordée relativement à la facturation d’éléments de services tarifés dans le groupe.

Le Conseil fait également remarquer que cette démarche n’exige pas que les affiliées des compagnies de téléphone (par ex., de radiodiffusion, sans fil) fassent des études de coûts, comme Mobilité Canada l’a suggéré. Il appartiendra à la compagnie de téléphone de prouver que les coûts d’acquisition de ces services sont couverts.

VI AUTRES INSTANCES

Le Conseil souligne que par suite de la présente décision, deux instances en suspens ont été annulées : (1) l’avis public Télécom CRTC 95-32 du 15 juin 1995 intitulé Mise en marché conjointe par les compagnies de téléphone et les filiales ou activités de services cellulaires et de services téléphoniques publics sans fil et (2) la demande de la Cantel, en date du 25 octobre 1996, en révision et modification de l’approbation par le Conseil datée du 16 septembre 1996 de la proposition de la Maritime Tel & Tel Limited visant à fermer ses téléboutiques et à distribuer ses services par l’entremise du réseau de détaillants de services cellulaires de la MT&T Mobility.

Compte tenu de l’évolution de la concurrence dans le marché de l’équipement terminal, le Conseil est d’avis préliminaire qu’il convient de retirer la restriction relative au groupement de l’équipement terminal avec des éléments de service réseau. Cette démarche est conforme aux conclusions qu’il a tirées dans la décision 97-19. En conséquence, les parties intéressées sont priées de déposer des observations, au plus tard le 25 mai 1998. Les parties n’ayant pas déposé d’observations mais désirant déposer une réplique doivent en informer le Conseil par écrit, au plus tard le 25 mai 1998. Le Conseil dressera une liste des parties qui ont déposé des observations ou qui l’en ont informé et il enverra la liste aux parties qui y figurent. Après avoir reçu la liste, les parties ayant déposé des observations sont priées de faire tenir copie de leurs observations aux autres parties figurant sur la liste au plus tard le jour d’affaires suivant. Les personnes désirant déposer une réplique peuvent le faire, au plus tard le 22 juin 1998 et elles doivent en signifier copie aux parties dont le nom figure sur la liste. Les documents devant être déposés ou signifiés doivent être reçus, non pas simplement envoyés, au plus tard aux dates indiquées. Outre les dépôts en version imprimée, les parties sont encouragées à déposer auprès du Conseil des versions électroniques de leurs mémoires, conformément aux Lignes directrices provisoires pour le traitement des fichiers de télécommunications lisibles par machine du Conseil, en date du 30 novembre 1995. L'adresse du courrier électronique du Conseil sur Internet pour les documents déposés par voie électronique est public.telecom@crtc. gc.ca. On peut accéder aux documents déposés par voie électronique au site du Conseil sur Internet, à http://www.crtc.gc.ca

Pour ce qui est des services groupés pour un abonné donné, le Conseil estime qu’il conviendrait d’examiner si le cadre établi dans la décision 94-19 devrait s’appliquer aux services tarifés groupés avec des services faisant l’objet d’une abstention et des services tarifés groupés avec des services visés par l’AP 97-21. En conséquence, les parties intéressées sont invitées à soumettre des observations, au plus tard le 25 mai 1998 indiquant dans quelle mesure ces arrangements pour un abonné donné conviennent et, le cas échéant, si le test d’imputation devrait être le même que celui qui est prescrit dans la décision 94-19 pour les services groupés pour un abonné donné. Celles qui n’ont pas déposé d’observations mais qui désirent déposer une réplique sont priées d’en informer le Conseil, par écrit, au plus tard le 25 mai 1998. Le Conseil dressera une liste des personnes qui ont déposé des observations ou qui l’en ont informé et il enverra la liste aux parties dont le nom y figure. Après avoir reçu la liste, les personnes qui ont déposé des observations sont priées de signifier copie de leurs observations aux autres parties de la liste au plus tard le jour d’affaires suivant. Toute personne désirant déposer une réplique peut le faire, au plus tard le 22 juin 1998 et elle doit en signifier copie aux parties dont le nom figure sur la liste. Les documents devant être déposés ou signifiés doivent être reçus, non pas simplement envoyés, au plus tard aux dates indiquées. En plus des versions imprimées, les parties sont encouragées à déposer des versions électroniques de leurs mémoires auprès du Conseil, tel qu’indiqué dans le paragraphe précédent.

La secrétaire générale
Laura M. Talbot-Allan

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