Décision de télécom CRTC 2023-349

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Référence : Demande de la Partie 1 affichée le 23 septembre 2022

Ottawa, le 26 octobre 2023

Dossier public : 8690-C304-202208529

Community Fibre Company – Demande en vue d’autoriser l’installation d’un nouveau poteau, d’un nouveau toron et de nouveaux ancrages à Franktown (Ontario) dans le canton de Beckwith

Sommaire

Le Conseil refuse la demande de la Community Fibre Company (CFC) afin que le Conseil rende plusieurs consignes relatives à la mise en place de ses installations dans les servitudes municipales du canton de Beckwith (Beckwith). Selon la CFC, Beckwith n’a pas donné l’autorisation de mettre en place ses installations ou n’a pas fourni les servitudes en temps voulu. Beckwith et toutes les municipalités ont un rôle important à jouer en facilitant l’accès en temps opportun aux servitudes municipales pour les entreprises canadiennes, ce qui est essentiel pour favoriser la concurrence et garantir aux Canadiennes et Canadiens des régions rurales l’accès à des services de haute qualité à des prix compétitifs.

Le Conseil refuse la demande au motif que les ordonnances demandées par la CFC sont soit résolues, soit prématurées, soit mieux traitées par d’autres moyens, soit non étayées par les preuves présentées. Plus précisément, le Conseil conclut que Beckwith a donné son autorisation à la CFC pour l’installation du poteau en question et qu’il n’y a donc plus lieu pour le Conseil d’exercer sa compétence en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi sur les télécommunications. De plus, le Conseil conclut que les autres mesures de redressement demandées par la CFC seraient mieux traitées dans le cadre d’un accord d’accès municipal (AAM) négocié selon les principes établis dans la décision 2001-23 (décision Ledcor) et l’AAM type non contraignant, afin de refléter un meilleur équilibre entre les besoins et les intérêts des deux parties. Le Conseil conclut également prématurée la demande d’autorisation générale de la CFC pour l’installation de nouveaux ancrages et torons sur les poteaux existants appartenant à Bell Canada ou Hydro One à Beckwith. Enfin, le Conseil conclut qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve au dossier pour justifier l’ouverture d’une instance visant à examiner les actions de Beckwith en ce qui a trait à la demande d’exonération de responsabilité et à déterminer si l’imposition d’une sanction administrative pécuniaire serait appropriée.

Bien que le Conseil refuse d’accorder le redressement demandé dans les circonstances, conformément à sa mission de veiller à ce que les Canadiennes et Canadiens des régions rurales aient accès à un système de communication de classe mondiale, le Conseil rappelle à Beckwith et à toutes les municipalités l’importance d’accorder un accès rapide aux entreprises canadiennes pour qu’elles puissent mettre en place des installations afin de fournir des services de télécommunication à leurs résidents.

Demande

  1. Le 23 août 2022, le Conseil a reçu une demande de Community Fibre Company (CFC) invitant le Conseil à rendre plusieurs ordonnances concernant la mise en place d’installations dans les servitudes municipales du canton de Beckwith (Beckwith). En particulier, la CFC a demandé au Conseil i) d’exercer ses pouvoirs en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi sur les télécommunications (Loi) pour autoriser la CFC à installer immédiatement un nouveau poteau téléphonique à Beckwith; ii) d’autoriser la CFC à installer des ancrages, au besoin, pour soutenir l’installation de nouveaux fils sur les poteaux existants à Beckwith et ses environs; iii) d’ordonner à Beckwith d’examiner et d’approuver rapidement les futures demandes d’autorisation municipale présentées par la CFC; iv) d’ordonner à Beckwith de conclure un accord d’accès municipal (AAM); et v) d’examiner les actions de Beckwith en ce qui concerne la demande d’une décharge de responsabilité pour la fibre enfouie et déterminer si l’imposition d’une sanction administrative pécuniaire (SAP) serait appropriée.
  2. Le Conseil a reçu une réponse de Beckwith et une intervention du Centre pour la défense de l’intérêt public (CDIP).

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • Le Conseil devrait-il exercer les pouvoirs que lui confère le paragraphe 43(4) de la Loi afin d’autoriser la CFC d’installer un nouveau poteau téléphonique, ainsi que les torons et ancrages connexes, à Beckwith?
    • Le Conseil devrait-il consentir à l’installation d’ancrages, au besoin, pour soutenir l’installation de nouveaux torons sur les poteaux existants à Beckwith et ses environs?
    • Le Conseil devrait-il ordonner à Beckwith d’examiner et d’approuver rapidement les futures demandes d’autorisation municipale présentées par la CFC pour l’utilisation des servitudes publiques que les entreprises canadiennes sont autorisées à utiliser en vertu de la Loi?
    • Le Conseil devrait-il ordonner à Beckwith de conclure un AAM sous la forme approuvée par le Conseil dans des instances antérieures concernant le cadre de l’AAM?
    • Le Conseil devrait-il amorcer une instance en vue d’examiner les actions de Beckwith en ce qui concerne la demande d’une décharge de responsabilité pour la fibre enfouie dans un conduit sur le chemin Crooked Side et de déterminer si l’imposition d’une SAP serait appropriée?

Le Conseil devrait-il exercer les pouvoirs que lui confère le paragraphe 43(4) de la Loi afin d’autoriser la CFC d’installer un nouveau poteau téléphonique, ainsi que les torons et ancrages connexes, à Beckwith?

Positions des parties
CFC
  1. La CFC a demandé au Conseil d’exercer les pouvoirs que lui confère le paragraphe 43(4) de la Loi et de l’autoriser à installer un nouveau poteau, un nouveau toron et de nouveaux ancrages à Beckwith.
  2. La CFC a affirmé que, le 28 juillet 2022, elle a demandé au directeur administratif de Beckwith (Ontario) l’autorisation d’installer un nouveau poteau, un nouveau toron et de nouveaux ancrages à Franktown à Beckwith. D’après la CFC, elle a envoyé dans un courriel au directeur administratif de Beckwith contenant les coordonnées du système mondial de positionnement (GPS) pour le nouveau poteau. La CFC a affirmé que malgré des appels téléphoniques de suivi, elle n’avait pas reçu de réponse officielle de Beckwith en date du 22 août 2022.
  3. La CFC a indiqué que si le Conseil accordait l’autorisation demandée, Beckwith ne subirait aucune difficulté financière. À l’inverse, la CFC a soutenu qu’elle subirait un préjudice et des dépenses supplémentaires de plus de 10 000 $ pour la construction à Franktown si cette demande n’était pas approuvée. La CFC a ajouté que tout retard au-delà du 15 septembre 2022 lui porterait préjudice, étant donné que la construction et les permis seraient repoussés dans les mois d’hiver, ce qui augmenterait les coûts de construction et retarderait inutilement la mise à disposition des services de fibre jusqu’au domicile de la CFC pour les résidents de Beckwith.
CDIP
  1. Le CDIP a soutenu la demande d’autorisation de la CFC. Le CDIP a fait remarquer que la jurisprudence sur les questions relatives aux paragraphes 43(2) et 43(4) de la Loi, ainsi que les décisions antérieures du Conseil, établissent clairement l’autorité du Conseil et la compétence fédérale sur ces questionsNote de bas de page 1. Le CDIP a indiqué que tous les fournisseurs de services devraient se voir accorder un accès rapide à la propriété publique pour installer et étendre leur infrastructure de réseau afin de fournir Internet haute vitesse. Le CDIP a ajouté que le fait de retarder un tel accès va à l’encontre de l’objectif de service universel du Conseil énoncé dans politique réglementaire de télécom 2016-496Note de bas de page 2.
Beckwith
  1. Dans sa réponse datée du 13 octobre 2022, Beckwith a affirmé qu’elle était très favorable aux infrastructures de télécommunication dans sa collectivité rurale et qu’elle serait heureuse de collaborer avec la CFC pour trouver une solution. Beckwith a ajouté qu’elle avait demandé à la CFCNote de bas de page 3 de contacter le surintendant des travaux publics afin de coordonner une visite du site pour confirmer l’emplacement exact avant d’accorder son approbation, car la largeur des routes dans le village n’est pas normalisée. En outre, étant donné que le poteau serait situé près du bord de la route, le service des travaux publics de Beckwith voulait s’assurer qu’il n’y aurait pas de problèmes de visibilité.
Réplique de la CFC
  1. Dans sa réplique datée du 3 novembre 2022, la CFC a indiqué que si Beckwith avait répondu presque à tout moment avant le 12 septembre 2022, la CFC aurait été en mesure d’achever sa conception, de commander un nouveau poteau et de l’installer avant la fin du mois de septembre. La CFC a affirmé que, dans ce cas, sa demande n’aurait pas été nécessaire et que les ressources consacrées par la CFC et le Conseil n’auraient pas été gaspillées afin de chercher à résoudre cette situation.
  2. En réponse à l’affirmation de Beckwith selon laquelle les coordonnées GPS étaient insuffisantes pour localiser l’emplacement du poteau demandé, la CFC a souligné le fait que l’emplacement était décrit dans le courriel du 28 juillet 2022 comme étant à « l’angle sud-est de l’intersection de la rue Powell et de la rue Church ». La CFC a ajouté que l’emplacement du poteau proposé avait été délimité à l’aide d’un piquet de bois et de peinture fluorescente par le personnel de la CFC avant l’envoi du courriel du 28 juillet 2022.
  3. La CFC s’est opposée à l’absence d’explication de Beckwith concernant le retard. La CFC a argué que les municipalités jouent un rôle essentiel en tant que gardiennes des servitudes publiques sur leur territoire et que, lorsque l’accès à une servitude publique est retardé par les municipalités, la conception, la construction et l’installation de services de télécommunication modernes pour les résidents sont inutilement retardées.
Réponse de Beckwith à la demande de renseignements
  1. Le 12 décembre 2022, en réponse à une demande de renseignements, Beckwith a confirmé que, le 14 novembre 2022, après des discussions avec la CFC et une clarification de l’emplacement exact du poteau, son service des travaux publics et elle-même ont accordé l’autorisation d’installer le poteau à l’emplacement demandé.
Analyse du Conseil
  1. En vertu du paragraphe 43(4) de la Loi, lorsque la CFC, une entreprise canadienneNote de bas de page 4, n’a pas été en mesure d’obtenir l’autorisation de la municipalité pour la construction d’une ligne de transmission, le Conseil a la compétence de lui accorder la permission de le faire :

    Dans le cas où l’administration leur refuse l’agrément ou leur impose des conditions qui leur sont inacceptables, l’entreprise canadienne ou l’entreprise de distribution peuvent demander au Conseil l’autorisation de construire les lignes projetées; celui-ci peut, compte tenu de la jouissance que d’autres ont des lieux, assortir l’autorisation des conditions qu’il juge indiquées.

  2. Comme indiqué ci-dessus, dans une lettre datée du 12 décembre 2022, en réponse à une demande de renseignements, Beckwith a confirmé que, le 14 novembre 2022, elle avait autorisé la CFC à installer le poteau à l’endroit demandé.
  3. Par conséquent, puisque Beckwith a accordé son autorisation pour que la CFC installe le poteau, le Conseil estime que cette question est maintenant résolue et qu’il n’y a plus de raisons pour que le Conseil exerce sa compétence en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi.
  4. Néanmoins, le Conseil estime que la rapidité des réponses et l’accès en temps opportun aux servitudes municipales sont essentiels au déploiement harmonieux et efficace des réseaux de télécommunication et au maintien de relations positives entre les fournisseurs et les municipalités.

Le Conseil devrait-il consentir à l’installation d’ancrages, au besoin, pour soutenir l’installation de nouveaux torons sur les poteaux existants à Beckwith et ses environs?

Positions des parties
CFC
  1. La CFC a demandé au Conseil de consentir à l’installation d’ancrages, au besoin, pour soutenir l’installation de nouveaux torons sur les poteaux existants à Beckwith et ses environs.
  2. En réponse à une demande de renseignements, la CFC a affirmé que la propriété des poteaux existants à Beckwith était commune entre Bell Canada et Hydro One. La CFC a ajouté que l’interaction entre la propriété des poteaux et l’autorisation de la municipalité a une influence importante sur les installations de télécommunication proposées en raison d’incohérences dans les normes de conception des différents propriétaires de poteaux. D’après la CFC, l’une de ces incohérences concerne l’emplacement des compteurs d’électricité pour les points de présence :
    • Si le poteau appartient à Bell Canada, un compteur d’électricité peut être placé sur un poteau ou une armoire montée sur poteau.
    • Si le poteau appartient à Hydro One, un compteur électrique ne peut pas être placé sur le poteau et doit plutôt être placé sur un nouveau poteau, ou il faut obtenir l’autorisation de la municipalité pour placer le compteur électrique et le point de présence sur le sol à une distance d’au moins 10 pieds du poteau.
CDIP
  1. Le CDIP a soutenu la demande de la CFC afin que le Conseil exerce ses pouvoirs en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi pour approuver l’installation de tout ancrage qui pourrait être nécessaire pour soutenir l’installation de nouveaux torons sur les poteaux existants à Beckwith.
Analyse du Conseil
  1. Il n’y a aucun élément de preuve dans le dossier de la présente instance que la CFC a déposé des demandes à Bell Canada ou à Hydro One pour l’installation d’ancrages et de nouveaux torons sur les poteaux existants à Beckwith. Il n’existe pas non plus d’élément de preuve que la CFC a demandé l’autorisation de Beckwith en ce qui concerne le positionnement, le retrait, l’entretien et l’exploitation de ses installations sur l’un des poteaux appartenant à Bell Canada ou à Hydro One à Beckwith ou qu’une telle autorisation a été refusée.
  2. Étant donné l’absence d’éléments de preuve concernant les demandes d’autorisation formulées par la CFC en ce qui concerne les poteaux appartenant à Bell Canada ou à Hydro One à Beckwith, le Conseil est d’avis que le redressement demandé par la CFC est prématuré et équivaut essentiellement à une demande d’autorisation générale pour l’installation de nouveaux ancrages et torons sur les poteaux existants à Beckwith sans aucune indication technique ou géographique.

Le Conseil devrait-il ordonner à Beckwith d’examiner et d’approuver rapidement les futures demandes d’autorisation municipale présentées par la CFC pour l’utilisation des servitudes publiques que les entreprises canadiennes sont autorisées à utiliser en vertu de la Loi?

Positions des parties
CFC
  1. La CFC a affirmé qu’elle avait déjà demandé à deux reprises à Beckwith l’autorisation d’utiliser la servitude municipale :
    • En 2018, elle a demandé à placer un câble de fibre enfoui le long d’un chemin constitué d’une servitude municipale ouverte entre les chemins Foster et St. Fillans. D’après la CFC, le préfet de Beckwith a estimé qu’il était approprié pour Beckwith d’exiger un paiement de 10 000 $ pour utiliser la servitude municipale non ouverte entre les chemins Foster et St. Fillans.
    • En 2020, elle a demandé à enfouir un câble de fibre optique dans un conduit le long du chemin Crooked Side, mais Beckwith a répondu en exigeant une décharge de responsabilité avant d’autoriser la CFC à placer le conduit et le câble, en invoquant « d’importants travaux de construction routière qui auront lieu au cours des deux prochaines années » [traduction].
  2. La CFC a affirmé qu’en 2022, aucune construction n’avait eu lieu sur le chemin Crooked Side; au lieu de cela, Beckwith a retardé l’expansion de la CFC à Prospect, un village de Beckwith, suffisamment longtemps pour que la titulaire soit la première sur le marché au début de l’année 2022. La CFC a indiqué que le refus d’accès au marché des clients de Prospect a entraîné des dommages financiers pour la CFC, tandis que Beckwith n’a pas respecté ses obligations en vertu du régime de l’AAM.
  3. La CFC a affirmé que d’autres municipalités locales (y compris le comté de Lanark) sont en mesure de traiter en quelques jours de simples demandes d’autorisation municipale pour de nouveaux poteaux placés le long des servitudes municipales existantes. La CFC a indiqué que l’installation de nouveaux poteaux le long des routes municipales fait partie du cours habituel des affaires pour les municipalités, les entreprises canadiennes et les entreprises de distribution.
  4. Compte tenu de la conduite de Beckwith, la CFC a demandé au Conseil d’ordonner à Beckwith d’examiner et d’approuver rapidement les futures demandes d’autorisation municipale présentées par la CFC pour l’utilisation des servitudes publiques que les entreprises canadiennes sont autorisées à utiliser en vertu de la Loi.
CDIP
  1. Le CDIP a affirmé que la demande de la CFC démontre les obstacles importants rencontrés par les fournisseurs de services de certaines municipalités afin de fournir l’accès à des services. Le CDIP a indiqué que le Conseil devrait utiliser cette demande pour clarifier le régime réglementaire et faire en sorte que ces fournisseurs de services aient un accès rapide à de tels installations ou locaux. Le CDIP a indiqué que, dans le cas contraire, il pourrait y avoir d’autres exemples à l’avenir où les municipalités ne reconnaissent pas la nécessité d’accorder une autorisation en temps opportun, et les résidents de ces collectivités seront confrontés à l’incidence négative d’un retard, ou pire, se verront refuser l’accès à Internet haute vitesse.
Analyse du Conseil
  1. Le Conseil reconnaît qu’un examen et une approbation rapides par Beckwith ou toute autre municipalité sont essentiels lorsqu’une entreprise canadienne dépose une demande à une municipalité afin d’obtenir l’autorisation d’utiliser les servitudes publiques. Ceci est important en raison de l’argent et des ressources en jeu, et parce qu’un retard dans l’octroi des permis pourrait retarder la construction et en augmenter les coûts de construction. Agir sans délai favorise un marché compétitif afin que les Canadiennes et les Canadiens puissent bénéficier de toutes les formes de concurrence et d’investissement, ainsi que de services plus abordables et d’un plus grand choix.
  2. Dans la décision de télécom 2001-23 (décision Ledcor), le Conseil a élaboré des principes pour aider les entreprises et les municipalités à négocier les modalités selon lesquelles les municipalités accorderont aux entreprises l’autorisation de construire, d’entretenir et d’exploiter des lignes de transmission sur ou dans la propriété municipale, sans avoir à recourir à une demande en vertu de l’article 43 ou 44 de la Loi.
  3. Le Conseil estime que le redressement demandé ne permettrait pas à Beckwith d’examiner les demandes d’autorisation de la CFC au cas par cas et de faire en sorte que l’utilisation et la jouissance des autoroutes et des espaces publics par le public soient dûment prises en compte.
  4. Selon le Conseil, le redressement demandé par la CFC serait mieux traité dans le cadre d’un AAM négocié, car il permettrait de mieux concilier les besoins et les intérêts des deux parties. Comme indiqué ci-dessous, les parties ne semblent pas avoir mené de négociations sérieuses sur les modalités d’un AAM.

Le Conseil devrait-il ordonner à Beckwith de conclure un AAM sous la forme approuvée par le Conseil dans des instances antérieures concernant le cadre de l’AAM?

Positions des parties
CFC
  1. La CFC a demandé au Conseil d’ordonner à Beckwith de conclure un AAM sous la forme approuvée dans les instances précédentes du Conseil concernant le cadre de l’AAM.
  2. En réponse à une demande de renseignements sollicitant des détails sur les négociations que la CFC a eues avec Beckwith en vue d’un AAM, ou sur tout autre accès ou toute autre discussion tenue récemment entre les parties et qui pourrait être pertinente pour la présente instance, la CFC a répondu qu’elle avait eu une réunion avec Beckwith et qu’elle avait fourni à Beckwith un AAM en vigueur avec un canton adjacent. La CFC a ajouté que le représentant de Beckwith a indiqué que :
    • l’AAM serait examiné avec son personnel et son conseil;
    • Beckwith n’a pas d’AAM avec d’autres entreprises;
    • les demandes d’autorisation municipale sont effectivement traitées de manière ad hoc.
Beckwith
  1. En réponse à une demande de renseignements par lettre datée du 12 décembre 2022, Beckwith a affirmé qu’elle et la CFC n’avaient eu aucune communication ou discussion concernant des négociations en vue de conclure un AAM, à l’exception des renseignements fournis pour confirmer l’emplacement de la demande de poteaux.
Analyse du Conseil
  1. Comme indiqué dans la réponse de la CFC à une demande de renseignements, en date du 21 février 2023, la CFC a fourni à Beckwith, le 9 février 2023, une copie d’un AAM en vigueur avec un canton adjacent, et Beckwith a indiqué que l’AAM proposé sera examiné par le personnel et le conseil de Beckwith. D’après les réponses de la CFC et de Beckwith, il ne semble pas qu’il y ait eu d’autres négociations entre les parties en vue de conclure un AAM.
  2. Le Conseil a dû rendre des décisions au cas par cas afin de résoudre des litiges portant sur des questions relatives à l’accès aux servitudes municipales en établissant les modalités d’un AAMNote de bas de page 5. Toutefois, le Conseil encourage généralement les parties à négocier un accord mutuellement acceptable.
  3. Le Conseil estime que, compte tenu de l’examen d’un AAM proposé entrepris par Beckwith et du fait que les parties ne semblent pas avoir eu de négociations sérieuses portant sur les modalités d’un accord, il ne serait pas approprié pour le Conseil d’ordonner à Beckwith de conclure un AAM avec la CFC à ce stade.
  4. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime qu’il serait plus approprié de donner aux parties le temps de négocier un AAM mutuellement acceptable, en utilisant les principes établis dans la décision Ledcor et l’AAM type non contraignantNote de bas de page 6 comme document de référence et d’aide à la négociation.
  5. En particulier, le Conseil estime que les principes relatifs à la répartition de la responsabilité (énoncés aux paragraphes 155 et 156 de la décision Ledcor et l’article 11 du modèle d’AAM) et aux coûts et frais non liés aux coûts (voir les paragraphes 60 à 100, 122 et 138 de la décision Ledcor et l’article 8 du modèle d’AAM) semblent être particulièrement pertinents pour le litige entre les parties et peuvent servir de guide dans le cadre de leurs négociations.
  6. Il est également toujours possible pour les parties de demander une médiation assistée par le personnel, comme indiqué dans le bulletin d’information de radiodiffusion et de télécommunication 2019-184.

Le Conseil devrait-il amorcer une instance en vue d’examiner les actions de Beckwith en ce qui concerne la demande d’une décharge de responsabilité pour la fibre enfouie dans un conduit sur le chemin Crooked Side et de déterminer si l’imposition d’une SAP serait appropriée?

Positions des parties
CFC
  1. Dans les paragraphes 22 et 23 de la présente décision, la CFC décrit la demande qu’elle a adressée à Beckwith en 2020 pour obtenir l’autorisation municipale d’enfouir un câble de fibre optique dans un conduit le long du chemin Crooked Side. La CFC a indiqué que Beckwith ne devrait pas être autorisée à exiger des décharges générales de responsabilité sans également fournir les concessions appropriées accordées aux entreprises canadiennes dans le cadre d’un AAM. La CFC a ajouté que le libellé approuvé dans la décision de télécom 2020-61 serait plus approprié qu’une décharge de responsabilité. La CFC a demandé que le Conseil amorce une instance en vue d’examiner les actions de Beckwith en ce qui concerne le fait de demander une décharge de responsabilité pour la fibre enfouie dans un conduit sur le chemin Crooked Side et de déterminer si la délivrance d’une SAP serait appropriée.
Beckwith
  1. Beckwith n’a pas formulé d’observations concernant la demande de la CFC.
CDIP
  1. Le CDIP a affirmé qu’il estimait qu’il ne serait pas approprié d’imposer une SAP à Beckwith. Le CDIP a toutefois ajouté que le Conseil pourrait envisager d’informer les municipalités et les demandeurs dont les demandes d’autorisation pour l’installation de nouveaux poteaux ou l’enfouissement de conduites, restées sans réponse, pourraient donner lieu à de telles sanctions en général à l’avenir.
  2. Le CDIP a également affirmé qu’il ne croyait pas que la demande particulière de la CFC, à savoir que le Conseil amorce une instance pour examiner les actions de Beckwith en ce qui concerne le fait qu’elle est allée au-delà de son rôle en demandant une décharge de responsabilité pour la fibre enfouie dans un conduit sur la chemin Crooked Side, était appropriée sur la base du présent dossier. Toutefois, le CDIP a indiqué que la CFC devrait être libre de déposer une nouvelle demande concernant le chemin Crooked Side concernant son allégation avec des éléments de preuve supplémentaires. Le CDIP était d’avis qu’il n’était pas nécessaire d’amorcer un avis de consultation portant sur une telle demande aussi particulière, mais que si, après l’examen de la présente demande et peut-être de la future demande de la CFC, les municipalités continuaient à se traîner les pieds en matière de déploiement de la large bande, il serait approprié pour le Conseil d’amorcer un avis de consultation de grande envergure.
Réplique de la CFC
  1. La CFC a affirmé que même si le CDIP n’était pas favorable à l’imposition d’une SAP, même une SAP relativement petite de 5 000 $ entraînerait une plus grande conformité de la part des municipalités de respecter leurs obligations en vertu de la Loi. La CFC a indiqué qu’il était justifié d’imposer une petite SAP pour les raisons suivantes :
    • les administrations municipales ont des contrôles financiers relativement stricts et, dans le cas où une dépense imprévue surviendrait en raison de l’action ou de l’inaction de leur personnel, une surveillance est exercée par les représentants élus;
    • les préoccupations financières sont au premier plan pour le personnel et les élus des petites municipalités, tandis que le respect de la Loi n’entre pas en considération dans le cadre des activités quotidiennes habituelles;
    • une motivation financière, même modeste, modifiera les comportements et encouragera le personnel à agir dans le respect des règles plutôt que d’avoir à justifier une dépense inutile auprès de son conseil municipal élu;
    • le fait que la réponse de Beckwith soit une lettre de son directeur administratif plutôt que de son conseiller juridique indique que probablement aucun budget n’a été utilisé pour sa réponse à la demande initiale.
  2. La CFC a indiqué que, compte tenu des retards qui ont eu lieu dans le cas présent et dans d’autres, le Conseil doit profiter de la présente instance pour fournir des orientations sur les comportements appropriés des municipalités lorsqu’elles répondent à de simples demandes d’autorisation municipale pour l’installation de nouveaux poteaux, d’ancrages et d’autre équipement de télécommunication. La CFC a également indiqué que le Conseil doit tenir compte du fait que les retards sont contraires à l’intérêt public et qu’ils entraînent une perte de revenus pour les entreprises. La CFC a ajouté qu’étant donné que les entreprises ne sont pas en mesure de facturer aux municipalités le temps et les revenus perdus, le Conseil doit utiliser son pouvoir pour les encourager à se conformer aux demandes d’autorisation municipale en utilisant les outils dont il dispose en vertu de la Loi.
  3. En réponse à une demande de renseignements, la CFC a affirmé que lors de la réunion du 9 février 2023 avec Beckwith, elle a soulevé la question de savoir comment résoudre le problème du chemin Crooked Side. La CFC a affirmé que Beckwith n’avait pas fourni de solution satisfaisante, mais que Beckwith avait expliqué que la servitude du canton sur le chemin Crooked Side n’était pas aussi large que leur norme, et que cela constituait la base de leur décision précédente.
  4. La CFC a indiqué qu’elle estimait qu’il ne s’agit pas d’une excuse raisonnable pour exiger la décharge de responsabilité, étant donné que d’autres municipalités partout au Canada sont en mesure de fonctionner tous les jours avec de nouveaux conduits de télécommunication, des regards et de l’équipement placés dans des plates-formes de routes appartenant à la municipalité.
Analyse du Conseil
  1. En vertu de l’article 72.001 de la Loi, le Conseil a le pouvoir d’imposer une SAP pour toute infraction à une disposition de la Loi (autre que l’article 17 ou l’article 69.2) et pour toute infraction à un règlement ou à une décision pris par le Conseil en vertu de la Loi (autre qu’une interdiction ou une exigence du Conseil prise en vertu de l’article 41).
  2. Comme indiqué dans le bulletin d’information de Conformité et Enquêtes et de Télécom 2015-111, en vertu de l’article 72.003 de la Loi, les demandeurs peuvent alléguer une violation et demander une SAP comme mesure corrective dans le cadre de leur demande, et dans ce cas, le Conseil s’attend à ce que le demandeur indique clairement tous les faits qui démontreraient que la personne a commis une violation et qu’une SAP est appropriée dans les circonstancesNote de bas de page 7.
  3. Le Conseil estime qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve dans le dossier pour justifier l’ouverture d’une instance d’examen des actions de Beckwith en ce qui concerne la demande d’une décharge de responsabilité pour la fibre enfouie dans un conduit sur le chemin Crooked Side et pour établir si l’imposition d’une SAP serait appropriée. Selon le Conseil, la CFC n’a pas clairement démontré en quoi le fait d’exiger une décharge de responsabilité constitue une violation apparente de toute disposition de la Loi, de tout règlement ou de toute décision du Conseil, de sorte qu’une instance concernant une SAP serait justifiée.
  4. En particulier, la CFC a cité la décision de télécom 2020-61 afin de démontrer le caractère inapproprié de la demande de Beckwith pour une décharge générale de responsabilité. Toutefois, cette décision concernait un litige entre la ville de Terrebonne et un groupe particulier d’entreprisesNote de bas de page 8 et ne crée donc aucune obligation juridiquement contraignante pour Beckwith. En outre, bien que la décision Ledcor énonce des principes qui peuvent guider les parties dans la négociation d’un AAM, à ce stade, le manquement allégué de Beckwith à ces principes ne constitue pas une violation d’une décision du Conseil qui pourrait faire l’objet d’une SAP.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil refuse la demande de la CFC.
  2. Le Conseil rappelle à Beckwith et à toutes les municipalités qu’il est important d’accorder un accès rapide aux entreprises canadiennes pour qu’elles puissent mettre en place des installations afin de fournir des services de télécommunication à leurs résidents.
  3. Le Conseil s’attend à ce que Beckwith et toutes les municipalités répondent en temps opportun aux demandes d’accès des entreprises canadiennes à l’accès à une servitude municipale et, en particulier, s’attend à ce que Beckwith réponde en temps opportun aux demandes d’autorisation municipale de la CFC.
  4. Enfin, le Conseil encourage les entreprises canadiennes et les municipalités à négocier des modalités mutuellement acceptables dans le cadre d’un AAM en tenant compte des principes établis dans la décision Ledcor.

Instructions

  1. Les Instructions de 2023Note de bas de page 9 (Instructions) prévoient que lorsque le Conseil exerce ses pouvoirs et remplit ses fonctions en vertu de la Loi, il devrait examiner comment ses décisions peuvent promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation, en particulier comment ses décisions tiennent compte des objectifs principaux qui incluent, entre autres, :
    • alinéa 2a) : encourager toutes formes de concurrence et d’investissement;
    • alinéa 2e) : réduire les obstacles à l’entrée sur le marché et à la concurrence pour les fournisseurs de services de télécommunication qu’ils soient nouveaux, régionaux, ou plus petits que les fournisseurs de services titulaires nationaux.
  2. Le Conseil estime que, bien qu’il n’ait pas accordé les consignes  demandées par la CFC, le fait d’encourager Beckwith à répondre aux futures demandes d’autorisation en temps opportun et d’inciter la CFC et Beckwith à négocier, en temps opportun, un AAM mutuellement acceptable, fait progresser les objectifs des Instructions d’encourager toutes formes de concurrence et d’investissement et de réduire les obstacles à l’entrée sur le marché.
  3. En outre, la conclusion du Conseil est conforme à l’article 4 des Instructions, qui énonce que le Conseil doit veiller à ce que les mesures qu’il impose au moyen de ses décisions soient efficaces et proportionnelles à leur objectif. Les conclusions du Conseil sont efficaces et proportionnelles dans la mesure où le Conseil s’abstiendrait d’exercer ses pouvoirs dans les cas où le redressement demandé est soit sans objet ou prématuré, soit mieux résolu par un accord mutuellement négocié et où il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve à l’appui du redressement demandé.
  4. Le Conseil estime également que ses conclusions sont conformes aux objectifs stratégiques énoncés à l’alinéa 7f) de la LoiNote de bas de page 10. Plus précisément, le fait d’encourager les parties à négocier les modalités d’un AAM favoriserait un recours accru au libre jeu du marché, par opposition à une solution réglementaire.

Secrétaire général

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