ARCHIVÉ -  Décision Télécom CRTC 99-13

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Décision Télécom

Ottawa, le 28 septembre 1999

Décision Télécom CRTC 99-13

DEMANDE EN VERTU DE LA PARTIE VII -- ACCÈS AUX STRUCTURES DE SOUTÈNEMENT DES SERVICES PUBLICS D'ÉLECTRICITÉ MUNICIPAUX --
ACTC c. MEA et al -- Décision finale

No de dossier : 8690-C13-01/97

Table des matières Paragraphe

Sommaire

Introduction 1

La demande 3

Points soulevés 26

A. La compétence constitutionnelle et statutaire du Conseil en vertu du paragraphe 43(5) de la Loi sur les télécommunications 28
1. Questions de compétence soulevées par les parties 28
2. Position de l'ACTC et de la MEA : Compétence constitutionnelle 34
3. Position de l'ACTC et de la MEA : Compétence statutaire 45
4. Position des autres parties :
Compétence constitutionnelle et statutaire 77
5. Analyse et conclusion sur la compétence 88
5.1 Compétence constitutionnelle 89
5.2 Compétence statutaire 107
a. Approche à l'interprétation de la Loi 107
b. Origine législative 111
c. Politique canadienne de télécommunication et
autres questions d'intérêt public 125
d. Interprétation de « fournisseur de services au public » 133
e. Nécessité de négociations préalables 135
f. Interprétation de « conditions que le Conseil juge indiquées » 137
g. Interprétation de « ligne de transmission » 140
h. Interprétation de « une voie publique ou un autre lieu public » 149
B. Équité procédurale 165
C. La nécessité d'une intervention réglementaire 174
D. Coûts des poteaux et tarif de location 181
1. Introduction 181
2. Coûts différentiels 187
3. Coûts en immobilisations 196
4. Facteur d'attribution de l'espace 213
E. Conditions non monétaires de l'entente sur les structures de soutènement 227
F. Autres coûts causals attribuables aux raccordements des câblodistributeurs
sur les poteaux des services publics d'électricité 232
G. Tarifs de location des poteaux des services publics d'électricité
municipaux non représentés par la MEA 236

Conclusion 241

Annexe A - Liste des intimés

Sommaire

Les câblodistributeurs et les entreprises de télécommunications concurrentes louent souvent de l'espace sur les poteaux et dans les conduites souterraines qui appartiennent aux compagnies de téléphone et d'électricité pour transporter les lignes de transmission qu'elles utilisent pour assurer leur service à leurs clients. Cela leur permet de fournir le service sans installer leurs propres poteaux et conduits, souvent appelés structures de soutènement.

Dans la décision Télécom CRTC 95-13 intitulée Accès aux structures de soutènement des compagnies de téléphone, le Conseil a établi un tarif de location des poteaux de 9,60 $ par année que les câblodistributeurs et les entreprises de télécommunications doivent payer pour louer de l'espace sur ces poteaux. Ce tarif s'applique aux poteaux appartenant à plusieurs grandes compagnies de téléphone, y compris celles qui faisaient alors partie du groupe Stentor.

Dans la demande qui fait l'objet de la présente décision, l'Association canadienne de télévision par câble (l'ACTC) demandait que le Conseil accorde l'accès aux poteaux appartenant à certains services d'électricité en Ontario au même tarif de 9,60 $ par an.

La Municipal Electric Association (MEA), organisme représentant la majorité des services publics d'électricité municipaux, et la Commission hydroélectrique de l'Ontario se sont opposées à la demande de l'ACTC. Elles jugeaient, entre autres choses, que la demande ne relève pas des compétences du Conseil.

Toutefois, le Conseil a conclu que, dans les circonstances entourant cette cause, il a la juridiction sur les plans statutaire et constitutionnel de traiter cette question en vertu de la Loi sur les télécommunications.

Le Conseil est d'avis que les câblodistributeurs devraient payer les coûts différentiels et verser une contribution raisonnable aux coûts des investissements associés au fait qu'ils fixent leurs câbles aux poteaux qui appartiennent aux services d'électricité. En fonction de ce principe, le Conseil établit un tarif annuel de location des poteaux de 15,89 $ par poteau pour que les câblodistributeurs puissent avoir accès aux poteaux qui appartiennent aux services publics d'électricité nommés dans cette décision, à moins que les parties ne s'entendent autrement.

Introduction

1.En 1996, la Municipal Electric Association (la MEA), organisme bénévole dont l'effectif est composé des Commissions de services publics municipaux et des Commissions hydroélectriques de l'Ontario (les services publics d'électricité municipaux), a décidé de revoir les ententes relatives aux structures de soutènement entre les services publics d'électricité municipaux et certains câblodistributeurs de l'Ontario. Au nom de ses membres, la MEA a proposé une révision de l'entente relative aux structures de soutènement pour y inclure un tarif annuel de location de plus de 40 $ par poteau pour les câblodistributeurs. Ceux-ci estiment que les propositions de la MEA sont inacceptables. Malgré de longs pourparlers, les câblodistributeurs n'ont pu s'entendre avec la MEA sur les conditions d'une entente d'accès aux structures de soutènement, y compris le tarif par poteau qui s'appliquera.

2.Les ententes sur les structures de soutènement entre les câblodistributeurs et les services publics d'électricité municipaux sont échues depuis le 31 décembre 1996 ou avant et prévoyaient un tarif annuel par poteau de 10,42 $ . À partir de janvier 1997, les services publics d'électricité municipaux ont refusé d'accorder aux câblodistributeurs de nouveaux permis d'accès à leurs structures de soutènement.

La demande

3.Le 13 février 1997, l'Association canadienne de télévision par câble (l'ACTC) a déposé une demande conformément à la partie VII Règles de procédures du CRTC en matière de télécommunications (les Règles), au nom de Cablenet (division de Cogeco Cable Inc.); de M. Pierre Juneau (à titre de fiduciaire pour 3305911 Canada Inc.) , en ce qui concerne certaines entreprises de câblodistribution qui devaient alors être transférées par Rogers Cablesystems Ltd.)1; de Rogers Cablesystems Limited et ses filiales; et de Shaw Cablesystems Ltd. et ses filiales (les câblodistributeurs ou les requérants). Cette demande a été déposée contre divers services publics d'électricité municipaux de l'Ontario. La demande de l'ACTC a été déposée en vertu des paragraphes 43(5) et 61(2) de la Loi sur les télécommunications (la Loi). Elle visait à obtenir un redressement définitif et provisoire pour pouvoir accéder aux structures de soutènement de ces services publics d'électricité municipaux.

4.Le paragraphe 43(5) de la Loi prévoit ce qui suit :

43. (5) Lorsqu'il ne peut, à des conditions qui lui sont acceptables, avoir accès à la structure de soutien d'une ligne de transmission construite sur une voie publique ou un autre lieu public, le fournisseur de services au public peut demander au Conseil le droit d'y accéder en vue de la fourniture de ces services; le Conseil peut assortir l'autorisation des conditions qu'il juge indiquées.

5.Les services publics d'électricité municipaux qui participent à la présente instance sont indiqués à l'annexe A et sont collectivement désignés ci-après sous le nom d'intimés. La MEA a agi au nom de la plupart (mais pas tous) des services désignés comme intimés. Avant le 1er janvier 1998, la MEA représentait 28 des services publics intimés. Dans son mémoire final, la MEA disait représenter 25 intimés2. Les autres intimés que la MEA ne représente pas sont : Canadian Niagara Power (CNP); Chatham Hydro; la Hydro Electric Commission of the Town of Deep River (Deep River); L'Orignal Hydro Electric Commission (L'Orignal HEC); la Pelham Hydro-Electric Commission (Pelham HEC); la Plantagenet Hydro Electric Commission (Plantagenet HEC); la Webbwood Hydro Electric Commission (Webbwood HEC); la Toronto Hydro-Electric Commission; et la West Elgin Hydro-Electric Commission. Deep River et CNP ont chacune déposé une réplique en leur propre nom.

6.Les câblodistributeurs ont obtenu des services de structures de soutènement des services publics d'électricité municipaux pendant de nombreuses années, conformément à des ententes successives relatives aux structures de soutènement. Comme nous l'avons mentionné plus haut, les ententes sur les structures de soutènement entre les câblodistributeurs et les services publics d'électricité municipaux sont échues depuis le 31 décembre 1996, ou avant. En prévision de cette échéance, on a commencé à négocier au printemps de 1996, pour conclure de nouveaux accords. Bien que les câblodistributeurs avaient de sérieuses inquiétudes en ce qui concerne de nombreux aspects de la nouvelle entente cadre de la MEA, les principaux points de désaccord entre les parties concernent les tarifs de location des structures de soutènement. La MEA a adopté la position que le tarif de location annuel des structures de soutènement devrait passer de 10,42 $ à 40,92 $ par poteau.

7.Les câblodistributeurs se sont opposés à l'augmentation proposée des tarifs de la MEA arguant que cela représente une hausse d'environ 300 % par rapport au tarif actuel et constitue un contraste marqué par rapport au tarif de 9,60 $ établi par le CRTC dans sa décision Télécom CRTC 95-13 du 22 juin 1995 intitulée Accès aux structures de soutènement des compagnies de téléphone (la décision 95-13) concernant l'accès aux poteaux des compagnies de téléphone. Les câblodistributeurs ont été incapables de s'entendre avec les services publics d'électricité municipaux, de façon provisoire ou définitive. En outre, les câblodistributeurs se sont retrouvés dans l'impossibilité d'obtenir de permis d'accès aux structures de soutènement de la part des services publics d'électricité municipaux.

8.Dans sa demande de redressement provisoire, l'ACTC a demandé que le Conseil accorde aux requérants l'accès provisoire aux structures de soutènement des intimés, aux conditions applicables en 1996, sauf deux exceptions. Premièrement, que le tarif annuel de 10,42 $ par poteau s'applique de façon provisoire. L'ACTC soutient que les tarifs provisoires qu'elle propose feront l'objet d'un rajustement rétroactif quand le Conseil établira le tarif définitif. Deuxièmement, l'ACTC demande que les intimés répondent aux demandes de permis dans les 30 jours de la réception, faute de quoi la demande de permis sera considérée comme ayant été approuvée. L'ACTC indique qu'une demande ne pourra être refusée que pour des raisons techniques ou de sécurité. Elle soutient que cette deuxième condition est rendue nécessaire pour garantir que les requérants pourront aller rapidement de l'avant.

9.Dans sa réponse, la MEA s'oppose à la demande de l'ACTC, tant pour le redressement définitif que pour le provisoire. Elle s'appuie sur le fait que, selon elle, le Conseil n'a pas la compétence sur les plans constitutionnel ou statutaire d'accorder le redressement demandé, ainsi que sur le fond même de la demande. La MEA se réserve le droit de présenter des mémoires supplémentaires sur les questions de compétence à une date ultérieure et ne reconnaît ou ne concède pas expressément la compétence du Conseil en cette matière.

10.Par lettre datée du 27 mars 1997, le Conseil a indiqué qu'il n'était pas prêt, à ce moment, à rendre une décision sur la demande de redressement provisoire et déclarait qu'il était d'intérêt public que les parties tentent de régler leur litige avec l'aide du personnel du Conseil. En conséquence, le Conseil suspendait son étude de la demande de l'ACTC alors que les parties participaient à un processus de règlement de différends non officiel et non exécutoire conçu pour inciter les parties à résoudre leurs différends de façon mutuellement acceptable avec l'aide du personnel du Conseil. Le personnel du Conseil émettrait une opinion non exécutoire sur les questions non réglées après la réunion avec les parties. Cette opinion non exécutoire offrirait aux parties l'occasion d'examiner le bien-fondé de leur cause et elle favoriserait des négociations plus réalistes avant la prise d'une décision officielle par le Conseil. Si une partie jugeait qu'une question n'était pas encore résolue deux semaines après que le personnel ait émis son opinion aux parties, elle pourrait déposer une demande pour que le Conseil relance le processus afin de régler, de façon provisoire et définitive, toute question non résolue de manière satisfaisante. Le Conseil notait aussi que les parties auraient l'occasion de commenter l'opinion du personnel et de présenter d'autres mémoires, y compris des mémoires concernant la compétence constitutionnelle et statutaire. Il était aussi précisé que l'opinion du personnel, tous les documents déposés par les parties avant que l'opinion ne soit rendue et tous les mémoires subséquents déposés feraient partie du dossier de l'instance sur laquelle le Conseil baserait sa décision.

11.Les parties ont rencontré le personnel du Conseil le 23 avril 1997. À cette réunion, il apparaît que le principal sujet de désaccord entre les parties a trait à la méthode appropriée d'établissement des coûts ainsi qu'au tarif par poteau qui en découle. La méthode proposée par les intimés se traduit par un tarif annuel proposé de 40,92 $ par poteau. Tel que mentionné précédemment, les ententes les plus récentes, échues au plus tard le 31 décembre 1996 ou avant, prévoyaient un tarif annuel de 10,42 $ par poteau. À la fin de la réunion, les parties ont reconnu qu'il était peu probable de régler le différend principal lors de la réunion, à savoir la méthode appropriée d'établissement des coûts et le tarif par poteau qui en découle. Par conséquent, la réunion fut ajournée et la discussion des autres points soulevés par les parties reportée jusqu'à ce que le personnel du Conseil émette une opinion non exécutoire seulement sur la question de la méthodologie appropriée et du tarif par poteau.

12.Le 13 mai 1997, le personnel du Conseil a émis une opinion non exécutoire proposant que les parties adoptent un tarif annuel d'utilisation des structures de soutènement de 13,40 $ par poteau. Dans le but de poursuivre la discussion amorcée durant le processus de règlement des différends du Conseil, les parties se sont réunies en juin et en juillet, mais n'ont pas réussi à s'entendre. Le 8 août 1997, l'ACTC a écrit au Conseil pour lui demander l'autorisation de relancer sa demande d'établissement d'un redressement provisoire et définitif.

13.Dans une lettre du 8 septembre 1997, le Conseil reprend le processus. En ce qui concerne le redressement provisoire, les requérants et les intimés ont eu l'occasion de déposer des preuves et tout exposé additionnel, y compris les mémoires relatifs à l'opinion non exécutoire du personnel et les questions de compétence constitutionnelle et statutaire. Les autres parties intéressées ont aussi eu l'occasion de déposer des observations.

14.Le 1er octobre 1997, la MEA présente aux procureurs généraux du Canada et des provinces un Avis de question constitutionnelle conformément à la Loi sur la Cour fédérale. Toutefois, aucun des procureurs généraux n'a déposé de présentation.

15.Au cours de cette instance, le Conseil a reçu des observations sur les questions de compétence déposées par l'ACTC, la MEA et la CNP ainsi que la Saskatchewan Power Corporation, TransAlta, UMG Cable Telecommunications Inc. (UMG), Hydro-Ontario, Telus Corporation (Telus) et le Centre de ressources Stentor Inc. (Stentor) au nom de BC TEL, Bell Canada et MTS NetCom Inc., à titre de parties intéressées.

16.Le 7 novembre 1997, après deux dépôts de mémoires par les parties, le Conseil rejette la demande de redressement provisoire se fondant sur le fait que les requérants n'ont pas satisfait à un des critères d'octroi de redressement provisoire.3 Ayant conclu que le redressement provisoire serait rejeté, le Conseil n'avait pas besoin de répondre, pour le moment, aux autres arguments soulevés par les parties, y compris la question de sa compétence constitutionnelle et statutaire.

17.Conformément à ses Directives révisées sur la procédure émises le 23 septembre 1997, le Conseil a reçu des réponses aux demandes de renseignements, ainsi que les observations et réponses finales au nom des parties concernant le redressement définitif. Le dossier a été clos le 17 février 1998.

18.Il faut souligner que le Conseil était saisi d'une deuxième demande semblable déposée par UMG le 25 février 1997, conformément à la partie VII des Règles. Dans sa demande, UMG réclamait un redressement provisoire conformément aux paragraphes 42(1), 43(5), et aux articles 55 et 61 de la Loi et elle nommait Hydro-Ontario comme intimée. Dans une décision du 27 mars 1997, le Conseil a accordé un redressement provisoire à UMG et a livré des conclusions préliminaires sur les questions de compétence.

19.Le 24 avril 1997, Hydro-Ontario a déposé devant la Cour d'appel fédérale une requête en autorisation d'appeler, ainsi qu'un avis de demande introductive d'instance de contrôle judiciaire de la décision du Conseil. Dans ces deux demandes, Hydro-Ontario a prétendu, entre autres, que le Conseil commettait une erreur en concluant qu'il est habilité sur les plans juridique et constitutionnel à accorder un redressement provisoire à UMG. Le 29 mai 1998, la Cour d'appel fédérale a rendu sa décision refusant à Hydro-Ontario sa requête en autorisation d'appeler et rejetant la demande de contrôle judiciaire.

20.Les décisions de la Cour d'appel fédérale de refuser l'autorisation d'appel et de rejeter la motion d'examen judiciaire de la décision du Conseil dans la cause UMG c. Hydro-Ontario ont été rendues après la clôture de l'instance de redressement définitive dans la présente cause.

21.Dans une lettre datée du 3 juin 1998, l'ACTC a demandé que le Conseil statue sur sa demande de redressement définitif puisqu'il est devenu évident que les parties ne pourront pas s'entendre et [traduction] « étant donné que tout doute relatif à la compétence du CRTC en matière de différends relatifs à l'accès a été dissipé par la décision récente de la Cour d'appel fédérale ». L'ACTC soutenait plus particulièrement que la Cour d'appel fédérale a [traduction] « maintenu la compétence du CRTC en vertu de la Loi sur les télécommunications dans le but de résoudre les différends entre les câblodistributeurs et les services publics d'électricité concernant l'accessibilité aux poteaux des services publics d'électricité ».

22.Dans une lettre du 4 juin 1998, la MEA s'oppose à la position de l'ACTC pour plusieurs raisons. Plus particulièrement, la MEA souligne que le tribunal a rejeté la demande d'autorisation d'appel d'Hydro-Ontario sans motiver sa décision. De plus, la MEA signale que la décision de la Cour ne constitue pas plus un précédent exécutoire qu'un jugement sur la validité des arguments relatifs à la compétence constitutionnelle et statutaire déposés devant le Conseil. La MEA précise que certaines des soumissions faites par la MEA dans la cause en instance diffèrent grandement de celles soumises au tribunal par Hydro-Ontario et que l'autorisation demandée alors concernait une ordonnance provisoire et non pas une ordonnance définitive.

23.LA MEA soutient aussi que la lettre de l'ACTC du 3 juin 1998 renferme des arguments juridiques additionnels déposés après la clôture de l'instance, créant ainsi un manque d'équité procédurale et que l'on ne devrait donc pas en tenir compte.

24.Le Conseil a conclu que les lettres susmentionnées doivent être considérées comme faisant partie du dossier de l'instance. Les décisions du tribunal représentent un changement des circonstances qui s'est produit après la clôture du dossier de l'instance et dont les parties n'auraient pas pu traiter auparavant. Le Conseil est d'avis que les allégations de manque d'équité procédurale soulevées par la MEA ne sont pas justifiées puisque la MEA a eu l'occasion de répondre à la position de l'ACTC et en a tiré avantage.

25.Le Conseil reconnaît que les décisions de la Cour d'appel relatives à la décision intérimaire dans la cause UMG c. Hydro-Ontario ne représentent pas un précédent exécutoire sur les questions de compétence soulevées dans la présente demande. Par conséquent, le Conseil a rendu sa décision définitive dans le cas présent en se fondant sur le bien-fondé de la cause, après avoir pris dûment compte de tous les arguments avancés par les parties dans la présente instance, y compris les arguments en matière de compétence semblables à ceux soulevés dans la cause UMG c. Hydro-Ontario.

Points soulevés

26.Dans sa demande, l'ACTC réclamait que le Conseil accorde aux câblodistributeurs un accès permanent aux structures de soutènement des services publics d'électricité municipaux et ce, aux mêmes conditions qu'en 1996, sauf en ce qui concerne le tarif par poteau qui serait établi à 9,60 $ par an.

27.Voici les principaux points soulevés dans les mémoires relatifs à la demande de redressement définitif :

a) la compétence constitutionnelle et statutaire du Conseil en vertu du paragraphe 43(5) de la Loi;

b) un prétendu manque d'équité procédurale;

c) la nécessité d'une intervention au chapitre de la réglementation;

d) les coûts appropriés des poteaux et les tarifs de location des poteaux;

e) les conditions non monétaires de l'entente sur les structures de soutènement;

f) les autres coûts causals liés à l'utilisation des poteaux des services publics par les câblodistributeurs;

g) le tarif de location de poteaux des services publics d'électricité municipaux non représentés par la MEA.

A.La compétence constitutionnelle et statutaire du Conseil en vertu du paragraphe 43(5) de la Loi sur les télécommunications

1.Questions de compétence soulevées par les parties

28.Le Conseil fait remarquer que durant toute cette instance, la MEA a soutenu systématiquement que le Conseil n'a pas la compétence sur les plans constitutionnel ou statutaire d'accorder le redressement demandé. Par sa part, l'ACTC a affirmé que le Conseil a effectivement cette compétence.

29.Dans ses mémoires finals, la MEA a réitéré sa position et répété qu'elle restait sur ses positions établies à l'étape provisoire. Dans ses mémoires en réponse au redressement définitif, la MEA a soulevé d'autres arguments ayant trait à la compétence, y compris des soumissions concernant l'interprétation de l'expression « un autre lieu public » au paragraphe 43(5) de la Loi et la question connexe des structures de soutènement situées sur un terrain privé.

30.Les mémoires de la MEA étaient axés sur les deux points de compétence suivants :

(i)La compétence statutaire du Conseil conformément au paragraphe 43(5) de la Loi d'émettre les ordonnances demandées par l'ACTC;

(ii)La compétence constitutionnelle du Parlement d'adopter et la compétence constitutionnelle du Conseil d'appliquer le paragraphe 43(5) de la façon dont l'ACTC le demande.

31.En outre, la MEA soutient que la décision du Conseil dans la cause UMG c. Hydro-Ontario en date du 27 mars 1997, qui comportait des questions semblables à celles soulevées dans la cause de la MEA, même si les faits en cause étaient différents, était erronée. La MEA affirme, en plus, que la cause UMG c. Hydro-Ontario était une décision « préliminaire » et que le Conseil a clairement indiqué qu'il prenait cette décision en se fondant sur le fait qu'il pourrait, après avoir entendu les arguments de toutes les parties, en arriver à une conclusion différente en ce qui concerne sa compétence. Selon la MEA, cette nuance est pertinente puisque des mémoires approfondis et des faits constitutionnels n'étaient pas connus du Conseil à ce moment.

32.Dans ses mémoires finals, l'ACTC se fondait sur ses exposés intérimaires et sur les raisons invoquées dans la décision du Conseil dans la cause UMG c. Hydro-Ontario. Elle a avancé des arguments supplémentaires, dont des arguments sur l'interprétation « un autre lieu public ».

33.CNP et Deep River se sont toutes deux opposées à l'intervention du Conseil dans cette question. Selon CNP, le paragraphe 43(5) ne s'applique pas parce que les poteaux ne sont pas des biens publics, que bon nombre d'entre eux se trouvent sur des terrains appartenant à CNP et que les allégations selon lesquelles les câblodistributeurs ne peuvent avoir accès aux structures de soutènement à des conditions qui leur sont acceptables sont tout à fait subjectives et partiales. Deep River soutient que le Conseil devrait veiller à ce que les négociations se poursuivent et recourir au besoin à la médiation.

2.Position de l'ACTC et de la MEA : Compétence constitutionnelle

34.La MEA soutient que le paragraphe 43(5) échappe à la compétence constitutionnelle du Parlement fédéral et relève des législatures provinciales.

35.À cet égard, la MEA avance les arguments suivants :

a) les services publics d'électricité municipaux sont créés par les législatures provinciales et sont responsables devant leurs municipalités locales;

b) les membres de la MEA sont réglementés sous tous les aspects par Hydro-Ontario;

c) un système législatif complexe s'applique aux services d'électricité municipaux de l'Ontario;

d) de nombreuses provinces canadiennes ont établi des plans de réglementation ayant trait aux raccordements aux poteaux des services publics d'électricité;

e) de nombreux facteurs contribuent aux décisions et aux normes qui s'appliquent aux raccordements aux poteaux des services publics d'électricité;

f) l'électricité est dangereuse et les activités de raccordement aux poteaux doivent rester entre les mains des membres de la MEA pour assurer la sécurité des travailleurs et du public et la fiabilité technique du réseau de distribution de l'électricité;

g) les services publics d'électricité municipaux et l'industrie de la câblodistribution ont une longue relation et une tradition d'ententes négociées.

36.De plus, la MEA soutient que les circonstances ont changé depuis que la Cour suprême a décidé, à la fin des années 70, que puisque les câblodistributeurs étaient des entreprises uniques indivisibles, toutes les fonctions de câblodistribution, y compris le réseau de distribution des signaux, étaient de compétence fédérale. La MEA fait valoir qu'il faudrait réviser la décision initiale de la Cour suprême.

37.La MEA souligne que selon la conclusion du Conseil, les câblodistributeurs ont une nature double, étant à la fois des entreprises de radiodiffusion et des entreprises de télécommunications. De plus, la MEA soutient que, bien qu'il y avait une certaine logique à trouver que toute l'entreprise était reliée et indivisible antérieurement, les câblodistributeurs ne sont plus tenus de posséder leurs propres installations de distribution. En d'autres termes, bien que la réception des signaux puisse être essentielle au câblodistributeur, celui-ci peut louer l'ensemble du réseau de distribution, de sorte que le réseau peut se trouver à l'intérieur des limites d'une seule province. En ce sens, la MEA indique qu'une division semblable s'est produite dans la cause de Hydro-Ontario où la Cour suprême a jugé que les installations nucléaires d'Hydro-Ontario étaient de compétence fédérale, mais que le réseau de distribution de l'électricité et les centrales électriques conventionnelles étaient de juridiction provinciale.

38.La MEA soutient aussi que le paragraphe 43(5) n'a pas de rapport avec les compétences fédérales. Il ne fait aucunement mention d'entreprises fédérales ou d'autres sujets de nature fédérale, contrairement au reste des articles 42 et 43 qui citent des « entreprises canadiennes » et des « entreprises de distribution ». La MEA avance qu'une disposition peut être subsumée à l'intérieur d'une compétence fédérale, quand elle est étroitement liée à un texte législatif fédéral, mais que ce lien étroit peut être contesté.

39.La MEA avance que la décision de la Cour suprême du Canada dans General Motors c. City National Leasing4 maintient le principe qu'un lien très étroit doit exister entre la disposition et la Loi dans son ensemble si les pouvoirs des provinces sont grandement affectés par la législation fédérale, comme dans le cas du paragraphe 43(5). À cet égard, la MEA suggère que le paragraphe 43(5) peut facilement être dissocié du reste du texte. Rien ne prouve que les câblodistributeurs ne pourraient pas fonctionner sans le paragraphe 43(5). En outre, le paragraphe 43(5) peut être interprété de façon à ne pas s'appliquer aux compagnies d'électricité provinciales.

40.La MEA souligne qu'une série élaborée et complexe de lois et règlements provinciaux régissent l'ensemble des activités des services publics d'électricité municipaux en Ontario et les lient aux municipalités. Bien que ces services publics soient chargés de contrôler et de gérer les installations, les municipalités, conformément à la Loi sur les municipalités, et Hydro-Ontario jouent un rôle dans le contrôle des biens et des finances des services publics d'électricité municipaux. Selon la MEA, tout ce qui vise les services publics d'électricité municipaux touche ce système législatif provincial. Les conditions demandées par l'ACTC ainsi que l'accès aux poteaux des services d'électricité toucheraient leur activité principale.

41.La MEA soutient que la distribution d'électricité, à cause du danger qu'elle représente, ne laisse pas une grande marge d'erreur. La participation du Conseil à l'industrie de l'électricité ne porte pas seulement sur le prix, mais aussi sur les conditions d'accès. De l'avis de la MEA, il y a des textes législatifs provinciaux élaborés pour assurer que l'électricité parvienne aux consommateurs de façon sûre et efficace et ce système doit être préservé, même si cela signifie des inconvénients pour les câblodistributeurs.

42.L'ACTC a répondu que même si le Conseil a conclu que les câblodistributeurs ont une double nature, puisqu'ils peuvent agir à titre d'entreprises de radiodiffusion et d'entreprises de télécommunications, ils sont assujettis à la compétence fédérale sous les deux aspects de leur double nature.

43.L'ACTC affirme qu'il n'y a aucun doute que le Parlement détient le pouvoir constitutionnel de toucher les droits de propriété pour réglementer les entreprises canadiennes et les entreprises de distribution. À cet égard, l'ACTC souligne que l'article 43 définit un régime législatif complet qui permet aux entreprises canadiennes et aux entreprises de distribution de construire, exploiter et entretenir leurs lignes de transmission. Les paragraphes 43(2) à 43(4) portent sur les cas où il est nécessaire de construire des structures de soutènement pour les lignes de transmission, tandis que le paragraphe 43(5) vise les structures de soutènement qui existent déjà. Toutes ces dispositions relèvent de la compétence législative du Parlement.

44.L'ACTC avance que l'approche analytique définie dans la décision proposée par la MEA, telle qu'appliquée dans General Motors c. City National Leasing, n'a pas d'incidence sur les télécommunications. L'ACTC suggère que même si la décision est pertinente, le paragraphe 43(5) fait partie intégrante d'un système législatif, en vertu de l'article 43, pour la construction de lignes de transmission par des entreprises canadiennes et des entreprises de distribution et qu'il garantit que les structures de soutènement sont partagées dans la mesure du possible, ce qui permet d'éviter des dépenses inutiles et des inconvénients pour le public. Selon l'ACTC, il n'est pas seulement raisonnable mais indispensable que le Conseil ait compétence dans le cas présent.

3.Position de l'ACTC et de la MEA : Compétence statutaire

45.La MEA indique que le paragraphe 43(5) comporte de nombreuses ambiguïtés et que sa signification est obscure. Plus particulièrement, selon la MEA, parce que les mots et expressions comme « fournisseur », « structure de soutien d'une ligne de transmission », « autre lieu public » et « conditions » sont ambigus, il faut aller plus loin que leur sens courant.

46.La MEA affirme que, parce que le paragraphe 43(5) est obscur, il importe d'examiner l'intention du Parlement quand il a rédigé cette disposition. La MEA avance l'argument qu'alors que le Conseil a utilisé la signification du dictionnaire dans la décision UMG c. Hydro-Ontario, il aurait dû examiner le contexte statutaire de la disposition. À cet égard, elle croit que les deux éléments de contexte statutaire sont le contexte immédiat des termes jugés ambigus ainsi que leur utilisation ailleurs dans le texte de la loi.

47.L'ACTC soutient que le Conseil a eu raison de se fonder sur le sens ordinaire du paragraphe 43(5) dans la décision UMG c. Hydro-Ontario. L'ACTC souligne que le Conseil a aussi considéré et adopté le contexte statutaire, qui appuie l'interprétation préconisée par l'ACTC dans l'instance actuelle. Selon l'ACTC, l'interprétation fondée sur l'objet du paragraphe 43(5) appuierait une interprétation expansive, étant donné l'intention évidente de cet article, à savoir promouvoir le partage et l'utilisation efficace des structures de soutènement. L'ACTC indique que, dans la décision UMG c. Hydro-Ontario, le Conseil décrit l'origine législative du paragraphe 43(5) et que, de cette description, il ressort clairement que le paragraphe 43(5) représente un élément intégral d'un système législatif cohérent visant à régler les problèmes de structures de soutènement et une tentative pour tenir compte des préoccupations des provinces concernant la prolifération possible des structures de soutènement.

48.La MEA soutient que, selon l'article 4 de la Loi, le « fournisseur de services au public » ne peut pas être une « entreprise de distribution » parce que le paragraphe 43(5) n'inclut pas explicitement les entreprises de distribution. La MEA souligne que le Parlement a mentionné les « entreprises canadiennes » et les « entreprises de distribution » dans des dispositions connexes des articles 42 et 43, mais est passé à « fournisseur de services » au paragraphe 43(5). De plus, la MEA suggère que le mot anglais « person » est ambigu puisque l'expression utilisée dans la version française est « fournisseur de services » plutôt qu'un terme équivalant à « person ». Selon la MEA, si on applique une démarche fondée sur l'objet pour interpréter la Loi, le paragraphe 43(5) devrait être dûment interprété pour permettre aux entreprises autres que de radiodiffusion d'accéder aux poteaux que les entreprises canadiennes et les entreprises de distribution ont eu l'autorisation de construire en vertu des articles 42 et 43. Le paragraphe 43(5) ne signifie pas que le Conseil peut rendre des décisions à l'égard d'organismes qui ne relèvent pas de la compétence fédérale.

49.L'ACTC soutient que l'interprétation du mot « person » par la MEA n'est ni fondée ni pertinente. Du point de vue de l'ACTC, il n'y a aucune distinction ou incongruité entre les expressions française et anglaise. Les deux désignent, en termes généraux, un fournisseur de services au public. Il est évident qu'un câblodistributeur est considéré comme « person who provides services to the public » ou comme « fournisseur de services au public ».

50.La MEA est d'avis que la décision UMG c. Hydro-Ontario était erronée dans sa conclusion selon laquelle l'absence de qualification de l'expression « ligne de transmission » au paragraphe 43(5) indique l'intention du Parlement d'inclure un type plus général de ligne de transmission. La MEA croit que les expressions « ligne de transmission » et « structures de soutien », si on les examine dans le contexte du texte législatif lui-même, doivent être interprétées comme désignant les lignes de transmission de télécommunications et leurs structures de soutènement. Selon la MEA, les poteaux des services d'électricité ne relèvent pas de la compétence statutaire du Conseil.

51.La MEA avance que, parce que d'autres paragraphes de la Loi désignent spécifiquement les « lignes de transmission » comme étant qualifiées dans le contexte des entreprises de télécommunications ou des entreprises de distribution, l'emploi de l'expression « ligne de transmission » au paragraphe 43(5) doit, de la même façon, désigner une ligne téléphonique ou un câble de câblodistribution plutôt qu'une ligne de transmission d'électricité. De l'avis de la MEA, pareille interprétation conserve le sens uniforme de l'expression « ligne de transmission » dans tout le texte législatif. En outre, la MEA soutient que la similitude entre les expressions « installation de transmission » et « ligne de transmission » semble indiquer que les transmissions qui intéressent la Loi concernent les renseignements ou les données et non pas le courant électrique. De plus, la MEA est d'avis que le Conseil a erré en se fondant sur la décision UMG c. Hydro-Ontario en ce qui a trait à l'emploi de « ligne sous-marine servant aux télécommunications » par le Parlement dans la définition de « câble sous-marin international » comme étant une indication de la portée de l'expression « ligne de transmission » au paragraphe 43(5). De l'avis de la MEA, l'emploi de « ligne sous-marine servant aux télécommunications » constituait une tentative de la part du Parlement de mettre en évidence les éléments d'émission et de réception d'une telle ligne, plutôt que de simplement la définir comme étant une ligne de transmission. Ainsi, le Parlement a utilisé l'expression « ligne sous-marine servant aux télécommunications » dans le contexte du câble sous-marin pour une raison et cette raison n'a aucune incidence sur le paragraphe 43(5).

52.La MEA affirme aussi que l'expression « structure de soutien d'une ligne de transmission » doit être interprétée dans le contexte où elle apparaît et que, non seulement « ligne de transmission » doit être interprétée comme une ligne servant aux télécommunications, mais que « structures de soutien » doit aussi être interprétée comme structure de soutènement de télécommunications. Il n'importe donc pas que les câbles de câblodistribution soient déjà fixés à certains poteaux de services publics, car les poteaux eux-mêmes ne sont pas du ressort du Conseil parce qu'ils ne constituent pas des « structures de soutien » aux télécommunications.

53.Le MEA souligne que le paragraphe 43(5) a été ajouté après la deuxième lecture du projet de loi C-62, sans qu'il y ait de véritable débat parlementaire. Ni le paragraphe 43(5), ni aucune disposition semblable ne figure dans la Loi sur les chemins de fer, loi qui précédait la Loi sur les télécommunications ou dans les textes législatifs connexes sur les télécommunications. De l'avis de la MEA, les raisons pour lesquelles cette disposition a été ajoutée ne sont pas claires, ni les problèmes qu'elle était censée régler. Quelles qu'en soient les raisons, le Parlement ne pouvait pas avoir l'intention de dire que les « lignes de transmission » incluent les fils de transmission de l'électricité qui se trouvent entièrement à l'intérieur d'une province ou que les « structures de soutien » incluent les poteaux de transmission de l'électricité.

54.L'ACTC soutient que les prétendues ambiguïtés soulevées par la MEA ne sont rien d'autres que des tentatives visant à obscurcir le premier sens d'une disposition rédigée clairement. Selon l'ACTC, il n'y a aucune ambiguïté dans l'emploi des expressions « ligne de transmission » et « structure de soutien » et les deux ont un sens suffisamment large pour inclure les lignes et les poteaux des services publics d'électricité.

55.L'ACTC soutient que l'emploi de l'expression plus générale « ligne de transmission » dans le paragraphe 43(5), sans la précision « télécommunications » ou expressions explicatives comme « entreprise canadienne » trouvées ailleurs dans la Loi indique que le Parlement voulait que l'expression ait son sens naturel le plus large. Dans le paragraphe 43(5), s'il avait voulu référer à une ligne dont le seul but est de recevoir, émettre ou transmettre des renseignements, le Parlement aurait utilisé « ligne servant aux télécommunications » comme il l'a fait dans la définition de « câble sous-marin international ».

56.Selon l'ACTC, l'argument de la MEA voulant que « structures de soutien » doit se lire « structures de soutien servant aux télécommunications » parce que les poteaux des services d'électricité ne sont pas du ressort du Conseil n'est ni pertinent ni fondé. De l'avis de l'ACTC, le sens ordinaire de « structure de soutien d'une ligne de transmission » inclut un poteau appartenant à un service d'électricité.

57.La MEA suggère que les expressions « voie publique » et « autre lieu public » suggèrent le contexte de l'une et l'autre. À son avis, le Parlement avait l'intention que le type de « lieu public » en question partage le même type d'accès public que celui d'une « voie publique » et, par conséquent, qu'un droit de passage ne serait pas le type « d'autre lieu public » envisagé par le Parlement.

58.La MEA croit aussi qu'en droit, un droit de passage sur un terrain privé détenu par un service public d'électricité municipal ne confère pas un droit d'accès public pas plus qu'il ne constitue le type « d'autre lieu public » envisagé par le Parlement. De l'avis de la MEA, l'expression « autre lieu public » ne peut pas être raisonnablement interprétée comme incluant les terrains privés.

59.La MEA souligne que de nombreux poteaux des services publics d'électricité municipaux se trouvent sur des terrains privés. La proportion est spécifique à chacun de ces services et varie considérablement. Une partie des poteaux se trouve sur des servitudes accordées à un service public d'électricité municipal alors que d'autres sont en place conformément à une entente entre les propriétaires des terrains et ces services. À son avis, l'application du paragraphe 43(5) aux terrains privés constituerait une forme d'expropriation illégale.

60.L'ACTC propose qu'au contraire de l'interprétation étroite préconisée par la MEA, l'expression « autre lieu public » doit être interprétée dans le contexte du paragraphe 43(5) et non pas simplement en rapport avec l'expression « voie publique ». L'objectif du paragraphe 43(5) est de promouvoir le partage et l'utilisation efficace des structures de soutènement actuelles. Dans ce but et comme on présume que le Parlement est censé connaître l'emplacement des structures de soutènement dans les droits de passage des services publics, il n'y aurait absolument pas lieu d'interpréter « autre lieu public » comme étant un emplacement qui doit comporter le même type d'accès public qu'une « voie publique » tel que l'entend la MEA.

61.De l'avis de l'ACTC, le paragraphe 43(5) doit recevoir sa signification courante et être interprété comme s'appliquant aux structures de soutènement qui appartiennent aux services publics d'électricité. L'ACTC soutient que si cette interprétation n'est pas adoptée, il y aura une lacune importante et injustifiable dans le régime établi en vertu de l'article 43. À l'appui de cet argument, l'ACTC souligne, par exemple, que presque tous les poteaux (environ 95 %) en Alberta appartiennent aux services publics d'électricité. À Terre-Neuve, les poteaux des services publics d'électricité sont mélangés aux poteaux appartenant à la compagnie de téléphone NewTel Communications Inc., d'où la futilité d'octroyer l'accès aux poteaux de NewTel seulement.

62.L'ACTC est d'avis que, dans le contexte du paragraphe 43(5), l'expression « autre lieu public » doit être comprise comme incluant les droits de passage et les servitudes. Du point de vue de l'ACTC, on doit présumer que le Parlement sait qu'un certain pourcentage des structures de soutènement qui appartiennent, soit aux services publics d'électricité, soit aux compagnies de téléphone, sont situés sur des droits de passage de services publics dans de nombreuses provinces. L'ACTC soutient, en outre, qu'il serait inutile que le Parlement établisse un régime de réglementation qui obligerait un câblodistributeur à construire une nouvelle ligne de structures de soutènement sur une voie publique quand des structures de soutènement qui ont une capacité excédentaire se trouvent déjà sur les droits de passage de service public voisin. Dans pareil scénario, le Conseil peut accorder un redressement en ce qui a trait à la majorité des structures de soutènement, mais pas en ce qui concerne les rares exceptions. Le Parlement ne peut pas avoir envisagé un tel régime d'accès chaotique.

63.L'ACTC affirme aussi que si les poteaux situés sur les droits de passage ou les servitudes publics ne sont pas inclus, les raccordements à ces poteaux pourraient faire l'objet de tarifs excessifs et d'autres conditions d'accès déraisonnables, ce qui risquerait d'annuler l'effet global des tarifs et conditions raisonnables imposés par le Conseil et serait contraire à l'intention du Parlement.

64.L'ACTC soutient aussi qu'un droit de passage de service public ne peut pas être considéré comme une propriété privée dans le sens habituel. C'est un terrain réservé à des fins publiques, soit la mise en place d'installations de services publics dans le but de permettre la prestation de services publics à l'avantage de tous. L'objectif public reste le même, que le droit de passage soit accordé par voie législative ou consensuelle. Les structures de soutènement situées sur un droit de passage de service public peuvent servir à plus d'une fin publique, ce qui ne modifie pas la nature publique d'un tel droit de passage. De l'avis de l'ACTC, l'objectif public d'un droit de passage de service public en fait un « lieu public » aux fins du paragraphe 43(5) et est conforme à l'interprétation fondée sur l'objet de l'expression.

65.L'ACTC est d'avis que, selon la preuve présentée par la MEA, 92 % des structures de soutènement faisant l'objet d'ententes entre les services publics d'électricité et les câblodistributeurs se trouvent sur les réserves routières des voies publiques et des rues. Les 8 % des structures de soutènement des membres de la MEA qui restent se trouvent sur des propriétés qui font l'objet d'un droit de passage ou d'une servitude de service public accordé par voie législative ou consensuelle.

66.Dans sa réponse au mémoire final de l'ACTC, la MEA met l'accent sur l'idée que le paragraphe 43(5) ne s'applique qu'aux lieux publics et non aux terrains privés. À ce titre, la MEA confirme que 92 % des poteaux des services publics d'électricité d'utilisation conjointe de 18 des intimés se trouvent sur des réserves des voies publiques et des rues.

67.La MEA soutient que le fait pour l'ACTC de tenir pour acquis que le reste des poteaux des services publics d'électricité se trouvent sur des terrains [traduction] « qui sont l'objet d'un droit de passage ou d'une servitude de services publics, législative ou consensuelle, est injustifiable et sans preuves ». La MEA indique particulièrement « que certains poteaux des services publics d'électricité se trouvent sur des propriétés publiques, mais que, plusieurs poteaux se trouvent sur des terrains privés sans les avantages d'un droit de passage ou d'une servitude. Dans certains cas, des propriétaires ont permis que les poteaux des services publics d'électricité soient placés sur leur terrain sans accorder un droit de passage ». De l'avis de la MEA, l'ACTC a essayé d'escamoter la question des droits de propriété dans l'interprétation qu'elle propose du paragraphe 43(5) de la Loi.

68.De l'avis de la MEA, permettre à un organisme gouvernemental d'ordonner l'utilisation de terrains privés à des fins d'utilité publique constitue une forme d'expropriation. La MEA prétend que ce genre d'expropriation par le Conseil est permis, conformément à l'article 42, dans des cas très précis et que, pour que le paragraphe 43(5) s'applique à des terrains privés, le gouvernement fédéral doit officiellement exproprier le terrain et en faire un lieu « public ». Cette mesure, selon la MEA, implique une juste compensation. De plus, la MEA soutient que l'esprit de l'article 43 permet au Conseil de rendre des ordonnances relatives aux terrains publics seulement et que le Parlement a expressément évité d'accorder des pouvoirs d'expropriation au Conseil dans les situations visées par l'article 43.

69.Selon la MEA, les lieux publics ont été définis dans d'autres contextes comme des lieux où le public peut aller ou des lieux où une invitation est lancée au public de pénétrer sur le terrain. Du point de vue de la MEA, les terrains privés occupés par les poteaux d'un service public d'électricité n'impliquent pas que le public a été invité à entrer sur ces terrains. La MEA ajoute de surcroît qu'une municipalité est un corps constitué qui n'est pas le public et que, par conséquent, les terrains occupés en partie par les services d'électricité municipaux et qui appartiennent à des propriétaires privés demeurent privés parce que le droit de passage ne permet pas à d'autres personnes d'entrer sur le terrain.

70.De plus, la MEA soutient que la mesure appropriée dans laquelle les parties doivent négocier de bonne foi avant de demander une ordonnance du Conseil n'est pas claire.

71.L'ACTC croit que l'argument de la MEA qui concerne le degré de négociations entre les parties avant d'approcher le Conseil n'est ni pertinent ni fondé. À cet égard, l'ACTC déclare qu'il n'y a aucun doute qu'il y a eu de véritables négociations sur la question de l'accès.

72.La MEA déclare que la mesure dans laquelle les « conditions » imposées par le Conseil couvriraient des éléments d'une entente qui serait normalement librement négociée entre les parties n'est pas claire. La MEA laisse également entendre qu'on ne sait pas précisément si ces « conditions » auraient une incidence sur des industries, comme l'industrie de l'électricité, qui ne sont pas du ressort du Conseil.

73.L'ACTC est d'avis que l'expression « conditions qu'il juge indiquées » n'est pas ambiguë et doit, évidemment, s'appliquer à l'accès aux structures de soutènement. L'ACTC indique que cette expression englobe clairement les conditions d'une entente sur les structures de soutènement qui relèvent de l'expertise du Conseil. L'ACTC note qu'elle n'a demandé aucune condition qui pourrait être interprétée autrement.

74.La MEA soutient aussi qu'il y a une présomption de droit que l'intention du Parlement en ce qui a trait à une disposition précise est d'éviter des résultats absurdes. Il est absurde de prétendre que le Conseil « régit » les services publics d'électricité ou a le pouvoir de rédiger l'ensemble du contrat pour que les câblodistributeurs puissent utiliser les poteaux des services publics d'électricité. La MEA ajoute que le Conseil n'a pas l'expertise voulue pour administrer toutes les normes techniques et de sécurité implicites dans la distribution de l'électricité. En outre, si une interprétation large est donnée au paragraphe 43(5), la MEA est d'avis que le Conseil pourrait devoir en venir à réglementer l'accès d'un publicitaire (un « fournisseur de services ») qui veut poser des affiches, près des routes ou sur des poteaux qui soutiennent des tubes pneumatiques entre les bureaux du gouvernement (« structures de soutien » d'une « ligne de transmission »).

75.De l'avis de l'ACTC, il n'y a rien d'absurde à ce que les conditions d'accès aux poteaux des services publics d'électricité relèvent du Conseil. Cette compétence n'équivaut pas à administrer toutes les normes techniques et de sécurité implicites dans la distribution d'électricité, comme le prétend la MEA. L'ACTC reconnaît que des normes et techniques de sécurité existent déjà et qu'il faudra en tenir compte.

76.En outre, l'ACTC croit qu'en ce qui a trait à la présente demande, le Conseil n'est pas confronté à un choix entre la sécurité du public et le service de télévision par câble. L'ACTC souligne que les requérants ont demandé au Conseil de leur permettre l'accès aux structures de soutènement des intimés selon les conditions de l'entente en place depuis un certain nombre d'années avant 1997.

4.Position des autres parties: Compétence constitutionnelle et statutaire

77.Tel que souligné plus haut, en plus des commentaires et des réponses aux observations reçues de l'ACTC et de la MEA, le Conseil a reçu des observations sur les questions de compétence de la part de CNP, Saskatchewan Power Corporation, TransAlta, UMG, Hydro-Ontario, Telus et de Stentor au nom de BC TEL, Bell Canada et MTS NetCom Inc., à titre de parties intéressées.

78.La Saskatchewan Power Corporation et TransAlta ont déposé, à l'étape provisoire, de brèves observations à l'appui de la position de la MEA. Bien que leurs remarques aient été déposées en retard, le Conseil a jugé bon de les accepter dans le cadre du redressement provisoire. Même si les deux parties se réservaient le droit de participer davantage au redressement définitif, aucun mémoire n'a été reçu au stade final.

79.UMG adopte la position que le Parlement du Canada jouit des compétences nécessaires pour promulguer les paragraphes 42(1) et 43(5) de la Loi et qu'une interprétation adéquate permet de conclure que les deux s'appliquent pour permettre au Conseil d'imposer le redressement demandé. Hydro Ontario soutient que le redressement devrait être refusé parce qu'il ne relève pas de la compétence statutaire et constitutionnelle du Conseil. Hydro-Ontario fait valoir que l'intention du paragraphe 43(5) est, clairement, d'apporter une solution à un fournisseur de services au public qui ne peut pas avoir accès aux installations de distribution d'une compagnie de télécommunication du ressort du Conseil. Hydro-Ontario est d'avis que même si le gouvernement fédéral était habilité à légiférer en ce qui a trait au réseau de distribution d'électricité d'une province, le paragraphe 43(5) de la Loi ne reconnaît pas cette compétence au Conseil.

80.Stentor estime que le Parlement dispose de l'autorité constitutionnelle de légiférer en ce qui concerne l'accessibilité par les entreprises canadiennes et les entreprises de distribution aux structures de soutènement appartenant à des services publics réglementés par les provinces ou exploités par eux. Selon Stentor, le paragraphe 43(5) s'applique aussi aux cas où une entreprise canadienne ou une entreprise de distribution ne peut accéder, à des conditions acceptables pour elle, aux structures de soutènement situées sur une voie publique ou un autre lieu public appartenant à des services publics réglementés par les provinces ou exploités par eux.

81.Stentor propose d'interpréter l'expression « ligne de transmission » dans le paragraphe 43(5) comme signifiant une ligne de transmission de télécommunications. Cette interprétation serait conforme de façon inhérente à l'ensemble de l'article 43. Les entreprises canadiennes et les entreprises de distribution construisent des lignes de transmission de télécommunications et non pas des lignes de transmission électriques. Par conséquent, une interprétation juste du paragraphe 43(5) est que, si une structure de soutènement d'un service public d'électricité est construite sur une voie publique ou un autre lieu public, un fournisseur de services au public (c.-à-d. une entreprise canadienne ou une entreprise de distribution relevant de la compétence fédérale), qui demande l'accès à ces structures pour soutenir une ligne de transmission de télécommunications, peut en réclamer l'accès au Conseil si un tel fournisseur ne peut l'obtenir à des conditions acceptables.

82.Stentor croit que l'essence et la substance du paragraphe 43(5) concernent les entreprises fédérales et les télécommunications et qu'il peut, validement, avoir une incidence sur des questions de propriété et de droits civils à l'intérieur d'une province. À cet égard, Stentor souligne que le paragraphe 43(3) et ses prédécesseurs ont depuis longtemps une telle incidence sur les municipalités et qu'il y a un lien clair et rationnel entre un objectif valide de la Loi et la nécessité d'accéder aux structures de soutènement. Par conséquent, Stentor croit que le paragraphe 43(5) de la Loi est un texte de loi fédérale valide, malgré ses répercussions secondaires sur la propriété et les droits civils dans une province.

83.Stentor ajoute que, bien qu'il soit clair que le Conseil a la compétence de traiter les questions litigieuses concernant l'accès aux structures de soutènement, il n'y aurait pas lieu de conclure qu'il peut régir la disposition d'accès aux structures de soutènement qui appartiennent aux services publics municipaux ou sont exploitées par eux de façon continue. De l'avis de Stentor, le paragraphe 43(5) visait à habiliter le Conseil à résoudre les litiges sur une base individuelle, comme l'Office national des transports et les organismes qui l'ont précédé le faisaient en vertu de dispositions analogues au paragraphe 43(4) de la Loi sur les chemins de fer et avant l'entrée en vigueur de l'article 104 de la Loi sur les télécommunications.

84.Telus soutient que l'expression « ligne de transmission » au paragraphe 43(5) doit signifier une ligne de transmission de télécommunications. Donc, toute structure de soutènement qui soutient une ligne de transmission de télécommunications relève du Conseil en vertu du paragraphe 43(5). Le langage générique utilisé dans ce paragraphe indique qu'il vise les structures de soutènement sur lesquelles les lignes de télécommunications sont transportées, quel que soit le propriétaire des structures de soutènement.

85.Telus souligne aussi que le Conseil est guidé par les principes enchâssés dans l'article 7 de la Loi, y compris : favoriser le développement ordonné des télécommunications partout au Canada en un système qui contribue à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure sociale et économique du Canada et de ses régions; permettre l'accès aux Canadiens dans toutes les régions - rurales ou urbaines - du Canada à des services de télécommunications sûrs, abordables et de qualité et accroître l'efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes. Du point de vue de Telus, l'adoption d'une interprétation restrictive du paragraphe 43(5) où seulement les structures de soutènement appartenant à des entreprises canadiennes relèveraient du Conseil serait contraire au langage générique de la disposition et priverait le Conseil des moyens d'atteindre les objectifs mêmes de la Loi.

86.Telus indique qu'il n'y a aucune jurisprudence5 où la doctrine de l'exclusivité des compétences des lois fédérales ait été appliquée afin de protéger les sociétés à charte provinciale ou les entreprises réglementées par une province des incidences d'application des lois fédérales sur la nature ou les pouvoirs essentiels de ces entreprises. Selon Telus, toutefois, il est difficile de voir comment le paragraphe 43(5) de la Loi serait considéré comme touchant la nature ou les pouvoirs essentiels des services publics d'électricité sous réglementation provinciale. De l'avis de Telus, l'analyse constitutionnelle devrait se fonder sur la question à savoir si la Loi peut avoir un effet secondaire ou accessoire sur une entreprise provinciale.

87.Telus soutient que la Loi est nettement liée à une question de compétence fédérale et que si le paragraphe 43(5) est un texte de loi fédéral valide dont l'essence et la substance se rapportent à une question du ressort du Parlement, il peut, de façon valide, avoir des répercussions accessoires sur la propriété et les droits civils dans une province. Une interprétation raisonnable du paragraphe 43(5) ne toucherait que les poteaux provinciaux ayant déjà servi à supporter des lignes de transmission; le droit qui est accordé n'est qu'un droit d'accès, il ne constitue pas une servitude et, on peut présumer qu'il ne nuit pas au fonctionnement des poteaux d'électricité. De l'avis de Telus, cela ne constitue qu'un empiétement très mineur. Par conséquent, le moyen d'établir dans quelle mesure la disposition contestée est nécessaire au régime législatif par ailleurs valide est de déterminer s'il y a un lien rationnel et fonctionnel entre le paragraphe 43(5) et la partie valide de la Loi, soit la réglementation des télécommunications et le déploiement des lignes de transmission.6 À cet égard, Telus fait valoir que l'accès aux structures de soutènement qui transportent déjà des lignes de transmission est lié, de façon rationnelle et fonctionnelle, à la réglementation des télécommunications et elle conclut que le paragraphe 43(5) est une législation fédérale valide, malgré ses effets accessoires sur la propriété et les droits civils à l'intérieur d'une province.

5.Analyse et conclusion sur la compétence

88.Le Conseil a soigneusement étudié les mémoires des parties en ce qui a trait à sa compétence statutaire et constitutionnelle. Bien que les faits qui conduisent à cette demande diffèrent de ceux de la cause UMG c. Hydro-Ontario, bon nombre des arguments de compétence soulevés dans cette instance sont semblables à ceux présentés ici. Après étude plus approfondie de ces arguments, le Conseil a, dans une certaine mesure, rendu une décision finale identique aux conclusions préliminaires tirées dans la décision provisoire UMG c. Hydro-Ontario. La décision du Conseil sur sa compétence constitutionnelle et statutaire est expliquée ci-dessous.

5.1 Compétence constitutionnelle

89.Conformément au paragraphe 52(1) de la Loi, le Conseil connaît, dans l'exercice des pouvoirs et fonctions que lui confère la Loi, aussi bien des questions de droit que des questions de fait. À la lumière de la jurisprudence pertinente, pareil pouvoir explicite permet au Conseil d'étudier et de rendre une décision sur la validité constitutionnelle d'un texte législatif qu'il doit mettre en application.7 Si le Conseil estime qu'une disposition est constitutionnellement non valide, il peut traiter la disposition législative comme étant nulle et sans effet.

90.Afin de dûment évaluer la validité du paragraphe 43(5), il faut tout d'abord déterminer le contenu ou la matière traitée par la loi pour être en mesure de qualifier adéquatement l'essence et la substance de la disposition et d'évaluer si elle se rapporte à une question de compétence fédérale. À cette fin, il faut non seulement tenir compte des effets juridiques de la disposition, mais examiner l'objectif visé par l'adoption de ce texte de loi.8

91.Conformément à l'article 47 de la Loi, le Conseil doit exercer les pouvoirs et les fonctions que lui confèrent la Loi et toute loi spéciale de manière à réaliser les objectifs de la politique canadienne de télécommunication définis à l'article 7 de la Loi. Le Conseil est d'avis qu'il y a un lien direct entre les objectifs de la politique et les buts sous-jacents que le paragraphe 43(5) vise à atteindre. Plus particulièrement, le Conseil souligne que, conformément à l'article 7, il doit exercer les pouvoirs que lui confère la Loi de manière à réaliser, entre autres, les objectifs suivants : favoriser le développement ordonné des télécommunications partout au Canada en un système qui contribue à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure sociale et économique du Canada; permettre l'accès aux Canadiens dans toutes les régions - rurales ou urbaines - du Canada à des services de télécommunications sûrs, abordables et de qualité; accroître l'efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes; et satisfaire les exigences économiques et sociales des usagers des services de télécommunications.

92.Le Conseil est d'avis que le paragraphe 43(5) de la Loi est une disposition validement adoptée dans le cadre de la compétence législative du Parlement du Canada. Elle prévoit un recours statutaire aux entreprises de distribution, aux entreprises canadiennes et aux autres fournisseurs de service au public. Elle s'applique dans les circonstances où ces entreprises ont été incapables de négocier des conditions qui leur soient acceptables et qui leur permettrait d'avoir accès aux structures de soutènement situées sur les voies publiques ou dans d'autres lieux publics afin d'y entretenir ou d'y mettre en place des installations existantes ou nouvelles. Le Conseil croit que le paragraphe 43(5) de la Loi est conçu pour encourager l'utilisation conjointe des structures de soutènement actuelles afin de faciliter le déploiement efficace d'installations fixes de distribution d'entreprises de câblodistribution, d'entreprises canadiennes ou d'autres fournisseurs de services au public. Le Conseil juge que cette disposition s'applique quand le requérant, l'intimé ou les deux sont des entreprises fédérales au sens de la Loi sur les télécommunications ou de la Loi sur la radiodiffusion.

93.Le Conseil estime que l'article 43 constitue un système législatif exhaustif, car il traite non seulement de la construction de lignes de transmission, mais aussi de l'accès aux structures de soutènement actuelles. Il est d'avis que l'inaptitude du Parlement à mettre en place un système législatif exhaustif permettant le déploiement ordonné de réseaux de distribution et l'utilisation conjointe efficace des structures de soutènement situées dans un lieu public, par une entreprise de câblodistribution ou par une entreprise canadienne, toucherait une partie essentielle et vitale de la gestion, de la localisation, de la conception et de l'exploitation de ces entreprises fédérales. Le paragraphe 43(5) garantit que les structures de soutènement sont partagées dans la mesure du possible, évitant ainsi des dépenses et des inconvénients inutiles.

94.Le Conseil a établi que l'essence et la substance du paragraphe 43(5) de la Loi se rapportent à une question de compétence fédérale, soit à des entreprises fédérales. La compétence exclusive du Parlement sur la radiodiffusion (y compris la câblodistribution) a été clairement établie par les tribunaux.9 Conformément à cette jurisprudence, un système de distribution par câble fait partie d'une entreprise de communication indivisible qui relève de la compétence législative du Parlement. De même, les tribunaux ont jugé que le Parlement détient la compétence exclusive sur les entreprises de télécommunications interprovinciales et internationales, y compris les sociétés qui offrent leurs services à l'intérieur d'une seule province, mais dont les activités s'étendent au-delà des frontières de la province par leur interconnexion avec le réseau téléphonique public commuté ou autrement.10 Parce que les entreprises de distribution assurent à la fois des services de radiodiffusion et de télécommunications, ces entreprises sont soumises à la compétence fédérale sous les deux aspects de leur double nature.

95.Le Conseil est d'avis que le paragraphe 43(5) fait partie intégrante du système législatif fédéral concernant la distribution de radiodiffusion et les télécommunications. Le réseau de communications d'une entreprise de distribution, y compris le câble coaxial ou à fibres optiques et le matériel connexe, représente un élément fondamental du fonctionnement de l'entreprise en radiodiffusion et en télécommunications. Sans le réseau de communications, une entreprise de distribution ne peut pas assurer de services au public, ni s'acquitter de ses obligations en vertu de la Loi sur la radiodiffusion. Une entreprise de distribution doit avoir accès aux structures de soutènement afin d'entretenir et d'améliorer les installations fixes actuelles et aussi pour étendre son réseau vers de nouveaux clients ou d'autres zones de desserte. Cet entretien, ces améliorations et ces élargissements des zones de desserte sont nécessaires pour que les requérants puissent s'acquitter de leurs obligations actuelles en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, ainsi que pour permettre aux requérants de livrer une véritable concurrence dans l'offre de services de radiodiffusion et de télécommunications. Contrairement à ce que la MEA avance, les réseaux de communication constituent une partie intégrante et indivisible des activités de l'entreprise, que ce soit en radiodiffusion ou en télécommunications. En outre, refuser l'accès aux structures de soutènement pourrait contraindre l'entreprise de distribution à interrompre son service au public qu'elle est autorisée à desservir ou entraîner un dédoublement inutile des structures de soutènement dont le coût serait, en fin de compte, payé par les abonnés.

96.De l'avis du Conseil, les lignes de transmission d'une entreprise de distribution représentent une partie essentielle à son fonctionnement, tout comme elles le sont pour une compagnie de téléphone.11 Comme l'a fait remarquer le juge Martland de la Cour suprême du Canada dans la décision Québec (Commission du salaire minimum) c. Compagnie de téléphone Bell du Canada12, une entreprise n'est pas une chose physique mais plutôt une mesure en vertu de laquelle des choses physiques sont utilisées et, dans les cas où ces éléments sont essentiels au fonctionnement normal d'une entreprise interprovinciale, ceux-ci relèvent alors du contrôle législatif exclusif du Parlement fédéral.

97.Comme l'a fait remarquer Telus, suivant la doctrine de l'essence et la substance d'un texte de loi, une loi qui se rapporte à une question relevant de la compétence de l'organisme qui l'a adoptée peut avoir un effet secondaire ou accessoire sur des sujets qui échappent à la compétence de l'organisme qui l'a adoptée. En ce qui concerne ces effets secondaires ou accessoires, le pouvoir législatif est concurrent plutôt qu'exclusif, mais la présence d'une loi fédérale valide prévaudra sur une loi provinciale en vertu du principe de prépondérance. Suivant la présente analyse, si l'essence et la substance du paragraphe 43(5) de la Loi se rapportent à une question de compétence fédérale, elle peut validement toucher des questions de propriété et de droit civil à l'intérieur d'une province.13 Le Conseil souligne, par exemple, que bien que les intimés soient réglementés en vertu de lois provinciales, certains aspects de leur activité peuvent relever du Parlement parce que la question fait partie intégrante de la compétence fédérale.14 L'existence d'une compétence provinciale valide sur les services publics d'électricité intraprovinciaux ne les exempte pas des lois fédérales valides dans les circonstances actuelles.

98.Les pouvoirs conférés au Parlement du Canada en vertu des paragraphes 91(29) et 92(10) de la Loi constitutionnelle de 1867 ont été largement interprétés en fonction des objectifs et des intérêts que les lois fédérales sont formulées pour réaliser. Par exemple, la compétence du Parlement sur les entreprises fédérales a été, de manière constante, jugée par les tribunaux comme incluant le pouvoir de leur conférer le droit d'entrer dans les rues et voies publiques d'une municipalité, sans leur agrément, dans le but de construire des conduits, de poser des câbles ou d'ériger des poteaux.15 La jurisprudence relative à des paragraphes semblables dans les lois précédentes est particulièrement pertinente et clairement applicable au régime législatif actuel établi en vertu de l'article 43.

99.Le Conseil est d'avis que le paragraphe contesté n'est pas en rapport avec la production ou la distribution intraprovinciale d'électricité, qui est un sujet de compétence provinciale en tant « qu'entreprises locales », au paragraphe 92(10) de la Loi constitutionnelle de 1867.16 Une loi qui cherche à stimuler et à promouvoir l'utilisation conjointe efficace de poteaux par des entreprises fédérales ne constitue pas une législation déguisée aux fins de réglementer l'activité principale des services d'électricité municipaux.

100.Le Conseil croit aussi que le régime législatif provincial relatif aux services d'électricité municipaux ne déplace pas le pouvoir conféré au Conseil par l'article 43 de la Loi, mais, en fait, peut exister concurremment. Même s'il y avait des incompatibilités entre les deux textes de loi, le paragraphe 43(5) aurait préséance. Toutefois, le Conseil croit qu'il n'y a pas d'incompatibilité dans le cas présent, puisque accorder l'accès aux structures de soutènement des services publics d'électricité municipaux constitue une fonction accessoire des ces entités. L'application du paragraphe 43(5) n'implique pas d'empiétement sur leur activité principale. Les réseaux de distribution de l'électricité ont pu, en pratique, coexister depuis plusieurs décennies sur les mêmes poteaux qui soutiennent les installations fixes de distribution et de téléphone.

101.Le Conseil reconnaît que le paragraphe 43(5) pourrait entraîner un certain degré d'interférence avec les droits contractuels ou de propriété des services publics. Comme l'ont soutenu Telus et la MEA, le critère pertinent pour déterminer si une loi fédérale peut validement affecter un sujet relevant de la compétence provinciale dépend du degré d'empiétement sur cette compétence provinciale. À cet égard, la MEA a souligné qu'il serait alors nécessaire de fournir des éléments de preuve considérables démontrant à quel point une telle disposition touche les pouvoirs provinciaux. À ce propos, la MEA a affirmé que l'application du paragraphe 43(5) se traduirait par un empiétement important sur des matières provinciales, mais n'a pas produit la preuve nécessaire pour démontrer le degré d'empiétement qu'elle prétend, malgré la possibilité qu'elle a eue de le faire au cours de la présente instance.

102.Le Conseil fait observer que « l'interférence » ou « l'empiétement » sur les services publics est limité dans le cadre de la présente Loi. Plus particulièrement, le paragraphe 43(5) ne s'applique que là où les parties ne peuvent s'entendre sur les conditions d'une entente d'utilisation conjointe, seulement en ce qui concerne le droit d'accès aux structures de soutènement d'une ligne de transmission construite sur une voie publique ou dans un autre lieu public et seulement aux fins d'assurer la fourniture des services au public. Comme l'a déclaré Telus, le droit qui est accordé n'en est qu'un d'accès aux structures de soutènement, il ne représente pas une servitude et on peut présumer qu'il ne nuit en rien au fonctionnement des poteaux d'électricité. Si le Conseil doit intervenir et définir des conditions d'accès aux structures de soutènement des services publics d'électricité, il le fera nécessairement de façon à ne pas empêcher la transmission de l'électricité de manière sûre et techniquement acceptable.

103.Le Conseil est d'accord avec Stentor qu'il ne serait pas approprié de conclure que le Parlement avait l'intention d'autoriser le Conseil à réglementer de façon continue l'accès aux structures de soutènement qui appartiennent aux services publics d'électricité municipaux ou sont exploitées par eux. À la lecture du paragraphe 43(5) et selon son contexte, il apparait que ce paragraphe vise à permettre au Conseil de résoudre chaque litige de façon individuelle.

104.Compte tenu de ce qui précède, le Conseil est d'avis que tout empiétement est mineur. Comme Telus l'a souligné, le critère permettant de déterminer à quel degré la disposition contestée est nécessaire à un régime législatif par ailleurs valide, dépendra du degré d'empiétement sur les pouvoirs provinciaux. Dans le cas d'empiétements mineurs, le critère fonctionnel rationnel est pertinent. En ce qui concerne les empiétements majeurs, il faudra utiliser un critère plus strict pour juger si la disposition est vraiment nécessaire ou essentielle.

105.Le Conseil juge qu'il y a un lien fonctionnel et rationnel entre un objectif valide de la Loi et la nécessité d'avoir accès aux structures de soutènement. En outre, parce que le paragraphe 43(5) offre une alternative moins envahissante que les droits de construction compris dans le texte de loi en vertu de l'article 43, le Conseil est d'avis que le paragraphe 43(5) est véritablement nécessaire et essentiel pour faciliter l'élaboration efficace et ordonnée d'un réseau de télécommunications conforme à la Loi sur les télécommunications et la politique canadienne de télécommunication.

106.Compte tenu de ce qui précède, le Conseil a conclu que le paragraphe 43(5) de la Loi ne doit pas être jugé comme invalide, inapplicable ou inopérant.

5.2. Compétence statutaire

a.Approche à l'interprétation de la Loi

107.Le Conseil croit que les termes et expressions dans le paragraphe 43(5) doivent être interprétés dans leur sens naturel aussi bien que dans le contexte de l'ensemble de la Loi. C'est un principe bien connu de l'interprétation des lois que les mots d'un texte de loi doivent revêtir leur sens naturel à moins que le contexte ne le veuille autrement.17 En outre, l'approche généralement acceptée de l'interprétation des lois exige qu'une disposition de texte législatif se lise dans le contexte de l'ensemble de la Loi, sans oublier l'objet et le régime de la Loi. Cette interprétation fondée sur l'objet visé a été décrite comme suit :

Aujourd'hui, il n'y a qu'un seul principe ou approche, soit que les mots d'une Loi doivent se lire dans tout leur contexte et dans leur sens grammatical et naturel, en harmonie avec le texte de la Loi, l'objet de la Loi et l'esprit de la Loi.18

108.Cette règle a évolué en ce qui est maintenant connu comme la « règle moderne » selon laquelle une personne doit déterminer le sens de la loi selon la totalité de son contexte en ce qui a trait à l'objet de la loi, les conséquences de l'interprétation proposée, les présomptions et règles particulières d'interprétation et les aides extérieurs admissibles.19 Une interprétation juste est dite une interprétation pouvant être justifiée sur le plan de sa conformité avec le texte législatif ou de sa plausibilité, sa promotion de l'objet de la loi ou son efficacité et son acceptabilité pour produire un résultat juste et raisonnable.20

109.En outre, le Conseil fait remarquer que l'article 12 de la Loi d'interprétation prévoit que : « Tout texte est censé apporter une solution de droit et s'interprète de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec la réalisation de son objet. »

110.Le Conseil a examiné les divers mémoires relatifs à l'interprétation des mots et des expressions contenus dans le paragraphe 43(5) en tenant compte de ces divers principes.

b.Origine législative

111.Les articles 42 et 43 sont deux dispositions parmi d'autres qui sont incluses dans une partie de la Loi intitulée « Construction et expropriation » (articles 42 à 46). L'article 54 de la Loi nationale sur les attributions en matière de télécommunications fut le prédécesseur immédiat de l'article 42, bien qu'une disposition semblable ait existé sous une forme ou une autre dans la Loi sur les chemins de fer depuis 1888. Les dispositions précédant les paragraphes 43(1) à (4) de la Loi figuraient dans la Loi sur les chemins de fer et les tribunaux ont interprété largement ces dispositions.21 Il n'y a pas de prédécesseur au paragraphe 43(5) dans les lois précédentes. Afin d'interpréter cette disposition dans le contexte adéquat, à la lumière des situations possibles que le paragraphe visait à corriger, un examen des mémoires, rapports et débats qui ont précédé l'adoption de l'article 43 de la Loi sur les télécommunications en 1993 [anciennement le Projet de loi C-62, Loi concernant les télécommunications] (le projet de loi C-62), bien qu'il ne soit pas déterminant, est utile.

112.Les questions relatives à l'utilisation conjointe des structures de soutènement et d'accès aux droits de passage ont soulevé l'intérêt, dès 1991, du Comité sur la convergence des réseaux locaux nommé sous l'autorité du ministre des Communications. Le Comité a élaboré des recommandations de modifications des politiques et de la réglementation gouvernementale pour réglementer l'évolution à venir des infrastructures des réseaux locaux de télécommunications et la convergence accrue des services et des marchés des compagnies de téléphone et des câblodistributeurs.

113.Le rapport du Comité précisait que les politiques et la réglementation gouvernementale de même que les pratiques de l'industrie reconnaissent depuis longtemps qu'il y a de bonnes raisons économiques, environnementales et esthétiques pour partager les structures de soutènement entre les entreprises de téléphone et de câblodistribution, ainsi qu'avec d'autres, notamment les services publics d'électricité.22 Le rapport soulignait qu'une intervention par règlements était nécessaire au début de l'industrie de la câblodistribution pour que les compagnies de téléphone mettent leurs structures de soutènement à la disposition des câblodistributeurs à des conditions raisonnables.23 Il indiquait aussi que les compagnies de téléphone avaient conclu des ententes avec les compagnies de services publics d'électricité pour s'assurer que les structures de soutènement soient partagées efficacement pour le transport de l'électricité et des services téléphoniques. De l'avis du Comité, le dédoublement des structures de soutènement aériennes n'était pas efficace du point de vue économique et aurait pu nuire à l'environnement et à l'esthétique. Le rapport soulignait le fait que la majorité des structures de soutènement de l'électricité et du téléphone étaient en place avant l'apparition de l'industrie de la câblodistribution et soulignait aussi l'importance accrue de prendre des mesures pour mettre les structures de soutènement à la disposition des câblodistributeurs. Il faisait remarquer que, bien que les ententes de collaboration relatives à l'utilisation conjointe des structures de soutènement aient été valides pour permettre le partage des structures de soutènement, il y avait place à amélioration. Il précisait que les ententes d'utilisation conjointe entre les services publics d'électricité, les compagnies de téléphone et les câblodistributeurs ont réussi à éliminer la construction d'une double infrastructure dans de nombreuses régions.

114.Le rapport incluait diverses recommandations relatives au partage des structures de soutènement :

7. La politique et la réglementation canadiennes devraient continuer à promouvoir le partage des structures de soutènement par les compagnies de téléphone, les câblodistributeurs et les autres fournisseurs de structures de soutènement. À cet égard, le concept des structures de soutènement devrait être défini de façon plus large à l'avenir, en tenant compte des nouvelles technologies comme les câbles à fibres optiques, pour lesquelles des accords de partage peuvent améliorer l'efficience de l'infrastructure locale des réseaux locaux.

8. La politique et la réglementation du gouvernement ne devraient pas empêcher la mise sur pied de coentreprises entre les compagnies de téléphone et des câblodistributeurs qui visent à atteindre un partage des structures de soutènement plus efficace et plus efficient.

9. Les compagnies de téléphone et les câblodistributeurs devraient, de concert avec les services publics d'électricité, ainsi que d'autres fournisseurs de structures de soutènement, établir de meilleurs mécanismes de collaboration pour planifier la construction et l'utilisation partagées des structures de soutènement. Si nécessaire, les organismes de réglementation devraient intervenir pour assurer que de tels mécanismes de collaboration sont élaborés et mis en oeuvre, et qu'ils fonctionnent de manière efficace.24 (mise en relief ajoutée)

115.Le rapport traitait aussi de questions relatives à l'assurance que les câblodistributeurs se voient accorder le droit juridique d'accéder aux droits de passage aux fins d'installer leurs lignes de transmission et leurs structures de soutènement connexes. Les représentants de l'industrie de la câblodistribution ont préconisé l'importance de ces droits dans les cas où l'accès aux structures de soutènement des entreprises de télécommunications, des services publics d'électricité et des autres fournisseurs de structures de soutènement ne serait pas disponibles. Les représentants des compagnies de téléphone ont dit craindre qu'un tel droit d'accès aux droits de passage n'amènerait un dédoublement des structures de soutènement. Les câblodistributeurs étaient d'accord qu'un droit d'accès de leur part aux droits de passage publics ne devrait se produire que si des structures de soutènement convenables n'étaient pas disponibles à des conditions raisonnables. Le rapport soulignait l'importance de l'utilisation conjointe des structures comme première mesure à prendre comme suit :

Pour empêcher le dédoublement inutile des structures de soutènement, de même que les problèmes éventuels d'ordre environnemental et esthétique, la politique et la réglementation du gouvernement devraient continuer à obliger les câblodistributeurs à négocier avec d'autres fournisseurs potentiels de structures de soutènement pour obtenir des installations convenables. Toutefois, si de telles négociations devaient échouer, il serait raisonnable d'accorder aux câblodistributeurs des droits similaires d'accès aux emprises publiques, comme pour les compagnies de téléphone. À l'échelon fédéral, ces droits qui sont présentement établis dans la Loi sur les chemins de fer, font l'objet d'une proposition de simplification et de mise à jour au moyen des dispositions 48 et 49 du projet de loi C-62.25

116.Le Comité conclut ses remarques par la recommandation suivante :

10. Les câblodistributeurs devraient avoir les mêmes droits d'accès aux emprises publiques que ceux des compagnies de téléphone sous réglementation fédérale dans les cas où ils ne peuvent disposer de structures de soutènement convenables à des conditions raisonnables auprès des compagnies de téléphone, des services publics d'électricité ou d'autres fournisseurs de structures de soutènement.26

117.Avant de déposer le projet de loi C-62 devant la Chambre des communes, le Comité sénatorial permanent des transports et des communications a entrepris une étude préliminaire de la question. Les présentations faites au nom des câblodistributeurs soulevaient la question de leur donner les mêmes droits d'accès que les compagnies de téléphone. En ce qui concerne ces préoccupations, le Comité sénatorial recommandait :

Nous recommandons aussi que l'industrie de la télévision par câble ait le droit qu'on lui confère le pouvoir de construire qui seront conférés [sic] à toutes les entreprises de télécommunications réglementées par le fédéral au moyen d'une modification corrélative à la Loi sur la radiodiffusion.27

118.Suite au rapport du Comité sénatorial, il n'y a pas eu de disposition relative à la construction ou à l'accès des entreprises de distribution dans le projet de loi C-62. En première lecture à la Chambre des communes, les dispositions relatives à la construction ne s'appliquaient qu'aux « entreprises canadiennes » et non aux entreprises de distribution. Aucune mention n'était faite de l'accès aux structures de soutènement.

119.Suite à la deuxième lecture, des présentations ont été faites devant le Sous-comité de la Chambre sur le projet de loi C-62 du Comité permanent des communications et de la culture. Plusieurs présentations devant ce sous-comité portaient sur la nécessité d'accorder aux câblodistributeurs les mêmes droits d'accès aux droits de passage que ceux conférés aux compagnies de téléphone. Ces présentations mettaient l'accent sur la nécessité de clarifier l'accès des câblodistributeurs aux droits de passage publics pour inclure les mêmes pouvoirs légaux reconnus d'accès aux voies et lieux publics que ceux dont profitent présentement les compagnies de téléphone étant donné le nouvel environnement concurrentiel. Les présentations mentionnaient spécifiquement l'accès refusé ou les cas où les structures de soutènement n'étaient pas disponibles et où aucune option n'est disponible pour résoudre le problème. Bien qu'un tel droit d'accès ait été déclaré implicite en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, étant donné leur obligation juridique de rendre le service disponible à chaque foyer ou habitation dans leur zone de desserte, les câblodistributeurs ont souligné l'importance d'avoir un droit explicite, étant donné la convergence accrue et la compétitivité du marché. Par ailleurs, les provinces ont dit craindre la prolifération des entreprises qui essaient de « creuser les routes ».

120.Le ministre de l'Industrie a proposé au sous-comité des Communes de modifier les dispositions de la façon suivante :

Si le sous-comité est d'accord, les dispositions 48 et 49 [maintenant les articles 43 et 44 de la Loi], seront modifiées de façon à s'appliquer également aux entreprises de distribution de radiodiffusion, telles qu'elles sont définies dans la Loi sur la radiodiffusion. De plus, nous proposerons une modification de la disposition 48 du projet de loi qui prévoira l'utilisation efficace, par les personnes desservant le public, des structures de soutènement construites sur les emprises publiques et obligera le CRTC à tenir compte de toutes les utilisations des emprises publiques ou d'autres lieux publics avant d'émettre une ordonnance en vertu de la présente disposition.

121.L'article a donc été modifié de manière à inclure une référence aux entreprises de distribution dans les paragraphes 43(1)28 à (4), et le paragraphe 43(5) a été ajouté au complet. Les modifications ont été adoptées en troisième lecture sans autre discussion.

122.En se fondant sur les préoccupations et les observations ainsi que sur les recommandations faites avant l'ajout du paragraphe 43(5), le Conseil est d'avis que l'intention implicite de l'ajout de cette disposition est que l'octroi de pouvoirs de construction aux entreprises canadiennes et aux entreprises de distribution pour ériger leurs propres structures de soutènement ne représentait pas la seule option qui s'offrait à ces entreprises si une utilisation plus efficace des structures de soutènement existantes était possible.

123.Le Conseil croit aussi qu'il est raisonnable de déduire pareille intention du fait que l'exercice des droits de construction par des entreprises canadiennes et des entreprises de distribution n'est pas un pouvoir absolu. Ces pouvoirs sont sous réserve de « veiller à éviter toute entrave abusive à la jouissance des lieux par le public » et ils doivent être exercés sur consentement de la municipalité ou des autres administrations publiques compétentes. De plus, s'il n'est pas possible d'obtenir le consentement et que le Conseil intervient, celui-ci doit tenir compte de la jouissance que d'autres ont des lieux. De l'avis du Conseil, l'existence préalable de structures de soutènement serait un facteur à considérer lors de l'octroi de l'autorisation de construire une infrastructure distincte. À cet égard, il faut ajouter que le paragraphe 43(5) ajoute un complément naturel aux paragraphes 43(2) à 43(4) de la Loi.

124.Le Conseil est d'avis qu'il est raisonnable de conclure que l'origine législative qui a donné lieu au paragraphe 43(5) tend à appuyer l'idée que le paragraphe 43(5) a été ajouté pour répondre aux inquiétudes relatives à l'octroi de pouvoirs de construction qui pourraient entraîner des constructions inutiles sur les voies et les lieux publics. L'origine législative appuie l'idée décrite plus loin qu'il est approprié d'interpréter ce paragraphe largement, de manière à y inclure les structures de soutènement de tous les services publics, dont les compagnies de services publics d'électricité. En permettant l'accès aux structures de soutènement actuelles, sans tenir compte du type de service public auxquel elles appartiennent ou qui les contrôlent, les incidences environnementales, esthétiques ou économiques négatives associées à un dédoublement inutile des structures de soutènement aériennes sont évitées.

c.Politique canadienne de télécommunication et autres questions d'intérêt public

125.Tel que mentionné précédemment, le Conseil doit, conformément à l'article 47 de la Loi, exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent la Loi de manière à réaliser les objectifs de la politique canadienne de télécommunication définis à l'article 7. Par conséquent, dans son interprétation de la portée du paragraphe 43(5), le Conseil doit tenir compte de la mise en oeuvre des objectifs de la politique.

126.Le Conseil fait remarquer que diverses considérations relatives aux structures de soutènement doivent être évaluées en fonction de l'article 7 de la Loi :

(1) Il semblerait contraire aux objectifs de l'alinéa 7a de ne pas favoriser le développement ordonné des réseaux de télécommunications du Canada (renforcer la structure économique du Canada et de ses régions);

(2) Si des dédoublements des infrastructures sont financés et construits malgré les coûts supplémentaires, des frais d'immobilisation et de fonctionnement inutiles devront, en fin de compte, être absorbés par les abonnés. Un tel résultat semblerait contraire aux objectifs de l'alinéa 7b) (services de télécommunications abordables);

(3) Les frais d'immobilisation inhérents à la construction d'infrastructures doubles peuvent poser un obstacle à l'entrée sur le marché et décourager le déploiement de réseaux qui sont essentiels à une société et à une économie fondées sur l'information. De tels résultats semblent contraires aux objectifs des alinéas 7a), 7c) (accroître l'efficacité et la compétitivité des télécommunications canadiennes) et 7f) (favoriser le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication);

(4) L'élaboration d'une infrastructure dédoublée soulève aussi la possibilité d'inconvénients considérables pour le public alors que des équipes des divers fournisseurs de service déploient, entretiennent et modifient leurs réseaux respectifs près des rues, voies publiques et autres lieux publics canadiens ou sous ces lieux, selon leurs propres calendriers. Ces conséquences semblent contraires aux objectifs définis aux alinéas 7c) et 7f).

127.Les structures de soutènement des services publics d'électricité ont toujours constitué un élément important des réseaux de télécommunications du Canada et un élément essentiel à la prestation des services de radiodiffusion au public canadien. L'interprétation du paragraphe 43(5) comme s'appliquant aux structures de soutènement des services publics d'électricité serait conforme à la réalisation des objectifs de la politique canadienne de télécommunication, y compris favoriser le développement ordonné des télécommunications en un système qui contribue à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure sociale et économique du Canada et de ses régions.

128.Le Conseil reconnaît depuis au moins 1977 que le partage des structures de soutènement sert l'intérêt public.29

129.De plus, en raison des objectifs de la politique de télécommunication, plus particulièrement de l'alinéa 7f), le Conseil a adopté une série de règlements afin de mettre en place un cadre de réglementation qui met davantage l'accent sur le libre jeu du marché et la concurrence.30 De même, dans le cadre des pouvoirs que lui confère la Loi sur la radiodiffusion, le Conseil a mis en place un cadre de réglementation visant à favoriser la concurrence dans la distribution de services de radiodiffusion.31 Par suite de la concurrence et de l'apparition d'autres intervenants de l'industrie, la pression augmentera au chapitre de la construction de nouvelles structures de soutènement de communications et de l'utilisation des structures actuelles.

130.Dans sa décision 95-13, le Conseil a clairement énoncé sa politique relative à l'utilisation conjointe des structures de soutènement :

Le Conseil est d'avis qu'il est dans l'intérêt public de limiter au minimum les structures de soutènement (poteaux et conduits) par l'utilisation conjointe de ces structures, peu importe le propriétaire. Il s'attend en outre que la maximisation de l'utilisation des structures de soutènement (en termes de nombre de compagnies employant chaque structure) contribuera à faciliter l'interconnexion et l'interfonctionnement entre les entreprises de télécommunications et de câblodistribution canadiennes. [...]

Pour ce qui est de la propriété partagée des structures de soutènement, le Conseil fait observer que de nombreuses compagnies de téléphone et d'électricité au Canada participent depuis longtemps à des arrangements dans le cadre desquels chaque partenaire contribue aux immobilisations. Ainsi, dans certains arrangements, les partenaires sont propriétaires conjoints de la structure. Dans ces cas, chaque participant a un certain contrôle et une certaine influence sur la fourniture des structures. Le Conseil est d'avis que ces arrangements semblent avoir fonctionné convenablement et il y a des avantages, selon lui, pour les parties, y compris les entreprises de câblodistribution, qui réclament l'accès à un plus grand nombre de structures, de conclure des accords dans le cadre desquels elles partageraient les immobilisations et les coûts de maintenance.

131.La construction d'infrastructures de distribution est nécessaire pour assurer des services de télécommunications et de radiodiffusion au public. De l'avis du Conseil, une approche qui contraint chaque exploitant à construire sa propre infrastructure n'est pas dans l'intérêt du public. Le Conseil croit que l'élaboration d'une infrastructure de distribution adéquate sera aussi importante pour l'économie canadienne au XXIe siècle que l'a été la construction d'une infrastructure ferroviaire au XIXe siècle.

132.En plus des objectifs de la politique de la Loi, le Conseil note que le Parlement a déclaré au sous-alinéa 3(1)t)ii) de la Loi sur la radiodiffusion que les entreprises de distribution devraient assurer efficacement, à l'aide des techniques les plus efficientes, la fourniture de la programmation à des tarifs abordables. Le Conseil souligne qu'il peut aussi y avoir des conséquences négatives sur l'environnement et l'esthétique liées à la construction évitable de doubles infrastructures, particulièrement en ce qui a trait aux lignes de transmission aériennes. Par conséquent, outre les objectifs déclarés par le Parlement dans la politique canadienne de télécommunication, l'utilisation efficace des structures de soutènement actuelles semble conforme aux meilleurs intérêts du public.

d.Interprétation de « fournisseur de services au public »

133.La MEA soutient que le paragraphe 43(5) ne s'applique pas aux entreprises de distribution. La MEA fait observer que le Parlement a utilisé l'expression « person who provides services to the public » au paragraphe 43(5) plutôt que « entreprises canadiennes » et « entreprises de distribution » qui sont utilisées dans les dispositions connexes des articles 42 et 43, et elle souligne qu'il y a incompatibilité entre le mot « person » dans la version anglaise et l'emploi de « fournisseur » dans la version française. La MEA conclut que le paragraphe 43(5) a été adopté afin de permettre aux entités qui ne sont pas des radiodiffuseurs d'accéder aux poteaux que les entreprises canadiennes et les entreprises de distribution ont le droit de construire en vertu des articles 42 et 43.

134.Le Conseil est d'avis que l'argument de la MEA ne peut pas être retenu. Il est évident que les entreprises de distribution offrent des services au public. L'emploi de l'expression « fournisseur » dénote clairement un fournisseur de services quand on l'interprète au sens du paragraphe 43(5). Compte tenu de l'origine législative, des objectifs de la Loi en ce qui a trait à la politique, du libellé clair du paragraphe et du reste de l'article 43, le Conseil croit que le paragraphe 43(5) apporte un recours juridique pour les entreprises de câblodistribution ainsi que pour les entreprises canadiennes et les autres fournisseurs de services au public dans le cadre d'un texte législatif complet conçu pour permettre le déploiement ordonné d'installations fixes de ces entités et l'utilisation conjointe efficace des structures de soutènement actuelles qui se trouvent dans un lieu public. Le Conseil croit que toute interprétation de l'expression « person who provides services to the public » qui exclut les entreprises de distribution nuirait à ces entreprises fédérales et serait contraire à l'intention du Parlement.

e.Nécessité de négociations préalables

135.Quant à savoir à quelle étape de leurs négociations les parties devraient soumettre leur différend au Conseil, celui-ci est d'avis qu'il n'y a pas d'exigence explicite ou implicite à cet effet dans la Loi.32 Le Conseil estime que le paragraphe 43(5) de la Loi s'applique dans le cas où un câblodistributeur est incapable, à des conditions acceptables, d'obtenir l'accès à des structures de soutènement conformément à une entente initiale sur les structures de soutènement. Le paragraphe s'appliquerait aussi là où, malgré l'existence d'un accord, la personne qui demande l'accès est, en fait, incapable d'obtenir cet accès à des conditions acceptables ou est incapable de rétablir un ancien lien contractuel.

136.Le Conseil estime qu'il est généralement logique de demander aux parties de négocier de bonne foi avant de demander au Conseil de trancher. Plus particulièrement, la décision du Conseil du 27 mars 1997, qui instaurait un processus de règlement de différends non exécutoire, illustre la volonté du Conseil de voir se dérouler les négociations. De l'avis du Conseil, il est clair, dans ce cas, qu'il y a eu des négociations sérieuses, que des négociations plus longues resteront stériles et que les requérants ne sont pas en mesure d'avoir accès à des conditions qui leur sont acceptables.

f.Interprétation de « conditions que le Conseil juge indiquées »

137.En ce qui concerne la position de la MEA, à savoir que le pouvoir du Conseil de fixer les conditions d'accès n'est pas clair et peut être limité, le Conseil est d'avis que le passage « conditions qu'il (le Conseil) juge indiquées » n'est pas ambiguë et qu'il est de portée suffisamment large pour permettre au Conseil d'établir les tarifs, les modalités et les conditions de l'accès aux structures de soutènement.

138.Le Conseil reconnaît que le Parlement n'avait pas l'intention que le pouvoir du Conseil englobe la réglementation de façon continue des tarifs, modalités et conditions entourant l'utilisation des structures de soutènement qui appartiennent aux services publics d'électricité municipaux, mais qu'il a plutôt habilité le Conseil à régler les différends individuellement.33 En outre, le Conseil est d'avis que les conditions d'accès qu'il impose dans la résolution de ces conflits devraient continuer à s'appliquer jusqu'à ce que les parties s'entendent autrement.

139.Comme il l'a souligné précédemment, le Conseil croit que les conditions liées à une permission accordée en vertu du paragraphe 43(5) doivent, nécessairement, être rédigées de façon à ne pas empêcher l'utilisation des poteaux du service public d'électricité de façon sûre et techniquement acceptable. Cela est conforme à l'approche adoptée précédemment par le Conseil à l'égard de l'accès aux structures de soutènement des compagnies de téléphone, tel que précisé dans la Décision 95-13 :

Le Conseil est d'avis que les propriétaires de structures de soutènement ont le droit d'établir et d'appliquer des normes de construction, sous réserve qu'elles soient basées sur des règles de sécurité et des exigences techniques et qu'elles n'entravent pas l'accès par d'autres entreprises de télécommunications et de télédistribution.

g.Interprétation de « ligne de transmission »

140.En ce qui concerne l'affirmation de la MEA selon laquelle l'emploi de l'expression « ligne de transmission » désigne une ligne de transmission d'une entreprise de télécommunications ou d'une entreprise de distribution, plutôt que la ligne de transmission d'un service public d'électricité, le Conseil est d'avis que l'emploi de l'expression est suffisamment large pour inclure les lignes de transmission de l'électricité. Le Conseil a fondé sa décision sur le sens naturel de l'expression, ainsi que sur l'interprétation des mots dans le contexte de l'article 43 et de la Loi dans son ensemble, en tenant compte de l'objet et du régime prévu par la Loi.

141.Le Conseil fait remarquer que la Loi n'offre pas de définition de « ligne de transmission ». Le Conseil souligne les définitions suivantes de « transmission line » ou « ligne (de transmission) » :

transmission line, a conductor or set of conductors designed to carry electricity (esp. on a large scale) or electromagnetic waves with minimum loss and distortion; [The Oxford English Dictionary, Second Edition]
transmission line: a metallic circuit of three or more conductors used to send energy usu. at high voltage over a considerable distance; specif. : a usu. metallic line used for the transmission of signals or for the adjustment of circuit performance and often consisting of a pair of wires suitably separated, a coaxial cable, or a wave guide. [Webster's Third New International Dictionary, 1981]
ligne: III [...] 3º Système de fils ou de câbles conduisant et transportant l'énergie électrique. Ligne à haute tension. - Spécialt. Ligne électrique assurant les communications par télégraphe ou téléphone. [Le Petit Robert, 1988]

142.En se fondant sur ces définitions, on peut raisonnablement conclure que le sens naturel de « transmission line » ou « ligne de transmission » inclut, en plus des lignes de transmission des entreprises de télécommunications et de câblodistribution, les lignes de transmission utilisées pour distribuer le courant électrique.

143.En outre, le Conseil est d'avis qu'une telle interprétation est compatible avec le fait qu'ailleurs dans la Loi, l'expression « ligne(s) de transmission » est réduite en étant qualifiée de ligne de transmission d'une entreprise canadienne ou d'une entreprise de distribution.34 Cela est particulièrement pertinent à l'article 43, où les paragraphes 43(2) à (4) contiennent une telle qualification alors que le paragraphe 43(5) n'en contient pas.

144.Le Conseil fait aussi remarquer que le Parlement a utilisé l'expression de sens apparemment plus étroit « ligne... servant aux télécommunications » quand il a défini, au paragraphe 2(1) de la Loi, l'expression « câble sous-marin international ».

145.En conformité avec la conclusion du Conseil que les mots « ligne de transmission » incluent les lignes de transmission de l'électricité, le Conseil est d'avis que l'expression « structure de soutien d'une ligne de transmission » au paragraphe 43(5) vise à désigner les structures de soutènement qui supportent des lignes de transmission, y compris les structures de soutènement qui appartiennent aux services publics d'électricité ou sont contrôlées par eux.

146.L'ACTC affirme dans son intervention que le Parlement devait être conscient de certains faits relatifs à la propriété des structures de soutènement au Canada au moment où la Loi a été adoptée. Le Conseil souligne que les entreprises de câblodistribution utilisent les structures de soutènement des services publics d'électricité depuis les années 50. De plus, les poteaux des services publics d'électricité constituent présentement un élément important des réseaux de distribution des compagnies de téléphone et de câblodistribution dans tout le pays. Par exemple, l'ACTC indique qu'en Alberta, presque toutes les structures de soutènement appartiennent aux services publics d'électricité. L'ACTC ajoute aussi qu'à Terre-Neuve, il y a un degré élevé de propriété mixte des poteaux utilisés pour soutenir les lignes de transmission, de sorte que dans toute série de poteaux, certains peuvent appartenir à NewTel Communications Inc. (anciennement Newfoundland Telephone Company Limited) (NewTel), et d'autres à Newfoundland Power. L'ACTC déclare qu'il serait futile de n'accorder l'accès qu'aux poteaux qui appartiennent aux compagnies de téléphone. De l'avis du Conseil, le Parlement ne peut pas avoir voulu un régime d'accès aussi désordonné.

147.L'interprétation par Telus du paragraphe 43(5) voulant qu'il vise les cas où les lignes de transmission de télécommunications occupent déjà des structures de soutènement est trop restrictive, contrairement aux objectifs de la politique canadienne de télécommunication et incompatible avec le sens naturel attribué au paragraphe 43(5). Une interprétation aussi restrictive créerait un obstacle à l'entrée de nouveaux concurrents, tant dans la câblodistribution que dans la téléphonie, favorisant les fournisseurs de service déjà en place, comme Telus. Les nouveaux venus seraient contraints d'exercer leurs droits de construction en vertu des paragraphes 43(2) à (4) de la Loi pour établir un réseau dédoublé. Le Conseil rejette donc l'interprétation étroite qui obligerait la présence de lignes de transmission de « télécommunications » sur les structures de soutènement avant qu'une demande de droit d'accès puisse être présentée conformément au paragraphe 43(5).

148.De l'avis du Conseil, le libellé du paragraphe 43(5) est assez générique pour signifier toute structure de soutènement existante qui soutient tout type de ligne de transmission. De plus, une telle interprétation est entièrement conforme à l'article 43 et à la Loi dans son ensemble. L'article 43 de la Loi établit un ensemble législatif complet pour permettre aux entreprises canadiennes et aux entreprises de distribution de construire, exploiter et entretenir leurs lignes de transmission. Les paragraphes 43(2) à 43(4) traitent des cas où il est nécessaire de construire des structures de soutènement. Le paragraphe 43(5) porte sur des situations où des structures de soutènement qui soutiennent des lignes de transmission existent déjà. De l'avis du Conseil, suggérer que l'accès en vertu du paragraphe 43(5) se limite aux structures de soutènement qui ne soutiennent que certains types de lignes de transmission ou des structures de soutènement qui appartiennent à certaines entités ou sont exploitées par elles serait non seulement contraire aux mots utilisés dans leur sens naturel, mais créerait aussi une lacune injustifiable dans l'ensemble du texte législatif qui se retrouve à l'article 43. Étant donné l'objet de l'article 43 et les objectifs de la politique de l'article 7, le Conseil conclut que l'expression « structure de soutien d'une ligne de transmission » doit être interprétée comme signifiant toute structure de soutènement déjà existante qui sert à supporter une ligne de transmission. Le Conseil est d'avis que cette interprétation est conforme à l'intérêt public et aux objectifs de la politique canadienne de télécommunication.

h.Interprétation de « une voie publique ou un autre lieu public »

149.Le Conseil n'accepte pas l'argument de la MEA selon lequel l'expression « autre lieu public » doit être interprétée étroitement parce qu'elle suit les mots « voie publique ». L'interprétation de la MEA signifierait que « autre lieu public » devrait être de la nature de la voie publique ou quelque chose du genre et exclurait les poteaux situés sur un droit de passage de service public. Contrairement à l'approche contextuelle plus étroite proposée par la MEA, le Conseil est d'avis que, conformément aux principes généralement acceptés de l'interprétation des lois, l'approche contextuelle exigerait que l'expression « autre lieu public » soit interprétée dans le contexte de l'ensemble du paragraphe, de l'article et de la Loi et non pas seulement en rapport avec l'expression « voie publique ». Étant donné l'objet du paragraphe 43(5), de l'article et de l'ensemble de la Loi et étant donné que le Parlement doit être présumé conscient de l'emplacement des structures de soutènement, il est tout à fait illogique d'interpréter « autre lieu public » comme se limitant à un emplacement qui a le même type d'accès public qu'une « voie publique ».

150.Le Conseil croit que l'expression « autre lieu public », étant donné l'objet et le contexte du paragraphe 43(5) et de la Loi dans son ensemble, ne peut pas se limiter aux terrains qui sont nécessairement ouverts au public. La signification de « lieu public » dépendra de l'objet précis et du contexte législatif dans lequel il est utilisé. La propriété privée n'est pas nécessairement incompatible avec la conclusion qu'un lieu est public. À titre d'exemple, mentionnons que les tribunaux ont jugé qu'un terrain privé peut être un lieu public si le public, ou une part du public, peut généralement y accéder. À titre d'exemple, la Loi sur la radiodiffusion exclut de la définition de « radiodiffusion » la « transmission... d'émissions... qui est destinée à la présentation dans un lieu public seulement ». Dans ce contexte, les stades de sport ont généralement été considérés comme des lieux publics même s'il sont de propriété privée et même s'il faut payer pour y entrer. Dans le cas de la Loi sur les télécommunications, il n'y a pas de précédent clairement applicable.

151.L'interprétation restrictive proposée par la MEA signifierait que l'accès à une série de poteaux serait obstrué si certains poteaux se trouvant sur un droit de passage ou une servitude de services publics étaient mêlés à d'autres situés sur une « voie publique ». Comme l'a déclaré l'ACTC, cette interprétation se traduirait par une forme de [traduction] « marelle de champs de compétence » où le paragraphe 43(5) s'appliquerait à la majorité des structures de soutènement, mais pas aux quelques exceptions. Cela aurait l'effet de frustrer entièrement l'objet du paragraphe 43(5) qui est de faciliter et de promouvoir l'utilisation efficace et le partage des structures de soutènement. Comme nous l'avons souligné précédemment, le Parlement doit être présumé conscient de l'emplacement des structures de soutènement sur les droits de passage ou les servitudes de services publics. Le Conseil estime que « voie publique ou autre lieu public » est plus générique que ce que souhaite la MEA.

152.Le Conseil fait remarquer que le paragraphe 43(5) porte sur l'accès aux structures de soutènement existantes. Il ne constitue pas un moyen de créer une servitude et ne peut pas servir à accorder des droits d'entrée sur une propriété où de tels droits n'existent pas déjà ou sont explicitement limités. Toutefois, aux fins de cerner les structures de soutènement qui sont incluses dans la portée du paragraphe 43(5) et étant donné l'objet et le contexte du paragraphe 43(5), l'expression « voie publique ou autre lieu public » doit s'interpréter comme incluant toute servitude ou droit de passage de services publics réservé à la mise en place d'installations de services publics à l'avantage du public.

153.Le Conseil est d'avis qu'une structure de soutènement située sur une servitude ou un droit de passage de services publics ne peut pas être qualifié comme étant sur une propriété purement privée. Le droit d'un service public à une servitude de services publics est un droit conditionnel et non un droit privé absolu, aux dépens et au détriment du public et d'autres services publics à qui incombe aussi la prestation d'un service public. L'intérêt public fait partie intégrante des services publics. Si on voue entièrement sa propriété à un usage auquel le public est intéressé, on accorde de fait un intérêt au public à l'égard de cet usage et on doit se soumettre au contrôle public pour le bien commun et une telle propriété cesse d'être juris privati.35

154.Le Conseil fait remarquer que la Cour d'appel de l'Ontario a reconnu que le principe établissant une relation de mandataire entre une commission de services publics et une municipalité existe en « common law » depuis plus d'un siècle.36 Il souligne aussi qu'une relation de mandataire statutaire peut aussi être établie en vertu de la loi constituante qui crée un service public d'électricité municipal donné. De l'avis du Conseil, si un service public d'électricité municipal acquiert une servitude, il acquiert l'emprise à titre d'agent de la municipalité. C'est à l'avantage du système de distribution, non seulement pour le client, mais pour l'ensemble de la ville.37 Par conséquent, étant donné le fait que les servitudes de services publics sont acquises pour servir un objectif public à l'avantage du grand public et non pas simplement à l'usage privé et pour des buts individuels, le Conseil croit qu'il est raisonnable d'inclure les structures de soutènement situées dans les servitudes de services publics dans le cadre de l'expression « construite sur une voie publique ou un autre lieu public ». Le fait qu'une servitude de services publics profite à la municipalité dans son ensemble appuie l'utilisation de ces droits d'accès par les câblodistributeurs à l'avantage de l'ensemble du public.

155.La MEA a indiqué dans son mémoire final que certains poteaux de services publics d'électricité se trouvent sur des terrains privés sans droit de passage ou servitude. À cet égard, le Conseil souligne que la MEA reconnaît que 92 % des structures de soutènement qui appartiennent à 18 des services publics d'électricité municipaux qu'elle représente se trouvent sur les réserves des voies publiques et des rues.

156.Bien que l'ACTC déclare que les 8 % qui restent se trouvent sur des terrains qui sont l'objet de servitudes ou droits de passage de services publics accordés par voie législative ou consensuelle, la MEA a répliqué que « certains » de ces poteaux se trouvent sur des terrains publics, « plusieurs » se trouvent sur des terrains privés sans droit de passage ou servitude et que « dans certains cas », des propriétaires ont permis de mettre des poteaux de services publics d'électricité sur leur terrain sans accorder de droit de passage.

157.Le Conseil est d'avis que, malgré le fait que la MEA est la mieux placée pour apporter des faits à l'appui de son exposé, elle n'a pas réussi à produire des preuves appropriées pour l'étoffer, choisissant plutôt de compter sur des mots ambigus comme « certains » et « plusieurs » pour indiquer un reste de 8 % En outre, le Conseil fait remarquer que, parce que cela a été soulevé au stade des répliques, l'ACTC n'a pas eu l'occasion de formuler des observations sur la proportion mal définie des 8 % des poteaux qui restent ou sur l'ampleur de la situation.

158.Le Conseil trouve difficile de supposer qu'il n'y a pas de droit de passage en ce qui a trait aux poteaux, vu les exigences de sécurité et d'entretien de ces structures. De l'avis du Conseil, la présence de structures de soutènement sur un terrain privé obligerait le propriétaire de la structure de soutènement à conserver un moyen de garantir la sécurité du public et du système.

159.Le Conseil fait remarquer que les services publics d'électricité municipaux peuvent acquérir des servitudes de diverses façons, y compris par voie de transferts d'Hydro-Ontario, d'achats auprès des propriétaires, de servitudes reçues des propriétaires de plans de lotissement enregistrés, de servitudes sur des terres transmises comme condition de l'octroi d'un consentement de séparation ou suite à une condition imposée dans un accord relatif à un plan d'implantation entre un propriétaire privé et la municipalité régionale et au moyen de droits d'accès statutaires. De l'avis du Conseil, il serait raisonnable et approprié que le Conseil applique une présomption de preuve que des servitudes de services publics existent de fait.

160.Le Conseil est d'avis que l'acquisition de droit limités et d'intérêts par le service public pour avoir accès à sa structure de soutènement au moyen de servitudes, de baux de location, de licences d'occupation ou de permis ne constitue pas une expropriation au sens qu'il n'y a pas de changement de propriétaire du terrain. Toutefois, le Conseil reconnaît que l'acquisition de ces droits peut, dans certains cas, impliquer une compensation aux propriétaires fonciers selon les inconvénients, la valeur du terrain, l'effet sur la propriété, la perte de production de terres agricoles, etc., et peut être limitée à des utilisateurs précis du terrain.

161.Le Conseil reconnaît que dans la détermination des utilisations possibles d'une servitude sur un terrain privé, il faut tenir compte des diverses circonstances qui existent au moment de sa création. Pareille évaluation devrait tenir compte des attentes raisonnables des parties, en considérant la nature de la servitude, son but, la portée des impacts sur le terrain, et leurs attentes quant à l'évolution normale de l'utilisateur et à l'utilisation projetée de la servitude. Sauf preuves contraires (comme des termes expressément restrictifs), on peut conclure que les parties anticipaient des changements qui pourraient toucher l'utilisation de la servitude en fonction des réalités changeantes, affectant le mode d'utilisation du terrain ou résultant de développements technologiques.

162.De l'avis du Conseil, le manque de restrictions précises dans les conditions qui créent la servitude, l'utilisation par une entreprise de câblodistribution d'un droit de passage de services publics pour accéder aux poteaux de services publics d'électricité, conforme à l'objet sous-jacent du droit de passage de services publics, ne constituerait généralement pas un élargissement non autorisé ou une modification du caractère, de la nature ou de la portée des servitudes reliées aux structures de soutènement du service public, particulièrement si le changement de nature ou d'intensité de l'usage n'impose pas un fardeau déraisonnable sur le terrain touché. À cet égard, les droits rattachés à chaque servitude de services publics dépendront des conditions rattachées à leur acquisition. Les conditions des servitudes doivent être interprétées en fonction des fins pour lesquelles on voulait les utiliser.

163.Le Conseil croit que les conditions d'accès aux servitudes de services publics dépassent la portée du paragraphe 43(5), qui touche l'accès aux structures de soutènement. Les entreprises de câblodistribution pourraient avoir à négocier leur propre droit d'accès avec le propriétaire, y compris une indemnisation, si les conditions d'accès à la servitude de services publics sont limitées, de façon explicite, en rapport avec l'utilisateur ou avec l'usage permis.

164.Le Conseil est d'avis qu'il a la compétence d'accorder un recours conformément au paragraphe 43(5) de la Loi, sous réserve de certaines conditions qu'il juge raisonnables dans les circonstances. Le Conseil souligne, plus particulièrement, que les requérants sont des entreprises de distribution au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la radiodiffusion et qu'ils sont des fournisseurs de services au public qui ne peuvent pas, à des conditions qui leur sont acceptables, accéder aux structures de soutènement des lignes de transmission construites sur une voie publique ou un autre lieu public, comme le prévoit le paragraphe 43(5) de la Loi.

B.Équité procédurale

165.Le Conseil est d'avis que les arguments de la MEA concernant le manque d'équité supposé de la procédure découlant de l'opinion du personnel ne sont pas fondés.

166.Dans ses observations finales et en réplique, la MEA a soutenu que l'opinion du personnel a rendu toute l'instance inéquitable et que l'ACTC a compté, pour une large part, sur l'opinion du personnel pour justifier un faible tarif d'utilisation des poteaux. La MEA a déclaré que les parties ont reçu du Conseil l'ordre de participer à un processus de règlement de différend dans le but d'en venir à une entente sans décision du Conseil. La MEA a ajouté que les parties ont été informées que les mémoires ainsi que l'éventuelle opinion du personnel feraient partie du dossier présenté devant le Conseil. La MEA déclare en outre que l'opinion du personnel qui en a découlé n'a pas tenu compte des exposés oraux exhaustifs faits par la MEA dans le but de résoudre le différend et, de fait, ne les a même pas mentionnés. Elle a souligné que le tarif d'utilisation des poteaux recommandé dans l'opinion du personnel est le même que celui réclamé par Hydro-Ontario, malgré le fait qu'aucune preuve concernant l'utilisation des poteaux d'Hydro-Ontario n'a été déposée devant le Conseil ou son personnel. La MEA est d'avis que, par conséquent, le Conseil ne devrait pas tenir compte de l'opinion du personnel, ni des sections des mémoires de l'ACTC qui sont fondées sur l'opinion du personnel.

167.En ce qui concerne la plainte de la MEA selon laquelle l'opinion du personnel n'a pas tenu compte des exposés oraux exhaustifs faits par la MEA et, de fait, ne les a même pas mentionnées, le Conseil fait remarquer que, comme l'ont confirmé les tribunaux, il n'est ni pratique, ni nécessaire que les décisions du Conseil reprennent tous les arguments de chaque partie qui ont entraîné une décision. Cela est encore plus vrai dans le cas d'une décision non exécutoire du personnel qui résultait d'une procédure moins officielle. Toutefois, le Conseil souligne que l'opinion du personnel n'en était pas moins fondée sur tous les commentaires qui ont mené jusqu'au processus de règlement des différends inclusivement. De plus, l'opinion du personnel n'a pas été rédigée dans le but de réitérer les positions des parties, qui étaient dans l'impasse, mais plutôt pour faciliter l'élaboration d'un accord entre les parties avec l'aide de l'opinion préliminaire du personnel sur la question des tarifs.

168.Tel que précisé dans la lettre du Conseil du 27 mars 1997 qui définissait le processus de règlement du différend, l'opinion du personnel visait à fournir un rapport concis définissant les vues du personnel sur une partie ou l'ensemble des problèmes qu'il restait à résoudre. On prévoyait que les parties « tenteraient, en tirant avantage de l'opinion du personnel, de régler les questions en instance ». Les parties pourraient obtenir des éclaircissements relatifs à toute question contenue dans cette opinion. Essentiellement, il devait servir, à partir de la connaissance approfondie du personnel et de sa compétence en ces matières, d'outil facilitant la conclusion d'une entente entre les parties de façon officieuse.

169.En ce qui a trait à la plainte selon laquelle l'opinion du personnel recommandait le même tarif que celui d'Hydro-Ontario malgré qu'aucune preuve relative à l'utilisation des poteaux d'Hydro-Ontario n'ait été déposée devant le Conseil ou le personnel, le Conseil souligne que le personnel a indiqué qu'à son avis, devant l'absence de meilleures preuves et d'arguments convaincants allant dans le sens contraire, il estimait que l'approche du coût causal de la Phase II pour l'établissement du prix de revient des services des compagnies de téléphone était un point de départ approprié pour déterminer le tarif applicable. Le personnel reconnaît qu'il peut y avoir des différences dans les coûts encourus par les services publics relativement aux structures de soutènement et, en l'absence de meilleures preuves, il a conclu que les tarifs proposés par Hydro-Ontario dans son entente type de permis d'utilisation des structures de soutènement étaient pertinents dans le contexte des poteaux des services publics d'électricité.

170.Le Conseil souligne que le dossier de l'instance apporte maintenant les preuves nécessaires à la décision du Conseil relativement à la méthode appropriée et aux tarifs sans en référer au tarif accepté d'Hydro-Ontario.

171.Il faut noter que toutes les parties ont été mises au courant de la décision du 27 mars du Conseil, qui suspendait la demande de redressement provisoire durant le processus de règlement du différend, que l'opinion du personnel n'était pas exécutoire et qu'elles auraient amplement l'occasion de se prononcer sur son bien-fondé, ainsi que de déposer d'autres mémoires, y compris des exposés sur les questions de compétence juridique et constitutionnelle, si l'instance relative à un redressement provisoire et définitif reprenait.

172.Le Conseil fait aussi remarquer que, bien que les parties aient fait des commentaires sur l'opinion du personnel, l'essence de leurs exposés porte sur le fond et les preuves à l'appui de leur propre méthode d'établissement des tarifs. Il a donc concentré son analyse sur ces arguments importants pour en arriver à ses recommandations finales.

173.Pour les raisons définies plus haut, le Conseil rejette la demande de la MEA d'exclure de son analyse l'opinion du personnel et les sections des mémoires de l'ACTC fondées sur cette opinion.

C.La nécessité d'une intervention réglementaire

174.Dans ses observations finales, la MEA soutient que, même si le Conseil est compétent en ce qui a trait au paragraphe 43(5), il ne devrait pas exercer cette compétence dans le cas présent. La MEA croit qu'il y a concurrence entre les entreprises de distribution de radiodiffusion et les entreprises de télécommunications et que le Conseil devrait donc s'abstenir d'exercer les pouvoirs que lui confère le paragraphe 43(5). La MEA déclare que, alors que les pouvoirs d'abstention prévus à l'article 34 ne s'appliquent pas à l'article 43, le paragraphe 34(2) de la Loi prévoit l'abstention de réglementer si les services sont suffisamment concurrentiels pour protéger les intérêts du public. La MEA ajoute que si le Conseil, dans cette instance, oblige l'accès aux poteaux des services publics d'électricité à un tarif inférieur à la juste valeur marchande de l'espace de communication, les câblodistributeurs gagneront un avantage concurrentiel sur leurs rivaux.

175.En réplique, l'ACTC soutient que, comme l'admet la MEA, l'article 34 de la Loi ne s'applique pas à l'article 43. De plus, l'ACTC ajoute que l'argument de la MEA en faveur de l'abstention néglige, à dessein, les questions de politique publique qui sous-tendent l'article 43 et le paragraphe 43(5) en particulier. L'ACTC ajoute que les problèmes d'environnement, de sécurité et de service au public associés aux structures de soutènement mettent en évidence la nécessité de réglementer et l'inaptitude de l'article 34. L'ACTC ajoute aussi que, même si l'article 34 était pertinent, les conditions nécessaires à une abstention en vertu de l'article 34 n'existent pas.

176.La MEA soutient aussi que le Conseil devrait s'abstenir d'exercer ses compétences dans le cas présent parce qu'il n'est pas question de refuser l'accès aux câblodistributeurs. La MEA ajoute que les câblodistributeurs ont simplement choisi de ne pas payer le prix exigé et ont plutôt demandé au Conseil de réglementer l'utilisation des poteaux, malgré l'existence d'autres moyens que les poteaux, par exemple, en enfouissant les câbles ou en distribuant le service au moyen d'une autre technologie, comme le satellite de radiodiffusion directe (SRD) ou autre technologie sans fil. L'ACTC réplique que le litige porte sur l'accès : la MEA exige que les câblodistributeurs paient un tarif annuel de 40,53 $ pour accéder aux poteaux des services publics d'électricité.

177.L'ACTC est d'avis que la proposition de la MEA voulant que les câblodistributeurs enfouissent leurs câbles ou érigent leurs propres poteaux ne tient pas compte de la forte politique publique en faveur du partage des structures de soutènement existantes. L'ACTC soutient aussi que les services publics d'électricité intimés ont un monopole effectif dans les cas en litige et que, par conséquent, aucune forme de négociation de marché ne peut avoir lieu. L'ACTC ajoute que la réglementation du coût des contributions des monopoles dans les services concurrentiels n'est ni inhabituelle, ni inappropriée. L'ACTC ajoute aussi que rien dans le dossier de l'instance ne laisse entendre que la MEA pourrait changer d'avis sur les tarifs appropriés d'utilisation des poteaux si le Conseil refusait d'exercer ses compétences en vertu du paragraphe 43(5).

178.Le Conseil fait remarquer que, comme l'a soutenu l'ACTC et comme le reconnaît la MEA, l'article 34 de la Loi ne peut s'appliquer que relativement aux articles de la Loi qui sont précisés à l'article 34. L'article 34 ne peut pas s'appliquer en ce qui concerne l'exercice des pouvoirs que l'article 43 confère au Conseil.

179.Le paragraphe 43(5) concerne principalement l'accès aux structures de soutènement. La question n'est pas seulement de savoir si l'accès a été refusé, mais plutôt si l'accès peut être obtenu à des conditions acceptables pour le fournisseur de services au public. Le Conseil est d'avis qu'un point important à considérer dans une décision de ne pas accorder de redressement en vertu du paragraphe 43(5) serait le fait qu'il y a, véritablement, d'autres fournisseurs de structures de soutènement qui pourraient répondre aux besoins de distribution du requérant qui veut obtenir un redressement. Le Conseil souligne qu'il n'y a pas suffisamment de concurrence entre les fournisseurs de structures de soutènement et que, de plus, il juge que les autres possibilités que l'utilisation des poteaux proposées par la MEA ne sont, selon lui, ni pratiques, ni raisonnables dans le cas présent. Le champ d'activité des requérants est de distribuer des signaux de télévision par câble, non pas par d'autres technologies de distribution. En fait, le Conseil leur a accordé des licences à cette fin. De plus, le paragraphe 43(5) s'applique à des cas où l'accès ne peut pas être obtenu à des conditions acceptables pour le requérant et n'est pas limité aux cas où l'accès est nécessairement refusé. Dans les circonstances, le paragraphe 43(5) est pertinent.

180.Le Conseil est d'avis que les questions de politique publique qui sous-tendent l'article 43 et l'intérêt public justifient la nécessité de réglementer. La construction de nouvelles structures de soutènement ainsi que l'accès aux structures de soutènement actuelles sont des questions d'intérêt public qu'il ne suffit pas d'examiner comme ne concernant que les intérêts privés des parties contractantes. Le Conseil juge aussi que toutes les possibilités raisonnables de régler ce différend par la négociation, avec ou sans la participation du personnel du Conseil, ont été explorées à fond et que des démarches additionnelles semblables ne surmontraient probablement pas l'impasse. Malgré le temps qui s'est écoulé depuis le début du différend, les parties n'ont pas pu ou n'ont pas voulu en arriver à une entente mutuelle. Étant donné ce qui précède, le Conseil croit qu'il y a lieu de prendre une décision finale sur le redressement définitif demandé.

D.Coûts des poteaux et tarif de location

1.Introduction

181.Dans sa demande, l'ACTC réclamait que le Conseil accorde l'accès aux structures de soutènement des services publics d'électricité au tarif de location des poteaux établi dans la décision 95-13 pour les compagnies membres de Stentor (ce qu'elles étaient alors), soit un tarif annuel par poteau de 9,60 $.

182.La MEA soutient que, dans le cas où le Conseil déciderait de réglementer l'accès aux poteaux des services publics d'électricité et d'établir un tarif de location de poteaux, le prix de l'accès devrait approcher aussi près que possible la juste valeur marchande. La MEA souligne que les frais de location des poteaux touchent les abonnés à l'électricité et croit que ces abonnés ne devraient pas être pénalisés en défrayant les coûts d'une subvention à l'industrie de la câblodistribution.

183.La MEA croit que le Conseil devrait axer l'établissement du coût des poteaux sur les coûts structurels des poteaux. La MEA propose des modèles d'établissement des coûts qui fixeraient des tarifs pouvant recouvrer les coûts différentiels associés à l'utilisation par les câblodistributeurs des poteaux des services publics d'électricité et faire une contribution aux coûts en immobilisations de ces structures de soutènement.

184.L'ACTC accepte en principe que les câblodistributeurs payent les coûts différentiels et fassent une contribution raisonnable aux coûts en immobilisations. Toutefois, l'ACTC n'est pas d'accord avec l'approche de la MEA en ce qui a trait au calcul réel des coûts différentiels et en immobilisations et, par voie de conséquence, des tarifs de location des poteaux.

185.Dans sa décision 95-13, le Conseil a approuvé des tarifs couvrant les coûts différentiels et prévoyant une contribution pour tenir compte des coûts communs fixes. Dans l'instance actuelle, le Conseil souligne l'accord de l'ACTC au fait que les utilisateurs des structures de soutènement des membres de la MEA doivent aussi payer des tarifs qui permettent de recouvrer les coûts différentiels et qui font une contribution. Toutefois, le Conseil est également d'avis que la détermination du niveau de la contribution exige, dans le cas présent, un examen de la preuve de la MEA en ce qui concerne ses coûts fixes.

186.Le Conseil souligne que, dans le dossier de la présente instance, les parties ont axé leurs éléments de preuve sur les coûts d'un poteau type de service public d'électricité de 40 pieds. Par conséquent, le Conseil fonde ses déterminations sur le modèle d'espace sur un poteau de 40 pieds fourni par la MEA. Bien que la taille des poteaux des intimés varie, les estimations de coûts du Conseil et le tarif de location final qui en découle s'appliquent à tous les poteaux sur les territoires des intimés.

2.Coûts différentiels

187.L'ACTC croit qu'en général, dans les ententes sur les structures de soutènement, une partie importante des coûts différentiels est couverte par des frais non périodiques spécifiques à une activité donnée. L'ACTC ajoute que cela a été le cas pour les ententes de structures de soutènement entre les câblodistributeurs et les services publics d'électricité dans le passé et que cela continuerait à l'être dans l'une ou l'autre des ententes de structures de soutènement préconisées par l'ACTC et par la MEA.

188.L'ACTC juge qu'en plus de ces coûts non périodiques, certains coûts différentiels peuvent être perçus comme étant encourus sur une base courante, soit les frais d'administration liés au placement des installations des câblodistributeurs sur les poteaux des services publics d'électricité et les pertes de productivité découlant du fait que les équipes des services publics d'électricité doivent travailler en tenant compte des installations des câblodistributeurs. L'ACTC fait remarquer que ces coûts différentiels sont généralement recouvrés dans le cadre du tarif mensuel de location des poteaux. L'ACTC croit qu'en se fondant sur la preuve déposée par les compagnies de téléphone dans les instances précédentes du Conseil, les frais d'administration des services publics d'électricité se situent entre 1,80 à 2,40 $ par an. Selon la même preuve, l'ACTC ajoute que les coûts associés à la perte de productivité se trouvent entre 0,25 et 0,75 $ et que les coûts différentiels totaux se situent donc entre 2,05 et 3,15 $ par année.

189.La MEA a remis une estimation annuelle de 3,15 $ par poteau pour la perte de productivité dans le travail des services publics à cause de la présence de raccordements de câbles sur les poteaux des services publics.

190.L'ACTC soutient que, dans la mesure où les coûts de perte de productivité de la MEA de 3,15 $ visent à recouvrer tous les coûts différentiels courants (c'est-à-dire les frais d'administration et ceux de perte de productivité puisque ces termes sont ceux utilisés par le Conseil), elle considère cette estimation élevée mais raisonnable.

191.Le Conseil souligne que l'ACTC et la MEA reconnaissent que la perte de productivité résultant du fait que les équipes des services publics d'électricité doivent travailler en tenant compte des installations des câblodistributeurs constituent véritablement des coûts différentiels courants généralement recouvrés au moyen du tarif de location des poteaux.

192.Le Conseil souligne aussi que l'ACTC cherche à obtenir un appui pour la perte de productivité qu'elle propose à partir de plusieurs anciennes analyses concernant la perte de productivité des compagnies de téléphone causée par la présence de raccordements de câbles sur les poteaux appartenant aux compagnies de téléphone. Le Conseil juge, toutefois, que l'utilisation et le coût des structures de soutènement des compagnies de téléphone ne constituent pas nécessairement une base pertinente à partir de laquelle il est possible de dériver les coûts d'utilisation des poteaux d'un service d'électricité par une compagnie de câblodistribution ou de télécommunications. D'autre part, l'ACTC n'a pas fourni de renseignements concernant la perte de productivité relative aux activités des services publics municipaux. Le Conseil estime que le coût de perte de productivité de la MEA de 3,15 $ constitue une estimation raisonnable.

193.Le Conseil souligne que selon l'ACTC, les frais d'administration directement applicables au raccordement des installations sur les poteaux des membres de la MEA doivent aussi être perçus comme des coûts différentiels dûment recouvrables au moyen des tarifs mensuels de location des poteaux.

194.Cependant, le Conseil fait remarquer que la MEA n'a pas défini de tels coûts d'administration liés aux poteaux. La MEA a adopté une approche différente pour estimer les frais d'administration et n'a pas inclus de coût différentiel précis pour les frais d'administration liés exclusivement aux poteaux. En l'absence de preuve précise quant à ce qui constituerait un coût différentiel raisonnable pour les frais d'administration liés aux poteaux, le Conseil a calculé un chiffre de 0,62 $, fondé sur le mémoire de la MEA, tel que discuté ci-après.

195.Selon ce qui précède, le Conseil estime que 3,77 $ par poteau par année (soit, 3,15 $ en perte de productivité et 0,62 $ en frais d'administration différentiels) représentent une estimation raisonnable du recouvrement des coûts différentiels courants.

3.Coûts en immobilisations

196.Selon une estimation des coûts structurels obtenus par déflation du coût de remplacement d'un poteau à partir de 1 270 $, selon l'indice des prix à la consommation (IPC) sur une période de 25 ans et en supposant une répartition égale des poteaux, la MEA calcule un coût structurel moyen de 820 $, un coût structurel net de 520 $ et un amortissement annuel de 32,80 $.

197.L'ACTC soutient que les coûts structurels et les estimations de coûts structurels nets de la MEA sont trop élevés. L'ACTC ajoute que, comme le reconnaît la MEA, ces chiffres ne sont pas fondés sur les données antérieures, mais représentent des estimations dérivées d'un coût initial qui est lui-même une estimation. L'ACTC juge qu'il n'y a pas eu de tentative de la part de la MEA d'exclure du coût des poteaux les éléments purement à l'avantage des services publics d'électricité (p. ex., les coûts des traverses de poteau) ou de tenir compte du fait que les poteaux des services publics d'électricité coûtent plus cher à l'achat et à l'installation que les poteaux qui seraient installés purement à des fins de communications. L'ACTC estime aussi que, dans les circonstances actuelles, la façon la plus simple de faire une estimation consiste à adopter le coût des compagnies de téléphone.

198.En réplique, la MEA soutient que les pratiques comptables des intimés ne sont pas établies de manière que tous les services publics puissent fournir les coûts exacts des poteaux. Toutefois, la MEA déclare que ses estimations reposent sur des données réelles fournies par les services publics en question et ne sont pas, comme c'est le cas avec les données de l'ACTC, fondées sur des renseignements datant de cinq ans et obtenus auprès d'une industrie complètement différente. La MEA soutient en outre que le caractère raisonnable de ces données est confirmé par les données réelles de Milton Hydro. La MEA croit aussi que les analyses de Milton Hydro se situent entre 5 % à 8 % des estimations élaborées par la MEA pour confirmer que les estimations de la MEA sont raisonnables.

199.La MEA fait remarquer qu'elle est d'accord avec l'opinion de l'ACTC selon laquelle des articles comme les traverses de poteaux doivent être exclus du coût en immobilisations des poteaux des services publics d'électricité et elle ajoute qu'elle avait enlevé ces coûts des chiffres qu'elle a proposés. La MEA précise aussi que tout modèle basé sur les coûts doit être fondé sur les coûts propres des poteaux en question, c'est-à-dire les poteaux des services publics d'électricité.

200.Dans sa preuve, la MEA incluait une base de rendement de l'actif de 10 % appliquée aux coûts structurels nets du poteau. L'ACTC croit que l'inclusion d'un taux de 7 % serait une estimation plus juste des coûts de détention annuels parce que les services publics d'électricité sont des entités contrôlées par des municipalités qui peuvent financer leur dette à moins de 10 %. La MEA réplique que les 10 % représentent le rendement nécessaire à ses membres pour leur actif et ne reflètent pas la dette, les coûts de détention ou les coûts du financement.

201.La MEA inclut aussi un supplément d'administration de 10 % sur l'amortissement et la base de rendement de l'actif. Dans la demande de renseignements MEA(CCTA)24oct97-9, la MEA a indiqué que ce supplément d'administration visait à recouvrer des coûts additionnels imposés aux services publics d'électricité comme ceux encourus à l'égard des commissaires ou les frais généraux d'administration et d'entretien de bureau qui ne sont pas reflétés dans les coûts en immobilisations des poteaux.

202.À cet égard, l'ACTC est d'avis que ces types de coûts ne doivent pas être inclus dans la détermination de la contribution aux immobilisations imputables aux câblodistributeurs. L'ACTC croit que le tarif des poteaux doit recouvrer les coûts différentiels courants liés à l'utilisation d'un poteau de service public d'électricité par un câblodistributeur, et aussi faire une contribution raisonnable aux coûts en immobilisations du poteau, mais qu'il ne vise pas à faire une contribution au fonctionnement global d'un service public d'électricité.

203.Dans sa preuve, la MEA inclut aussi un coût annuel d'entretien des poteaux de 20 $ dans son calcul des coûts de détention annuels. Selon la MEA, ces frais d'entretien incluent 15 $ pour l'élagage des arbres, 3,50 $ pour l'inspection et l'entretien des poteaux et 1,50 $ pour le redressement des poteaux.

204.L'ACTC souligne que, dans la demande de renseignements MEA(ACTC)24 oct97-6b), la MEA a indiqué que les coûts d'élagage de 15 $ incluent les coûts d'élagage au niveau des installations de communications où cette tâche est accomplie par le service public d'électricité sur les poteaux utilisés conjointement. L'ACTC ajoute qu'en même temps, suivant les anciennes ententes de structures de soutènement de la MEA, tout comme suivant le nouveau modèle d'entente proposé par la MEA, les câblodistributeurs devraient payer des frais séparés pour l'élagage des arbres au niveau des installations de communications, en plus du tarif de location des poteaux. L'ACTC précise que les frais d'entretien de la MEA devraient être réduits pour les rendre conformes aux coûts d'entretien des compagnies de téléphone lesquels, selon l'ACTC, se situent entre 5,75 $ et 15 $.

205.Le Conseil est d'accord avec la MEA que tout modèle fondé sur les coûts doit être établi en fonction des coûts des poteaux des services publics d'électricité plutôt que des poteaux conçus purement aux fins de communications et que les câblodistributeurs devraient payer pour l'utilisation des poteaux qui sont à leur disposition.

206.Le Conseil souligne que les membres de la MEA ne sont soumis à aucune exigence comptable réglementaire de tenir des comptes secondaires distincts pour les structures de soutènement et qu'en conséquence, les coûts comptables pour les poteaux seulement ne sont pas disponibles. Cependant, le Conseil souligne aussi que la MEA, à l'appui de ses estimations des coûts structurels et des coûts structurels nets d'un poteau a présenté une analyse des poteaux de Milton Hydro qui a été annexée à la preuve de la MEA du 17 octobre 1997.

207.Au moyen d'une démarche relative aux coûts structurels du service fondée sur les dossiers financiers des services publics, Milton Hydro a mis au point une méthode pour déterminer les coûts complets associés aux lignes aériennes des services publics et à l'élément poteau de ces lignes. Selon l'annexe A de l'analyse de Milton Hydro, les chiffres suivants pour les poteaux sont disponibles : le coût structurel d'un poteau s'élève à 478 $ et celui de l'amortissement annuel, à 31,11 $.

208.Le Conseil souligne que, contrairement aux estimations présentées par la MEA, la preuve de Milton Hydro est fondée sur des dossiers financiers pour déterminer le coût des poteaux. En l'absence de données réelles pour l'ensemble des poteaux de la MEA, le Conseil est d'avis que les données de Milton Hydro pourront servir de substitut raisonnable. Par conséquent, le Conseil détermine que des coûts structurels nets estimés de 478 $ et un amortissement de 31,11 $ devront servir au calcul du tarif de location des poteaux.

209.Le Conseil croit que le tarif des poteaux ne vise pas à faire une contribution aux coûts globaux d'exploitation d'un service public. En l'absence de désignation par la MEA de coûts différentiels précis liés expressément à l'administration de l'utilisation des poteaux des services publics d'électricité par les câblodistributeurs, le Conseil juge que la moitié du supplément d'administration total de la MEA qui se chiffre à 0,62 $ par année servira d'estimation raisonnable des coûts différentiels courants d'administration liés aux poteaux, comme l'octroi de permis, l'administration des contrats, la facturation et la perception des fonds.

210.En ce qui concerne le rendement proposé de l'actif de la MEA à 10 %, le Conseil souligne que, dans la preuve de la MEA du 14 avril 1997 à l'appui de son tarif de location, elle a décrit des frais financiers proposés de 8 % comme une perte annuelle de possibilités d'investissement représentées par le coût d'un poteau de bois de 40 pieds mis en place. La MEA a aussi déclaré que son taux proposé de 8 % de rendement de l'actif était conforme aux pratiques de planification financière dans les maisons de placement, d'assurance et de régime de retraite. Dans le même mémoire, la MEA a aussi ajouté que le taux de rendement actuellement permis aux municipalités par Hydro-Ontario est de 8,5 %.

211.Le Conseil s'accorde avec la MEA sur le fait que les propriétaires d'actif en poteau de services publics d'électricité devraient pouvoir retirer un rendement sur leur investissement. Toutefois, le Conseil croit que le taux proposé de 10 % de rendement n'est pas appuyé par la preuve de la MEA sur cette question. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil décide que 8,5 % est un taux de rendement de l'investissement approprié.

212.Le Conseil est d'avis que les frais d'entretien doivent exclure l'élagage des arbres. Les services publics d'électricité devraient plutôt être autorisés à percevoir des frais séparés auprès des câblodistributeurs pour refléter leur activité d'élagage des arbres. Le Conseil croit qu'il serait préférable de laisser cette question à la discrétion des parties en premier lieu. De plus, le Conseil souligne que, dans l'étude de Milton Hydro, les coûts d'entretien des poteaux, sans l'élagage des arbres, s'élèvent à 6,47 $ (5 $ pour les inspections des poteaux et 1,47 $ pour les redresser). Selon la décision du Conseil d'utiliser les données de Milton Hydro dans le calcul des tarifs, des frais d'entretien de 6,47 $ seront inclus dans le tarif de location mensuel des poteaux.

4.Facteur d'attribution de l'espace

213.L'ACTC est d'avis qu'un facteur fondé sur le pourcentage d'espace utilisable occupé reste le meilleur moyen de répartir les coûts en immobilisations. L'ACTC croit aussi qu'en vertu de cette approche, un facteur d'attribution de 7,4 % serait approprié puisque les câblodistributeurs utilisent 1 pied sur un total de 13,5 pieds d'espace utilisable sur un poteau type de 40 pieds. La MEA a proposé deux facteurs d'attribution différents - i) le facteur du modèle d'espace sur le poteau et ii) le facteur du modèle Glaeser de la MEA.

(i)Modèle d'espace sur le poteau

214.Un poteau type de 40 pieds d'utilisation conjointe est décrit dans la preuve de la MEA comme suit :

Espace d'électricité 11,50 pi.
Espace de séparation 3,25 pi.
Espace de communication 2,00 pi.
Hauteur libre 17,25 pi.
Longueur sous terre 6,00 pi.

215.Le facteur d'attribution selon le modèle d'espace sur le poteau de la MEA est de 33 % et il est obtenu en faisant la moyenne des facteurs d'attribution de 26 % et de 40 % qui, à leur tour, sont fondés sur les attributions entre trois utilisateurs (câblodistributeur, compagnie de téléphone et compagnie d'électricité) et deux utilisateurs (câblodistributeur et compagnie de téléphone) respectivement. La MEA propose d'attribuer la longueur totale d'un poteau de 40 pieds de telle sorte que l'utilisateur ou les utilisateurs de l'espace de communication soient responsables de 100 % de l'espace de communication, de 100 % de l'espace de séparation et d'une part proportionnée de la hauteur libre et de la longueur sous terre du poteau (c.-à-d. 50 % ou 33 %, selon le nombre d'utilisateurs).

216.L'ACTC croit que l'attribution d'espace de séparation à un câblodistributeur n'est pas justifiée. L'ACTC précise que la nécessité d'un espace de séparation est due à l'obligation des services publics d'électricité de se conformer aux normes de l'Association canadienne de normalisation (CSA) qui, pour leur part, concernent le caractère dangereux des installations des services publics d'électricité. L'ACTC ne croit pas que les coûts d'un espace de hauteur libre et de la longueur sous terre du poteau doivent être répartis également entre tous les utilisateurs de la structure de soutènement. L'ACTC est aussi d'avis que le facteur d'attribution doit refléter les avantages et les droits supérieurs associés à la propriété des poteaux de sorte que le propriétaire devrait absorber une partie proportionnellement plus élevée des coûts en immobilisations. De l'avis de l'ACTC, l'espace de communication est une capacité de réserve pour les services publics d'électricité et ceux-ci seront entièrement indemnisés pour l'utilisation de cet espace s'ils recouvrent les coûts différentiels qu'ils pourraient devoir débourser.

217.En réplique, la MEA croit que l'espace de séparation n'est nécessaire que parce que les câblodistributeurs mettent des installations fixes sur les poteaux des services publics d'électricité. La MEA ajoute que, sans installations fixes de communications, un service public d'électricité pourrait, dans de nombreux cas, installer des poteaux plus courts ou utiliser tout l'espace de communication et l'espace de séparation lui-même. La MEA est d'avis que l'espace de séparation n'existe que pour protéger les installations fixes et les travailleurs en communications et que les services publics d'électricité n'en tirent aucun avantage.

(ii)Modèle de Glaeser

218.Dans l'approche du modèle de Glaeser, les coûts en immobilisations sont répartis selon les avantages mesurés par les coûts évités à chaque partie par l'utilisation conjointe des poteaux, c'est-à-dire que le coût en immobilisations d'un poteau est réparti selon le coût relatif qu'une entreprise de câblodistribution aurait autrement à débourser. Selon le nombre d'utilisateurs, le modèle de Glaeser utilise la formule C/(C+U) ou C/(C+C+U) pour déterminer le facteur d'attribution pour une entreprise de câblodistribution. Dans ces formules, C représente le coût d'un poteau de communications et U est le coût d'un poteau de service public d'électricité. En faisant la moyenne des facteurs d'attribution qui découlent de ces deux formules, la MEA arrive à un facteur d'attribution selon le modèle de Glaeser de 35 % .

219.Dans ses observations finales, l'ACTC a émis l'avis que le modèle de Glaeser ne tient pas bien compte du fait que les services publics d'électricité utilisent un poteau qui coûte plus cher. L'ACTC ajoute que le modèle de Glaeser n'a jamais servi à établir des coûts de structure de soutènement et, selon elle, il ne conviendrait pas que le Conseil utilise cette méthode maintenant. L'ACTC ajoute que ce modèle prétend répartir les coûts selon les avantages relatifs. Toutefois, il ne tient pas compte des avantages de la propriété.

220.La MEA réplique que le Conseil ne devrait pas se laisser dissuader d'adopter une méthode seulement parce qu'il n'a jamais utilisé ce modèle auparavant.

221.La méthode de calcul des coûts utilisée par la MEA dans l'élaboration de son tarif annuel proposé de 40,53 $ est fondée sur une méthode d'établissement des coûts entièrement répartis qui impose aux compagnies de communications de supporter tous les coûts de l'espace de communication, une partie de la hauteur libre et de la longueur sous terre du poteau et tous les coûts de l'espace de séparation.

222.Le Conseil est d'avis que pour déterminer les coûts appropriés à recouvrer des câblodistributeurs, il importe de tenir compte du fait qu'ils n'ont pas de droit de propriété sur le poteau. Par conséquent, le Conseil croit que l'approche de coûts entièrement répartis proposée par la MEA ne convient pas et qu'un facteur d'attribution fondé sur le pourcentage d'espace utilisable occupé reflète mieux l'utilisation réelle par un utilisateur et, par conséquent, constitue une meilleure façon de répartir les coûts. En outre, compte tenu de la concurrence accrue en distribution de radiodiffusion et en télécommunications et de la possibilité que le nombre d'utilisateurs de l'espace de communication augmente dans l'avenir, le Conseil est d'avis que les attentes voulant que tous les poteaux des services publics d'électricité servent à deux utilisateurs en communications sont raisonnables.

223.Le Conseil est d'avis que l'espace utilisable sur un poteau de service public d'électricité de 40 pieds, après avoir calculé la hauteur libre et la longueur sous terre, est de 16,75 pieds. De plus, le Conseil croit que les services publics d'électricité ne tirent aucun avantage de l'espace de séparation et que cet espace est nécessaire seulement pour protéger les employés et les raccordements des compagnies de communications. Le Conseil s'accorde avec la MEA pour dire que sans les raccordements de communications, les services publics d'électricité pourraient utiliser tout l'espace de séparation et l'espace de communication comme tel. Par conséquent, le Conseil juge que l'espace de séparation a un lien avec les utilisateurs de communications. En conséquence, l'espace de séparation ainsi que l'espace de communication seront répartis également entre deux utilisateurs de communications.

224.À partir de ce qui précède, le Conseil estime que le câblodistributeur occupe un pied de l'espace de communication et 1,6 pied de l'espace de séparation, soit un total de 2,6 pieds des 16,75 pieds d'espace utilisable. Par conséquent, le Conseil juge que l'attribution d'espace qui en découle pour les entreprises de câblodistribution totalise 15,5 %.

225.À partir des conclusions de la présente décision, le Conseil calcule le tarif de location des poteaux comme suit :

Coût structurel net par poteau : 478,00 $
Amortissement : 31,11
Intérêt : 40,63
(8,5% du coût structurel net par poteau)
Entretien : 6,47
Supplément d'administration : S/O
Total des coûts liés à l'immobilisation : 78,21
(Amortissement + Intérêt + Entretien)
Attribution de la câblodistribution : 15,5 %
(Facteur d'attribution de l'espace)
Contribution : 12,12
(Total des coûts liés à l'immobilisation x Attribution de la câblodistribution )
Perte de productivité : 3,15
Frais d'administration : 0,62
Coût annuel total par poteau : 15,89 $
(Contribution + Perte de productivité + Frais d'administration)

226.Par les présentes, le Conseil fixe le tarif annuel de location des poteaux à 15,89 $ le poteau, à moins que les parties ne s'entendent autrement.

E.Conditions non monétaires de l'entente sur les structures de soutènement

227.L'ACTC est d'avis que les entreprises de câblodistribution ont été incapables de s'entendre avec les services publics d'électricité sur les conditions de renouvellement des accords sur les structures de soutènement qui arrivaient à échéance le 31 décembre 1996 ou avant. L'ACTC ajoute que la solution appropriée à ce stade-ci serait que le Conseil définisse le tarif de location des poteaux et donne aux câblodistributeurs la permission d'accéder aux structures de soutènement des services publics d'électricité aux mêmes conditions non monétaires que celles qui s'appliquaient en 1996.

228.Dans sa réplique, la MEA déclare que si la question des tarif est résolue, il ne restera que cinq points importants à régler. De l'avis de la MEA, ils peuvent être résolus par des négociations entre les parties sans intervention du Conseil. Selon la MEA, les cinq points à résoudre sont les frais, la signature des plans par un ingénieur, la responsabilité civile, les dommages et l'assurance, les droits acquis et la cession.

229.La MEA ajoute que, contrairement à ce que l'ACTC affirme, l'entente sur les structures de soutènement n'est plus viable. La MEA précise que les services publics d'électricité avaient certaines inquiétudes en ce qui concerne l'entente modèle échue en 1992, relativement aux questions et aux problèmes non réglés ou absents dans l'entente échue. La MEA dresse la liste des divers éléments de l'entente sur les structures de soutènement échue qui poseraient un problème si le Conseil tentait d'imposer le contrat échue pour les raccordements de poteaux ultérieurs. La MEA précise que ces préoccupations concernent directement le fonctionnement sûr, efficace et rentable du réseau de distribution des services publics.

230.L'ACTC répond que les négociations étaient prometteuses, au moins en ce qui concerne les conditions non monétaires. Toutefois, l'ACTC ajoute qu'elle croit aussi que la conclusion de ces négociations prendrait probablement plusieurs mois, alors qu'ils auront besoin d'avoir accès aux poteaux des services publics d'électricité des intimés le plus tôt possible.

231.Le Conseil est d'avis que les conditions non monétaires d'accès aux structures de soutènement relèvent de sa compétence, mais il estime qu'il serait préférable que les parties négocient ces questions entre elles. Étant donné la déclaration de la MEA selon laquelle il ne reste que peu de points à résoudre, le Conseil juge qu'une nouvelle entente négociée est probablement possible. Toutefois, jusqu'à ce qu'une nouvelle entente soit réalisée, les câblodistributeurs doivent avoir accès aux structures de soutènement des services publics d'électricité. Le Conseil ordonne donc que les câblodistributeurs aient accès aux mêmes conditions non monétaires que celles définies dans l'entente échue sur les structures de soutènement à moins que les parties n'en conviennent autrement.

F.Autres coûts causals attribuables aux raccordements des câblodistributeurs sur les poteaux des services publics d'électricité

232.Dans sa preuve, la MEA déclare qu'en plus de la perte de productivité dans l'exécution des travaux de ligne en tenant compte des raccordements des câblodistributeurs, le service public doit assumer un certain nombre d'autres coûts causals à cause de la présence des raccordements des câblodistributeurs sur les poteaux des services publics. La MEA propose de séparer les frais directs non périodiques à recouvrer des frais de location des poteaux.

233.La MEA est d'avis que ces coûts causals varient selon les services publics et les câblodistributeurs en fonction de facteurs comme les conditions locales, la quantité de travail en cours et le rendement du câblodistributeur. Entre autres exemples de coûts causals faisant l'objet de frais directs, mentionnons : le temps supplémentaire d'ingénierie imposé par la présence de raccordements de câblodistribution sur les poteaux, l'examen des demandes de permis, les coûts de l'installation de connexions de liaison aux conducteurs neutres des services publics et le coût de l'inspection initiale sur place pour déterminer la faisabilité de l'utilisation conjointe proposée.

234.Dans ses observations en réplique, l'ACTC soutient que les câblodistributeurs n'ont pas connu, par le passé, de problèmes importants avec les services publics d'électricité intimés, en ce qui a trait à ces frais non récurrents. L'ACTC déclare que, bien que cette préoccupation n'ait pas été importante dans la demande, les câblodistributeurs croient qu'il est important d'insister sur le fait que le paragraphe 43(5) de la Loi habilite le Conseil dans le cas d'un litige sur l'accès devant découler de ces frais.

235.Le Conseil est d'avis qu'il est habilité à intervenir dans tout litige concernant l'accès aux structures de soutènement, y compris ceux qui touchent le recouvrement des frais non récurrents. Le Conseil estime que le recouvrement des autres coûts causals doit être négocié en premier lieu entre les divers câblodistributeurs et les services publics d'électricité.

G.Tarif de location des poteaux des services publics d'électricité municipaux non représentés par la MEA

236.Les services publics d'électricité municipaux non représentés par la MEA dans le cadre de la présente instance sont : Toronto Hydro-Electric Commission; West Elgin Hydro-Electric Commission; CNP; Chatham Hydro; Deep River; L'Orignal HEC; Pelham HEC; Plantagenet HEC; et Webbwood HEC. Deep River et CNP ont toutes deux déposé une réponse en leur propre nom.

237.Dans leurs exposés, Deep River et CNP s'opposaient largement à ce que le Conseil intervienne dans cette question tout en offrant peu d'éléments de preuve pour appuyer les coûts des poteaux et les tarifs de location des poteaux.

238.Toutefois, dans son exposé du 7 mars 1997, CNP déclarait en substance que [traduction] « puisque Rogers croit pouvoir obtenir une solution du CRTC sur des questions contractuelles, nous nous sentons justifiés de demander que le CRTC impose une décision à Rogers d'accepter notre dernière offre d'un contrat d'un an à un tarif par poteau très raisonnable de 20,75 $ ». Toutefois, aucune preuve précise sur les éléments de coûts différentiels ou en immobilisation inclus dans le tarif de location des poteaux n'a été présentée par le service public d'électricité. Aussi, dans une lettre du 2 avril 1997, CNP déclarait qu'elle était prête à attendre les résultats du processus du Conseil pour déterminer un tarif pour la MEA. CNP ajoute qu'elle serait en outre préparée à harmoniser ses tarifs par poteau aux tarifs obtenus par médiation de la MEA, à la condition qu'elle les trouve justes et équitables.

239.Dans une lettre du 21 février 1997, Pelham HEC confirme qu'elle renouvellerait son contrat échu à compter du 1er janvier 1997. Pelham HEC déclare aussi en substance que [traduction] « les prix seront tels que convenus après négociations avec la MEA ou selon la décision finale du CRTC ».

240.Le Conseil fait remarquer qu'aucun des autres services publics d'électricité municipaux intimés non représentés par la MEA n'a présenté de coûts ou de preuve concernant le tarif de location de poteau en son propre nom durant la présente instance. Le Conseil souligne aussi que les services publics d'électricité municipaux étaient au courant de la demande de l'ACTC contre eux et ont eu l'occasion de participer à l'instance. Le Conseil décide donc que le taux annuel de location par poteau de 15,89 $ s'applique à tous les intimés, à moins que les parties n'en conviennent autrement.

Conclusion

241.Le Conseil décide qu'à moins que les parties n'en conviennent autrement, les câblodistributeurs pourront avoir accès aux mêmes conditions que celles définies dans les différentes ententes sur les structures de soutènement qui sont échues, modifiées pour que le tarif annuel de location par poteau soit fixé à 15,89 $ à compter de la date de la présente décision.

242.En ce qui concerne la Toronto Hydro-Electric Commission, les conditions des ententes précédentes qui s'appliquaient à la Hydro Electric Commission de la ville de North York et à la Commission des services publics de la ville de Scarborough, sauf en ce qui concerne le tarif par poteau fixé à 15,89 $ par année, à moins que les parties n'en conviennent autrement, restent en vigueur dans leurs anciens territoires respectifs. De même, en ce qui concerne la West Elgin Hydro Electric Commission, à moins que les parties n'en conviennent autrement, les câblodistributeurs auront accès aux mêmes conditions que celles définies dans l'entente échue sur les structures de soutènement de la West Lorne Public Utilities Commission, modifiée pour que le tarif annuel des poteaux à compter de la date de la présente décision soit fixé à 15,89 $ par poteau.

Secrétaire général

Ce document est disponible, sur demande, en média substitut et peut également être consulté sur le site Internet suivant : http://www.crtc.gc.ca

1.Les transactions ont été autorisées dans la décision 97-157 du 24 avril 1997.

2.À compter du 1er janvier 1998, trois des services publics représentés par la MEA ont été dissous et reconstitués en vertu d'une loi provinciale. Conformément au paragraphe 28(3) de la Loi de 1997 sur la Cité de Toronto, L.O. 1997, c. 2, la Hydro Electric Commission de la ville North York et la Public Utilities Commission de la ville de Scarborough ont été dissoutes. Un nouveau service public hydroélectrique, nommé Toronto Hydro-Electric Commission a été établi conformément à la Loi susmentionnée. De même, West Lorne Public Utilities Commission a été dissoute par règlement municipal et par arrêté ministériel. Un nouveau service public d'électricité a été établi sous le nom de West Elgin Hydro-Electric Commission Ces entités reconstituées ne sont pas représentées par la MEA.

3.Les critères de redressement provisoire définis dans Manitoba (procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110, tel que suppléé par RJR MacDonald Inc. c. Canada (procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311.

4.[1989] 1 R.C.S. 641, 58 D.L.R. (4e) 255.

5.Hogg, Constitutional Law of Canada, pp. 15-33.

6.Telus présente un survol de la jurisprudence relative aux deux approches appliquées par les tribunaux pour déterminer si une loi fédérale peut validement toucher une question provinciale. Selon Telus, les deux approches appliquées dans la jurisprudence sont : 1) le critère du lien rationnel et fonctionnel énoncé dans Papp c. Papp, (1970), 1 O.R. 331 (C.A. Ont.) appliqué dans R. c. Zelensky, [1978] 2 R.C.S. 940 et dans Multiple Access c. McCutcheon, [1982] 2 R.C.S. 161, et 2) le critère à savoir que la disposition contestée est véritablement « nécessaire » ou essentielle au fonctionnement du texte de loi tel qu'énoncé comme remarque incidente dans R. c. Thomas Fuller Construction, [1980] 1 R.C.S. 695 et cité avec approbation dans Regional Municipality of Peel c. MacKenzie, [1982] 2 R.C.S. 9. Telus souligne que selon le professeur Hogg, la stipulation que la disposition contestée est « essentielle » au texte de loi est plus stricte que le critère du lien rationnel et que dans General Motors c. City National Leasing, [1989] 1 R.C.S. 641, le juge Dickson a tenté de concilier ces approches de façon que [traduction] « Puisque la gravité de l'empiétement sur les pouvoirs provinciaux varie, il en va de même du critère requis pour maintenir un équilibre constitutionnel approprié » à la page 671. Telus est d'avis que, si l'on suit cette théorie, un tribunal doit mesurer le degré d'empiétement d'un texte législatif sur la sphère de compétence de l'autre gouvernement, puis dans quelle mesure la disposition contestée est nécessaire à un texte législatif autrement valide. En ce qui concerne les empiétements mineurs, le critère du lien fonctionnel et rationnel est pertinent. Pour les empiétements majeurs, un critère plus strict, comme les critères « vraiment nécessaire » ou « essentiel » s'appliquent.

7.Bell c. Canada (Commission des droits de la personne), [1996] 3 R.C.S. 854.

8.Tel que souligné par Hogg dans Constitutional Law of Canada, aux pages 15-12 à 15-16 (1998, édition à feuilles mobiles), la qualification d'une loi à des fins constitutionnelles implique la définition de « le sujet » de la loi, l'objet est souvent décrit comme l'essence et la substance de la loi, mais peut être mieux décrit comme les caractéristiques dominantes ou les plus importantes de la loi. Le processus de qualification n'est pas un exercice technique formaliste, confiné au strict fonctionnement juridique de la loi constestée. Par exemple, le fait qu'une loi provinciale perçoive une taxe ne permet pas de façon décisive de la classer de mesure de taxation. Le tribunal ira plus loin que les effets juridiques directs pour examiner les objectifs sociaux et économiques que le texte de loi visait. Pour déterminer l'objet d'un texte législatif, Hogg déclare qu'il n'y a aucun doute quant à la pertinence de la référence à l'état du droit avant le texte législatif et la question juridique que le texte législatif vise à corriger.

9.Radio Reference [1932] A.C. 304; Re CFRB (1973) 3 O.R. 819 (C.A. Ont.); Capital Cities Communications c. CRTC [1978] 2 R.C.S. 141; Commission de la fonction publique c. Dionne, [1978] 2 R.C.S. 191; procureur général (Québec) c. Kellogg's Co., [1978] 2 R.C.S. 211; Irwin Toy c. procureur général (Québec), [1989] 1 R.C.S. 927; et Re Canadian Motion Pictures Distributors Association et al. et Partners of Viewer's Choice Canada (1996), 68 C.P.R. (3e) 450 (C.A.F.).

10.Les paragraphes 91(29) et l'alinéa 92(10)a) de la Loi constitutionnelle de 1867; Toronto c. Bell Telephone Co., [1905] A.C. 52; Alberta Government Telephones c. CRTC, [1989] 2 R.C.S. 225; Téléphone Guèvremont Inc. c. Québec (Régie des télécommunications), [1994] 1 R.C.S. 878.

11.Re Oshawa Cable TV Ltd et Town of Whitby (1969), 4 D.L.R. (4e) 224 (Ont H.C.J.) concernant l'incompétence constitutionnelle d'une province à régir la construction et le fonctionnement du réseau de distribution d'un câblodistributeur.

12.Québec (Commission du salaire minimum) c. Bell Telephone Co., [1966] R.C.S. 767.

13.Munro c. Commission de la Capital nationale, [1966] R.C.S. 663; Dyke et Cochin Pipe Lines (1978), 85 D.L.R. (3e) 607 (C.A. Sask.); Re Canadian Motion Pictures Distributors Association et al. et Partners of Viewer's Choice Canada (1996), 68 C.P.R. (3e) 450 (C.A.F.); Canadian National Railway Co. c. Agence nationale des transports, [1996] 1 C.F. 355 (C.A.F.).

14.Re Ontario Hydro et al., [1993] 3 R.C.S. 327.

15.Toronto c. Bell Telephone Co., [1905] A.C. 52; Toronto c. Canadian Pacific Railway Co., [1908] A.C. 540; Canadian Pacific Railway Co. c. Toronto Transportation Commission, [1930] A.C. 696, [1930] 4 D.L.R. 849 (C.P.), Bell Telephone Company of Canada c. Canadian National Railway Co., [1933] A.C. 563; Toronto Railway Company c. Toronto, [1920] A.C. 426.

16.Fulton c. Energy Resources Conservation Board, [1981] 1 R.C.S. 153; article 92A de la Loi constitutionnelle de 1867.

17.Côté, P.-A., Interpretation of Legislation in Canada, 2e édition aux pages 219-224 (en anglais).

18.Stubart Investments Ltd. c. La Reine [1984] 1 R.C.S. 536.

19.Dreidger on the Construction of Statutes, 3e édition à la page 131 (en anglais).

20.Dreidger, supra, à la page 427.

21.Canadian Pacific Railway Co. c. Toronto Transportation Commission, [1930] A.C. 696, [1930] 4 D.L.R. 849 (C.P.); Bell Telephone Co. c. Canadian National Railway, [1933] A.C. 563; Canadian Electrical Association c. Canadian National Railway, [1934] C.R.C. 162 (C.P.); Canadian National Railway Co. c. Bell Telephone Co., [1939] R.C.S. 308; Canadian Pacific Railway Co. c. procureur général (Québec), [1965] R.C.S. 602; Toronto Railway Company c. Toronto, [1920] A.C. 426.

22.Convergence - Concurrence et coopération - Politiques et réglementation concernant les réseaux locaux du téléphone et de la câblodistribution, Rapport des coprésidents du Comité sur la convergence des réseaux, à la page 63.

23.Voir, par exemple, Transvision (Magog) Inc. c. Bell Canada, [1975] C.T.C. 463.

24.Supra, note 22, page 65

25.Supra, note 22, page 66

26.Supra, note 22, page 67

27.Délibérations devant le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, Sénat du Canada, Fascicule 27 (22 juin 1992), à 27:36.

28.Le paragraphe 43(1) stipule qu'aux articles 43 et 44, « entreprise de distribution » s'entend au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la radiodiffusion.

29.Bell Canada, Tarif d'utilisation des structures de soutènement par les détenteurs de permis de câblodistribution, la décision Télécom CRTC 77-6 du 27 mai 1977.

30.Voir, par exemple, la décision Télécom CRTC 94-19 du 16 septembre 1994 intitulée Examen du cadre de réglementation; Concurrence et culture sur l'autoroute canadienne de l'information : Gestion des réalités de transition, 19 mai 1995; l'avis public Télécom CRTC 95-13 du 20 mars 1995 intitulé Mise en oeuvre du cadre de réglementation - Co-implantation; l'avis public Télécom CRTC 95-36 du 11 juillet 1995 intitulé Mise en oeuvre du cadre de réglementation - Interconnexion locale et dégroupement des composantes réseau; l'avis public Télécom CRTC 95-48 du 10 novembre 1995 intitulé Mise en oeuvre du cadre de réglementation - Transférabilité des numéros locaux et questions connexes; la décision Télécom CRTC 97-8 du 1er mai 1997 intitulée Concurrence locale; la décision Télécom CRTC 97-19 du 18 décembre 1997 intitulée Abstention - Réglementation des services interurbains fournis par les compagnies de téléphone titulaires; la décision Télécom CRTC 97-20 du 18 décembre 1997 intitulée Centre de ressources Stentor Inc. - Abstention de la réglementation des services de liaison spécialisée intercirconscriptions; la décision Télécom CRTC 98-2 du 5 mars 1998 intitulée Mise en oeuvre de la réglementation par plafonnement des prix et questions connexes; la décision Télécom CRTC 98-8 du 30 juin 1998 intitulée Concurrence des services téléphoniques payants locaux; la décision Télécom CRTC 98-9 du 9 juillet 1998 intitulée Réglementation en vertu de la Loi sur les télécommunications de certains services de télécommunications offerts par des « entreprises de radiodiffusion »; la décision Télécom CRTC 99-5 du 21 avril 1999 intitulée Examen du régime de contribution des compagnies de téléphone indépendantes en Ontario et au Québec.

31.Avis public CRTC 1997-25 du 11 mars 1997 intitulé Nouveau cadre de réglementation pour les entreprises de distribution de radiodiffusion; avis public CRTC 1997-150 du 22 décembre 1997 intitulé Règlement sur la distribution de radiodiffusion.

32.British Columbia Telephone Company c. CRTC, 28 juin 1991, dossiers nos 91-A-1800 et 91-A-1920 (C.A.F.), autorisation d'appel rejetée de la décision interlocutoire du 16 mai 1992, CRTC pièce no 6, dans l'instance menant à la décision 92-12; cf. Article 336 de l'ancienne Loi sur les chemins de fer.

33.Le Conseil souligne que sa compétence pour résoudre les litiges d'accès en vertu du paragraphe 43(5) doit être mise en opposition avec la réglementation courante d'accès aux structures de soutènement des compagnies de téléphone qui n'a pas été fondée sur le paragraphe 43(5) de la Loi. Dans l'instance qui a mené à la décision Télécom 95-13, on a soutenu que le Conseil ne devrait pas rendre de décision globale en ce qui a trait à l'accès aux structures de soutènement des compagnies de téléphone et que l'accès à ces structures ne doit être régi que selon le régime précis donné au paragraphe 43(5) de la Loi. Le Conseil a conclu que l'accès aux structures de soutènement des compagnies de téléphone est un « service de télécommunications » au sens de la Loi. Il a donc rejeté l'argument selon lequel sa compétence en matière d'accès ne découle que du paragraphe 43(5) de la Loi. En prescrivant plutôt les tarifs et les modalités établis dans la décision 95-13, le Conseil s'est appuyé sur les dispositions de la Loi s'appliquant généralement aux services de télécommunications, y compris les articles 24, 25 et 27. C'est l'approche adoptée précédemment par le Conseil en vertu de la Loi sur les chemins de fer et qui a été approuvée par la Cour suprême du Canada dans British Columbia Telephone Company c. Shaw Cable Systems (B.C.) Ltd., [1995] 2 R.C.S. 739, aux pages 760-766.

34.Voir les paragraphes et alinéas 43(2), 43(3), 43(4), 44, 67(1)a) et 76(2) de la Loi.

35.À cet égard, le Conseil fait remarquer que dans Transvision (Magog) Inc. c. Bell Canada, supra, la Commission canadienne des transports (CCT) a conclu que les poteaux des compagnies de téléphone ont cessé d'être de propriété privée absolue. La CCT a déclaré que l'utilisation et la jouissance que Bell avait de sa propriété est soumise à certaines restrictions imposées par la loi dans l'intérêt public. Elle a aussi déclaré que, lorsque quelqu'un utilise sa propriété dans l'intérêt du public, il accorde, en réalité, à ce public, un intérêt lié à cette utilisation et il doit accepter d'être contrôlé par le public en vue du bien commun, dans la mesure de l'intérêt qu'il a créé.

36.Fenn c. Peterborough (City) (1979), 25 O.R. (2e) 399 (C.A. Ont.); confirmé par la Cour suprême du Canada dans Consumers Gas Co. et al c. Fenn et al, [1981] 2 R.C.S. 613.

37.In the Matter of an Application under Rule 14.05(3) by Sudbury Hydro-Electric Commission for an Interpretation of Subsection 50(3) and Subsection 50(5) of the Planning Act. R.S.O. 1990, C.P. 13 (1996), 29 O.R. (3e) 23 (Gen. Div.)

ANNEXE A

LISTE DES INTIMÉS

1.Barrie Public Utilities Commission
2.Canadian Niagara Power
3.Chatham Hydro
4.Clarington Hydro Electric Commission
5.Hydro Electric Commission de la ville de Deep River
6.Réseau hydroélectrique du village partiellement autonome d'Embrun
7.Essex Public Utilities Commission
8.Guelph Hydro
9.Hydro-Electric Commission de Cambridge et North Dumfries
10.Innisfil Hydro
11.Hydro Electric Commission de Kitchener-Wilmot
12.L'Orignal Hydro Electric Commission
13.Leamington Public Utilities Commission
14.Markham Hydro Electric Commission
15.Mississauga Hydro Electric Commission
16.Niagara-on-the-Lake Hydro Electric Commission
17.Hydro Electric Commission de North Bay
18.Oakville Hydro
19.Orillia Water, Light and Power
20.Pelham Hydro-Electric Commission
21.Perth Public Utilities Commission
22.Pickering Hydro
23.Plantagenet Hydro Electric Commission
24.Public Utilities Commission du Village de Port Stanley
25.Public Utilities Commission de la ville de Paris
26.Richmond Hill Hydro Electric Commission
27.Shelburne Hydro
28.Stoney Creek Hydro-Electric Commission
29.Stratford Public Utility Commission
30.Toronto Hydro-Electric Commission (ancienne Hydro Electric Commission de la ville de North York et la Public Utilities Commission de la ville de Scarborough)
31.Hydro Electric Commission de Waterloo, Wellesley, et Woolwich
32.Webbwood Hydro Electric Commission
33.West Elgin Hydro-Electric Commission (anciennement West Lorne Public Utilities Commission)
34.The Public Utilities Commission du canton de Zorra

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