ARCHIVÉ -Décision de télécom CRTC 2011-517

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Ottawa, le 22 août 2011

MTS Allstream Inc. – Demande de révision des tarifs des services d’interconnexion de l’interurbain facturés au Québec par Télébec, Société en commandite et la Société TELUS Communications

Numéro de dossier : 8661-M59-201102954

Le Conseil ordonne à Télébec et à la STC (les compagnies) de déposer des avis de modification tarifaire en vue de modifier les tarifs de leurs services de raccordement direct, de transit d’accès, d’identification de l’entreprise sans frais d’interurbain et de traitement des entreprises intercirconscriptions de base dans la province de Québec, et ce, dans les 90 jours suivant la date de la présente décision. Les tarifs proposés doivent être fondés sur des études de coûts de la Phase II actualisées ou sur les tarifs en vigueur dans le territoire de Bell Aliant.

De plus, le Conseil détermine que les compagnies ne seront pas dédommagées pour une perte de revenus éventuelle si les tarifs des quatre services sont réduits.

Introduction

1.      Le Conseil a reçu une demande présentée par MTS Allstream Inc. (MTS Allstream) datée du 14 février 2011, dans laquelle la compagnie demandait au Conseil d’approuver les tarifs modifiés de quatre services d’interconnexion de l’interurbain offerts par Télébec, Société en commandite (Télébec) et par la Société TELUS Communications (STC) [collectivement les compagnies] dans la province de Québec.

2.      MTS Allstream a indiqué que les tarifs des compagnies pour les quatre services en question – c’est-à-dire les services de raccordement direct (RD), de transit d’accès (TA), d’identification de l’entreprise sans frais d’interurbain[1] et de traitement des entreprises intercirconscriptions de base (EIB) [collectivement les quatre services][2] – sont beaucoup plus élevés que les tarifs facturés pour les mêmes services par d’autres entreprises de services locaux titulaires (ESLT) et que, par conséquent, ils ne sont pas présentement justes ou raisonnables.

3.      MTS Allstream a demandé au Conseil :

a)    de rendre immédiatement provisoires les tarifs actuels des compagnies pour les quatre services;

b)   d’ordonner aux compagnies soit de déposer, pour les quatre services, des études de coûts actualisées, soit d’adopter les tarifs actuels que Bell Alliant Communications régionales, société en commandite (Bell Aliant) facture pour les mêmes services au Québec;

c)    de faire appliquer les tarifs définitifs rétroactivement, c’est-à-dire à compter de la date où les tarifs actuels deviennent provisoires.

4.       Le Conseil a reçu des observations de Distributel Communications Limited (Distributel), de Télébec et de la STC. On peut consulter sur le site Web du Conseil le dossier public de l’instance, lequel a été fermé le 26 mai 2011. On peut y accéder à l’adresse www.crtc.gc.ca, sous l’onglet Instances publiques, ou au moyen du numéro de dossier indiqué ci-dessus.

5.      Dans la présente décision, le Conseil a établi qu’il devait se prononcer sur les questions suivantes : 

 I.          Le Conseil devrait-il examiner les tarifs des compagnies pour les quatre services?

Si c’est le cas,

 II.          Quelle politique devrait être appliquée pour établir les tarifs des compagnies?

 III.          Si les tarifs des quatre services sont réduits, les compagnies devraient-elles être dédommagées pour les pertes éventuelles de revenus?

 IV.          Les tarifs actuels des compagnies associés aux quatre services devraient-ils passer de définitifs à provisoires?

I.        Le Conseil devrait-il examiner les tarifs des compagnies pour les quatre services?

6.      MTS Allstream a indiqué que les tarifs des compagnies pour les quatre services datent de 1997 et sont beaucoup plus élevés que les tarifs facturés par les autres ESLT pour les mêmes services. Elle a fait remarquer que ces services sont classés dans la catégorie « interconnexion » dans la décision de télécom 2008-17 et a précisé que les tarifs devraient donc être fondés sur les coûts et majorés d’un supplément préétabli. Selon MTS Allstream, le fait de facturer des tarifs qui dépassent largement les coûts liés à la fourniture du service est contraire aux Instructions[3], car cela empêche les concurrents de pénétrer les marchés de manière efficace sur le plan économique et ne sont pas aussi neutres que possible sur le plan de la concurrence. Distributel a appuyé la demande de MTS Allstream.

7.      Les compagnies ont indiqué que la demande de MTS Allstream devrait être refusée, sinon, elles devraient avoir le droit de recouvrer toute perte de revenus advenant la réduction des tarifs. Elles ont ajouté que les tarifs actuels des quatre services font partie d’une subvention implicite et que le Conseil aurait pu rajuster les tarifs des quatre services en 2002, lorsqu’il a rajusté ceux des grandes ESLT, mais il ne l’a pas fait. Télébec est d’avis qu’une réduction des tarifs en fonction des coûts irait à l’encontre du cadre de plafonnement des prix et constituerait une action punitive envers Télébec. La STC a indiqué qu’elle était prête à fournir des études de coûts, au besoin.

8.      Le Conseil fait remarquer que lorsqu’il a établi le cadre réglementaire destiné aux prédécesseures des compagnies[4] dans la décision Télécom 96-5, il a conclu que le cadre de base prévu pour les compagnies membres de Stentor (aujourd’hui devenues les grandes ESLT) [5] devait aussi s’appliquer aux compagnies. Dans cette décision, le Conseil a autorisé la concurrence de l’interurbain dans les territoires des compagnies à compter du 1er janvier 1997.

9.      Dans la décision de télécom 96-5, le Conseil avait ordonné aux compagnies de déposer des tarifs dégroupés pour recouvrer les coûts de commutation et de groupement, ce qui comprenait les services de RD et de TA, en fonction des coûts de la Phase II.[6] Le Conseil avait indiqué que même si les deux compagnies avaient affirmé qu’elles n’étaient pas en mesure de calculer ces coûts à ce moment, il était d’avis qu’elles devaient se doter des moyens pour ce faire.

10.  Lorsque les compagnies ont proposé des tarifs pour les quatre services en 1997, les tarifs des services de TA et de traitement des EIB étaient fondés sur les coûts de la Phase II, majorés d’un supplément de 25 %, tandis que les tarifs des services de RD et d’identification de l’entreprise sans frais d’interurbain étaient fondés sur des tarifs uniformes que le Conseil avait approuvés pour les compagnies membres de Stentor.

11.  Le Conseil fait remarquer que, depuis 1997, les tarifs des grandes ESLT pour les quatre services d’interconnexion ont chuté de façon importante, reflétant une réduction considérable des coûts liés à la fourniture de ceux-ci. Toutefois, les tarifs des compagnies pour ces services des compagnies n’ont pas vraiment changé depuis 1997. Le Conseil estime qu’il est raisonnable de s’attendre à ce que les coûts des quatre services des compagnies aient baissé depuis 1997, puisque ceux des grandes ESLT ont connu une baisse importante depuis cette période.

12.  Le Conseil fait remarquer que dans la décision de télécom 2008-17, il a classé les quatre services dans la catégorie « interconnexion » et a déterminé que leurs tarifs seraient établis sur la même base que ce qui est actuellement requis, c’est-à-dire en fonction des coûts de la Phase II comme il l’avait ordonné dans la décision de télécom 96-5.

13.  Par conséquent, comme le Conseil a conclu que les tarifs des services d’interconnexion doivent refléter les coûts liés à la fourniture de ces services et comme il s’attend à ce que les coûts des compagnies pour les quatre services aient baissé de façon considérable depuis 1997, le Conseil détermine qu’il conviendrait d’examiner les tarifs des compagnies pour ces services.

II.        Quelle politique devrait être appliquée pour établir les tarifs des compagnies?

14.  MTS Allstream a indiqué que les compagnies devraient, pour les quatre services, soit déposer des tarifs fondés sur des études de coûts actualisées, soit adopter les tarifs actuels que Bell Aliant facture pour les mêmes services au Québec.

15.  La STC a précisé que si le Conseil détermine qu’il convient de modifier les tarifs de la STC pour son territoire du Québec, elle devrait alors être autorisée à déposer des études de coûts propres à son territoire québécois.

16.  Le Conseil fait remarquer que, pour les quatre services, les tarifs des grandes ESLT sont fondés sur les coûts de la Phase II. Or, tous les tarifs des compagnies sont fondés sur les coûts de la Phase II, sauf pour le service de RD.

17.  Dans le cas des services de RD des compagnies, les tarifs sont fondés sur ceux de 1997 des grandes ESLT, lesquels étaient à leur tour fondés sur des coûts historiques plutôt que les coûts de la Phase II majorés d’un supplément préétabli. Dans la décision de télécom 2002-34, le Conseil a modifié la politique de tarification pour les services de RD des grandes ESLT, exigeant que leurs tarifs soient établis en fonction des coûts de la Phase II majorés d’un supplément de 15 % et non en fonction des coûts historiques.

18.  Le Conseil estime qu’aujourd’hui, il serait approprié que les tarifs des quatre services des compagnies soient établis en fonction des coûts de la Phase II majorés d’un supplément préétabli, conformément à la politique de tarification des services d’interconnexion des grandes ESLT.

19.  Le Conseil fait remarquer que, tout comme les compagnies, Bell Aliant dessert un nombre important de zones de desserte à coût élevé. Outre l’option de demander aux compagnies de déposer des études de coûts pour les quatre services, le Conseil considère que les tarifs de Bell Aliant pour ces services constituent des tarifs de remplacement raisonnables pour les tarifs des compagnies.

20.  Par conséquent, le Conseil ordonne à Télébec et à la STC de déposer des avis de modification tarifaire en vue de modifier les tarifs de leurs services de RD, de TA, d’identification de l’entreprise sans frais d’interurbain et de traitement des EIB dans les 90 jours suivant la date de la présente décision. Les tarifs proposés doivent être fondés :

III.        Si les tarifs des quatre services sont réduits, les compagnies devraient-elles être dédommagées pour les pertes éventuelles de revenus?

21.  Les compagnies ont indiqué qu’elles devraient être dédommagées si les tarifs des quatre services qu’elles offrent sont réduits. Elles ont fait remarquer que les grandes ESLT avaient reçu une compensation pour les pertes de revenus attribuables au changement de politique lorsque le Conseil avait modifié la méthode d’établissement des coûts de RD – laquelle est passée des coûts historiques aux coûts de la Phase II – et elles ont fait valoir que les compagnies devraient recevoir aussi un dédommagement pour une telle modification.

22.  De plus, la STC a précisé que les grandes ESLT avaient reçu une compensation de leurs comptes de report lorsque le Conseil avait modifié une autre politique, dans la décision de télécom 2002-34, en abaissant les suppléments des coûts de la Phase II de 25 à 15 %. Selon elle, toute modification de politique en matière d’établissement des prix associée au service de RD doit s’accompagner d’une compensation.

23.  Les deux compagnies ont suggéré que la compensation provienne du Fonds de contribution national (FCN).

24.  MTS Allstream s’est opposée au remplacement de la subvention associée à l’interconnexion des réseaux interurbains par une subvention financée à partir du FCN. Elle a fait valoir que les compagnies avaient déjà été suffisamment compensées au fil des ans par la baisse des coûts de fourniture des services et la diminution des tarifs payés aux autres ESLT pour les services d’interconnexion.

25.  Le Conseil fait remarquer qu’il a établi, dans la décision de télécom 97-9, le cadre de réglementaire applicable à la première période de plafonnement des prix pour les grandes ESLT et, dans la décision de télécom 98-2, il a fixé les taux de rendement et les tarifs initiaux. Dans la décision de télécom 2002-34, le Conseil a fixé le cadre de réglementaire applicable à la deuxième période de plafonnement des prix pour les grandes ESLT et a apporté plusieurs modifications relativement à la politique d’établissement des prix. Dans cette décision, le Conseil a déterminé que les grandes ESLT devaient être compensées, entre autres, pour la réduction de 25 à 15 % du supplément applicable aux services aux concurrents.  

26.  Dans la décision de télécom 2006-23, lorsqu’il a approuvé de façon définitive les tarifs de RD pour les grandes ESLT, le Conseil a déterminé qu’Aliant Telecom Inc. (désormais Bell Aliant), Bell Canada, MTS Communications Inc. (désormais MTS Allstream) et la Société TELUS Communications Inc. (désormais la STC) devaient être compensées pour la modification de politique que le Conseil avait effectuée dans la décision de télécom 2002-34, lorsqu’il a basé le calcul des tarifs du service de RD non plus sur les coûts historiques mais sur les coûts de la Phase II plus un supplément[7].

27.  Toutefois, le Conseil fait remarquer qu’il avait auparavant rejeté la demande de compensation présentée par les grandes ESLT pour les pertes de revenus attribuables aux réductions des coûts de la Phase II – par exemple, dans la décision de télécom 2006-22 pour le service de TA, dans la décision de télécom 2006-23 pour le service RD et dans la décision 2004-72 pour les frais de traitement des EIB.  

28.  Le Conseil fait remarquer que le service de RD comprend la commutation locale et les installations de transmission – lesquelles, en raison de divers progrès techniques, ont fait l’objet de baisses de coûts importantes depuis leur dernier examen. Le Conseil estime que les réductions de tarifs potentielles liées aux services en question seraient dues à des réductions des coûts des compagnies pour lesquelles elles ne devraient pas être dédommagées. De plus, le Conseil estime que la baisse des revenus découlant des modifications des méthodes de calcul, soit la substitution des coûts de la Phase II aux coûts historiques, ne serait pas importante. Le Conseil n’est donc pas convaincu que les compagnies devraient avoir droit à une compensation pour la baisse de revenus découlant des modifications des méthodes de calcul.

29.  Par conséquent, le Conseil détermine que les compagnies ne seront pas compensées pour les pertes de revenus éventuelles, si les tarifs des quatre services, y compris les tarifs de RD, sont réduits.

IV.        Les tarifs actuels des compagnies associés aux quatre services devraient-ils passer de définitifs à provisoires?

30.  MTS Allstream a indiqué que maintenir les tarifs actuels alors que les études de coûts sont en préparation et en révision aurait une incidence réelle négative sur les concurrents raccordés aux compagnies. Selon MTS Allstream, elle verse chaque année à Télébec et à la STC de un à deux millions de dollars en sus de ce qu’elle devrait payer pour les quatre services.

31.  La STC a signalé qu’il n’y avait aucun doute quant au caractère raisonnable des tarifs actuels et que rien au dossier ne pouvait justifier que le Conseil confère le statut de provisoire aux tarifs. De plus, elle a ajouté que le statut de tarif provisoire n’a pas à s’appliquer tant qu’elle n’a pas déposé, au besoin, des études de coûts à jour concernant chacun de services.  

32.  Comme il est précédemment indiqué, pendant plus d’une décennie, les tarifs des compagnies associés aux services d’interconnexion de l’interurbain ont été beaucoup plus élevés que les tarifs correspondants des autres ESLT. Le Conseil estime qu’il conviendrait, en raison de la disparité, de rendre les tarifs actuels provisoires afin de permettre au Conseil, s’il devait en décider ainsi, de fixer de nouveaux tarifs définitifs rétroactifs à la date où ils ont été établis provisoirement.

33.  Par conséquent, le Conseil détermine qu’à compter de la date de la présente décision, les tarifs actuels des compagnies pour les services de RD, de TA, d’identification de l’entreprise sans frais d’interurbain et de traitement des EIB seront provisoires. Le Conseil examinera la question de la rétroactivité lorsqu’il tranchera de façon définitive au sujet des tarifs que les compagnies ont proposés.  

Secrétaire général

Documents connexes



Notes de bas de page :

[1] Le service d’identification de l’entreprise sans frais d’interurbain est également appelé « service d’identification de l’entreprise 800/888 ».

[2] Les tarifs des quatre services sont établis à l’article 7.2.2, Circuits d’interconnexion avec accès côté réseau, du Tarif général de Télébec, et à l’article 1.01.07, Circuits d’interconnexion avec accès côté réseau, du Tarif des services d’accès de la STC (Québec).

[3] Décret donnant au CRTC des instructions relativement à la mise en œuvre de la politique canadienne de télécommunication, C.P. 2006-1534, 14 décembre 2006  

[4] Québec-Téléphone (aujourd’hui la STC dans son territoire d’exploitation au Québec) et Télébec ltée. Dans la présente décision, toute mention des « compagnies » renvoie à la fois aux compagnies actuelles et à leurs prédécesseures.

[5] Au moment où la décision Télécom 96-5 a été publiée, Stentor était une association industrielle qui comprenait les compagnies que l’on désigne aujourd’hui comme grandes ESLT (Bell Aliant, Bell Canada, MTS Allstream, Saskatchewan Telecommunications [SaskTel] et la STC), ainsi que leurs prédécesseures. À cette époque, SaskTel n’était pas assujettie à la réglementation du Conseil. Le cadre réglementaire de SaskTel a été établi dans la décision 2000-150.

[6] Les coûts de la Phase II correspondent aux coûts marginaux anticipés liés à la prestation du service.

[7] Dans l’ordonnance 2000-1080, le Conseil a approuvé les tarifs du service de RD de SaskTel en fonction des coûts de la Phase II plus un supplément.

 
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