Décision Télécom
CRTC 98-20
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Ottawa, le 6 novembre 1998
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DEMANDE DE RÉVISION ET DE MODIFICATION DE LA DÉCISION TÉLÉCOM CRTC 98-4 : MISE EN MARCHÉ CONJOINTE ET GROUPEMENT
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No de dossier : 8662-M16-02/98
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I INTRODUCTION
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1. Le 15 mai 1998, la Microcell Telecommunications Inc. (la Microcell) a déposé une demande au nom de nombreuses requérantes (les « requérantes ») en révision et modification, conformément à l’article 62 de la Loi sur les télécommunications (la Loi), de la décision Télécom CRTC 98-4 du 24 mars 1998 intitulée Mise en marché conjointe et groupement (la décision 98-4).
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2. La demande a été déposée au nom des compagnies suivantes : ACC TelEnterprises Ltd., AT&T Canada Services interurbains, Call-Net Enterprises Inc., Clearnet Communications Inc., Echelon Internet Corp., fONOROLA Inc., Integrated Messaging Inc., Interlog Internet Services Inc., Madison Telecommunications Inc., MetroNet Communications Group Inc., Microcell, Optel Communications Corp., PageMart Canada Ltd., Rogers Cantel Inc., TAS Communications Systems Ltd., TelcoPlus Services Inc. et Vidéotron Télécom ltée.
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3. Les requérantes ont demandé que le Conseil révise et modifie la partie de la décision 98-4 qui permet aux compagnies du Centre de ressources Stentor Inc. (Stentor) du ressort fédéral de grouper des services de télécommunication tarifés avec des services d’une compagnie affiliée ou non affiliée ou avec des services autres que des services de télécommunication.
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4. Les requérantes ont également demandé qu’il soit dorénavant interdit aux compagnies de Stentor de grouper des services locaux tarifés – y compris des services locaux de base et des services locaux optionnels – avec des services concurrentiels.
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5. Les requérantes demandent ce redressement jusqu’à ce que les obstacles à l’entrée en concurrence dans le marché local aient été supprimés dans une large mesure.
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6. Les requérantes ont fait valoir que les obstacles à l’entrée persisteront au moins jusqu’à ce que les conditions suivantes soient remplies : (1) la transférabilité des numéros locaux (TNL) existe pour une grande partie des services ou lignes d’accès au réseau (SAR) desservis par les compagnies de Stentor; (2) le Conseil a approuvé les tarifs des compagnies de Stentor pour les installations essentielles ou quasi-essentielles requises pour donner effet à la décision Télécom CRTC 97-8 du 1er mai 1997 intitulée Concurrence locale (la décision 97-8); et (3) le travail que le Conseil a, dans la décision 97-8, confié au Comité directeur sur l’interconnexion du CRTC (le CDIC) à l’égard des exigences techniques relatives à l’interconnexion est sensiblement achevé.
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7. Les requérantes ont fait valoir que le fait que les concurrents dotés d’installations soient toujours incapables d’accéder au marché des services de télécommunication locaux jette un doute réel sur la rectitude de la décision du Conseil de permettre aux compagnies de Stentor de grouper un plus vaste éventail de services. Selon les requérantes, un tel groupement permettrait aux compagnies de Stentor de conférer à leurs propres activités concurrentielles (et à celles de leurs affiliées) une préférence ou un avantage indu, d’enraciner leur position monopolistique dans le marché local et de retarder l’implantation de la concurrence locale.
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II HISTORIQUE
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8. Dans la décision Télécom CRTC 94-19 du 16 septembre 1994 intitulée Examen du cadre de réglementation (la décision 94-19), le Conseil a déclaré que le terme groupement s’entend généralement d’une situation dans laquelle un tarif regroupe un certain nombre de composantes d’un service et que le groupement comprend les situations où il peut exister des éléments tarifaires séparés pour chaque composante du service, mais où un certain nombre de composantes du service sont groupées aux fins de l’application de rabais sur volume, ce qui fait que le rabais offert est plus important qu’il ne le serait si les composantes du service n’étaient pas groupées. Dans la décision Télécom CRTC 97-19 du 18 décembre 1997 intitulée Abstention - Réglementation des services interurbains fournis par les compagnies de téléphone titulaires (la décision 97-19) et dans la décision Télécom CRTC 97-20 du 18 décembre 1997 intitulée Centre de ressources Stentor Inc. - Abstention de la réglementation des services de liaison spécialisée intercirconscriptions (la décision 97-20), le Conseil a également décrit le groupement comme étant l’inclusion de différents services ou composantes de services dans une structure tarifaire. Le Conseil a fait remarquer que cette structure tarifaire peut être un tarif unique, un ensemble de tarifs pour diverses composantes de services et/ou des tarifs pour une ou plusieurs composantes d’un service qui dépendent de l’utilisation d’autres services.
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9. Dans la décision 94-19, le Conseil a déclaré que le groupement de composantes monopolistiques avec des composantes concurrentielles par les compagnies de Stentor est généralement approprié, sous réserve de trois conditions :
(1) le service groupé doit recouvrer ses coûts, quand l’étude du prix de revient du service groupé comprend :
a) le prix de revient de l’élément ou des éléments goulot, calculé d’après les taux tarifés (y compris, s’il y a lieu, les frais de contribution et de recouvrement des frais d’établissement); et
b) les coûts causals de la Phase II de l’élément ou des éléments non visés en a);
(2) les concurrents peuvent offrir leur propre service groupé par l’intermédiaire de composantes goulot tarifées de façon autonome, de concert avec leurs propres éléments concurrentiels; et
(3) la revente du service groupé est autorisée.
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10. Dans la décision 97-8, le Conseil a déclaré que les compagnies de Stentor peuvent continuer à grouper leurs services publics et autres services de télécommunication conformément à la décision 94-19. Dans la décision 97-8, il a ajouté que, compte tenu de l’avènement de la concurrence dans le marché des services locaux, les modifications suivantes au régime de groupement établi dans la décision 94-19 sont pertinentes :
(1) On ne doit pas empêcher les compagnies de Stentor de grouper des services visés par une abstention avec des services locaux. Toutefois, lorsqu’un service visé par une abstention est compris dans un nouveau service groupé, on doit en déposer les coûts de la Phase II dans le cadre du test d’imputation et déposer les tarifs portant sur le service groupé pour fins d’approbation par le Conseil.
(2) Si les compagnies de Stentor groupent, à des tarifs inférieurs aux coûts, des services locaux de résidence monolignes avec d’autres services de télécommunication, le Conseil jugera que le coût des services locaux de résidence est égal au taux tarifé pour les besoins du test d’imputation.
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III LA DEMANDE DE RÉVISION ET DE MODIFICATION
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11. Les requérantes ont fait remarquer que le Conseil a récemment réitéré les critères qu’il utilise pour établir s’il y a lieu de réviser et de modifier des décisions antérieures en vertu de l’article 62 de la Loi. Dans l’avis public Télécom CRTC 98-6 du 20 mars 1998 (l’AP 98-6) intitulé Lignes directrices relatives aux demandes de révision et de modification, le Conseil a déclaré que « les requérantes doivent lui démontrer qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision initiale » et que « le doute réel quant à la rectitude d’une décision devien[dra] l’analyse principale ». Le Conseil a aussi donné une liste non exhaustive de préoccupations qui pourraient donner lieu à un doute réel :
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(i) une erreur de droit ou de fait;
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(ii) un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision;
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(iii) le défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans la procédure initiale; ou
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(iv) un nouveau principe découlant de la décision.
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12. Les requérantes ont fait valoir qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 98-4 parce qu’elle est prématurée et qu’elle permettra aux compagnies de Stentor d’enraciner leur dominance sur le marché des services locaux avant que les conditions nécessaires à la concurrence dans ce marché aient été remplies. Elles ont ajouté que la décision 98-4 est contraire aux politiques du gouvernement du Canada et du Conseil, qui favorisent l’implantation de la concurrence fondée sur les installations. Les requérantes ont soutenu que le doute réel résulte de trois facteurs.
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13. Premièrement, les requérantes ont fait valoir qu’il s’est produit un changement fondamental dans les circonstances depuis le 8 août 1997, date limite de dépôt des plaidoyers dans les instances amorcées par l’avis public Télécom CRTC 97-14 du 25 avril 1997 intitulé Examen des restrictions relatives à la mise en marché conjointe (l’AP 97-14) et par l’avis public Télécom CRTC 97-21 du 6 juin 1997 intitulé Examen du groupement et des restrictions relatives à la mise en marché conjointe (l’AP 97-21). Les requérantes ont soutenu que, lorsque le Conseil a rendu la décision 97-8, il a déclaré s’attendre à ce que les conditions requises pour permettre la concurrence locale fondée sur les installations soient sensiblement en place d’ici le 1er janvier 1998. Les requérantes ont fait valoir que l’objectif d’éliminer les obstacles à la concurrence fondée sur les installations d’ici le 1er janvier 1998 n’a pas été atteint et qu’il est peu probable que ces obstacles soient supprimés dans un avenir rapproché.
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14. Deuxièmement, les requérantes ont fait valoir que la décision 98-4 n’a pas tenu compte d’un principe de base établi par le Conseil dans l’ordonnance Télécom CRTC 97-1764 du 27 novembre 1997 (l’ordonnance 97-1764), qui porte que :
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« Le Conseil fait remarquer que les arrangements n’ont pas encore été mis en œuvre afin de permettre la concurrence locale fondée sur les installations et il estime que le groupement de services locaux de base et de services interurbains donnerait aux compagnies de téléphone un avantage indu en regard des nouveaux fournisseurs de services locaux, de même que des fournisseurs concurrents de services interurbains, compte tenu du fait que les compagnies de téléphone ont mis en place des installations dans les marchés de services locaux et de services interurbains.
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Le Conseil est d’avis que les promotions qui groupent le service local de base avec des services interurbains ne seraient pas appropriées d’ici à ce que les obstacles à la concurrence locale fondée sur les installations soient dans une large mesure supprimés. »
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15. Les requérantes ont soutenu que cette déclaration constitue un principe établi par le Conseil, qui exige que les obstacles à la concurrence locale soient supprimés avant que les compagnies de Stentor soient autorisées à grouper des services locaux avec des services concurrentiels (y compris des services de compagnies affiliées et non affiliées). Les requérantes ont fait valoir que, soit que le Conseil n’ait pas tenu compte de ce principe lorsqu’il a rendu la décision 98-4, soit qu’il ait permis à un nouveau et faux principe d’être soulevé, à savoir, que le groupement est permis indépendamment de l’état de la concurrence locale.
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16. Troisièmement, les requérantes ont fait valoir que le Conseil a commis une erreur, soit en ne tenant pas compte de l’état de la concurrence dans le marché des services locaux, soit en se méprenant sur la mesure dans laquelle les obstacles à l’entrée en concurrence dans ce marché continuent d’exister. Les requérantes ont fait remarquer que le Conseil a tenu compte de l’état de la concurrence dans le marché du sans fil desservi par les affiliées de Stentor. Toutefois, les requérantes ont avancé que rien dans la décision 98-4 n’indique que le Conseil ait bien tenu compte de l’état de la concurrence dans le marché local même.
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17. Les requérantes ont soutenu que le groupement permet aux compagnies de Stentor d’établir un [TRADUCTION] « cercle de dominance ». Elles ont allégué que les compagnies de Stentor pourront se servir de leur monopole dans les marchés des services téléphoniques locaux comme levier pour avantager leurs divisions et affiliées, ce qui accroîtra les obstacles à l’entrée en concurrence. Les requérantes ont soutenu que les compagnies de Stentor pourront créer des liens entre leurs services dans l’esprit des consommateurs, chaque service de la famille Stentor aidant à promouvoir d’autres services de Stentor. À l’appui de cette position, les requérantes ont fait remarquer que, dans l’instance qui a abouti à la décision 98-4, Mobilité Canada (Mobilité) a déposé les résultats de sondages indiquant que 63 % de ses usagers de téléphones cellulaires seraient intéressés à des comptes de télécommunication consolidés (définis comme incluant le service téléphonique local et les services interurbains, de téléappel, cellulaire et de télévision par câble) et que 72 % de ses comptes corporatifs de sans fil étaient intéressés à avoir un seul fournisseur pour tous les services locaux, interurbains et sans fil.
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18. Les requérantes ont fait valoir que l’attente du Conseil selon laquelle la TNL existerait au cours du premier trimestre de 1998 ne s’est pas concrétisée. Elles ont soutenu que la TNL est nécessaire parce qu’il ne peut y avoir de concurrence locale réelle si les abonnés doivent changer leurs numéros de téléphone lorsqu’ils passent à un autre fournisseur. Elles ont fait remarquer que la TNL même dépend de la mise en œuvre de la base de données de la TNL, dont l’élaboration pose un énorme défi sur le plan technologique, et que d’autres retards peuvent se produire.
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19. Les requérantes ont fait remarquer qu’un an après la publication de la décision 97-8, les tarifs applicables aux composantes réseau essentielles et quasi-essentielles dégroupées ne sont pas encore établis de manière définitive. Faute de tarifs définitifs pour les lignes locales dégroupées, les nouveaux fournisseurs éventuels de services sur ligne métallique sont incapables de quantifier leur plus importante composante du coût de fourniture du service local. Les requérantes ont aussi fait état d’un autre important obstacle à l’entrée en concurrence, soit l’incertitude concernant les modalités dans lesquelles les compagnies de Stentor transiteront le trafic entre des entreprises de services locaux concurrentes (ESLC) ou entre des ESLC et un autre fournisseur de services interurbains ou de services sans fil. Elles ont fait valoir que, même après le règlement de telles questions dans le cadre du CDIC, il faudra du temps pour que le Conseil établisse de manière définitive les tarifs pour ces fonctions.
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20. Bien que la décision 97-8 ait établi les grands principes de politique régissant l’interconnexion, les dispositions techniques et juridiques réelles qui s’imposent pour appliquer ces principes ont été laissées aux soins du CDIC. Les requérantes ont fait valoir que, du moins tant que les questions suivantes n’auront pas été réglées, d’importants obstacles à l’entrée en concurrence resteront :
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(i) les principes relatifs à la sélection de points d’interconnexion (PI);
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(ii) les principes relatifs à l’interconnexion des réseaux de signalisation et à la co-implantation de PI et de points d’interconnexion de la signalisation;
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(iii) le câblage intérieur : la désignation d’un point de démarcation et de règles relatives à l’accès aux installations possédées et contrôlées par les entreprises canadiennes;
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(iv) les interfaces techniques réseau à réseau (non réglées par l’ordonnance Télécom CRTC 98-40) et les données concernant l’architecture des réseaux devant être échangées par les ESL [entreprises de services locaux] d’interconnexion; et
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(v) les lignes directrices relatives au fonctionnement des réseaux.
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21. Les requérantes ont soutenu qu’en l’absence de concurrence locale fondée sur les installations, la seule façon dont les concurrents peuvent offrir une suite de services semblables à ceux des compagnies de Stentor, c’est en revendant des services de Stentor de concert avec leurs propres services. Toutefois, les requérantes ont fait valoir qu’elles ne peuvent pas financièrement égaler les services des compagnies de Stentor qui groupent des services téléphoniques locaux et des services d’affiliées de Stentor. Selon elles, la concurrence fondée sur la revente de services locaux de base et optionnels des compagnies de Stentor, acquis à des tarifs de détail, n’est ni financièrement viable ni un moyen efficace de différencier les services du concurrent. Les requérantes estiment que la nécessité de contrer ce type de groupement empêchera les concurrents éventuels de se concentrer sur la construction des installations requises pour livrer efficacement concurrence dans le marché local. Elles ont soutenu que les concurrents seront obligés de consacrer d’importantes ressources à acquérir et renommer des services des compagnies de téléphone plutôt qu’à élaborer leurs propres installations locales.
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22. Les requérantes ont aussi allégué que le fait de permettre le groupement créera de nouveaux obstacles à la concurrence. Elles ont déclaré que, par exemple, les téléphones sans fil ne fonctionnent pas tous entre les réseaux de diverses entreprises. Elles ont avancé qu’un client qui désire un guichet unique et une seule facture pour des services de télécommunication ne peut à l’heure actuelle obtenir ce service que d’une compagnie de Stentor. Toutefois, une fois que le client a « investi » dans ce téléphone sans fil, cet appareil devient un désincitatif non seulement à changer de fournisseur de service sans fil, mais aussi à changer de fournisseur de services locaux de base. Les requérantes ont également soutenu que le même désincitatif existe dans le cas du service Internet groupé, si le client risque de devoir changer d’adresse de courrier électronique pour changer de fournisseur de service Internet.
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23. Les requérantes ont aussi soutenu qu’étant donné que le groupement a pour effet de rendre le prix facturé pour les composantes individuelles moins transparent pour le client, celui-ci peut devenir moins apte à comparer le coût de services interurbains ou Internet concurrents fournis sur une base individuelle. Cela pourrait rendre le client plus réfractaire à changer de fournisseur pour une ESLC, au fur et à mesure que la concurrence s’implante.
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24. Les requérantes ont proposé que le groupement soit défini comme suit :
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[TRADUCTION] « tout assemblage de services séparés, que ce soit par la tarification, le jumelage ou toute autre disposition, qui fait qu’il est avantageux pour le consommateur d’obtenir le service groupé par opposition à ses composantes séparées. »
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25. Les requérantes ont également soutenu que la facturation conjointe de services cellulaires et de services de communications personnelles (SCP) avec des services sur ligne métallique devrait constituer du groupement et, ainsi, être assujettie aux règles du Conseil relatives au groupement. Toutefois, elles n’ont pas fait valoir que la facturation conjointe de services sur ligne métallique et sans fil autres que des services cellulaires et des SCP devrait être considérée comme du groupement, du fait que le Conseil accepte depuis toujours ces types de facturation conjointe.
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IV REDRESSEMENT DEMANDÉ
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26. Les requérantes ont demandé au Conseil de réviser et de modifier la partie de la décision 98-4 qui permet aux compagnies de Stentor de grouper des services de télécommunication tarifés avec des services d’une compagnie affiliée ou non affiliée ou avec des services autres que des services de télécommunication. Elles ont également demandé qu’il soit dorénavant interdit aux compagnies de Stentor de grouper des services locaux tarifés (y compris les services locaux de base et les services locaux optionnels) avec des services concurrentiels. Les requérantes ont également fait valoir que ces restrictions au groupement par les compagnies de Stentor devraient être maintenues jusqu’à ce que les obstacles à l’entrée en concurrence dans le marché local aient été supprimés dans une large mesure.
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27. Les requérantes ont proposé le test suivant, sous réserve de l’achèvement de certaines étapes marquantes dans la réglementation, pour établir quand une concurrence locale réelle peut être implantée :
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(i) mise en œuvre de la base de données de la TNL;
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(ii) approbation des tarifs des compagnies de Stentor pour toutes les installations essentielles et quasi-essentielles figurant dans la décision 97-8, y compris les lignes locales dégroupées, le transitage et le transport et le déséquilibre de trafic sur les lignes principales à facturer et à conserver; et
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(iii) établissement définitif d’ententes d’interconnexion, avec annexes décrivant les exigences relatives au réseau et au fonctionnement requises pour permettre une interconnexion locale efficace.
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28. Les requérantes ont proposé qu’une fois que ces conditions auront été remplies, une compagnie de Stentor soit autorisée à grouper des services dans son territoire, seule ou de concert avec des compagnies affiliées ou non affiliées, sous réserve qu’elle remplisse le critère d’imputation du Conseil et qu’elle offre le service groupé dans son ensemble (et, dans le cas d’un groupement interne, ses composantes) pour fins de revente.
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29. Dans le cas de la TNL, les requérantes ont proposé qu’à l’exception de la Island Telecom Inc. (la Island Tel) et de la TELUS Communications Inc. (la TCI), chaque compagnie de Stentor soit autorisée à grouper des services locaux avec des composantes et des services concurrentiels offerts par des affiliées et des compagnies non affiliées ou avec des services autres que des services de télécommunication uniquement quand la première des deux éventualités suivantes se produira : soit que la TNL soit offerte dans toutes ses circonscriptions de priorité 1 et 2, soit que 66 % de ses SAR soient compatibles avec la TNL.
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30. Étant donné qu’aucune circonscription desservie par la Island Tel ne figure dans la liste de circonscriptions de priorité 1 et 2, la Island Tel serait autorisée, selon la proposition des requérantes, à grouper des services locaux optionnels et à mettre en œuvre les règles établies dans la décision 98-4 lorsque 18 % de ses SAR seraient compatibles avec la TNL.
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31. Les requérantes ont proposé que la TCI soit obligée d’atteindre le seuil de 66 % avant d’être autorisée à grouper des services locaux optionnels et de mettre en œuvre les règles établies dans la décision 98-4.
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V OBSERVATIONS DES INTERVENANTS
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32. Des observations ont été reçues d’AT&T Canada Enterprises Company (AT&T Canada), la London Telecom Network Inc. (la London Telecom), Mobilité, les Responsible Internet Service Companies (les RISC), Stentor et la TCI. Mobilité, Stentor et la TCI ont soutenu que la demande ne remplit pas les critères de révision et de modification et qu’il faut donc la rejeter. AT&T Canada, la London Telecom et les RISC ont appuyé la demande.
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33. AT&T Canada, la London Telecom et les RISC étaient favorables à la demande parce qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 98-4, principalement à cause de retards imprévus dans l’implantation de la concurrence dans le marché local. Ces parties étaient également en faveur du redressement demandé par les requérantes.
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34. AT&T Canada a fait valoir que la décision 98-4 donne aux compagnies de Stentor une longueur d’avance injuste dans le marché des télécommunications à guichet unique. Elle a ajouté que le Conseil lui-même, dans l’ordonnance 97-1764, a reconnu les dangers inhérents au groupement de services avant la concurrence dans le marché local. La London Telecom a réitéré la position adoptée dans la demande, selon laquelle la décision 98-4 confère aux compagnies de Stentor la capacité d’utiliser leur monopole dans le marché local comme levier dans les marchés adjacents, notamment celui des services interurbains concurrentiels qui font l’objet d’une abstention.
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35. AT&T Canada a aussi soutenu qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 98-4 à la lumière des engagements que le Canada a pris dans le cadre des négociations du GATS sur le commerce de services de télécommunication de base. Un engagement que le Canada a pris dans le « Document de référence » sur le cadre réglementaire porte que des mesures appropriées seront appliquées en vue d’empêcher un fournisseur principal de se livrer ou de continuer à se livrer à des agissements anticoncurrentiels. Selon AT&T Canada, le groupement par des compagnies de Stentor conformément aux règles établies dans la décision 98-4 serait anticoncurrentiel.
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36. Les RISC ont soutenu que la décision 98-4 est incompatible avec les conditions générales d’abstention que le Conseil a établies dans la décision 94-19. Les RISC ont fait remarquer que, dans la décision 94-19, le Conseil a fixé comme condition d’abstention que les obstacles importants à l’entrée en concurrence soient supprimés et que la concurrence doive s’être produite ou se produire d’ici un an ou deux. Les RISC ont soutenu que la deuxième condition (c.-à-d., une concurrence réelle) n’a pas été remplie parce que d’importants obstacles à l’entrée en concurrence (c.-à-d., la première condition) existent encore.
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37. Mobilité, Stentor et la TCI ont fait valoir que la demande repose sur des hypothèses factuelles erronées et qu’ainsi, le Conseil devrait la rejeter. Ils ont fait remarquer que la chronologie de l’instance qui a abouti à la décision 98-4 n’appuie pas la demande de révision et de modification de la décision 98-4, qui repose essentiellement sur la prémisse que le Conseil ne connaissait pas les nouvelles circonstances de la concurrence locale. Mobilité, Stentor et la TCI ont soutenu que le Conseil était parfaitement au courant des progrès de la concurrence locale. Mobilité a fait remarquer qu’entre la publication de la décision 97-8, le 1er mai 1997, et celle de la décision 98-4, le 24 mars 1998, plusieurs réunions du CDIC ont eu lieu et, lors de réunions tenues les 24 novembre 1997 et 20 février 1998, il y a eu de longues discussions en table ronde sur les progrès des activités et des étapes marquantes liées à l’ouverture des marchés de la téléphonie locale à la concurrence. Mobilité a ainsi fait valoir que le Conseil était parfaitement au courant des progrès de la concurrence locale.
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38. La TCI a fait remarquer que les requérantes n’ont pas soutenu qu’un changement s’est produit dans les circonstances depuis que la décision 98-4 a été publiée le 24 mars 1998, mais plutôt qu’il y a eu un changement dans les circonstances depuis que le dossier des AP 97-14 et 97-21 a été fermé, le 8 août 1997. Stentor et la TCI ont soutenu que, contrairement aux raisons invoquées par les requérantes, ce ne sont pas les circonstances au moment de la fermeture du dossier d’une instance qui sont pertinentes pour établir s’il s’est produit un changement fondamental dans les circonstances justifiant une révision et une modification. Ce sont plutôt les circonstances qui existent au moment de la décision même qui sont pertinentes à cette fin. Stentor a fait remarquer qu’un tribunal spécialisé comme le Conseil peut tenir compte des développements depuis la fermeture du dossier, en particulier lorsque ces développements ont trait à des questions du ressort du Conseil. Stentor et la TCI ont soutenu que l’affirmation des requérantes selon laquelle le Conseil, lorsqu’il a publié la décision 98-4, s’est appuyé sur un dossier qui ne reflétait pas le changement de circonstances dans la concurrence locale donne à entendre que le Conseil a sciemment fermé les yeux sur sa propre connaissance de l’industrie et des développements dans la mise en œuvre de la concurrence locale.
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39. La TCI a soutenu que le fait d’accéder à la demande aurait pour effet de modifier non seulement la décision 98-4, mais aussi la décision 97-8 et, sur une base prospective, l’ordonnance Télécom CRTC 97-1345 du 22 septembre 1997 (l’ordonnance 97-1345), qui permet le groupement de services locaux optionnels avec des services concurrentiels à la condition que le service local optionnel soit aussi offert pour fins de revente.
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40. Pour ce qui est des raisons particulières de la demande, Mobilité, Stentor et la TCI ont fait valoir que la demande ne soulève pas de questions qui n’ont pas déjà été cernées dans le dossier de l’instance qui a abouti à la décision 98-4 ou ne jette pas de nouvel éclairage sur elles. Mobilité et la TCI ont fait remarquer que l’argument des requérantes porte essentiellement sur les progrès et le moment de la suppression des obstacles à l’entrée en concurrence (c.-à-d., les seuils de la concurrence) et l’à-propos de grouper des services locaux et des services optionnels de Stentor, entre autres choses, avec les services d’une affiliée. Mobilité a fait remarquer que le dossier de l’instance qui a abouti à la décision 98-4 révèle clairement que chacune de ces préoccupations a été soulevée par les parties à l’instance et a ainsi été examinée par le Conseil. Mobilité a fait valoir qu’au lieu de remplir le test de révision et de modification, la demande constitue une tentative de plaider de nouveau sur des parties de l’instance qui a abouti à la décision 98-4.
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41. Dans le cas de l’échéancier de déploiement de la TNL, la TCI a soutenu que ni le Conseil ni l’industrie n’ont envisagé le déploiement de la TNL d’ici le 1er janvier 1998 et sûrement pas dans le pourcentage de circonscriptions qui, selon les requérantes, s’impose avant que le groupement puisse être autorisé. De plus, la TCI a soutenu que ni la décision 98-4 ni la décision 97-8, qui ont établi les conditions de groupement de services locaux tarifés avec des services faisant l’objet d’une abstention, n’exigent de conditions préalables comme la TNL avant qu’un tel groupement soit permis.
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42. Quant à la définition de groupement que les requérantes ont proposée, Mobilité et Stentor ont fait remarquer que cette définition engloberait la facturation conjointe de services cellulaires et de SCP avec des services sur ligne métallique. Mobilité a fait valoir que la proposition des requérantes de redéfinir le groupement de manière à inclure des services sans fil et sur ligne métallique sur la même facture constitue une tentative d’élargir la portée de l’instance. À cet égard, elle a fait remarquer que le Conseil a, dans l’AP 97-21, donné la définition de groupement (telle que la définition initiale établie dans la décision 94-19) qui s’appliquerait aux fins de cette instance. Mobilité a soutenu que la définition de groupement dans l’AP 97-21 convient et qu’elle ne devrait pas être élargie de manière à inclure la notion de facture unique. Mobilité et Stentor ont fait remarquer qu’une facture unique peut inclure ou non un groupement (c.-à-d., un tarif groupé, un ensemble à rabais ou un lien entre la disponibilité d’un service ou d’un prix et celle d’un autre service).
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43. Mobilité a également soutenu que les requérantes ont mal interprété la position du Conseil sur le rôle de la revente dans les marchés s’ouvrant à la concurrence. Elle a fait remarquer que les requérantes se sont appuyées sélectivement sur le paragraphe 237 de la décision 97-8 pour étayer leur allégation que la concurrence doit être fondée sur les installations et que la revente des services de Stentor ne ferait qu’empêcher les nouveaux venus de se concentrer sur la tâche de construire leurs réseaux. Mobilité a fait remarquer que le paragraphe 237 intégral de la décision 97-8 porte que :
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« Le Conseil est d’avis que la revente peut favoriser le développement d’un marché concurrentiel tout en donnant aux concurrents le temps de construire leurs propres installations. Bien que la concurrence dans la revente puisse permettre de favoriser le développement d’un marché concurrentiel, le Conseil estime qu’on ne pourra réaliser tous les avantages de la concurrence que si elle est fondée sur les installations. »
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44. Mobilité et Stentor ont fait valoir que non seulement le Conseil n’a éliminé aucune des exigences relatives au groupement établies dans les décisions 94-19 et 97-8, mais qu’il en a ajouté, par exemple, l’exigence supplémentaire relative à l’approbation préalable de tels groupements par le Conseil et à un test d’imputation pour les services d’affiliées et de non-affiliées. De plus, Mobilité et Stentor ont fait valoir que ces exigences visent à favoriser la concurrence dans le marché local, en permettant aux nouveaux venus de réagir aux demandes de clients pour des options de services intégrés innovatrices pendant qu’ils construisent leurs propres installations.
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45. Stentor a soutenu que les requérantes ont allégué à tort que l’ordonnance 97-1764 a établi un « principe fondamental » selon lequel les obstacles à la concurrence locale doivent être supprimés avant que les compagnies de Stentor puissent être autorisées à grouper des services locaux avec des services concurrentiels. Selon Stentor, le principe général que le Conseil a adopté permet le groupement de services publics avec des services concurrentiels. Le Conseil a adopté ce principe dans la décision 94-19 et, depuis, il a, dans d’autres décisions, fermement établi qu’un tel groupement est autorisé. Dans la décision 97-8, il a réitéré les principes relatifs au groupement établis dans la décision 94-19 et imposé des exigences supplémentaires en matière de dépôt pour le groupement de services faisant l’objet d’une abstention avec des services locaux.
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46. Stentor a fait remarquer que, dans l’ordonnance 97-1345, le Conseil a réitéré qu’il est acceptable de grouper des composantes de services publics et de services concurrentiels et confirmé les règles relatives au groupement établies dans les décisions 94-19 et 97-8, dans le contexte d’un dépôt tarifaire qui groupait des fonctions optionnelles de services locaux avec des services interurbains. Stentor a ajouté que, bien que le Conseil ait rejeté le dépôt tarifaire, il l’a fait en s’appuyant exclusivement sur le fait que les fonctions optionnelles incluses dans le groupement n’étaient pas offertes pour fins de revente sur une base autonome.
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47. Stentor a soutenu que la déclaration dans l’ordonnance 97-1764 n’établit pas de « principe fondamental » comme l’ont allégué les requérantes. Il a fait remarquer qu’à la suite de cette ordonnance, le Conseil a, dans la décision 97-19 réitéré les règles relatives au groupement établies dans les décisions 94-19 et 97-8 et explicitement déclaré qu’il permettrait le groupement de services interurbains et de services interurbains sans frais avec des services locaux.
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48. Stentor et la TCI ont soutenu que les requérantes ont exagéré leur allégation qu’un changement s’est produit dans l’état de la mise en œuvre de la concurrence locale et qu’elles ont sous-estimé d’importants développements qui ont eu pour effet de supprimer des obstacles à l’entrée en concurrence. Ils ont fait remarquer, par exemple, que des ententes d’interconnexion d’ESLC provisoires ont été signées et approuvées; que le CDIC a réglé d’importantes questions; que le régime de contribution portable a été mise en œuvre; et que le Conseil a établi et mis en œuvre des tarifs initiaux reflétant des majorations des tarifs locaux pour la plupart des compagnies de Stentor. La TCI a fait remarquer qu’au moins un nouveau venu dans le marché local de l’Alberta s’est prévalu de son tarif d’interconnexion et a conclu des ententes d’interconnexion provisoires. En outre, le Conseil a ordonné à la TELUS Communications (Edmonton) Inc. (la TCEI) de lui présenter des tarifs provisoires, reposant sur les tarifs interentreprises provisoires de la TCI, pour les composantes réseau dégroupées et interentreprises, à compter du 1er juillet 1998. Dès que le Conseil aura approuvé ces tarifs, les concurrents pourront accéder également au marché d’Edmonton.
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49. Stentor a aussi fait remarquer que le Conseil a et continuera d’avoir le pouvoir d’examiner, au moyen du processus d’approbation de tarifs, tout groupement intégrant des services locaux. Grâce à ce processus, le Conseil peut établir si un groupement donné inclut une installation essentielle qui n’est pas déjà offerte sur une base autonome. En outre, les parties intéressées pourraient intervenir et présenter des arguments au Conseil si elles estiment qu’un groupement donné ne satisfait pas aux exigences applicables.
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50. La TCI et Stentor ont fait valoir que le public exige de plus en plus un guichet unique pour ses besoins de communications et que le Conseil tient compte de ces exigences en permettant aux compagnies de Stentor d’offrir des solutions groupées, même si c’est sous réserve d’un test d’imputation et d’autres conditions. Ils ont fait remarquer que, dans la décision 98-4, le Conseil a déclaré que le cadre pour le groupement tente d’établir un équilibre approprié entre les préoccupations des concurrents en ce qui concerne la possibilité d’abus de prix anticoncurrentiels et celles des compagnies de Stentor concernant leur capacité de fournir des solutions intégrées rentables.
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VI RÉPLIQUES DES REQUÉRANTES
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51. Les requérantes ont fait valoir que Mobilité, Stentor et la TCI n’ont pas réussi à contrer le principal motif de la demande, à savoir, qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 98-4 parce qu’il y aura des [TRADUCTION] « effets délétères » dans les marchés locaux et adjacents si les compagnies de Stentor sont autorisées à grouper des services locaux tarifés et des services concurrentiels avant la suppression des obstacles à l’entrée en concurrence dans le marché local.
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52. Pour ce qui est du changement fondamental dans les circonstances, les requérantes ont soutenu que, bien que le Conseil puisse avoir été au courant des développements dans la mise en œuvre de la concurrence locale lorsqu’il a rendu la décision 98-4, les parties intéressées dans cette instance se sont appuyées sur différentes hypothèses dans leurs plaidoyers. Même si la décision 98-4 s’est fondée sur le dossier de cette instance, les requérantes ont allégué que [TRADUCTION] « le Conseil semble ne pas avoir tenu compte d’un changement pertinent dans les circonstances, à savoir, que les obstacles à l’entrée en concurrence dans le marché local n’ont pas été supprimés au rythme qui était prévu à la date limite de dépôt des plaidoyers ».
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53. Les requérantes ont soutenu que, même si le principe sur lequel la demande repose a été soulevé dans la procédure initiale, le Conseil n’en a pas tenu parfaitement compte. Elles ont fait remarquer que, selon l’AP 98-6, le défaut de considérer un principe de base qui a été soulevé dans la procédure initiale constitue un motif suffisant pour réviser et modifier une décision du Conseil.
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54. Les requérantes ont soutenu que l’inclusion de la facturation conjointe dans la définition de groupement est appropriée. Elles ont soutenu que Mobilité a, dans ses mémoires dans l’instance amorcée par les AP 97-14/97-21, considéré la facturation conjointe comme du groupement. Elles ont ajouté que le Conseil n’a jamais complètement défini le terme groupement et que la définition figurant dans l’AP 97-21 n’est ni exhaustive ni décisive.
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55. En réplique au fait que le Conseil ait approuvé des tarifs provisoires relatifs à l’interconnexion et aux installations dégroupées, les requérantes ont réitéré leur position que des tarifs provisoires ne peuvent servir de base à l’implantation d’une concurrence généralisée dans le marché local.
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56. Les requérantes ont réitéré leur position selon laquelle il n’est pas rentable pour elles de revendre des services locaux de base et/ou des services locaux optionnels de Stentor comme partie de leurs propres services groupés. Elles ont fait remarquer que Mobilité n’a pas présenté de preuve à l’appui de son affirmation que les concurrents jouissent d’avantages sur le plan des coûts qui peuvent l’emporter sur les inconvénients de la revente des services locaux tarifés de Stentor. Les requérantes ont soutenu qu’elles sont désavantagées sur le plan des coûts du fait que leur coût du capital est plus élevé et qu’elles n’ont pas les économies d’échelle et/ou de portée des compagnies intégrées de Stentor.
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VII CONCLUSIONS
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57. Les requérantes ont fait valoir qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 98-4 pour trois motifs :
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(1) il s’est produit un changement fondamental dans les circonstances, en particulier des retards dans la suppression des obstacles à la concurrence locale fondée sur les installations, depuis le 8 août 1997, date limite de dépôt des plaidoyers dans l’instance qui a abouti à la décision 98-4;
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(2) le Conseil n’a pas tenu compte d’un principe fondamental établi dans l’ordonnance 97-1764, à savoir, que le groupement de services locaux de base avec des services interurbains avant que les obstacles à la concurrence locale fondée sur les installations soient supprimés dans une large mesure conférerait aux compagnies de Stentor une préférence indue et n’est pas approprié; et
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(3) le Conseil a commis une erreur en ne tenant pas compte de l’état de la concurrence pour les services locaux ou en se méprenant sur la mesure dans laquelle les obstacles à l’entrée en concurrence dans le marché existent encore.
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58. Pour les motifs exposés ci-dessous, le Conseil estime que les requérantes n’ont pas prouvé qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 98-4.
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59. Dans le cas du premier motif, à savoir, qu’il s’est produit un retard dans l’élimination des obstacles à l’entrée en concurrence dans le marché local et qu’ainsi, il y a eu un changement fondamental dans les circonstances après la clôture des plaidoyers dans l’instance qui a abouti à la décision 98-4, le Conseil conclut qu’un tel retard n’influe en rien sur la rectitude de la décision 98-4.
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60. Le Conseil fait remarquer que les règles et les garanties relatives au groupement des services monopolistiques et concurrentiels tarifés des compagnies de Stentor n’ont pas été établies dans la décision 98-4, mais dans les décisions 94-19 et 97-8. Le Conseil a établi les règles relatives au groupement expressément pour permettre le groupement de services monopolistiques et concurrentiels avec les garanties appropriées sur le plan de la concurrence. Ces garanties sont les suivantes : (1) le service groupé doit faire ses frais; (2) les concurrents doivent être en mesure d’offrir leur propre service groupé au moyen de l’utilisation de composantes goulot tarifées indépendantes, jumelées à leurs propres composantes concurrentielles; et (3) la revente du service groupé est permise. Le Conseil estime que les conditions ci-dessus permettent aux concurrents d’offrir des services groupés sur une base concurrentielle, même dans le cas où des services monopolistiques ou quasi-monopolistiques sont en cause. L’élimination complète ou même partielle des obstacles à l’entrée en concurrence dans le marché local n’était pas et n’est toujours pas une condition préalable au groupement de services par les compagnies de Stentor. Par conséquent, le Conseil estime que tout retard qui peut s’être produit dans la réduction des obstacles à l’entrée en concurrence dans le marché local ne peut être qualifié de changement fondamental dans les circonstances mettant en doute la rectitude de la décision 98-4.
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61. Le Conseil fait remarquer, à cet égard, que de nombreux obstacles à l’entrée en concurrence dans le marché de la téléphonie locale et qui, selon les requérentes, restent encore en place ont, de fait, été réglées. Le processus du CDIC répond aux attentes. Des ententes d’interconnexion d’ESLC provisoires ont été signées et approuvées, et le régime de contribution portable a été mis en œuvre. Le Conseil fait également remarquer que de nombreuses questions importantes concernant les principes d’interconnexion ont été réglées dans le cadre du CDIC. Quoique certaines questions concernant le câblage intérieur, les interfaces techniques réseau à réseau et les lignes directrices relatives au fonctionnement des réseaux ne soient pas encore complètement réglées, elles ne sont pas considérées comme d’importants obstacles à l’entrée en concurrence. En outre, la TNL est devenue disponible à Calgary et à Vancouver le 31 juillet 1998 et à Toronto et à Montréal le 31 août 1998. Le déploiement de la TNL pour d’autres circonscriptions devrait progresser conformément au calendrier initial établi à l’été de 1997. Tel que la TCI l’a fait remarquer, au moins un autre nouveau venu dans le marché local en Alberta s’est prévalu du tarif d’interconnexion de la TCI et a conclu des ententes d’interconnexion provisoires. En outre, le Conseil a ordonné à la TCEI de lui présenter des tarifs provisoires pour les composantes réseau dégroupées et interentreprises, qu’il a par la suite approuvés.
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62. Pour ce qui est du deuxième motif des requérantes, à savoir que le Conseil n’a pas, dans la décision 98-4, tenu compte d’un « principe fondamental » établi dans l’ordonnance 97-1764, le Conseil fait remarquer que, dans cette ordonnance, il n’a pas établi de principe fondamental concernant le groupement. Les principes généraux à cet égard ont été établis dans les décisions 94-19 et 97-8. Tel que signalé ci-dessus, ces principes n’exigent pas que la concurrence locale ou les dispositions permettant cette concurrence soient en place comme condition préalable au groupement.
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63. Les décisions 94-19 et 98-7 établissent les principes généraux concernant le groupement, mais, en plus, le Conseil a, dans des décisions plus récentes rendues après l’ordonnance 97-1764, réaffirme que le groupement est permis. Par exemple, dans la décision 97-19, le Conseil a déclaré que le groupement de services interurbains et de services sans frais d’interurbain faisant l’objet d’une abstention avec des services locaux ou d’autres services tarifés est approprié, sous réserve des règles relatives au groupement établies dans les décisions 94-19 et 97-8.
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64. Le Conseil fait aussi remarquer que, dans l’AP 97-21 par lequel il a amorcé l’instance portant sur le groupement qui a abouti à la décision 98-4, il a déclaré qu’il n’avait pas l’intention de réexaminer des questions concernant le groupement de services de télécommunication fournis exclusivement par les compagnies de Stentor, parce que ces questions avaient été réglées dans les décisions 94-19 et 97-8.
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65. Ainsi, la décision 98-4 ne change en rien les principes fondamentaux du groupement; elle élargit simplement les garanties sur le plan de la concurrence établies dans des décisions antérieures du Conseil, de manière à tenir compte du groupement de services tarifés avec des services d’affiliées et de non-affiliées et avec des services autres que des services de télécommunication.
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66. Le troisième motif que les requérantes ont invoqué porte que le Conseil a commis une erreur en ne tenant pas compte de l’état de la concurrence dans le marché des services locaux ou en se méprenant sur la mesure dans laquelle les obstacles à l’entrée en concurrence dans ce marché continuent d’exister. Le Conseil fait remarquer toutefois que, compte tenu des faits exposés ci-dessus, l’état de la concurrence locale n’a rien à voir avec les règles et garanties relatives au groupement qui ont été établies en 1994 et élargies par la décision 98-4 aux affiliées et aux non-affiliées.
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67. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil juge que les deuxième et troisième motifs que les requérantes ont invoqués pour étayer leur position qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 98-4 ne sont pas fondés.
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68. Le Conseil prend note de l’argument des requérantes concernant leur fourniture de groupes de services semblables à ceux que les compagnies de Stentor offrent, sur la base de revente de composantes de services locaux des compagnies de Stentor. Tel que le Conseil l’a déclaré dans la décision 97-8, la revente peut promouvoir le développement d’un marché concurrentiel tout en donnant aux concurrents du temps pour construire leurs propres installations. Le Conseil fait également remarquer que l’exigence imposée dans l’ordonnance 97-1345, à savoir, que les fonctions locales optionnelles soient offertes sur une base indépendante pour fins de revente, donne aux concurrents un plus grand choix d’options pour élaborer leurs propres groupes de services s’ils décident d’inclure dans leurs groupes des services locaux des compagnies de Stentor à des fins de revente (par ex., en revendant des fonctions locales optionnelles et/ou des services locaux de base).
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69. En outre, le Conseil estime qu’il serait contraire aux intérêts des consommateurs d’empêcher la fourniture de services groupés par les compagnies de Stentor. Les consommateurs tirent avantage d’un guichet unique au moyen du groupement. De plus, le Conseil estime que les conditions dans lesquelles les compagnies de Stentor peuvent grouper des services établit un équilibre approprié entre les préoccupations des compagnies de Stentor et celles des concurrents.
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70. Dans le cas de la proposition des requérantes de redéfinir le groupement de manière à y inclure l’assemblage de services distincts, que ce soit par le prix, le jumelage ou toute autre disposition qui fait qu’il est plus avantageux pour le consommateur d’obtenir le service groupé que les composantes distinctes, le Conseil conclut que sa définition actuelle de groupement tient adéquatement compte des préoccupations sous-jacentes.
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71. De même, le Conseil estime que la proposition des requérantes de traiter la facturation conjointe des services cellulaires/SCP et des services sur ligne métallique fournis par les compagnies de Stentor comme du groupement n’est pas appropriée. Selon le Conseil, la facturation conjointe ne peut, en soi, convenablement être qualifiée de groupement. Il fait remarquer, à cet égard, que les compagnies de Stentor ont inclu depuis de nombreuses années des services locaux et interurbains dans le même état de compte. Il y a groupement, par exemple, lorsqu’un ou plusieurs des services offerts sont facturés à un tarif qui n’est pas disponible dans le cas d’une facturation séparée.
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72. Quant à la position des RISC voulant que la décision 98-4 soit incompatible avec les critères d’abstention que le Conseil a établis dans la décision 94-19, le Conseil fait remarquer que ces critères n’ont rien à voir avec le régime de groupement qu’il a implanté. Les critères d’abstention ont été établis pour déterminer si un marché donné était suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des usagers, de sorte que le Conseil puisse s’abstenir de réglementer ces marchés. Les règles relatives au groupement, par contre, ont été établies pour fournir certaines garanties sur le plan de la concurrence, comme assurer que les prix groupés ne sont pas anticoncurrentiels (par ex., remplissent le test d’imputation), que les composantes goulot ou essentielles sont disponibles pour les concurrents à des taux tarifés, non discriminatoires, afin qu’ils puissent offrir leurs propres services groupés, et que le groupement est accessible à des fins de revente.
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73. Le Conseil fait aussi remarquer que, selon les règles actuelles, il continuera d’examiner tous les services groupés que les compagnies de Stentor proposent d’offrir et qui mettent en cause des services tarifés, afin de faire en sorte qu’ils se conforment aux garanties établies dans les décisions 94-19, 97-8 et 98-4.
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74. Bref, le Conseil conclut que les requérantes n’ont pas prouvé qu’il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision 98-4 et, par conséquent, il rejette leur demande.
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Secrétaire général
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