Décision de télécom CRTC 2022-150

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Ottawa, le 9 juin 2022

Dossier public : 8662-B2-202105106

Bell Canada – Demande de révision et de modification de l’ordonnance de télécom 2021-182 concernant l’acheminement des appels 800/888 des entreprises de services locaux concurrentes

Sommaire

Bell Canada a demandé au Conseil d’examiner et de modifier et de suspendre l’ordonnance de télécom 2021-182. Le Conseil conclut qu’il n’y a pas de doute important quant à l’exactitude de l’ordonnance de télécom 2021-182 en raison d’erreurs de droit ou de fait et de droit et refuse la demande de Bell Canada.

Compte tenu des conclusions du Conseil concernant la demande de révision et de modification, la demande de suspension de la mise en œuvre de l’ordonnance de télécom 2021-182 est sans objet.

Contexte

  1. Le 2 décembre 2019, le Conseil a publié la décision de télécom 2019-390, en raison d’une demande de Rogers Communications Canada Inc. (RCCI) concernant l’acheminement du trafic sans frais du réseau de RCCI destiné aux clients des numéros de téléphone sans frais de Bell Canada. Ce trafic était auparavant envoyé à Bell Canada sur des circuits de facturation-conservation entre les deux compagnies, et Bell Canada utilisait sa base de données afin de déterminer l’entreprise de numéro sans frais destinataire pour RCCI, puis acheminait le trafic interurbain à la destination prévue. Cependant, RCCI avait mis au point sa propre base de données afin de déterminer l’entreprise de services interurbains à qui le trafic sans frais doit être acheminé. Ce trafic peut être acheminé directement vers les fournisseurs de services sans frais destinataires au moyen de circuits sans frais unidirectionnels déployés par le fournisseur de services sans frais vers les réseaux de RCCI. RCCI avait conclu ce genre d’ententes avec d’autres entreprises de services locaux concurrentes (ESLC) et entreprises de services intercirconscriptions (ESI), à l’exception de Bell Canada.
  2. Dans la décision, le Conseil a ordonné à Bell Canada de déployer des circuits interurbains unidirectionnels connectés aux commutateurs de RCCI dans le territoire d’exploitation de Bell Canada dans lequel RCCI fournit également des services. Ces circuits devaient être utilisés pour acheminer le trafic sans frais en provenance du réseau de RCCI vers les clients des numéros de téléphone sans frais de Bell Canada. Cette entente permet à RCCI de profiter de sa nouvelle base de données et de sa capacité d’identification d’entreprise destinataire afin de réduire les coûts d’interconnexion locale et de rentabiliser son investissement dans les services d’acheminement d’appels sans fraisNote de bas de page 1. Ces circuits devaient être mis en place dans les 150 jours suivant la date de publication de la décision de télécom 2019-390. Le Conseil a également ordonné à Bell Canada de déposer des pages de tarif proposées indiquant que Bell Canada recevrait le trafic sans frais en provenance de RCCI sur les circuits interurbains.
  3. Le 20 décembre 2019, Bell Canada a déposé une demande de révision et de modification et de suspension de la décision de télécom 2019-390. Dans sa demande, Bell Canada a argué que le Conseil avait commis une erreur de fait et de droit en n’appliquant pas correctement les Instructions de 2006Note de bas de page 2. Dans la décision de télécom 2020-226, le Conseil a refusé à la fois la demande de suspension et la demande de révision et de modification. Bell Canada a reçu la consigne d’achever le déploiement des circuits sans frais d’ici le 17 août 2020 et de déposer des pages de tarifs révisées d’ici le 20 juillet 2020.
  4. Le 20 juillet 2020, Bell Canada a déposé des pages de tarif révisées (avis de modification tarifaire [AMT] 7616 et 7616A)Note de bas de page 3 avec le libellé proposé pour l’acceptation du trafic sans frais de RCCI destiné aux clients des numéros de téléphone sans frais de Bell CanadaNote de bas de page 4. L’AMT a reçu l’approbation provisoire du Conseil dans l’ordonnance de télécom 2020-244.
  5. Le Conseil a approuvé de manière définitive l’AMT 7616 et l’AMT 7616A, sous réserve de modifications, dans l’ordonnance de télécom 2021-182. Plus précisément, le Conseil a modifié le libellé du tarif i) en supprimant la référence qui limitait l’entente aux clients de détail de RCCI et ii) en remplaçant cette référence par une référence qui rendait l’entente applicable à toute ESLC qui développe un service concurrentiel d’acheminement d’appels sans fraisNote de bas de page 5.

Demande

  1. Le 23 juillet 2021, Bell Canada a déposé une demande de révision, de modification et de suspension de l’ordonnance de télécom 2021-182 en vertu des articles 52 et 62 de la Loi sur les télécommunications (Loi). Bell Canada a indiqué qu’il existe un doute important quant à l’exactitude de l’ordonnance de télécom 2021-182, car le Conseil a commis des erreurs de fait et de droit dans cette ordonnance. Par conséquent,
    Bell Canada a demandé au Conseil d’annuler l’obligation pour Bell Canada de déployer de nouveaux circuits interurbains à toute entreprise de services locaux (ESL) autre que RCCI.
  2. Bell Canada a également demandé au Conseil de suspendre l’ordonnance de télécom 2021-182 en ce qui concerne les circuits sans frais avec des ESL autres que RCCI jusqu’à ce que le Conseil ait statué sur la demande.
  3. Bell Canada a indiqué que l’ordonnance de télécom 2021-182 a modifié le libellé du tarif proposé par Bell Canada de deux façons. Premièrement, le libellé qui a reçu l’approbation provisoire limitait le trafic admissible au trafic provenant des propres utilisateurs finals de détail de RCCI, et le Conseil a supprimé cette référence dans le libellé du tarif final au motif que cette restriction ne figurait pas dans la décision de télécom 2019-390. Bell Canada n’était pas d’accord avec cette suppression, mais a reconnu que le Conseil avait le pouvoir discrétionnaire d’effectuer ce changement, car celui-ci représente l’interprétation par le Conseil de ses propres conclusions dans la décision de télécom 2019-390. Par conséquent, ce changement ne faisait pas partie de la demande de révision et de modification de Bell Canada.
  4. Deuxièmement, le Conseil a étendu la conclusion rendue dans la décision de télécom 2019-390 à la relation de Bell Canada (et seulement de Bell Canada) avec toute ESL qui a mis au point un service de transfert d’appel sans frais concurrentiel au moyen d’un simple processus de mise en œuvre de tarifs.
  5. Bell Canada a soutenu que le Conseil a commis à la fois une erreur de droit ainsi qu’une erreur de fait et de droit. En particulier, Bell Canada a soutenu que le Conseil a commis une erreur de droit en :
    • ayant omis de donner à Bell Canada un avis approprié de son intention d’élargir la portée de l’instance;
    • utilisant une instance de mise en œuvre de tarif pour réviser ses décisions politiques précédentes;
    • concluant que la possibilité pour Bell Canada de répondre aux observations hors champ lui a permis de bénéficier d’une équité procédurale suffisante;
    • ne réglementant pas de manière neutre sur le plan de la concurrence en appliquant l’exigence de recevoir le trafic sans frais de toutes les ESL à
      Bell Canada seulement, ce qui est contraire aux Instructions de 2006 et aux Instructions de 2019Note de bas de page 6 (collectivement les Instructions).
  6. Bell Canada a ajouté que le Conseil a commis une erreur de fait et de droit en :
    • s’appuyant sur l’ampleur de la demande de RCCI qui a été signifiée aux parties intéressées et qui a mené à la décision de télécom 2019-390;
    • étendant les conclusions de la décision de télécom 2019-390 pour qu’elles s’appliquent au-delà de RCCI;
    • s’appuyant sur les observations hors champ des intervenants.
  7. Bell Canada a suggéré que si le Conseil souhaite toujours élargir la portée de la décision de télécom 2019-390, la bonne approche serait d’entamer une instance de justification ou une autre instance générale. Cette instance porterait sur la question de savoir si une entente d’accès sans frais semblable à celle conclue avec RCCI devrait être disponible pour toutes les ESL ou si toutes les ESL disposant d’un service d’acheminement d’appels sans frais devraient être tenues de déployer sur demande des circuits unidirectionnels sans frais vers d’autres ESL disposant de services d’acheminement d’appel sans frais.
  8. Dans sa demande, Bell Canada a également fait remarquer que, bien qu’il n’y ait pas de demandes en cours à ce moment-là de la part d’autres ESL pour qu’elle mette en place des circuits unidirectionnels sans frais, elle craignait qu’on lui demande de conclure de telles ententes d’interconnexion avec des ESL autres que RCCI à l’avenir.
  9. Le Conseil a reçu des interventions de Distributel Communications Limited (Distributel), de Québecor Média inc. au nom de Vidéotron ltée. (Vidéotron) et de TELUS Communications Inc. (TCI).

Critères de révision et de modification

  1. Dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, le Conseil a précisé les critères qu’il utiliserait pour évaluer les demandes de révision et de modification déposées en vertu de l’article 62 de la Loi. En particulier, le Conseil a indiqué que, pour qu’il puisse exercer sa discrétion en vertu de l’article 62 de la Loi, les demandeurs doivent prouver qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale, par exemple en raison i) d’une erreur de droit ou de fait, ii) d’un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision, iii) du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans l’instance initiale, ou iv) d’un nouveau principe découlant de la décision.

Question

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner la question suivante dans la présente décision :
    • Le Conseil a-t-il commis une erreur de droit ou de fait et de droit dans l’ordonnance de télécom 2021-182?

Le Conseil a-t-il commis une erreur de droit ou de fait et de droit dans l’ordonnance de télécom 2021-182?

Positions des parties

Bell Canada
  1. Bell Canada a indiqué que le Conseil ne lui a jamais donné un avis approprié l’informant que la mise en œuvre du tarif de la décision de télécom 2019-390 serait élargie afin d’exiger que Bell Canada reçoive du trafic sans frais sur des circuits unidirectionnels sans frais de toute ESL (autre que RCCI) qui a la capacité d’interroger un service de transfert d’appel sans frais. Bell Canada a indiqué que cela allait au-delà des conclusions du Conseil dans la décision de télécom 2019-390, modifiant sa portée et celle du processus de mise en œuvre du tarif qui lui est associé. Bell Canada a fait remarquer que les conclusions du Conseil voulant que la disposition soit appliquée de façon plus générale à toutes les ESL apporteraient de la clarté et réduiraient le risque d’autres différends et de demandes semblables à l’avenir, en plus de réduire le fardeau réglementaire tant pour le Conseil que pour l’industrie. Toutefois, Bell Canada a contesté la justification du Conseil pour cet élargissement de la décision de télécom 2019-390, en faisant remarquer que de tels aspects pratiques ne peuvent l’emporter sur le droit de Bell Canada à la justice naturelle et à l’équité procédurale.
  2. Bell Canada a indiqué que le Conseil a mal interprété le processus tarifaire en adoptant la position selon laquelle l’AMT en vue de mettre en œuvre les directives de la décision de télécom 2019-390 a amorcé une instance qui a permis aux intervenants de formuler des observations concernant la possibilité d’élargir le libellé proposé au-delà de RCCI. Bell Canada a soutenu que l’AMT 7616 n’existe que parce que le Conseil a ordonné à la compagnie, dans la décision de télécom 2019-390, de déposer un libellé de tarif proposé indiquant qu’elle recevrait le trafic sans frais de RCCI à partir des commutateurs de RCCI sur des circuits sans frais.
  3. Bell Canada a fait remarquer que le Conseil n’a pas amorcé d’instances de justification ou d’avis de consultation afin d’examiner si ses conclusions dans la décision de télécom 2019-390 devraient être élargies. À cet égard, Bell Canada a argué que le Conseil a commis une erreur de droit en transformant un AMT en une instance de révision et de modification. Bell Canada a fait valoir que, bien que le Conseil ait la compétence pour le faire, il doit le faire de façon transparente, conformément à la Loi, aux Règles de pratique et de procédure du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, et aux principes de justice fondamentale.
  4. Bell Canada n’était pas d’accord avec l’observation du Conseil, dans l’ordonnance de télécom 2021-182, selon laquelle Bell Canada avait reçu toutes les interventions et avait eu l’occasion de répondre au dossier à la question entourant le libellé de son tarif, et que l’équité procédurale associée à l’instance avait été respectée. Bell Canada a argué que le raisonnement du Conseil était erroné, ajoutant que dans ses observations initiales en réplique, Bell Canada avait déclaré que les demandes pour une application élargie étaient hors de portée. Dans ses deuxièmes observations en répliqueNote de bas de page 7, Bell Canada a de nouveau rejeté certaines observations d’intervenants au motif qu’elles étaient hors de portée. Bell Canada a soutenu que le Conseil avait commis une erreur en concluant que cette deuxième réplique remédiait au manquement à l’équité procédurale.
  5. De plus, Bell Canada a indiqué que la portée de l’instance est définie par le dépôt initial, mais qu’elle peut être modifiée par la suite si le Conseil indique clairement qu’il veut changer la portée d’une instance, par exemple en modifiant un avis de consultation. Les intervenants ne modifient toutefois pas la portée de l’instance, à moins et jusqu’à ce que le Conseil l’indique. Bell Canada a argué que nulle part dans les instances menant à la décision de télécom 2019-390 ou à l’ordonnance de télécom 2021-182 le Conseil n’a indiqué que l’affaire était autre chose qu’un différend entre Bell Canada et RCCI.
  6. De plus, Bell Canada a soutenu que son AMT, dans lequel la compagnie proposait un libellé propre à RCCI, avait reçu une approbation provisoire et que, dans l’ordonnance d’approbation provisoire, le Conseil n’avait fait aucune référence à l’élargissement possible de l’obligation de se raccorder à d’autres ESL que RCCI. À aucun moment au cours de l’instance concernant la mise en œuvre du tarif le Conseil n’a indiqué à Bell Canada que l’instance était autre chose que l’élaboration d’un libellé de tarif afin de refléter la conclusion concernant Bell Canada et RCCI dans la décision de télécom 2019-390.
  7. Bell Canada a soutenu que si l’ordonnance de télécom 2021-182 visait à établir une nouvelle politique de l’industrie, la neutralité concurrentielle exigerait qu’elle s’applique à tous les fournisseurs qui offrent un service de transfert d’appel sans frais et pas seulement à Bell Canada, conformément aux Instructions. Par conséquent,
    Bell Canada a soutenu que le Conseil avait commis une erreur de droit en omettant de réglementer de manière neutre sur le plan de la concurrence.
  8. Selon Bell Canada, l’ordonnance de télécom 2021-182 ne s’applique pas symétriquement à tous les fournisseurs se trouvant dans une situation semblable.
    Bell Canada a indiqué que si le Conseil souhaitait élargir la portée de la décision de télécom 2019-390, la bonne façon de le faire serait de recourir à une instance de justification ou à une autre instance générale. Bell Canada a argué qu’il s’agit de la seule façon pour le Conseil d’obtenir les renseignements manquants dans l’ordonnance de télécom 2021-182 afin de prendre une décision éclairée sur la possibilité d’étendre à toutes les ESL les conclusions qu’il a tirées dans la décision de télécom 2019-390.
  9. Bell Canada a fait valoir que le type de renseignements qui pourraient être obtenus dans le cadre d’une telle instance et qui seraient utiles comprend les détails pratiques du service d’acheminement sans frais des ESL, notamment la robustesse, l’exactitude et la fiabilité de ces services. Bell Canada a indiqué que le service de transfert des appels sans frais d’une ESL devrait faire l’objet d’un examen minutieux avant d’être rendu obligatoire. Bell Canada a précisé qu’à titre d’ESI, elle serait critiquée par ses clients du service sans frais pour les problèmes de prestation ou les interruptions de service.
  10. Bell Canada a argué que certains des processus actuels de l’industrie et les gabarits d’ententes d’ESL-ESI devraient être modifiés pour tenir compte de l’accès obligatoire parce que la relation entre les ESI passe d’une relation où une ESI accepte librement les ententes d’interconnexion à une relation fondée sur des ententes obligatoires. Bell Canada a avancé que cela a des répercussions sur les tarifs et certaines des exigences des ententes ESL-ESI. Bell Canada a soulevé d’autres préoccupations concernant les coûts d’interconnexion, soit qu’ils pourraient être plus élevés pour Bell Canada en raison de l’obligation de conclure des ententes d’interconnexion dans les locaux des ESLC lorsque ces locaux sont loués, soumettant ainsi Bell Canada aux exigences et aux coûts du propriétaire.
  11. Bell Canada a soutenu que le Conseil a commis une erreur de fait et de droit en considérant l’offre du service d’autres acteurs de l’industrie comme une justification de l’élargissement de la portée de l’instance. Bell Canada a fait valoir que la demande de RCCI ayant mené à la décision de télécom 2019-390 était une demande spécifique de redressement limitée à Bell Canada. Bell Canada a ajouté que le fait que d’autres parties aient reçu une copie de la demande de RCCI n’avait aucune incidence sur la portée de la demande, la décision de télécom 2019-390 ou l’ordonnance de télécom 2021-182 subséquente.
  12. Bell Canada a soutenu que le Conseil a utilisé de façon inappropriée une ordonnance du Conseil pour prendre une décision stratégique sur la question de savoir si le tarif devrait s’appliquer de façon plus générale au trafic sans frais provenant d’autres ESL.
Intervenants
Distributel
  1. Distributel a indiqué que la demande de Bell Canada devrait être rejetée. Distributel a soutenu que l’ordonnance de télécom 2021-182 justifiait suffisamment que les exigences en matière d’équité procédurale avaient été respectées. Cette justification comprenait les éléments suivants : i) la capacité d’interroger directement une base de données de numéros de téléphone sans frais représente un changement important dans les circonstances; ii) le dépôt de l’AMT représentait le début d’une nouvelle instance; iii) tous les intervenants ont soulevé des objections au libellé du tarif de Bell Canada et ont proposé un autre libellé qui s’appliquerait à la disposition tarifaire de façon plus générale; et iv) Bell Canada a eu l’occasion de répondre à toutes les observations des intervenants, y compris celles voulant que la disposition tarifaire devrait s’appliquer de façon plus générale.
  2. Distributel a soutenu que le constat de Bell Canada selon lequel les questions soulevées par les intervenants sont hors de portée ne les rend pas comme telles pour autant. Le choix de Bell Canada, et son choix à elle seule, de ne pas répondre à certaines observations ne peut être utilisé pour prétendre qu’il y a eu un manquement à l’équité procédurale qui a violé le droit de Bell Canada à la justice fondamentale.
  3. Distributel n’était pas d’accord avec la proposition de Bell Canada selon laquelle les dispositions tarifaires ne devraient pas s’appliquer aux autres ESL parce que Bell Canada prétendait que cela dépassait la portée de l’instance. Selon Distributel, le point de vue de Bell Canada n’est pas conforme aux conclusions générales du Conseil dans les décisions de télécom 2019-390 et 2020-226. Distributel a indiqué que, dans ces décisions, le Conseil a fait remarquer qu’il avait envisagé, dans la décision de télécom 97-8, qu’il pourrait y avoir d’autres ententes pour l’acheminement des appels sans frais. Distributel a également indiqué que le Conseil a fait remarquer dans la décision de télécom 2020-226 comment ses conclusions dans la décision de télécom 2019-390 étaient harmonisées avec le cadre réglementaire des ententes d’interconnexion entre toutes les ESL et les ESI. Avec ces conclusions générales, Distributel a ajouté qu’il était logique que les intervenants se demandent si le libellé proposé par Bell Canada était trop restrictif, étant donné la nature générale des conclusions antérieures du Conseil.
  4. Distributel a contesté l’argument de Bell Canada selon lequel le Conseil a commis une erreur de fait et de droit en arrivant à des conclusions stratégiques générales qui ne s’appliquaient qu’à Bell Canada. Distributel a indiqué que cet argument avait été examiné par le Conseil dans la décision de télécom 2020-226, dans laquelle le Conseil a examiné et rejeté des arguments semblables, et a fait remarquer que RCCI avait été en mesure de conclure des ententes semblables avec d’autres entreprises de services locaux titulaires. Distributel a ajouté que puisque l’acheminement du trafic sans frais du réseau de RCCI à Bell Canada suit les pratiques de l’industrie en matière d’acheminement du trafic sans frais vers les ESI, aucune exigence particulière n’est imposée à Bell Canada. Distributel a indiqué que pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus, il n’est pas nécessaire de tenir une instance de justification afin de déterminer si le Conseil devrait appliquer ses conclusions à tous les participants de l’industrie concernés.
  5. Distributel a indiqué que, puisque le Conseil a conclu que Bell Canada était la seule ESL qui avait refusé de conclure une entente avec RCCI, même si la demande de RCCI était conforme aux règles, pratiques et exigences bien établies de l’industrie, il était raisonnable pour le Conseil de s’attendre à ce qu’il y ait d’autres différends et demandes de la part d’autres ESLC ayant des capacités semblables à celles de RCCI. Distributel a ajouté que ces attentes ne sont pas hypothétiques étant donné les observations de Bell Canada dans sa demande. À cet égard, les conclusions du Conseil dans l’ordonnance de télécom 2021-182 apportent de la clarté et réduisent les possibilités de différends et de demandes à l’avenir. On peut donc s’attendre à ce que les conclusions du Conseil réduisent la charge réglementaire tant pour le Conseil que pour l’industrie.
Vidéotron
  1. Vidéotron estime que la décision du Conseil d’ordonner une application plus large des dispositions tarifaires dans l’ordonnance de télécom 2021-182 était appropriée. Elle a fait remarquer qu’un certain nombre d’ESLC sont intervenues dans la série d’instances qui ont mené à l’ordonnance de télécom 2021-182, ce qui, selon Vidéotron, souligne la nécessité de stimuler l’innovation et la compétitivité du marché. Selon Vidéotron, cela se fera en encourageant les autres ESL à envisager de mettre en place leurs propres services d’acheminement d’appel sans frais. Pour celles qui ne le font pas, Vidéotron a indiqué qu’elles auraient potentiellement plus d’options pour acheminer le trafic sans frais généré sur leurs réseaux. Un tel résultat pourrait être bénéfique aux consommateurs qui profiteraient d’une concurrence plus équitable entre les ESL pour l’acheminement des appels sans frais.
  2. Vidéotron a fait remarquer deux autres avantages, soit de réduire la congestion du réseau de Bell Canada et de rendre cette dernière plus réceptive aux idées en vue d’améliorer la qualité de ses services.
  3. Vidéotron a précisé que si le Conseil est favorable à la demande de Bell Canada, la question de savoir si les dispositions de l’AMT devraient s’appliquer de façon plus large devrait faire l’objet d’une instance de justification, qui devrait être publiée en même temps que la décision sur la demande de révision et de modification.
TCI
  1. TCI a indiqué qu’elle s’oppose à la demande de révision et de modification de
    Bell Canada. Bien que TCI soit d’accord avec les affirmations de Bell Canada sur la façon dont la portée d’une instance peut être élargie, TCI a soutenu que ces considérations ne s’appliquent pas dans ce cas-ci. TCI a ajouté que l’ordonnance de télécom 2021-182 n’a été publiée ni en réponse à la décision de télécom 2019-390 ni en réponse à la demande de RCCI ayant mené à cette décision.
  2. TCI a fait valoir qu’il y avait deux directives distinctes dans la décision de télécom 2019-390. La première était une directive pour le raccordement de circuits sans frais entre Bell Canada et RCCI. La seconde visait le dépôt d’un AMT indiquant que Bell Canada recevrait le trafic sans frais provenant de RCCI et destiné aux clients des numéros de téléphone sans frais de Bell Canada sur les circuits interurbains. TCI a indiqué que l’ordonnance de télécom 2021-182 a été publiée conformément à l’AMT de Bell Canada, et que l’interprétation du langage inclus dans cet AMT relève bien de la portée d’une instance tarifaire.
  3. TCI a indiqué que tous les arguments de la demande de Bell Canada sont axés sur la prémisse selon laquelle, en modifiant le libellé du tarif, le Conseil a élargi la portée de la décision de télécom 2019-390 pour inclure toutes les ESLC. TCI a soutenu que cette prémisse est incorrecte et que, par conséquent, la conclusion de Bell Canada selon laquelle il existe un doute important quant à l’exactitude de l’ordonnance de télécom 2021-182 est également incorrecte.
  4. Selon TCI, l’hypothèse de Bell Canada selon laquelle le Conseil a ordonné à cette dernière de s’interconnecter avec d’autres ESL sans connaître les réseaux ou les niveaux de trafic est injustifiée. TCI a indiqué que le Conseil est parfaitement conscient du fait qu’une ordonnance d’interconnexion ne peut être donnée qu’en tenant compte des particularités des réseaux des parties et du trafic entre eux.
  5. De plus, TCI a indiqué que le libellé exclusif proposé par Bell Canada pourrait créer de l’incertitude chez les autres ESLC qui pourraient conclure que l’entente n’est offerte qu’à RCCI. Bell Canada pourrait aussi conclure qu’elle n’a aucune obligation de négocier raisonnablement des ententes semblables avec d’autres ESL. TCI a indiqué que rien dans l’ordonnance de télécom 2021-182 n’oblige Bell Canada à s’interconnecter avant ces négociations. TCI a ajouté que le Conseil était au courant d’au moins une autre ESLC (soit TCI) qui est intéressée par une telle entente avec Bell Canada.
  6. TCI a indiqué que le Conseil a reconnu que s’il acceptait le libellé proposé par
    Bell Canada, qui limitait l’application du tarif à RCCI seulement, d’autres modifications au tarif seraient nécessaires chaque fois que Bell Canada mettrait en œuvre une interconnexion. Il en résulterait un fardeau inutile qui retarderait les interconnexions et les avantages qui en découlent pour les ESL.
  7. TCI dispose d’un tarif approuvé pour l’acheminement des appels 800/888 qui établit les tarifs pour déterminer l’entreprise sans frais et, à toutes fins pratiques, le libellé du tarif de TCI est le même que celui du tarif de l’ordonnance de télécom 2021-182. TCI a indiqué que le Conseil révise le texte restrictif pour qu’il s’applique de façon plus générale afin de s’assurer que le tarif de Bell Canada n’entre pas en conflit avec le tarif approuvé de TCI.
  8. TCI a reconnu l’allégation de Bell Canada selon laquelle elle n’a pas reçu un avis approprié indiquant que la portée de l’instance tarifaire avait changé. TCI a convenu qu’un avis en bonne et due forme aurait été requis si la portée de l’instance avait été élargie, et que la portée ne peut être modifiée uniquement par les soumissions des intervenants. TCI était d’accord avec Bell Canada comme quoi l’équité procédurale de base exige que le Conseil communique expressément aux parties qu’il a l’intention d’envisager de prendre une décision sur un sujet ou une question nouvellement soulevée.
  9. Toutefois, TCI a précisé que, dans ce cas, le Conseil n’a pas élargi la portée de l’instance, mais qu’il a plutôt étudié le libellé approprié compte tenu du tarif approuvé de TCI, des intérêts des autres ESL et de l’efficacité du processus de réglementation, tous ces éléments faisant partie de la portée d’une instance tarifaire. De plus, TCI a argué que l’ordonnance de télécom 2021-182 n’exigeait pas de nouvelles ententes entre Bell Canada et d’autres parties.
  10. TCI n’a pas accepté l’argument de Bell Canada selon lequel cette dernière faisait l’objet d’une discrimination en raison de l’élargissement de la conclusion du Conseil pour que l’entente bilatérale entre Bell Canada et RCCI soit entre Bell Canada et toutes les ESL. TCI a reconnu l’observation de RCCI selon laquelle Bell Canada est la seule ESL qui a refusé de négocier une entente de service sans frais avec RCCI. En tant que répondant à l’instance menant à la décision de télécom 2019-390, Bell Canada était la seule cible de la mesure corrective.
Observations en réplique de Bell Canada
  1. Bell Canada a indiqué que l’AMT n’existe qu’en raison de l’ordonnance du Conseil dans la décision de télécom 2019-390. Bell Canada a affirmé qu’elle n’avait pas entamé d’instance afin de déterminer si elle devait faire quelque chose de plus que ce qui lui avait été ordonné dans la décision de télécom 2019-390. De même, le Conseil n’a pas entamé d’instance afin d’examiner si ses conclusions dans la décision de télécom 2019-390 devraient être élargies.
  2. Bell Canada n’était pas d’accord avec l’argument de Distributel selon lequel, puisque la demande de RCCI à Bell Canada de déployer des circuits interurbains unidirectionnels reflète des règles, des pratiques et des exigences bien établies dans l’industrie, Bell Canada devrait se conformer à de telles demandes de la part de toute ESL. Bell Canada a argué qu’aucune ESI n’est tenue de déployer des circuits interurbains unidirectionnels vers une ESL, et que ce type d’entente devrait être laissé au choix de l’ESI. Bell Canada a indiqué que si l’ordonnance de télécom 2021-182 est maintenue, elle impose à Bell Canada, et seulement à Bell Canada, une obligation positive d’interconnexion sur demande en tant que cliente d’une ESL.

Analyse du Conseil

  1. Dans l’AMT 7616 et l’AMT 7616A, qui ont été approuvées provisoirement dans l’ordonnance de télécom 2020-244, Bell Canada a proposé le libellé suivant pour la réception du trafic sans frais sur ses circuits unidirectionnels sans frais reliés à des commutateurs RCCI :

    La compagnie recevra le trafic sans frais de Rogers Communications Canada Inc. (RCCI) provenant des utilisateurs finals de détail de RCCI destinés aux clients des numéros de téléphone sans frais de l’entreprise au moyen des circuits interurbains unidirectionnels déployés aux commutateurs de RCCI. [Traduction]

  2. Dans l’ordonnance de télécom 2021-182, le Conseil a révisé cette formulation comme suit :

    La compagnie recevra le trafic sans frais en provenance de Rogers Communications Canada Inc. (RCCI) des utilisateurs finals de détail de RCCI, peu importe sa provenance, destiné aux clients des numéros de téléphone sans frais de la compagnie au moyen des circuits interurbains unidirectionnels sans frais déployés vers les commutateurs de RCCI dans le ou les réseau(x) du TSLC [entreprise de services locaux concurrente]Note de bas de page 8.

  3. Le Conseil estime que les questions soulevées par Bell Canada dans sa demande peuvent être regroupées en deux grandes préoccupations :
    • si le Conseil a respecté les principes de justice naturelle et a accordé à
      Bell Canada une équité procédurale dans l’instance ayant mené à l’ordonnance de télécom 2021-182;
    • si la procédure de mise en œuvre du tarif était l’instance appropriée pour les conclusions que le Conseil a rendues en ce qui concerne la modification de l’étendue du libellé du tarif.
Équité procédurale
  1. Bell Canada a indiqué qu’elle n’avait pas reçu un avis approprié l’informant que l’instance tarifaire serait élargie afin d’exiger que la compagnie reçoive du trafic sans frais de toute ESLC (autre que RCCI) sur des circuits unidirectionnels sans frais. Le Conseil reconnaît l’importance de respecter les principes de justice fondamentale et d’équité procédurale en fournissant un avis aux demandeurs lorsqu’elle détermine qu’il serait approprié d’élargir la portée d’une instance.
  2. Bell Canada a fait valoir que le Conseil a utilisé de façon inappropriée une ordonnance du Conseil pour prendre une décision stratégique sur la question de savoir si le tarif devrait s’appliquer de façon plus générale au trafic sans frais provenant d’autres ESLC. Le Conseil n’accepte pas l’argument de Bell Canada selon lequel les modifications apportées par le Conseil au libellé du tarif ont eu pour effet d’élargir la portée de l’instance sans procédure équitable. Par conséquent, le Conseil estime que Bell Canada a mal interprété l’effet de l’ordonnance de télécom 2021-182. Bien que le Conseil ait élargi le libellé du tarif, il n’a pas élargi les directives de la décision de télécom 2019-390 en ce qui a trait au différend entre RCCI et Bell Canada, qui demeurent en vigueur.
  3. Le Conseil estime que le libellé du tarif n’a pas eu pour effet d’introduire de nouvelles exigences pour Bell Canada. Bell Canada conserve toujours sa capacité de négocier des ententes d’interconnexion convenables avec d’autres ESLC, et les parties peuvent toujours faire appel au Conseil pour résoudre les différends bilatéraux, le cas échéant. Le libellé permet à Bell Canada de maintenir ses ententes d’acheminement actuelles avec d’autres ESLC, conformément à la décision de télécom 97-8. Si Bell Canada pouvait négocier avec succès une entente avec une ESLC, il ne serait pas nécessaire de déposer un nouveau tarif révisé.
  4. En ce qui concerne l’argument de Bell Canada selon lequel ses deux possibilités de réplique n’ont pas permis de remédier au manque d’équité procédurale en ne permettant pas de répondre aux observations hors champ dans le dossier, le Conseil n’estime pas que l’évaluation du libellé du tarif dans le contexte d’une instance d’AMT soit hors champ. Encore une fois, le Conseil estime qu’il n’a apporté aucun changement de politique à la décision de télécom 2019-390, et que l’examen du libellé précis du tarif relevait de cette instance, dans laquelle Bell Canada a eu l’occasion de répondre. Le Conseil fait remarquer que Bell Canada a reçu toutes les observations des intervenants et a pu y répondre comme elle l’estimait approprié.
  5. Par conséquent, le Conseil estime qu’il n’y a pas d’erreur de droit ou de fait et de droit étant donné que le libellé approuvé i) n’introduit pas de nouvelle politique réglementaire, ii) n’impose pas de nouvelles exigences ni de directives à Bell Canada, iii) est conforme aux pratiques réglementaires actuelles, et iv) assure l’efficacité réglementaire. Les politiques réglementaires et les règles actuelles permettent au trafic sans frais généré sur les réseaux des ESLC d’être acheminé directement vers les ESI au moyen de circuits interurbains unidirectionnels vers les réseaux des ESI, tel qu’indiqué dans la décision de télécom 2020-226. Le libellé approuvé concernant le tarif reflète cette évolution du secteur.
  6. Le libellé définitif du tarif assure l’efficacité réglementaire et réduit le fardeau et l’incertitude réglementaires en éliminant la nécessité d’un AMT distinct chaque fois que Bell Canada conclut des ententes d’interconnexion supplémentaires avec une ESLC. De plus, le Conseil n’a pas ordonné à Bell Canada, dans l’ordonnance de télécom 2021-182, de déployer des circuits sans frais ou de conclure de telles ententes avec toutes les ESL.
Utilisation d’une instance tarifaire
  1. Bell Canada a indiqué que le Conseil a mal décrit le processus de modification tarifaire. Plus précisément, Bell Canada a soutenu que le Conseil a commis une erreur de droit en transformant une instance d’AMT en une instance de révision et de modification. Comme il a été mentionné précédemment, le Conseil estime que l’instance concernant l’AMT était une instance nouvelle et distincte de la décision de télécom 2019-390, et que le Conseil n’élargissait donc pas la portée de l’instance relative à la modification tarifaire afin d’apporter des changements de politique à cette décision lorsqu’il examinait le libellé du tarif de Bell Canada. Les observations des intervenants portaient sur le libellé de la disposition tarifaire et sur la façon dont ce libellé est conforme aux politiques, règles et règlements existants du Conseil. Ce point de vue a été soutenu par Distributel, qui a indiqué que l’instance tarifaire constituait une nouvelle instance. TCI a également indiqué que dans le cadre d’une instance sur l’AMT, le libellé du tarif relève de la portée d’une telle instance.
  2. Le Conseil a examiné le libellé approprié du tarif de Bell Canada en fonction du tarif approuvé de TCI, qui comprend des ententes d’interconnexion sans frais avec toutes les ESLCNote de bas de page 9. Le Conseil réitère les conclusions qu’il a tirées dans la décision de télécom 2020-226, dans laquelle il avait estimé qu’il existait d’autres ententes d’interconnexion sans frais que l’utilisation de circuits de facturation-conservation établis dans la décision de télécom 97-8 pour faciliter le développement de la concurrence dans les services locaux.
  3. À cet égard, Bell Canada ne peut plus uniquement se fier à la conclusion du Conseil dans la décision de télécom 97-8 quant à l’acheminement du trafic sans frais généré sur les réseaux des ESLC. Dans cette décision, les conclusions du Conseil ont été tirées afin de faciliter le développement du service local. Depuis lors, le Conseil a tiré un certain nombre de conclusions afin de permettre d’autres types d’ententes d’acheminement au fur et à mesure que le marché des ESLC s’est développé et a mûri.
  4. Bell Canada a indiqué qu’en imposant une solution qui ne s’applique qu’à elle, le Conseil a commis une erreur de droit en omettant de réglementer de manière neutre sur le plan de la concurrence. De plus, le libellé définitif du tarif oblige uniquement Bell Canada, à titre d’ESI, à déployer des circuits interurbains unidirectionnels pour les ESLC.
  5. Le Conseil estime qu’avec le libellé révisé pour inclure « le réseau d’une ESLC », plutôt qu’une simple référence à RCCI, il n’a pas révisé de conclusions antérieures. L’obligation pour les ESI de recevoir leur trafic sans frais depuis les ESLC sur des circuits unidirectionnels sans frais est une politique qui a été établie il y a plus de 20 ansNote de bas de page 10. RCCI a soutenu ce fait dans l’instance menant à la décision de télécom 2019-390, dans laquelle RCCI a indiqué qu’elle a été en mesure de conclure des ententes semblables avec des ESI pour l’acheminement de leur trafic sans frais à leurs clients de numéros de téléphone sans frais sur des circuits unidirectionnels sans frais.
  6. Il ne s’agit pas de nouvelles politiques de l’industrie, comme le prétend Bell Canada. Ainsi, les modifications apportées au libellé du tarif reflètent des pratiques actuelles utilisées par l’industrie des télécommunications. Comme le Conseil l’a déjà mentionné dans l’ordonnance de télécom 2021-182, la référence générale aux ESLC a été faite dans l’intérêt de l’efficacité de la réglementation afin que des AMT futurs ne soient pas requis chaque fois que Bell Canada conclut une nouvelle entente d’interconnexion sans frais avec une ESLC.
  7. Étant donné que RCCI a pu conclure des ententes d’interconnexion sans frais avec d’autres entreprises titulaires et que TCI a un tarif approuvé afin de recevoir du trafic sans frais, le Conseil estime que Bell Canada a tort d’affirmer que les exigences du libellé du tarif ne s’appliquent qu’à elle. Ces exigences sont déjà respectées par d’autres entreprises de télécommunication, conformément au cadre réglementaire actuel du Conseil.
  8. Le Conseil fait remarquer que les modifications qu’il apporte au libellé du tarif reflètent les règles et règlements actuels du Conseil et n’introduisent aucune nouvelle politique, pas plus qu’elles n’obligent Bell Canada à prendre des mesures. Comme mentionné, le Conseil n’a pas élargi l’application de la décision de télécom 2019-390 pour rendre une conclusion stratégique plus importante à l’égard de Bell Canada, malgré la description erronée que fait cette dernière de l’effet du tarif sur elle. Le Conseil conclut que le principe de la neutralité concurrentielle a été reconnu en ce que les exigences d’interconnexion sans frais pour les ESI de Bell Canada avec les ESLC dans le libellé du tarif sont les mêmes que celles pour les autres ESI. Par conséquent, le Conseil estime qu’il n’y a pas eu d’erreur de fait ou de droit.
  9. Le Conseil conclut qu’il n’y a aucun doute important quant à l’exactitude de l’ordonnance de télécom 2021-182 en raison de toute erreur de droit ou de fait et refuse la demande de Bell Canada de réviser et de modifier l’ordonnance de télécom 2021-182.

Conclusion

  1. Le Conseil conclut qu’il n’y a aucun doute important quant à l’exactitude de l’ordonnance de télécom 2021-182 en raison de toute erreur de droit ou de fait et refuse la demande de Bell Canada de réviser et de modifier l’ordonnance de télécom 2021-182.
  2. Compte tenu des conclusions du Conseil concernant la demande de révision et de modification, la demande de suspension de la mise en œuvre de l’ordonnance de télécom 2021-182 est sans objet.

Instructions

  1. En vertu de l’article 8 de la Loi, le gouverneur en conseil a publié les Instructions de 2019 qui précisent que, lorsque le Conseil exerce ses pouvoirs et ses fonctions aux termes de la Loi, il devrait examiner comment ses décisions peuvent promouvoir la concurrence, l’accessibilité économique, les intérêts des consommateurs et l’innovation. De plus, dans ses décisions, le Conseil devrait démontrer sa conformité avec les Instructions de 2019 et préciser comment ses décisions peuvent, le cas échéant, promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation.
  2. La décision de refuser la demande de Bell Canada est conforme aux sous-alinéas 1a)(i), 1a)(ii) et 1a)(vi) des Instructions de 2019, selon lesquels le Conseil devrait examiner dans quelle mesure ses décisions i) encouragent toutes formes de concurrence et d’investissement; ii) favorisent l’abordabilité et des prix plus bas, notamment lorsque les fournisseurs de services de télécommunication exercent un pouvoir de marché; et vi) permettent l’innovation dans les services de télécommunication, y compris les nouvelles technologies et les offres de services différenciés.
  3. Le Conseil estime que ses conclusions répondent également aux objectifs de la politique énoncés aux alinéas 7a) et 7c) de la LoiNote de bas de page 11.
  4. La demande de Bell Canada porte sur une interprétation du libellé du tarif. Le libellé du tarif en question porte sur les ententes d’interconnexion entre les entreprises fonctionnant comme des entreprises de services interurbains et les entreprises de services locaux, et le libellé reflète les pratiques industrielles précédemment développées et approuvées par le Conseil. Le libellé du tarif encouragera les ESLC à investir dans le développement de leurs propres services d’acheminement d’appels sans frais novateurs, comme ceux que RCCI a mis en place. Ce faisant, une concurrence sera créée dans les services d’acheminement d’appels sans frais, ce qui devrait entraîner une baisse des coûts des services d’acheminement d’appels sans frais. Parallèlement, les ESI disposeront d’un plus grand choix quant à la manière dont elles reçoivent les appels sans frais destinés à leurs clients, car elles pourront négocier des ententes d’interconnexion avec différentes entreprises.
  5. De plus, le gouverneur en conseil a publié des instructions à l’intention du Conseil, les Instructions de 2006, qui exigent que le Conseil se fie au libre jeu du marché dans toute la mesure du possible comme moyen d’atteindre les objectifs stratégiques en matière de télécommunication lorsqu’il met en œuvre les objectifs stratégiques énoncés à l’article 7 de la Loi. Par ailleurs, lorsqu’il a recours à la réglementation, le Conseil devrait prendre des mesures qui sont efficaces et proportionnelles aux buts visés et qui ne font obstacle au libre jeu d’un marché concurrentiel que dans la mesure minimale nécessaire pour atteindre les objectifs.
  6. La conclusion du Conseil de refuser la demande de Bell Canada est conforme aux Instructions de 2006 en ce qu’elle maintient l’obligation pour Bell Canada de déployer des circuits unidirectionnels sans frais d’une manière qui est conforme aux pratiques actuelles de l’industrie pour l’acheminement du trafic interurbain entre les ESL et les ESI, et n’introduit aucune nouvelle mesure réglementaire.

Secrétaire général

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