Décision de télécom CRTC 2020-33

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Ottawa, le 29 janvier 2020

Dossier public : 8662-T66-201907411

TELUS Communications Inc. – Demande de révision et de modification des ordonnances de télécom 2019-170 et 2019-171

Le Conseil conclut qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de l’une de ses décisions dans les ordonnances de télécom 2019-170 et 2019-171 (les ordonnances), dans lesquelles il a attribué des frais à des groupes de défense des consommateurs concernant leur participation à l’instance ayant mené à la décision de télécom 2019-169. Par conséquent, le Conseil approuve, en partie, la demande de réviser et de modifier les ordonnances de TELUS Communications Inc. (TCI), et il répartit à nouveau la responsabilité du paiement des frais prévus dans les ordonnances à Bell Mobilité Inc., à Rogers Communications Canada Inc. et à TCI, en fonction de leurs revenus des services sans fil.

Contexte

  1. Dans l’ordonnance de télécom 2019-170, le Conseil a ordonné que les intimés versent à l’Union des consommateurs (Union) des coûts d’un montant de 2 762,50 $ en ce qui concerne la participation de l’Union à l’instance ayant mené à la décision de télécom 2019-169 (instance) concernant le déverrouillage des appareils mobiles et les règles à cet égard énoncées dans le Code sur les services sans fil. TELUS Communications Inc. (TCI) était tenue responsable de 51,4 % des frais et Rogers Communications Canada Inc. (RCCI) était tenue responsable de 48,6 % des frais attribués à l’Union.
  2. Dans l’ordonnance de télécom 2019-171, le Conseil a ordonné que les intimés versent au Centre pour la défense de l’intérêt public (CDIP) des coûts d’un montant de 4 317,66 $ concernant sa participation à l’instance. TCI était tenue responsable de 37,2 % des frais, RCCI était responsable de 35,2 % des frais et Bell Mobilité Inc. (Bell Mobilité) était responsable de 27,6 % des frais attribués au CDIP.

Demande

  1. Le 20 août 2019, le Conseil a reçu une demande en vertu de la partie 1 de TCI, dans laquelle la compagnie demandait que le Conseil révise et modifie l’ordonnance de télécom 2019-170 et l’ordonnance de télécom 2019-171 (les ordonnances).
  2. TCI a indiqué que le Conseil avait commis une erreur i) en désignant TCI comme une intimée alors qu’elle n’avait aucun intérêt dans l’instance et qu’elle n’y avait pas participé activement, ii) en privant TCI de l’équité procédurale en omettant de l’aviser qu’elle pouvait être désignée comme une intimée, iii) même si TCI était une intimée appropriée, en utilisant les revenus d’exploitation provenant d’activités de télécommunication (RET), et non les revenus des services sans fil, pour répartir les frais.
  3. TCI a versé au CDIP et à l’Union sa part du montant des frais attribués. Dans sa demande, TCI a demandé à Bell Mobilité le remboursement des sommes qu’elle avait versées au CDIP et à l’Union, conformément aux ordonnances. Subsidiairement, TCI a indiqué que la répartition des frais devrait être déterminée en fonction des revenus  des services sans fil, entraînant une répartition comptable entre les parties.
  4. Le 23 septembre 2019, Bell Canada a fourni une réponse à la demande de TCI.

Cadre réglementaire

  1. L’article 56 de la Loi sur les télécommunications (Loi) confère au Conseil le pouvoir d’attribuer les frais relatifs à une instance dont il est saisi et lui confère aussi le pouvoir d’ordonner par qui et à qui les frais doivent être payés.
  2. Le Conseil a établi les Lignes directrices pour l’évaluation des demandes d’attribution de frais (Lignes directrices) dans la politique réglementaire de télécom 2010-963 afin d’orienter le processus d’attribution des frais. Les Lignes directrices énoncent les principes clés que le Conseil cherche à mettre en œuvre avec son régime d’attribution des frais, notamment en veillant à ce que le processus soit suffisamment souple pour tenir compte des circonstances particulières de chaque cas.
  3. Le Conseil détermine généralement que les intimés appropriés à une attribution de frais sont les parties qui sont particulièrement visées par le dénouement de l’instance et qui y ont participé activement. Sa pratique générale consiste à répartir la responsabilité du paiement des frais entre les intimés en fonction de leurs RET pour tous les services de télécommunication, critère qu’il utilise pour déterminer la prépondérance et l’intérêt relatifs des parties aux instances.
  4. L’article 62 de la Loi stipule que le Conseil peut, sur demande ou de sa propre initiative, réviser, annuler ou modifier ses décisions, ou entendre à nouveau une demande avant d’en décider.

Critères de révision et de modification

  1. Le Conseil a précisé, dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, les critères qu’il utiliserait pour évaluer les demandes de révision et de modification présentées en application de l’article 62 de la Loi. En particulier, le Conseil a déclaré que les demandeurs doivent démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale, par exemple en raison : i) d’une erreur de droit ou de fait, ii) d’un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision, iii) du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans l’instance initiale ou iv) d’un nouveau principe découlant de la décision.

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • Existe-t-il un doute réel quant au bien-fondé des décisions du Conseil dans les ordonnances i) en désignant TCI comme une intimée, ii) en privant TCI de l’équité procédurale en omettant de l’aviser qu’elle pouvait être désignée comme une intimée et iii) en utilisant les RET, et non les revenus des services sans fil, pour répartir la responsabilité du paiement des frais ?
    • S’il existe un doute réel quant au bien-fondé des ordonnances, comment le Conseil devrait-il modifier ses décisions ?

Existe-t-il un doute réel quant au bien-fondé des décisions du Conseil ?

i) Le Conseil a-t-il commis une erreur en désignant TCI comme une intimée ?

Positions des parties
  1. TCI a souligné la pratique générale du Conseil qui consiste à désigner les intimés appropriés, comme il est indiqué au paragraphe 9 ci-dessus. TCI a soutenu qu’elle n’avait pas un grand intérêt dans l’instance et qu’elle n’y a pas participé activement, et qu’elle y a participé uniquement parce qu’elle était obligée de le faire lorsque les demandes de renseignements ont été envoyées à tous les fournisseurs de services sans fil (FSSF), y compris elle-même. Par conséquent, TCI a indiqué que le Conseil a commis une erreur en la désignant comme une intimée alors qu’elle n’atteint pas le seuil d’intérêt et de participation active.
  2. TCI a précisé que l’instance i) avait été amorcée par le CDIP pour obtenir des précisions sur les éléments du Code sur les services sans fil liés au déverrouillage des appareils mobiles et ii) avait découlé du fait que Bell Mobilité aurait refusé de déverrouiller les appareils détenus par des personnes qui n’étaient pas ses clients actuels et de certains commentaires qui auraient été formulés par le personnel du Conseil, affirmant que ces pratiques étaient conformes au Code sur les services sans fil. TCI a soutenu que sa politique était conforme à la mesure de redressement sollicitée par le CDIP à toutes les périodes pertinentes, en ce sens que, à quelques exceptions près, elle a répondu aux demandes de déverrouiller un appareil verrouillé à son réseau faites par des personnes qui n’étaient pas ses clients actuels. La mesure de redressement sollicitée par le CDIP ne concernait donc pas TCI.
  3. Par conséquent, TCI a fait valoir que le Conseil a agi de façon déraisonnable en imposant des frais à l’égard de TCI de façon arbitraire et contrairement aux Lignes directrices, en attribuant des frais à TCI étant donné qu’elle i) n’a pas adopté le comportement en cause, ii) n’avait aucun intérêt au dénouement de l’instance, iii) est allée au-delà, à tout moment pertinent, de ses obligations réglementaires relatives au déverrouillage des appareils mobiles et iv) a uniquement participé à l’instance parce que la loi l’obligeait de le faire. De ce fait, TCI a soutenu que le Conseil avait commis une erreur en la désignant comme une intimée dans les ordonnances.
  4. Bell Canada a précisé que, dans la mesure où l’argument de TCI selon lequel elle ne devrait pas être désignée comme une intimée parce qu’elle n’est pas intervenue dans l’instance est fondé, TCI devrait demander une indemnisation de RCCI, et non de Bell Mobilité, étant donné que Bell Mobilité n’est pas non plus intervenue dans l’instance et n’a répondu qu’aux demandes de renseignements.
  5. Bell Canada a indiqué que le CDIP a indûment ciblé Bell Mobilité comme étant le seul fournisseur de services qui refusait systématiquement de déverrouiller les appareils des anciens clients. Bell Canada a également fait valoir que, même si le principe à l’égard de la répartition de l’attribution de frais était que « les frais devraient suivre la cause », ce qui n’est pas le cas, dans la décision de télécom 2019-169, le Conseil avait déterminé qu’il était clair que le libellé du Code sur les services sans fil s’appliquait aux « clients » et il a rejeté la demande du CDIP en fin de compte. Par conséquent, Bell Canada a suggéré que Bell Mobilité ne devrait pas être la seule intimée.
  6. Enfin, Bell Canada a également précisé que les règles sur le déverrouillage d’appareils s’appliquent à tous les FSSF, y compris TCI, et que toute précision de la règle pourrait présenter un intérêt pour tous les FSSF, y compris TCI. À ce titre, Bell Canada a soutenu que TCI n’avait ni plus ni moins un intérêt dans la procédure que les autres FSSF.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Aux paragraphes 16 à 19 de l’ordonnance de télécom 2019-171, le Conseil a examiné s’il devait suivre sa pratique générale qui consiste à désigner les intimés appropriés à une attribution de frais et il a conclu qu’il ne serait pas approprié de dévier de cette pratique. Le Conseil a estimé que les questions examinées dans l’instance avaient une vaste portée et qu’elles pourraient considérablement porter atteinte aux intérêts de tous les FSSF sur le marché. Le Conseil a également noté que plusieurs FSSF avaient répondu à la demande du CDIP et que tous les FSSF avaient reçu l’ordre de participer au processus de demande de renseignements.
  2. Le Conseil estime que les questions examinées dans l’instance n’étaient pas limitées à Bell Mobilité. Bien que le CDIP ait affirmé que sa demande avait été amorcée à la suite d’un comportement allégué de Bell Mobilité, l’instance s’est penchée plus largement sur la question d’interpréter les dispositions du Code des services sans fil liées au déverrouillage, ce qui pourrait avoir une incidence sur tous les FSSF sur le marché et qui s’applique à tous les FSSF. À ce titre, toute précision des règles devrait intéresser tous les FSSF, y compris TCI. À cet égard, le paragraphe 18 de l’ordonnance de télécom 2019-171 a clairement reconnu que les questions examinées dans l’instance avaient une vaste portée et qu’elles pourraient considérablement porter atteinte aux intérêts de tous les FSSF sur le marché.
  3. Même si un FSSF, tel que TCI, n’avait pas adopté le comportement en cause, par exemple, parce que ses pratiques exemplaires allaient au-delà des obligations officielles énoncées dans le Code sur les services sans fil relativement au déverrouillage, l’instance portait sur les précisions des obligations liées au déverrouillage existantes en vertu du Code sur les services sans fil et elle pourrait quand même avoir une incidence importante sur les intérêts du FSSF.
  4. Par conséquent, le Conseil estime que le dénouement de l’instance revêtait un intérêt important pour tous les FSSF, y compris TCI.
  5. En ce qui concerne l’argument selon lequel TCI n’a pas participé activement à l’instance et, dans la mesure où elle y a participé, parce qu’elle était obligée de le faire au moyen d’une demande de renseignements, le Conseil fait remarquer que l’exigence générale voulant que les intimés appropriés soient « les parties qui ont participé activement à l’instance » n’accompagne pas la notion qu’une partie doit intervenir de sa propre initiative pour être considérée y « participer activement ». TCI a fourni des renseignements importants sur le dossier de l’instance aux fins d’examen du Conseil en ce qui concerne le déverrouillage d’un appareil. Qu’il s’agisse ou non d’une réponse à une demande de renseignements ou que TCI soit intervenue de son propre chef n’est pas pertinent, car TCI a participé activement à l’instance lorsqu’elle a déposé des mémoires sur le dossier et le Conseil a pris en compte ces mémoires dans son processus décisionnel. Il serait illogique que TCI suggère qu’elle n’a pas participé activement à l’instance, mais que le Conseil tienne en même temps compte de ses mémoires dans son analyse et ses décisions.
  6. Bien que le Conseil puisse exercer son pouvoir discrétionnaire, s’il y a lieu, afin d’exclure les parties dont la participation à une instance se limitait à répondre à une demande de renseignements, surtout si une instance peut ne pas avoir une incidence aussi directe ou importante sur ces parties, dans la présente instance, une précision du Code sur les services sans fil par le Conseil a eu une incidence directe et importante sur tous les FSSF qui avaient reçu l’ordre de participer au processus de demande de renseignements. Ainsi, et pour les raisons indiquées au paragraphe 23, les FSSF qui ont participé uniquement au processus de demande de renseignements ont été inclus, à juste titre, dans les ordonnances comme des intimés appropriés.
  7. Par conséquent, le Conseil estime que TCI a participé activement à l’instance.
  8. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil n’a pas commis d’erreur dans les ordonnances lorsqu’il a estimé que TCI était une intimée appropriée, étant donné que le dénouement de l’instance revêtait un intérêt important pour TCI et qu’elle a participé activement à l’instance.

ii) Le Conseil a-t-il privé TCI de l’équité procédurale lorsqu’il a omis de l’aviser qu’elle pouvait être désignée comme une intimée ?

Positions des parties
  1. TCI a soutenu qu’elle n’a pas été avisée qu’elle pourrait être tenue responsable de la majorité des frais du CDIP et de l’Union. TCI a fait remarquer que le CDIP avait proposé que les frais soient attribués uniquement à Bell Mobilité, puisque l’instance avait été amorcée à la suite d’un comportement allégué de Bell Mobilité, ou, subsidiairement, que les frais soient attribués à tous les FSSF participants en fonction de leurs revenus des services sans fil, ce qui aurait fait en sorte que les frais soient payés uniquement par RCCI. TCI a également fait remarquer qu’aucune partie ne s’était opposée aux propositions du CDIP en ce qui concerne qui devrait être désigné comme intimé. TCI a indiqué qu’aucune des propositions du CDIP, si elle avait été acceptée, n’aurait entraîné de passif financier pour TCI. La compagnie soutient qu’elle n’avait pas participé parce qu’elle ne faisait pas partie de la catégorie d’un intimé approprié et qu’elle était d’accord avec les deux approches proposées par le CDIP concernant la répartition des frais.
  2. TCI a indiqué que si elle avait su que le Conseil ne tiendrait pas compte des propositions du CDIP et ferait de TCI une intimée, elle aurait alors répondu aux demandes d’attribution de frais. TCI a soutenu qu’il est contraire à l’équité procédurale d’en faire une intimée sans préavis suffisant.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Comme intimée habituelle dans les ordonnances d’attribution de frais du Conseil, TCI connaît l’approche générale suivie pour désigner les intimés et répartir la responsabilité du paiement des frais. Bien que le CDIP ait présenté deux autres propositions concernant la répartition de la responsabilité du paiement des frais qui a peut-être entraîné le fait que TCI ne soit pas tenue responsable du paiement de frais, le Conseil n’était pas obligé d’accepter ces propositions. Le Conseil a un large pouvoir discrétionnaire pour désigner les intimés appropriés et répartir la responsabilité du paiement des frais. Le Conseil pouvait accepter toute proposition du CDIP ou envisager d’autres approches, notamment de suivre ses pratiques générales, le cas échéant, qui pourraient entraîner un passif financier à TCI.
  2. Par exemple, dans l’ordonnance de télécom 2019-220, le CDIP a indiqué que Cloudwifi Inc. en tant que partie dont la demande avait amorcé cette instance, devrait payer 50 % des frais du CDIP, et que le solde devrait être payé par les compagnies de télécommunication ayant participé à cette instance, en fonction de leurs RET annuels. Le Conseil n’a reçu aucune intervention concernant la demande du CDIP. Néanmoins, parce que les circonstances de cette instance ne permettaient pas de s’écarter des pratiques normalisées du Conseil, ce dernier a refusé la proposition du CDIP. Le Conseil a appliqué sa pratique générale de désigner les intimés appropriés sur la base de l’intérêt particulier et d’une participation active, de répartir la responsabilité du paiement des frais entre les intimés selon le RET et de limiter le paiement à 1 000 $, montant minimal qu’un intimé devrait être tenu de payer. Bell Mobilité a donc été tenue de payer le montant total des frais engagés par le CDIP, bien que cela ne corresponde pas aux mémoires de ce dernier et qu’il n’y ait aucune intervention en réplique à la demande d’attribution de frais.
  3. De même, dans le cas présent, le Conseil n’était obligé d’accepter aucune des propositions du CDIP et était disposé à suivre ses pratiques générales si les circonstances le justifiaient. Si TCI appuyait les propositions du CDIP et n’estimait pas approprié que le Conseil suive ses pratiques générales, elle avait la possibilité de présenter de tels mémoires. De plus, TCI a également eu la possibilité de présenter des mémoires sur le dossier ayant mené à l’ordonnance de télécom 2019-170 pour donner son avis, étant donné qu’il n’y avait rien dans le dossier de cette demande d’attribution de frais concernant les intimés appropriés ou les autres approches possibles à la répartition de la responsabilité du paiement des frais. Toutefois, TCI n’est intervenue dans aucune des demandes d’attribution de frais.
  4. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime qu’il n’a pas privé TCI de l’équité procédurale et qu’il n’a donc pas commis d’erreur de droit. La compagnie a été avisée qu’un passif financier pourrait être engagé, étant donné que le Conseil dispose d’un large pouvoir discrétionnaire pour la désignation des intimés et la répartition de la responsabilité du paiement des frais, y compris des pratiques passées claires concernant la façon dont il exerce généralement ce pouvoir discrétionnaire. Si TCI était d’accord avec les propositions du CDIP, il lui était loisible d’intervenir, car elle avait été informée de la demande du CDIP. De plus, bien qu’elle ait choisi de ne pas intervenir, TCI a néanmoins eu la possibilité de défendre sa cause concernant la demande d’attribution de frais présentée par l’Union et de faire valoir que le Conseil devrait s’écarter de ses pratiques générales concernant la désignation des intimés et la répartition de la responsabilité du paiement des frais.

iii) Le Conseil a-t-il commis une erreur en utilisant les RET, et non les revenus des services sans fil, pour répartir la responsabilité du paiement des
frais ?

Positions des parties
  1. TCI a soutenu que le CDIP avait fourni, dans sa demande de frais, une justification claire et un précédent pertinent du Conseil pour s’écarter de sa pratique générale de la répartition des frais en fonction des RET. Premièrement, Bell Mobilité aurait dû être la seule intimée, car elle était le seul fournisseur adoptant un comportement qui, selon le CDIP, contrevenait au Code sur les services sans fil. À titre subsidiaire, même s’il était raisonnable pour le Conseil d’étendre les frais aux intimés pour inclure d’autres entreprises, c’était néanmoins une instance dédiée exclusivement aux questions concernant les fournisseurs de services sans fil. À ce titre, les revenus provenant d’autres services de télécommunication n’étaient pas pertinents. Étant donné que la demande du CDIP découlait de l’examen du Code sur les services sans fil dans la politique réglementaire de télécom 2017-200 (l’instance de l’examen du Code sur les services sans fil), le Conseil aurait dû recourir à la même approche de répartition des frais utilisée dans cette instance. Dans les ordonnances découlant de cette instance, le Conseil a réparti la responsabilité du paiement des frais en fonction des revenus des services sans fil.
  2. TCI a soutenu que, si le Conseil est d’avis que la méthode de répartition proposée par le CDIP pour répartir la responsabilité du paiement des frais n’est pas appropriée pour la présente instance, il devrait expliquer clairement les raisons. TCI est d’avis que le refus du Conseil du mémoire sans opposition du CDIP lui nuit considérablement, tout en accordant un avantage à ses concurrents, qui finissent par ne pas partager le fardeau des frais.
  3. Bell Canada a indiqué que, dans certaines circonstances, le Conseil s’est écarté de sa pratique générale qui comprend la répartition de la responsabilité du paiement des frais. Comme TCI, la compagnie a fait référence à l’instance de l’examen du Code sur les services sans fil, dans laquelle le Conseil a réparti les frais en fonction des revenus  des services sans fil. Selon Bell Canada, étant donné que l’instance qui a mené à la décision de télécom 2019-169 était entièrement réservée à l’industrie des services sans fil, il pourrait être logique dans le cas présent de répartir la responsabilité du paiement des frais en fonction des revenus des services sans fil.
  4. Bell Canada a convenu avec le CDIP et TCI que seuls les participants actifs devraient être responsables des frais, mais elle a ajouté que si tel était le cas, RCCI devrait alors être la seule intimée. Dans la mesure où Bell Mobilité et TCI sont considérées intimées bien qu’elles n’aient aucune participation active à l’instance, Bell Canada a suggéré que les frais soient répartis en fonction des revenus des services sans fil.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. L’argument de TCI selon lequel Bell Mobilité devrait être la seule intimée, car elle était le seul fournisseur adoptant un comportement qui, selon le CDIP, contrevenait au Code sur les services sans fil, est traité dans la question secondaire i) ci-dessus. De même, la position, appuyée par Bell Canada, selon laquelle seules les parties qui ont participé activement à une instance (au lieu de celles qui participent uniquement en réponse à une demande de renseignements) devraient être responsables du paiement des frais, est également traitée dans la question secondaire i) ci-dessus.
  2. En ce qui concerne la question concernant la répartition fondée sur les revenus  des services sans fil, le Conseil a refusé la demande du CDIP de répartir les frais en fonction des revenus  des services sans fil, et a plutôt réparti les frais selon les RET. Le Conseil estime qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de cette approche.
  3. Dans l’ordonnance de télécom 2017-364, dans laquelle le CDIPNote de bas de page 1 a demandé l’attribution de frais pour sa participation à l’instance de l’examen du Code sur les services sans fil, le Conseil a repris en grande partie sa justification de l’ordonnance de télécom 2017-362, qui découlait de la même instance, afin de conclure qu’il était justifié de s’écarter de la pratique générale du Conseil en ce qui concerne la répartition de la responsabilité du paiement des frais en fonction des RET. Dans l’ordonnance de télécom 2017-362, le Conseil a fait remarquer que, dans les circonstances particulières, les RET ne représentaient pas les indicateurs les plus appropriés pour déterminer l’attribution des frais appropriée. Le Conseil a fait référence aux principes clés des Lignes directrices que le Conseil souhaite mettre en place au moyen de son régime de coûts, notamment en veillant à ce que le processus soit suffisamment souple pour tenir compte des circonstances particulières lorsqu’elles sont pertinentes et que l’approche adoptée est juste, efficace et efficiente. Finalement, le Conseil s’est écarté de l’utilisation des RET pour répartir la responsabilité du paiement des frais afin de répartir cette responsabilité, en partie, en fonction de la part du marché des revenus des services sans fil, établie au cours de la période la plus récente décrite dans le Rapport de surveillance des communications de 2015.
  4. Bien que le Conseil ne soit pas lié par son approche à l’égard de la réparation des frais dans l’instance sur l’examen du Code sur les services sans fil, les circonstances justifiaient une telle approche. Étant donné i) qu’il s’agit de l’approche ayant été utilisée, en partie, dans les ordonnances d’attribution de frais de l’examen du Code sur les services sans fil et que ii) les questions énoncées dans la décision de télécom 2019-169 étaient associées à la clarification de certains aspects du Code sur les services sans fil (à savoir les obligations liées au déverrouillage des appareils) et portaient également sur l’industrie des services sans fil, le Conseil estime que la répartition de la responsabilité du paiement des frais en fonction des revenus des services sans fil reflète le mieux les circonstances particulières de l’instance.
  5. Par conséquent, le Conseil estime qu’il a commis une erreur en utilisant les RET, et non les revenus des services sans fil, pour répartir la responsabilité du paiement des frais et, en ce sens, il existe un doute réel quant au bien-fondé des ordonnances. Les circonstances justifiaient la répartition de la responsabilité du paiement des frais en fonction des revenus des services sans fil, et cette répartition refléterait le mieux les circonstances particulières de l’instance.

S’il existe un doute réel quant au bien-fondé des ordonnances, comment le Conseil devrait-il modifier ses décisions ?

Positions des parties

  1. TCI a déjà versé au CDIP et à l’Union sa part du montant des frais attribués. Par conséquent, la compagnie demande soit i) le remboursement par Bell Mobilité des montants qu’elle a versés, qu’elle considère comme l’intimée appropriée dans cette instance soit ii) que les frais soient répartis en fonction des revenus des services sans fil et d’une répartition comptable entre les parties, même si TCI était une intimée appropriée. Bell Canada s’est opposée à la première approche, qui est abordée dans la question secondaire i) ci-dessus, mais ne s’est pas opposée à la dernière approche, faisant remarquer que dans la mesure où Bell Mobilité et TCI sont désignées comme intimées, les frais devraient alors être répartis en fonction des revenus des services sans fil.
  2. Les parties qui pourraient s’opposer à la répartition des frais fondée sur les revenus  des services sans fil, notamment RCCI, ne sont pas intervenues, bien que la demande de TCI et la réplique de Bell Canada leur aient été signifiées.
  3. En outre, Bell Canada a indiqué que, compte tenu du montant relativement petit et du fait que la demande de TCI a été seulement faite une fois qu’elle avait déjà versé les frais attribués, toute nouvelle répartition des frais pourrait être appliquée par le Conseil à une demande d’attribution de frais future pour éviter le fardeau administratif qui serait autrement imposé à toutes les parties concernées.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Le Conseil estime qu’à l’instar de l’approche adoptée dans les ordonnances d’attribution de frais associées à l’examen du Code sur les services sans fil, la responsabilité du paiement des frais découlant de l’instance devrait être répartie en fonction de derniers revenus des services sans filNote de bas de page 2 des intimés comme indicateur de la prépondérance et de l’intérêt relatifs des parties concernées.
  2. Compte tenu de la taille relativement petite des attributions de frais réclamés par le CDIP et l’Union ainsi que le nombre important d’intimés potentiels, le Conseil a limité les intimés dans les ordonnances aux plus grands FSSF (Bell Mobilité, RCCI et TCI). Pour les mêmes raisons, le Conseil estime que les intimés devraient être limités de façon semblable dans le cas présent.
  3. En outre, dans l’ordonnance de télécom 2019-170, le Conseil a tenu compte de la pratique générale décrite dans l’ordonnance de télécom 2015-160 en ce qui concerne le montant minimal de 1 000 $ qu’un intimé devrait être tenu de payer. Pour les mêmes raisons, le Conseil estime que ce seuil de 1 000 $ pour la responsabilité de paiement devrait également s’appliquer au cas présent en ce qui a trait à la responsabilité du paiement des frais de l’Union.
  4. En ce qui a trait à la demande de Bell Canada visant à ce que le Conseil applique toute nouvelle répartition des frais à une demande d’attribution des frais future, le Conseil est actuellement saisi du dossier pour répartir à nouveau les frais. De ce fait, il ne serait pas approprié d’attendre une autre instance sur les frais pour répartir à nouveau les frais entre les FSSF afin que certaines parties puissent recevoir leurs remboursements. Cette approche entraînerait un fardeau administratif et des retards, étant donné qu’un autre processus devrait être mis en place à l’avenir pour s’assurer que les parties étaient avisées de l’instance sur les ordonnances d’attribution de frais dans laquelle le Conseil mettrait en œuvre la nouvelle répartition déterminée dans la présente décision.
  5. Par conséquent, le Conseil répartit à nouveau la responsabilité du paiement des frais comme suit :

    Répartition initiale de l’ordonnance de télécom 2019-170

    Entreprise Proportion Montant
    TCI 51,4 % 1 419,97 $
    RCCI 48,6 % 1 342,53 $

    Répartition initiale de l’ordonnance de télécom 2019-171

    Entreprise Proportion Montant
    TCI 37,2 % 1 606,14 $
    RCCI 35,2 % 1 518,55 $
    Bell Mobilité 27,6 % 1 192,97 $

    Répartition modifiée de l’ordonnance de télécom 2019-170

    Entreprise Proportion Montant
    RCCI 53,0 % 1 464,13 $
    Bell Mobilité 47,0 % 1 298,37 $

    Répartition modifiée de l’ordonnance de télécom 2019-171

    Entreprise Proportion Montant
    RCCI 36,7 % 1 584,58 $
    Bell Mobilité 32,6 % 1 407,56 $
    TCI 30,7 % 1 325,52 $
  6. Dans ses mémoires, TCI a indiqué qu’elle avait déjà payé les montants requis dans les ordonnances. Il n’est pas clairement indiqué dans le dossier si Bell Mobilité et RCCI ont payé les montants requis à l’Union ou au CDIP.
  7. Si Bell Mobilité et RCCI ont déjà payé les montants requis, le Conseil ordonne à RCCI de payer à TCI le montant de 187,63 $ et à Bell Mobilité de payer à TCI le montant de 1 512,96 $, afin de réduire le fardeau administratif.
  8. Si Bell Mobilité ou RCCI n’ont pas déjà payé les montants requis dans les ordonnances, le Conseil ordonne à l’Union et au CDIP de remettre les fonds déjà reçus. Le Conseil ordonne également à Bell Mobilité, RCCI et TCI de payer l’Union et le CDIP conformément aux répartitions modifiées énoncées au paragraphe 49.

Instructions

  1. Le Conseil estime que la présente décision, qui entraîne la nouvelle répartition de la responsabilité du paiement des frais entre les FSSF, ne constitue pas une situation dans laquelle les Instructions de 2019Note de bas de page 3s’appliquent directement. Toutefois, la décision peut, en partie, favoriser les intérêts des consommateurs, puisque les groupes de défense des consommateurs, dans la mesure du possible, ne subissent pas indûment le fardeau de l’obligation de rembourser les frais déjà reçus à la suite de la nouvelle répartition des frais, et qu’il y a simplement une comptabilisation des frais entre les FSSF.

Secrétaire général

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