Décision de télécom CRTC 2019-316

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Ottawa, le 6 septembre 2019

Dossier public : 8690-V81-201703231

Ville de Gatineau – Termes et modalités de l’Accord d’accès municipal conclu avec certaines entreprises

Le Conseil approuve, avec modifications, certaines modalités d’un Accord d’accès municipal (AAM) entre la Ville de Gatineau (Gatineau) et Bell Canada, Cogeco Communications inc., Rogers Communications Canada Inc., TELUS Communications Inc. et Vidéotron ltée (collectivement les Entreprises).

L’AAM régira l’utilisation par les Entreprises des emprises municipales de Gatineau afin d’offrir des services de télécommunication modernes qui profiteront aux résidents et aux commerces.

Contexte

  1. Les pouvoirs du Conseil en vertu des articles 42 à 44 de la Loi sur les télécommunications (Loi) portent sur la résolution de différends entre une entreprise de télécommunication ou une entreprise de distribution canadienneNote de bas de page 1 (ci-après, une entreprise) et une municipalité relativement aux modalités de l’accès par l’entreprise aux servitudes de la municipalité aux fins de construction, d’exploitation ou d’entretien de lignes de transmission.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande de la Ville de Gatineau (la Ville ou Gatineau), datée du 13 avril 2017, dans laquelle elle demandait l’approbation des termes et des modalités d’un Accord d’accès municipal proposé (AAM proposé) avec Bell Canada, Cogeco Communications inc.Note de bas de page 2, Rogers Communications Canada Inc. (RCCI)Note de bas de page 3, TELUS Communications Inc. (TCI)Note de bas de page 4 et Vidéotron ltéeNote de bas de page 5 (collectivement les Entreprises). Gatineau a indiqué qu’elle avait négocié au cours des dernières années avec les Entreprises, mais que certains éléments ne font toujours pas l’objet d’une entente. 
  2. Dans le cadre de la présente instance, qui a fait l’objet de quelques rebondissements procédurauxNote de bas de page 6, Gatineau et les Entreprises ont eu l’occasion de soumettre leurs argumentaires concernant les articles en litige de l’AAM proposé. Au fil de ces échanges, les parties sont parvenues à s’entendre sur le libellé de plusieurs articles. Le Conseil n’a pas à se prononcer sur les articles sur lesquels les parties se sont entendues mais plutôt à trancher sur les questions qui n’ont toujours pas été réglées.

Questions

  1. Un grand nombre de questions ont été soulevées dans le dossier de la présente instance. Dans les paragraphes qui suivent, le Conseil aborde les questions suivantes :   
    • Travaux exigeant (ou non) un permis
    • Remboursement des coûts de déplacement
    • Remboursement des frais de contournement
    • Frais de délivrance et de renouvellement d’approbations municipales
  2. Les conclusions du Conseil à l’égard des autres modalités qui demeurent en litige sont énoncées à l’annexe de la présente décision.
  3. Dans le cadre de son analyse, le Conseil a tenu compte de manière générale du principe de la neutralité des coûts établi d’abord dans la décision de télécom 2001-23 (décision Ledcor/Vancouver). Selon ce principe, les coûts directement liés à la présence des infrastructures d’une entreprise sur les emprises municipales devraient être absorbés par l’entreprise et non pas par les contribuables municipaux. Toutefois, le Conseil a reconnu dans le passé que, dans certaines circonstances, tel que le déplacement des installations d’une entreprise à la demande de la municipalité, il convient de s’écarter de ce principe pour attribuer la responsabilité des coûts.
  4. De plus, puisque les modalités de l’AAM proposé sont en grande partie basées sur l’Accord type d’accès municipal (AAM type)Note de bas de page 7, le Conseil se réfère aux articles de l’AAM type dans ses modifications à certains libellés de l’AAM proposé.

Travaux exigeant (ou non) un permis

Positions des parties

  1. L’alinéa (a) de l’article 3.1 de l’AAM proposé (qui est conforme à l’AAM type et qui ne fait pas figure de dispute) stipule ce qui suit :


    Sous réserve du paragraphe 3.2, les travaux exécutés sur les emprises municipales par l’entreprise doivent être soumis à l’autorisation de la municipalité selon les exigences en vigueur, énoncées à l’annexe B;

  2. L’annexe B de l’AAM proposé dénombre les travaux pour lesquels Gatineau exige des permis ou des avis. Selon cette annexe, les entreprises doivent obtenir une approbation municipale et fournir un avis à la Ville pour les trois types de travaux suivants lorsque ceux-ci ne requièrent pas de travaux d’excavationNote de bas de page 8 :
    • l’installation de réseau aérien (à l’exclusion de câbles de raccordement aériens);
    • le remplacement de matériel en surface sans ajouter de réseau ou sans augmenter la taille du réseau en place (à l’exclusion du remplacement de poteaux);
    • le passage de câbles dans une conduite souterraine existante.
  3. Gatineau a noté que ces trois activités devraient être considérées comme des exemples de construction de lignes de transmission nécessitant l’agrément d’une administration municipale en vertu du paragraphe 43(3) de la Loi. Par exemple, l’ajout d’un réseau de fibres optiques dans une conduite souterraine existante ne constitue pas des travaux de routine puisqu’il s’agit de l’ajout d’une ligne de transmission. Selon Gatineau, l’obtention d’un permis ou d’un agrément est nécessaire dans ces situations puisqu’elle a le droit de connaître les risques et les coûts associés à la présence des équipements et que la valeur de ces équipements pourrait devoir être prise en considération lors d’une éventuelle demande de déplacement.
  4. L’article 3.2 de l’AAM proposé identifie les travaux de routine que les entreprises peuvent effectuer sur le territoire de la Ville pour lesquels aucun permis n’est exigé. Cet article est conforme à l’article correspondant dans l’AAM type, sauf pour une partie du texte que Gatineau a modifiée. La portée de ces modifications (par rapport à l’AAM type) est que dès qu’une entreprise ajoute de l’équipement, cette dernière doit soit obtenir un permis auprès de la Ville (p. ex. une approbation municipale), soit renoncer à toute compensation à laquelle elle pourrait avoir droit dans le cas d’un déplacement éventuel du même équipement à la demande de la Ville.
  5. Les Entreprises ont exprimé leur opposition à ces modifications et soumis que la Ville doit assumer les coûts de ses demandes de déplacement même si l’équipement installé par une entreprise n’a pas fait l’objet d’une approbation municipale. Elles ont indiqué que seule la construction d’une ligne de transmission nécessite l’agrément d’une administration municipale en vertu du paragraphe 43(3) de la Loi, et qu’elles voient mal comment l’ajout d’un câble sur un toron existant ou dans une conduite souterraine existante pourrait être qualifié de construction de ligne de transmission.
  6. Les Entreprises ont soutenu que la Loi leur reconnaît le droit de construire et de maintenir en place leurs équipements et, une fois installés, la possibilité d’entretenir et de modifier leurs équipements sans avoir à obtenir l’agrément d’une municipalité. Selon elles, il va de soi qu’une entreprise manipule très fréquemment ses lignes de transmission.
  7. Les Entreprises ont indiqué que le Conseil a reconnu par le passé qu’aucun consentement n’est nécessaire lorsqu’une activité de construction envisagée par une entreprise ne résulte pas en une entrave abusive à la jouissance des lieux par le public, tel qu’indiqué dans la décision Ledcor/Vancouver. Elles ont soutenu qu’aucune des trois activités mentionnées ci-dessus ne peut résulter en une entrave abusive à la jouissance des lieux publics puisque les activités ne nécessitent pas de travaux d’excavation et ne causent pas une interruption complète de la circulation routière. Ce ne sont que des activités ordinaires et des travaux de routine auxquels les Entreprises doivent pouvoir procéder librement afin d’être en mesure d’exploiter efficacement leurs réseaux.
  8. Les Entreprises ont précisé que procéder librement ne veut pas dire procéder sans informer Gatineau. Elles ont accepté d’obtenir un permis d’occupation routièreNote de bas de page 9 en cas d’installation de réseau aérien (à l’exclusion de câbles de raccordement aériens) et d’aviser Gatineau en cas de remplacement de matériel en surface sans ajouter de réseau ou sans augmenter considérablement la taille du réseau en place, ainsi qu’en cas de passage de câbles dans une conduite souterraine existante. Les Entreprises ont ajouté qu’étant informée, Gatineau a également le choix de procéder à l’inspection des équipements.
  9. En ce qui a trait à l’annexe B de l’AAM proposé, les Entreprises ont également exprimé leur désaccord à ce que l’expression « matériel beaucoup plus gros » soit remplacée par « matériel plus gros » et l’expression « sans augmenter considérablement la taille du réseau en place » soit remplacée par « sans augmenter la taille du réseau ». Elles ont soutenu que le libellé proposé par Gatineau aurait pour effet de les soumettre à une obligation d’obtenir l’approbation municipale pour tout travail visant le remplacement de matériel en surface par du matériel plus gros.
  10. Gatineau a soumis qu’elle éliminait des termes imprécis, vagues ou ambigus qui rendent impossible l’application exacte des dispositions concernées.
  11. Les Entreprises ont expliqué que le sens de ces expressions n’est pas imprécis et que le retrait des adverbes « beaucoup » et « considérablement » a plutôt pour effet de les dénaturer.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Le Conseil estime que l’obligation d’obtenir un permis municipal devrait être liée à l’obligation des Entreprises de veiller à éviter toute entrave abusive à la jouissance des lieux publics.
  2. Dans ce contexte, dans la décision de télécom 2007-100 (décision Maple Ridge), le Conseil a déterminé que Shaw Cablesystems Limited pouvait effectuer les travaux ordinaires qui ne nécessitaient pas l’excavation ou le bris de la surface de tout corridor de service dans le district de Maple Ridge en Colombie-Britannique sans demander un permis de la municipalité. La compagnie devait également informer la municipalité si un travail ordinaire nécessitait le remplacement du matériel de surface par du matériel dont la taille est au moins 25 % supérieure à celle du matériel qu’il remplaçait.
  3. Concernant les trois activités de l’annexe B pour lesquelles l’obligation d’obtenir un permis (ou le renoncement à toute compensation de la part d’une entreprise dans le cas d’un déplacement éventuel à la demande de la Ville) est contestée, selon l’AAM proposé, l’installation de réseau aérien (à l’exclusion de câbles de raccordement aériens) semble nécessiter à la fois l’approbation écrite de la municipalité, avec ou sans conditions, et un permis d’occupation routière. Les Entreprises ne se sont pas opposées à ce qu’un permis d’occupation routière soit requis, ce qui est conforme à l’AAM type. Le Conseil estime que l’obligation d’obtenir un permis d’occupation routière est suffisante pour ces travaux et que cette procédure permettra à la Ville d’en être avisée.
  4. En ce qui a trait aux deux autres activités, soit le remplacement de matériel en surface et le passage de câbles dans une conduite souterraine existante, il est prévu dans l’AAM proposé que, soit une approbation municipale, soit un avis seulement, pourrait être requis, selon que l’entreprise renonce ou non à toute compensation à laquelle elle pourrait avoir droit dans le cas d’un déplacement éventuel du même équipement à la demande de la Ville. Le Conseil estime que ces deux activités ne résultent généralement pas en une entrave abusive à la jouissance des lieux publics puisqu’elles ne nécessitent pas de travaux d’excavation ou une interruption complète de la circulation routière. Par conséquent, un avis est suffisant pour ces activités.
  5. Tel que confirmé par Gatineau dans le cadre de la présente instance, les demandes de déplacement d’équipement de télécommunication sont relativement rares. De plus, il est raisonnable de présumer que dans une proportion importante des cas où une entreprise effectue des travaux qui entrent dans la définition des trois activités en question, il n’y aura pas d’augmentation de réseau qui aurait une incidence importante sur les coûts d’un déplacement éventuel ultérieur. 
  6. Les procédures administratives relatives à l’obtention d’un permis municipal exigent du temps et de l’argent aux Entreprises. Ainsi, les conditions que la Ville souhaite imposer dans certains cas d’ajout d’équipement pourraient entraîner des retards dans l’exécution de travaux de routine qui s’avèrent nécessaires au maintien et à l’exploitation efficace des réseaux de télécommunication ou priver les Entreprises d’une compensation de la Ville pour des relocalisations d’équipements demandées par celle-ci. Gatineau ne devrait pas utiliser ses exigences en matière de permis afin de refuser l’exécution de travaux nécessaires à la fourniture de services de télécommunication dont bénéficient ses citoyens uniquement pour éviter d’éventuels frais de déplacement. Dans ce sens, la volonté des Entreprises d’aviser la Ville de ces travaux, permettant à la Ville d’obtenir les renseignements nécessaires auprès des Entreprises avant de soumettre une demande de déplacement, semble contribuer à atténuer les préoccupations de la Ville.
  7. Ainsi, le Conseil estime que les craintes exprimées par la Ville ne justifient pas l’imposition d’une obligation générale que les Entreprises obtiennent une approbation municipale à chaque fois qu’elles doivent effectuer des travaux qui entrent dans la définition des trois types d’activités en question. De même, les Entreprises ne devraient pas avoir à choisir entre obtenir une approbation municipale à chaque fois ou renoncer à toute compensation dans le cas d’un déplacement éventuel à la demande de la Ville.
  8. Dans la même optique, en ce qui a trait au libellé proposé par Gatineau lié au remplacement de matériel en surface et à l’augmentation de la taille du réseau, de telles activités ne devraient pas résulter en une entrave abusive à la jouissance des lieux publics. De plus, dans la décision Maple Ridge, le Conseil a déterminé que même dans le cas d’un travail ordinaire qui nécessite le remplacement du matériel de surface par du matériel dont la taille est au moins 25 % supérieure à celle du matériel remplacé, un avis au district de Maple Ridge serait approprié.
  9. Par conséquent, le Conseil détermine que les expressions « le remplacement de matériel en surface existant par du matériel beaucoup plus gros » et « le remplacement de matériel en surface sans ajouter de réseau ou sans augmenter considérablement la taille du réseau en place (à l’exclusion du remplacement de poteaux) » doivent être maintenues dans le texte de l’annexe B de l’AAM proposé.
  10. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil retient le libellé proposé par les Entreprises pour l’article 3.2 de l’AAM proposé, comme suit :


    Travaux de routine pour lesquels aucun permis n’est exigé.
    Nonobstant le paragraphe 3.1 et tel qu’indiqué à l’annexe B, l’entreprise peut, sous réserve du préavis prévu aux politiques de gestion de la circulation de la municipalité et sans devoir d’abord obtenir un permis :

    1. utiliser les conduits existants ou toute structure de l’équipement;
    2. procéder à l’entretien de routine de l’équipement et aux essais sur le terrain; et
    3. installer et réparer des câbles de raccordement;

    sous réserve que l’entreprise ne doit jamais briser ou abîmer de quelque façon que ce soit la surface physique des emprises municipales sans le consentement préalable et écrit de la municipalité.

  11. Le Conseil approuve ce qui suit pour les articles en litige de l’annexe B de l’AAM proposé :
    • Le maintien de l’adverbe « beaucoup » dans le libellé suivant : « Le remplacement de matériel en surface existant par du matériel beaucoup plus gros »;
    • Un avis seulement est requis de la part des Entreprises avec le maintien de l’adverbe « considérablement » pour : « le remplacement de matériel en surface sans ajouter de réseau ou sans augmenter considérablement la taille du réseau en place (à l’exclusion du remplacement de poteaux) »;
    • Un avis seulement est requis de la part des Entreprises pour : « le passage de câbles dans une conduite souterraine existante » lorsque l’entreprise n’a pas à briser ou à abîmer de quelque façon que ce soit la surface physique des emprises municipales;
    • Un permis d’occupation routière seulement est requis de la part des Entreprises pour : « l’installation de réseau aérien (à l’exclusion de câbles de raccordement aériens) ».

Remboursement des coûts de déplacement

Positions des parties

  1. Dans l’article 1 de l’annexe C de l’AAM proposé, Gatineau a proposé une échelle mobile sur dix ans (basée sur le nombre d’années depuis l’installation de l’actif) pour le remboursement par la Ville des coûts relatifs au déplacement des équipements des Entreprises lorsque la Ville fait une demande de déplacement dans le cadre d’un projet municipal.
  2. Les Entreprises ont indiqué qu’elles devraient assumer une juste part des coûts de déplacement lorsque ceci représente le moyen le plus efficace d’atteindre un objectif municipal légitime autre que l’embellissement, l’esthétique ou tout autre but de nature similaire. Cependant, elles ont signalé qu’avec l’échelle mobile proposée par Gatineau, le droit d’une entreprise d’être compensée pour le déplacement de ses équipements est limité dans le temps. Une fois que l’échelle arrive à terme, les villes ne ressentent plus la nécessité d’envisager des solutions de rechange qui permettraient de réduire les coûts ou d’éviter d’avoir à demander le déplacement.
  3. Les Entreprises ont soumis qu’indépendamment de l’âge des actifs en cause, le déplacement d’équipements de télécommunication constitue une opération complexe, coûteuse et exigeante en main-d’œuvre (particulièrement en ce qui concerne les réseaux de nouvelle génération tels que les réseaux de fibres optiques). Par conséquent, il est crucial pour les Entreprises que de tels déplacements ne leur soient imposés que lorsque ces déplacements sont absolument nécessaires.
  4. Les Entreprises ont soutenu qu’un modèle d’attribution de la responsabilité des coûts de déplacement devrait non seulement reconnaître l’importance des coûts qui leur sont imposés lorsqu’elles doivent déplacer leurs équipements, mais aussi inciter les municipalités à toujours donner la préséance aux solutions autres que le déplacement, lorsque d’autres solutions sont possibles.
  5. Les Entreprises ont proposé un modèle d’attribution de la responsabilité des coûts de déplacement 50/60, c’est-à-dire un remboursement par la Ville de 50 % des coûts des structures et des équipements installés et construits dans le cadre des travaux de déplacement, et de 60 % des frais de main-d’œuvre et d’ingénierie pour y parvenir, et ce peu importe l’âge de l’équipement concerné.
  6. Les Entreprises ont indiqué qu’un tel modèle, applicable à toutes les demandes de déplacement, serait équitable pour les deux parties et offrirait une prévisibilité accrue facilitant la planification des projets. Les Entreprises ont mentionné que la méthode de l’échelle mobile peut entraîner un lourd fardeau administratif et que leur proposition permettra d’éliminer les risques de différends liés à la détermination de l’âge des équipements touchés par un déplacement et à l’application de facteurs d’allocation fondés sur l’âge des équipements.
  7. Les Entreprises ont soutenu que le modèle 50/60 qu’elles proposent ne contredit en rien les décisions antérieures du Conseil, dont la décision Ledcor/Vancouver, puisque dans cette décision, le Conseil n’a imposé aucun critère concernant la répartition des frais de déplacement; les parties demeuraient libres de négocier ou encore d’adopter un modèle facile à gérer. Les Entreprises ont soumis que d’autres municipalités, sans donner d’exemples, ont convenu d’adopter un modèle d’attribution de la responsabilité des coûts selon des pourcentages fixes identique ou similaire au modèle 50/60.  
  8. Gatineau a indiqué que la méthode de l’échelle mobile est usuelle, a été retenue par le Conseil dans des décisions antérieures et est également utilisée dans de nombreux AAM conclus au Canada. Elle a soumis que les échelles mobiles ne donnent pas aux Entreprises un droit de propriété mais plutôt un droit d’accès limité aux emprises municipales et qu’elles doivent déplacer leurs équipements lorsqu’elles sont requises de le faire.
  9. Gatineau a fait remarquer que le modèle proposé par les Entreprises est nouveau et ne semble jamais avoir été soumis au Conseil. Gatineau a ajouté que ce modèle n’est pas approprié car il est inéquitable et n’est pas conforme aux critères établis par le Conseil, tels que le principe de la neutralité des coûts. Selon ce modèle, ce principe ne serait jamais respecté.
  10. Gatineau a soumis des graphiques montrant une évolution de son risque financier concernant le partage des coûts de déplacement. Elle a soutenu que selon le modèle proposé par les Entreprises, son risque financier augmentera avec les années, que les coûts associés aux équipements soient amortis ou non, étant donné que l’âge des équipements n’a plus aucune importance pour un actif sans cesse grandissant. Selon Gatineau, le Conseil a toutefois reconnu que l’âge des équipements doit être pris en compte et que le principe de la neutralité des coûts pour les municipalités doit éventuellement être respecté. 
  11. Les Entreprises ont qualifié les graphiques soumis par la Ville comme étant aussi simplistes que vagues, ce qui leur enlève toute valeur probante. Selon elles, l’hypothèse que les graphiques tentent de démontrer (qu’indemniser une entreprise au-delà d’une certaine période de temps se solderait par un enrichissement injuste) est erronée.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Tel qu’indiqué ci-dessus, le Conseil a d’abord établi le principe de la neutralité des coûts dans la décision Ledcor/Vancouver et il l’a repris dans des décisions subséquentes. Toutefois, dans ces mêmes décisions, le Conseil a reconnu que, dans certaines circonstances, il convient de s’écarter de ce principe pour attribuer la responsabilité des coûts.
  2. Dans le cas où une municipalité exige qu’une entreprise déplace ses installations dans le cadre d’un projet municipal, le Conseil a déterminé dans la décision Ledcor/Vancouver qu’il y aurait lieu de manière générale de tenir compte des facteurs ci-dessous pour répartir la responsabilité des coûts entre l’entreprise et la municipalité :
    • qui a demandé le déplacement (c.-à-d. la municipalité, l’entreprise ou une tierce partie);
    • la raison du déplacement demandé (p. ex. sécurité, esthétique ou service amélioré aux clients);
    • quand la demande est faite par rapport à la date de la construction (p. ex. que la demande soit faite bien longtemps après la construction originale ou très peu de temps après).
  3. Selon la méthode de l’échelle mobile, on s’écarte du principe de la neutralité des coûts au cours des premières années lorsque la municipalité est responsable de la totalité des coûts de déplacement des équipements de télécommunication. Le raisonnement est que la municipalité, lors de son processus de planification, devrait savoir si l’infrastructure dont elle autorise l’installation devra être déplacée dans un avenir rapproché. Considérant qu’avec chaque année qui s’ajoute il devient plus difficile pour la municipalité de prévoir si le déplacement s’imposera, la méthode de l’échelle mobile réduit le niveau de responsabilité de la municipalité au fil du temps. Après un nombre d’années déterminé, la municipalité n’est plus responsable des coûts de déplacement, d’où le retour à l’application du principe de la neutralité des coûts pour la municipalité.
  4. Tel qu’indiqué par Gatineau, si le Conseil appliquait le modèle 50/60 proposé par les Entreprises, cela ne respecterait pas le principe de la neutralité des coûts puisque la Ville demeurerait responsable d’une grande partie des coûts, peu importe la période de temps qui s’est écoulée depuis l’installation de l’équipement.
  5. Le Conseil estime que la méthode de l’échelle mobile, telle qu’appliquée dans des décisions antérieures, est appropriée dans le cas de l’AAM proposé puisqu’elle prévoit le retour au principe de la neutralité des coûts après un certain temps pour la Ville et ainsi pour les contribuables.
  6. Tel qu’indiqué ci-dessus, les Entreprises ont mentionné que la méthode de l’échelle mobile peut leur entraîner un lourd fardeau administratif. Cependant elles n’ont pas démontré l’importance de ces difficultés dans le contexte où cette méthode est utilisée depuis bon nombre d’années dans le cadre de plusieurs ententes.
  7. En ce qui a trait à la durée de l’échelle mobile, le Conseil estime qu’il est approprié d’adopter la même durée de 16 ans qu’il a approuvée dans la décision de télécom 2016-51 (la décision Hamilton) et tout récemment dans la décision de télécom 2019-19 concernant la Ville de Calgary. Selon cette échelle, Gatineau assumera une part de la responsabilité des coûts de déplacement engagés par la Ville pour une période plus longue et les Entreprises pourront recouvrer des coûts sur une période plus longue.
  8. Dans la décision Hamilton, le Conseil avait abordé la question de la durée de l’échelle mobile en tenant compte de la durée de vie utile la plus courte des actifs de Bell Canada, considérant les réseaux de télécommunication modernes. Il a estimé que le choix d’une échelle mobile sur 16 ans reflétait mieux les avantages mutuels qui découlent du partenariat entre l’entreprise et la municipalité, sans limiter indûment aucune partie dans la planification d’investissements futurs. Le Conseil estime que les mêmes conditions s’appliquent dans le cas présent.
  9. Par conséquent, le Conseil détermine que l’article 1 de l’annexe C doit se lire comme suit :


    Lorsque la municipalité exige qu’un équipement de l’entreprise soit déplacé, la répartition des coûts directement attribuables au déplacement se fait en fonction des barèmes ci-après. Les coûts de déplacement incluent notamment les coûts liés à l’amortissement, à l’amélioration et à la récupération.

    Nombre d’années depuis l’installation de l’actif Pourcentage des coûts de déplacement à payer par la municipalité
    1 100 %
    2 100 %
    3 100 %
    4 90 %
    5 80 %
    6 70 %
    7 65 %
    8 60 %
    9 55 %
    10 45 %
    11 40 %
    12 35 %
    13 30 %
    14 20 %
    15 10 %
    16 5 %
    17 et plus 0 %


    Si l’avis de relocalisation est donné après la fin de la 16e année depuis l’installation de l’équipement visé, l’entreprise devra payer seule l’ensemble des coûts de déplacement de l’équipement.

Remboursement des frais de contournement

Positions des parties

  1. L’article 7.4 de l’AAM proposé prévoit ce qui suit :


    Les frais de contournement.
    Lorsque dans le cadre de travaux municipaux, la municipalité peut éviter le déplacement de l’équipement de l’entreprise mais doit contourner l’équipement de l’entreprise, cette dernière doit rembourser à la municipalité les coûts de contournement jusqu’à concurrence du montant des coûts de déplacement qu’elle devrait rembourser aux termes du paragraphe 7.3Note de bas de page 10.

  2. Gatineau a soumis que cette clause s’inscrit dans le droit qu’elle possède de recouvrer les frais directement liés à la présence des équipements de télécommunication des Entreprises sur l’emprise municipale.
  3. Les Entreprises se sont opposées à l’inclusion de cet article. Selon elles, il est contraire au droit que la Loi leur accorde d’accéder, d’occuper et de maintenir leurs équipements sur les emprises municipales. Plus précisément, elles ont indiqué que le paragraphe 43(2) de la Loi leur accorde un droit d’accès à toute voie publique ou à tout autre lieu public pour la construction, l’exploitation ou l’entretien de leurs lignes de transmission, ainsi que pour procéder à des travaux, notamment de creusage, et d’y demeurer pour la durée nécessaire. La seule limite à ce droit est qu’une entreprise doit veiller à éviter toute entrave abusive à la jouissance des lieux par le public.
  4. Selon les Entreprises, ce droit n’est pas subordonné à l’autorisation municipale, il est dominant, et il a pour effet de restreindre les droits de propriété des municipalités sur les voies et les autres lieux publics. Les Entreprises ont soutenu que les municipalités ne devraient pas être compensées pour les frais qu’elles encourent en raison de la présence des installations de télécommunication sur les emprises municipales. D’ailleurs, celles-ci sont déjà indirectement compensées pour ces coûts en raison des avantages que la présence de ces infrastructures leur confère.
  5. Gatineau a indiqué que même si les Entreprises reconnaissent qu’elles doivent assumer une juste part de la responsabilité des coûts de déplacement, elles refusent d’assumer leur juste part de la responsabilité des coûts dans l’éventualité où un contournement de leur équipement pourrait servir comme solution de rechange à un déplacement.
  6. Gatineau s’est référée aux décisions antérieures du Conseil et a soumis que la présence des équipements de télécommunication des Entreprises sur l’emprise municipale doit être à coût nul pour elle et que si elle encourt des coûts supplémentaires causés par le contournement de ces équipements lors de travaux municipaux légitimes, elle est en droit de récupérer ces coûts à titre de coûts causals. Elle a par ailleurs noté que l’article 7.4 de l’AAM proposé limite les coûts supplémentaires qui pourraient être assumés par les Entreprises au montant des coûts de déplacement que ces dernières devraient assumer sur la base d’une échelle mobile de 10 ans.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Conformément au paragraphe 43(2) de la Loi, les municipalités sont tenues de composer avec la présence de l’équipement de télécommunication sur les emprises municipales, qui d’ailleurs procure de nombreux avantages aux citoyens et aux entreprises présentes dans la municipalité, ainsi qu’à l’administration municipale elle-même.
  2. Cette cohabitation mutuellement avantageuse nécessite que, dans le cas où un projet municipal entre en conflit avec la localisation légitime de l’équipement de télécommunication, les solutions de rechange à l’obligation pour les entreprises de déplacer leurs équipements devraient toujours être envisagées. Ainsi, le déplacement de cet équipement, qui oblige souvent les entreprises à engendrer des coûts importants, ne devrait que rarement être imposé.
  3. Si le Conseil accepte la proposition de Gatineau concernant l’imposition de frais de contournement aux Entreprises, cela n’irait pas dans le sens d’encourager la Ville à planifier ses travaux de manière à réduire les coûts pour toutes les parties impliquées. La Ville pourrait ainsi se voir en mesure de toucher une compensation à chaque fois qu’elle rencontre des installations des Entreprises dans le cadre d’un projet municipal (dépendamment de l’âge des équipements), ce qui à tout le moins diminuerait l’incitation à la recherche de solutions de rechange ou à moindre coût, et pourrait avoir comme conséquence de multiplier les instances pour lesquelles les Entreprises seraient appelées à engendrer des coûts importants liés au déplacement ou encore au contournement des équipements. 
  4. Ainsi, l’impératif qui a mené le Conseil dans le passé à conclure que les entreprises devraient contribuer aux frais de déplacement de leur équipement à la demande des municipalités lorsque cela s’avère nécessaire dans le contexte d’un projet municipal, voire les assumer entièrement, ne s’impose pas lorsqu’une ou des solutions de rechange existent et que le déplacement peut être évité (y compris lorsque la municipalité entreprend de contourner les équipements de l’entreprise). 
  5. Par conséquent, le Conseil détermine que l’article 7.4 de l’AAM proposé devrait être supprimé.

Frais de délivrance et de renouvellement d’approbations municipales

Positions des parties

  1. Dans le cadre de ses observations, Gatineau a proposé de nouveaux frais de délivrance et de renouvellement d’approbations municipales (articles 1 et 2 de l’annexe A de l’AAM proposé) pour 2018 plus élevés que ceux proposés pour 2017 dans le cadre de sa demande. De plus, l’article 4 de l’annexe A de l’AAM proposé prévoit un ajustement annuel des tarifs, le 1er janvier de chaque année, selon l’augmentation de l’indice des prix à la consommation (IPC) établie par Statistique Canada pour la province de Québec au cours des 12 mois précédents.
  2. À l’appui de ces nouveaux frais proposés pour 2018, Gatineau a soumis des données financières en se basant sur la méthodologie décrite dans une étude faite en 2011 par la firme KPMG à la demande de l’Union des municipalités du Québec (ci-après, l’étude de KPMG).
  3. Les Entreprises ont indiqué que l’étude de KPMG ne permet pas de justifier les nouveaux frais que Gatineau a proposés pour 2018, puisque ce document n’est qu’une description d’un outil méthodologique permettant d’évaluer et de déterminer les coûts causals des municipalités. Elles ont ajouté qu’elles ne disposent d’aucune information sur la provenance et la fiabilité des données financières déposées par Gatineau, et qu’elles sont donc incapables d’en déterminer la valeur probante. De plus, en ce qui concerne les frais proposés par Gatineau dans sa demande pour les travaux effectués entre le 15 décembre et le 15 avril, les Entreprises ont signalé qu’elles voient mal en quoi l’analyse des travaux réalisés au cours de la période hivernale justifie l’ajout de frais.
  4. Les Entreprises ont énuméré plusieurs problèmes concernant la proposition de frais de Gatineau, dont des frais qui augmentent plus rapidement que l’inflation, les valeurs attribués à certains coûts dont les coûts indirects, ainsi que l’absence d’un facteur visant à prendre en compte les gains de productivité que la Ville aurait dû réaliser avec le passage des années.
  5. Les Entreprises ont ajouté que les inspections de leurs travaux peuvent révéler des problèmes que la Ville ne connaitrait pas autrement, et que cela devrait être pris en compte dans ses calculs.
  6. Les Entreprises ont soutenu que le Conseil devrait s’assurer que les données financières déposées par Gatineau sont le fruit d’une véritable étude de coûts s’appuyant sur des mesures de temps et de mouvement. Elles ont ainsi demandé au Conseil de prendre les mesures suivantes :
    • ordonner à Gatineau de déposer ou, le cas échéant, d’effectuer une véritable étude de coûts établissant le bien-fondé des données financières qu’elle a déposées;
    • modifier la procédure de la présente instance de façon à permettre aux Entreprises d’analyser et de commenter sur l’étude de coûts que Gatineau aura déposé.
  7. Gatineau a expliqué que le montant de 385 $ pour les conduites de 20 mètres ou moins est calqué sur le règlement de tarification des différents services municipaux de la Ville qui s’appliquent à toutes les entreprises avec lesquelles elle fait affaire, sauf aux entreprises de télécommunication et de distribution d’énergie. Gatineau a indiqué que l’ajout de frais pour les travaux entre le 15 décembre 2017 et le 15 avril 2018 vise les travaux d’excavation et s’explique par le fait qu’au cours de cette période, les travaux de pavage sont temporaires, ce qui amène une autre inspection et de nombreuses plaintes des citoyens.
  8. Gatineau a demandé au Conseil de refuser la demande des Entreprises visant à obtenir une étude de coûts. Gatineau a précisé que la méthodologie de calcul dans l’étude de KPMG respecte les concepts fondamentaux reconnus par le Conseil, tels que ceux présentés dans le manuel d’études économiques réglementaires de 2009 de Bell Aliant Communications régionales, société en commandite et Bell Canada.
  9. Gatineau a réfuté les problèmes énumérés par les Entreprises. Elle a indiqué que ses dépenses augmentent plus rapidement en général que l’inflation, et que l’augmentation de ses tarifs est liée à l’augmentation de ses dépenses et non pas nécessairement à l’inflation. 
  10. Gatineau a ajouté que les améliorations technologiques (et des gains de productivité) impliquent des investissements dont les coûts doivent être pris en compte et que le coût des permis augmente en général avec le temps, et ce malgré toutes les avancées technologiques. De plus, Gatineau a rappelé que dans la décision Ledcor/Vancouver et la politique réglementaire de télécom 2009-150 concernant MTS AllstreamNote de bas de page 11 et la Ville de Vancouver, le Conseil a approuvé des frais qui, dans la plupart des cas, étaient supérieurs à ceux qu’elle avait proposés dans le cadre de sa demande.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Pour que les coûts soient conformes aux principes de la Phase II, ils doivent être prospectifs (c.-à-d. axés sur l’avenir, puisque les frais irrécupérables ne sont pas inclus) et différentiels (c.-à-d. seuls les coûts qui changent à la suite d’un projet sont pris en compte). Ces coûts différentiels prospectifs sont également appelés des coûts causals.
  2. Le Conseil note que l’étude de KPMG sur les coûts causals a été produite par Gatineau non pas pour justifier les montants demandés mais plutôt pour démontrer que l’utilisation de cette méthodologie validait les frais que la Ville proposait.
  3. Au niveau des frais supplémentaires liés à la période hivernale, l’étude de KPMG note que les efforts d’autorisation et d’inspection sont amplifiés en période hivernale. Typiquement, selon l’étude, l’excavation hivernale force les entreprises à utiliser un revêtement temporaire en hiver et à revenir faire le revêtement permanent au printemps. Par conséquent, un technicien municipal doit inspecter les travaux à deux reprises.
  4. Concernant l’argument des Entreprises lié aux gains de productivité résultant des améliorations technologiques dans le domaine bureaucratique, il est très difficile d’en quantifier l’impact et celui-ci pourrait être négligeable. On peut également se demander jusqu’à quel point les coûts globaux des municipalités sont sensibles à ces améliorations étant donné que, lorsque l’on considère le processus d’évaluation des demandes d’approbations municipales, une grande partie des frais pertinents consiste plutôt en des frais de consultation d’experts en urbanisme ou de soutien technique, de coûts liés aux inspections, etc. Une étude plus étoffée serait nécessaire pour bien comprendre l’impact et le Conseil estime que ce n’est pas justifié dans le cadre de la présente instance.   
  5. Il est aussi difficile de quantifier comment les inspections des travaux effectuées par les Entreprises pourraient bénéficier Gatineau de manière suffisamment significative pour contribuer à réduire les frais de délivrance d’approbations municipales. Les Entreprises n’ont pas soumis d’exemples concrets afin de justifier cet argument.
  6. Le Conseil estime que le processus permettant de calculer avec plus d’exactitude les coûts causals liés à la délivrance par Gatineau d’une approbation municipale serait complexe et onéreux et nécessiterait l’accès à de l’information beaucoup plus détaillée. Dans le cadre de la présente instance, Gatineau a soumis des réponses appropriées aux questions des Entreprises en ce qui a trait à la méthodologie de calcul et aux données financières qu’elle a utilisées. Compte tenu de son examen de l’ensemble des renseignements, le Conseil est d’avis que Gatineau a soumis des coûts raisonnables et un tel processus n’est pas justifié dans la présente instance.
  7. En outre, la proposition de frais de Gatineau se compare favorablement à certains frais que le Conseil a approuvés dans le cadre de décisions antérieures qui remontent à de nombreuses années. Le Conseil estime donc que Gatineau ne devrait pas avoir à soumettre des données financières supplémentaires et/ou une étude de coûts.
  8. Par conséquent, le Conseil approuve la structure tarifaire proposée par Gatineau en ce qui a trait aux frais de délivrance et de renouvellement d’approbations municipales.
  9. Le Conseil rejette la demande des Entreprises d’ordonner à Gatineau de déposer une étude de coûts dans le cadre de la présente instance.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil approuve, sous réserve des modifications indiquées dans la présente décision, l’AAM proposé par Gatineau.
  2. Gatineau et les Entreprises sont toujours libres de continuer à négocier dans l’éventualité où elles souhaiteraient s’écarter de l’AAM tel qu’approuvé par le Conseil. Toute modification ainsi convenue entre les parties n’aurait pas besoin d’être approuvée par le Conseil.

Instructions de 2006 et de 2019

  1. Le 17 juin 2019, le gouverneur en Conseil a enregistré le Décret donnant au CRTC des instructions relativement à la mise en œuvre de la politique canadienne de télécommunication pour promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation (Instructions de 2019). Les Instructions de 2019, qui sont entrées en vigueur à la date de son enregistrement, complètent les Instructions de 2006Note de bas de page 12 et s’appliquent à la présente instance. Le Conseil note qu’il s’appuie sur les pouvoirs que lui confère l’article 44 de la Loi. Cette disposition, lorsqu’elle est lue conjointement avec l’article 43, exige que le Conseil, en plus de tenir compte des objectifs de la politique énoncés à l’article 7 de la Loi, examine les préoccupations de politique générales. De plus, le pouvoir conféré au Conseil en vertu de ces dispositions se limite au règlement des questions en litige entre certaines personnes. Par conséquent, son intervention dans la présente instance est révélatrice de l’incapacité de s’en remettre aux forces du marché pour faire avancer la mise en œuvre des objectifs de la politique énoncés à l’article 7, compte tenu également des préoccupations de politique générales soulevées dans le cadre des droits de passage des municipalités.
  2. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que les conclusions qu’il a tirées dans la présente décision favorisent l’atteinte des objectifs de la politique énoncés aux alinéas 7a), 7b), 7c), 7e), 7f) et 7h) de la LoiNote de bas de page 13. Conformément au sous-alinéa 1a)(ii) des Instructions de 2006, en se prononçant uniquement sur les modalités d’accès faisant l’objet d’un différend entre les parties, le Conseil a eu recours à des mesures réglementaires qui sont efficaces et proportionnelles aux buts visés et qui ne font obstacle au libre jeu d’un marché concurrentiel que dans la mesure minimale nécessaire pour atteindre les objectifs.
  3. En ce qui concerne plus particulièrement les Instructions de 2019, la nature de la présente instance et du cadre législatif est telle que les conclusions ne visent pas directement à promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation. Toutefois, en veillant à ce que les entreprises puissent avoir accès aux emprises de la Ville de Gatineau selon des modalités établies qui permettent à la Ville de gérer ses emprises et de limiter les inconvénients pour sa population découlant des activités des entreprises et qui garantissent aux entreprises un accès rapide et soutenu auxdites emprises de manière économique, les conclusions du Conseil contribuent à favoriser la concurrence et les intérêts des consommateurs.
  4. Plus précisément, en étant en mesure d’accéder aux emprises municipales dans ces conditions, les Entreprises bénéficieront de règles de concurrence plus équitables. En réglant les conditions d’accès contestées entre ces entités, le Conseil a contribué à promouvoir la capacité des Entreprises à compléter et à améliorer leurs réseaux respectifs au fil du temps, favorisant ainsi la capacité d’innover dans la prestation de services et l’innovation dans les services. Toutes ces questions contribuent aux intérêts des consommateurs.
  5. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil estime que les conclusions qu’il a tirées dans la présente décision sont conformes aux instructions applicables du gouverneur en conseil.

Secrétaire général

Documents connexes

Annexe à la Décision de télécom CRTC 2019-316

Conclusions du Conseil à l’égard des modalités qui demeurent en litige

Numéro de l’article de l’AAM proposé Libellé de l’article établi par le Conseil Justification du Conseil
2.4 Conserver le libellé proposé par Gatineau dans l’AAM proposé. Le libellé proposé par Gatineau est conforme à celui accepté à l’unanimité par les membres du Comité directeur du CRTC sur l’interconnexion dans l’AAM type.

Dans la mesure où le droit d’accès admissible accordé aux Entreprises en vertu de la Loi pourrait constituer un « droit de propriété », ce droit serait accordé par la Loi et ne découlerait pas de l’AAM.
4.2 Conserver le libellé proposé par Gatineau dans l’AAM proposé, avec les modifications suivantes (en caractères gras et italiques) :

4.2 Arrêt des travaux

La municipalité peut exiger l’arrêt des travaux pour toute raison soulevée de bonne foi et valable sur le plan municipal, pour toute question de santé et de sécurité public, pour un événement spécial, pour toute situation hors de son contrôle, ou pour toute autre raison valable, le tout en ayant égard de l’intérêt public relatif à l’accès aux services de communication, y compris au service 9-1-1. Dans ces circonstances, la municipalité doit fournir à l’entreprise un ordre verbal et les raisons de l’arrêt des travaux; de son côté, l’entreprise doit cesser les travaux sur le-champs.

Dans les deux (2) jours ouvrables suivant l’ordre d’arrêter les travaux, la municipalité doit fournir à l’entreprise des raisons écrites pour justifier cet arrêt des travaux. Une fois justifié l’arrêt des travaux, la municipalité doit informer l’entreprise dès que les travaux peuvent être repris.
Le texte proposé par Gatineau est conforme à ce que le Conseil a approuvé dans la décision Hamilton.

Il n’est pas approprié de restreindre l’application de cet article aux situations d’urgence ou qui portent atteinte à la santé et à la sécurité publique, tel que proposé par les Entreprises.

L’article, tel que modifié, servira à faire en sorte que i) Gatineau puisse émettre des ordonnances d’arrêt de travail lorsque nécessaire, notamment pour assurer la sécurité publique, et ii) les raisons soutenant la délivrance d’une telle ordonnance sont valables sur le plan municipal et tiennent compte de l’intérêt public envers un accès continu aux services de communication, y compris l’accès aux services 9-1-1.

La Ville ne sera pas incitée à émettre des ordonnances d’arrêt de travail pour des raisons non fondées, étant donné que de telles ordonnances auraient pour effet de retarder le service aux citoyens, ce qui pourrait i) entraîner une perte de productivité ou du mécontentement, ii) exposer les citoyens à un danger potentiel ou iii) en ce qui concerne les projets déjà commencés, encombrer les voies publiques pendant des périodes plus longues.
4.8 Conserver le libellé proposé par Gatineau dans l’AAM proposé. Gatineau a proposé le libellé tel qu’approuvé par le Conseil dans la décision Hamilton (article 27f de l’AAM proposé par la Ville d’Hamilton).

Les Entreprises ont indiqué que leur formulation et celle de Gatineau permettent d’obtenir le même résultat mais que leur formulation est plus claire.

La formulation de Gatineau exige entre autres que la Ville fasse preuve d’une souplesse raisonnable dans les cas où l’équipement est installé à l’extérieur de l’emplacement qu’elle a approuvé mais que l’écart est tel qu’il n’y a aucune incidence importante pour la Ville (c’est-à-dire les écarts qui n’exigent pas le déplacement de l’équipement). Gatineau précise simplement que lorsque la Ville demande de déplacer de l’équipement, ou encore lorsque les parties sont en présence d’une autre circonstance qui aurait mené à des changements dans les conditions de la voie publique (p. ex. lorsque l’équipement des Entreprises bouge dans le sol à la suite de travaux effectués à proximité par la Ville), les parties doivent agir raisonnablement pour répartir la responsabilité des coûts associés à la relocalisation de l’équipement.

Par conséquent, le texte proposé par Gatineau adresse les préoccupations des Entreprises et est raisonnable.
6.3 Conserver le libellé proposé par les Entreprises, modifié pour ajouter une obligation pour les parties d’agir raisonnablement lorsque les conditions ont changé sur l’emprise municipale, similaire au libellé qui se trouve également dans l’article 4.8, comme suit (les modifications sont indiquées en caractères gras et italiques) :

6.3 Erreur de localisation

Lorsque la localisation de l’équipement faite par l’entreprise ne correspond pas à l’emplacement réel de l’équipement et que la municipalité est alors incapable d’installer son équipement sur l’emprise municipale comme il était prévu aux plans qu’elle a préparés en fonction de la localisation faite par l’entreprise (l’« Erreur »), l’entreprise devra payer à la municipalité les coûts directs découlant de l’Erreur.

Ne constitue pas une Erreur une localisation erronée découlant d’un déplacement des équipements de l’entreprise en raison du mouvement des sols dus notamment aux conditions climatiques, de travaux ou d’interventions réalisés par des tiers ou par la municipalité. En cas de mésentente quant à l’existence d’une Erreur, les parties s’engagent à collaborer afin de déterminer si l’Erreur découle ou non de mouvements du sol, de travaux ou d’interventions de tiers ou par la municipalité.

Lorsqu’il est déterminé que les conditions de l’emprise municipale ont changé, les parties conviennent d’agir raisonnablement, y compris au niveau de l’attribution des coûts directs découlant du changement.
Les spécifications ajoutées par les Entreprises fournissent des exemples de ce qui pourrait ne pas constituer une erreur de localisation qui leur serait imputable; par conséquent, ces spécifications sont légitimes.

Selon le principe de causalité des coûts, les coûts encourus par la Ville, liés à une localisation erronée et qui découlent de circonstances indépendantes du contrôle des Entreprises (par exemple, les mouvements du sol et l’intervention d’un tiers) découlent à la fois (à l’origine) de la présence de l’équipement des Entreprises sur l’emprise municipale, et à la fois (ensuite) de facteurs externes hors du contrôle des Entreprises.
7.5 Conserver le libellé révisé proposé par Gatineau. Bien qu’il n’y ait pas de distinction apparente entre les termes « déplacement » et « relocalisation », les deux termes sont utilisés dans l’AAM proposé et Gatineau croit que cette définition pourrait aider à éviter des différends potentiels. Ces deux termes sont utilisés sans distinction à leur sens dans l’article 1 de l’annexe C de l’AAM proposé et, par conséquent, l’inclusion de cette définition clarifiera qu’un sens commun a été attribué à ces deux termes.
Annexe C, article 3, Embellissement Conserver seulement le premier paragraphe proposé par Gatineau, dans l’AAM proposé, comme suit :

Annexe C : 3. Embellissement

Malgré les paragraphes 1 et 2, la municipalité devra payer seule l’ensemble des coûts de relocalisation de l’équipement si la relocalisation découle d’un projet d’embellissement ou d’esthétique. Ces coûts incluent notamment les coûts liés à l’amortissement, à l’amélioration et à la récupération.
Le Conseil n’a pas défini auparavant ce qui constitue un embellissement et il n’a pas reçu auparavant de demandes de règlement de différends sur ce sujet. De plus, cette question n’a pas fait l’unanimité par les membres du Comité directeur du CRTC sur l’interconnexion dans l’AAM type.

Dans bien des cas, ce n’est pas la nature des travaux mais plutôt la raison motivant les travaux qui servira à déterminer si le projet en est un d’embellissement ou d’esthétique ou non. Par conséquent, il n’est pas approprié que le Conseil se prononce à l’avance et en l’absence de contexte particulier à l’effet que tels projets ou tels types de projets se classent sous la catégorie projet d’embellissement ou non, vu la multitude de ces travaux et la subjectivité d’une définition de ces travaux.

Cet article est donc à négocier entre les parties. Si les parties n’arrivent pas à s’entendre, elles ont toujours la possibilité d’invoquer le processus de règlement des différends prévu dans l’AAM proposé.
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