Décision de télécom CRTC 2008-17
Ottawa, le 3 mars 2008
Politique de réglementation
Cadre de réglementation révisé concernant les services de gros et la définition de service essentiel
Référence : 8663-C12-200614439
Dans la présente décision, le Conseil révise la définition de service essentiel et remplace de ce fait la définition énoncée dans la décision de télécom 97-8.
Le Conseil établit en outre la nouvelle structure du cadre de réglementation concernant les services de gros et justifie la répartition des services clés dans chacune des six nouvelles catégories de services. Ensuite, il établit notamment les principes de tarification relatifs à chacune de ces catégories et les périodes d'élimination graduelle des services non essentiels qui doivent être éliminés.
Finalement, le Conseil établit qu'il examinera la répartition de l'ensemble des autres services de gros obligatoires dans six ans à partir de la date de la présente décision.
Introduction
1. Dans l'avis public de télécom 2006-14, le Conseil a amorcé une instance visant à examiner son cadre de réglementation concernant les services de gros, ce qui supposait plus précisément d'examiner la définition de service essentiel ainsi que les principes de tarification applicables à l'ensemble des services de gros obligatoires. Le Conseil a fait remarquer qu'il entendait appliquer ses décisions aux services de gros fournis par les entreprises de services locaux concurrentes (ESLC), ainsi qu'à l'ensemble des services de gros fournis par les grandes entreprises de services locaux titulaires (ESLT), Télébec, Société en commandite (Télébec) et les entreprises de câblodistribution1.
2. Le Conseil a reçu des observations écrites concernant l'avis public, et de nombreuses parties se sont exprimées oralement à l'audience publique d'une durée de 11 jours qui a débuté le 9 octobre 2007. Les parties concernées comprenaient les ESLT et certains de leurs concurrents nationaux ou locaux des marchés résidentiels et d'affaires ainsi que des représentants d'organismes de défense des consommateurs. Le dossier de la présente instance est affiché sur le site Web du Conseil à l'adresse www.crtc.gc.ca sous l'onglet Instances publiques.
3. Le Conseil a défini les quatre questions principales suivantes à traiter dans ses décisions :
- Quelle est la définition appropriée d'un service essentiel et comment devrait-on l'appliquer?
- Quel devrait être le cadre de réglementation concernant les services de gros à partir de maintenant?
- À quel moment devrait-on réaliser les prochains examens concernant les services essentiels et le cadre de réglementation concernant les services de gros?
- Les conclusions de la présente décision sont-elles conformes aux instructions?
4. En vue de rendre sa décision dans le cadre de la présente instance, le Conseil s'est appuyé sur les objectifs de la politique énoncés à l'article 7 de la Loi sur les télécommunications (la Loi) et sur le Décret donnant au CRTC des instructions relativement à la mise en oeuvre de la politique canadienne de télécommunication, C.P. 2006-1534 (les instructions), publié le 14 décembre 2006 par la gouverneure en conseil.
I. Quelle est la définition appropriée d'un service essentiel et comment devrait-on l'appliquer?
5. Dans la décision de télécom 97-8, qui établit un cadre relatif à la concurrence sur le plan des services locaux, le Conseil a conclu que, pour être essentiel, une installation, une fonction ou un service doit être contrôlé en régime de monopole, une ESLC doit en avoir besoin comme intrant pour fournir des services et une ESLC ne peut pas les reproduire économiquement ou techniquement.
6. Dans l'avis public de télécom 2006-14, le Conseil a sollicité des observations pour déterminer s'il devrait adopter la définition d'installation essentielle proposée dans la version préliminaire du Bulletin d'information sur les dispositions en matière d'abus de position dominante dans l'industrie des télécommunications (la version préliminaire du Bulletin) du 26 septembre 2006 publiée par le Bureau de la concurrence (le Bureau). Dans la version préliminaire du Bulletin, le Bureau présente les dispositions en vertu desquelles le refus d'accès à une installation essentielle (services de gros) dans le marché en amont représenterait un abus de position dominante aux termes de l'article 79 de la Loi sur la concurrence. Dans la version préliminaire du Bulletin, on définit une installation essentielle comme « un intrant qui procure à l'entreprise qui en a le contrôle le pouvoir de diminuer ou d'empêcher la concurrence dans un marché en aval pertinent ».
7. Le Conseil a demandé aux parties qui refusaient cette définition de service essentiel de proposer une définition qu'elles jugeaient appropriée, ainsi que la meilleure façon d'appliquer cette définition en vue d'atteindre les objectifs de la politique énoncés dans la Loi.
Positions des parties
Bureau de la concurrence
8. À toutes les étapes de la présente instance, le Bureau a maintenu qu'il est essentiel d'évaluer les effets de la concurrence sur le marché en aval (de détail) au moment d'évaluer le caractère essentiel d'une installation.
9. Dans sa preuve initiale, le Bureau a apporté des précisions à sa définition d'« installation essentielle » et il a présenté en détail un certain nombre de conditions auxquelles une installation doit répondre en vue d'être qualifiée d'essentielle.
10. Pendant sa comparution, le Bureau a procédé à la révision de la définition qu'il a proposée en vue de l'appliquer de façon rétroactive pour recenser les conditions en vertu desquelles le Conseil devrait ou non retirer l'accès obligatoire aux installations existantes.
11. Selon la définition rétroactive du Bureau, le Conseil jugerait qu'une installation, une fonction ou un service est essentiel s'il respecte l'ensemble des conditions suivantes :
- L'entreprise qui a le contrôle de l'installation en question est une entreprise intégrée verticalement qui occupe une position dominante dans deux marchés. Le premier marché pertinent est le marché en amont pour l'installation et le deuxième est le marché en aval, où l'installation est un intrant. Pour conclure qu'il y a effectivement domination du marché en amont, il faut qu'il ne soit ni pratique ni possible pour les concurrents de reproduire l'installation en question.
- Le fait de retirer l'accès obligatoire à l'installation est susceptible de favoriser la sortie des concurrents, ou la diminution des services dans le marché en aval.
- Une telle sortie des concurrents ou une telle réduction des services est susceptible de provoquer une réduction importante de la concurrence dans le marché en aval.
Autres parties
12. Bell Aliant Communications régionales, société en commandite, Bell Canada, Saskatchewan Telecommunications et Télébec (Bell Canada et autres) ont appuyé l'approche fondée sur la loi sur la concurrence présentée par le Bureau. Plus précisément, ils ont notamment convenu que le caractère essentiel d'une installation dans le marché en amont dépend du besoin ou non de remédier à un problème de position dominante sur le marché en aval.
13. La plupart des autres parties ont proposé leur propre définition. Malgré certaines variations relatives à leur libellé et à leur interprétation, ces définitions comportaient généralement trois conditions communes :
- L'installation est nécessaire comme intrant pour fournir des services dans le marché en aval;
- Les conditions de l'offre dans le marché en amont et la capacité de l'entreprise en position dominante d'avoir un effet sur la concurrence dans le marché en aval;
- La mesure dans laquelle il est possible de reproduire l'installation.
14. La majorité des définitions proposées par les autres parties comprenaient une condition selon laquelle l'installation doit être nécessaire comme intrant pour offrir des services sur le marché en aval, mais il y avait des différences concernant le libellé de la condition. Plus précisément, les parties avaient des points de vue divergents à savoir si l'on devait parler « d'un concurrent » ou, de manière plus générale « des concurrents ». Certaines parties, y compris le Bureau, ont remis en question l'utilité de cette condition, en soutenant que toute analyse du pouvoir de marché ou de reproductibilité permettrait de confirmer cette condition, c.-à-d. l'installation d'un ESLT n'est essentielle comme intrant que s'il est impossible de la reproduire.
15. Dans l'ensemble, toutes les parties ont convenu qu'on devait tenir compte, dans la définition du caractère essentiel d'une installation, de la mesure dans laquelle les conditions de l'offre de l'installation dans le marché en amont pouvaient être utilisées pour faire varier la concurrence dans un marché en aval.
16. Contrairement aux autres parties, la Société TELUS Communications (la STC) a fait valoir que l'entreprise dominante doit posséder un contrôle monopolistique de l'offre de l'installation, abstraction faite de l'existence d'une autre offre de moindre importance. La STC a soutenu que la définition du Conseil présentée dans la décision de télécom 97-8 est parfaitement conforme à la doctrine en matière d'installations essentielles parce qu'elle tient compte d'un empêchement de la concurrence découlant du contrôle monopolistique d'une installation par une entreprise. Selon la STC, en fonction de cette doctrine, la position dominante sur le marché et la réduction de la concurrence sont des considérations non pertinentes.
17. De manière quasi unanime, les parties ont convenu que la reproductibilité est un élément nécessaire du caractère essentiel d'une installation, et qu'une analyse de reproductibilité devrait permettre d'évaluer la mesure dans laquelle les concurrents peuvent aménager leurs propres installations ou utiliser celles d'un autre fournisseur dans un marché donné.
18. Les parties ont convenu que la reproductibilité dépend principalement des obstacles à l'entrée des concurrents dans un marché et des difficultés relatives à l'aménagement de leurs propres installations ou à l'utilisation des installations d'un autre fournisseur. Les exemples cités par toutes les parties comprenaient les obstacles de nature économique comme la capacité de récupérer les coûts, les périodes de remboursement et la rapidité de la récupération des coûts, les coûts irrécupérables, les économies d'échelle et de gamme ainsi que les avantages en matière de coûts de l'entreprise titulaire; les obstacles de nature technique comme la compatibilité entre les réseaux et les technologies utilisées ainsi que l'accès aux structures de soutien; et les obstacles de nature juridique comme l'accès aux immeubles et aux servitudes municipales. La plupart des parties ont soutenu que la capacité économique concerne les coûts relatifs à l'obtention de la fonctionnalité en comparaison aux sources possibles de revenus relatifs à cette même fonctionnalité.
19. La STC a proposé que le Conseil mesure la reproductibilité en fonction d'un « concurrent raisonnablement efficace », concept utilisé aux États-Unis par la Federal Communications Commission (FCC) dans son cadre en matière de dégroupement des services de gros2. Une telle norme viserait à évaluer s'il est faisable de reproduire une installation pour un concurrent raisonnablement efficace plutôt qu'à évaluer si un concurrent précis peut ou non reproduire une installation.
Résultats de l'analyse du Conseil
Bureau de la concurrence
i) Transition vers une norme fondée sur la position dominante sur le marché
20. Le Conseil estime qu'une différence importante par rapport à la définition énoncée dans la décision de télécom 97-8 est que la définition du Bureau présentée ci-dessus est fondée sur la position dominante ou la position dominante sur le marché3, au lieu d'être fondée sur le contrôle monopolistique. Le Conseil est d'accord avec cette modification. Il estime qu'exiger la preuve du contrôle monopolistique en vue d'évaluer le caractère essentiel d'une installation serait indûment sévère, ne serait pas conforme aux conditions actuelles du marché et risquerait de diminuer sensiblement la concurrence dans de nombreux marchés ou de l'empêcher.
ii) Position dominante sur le marché en aval
21. Dans sa définition rétroactive, le Bureau a ajouté la condition relative à la position dominante sur le marché en aval. Bien que le Conseil convienne qu'il est pertinent d'évaluer les effets sur la concurrence dans le marché en aval en vue de juger du caractère essentiel d'une installation, l'imposition d'une condition relative à la position dominante dans le marché en aval représenterait un problème étant donné que dans le Décret modifiant la décision Télécom CRTC 2006-15, C.P. 2007-532, 4 avril 2007 (le décret C.P. 2007-532), la gouverneure en conseil a défini qu'un fournisseur de services de télécommunication (FST) doté d'installations est un fournisseur qui « fournit des services sur le marché pertinent au moyen de ses propres installations et services ou en combinant ceux-ci à ceux loués d'autres fournisseurs ». Par conséquent, le Conseil a accordé l'abstention locale sur les marchés résidentiels et d'affaires fondée sur l'accès obligatoire à certaines installations de gros des ESLT à des tarifs prescrits4.
22. Le Conseil est conscient des préoccupations du Bureau relatives aux risques que représente la substitution des règlements en matière d'installations de détail aux règlements en matière d'installations de gros en vue de remédier à un problème dans le marché en aval. Toutefois, le Conseil estime que le retrait de l'accès obligatoire aux installations lorsque l'abstention est fondée sur l'accès aux installations pourrait menacer sérieusement la concurrence en matière de services de détail dans de nombreux marchés faisant l'objet d'une abstention. Par conséquent, le Conseil estime que la position dominante sur le marché en aval ne devrait pas faire partie de la définition de service essentiel.
iii) Effets sur la concurrence dans le marché en aval
23. Le Conseil remarque que le Bureau a traité la question relative aux effets sur la concurrence dans le marché en aval en deux étapes. Dans un premier temps, le retrait de l'accès obligatoire à l'installation forcerait probablement les concurrents à sortir du marché en aval ou réduirait le nombre de services dans le marché en aval. Dans un deuxième temps, un tel exode des concurrents ou une telle réduction des services résulterait probablement en une réduction importante de la concurrence dans le marché en aval.
24. Comme il a été mentionné, le Conseil convient de la nécessité d'établir un lien entre le caractère essentiel des installations dans le marché en amont et les effets qu'un tel accès obligatoire aura sur la concurrence dans le marché en aval. En résumé, si les avantages concurrentiels relatifs au maintien de l'accès obligatoire sont minimes, l'installation n'est pas susceptible d'être essentielle à la concurrence.
25. Le Conseil estime que la définition originale proposée par le Bureau dans la version préliminaire du Bulletin, qui fait uniquement référence à la capacité d'une entreprise de réduire ou d'empêcher la concurrence dans un marché en aval pertinent, tiendrait compte des effets de la concurrence sur le marché en aval. La troisième condition de la définition rétroactive du Bureau tient également compte de cet élément, mais elle est davantage axée sur la réduction de la concurrence en excluant la notion de prévention de la concurrence.
26. Par conséquent, dans le cas de l'approche en deux étapes du Bureau, le Conseil estime qu'il est approprié de combiner les deux étapes en une seule condition parce qu'en réalité, ces deux étapes concernent le même enjeu, soit les effets de la concurrence sur le marché en aval.
iv) Reproductibilité
27. La définition du Bureau et la définition présentée dans la décision de télécom 97-8 comprennent une condition relative à la capacité des concurrents de reproduire l'installation en question. Le Conseil convient que cet aspect est un élément clé de la définition de service essentiel.
Autres parties
i) L'installation est nécessaire comme intrant
28. En ce qui a trait à l'utilité d'une telle condition, le Conseil considère que, bien qu'elle soit comprise de manière implicite dans les autres conditions, cette condition fournirait néanmoins des renseignements contextuels importants relatifs à l'évaluation du caractère essentiel en indiquant dans quels marchés en aval l'installation est nécessaire.
29. Le Conseil estime également que l'accès à une installation doit être exigé par « les concurrents » en général, et non pas par un seul concurrent dans une circonstance précise et dont la stratégie d'entreprise pourrait favoriser le recours à des composants dégroupés.
ii) Conditions de l'offre dans le marché en amont et effets sur la concurrence dans un marché en aval
30. En ce qui a trait au débat entre la position dominante sur le marché et le contrôle monopolistique, comme il a déjà été mentionné, le Conseil estime que la position dominante sur le marché en amont représente la mesure appropriée.
31. Le Conseil considère toutefois que l'unique fait d'exercer une position dominante sur une installation dans un marché en amont ne constitue pas en soi une condition suffisante qui permet d'évaluer le caractère essentiel d'une installation. Par conséquent, le Conseil estime que les effets négatifs potentiels sur la concurrence, c.-à-d. le fait de réduire la concurrence ou de l'empêcher, dans le marché en aval en raison de toute position dominante sur un marché en amont constitue un élément clé de l'évaluation du caractère essentiel d'une installation.
32. En outre, le Conseil estime que toute diminution prévue de la concurrence ou tout empêchement à son implantation doit être de nature sensible. Si la diminution ou l'empêchement n'est pas jugé « importante », on risque qu'une installation puisse être jugée essentielle par erreur alors que les répercussions de l'accès obligatoire dans le marché en aval sont susceptibles d'être négligeables.
iii) Reproductibilité
33. Le Conseil estime que la capacité des concurrents de reproduire eux-mêmes la fonctionnalité d'une installation ou de l'obtenir d'un tiers représente un élément clé de l'évaluation du caractère essentiel. En outre, le Conseil fait remarquer que la reproductibilité constitue un élément important de l'évaluation de la position dominante sur un marché en amont; par conséquent, ces deux éléments sont inextricablement liés.
34. En ce qui concerne le libellé approprié de cette condition, le Conseil estime que le libellé du Bureau est approprié : « il n'est pas pratique ni faisable pour les concurrents de reproduire l'installation en question ». Ce libellé est neutre tant sur le plan technologique que sur le plan de la concurrence, et il permet de tenir compte de manière appropriée de tous les obstacles qui se présentent aux concurrents.
35. En outre, le Conseil estime qu'étant donné que la reproduction de la fonctionnalité, non seulement de l'installation elle-même, est un élément essentiel dont on doit tenir compte, cette condition doit également faire référence à la fonctionnalité de l'installation.
Définition révisée du Conseil
36. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil remplace la définition énoncée dans la décision de télécom 97-8. Le Conseil établit que pour être jugé essentiel, une installation, une fonction ou un service5 doit satisfaire à l'ensemble des conditions suivantes :
- L'installation est nécessaire comme intrant pour que les concurrents puissent offrir des services de télécommunication dans un marché pertinent en aval;
- L'installation est contrôlée par une entreprise6 qui occupe une position dominante sur le marché en amont de telle sorte que le retrait de l'accès obligatoire à l'installation serait susceptible de réduire ou d'empêcher sensiblement la concurrence dans le marché pertinent en aval;
- Il n'est ni pratique ni faisable pour les concurrents de reproduire la fonctionnalité de l'installation.
37. En ce qui a trait aux éventuelles demandes d'évaluation du caractère essentiel d'un service non obligatoire, la définition sera la suivante :
Pour être jugé essentiel, une installation, une fonction ou un service doit satisfaire à l'ensemble des conditions suivantes :
- L'installation est nécessaire comme intrant pour que les concurrents puissent offrir des services de télécommunication dans un marché pertinent en aval;
- L'installation est contrôlée par une entreprise6 qui occupe une position dominante sur le marché sur le marché en amont, de sorte que le refus de donner accès à l'installation serait susceptible de réduire ou d'empêcher sensiblement la concurrence dans le marché pertinent en aval;
- Il n'est ni pratique ni faisable pour les concurrents de reproduire la fonctionnalité de l'installation.
Application de la définition
38. Au moment d'appliquer la définition de service essentiel, le Conseil se demande si une entreprise peut utiliser sa position dominante sur l'approvisionnement d'une installation dans le marché en amont afin de réduire ou d'empêcher sensiblement la concurrence dans le marché en aval. En vue de mener son évaluation, le Conseil estime que la position dominante sur le marché en amont et la reproductibilité doivent être évalués simultanément. En d'autres termes, s'il est pratique et faisable pour les concurrents de reproduire une installation, il est peu probable que l'entreprise puisse utiliser sa position dominante sur le marché en amont pour réduire sensiblement la concurrence dans le marché en aval ou l'empêcher. Selon le Conseil, le caractère reproductible d'une installation doit être suffisamment important pour limiter la capacité d'une ESLT d'exercer toute position dominante sur un marché en amont en vue d'influencer la concurrence dans le marché en aval.
39. Le Conseil estime que l'application du concept de concurrent raisonnablement efficace à sa définition du caractère essentiel soulignerait de manière appropriée que le cadre révisé concernant les services de gros a été élaboré afin de protéger la concurrence et le processus concurrentiel, et non chaque concurrent.
40. Au moment d'appliquer le concept de concurrent raisonnablement efficace associé à la reproductibilité, le Conseil tiendra compte des conditions du marché en vertu desquelles d'autres entreprises sont entrées dans le marché, ainsi que des conditions actuelles du marché auxquelles sont exposées les jeunes entreprises et les entreprises en croissance. Par exemple, le Conseil estime qu'une ESLT ou une entreprise de câblodistribution en exploitation dans un territoire ne représenterait pas nécessairement de manière appropriée un concurrent raisonnablement efficace dans un marché résidentiel étant donné que son réseau a été construit alors qu'elle exerçait un monopole. Dans ce cas, le Conseil se demanderait si une autre entreprise concurrente, agissant de manière raisonnablement efficace, serait en mesure d'utiliser ses propres installations ou l'installation d'un tiers dans les conditions actuelles du marché.
41. Selon le Conseil, le caractère pratique de la reproductibilité concerne principalement la capacité économique des concurrents de reproduire les installations ou d'utiliser les installations d'un tiers dans le marché en amont. Le Conseil estime qu'il est pratique de reproduire l'installation si un concurrent raisonnablement efficace peut espérer en retirer des revenus suffisants pour justifier l'investissement relatif à la construction d'une installation donnée. Par conséquent, le Conseil estime qu'il doit tenir compte de l'ensemble des revenus et des coûts potentiels dans l'évaluation de la reproductibilité.
42. Selon le Conseil, la possibilité de reproduire une installation dépend principalement des obstacles juridiques, techniques et des autres obstacles de nature non économique importants qui pourraient empêcher un concurrent raisonnablement efficace de reproduire l'installation ou d'utiliser l'installation d'un tiers dans un marché en amont, dans un délai raisonnable.
43. Le Conseil estime que l'évaluation de la reproductibilité est comparable au fait de définir le marché pertinent pour une installation de gros, en ce sens que les deux exercices exigent la détermination de solutions de rechange, existantes ou potentielles.
44. Le Conseil fait remarquer qu'il existe effectivement trois façons d'appliquer le critère de reproductibilité, soit par marché, par représentant ou par service.
45. Le Conseil fait remarquer que le dossier de la présente instance ne contient pas les renseignements nécessaires pour prendre des décisions en fonction du marché pour chaque installation et service étudiés. Le Conseil signale également qu'une approche en fonction des marchés nécessiterait un examen de chaque marché géographique pertinent pour chacun des services de gros examiné dans la présente instance, de sorte qu'une série d'instances et de procédures de suivi serait nécessaire pour réaliser ces évaluations. Le Conseil estime que cette approche serait une forme de réglementation inefficace et inutilement intrusive.
46. Le Conseil craint qu'un modèle de représentation nécessite d'importantes démarches administratives de la part des participants de l'industrie, dont la collecte de renseignements, les exigences en matière d'établissement de rapports ainsi que des processus additionnels d'établissement de seuils de représentation convenables, ce qui entraînerait d'autres retards et incertitudes en matière de réglementation. Les gains nets sur le plan de l'efficacité administrative seraient donc minimes.
47. Afin de réduire au minimum les exigences réglementaires, le Conseil a tiré ses conclusions quant aux aspects essentiels en fonction des services, puis il les a appliquées à l'échelle nationale. Le Conseil considère que cette approche suppose une intrusion et des formalités administratives minimales, et offre le plus haut degré de certitude sur le plan réglementaire comparativement aux autres approches.
II. Quel devrait être le cadre de réglementation concernant les services de gros à partir de maintenant?
48. Dans l'application de sa définition révisée d'un service essentiel, le Conseil a classé les services de gros actuels en six catégories : essentiel, essentiel conditionnel, non essentiel prescrit et conditionnel, bien public, interconnexion et non essentiel assujetti à l'élimination graduelle7. La description de chacune de ces catégories figure dans les sections pertinentes ci-dessous.
49. Durant la présente instance, les parties se sont prononcées sur la pertinence de cette classification des services et sur la catégorie à laquelle chacun des services de gros existant devrait faire partie. Concernant les services considérés comme non essentiels pouvant être éliminés graduellement, les parties ont également donné leur avis sur la période d'élimination graduelle appropriée pour chaque service.
50. Dans la présente partie de la décision, le Conseil justifie l'attribution des services clés à chacune des six catégories de services. Il se penche ensuite sur la mise en oeuvre d'une restriction sur l'utilisation, les principes de tarification de la catégorie de service, la période de retrait graduel des services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle et l'abstention potentielle de ces services à la fin de la période d'élimination graduelle.
51. L'annexe de la présente décision contient la liste complète des services de gros par catégorie, déterminés par le Conseil. Celui-ci fait remarquer que cette liste est actuelle en date du 15 janvier 2008 et qu'elle comprend les services aux concurrents approuvés par le Conseil après la parution de l'avis public de télécom 2006-14. Les services clés sont décrits expressément dans les sections ci-dessous. Le Conseil signale que, pour de nombreux autres services, les parties se sont entendues sur la question d'établir si leur mandat devrait être poursuivi.
Catégories de services
a) Essentiel
52. La catégorie des services essentiels comprend les services qui entrent dans la définition révisée d'un service essentiel établie par le Conseil.
Renseignements tirés des inscriptions d'abonnés
53. Les renseignements tirés des inscriptions d'abonnés sont accessibles au moyen de deux services :
- Le service de fichier d'échange d'inscriptions ordinaires (FEIO) offre un ensemble complet de renseignements de base non confidentiels tirés des inscriptions d'abonnés pour une entreprise de services locaux (ESL) lisibles par ordinateur;
- Le service de fichiers répertoires (SFR) fournit les mêmes renseignements que le service de FEIO, plus des renseignements sur les inscriptions complexes comme l'information sur les sous-inscriptions d'entreprises ou de l'information complémentaire sur les inscriptions pour une ligne principale de résidence.
54. Toutes les parties ont convenu que le service de FEIO constitue un service essentiel. La plupart des parties étaient d'avis que le SFR représente également un service essentiel.
55. Le Conseil fait remarquer que les renseignements tirés des inscriptions d'abonnés non confidentiels sont nécessaires pour la publication des annuaires et la fourniture de services d'assistance-annuaire. Le Conseil signale également que ces renseignements ne sont accessibles que de l'ESL qui offre des services locaux à ses clients, de sorte qu'ils ne peuvent pratiquement pas être reproduits par les concurrents.
56. En conséquence, le Conseil estime que le service de FEIO actuel et le SFR doivent être considérés comme des services essentiels.
b) Essentiel conditionnel
57. Les services de la catégorie des services essentiels conditionnels sont ceux qui, d'après le Conseil, répondent aux critères du service essentiel de façon conditionnelle. Le Conseil estime que toute modification aux conditions du marché pourrait avoir comme conséquence que certains de ces services, sinon tous, ne seraient plus considérés comme essentiels. La classification de ces services sera maintenue jusqu'à ce qu'il soit prouvé dans une demande que d'autres services de gros équivalents sont suffisamment présents pour que le retrait de l'accès obligatoire n'entraîne pas de diminution importante de la concurrence sur le marché en aval pertinent ou un empêchement à son implantation.
Installations de lignes locales dégroupées et services connexes
58. Bell Canada a indiqué que 99 % des lignes locales dégroupées (LLD) utilisées dans son territoire d'exploitation sont de type A. Les tarifs de Bell Canada indiquent qu'une LLD fournit la voie de transmission entre les emplacements de l'utilisateur final et le central de l'ESLT (central de desserte). Elle permet la transmission d'un signal de qualité téléphonique d'une largeur de bande utilisable d'environ 3 kHz (bande téléphonique) et d'une messagerie de données utilisant une largeur de bande disponible supérieure à la largeur de bande téléphonique (bande à haute fréquence) qui permet le service d'accès Internet haute vitesse. Le Conseil estime que l'installation et l'utilisation de LLD par Bell Canada pour fournir des services téléphoniques et Internet haute vitesse sont représentatives de toutes les principales ESLT.
59. Bell Canada et autres et la STC ont indiqué que le marché en aval pour les LLD est très concurrentiel et que la fonctionnalité de la LLD a été reproduite par les entreprises de câblodistribution. Bell Canada et autres, la STC et certaines autres parties ont indiqué que les LLD ne sont pas essentielles aux concurrents car les ESLT n'occupent pas une position dominante sur le marché en aval. Bell Canada et autres ont également indiqué que la demande pour des LLD diminue en Ontario et au Québec, surtout là où le service de téléphonie par câble a été lancé sur le marché en aval.
60. Certaines parties divergent fortement sur la question de savoir si un régime de duopole dans le cas des services filaires de détail et, plus particulièrement, des services filaires locaux de détail permet une concurrence suffisante pour satisfaire aux objectifs de la politique énoncés à l'article 7 de la Loi.
61. Le Conseil remarque que, conformément à la décision de télécom 2006-15, modifiée par le décret C.P. 2007-532 (décision de télécom 2006-15 modifiée), il a rendu et continue de rendre des décisions d'abstention concernant les services locaux en fonction de la présence de fournisseurs indépendants de services de télécommunication dotés d'installations qui sont en mesure de desservir au moins 75 % du nombre de lignes du service local que l'ESLT peut desservir. Le Conseil fait également remarquer que, comme il est indiqué dans la décision de télécom 2006-15 modifiée, un fournisseur de services de télécommunication doté d'installations est un fournisseur qui fournit des services sur le marché pertinent au moyen de ses propres installations et services ou en les combinant à ceux loués d'autres fournisseurs.
62. Le Conseil fait remarquer que, d'après les instructions, la présente instance devrait avoir lieu dans le but d'accroître les incitatifs pour l'innovation, l'investissement et la construction relativement aux installations de réseaux de télécommunication concurrentielles. Les instructions prévoient également que, dans le cadre du présent examen, le Conseil devrait tenir compte des principes de neutralité sur les plans de la technologie et de la concurrence, de la capacité des entreprises titulaires d'occuper une position dominante sur les marchés de gros et de détail en l'absence de l'obligation de donner accès aux services de gros, et des obstacles auxquels se heurtent tant les nouveaux FST, que ceux déjà établis, lorsqu'ils souhaitent mettre sur pied des installations de réseaux concurrentielles. Le Conseil fait remarquer qu'aucun témoin expert ou partie n'a présenté de preuve ou d'argument voulant que la concurrence fondée sur les installations de bout en bout soit un objectif atteignable.
63. Le Conseil reconnaît que la reproduction de la fonctionnalité des LLD par les entreprises de câblodistribution peut être vue comme une contrainte relative à la position dominante sur le marché en amont des ESLT. Le Conseil signale toutefois que, même si les entreprises de câblodistribution sont des concurrentes des ESLT sur le marché de la téléphonie classique au détail, il n'y a aucune solution de rechange de gros pour les LLD des ESLT. Le Conseil estime qu'aucune preuve dans la présente instance n'a démontré qu'un concurrent raisonnablement efficace ne possède de solution de rechange viable aux LLD des ESLT pour offrir des services filaires locaux et résidentiels à ses clients.
64. Le Conseil estime que les concurrents nouveaux et existants, autres que les entreprises de câblodistribution, font face à des obstacles importants dans le développement d'installations de réseaux équivalentes aux LLD des ESLT. Le Conseil considère également qu'en raison de ces obstacles, qui comprennent les coûts de construction relatifs aux revenus potentiels et le besoin de négocier des ententes municipales et autres, il ne serait pas pratique ni faisable pour ces concurrents de reproduire la fonctionnalité des LLD.
65. Le Conseil estime qu'en raison des obstacles qui se présentent aux concurrents autres que les entreprises de câblodistribution, le retrait de l'accès obligatoire aux LLD des ESLT entraînerait probablement une diminution importante de la concurrence sur le marché de la téléphonie classique de détail ou empêcherait son implantation. Le Conseil reconnaît qu'à l'avenir, les progrès technologiques et l'évolution de l'industrie pourraient éventuellement offrir une solution de rechange de gros aux LLD des ESLT.
66. En conséquence, le Conseil estime que les LLD des ESLT doivent être classées dans les services essentiels conditionnels. Cette classification sera maintenue jusqu'à ce qu'il soit prouvé que des solutions de rechange de gros ayant un fonctionnement équivalent aux LLD des ESLT sont suffisamment présentes pour que le retrait de l'accès obligatoire n'entraîne pas vraisemblablement de diminution importante de la concurrence sur le marché des services locaux ou d'empêchement à son implantation.
Installations d'accès au réseau numérique propre aux concurrents DS-0 et DS-1
67. Bell Canada et autres ont fait valoir que les installations d'accès au réseau numérique propre aux concurrents (RNC) DS-0 et DS-1 (installations d'accès au RNC basse vitesse) offrent aux concurrents une installation d'accès numérique ainsi qu'un lien entre les emplacements d'un utilisateur final ou le point de présence d'un concurrent et un central de desserte d'une ESLT. Le Conseil estime que la description que Bell Canada donne de ces installations est représentative de celles de toutes les grandes ESLT.
68. Bell Canada et autres ainsi que la STC ont fait valoir que le marché en aval relatif aux installations RNC basse vitesse est concurrentiel et que de nombreuses possibilités s'offrent aux concurrents, y compris les installations de fibre optique, les installations du câble, les installations sans fil et les services de détail des ESLT. Rogers Communications Inc. (RCI) a fait valoir que le développement et le déploiement de la fonctionnalité d'accès DS-0 ou DS-1 par câble coaxial auront lieu dans environ deux ans.
69. Étant donné que les installations de cuivre des ESLT se trouvent presque partout, le Conseil n'estime pas que les installations de fibre optique actuellement déployées par les concurrents constituent une solution de rechange suffisante aux installations de cuivre des ESLT utilisées pour offrir des services d'accès numérique basse vitesse à leurs clients de détail.
70. Le Conseil estime que les installations du câble n'offrent pas actuellement une solution de rechange de gros aux installations d'accès au RNC basse vitesse des ESLT. De plus, le Conseil fait remarquer qu'aucune preuve au dossier de l'instance ne confirme que les installations sans fil constituent une solution de rechange de gros par rapport aux installations d'accès au RNC basse vitesse. En outre, le Conseil n'estime pas que les services de détail des ESLT constituent une solution de rechange économique aux installations d'accès au RNC basse vitesse de gros destinées aux concurrents. Par conséquent, le Conseil est d'avis que le retrait de l'accès obligatoire aux installations d'accès au RNC basse vitesse des ESLT serait susceptible de réduire ou d'empêcher sensiblement la concurrence sur le marché des services de détail pertinent.
71. Le Conseil estime que les FST, nouveaux et existants, se heurtent à d'importants obstacles pour mettre sur pied des installations d'accès au réseau concurrentielles équivalentes aux installations d'accès au RNC basse vitesse des ESLT. Le Conseil estime également qu'il ne serait pas pratique ou faisable pour les concurrents de reproduire la fonctionnalité de ces installations. Le Conseil reconnaît qu'à l'avenir, les progrès technologiques et l'évolution de l'industrie pourraient éventuellement offrir une solution de rechange de gros aux installations d'accès au RNC basse vitesse des ESLT.
72. Par conséquent, et pour les mêmes raisons que celles énoncées relativement aux LLD, le Conseil conclut que les installations d'accès au RNC basse vitesse, y compris les liaisons connexes, doivent être classées comme essentielles conditionnelles. Cette classification sera maintenue jusqu'à ce qu'il soit prouvé que des solutions de rechange de gros offrant des fonctionnalités équivalentes à celles des installations d'accès au RNC basse vitesse des ESLT sont suffisamment présentes pour que le retrait de l'accès obligatoire ne contribue pas vraisemblablement à réduire ou à empêcher sensiblement la concurrence sur le marché des services locaux.
Service d'accès LNPA
73. Comme le prévoient les tarifs des ESLT, le service d'accès par ligne numérique à paires asymétriques (LNPA) est offert aux centraux des ESLT. Il offre une connexion aux emplacements des clients à l'aide d'une largeur de bande à haute fréquence supérieure à la bande des fréquences téléphoniques sur les lignes de cuivre. Le service d'accès LNPA permet d'assurer le service d'accès Internet haute vitesse. Grâce au service d'accès LNPA, les concurrents peuvent soit utiliser leur propre équipement de ligne d'abonné numérique (LAN) avec les LLD, soit utiliser l'équipement LAN fourni par les ESLT.
74. Cependant, le Conseil fait remarquer que, dans de nombreux cas, les réseaux de distribution des ESLT comprennent l'approvisionnement d'installations de fibre optique depuis leurs centraux vers des emplacements distants et d'installations de cuivre depuis des emplacements distants vers les locaux des utilisateurs finals. Dans de tels cas, afin d'offrir un service d'accès Internet haute vitesse aux clients, les ESLT installent l'équipement LAN à chaque emplacement distant dans le but d'accéder à la bande à haute fréquence de la partie en cuivre de la LLD. Le Conseil fait remarquer que le service d'accès LNPA n'offre pas aux concurrents l'accès à la partie en cuivre de la LLD pour les clients desservis à partir d'emplacements distants.
75. Le Conseil estime que l'aspect du service d'accès LNPA lié à l'utilisation de l'équipement LAN des ESLT par les concurrents doit offrir à ces derniers la possibilité de proposer des services d'accès Internet haute vitesse de détail à tous les utilisateurs finals desservis à partir d'un central, y compris à ceux qui sont desservis à partir d'emplacements distants.
76. Le Conseil estime que, comme dans le cas des LLD, il n'existe pas de solutions de rechange de gros suffisantes aux services d'accès LNPA des ESLT. Le Conseil estime également qu'en l'absence de solutions de rechange de gros, le retrait de l'accès obligatoire aux services d'accès LNPA des ESLT serait susceptible de réduire ou d'empêcher la concurrence sur le marché des services d'accès Internet haute vitesse de détail, ce qui ne serait pas conforme aux objectifs de la politique et aux instructions. En outre, le Conseil reconnaît qu'à l'avenir, les progrès technologiques et l'évolution de l'industrie pourraient éventuellement offrir une solution de rechange de gros aux services d'accès LNPA des ESLT.
77. Par conséquent, et pour les mêmes raisons que celles énoncées relativement aux LLD, le Conseil conclut que le service d'accès LNPA doit être classé comme un service essentiel conditionnel. Cette classification sera maintenue jusqu'à ce qu'il soit démontré que des solutions de rechange de gros ayant un fonctionnement équivalent aux services d'accès LNPA des ESLT sont suffisamment présentes pour que le retrait de l'accès obligatoire ne contribue pas vraisemblablement à réduire ou à empêcher sensiblement la concurrence dans le marché des services d'accès Internet haute vitesse de détail.
c) Services non essentiels obligatoires et conditionnels
78. Les services appartenant à la catégorie des services non essentiels obligatoires et conditionnels ne répondent pas aux exigences relatives aux services essentiels selon le Conseil, mais demeurent obligatoires pour les raisons mentionnées ci-dessous. Le Conseil estime que certaines modifications à venir des conditions du marché pourraient avoir comme conséquence que certains de ces services, sinon tous, ne devraient plus continuer d'être obligatoires. La classification de ces services sera maintenue jusqu'à ce qu'il soit prouvé dans une demande que les raisons qui rendaient ces services obligatoires ne tiennent plus.
Co-implantation et services de liaison connexes
79. Bell Canada et autres ont fait valoir que les services de co-implantation sont des services auxiliaires et que leur classification devrait correspondre au service offert aux concurrents pertinent qu'ils soutiennent. Bell Canada et autres ont proposé que le Conseil adopte un principe d'utilisation limitée afin que le recours aux services de co-implantation, pour quelque raison que ce soit autre que l'accès à des services de gros obligatoires, soit uniquement autorisé conformément à des modalités négociées entre l'ESLT et le concurrent.
80. Le Conseil estime que la mise en oeuvre d'un principe d'utilisation limitée pour la co-implantation et les services connexes des ESLT, comme le proposent Bell Canada et autres, ne serait pas appropriée à la fois parce que de tels services sont requis pour de nombreux autres services obligatoires établis par le Conseil dans la présente décision, de même que pour les raisons mentionnées dans la section relative à la restriction de l'utilisation ci-dessous.
81. Le Conseil fait remarquer que la co-implantation et les services de liaison connexes sont requis par les concurrents qui utilisent des LLD ou concluent des ententes d'interconnexion de réseaux à l'aide de leurs propres installations de transmission.
82. Par conséquent, le Conseil conclut que la co-implantation et les services de liaison connexes doivent être classés comme des services non essentiels obligatoires et conditionnels. Le caractère obligatoire de la co-implantation et des services de liaison connexes dépend de l'existence de services de gros obligatoires exigeant le service de co-implantation ou de l'existence d'un service de gros obligatoire auquel les concurrents peuvent avoir accès uniquement au moyen de la co-implantation.
Service d'accès groupé de LNPA et service d'accès Internet de tiers
83. Le service d'accès groupé de LNPA établit une interface qui fournit aux concurrents des voies d'accès à la haute vitesse vers les emplacements des utilisateurs finals des ESLT sur tout le territoire d'exploitation de celles-ci. Le service d'accès Internet de tiers (AIT) offert par les entreprises de câblodistribution établit une ou des interfaces qui offrent aux concurrents des voies d'accès à la haute vitesse aux emplacements des utilisateurs finals des entreprises de câblodistribution dans les zones de desserte autorisées. Le service d'accès groupé de LNPA et le service AIT comprennent deux éléments, soit l'accès au réseau et le transport.
84. Le Conseil fait remarquer que les concurrents utilisent le service d'accès groupé de LNPA et le service AIT pour offrir des services d'accès Internet haute vitesse de détail. Ils peuvent également utiliser le service d'accès de LNPA, qui a été classé comme un service essentiel conditionnel mentionné plus haut, conjointement avec des installations de transport auto-approvisionnées pour offrir le service d'accès Internet haute vitesse de détail. Cependant, le Conseil fait également remarquer que l'utilisation d'installations de transport auto-approvisionnées nécessite la co-implantation des concurrents, généralement dans plusieurs centraux.
85. Le Conseil estime qu'à l'heure actuelle, dans de nombreuses situations, la co-implantation n'est pas une solution rentable pour des concurrents raisonnablement efficaces. Dans la plupart des cas, les concurrents qui souhaitent offrir le service d'accès Internet haute vitesse de détail n'ont d'autre choix que d'acheter le service d'accès groupé de LNPA de gros ou le service d'AIT de gros. À l'heure actuelle, le retrait de l'accès obligatoire au service d'accès groupé de LNPA, soit l'accès et le transport, serait susceptible de réduire ou d'empêcher sensiblement la concurrence relativement aux services d'accès Internet haute vitesse de détail. Par conséquent, le Conseil conclut que le service d'accès groupé de LNPA doit être obligatoire étant donné qu'il s'agit du seul moyen abordable de fournir le transport entre le central d'une ESLT et le client du concurrent, ainsi que l'accès depuis ledit central. Afin d'appliquer le principe de la neutralité technologique, le Conseil estime que, dans les circonstances, les services d'AIT devraient aussi demeurer obligatoires.
86. En conséquence, parce que les deux services comprennent la fonctionnalité du transport sur le réseau, le Conseil estime que le service d'accès groupé de LNPA des ESLT et le service d'AIT des entreprises de câblodistribution doivent être classés parmi les services non essentiels obligatoires et conditionnels. Cette classification sera maintenue jusqu'à ce qu'il soit démontré qu'une solution de rechange de gros équivalente, pratique et faisable est disponible.
Autres services
87. Le Conseil estime que les quatre services suivants devraient aussi être classés parmi les services non essentiels obligatoires et conditionnels :
- l'accès des ESLC au système de soutien à l'exploitation (SSE), qui leur donne un accès électronique en temps réel aux SSE des ESLT;
- le service d'accès manuel aux relevés d'équipement pour les ESLC (RE manuels pour les ESLC), qui permet d'accéder à des renseignements liés à des services complexes qui ne sont pas accessibles au moyen de l'accès des ESLC au SSE;
- le service de ligne spécialisée (LS), qui fournit des lignes locales et des liaisons de raccordement connexes aux FST conformément aux ententes d'accès par liaison spécialisée;
- le service de ligne d'accès de base aux téléphones payants (LATP), qui offre aux fournisseurs de services téléphoniques payants concurrentiels l'accès au réseau téléphonique publiccommuté (RTPC) pour la fourniture des services de téléphone public.
88. Le Conseil estime que chacun de ces services est accessoire aux services de LLD des ESLT, que le Conseil a classés parmi les services essentiels conditionnels, comme il est indiqué ci-dessus.
89. En conséquence, le Conseil estime que les services de SSE, de RE manuels pour les ESLC ainsi que de LS et de LATP accessibles aux ESLC doivent être classés dans la catégorie des services non essentiels obligatoires et conditionnels. Le caractère obligatoire de ces services est conditionnel au maintien des services de LLD dans la catégorie des services essentiels conditionnels.
d) Bien public
90. Les services de la catégorie bien public sont ceux qui, d'après le Conseil, procurent un avantage collectif important et qui sont donc obligatoires.
Services d'urgence et services de relais téléphonique
91. Le Conseil souligne que les ESLT ont convenu à l'unanimité que les services d'urgence actuels, que ce soit le 9-1-1 ou ceux qui sont coordonnés par un téléphoniste, et les services de relais téléphoniques actuels devraient être classés dans la catégorie du bien public. Le Conseil y souscrit et, par conséquent, conclut que ces services doivent être classés dans la catégorie du bien public.
Services de structures de soutènement
92. Bell Canada et autres ont indiqué que le service de fourniture d'installations de structures de soutènement sera dans l'intérêt public dans un avenir prévisible. Bien que la STC ait soutenu que les installations de structures de soutènement ne sont pas des services essentiels, elle a reconnu la nécessité d'un encadrement réglementaire pour des raisons environnementales et de commodité publique. MTS Allstream Inc. (MTS Allstream) a indiqué que les installations de structures de soutènement constituent des services essentiels pour les concurrents.
93. Le Conseil estime que la construction en double d'installations de structures de soutènement donnerait lieu à une utilisation inefficace des ressources publiques et privées, et représenterait un désagrément pour le public. En conséquence, le Conseil juge que les services de structures de soutènement doivent être classés parmi les services de biens publics.
e) Interconnexion
94. Les services de la catégorie interconnexion sont ceux qui, de l'avis du Conseil, sont nécessaires à l'échange de trafic avec les clients du RTPC et qui sont donc obligatoires.
95. Le Conseil fait remarquer que, dans l'avis public de télécom 2006-14, il a exprimé sa position préliminaire selon laquelle les services d'interconnexion nécessaires à l'échange de trafic avec les clients du RTPC entreraient dans n'importe quelle définition révisée d'un service essentiel. Le Conseil fait également remarquer qu'en général, les parties ont recommandé que les services d'interconnexion soient considérés comme distincts des services essentiels, mais qu'ils devraient être obligatoires.
96. Le Conseil indique que, conformément aux instructions, dans la mesure où il réglemente les arrangements d'interconnexion de réseaux, il doit tout mettre en oeuvre pour garantir la neutralité technologique et concurrentielle de ces arrangements afin de permettre le plus possible la concurrence en matière de nouvelles technologies et de ne pas favoriser artificiellement les entreprises ou les revendeurs canadiens.
97. Le Conseil fait remarquer que Quebecor Média inc. (QMI) a soulevé la question de la rationalisation des régimes de réglementation existants pour l'interconnexion locale, interurbaine et sans fil, de même que pour l'acheminement du trafic fondé sur la compensation réciproque. Le Conseil estime que ces questions vont au-delà du champ d'application de la présente instance. Le Conseil souligne également que dans la décision de télécom 2007-51, qui contient le plan d'action pour son examen des mesures de réglementation existantes, il a indiqué qu'il aborderait un certain nombre de questions liées à l'interconnexion de réseaux. Par conséquent, le Conseil estime qu'il serait préférable d'aborder ces questions dans les instances de suivi de la décision de télécom 2007-51.
Interconnexion entre les réseaux des ESL
98. Les parties ont convenu à l'unanimité que les installations et les services qui permettent à une ESL d'échanger des appels locaux avec une autre ESL dans la même circonscription ou région d'interconnexion locale (RIL) devraient être classés parmi les services d'interconnexion.
99. Bell Canada et autres, la STC et QMI ont indiqué que les services de transport et de transit du service régional (SR) devraient être considérés comme non essentiels et assujettis à l'élimination graduelle. La plupart des autres parties considèrent que les services de transport du SR et de transit sont nécessaires pour assurer un échange efficace de trafic entre les FST.
100. Le Conseil fait remarquer qu'en ce qui a trait au service de transport du SR, le trafic des ESLC qui provient d'une circonscription ou d'une RIL peut être fourni aux abonnés des ESLT dans d'autres circonscriptions qui ont un SR avec la circonscription de départ, ou aux abonnés des ESLT situés à l'extérieur de la RIL dans des circonscriptions qui ont un SR avec au moins une circonscription à l'intérieur de la RIL. Les services de transit permettent l'échange de trafic local et interurbain, ainsi que de messages CCS78 entre deux fournisseurs de services par les réseaux des ESLT.
101. Le Conseil estime qu'il serait déraisonnable de s'attendre à ce que les ESLC établissent une présence dans la circonscription d'une ESLT ou dans une RIL si elles n'entendent pas offrir des services locaux aux utilisateurs finals dans cette circonscription ou RIL. Le Conseil estime également qu'il est improbable que toutes les ESL dans une circonscription ou une RIL donnée aient suffisamment de clients finals pour justifier l'interconnexion entre elles. Le Conseil estime en outre que les services de transport du SR et de transit des ESLT offrent suffisamment de solutions d'interconnexion aux concurrents.
102. En conséquence, le Conseil conclut que les services qui permettent un échange de trafic local entre des ESL dans la même circonscription ou RIL, et dans des circonscriptions à l'intérieur du SR de la circonscription de départ ou d'une circonscription dans une RIL doivent être classés parmi les services d'interconnexion. Le Conseil conclut également que les services de transit locaux, interurbains et CCS7 doivent être classés parmi les services d'interconnexion.
Interconnexion entre les ESL et les réseaux interurbains
103. Les parties se sont généralement entendues que les services d'interconnexion et les services administratifs liés aux consommateurs qui choisissent leur fournisseur de service interurbain devraient être obligatoires.
104. Bell Canada et autres ont indiqué que le service d'interconnexion par transit d'accès (TA) devrait être considéré comme non essentiel, car il existe des solutions de rechange, dont l'utilisation de l'interconnexion par le raccordement direct (RD) ou la négociation avec l'ESLT. D'autres parties, dont MTS Allstream, RCI, et Primus Telecommunications Canada Inc. (Primus) et Globility Communications Corp. (Globility), ont indiqué qu'il ne serait pas rentable de se connecter à chaque central local.
105. Bell Canada et autres ainsi que la STC ont proposé que le service de facturation et de perception (SFP) soit considéré comme non essentiel, car il existe de nombreuses solutions de rechange, comme l'appel sur carte de crédit, les cartes d'appel prépayées et la préinscription auprès d'un fournisseur de service interurbain.
106. Le Conseil estime qu'il serait déraisonnable d'exiger que les fournisseurs de service interurbain s'interconnectent à chaque centre local d'une ESLT pour offrir ses services interurbains aux utilisateurs finals. Le Conseil est d'avis que l'option de l'interconnexion par TA permettrait aux fournisseurs de service interurbain de s'interconnecter efficacement à l'ESLT.
107. Dans la décision de télécom 92-12, le Conseil a conclu que l'égalité d'accès et les services connexes, dont le SFP, sont nécessaires à la concurrence des services interurbains. Le Conseil considère toujours qu'en l'absence du SFP, les ESLT s'accorderaient une préférence indue, de sorte qu'elles doivent donc rendre ces services accessibles aux concurrents. Le Conseil estime que le service d'accès à la base de données de validation des numéros à facturer (VNF), qui est accessoire au SFP, devrait faire l'objet du même traitement réglementaire que le SFP.
108. En conséquence, le Conseil conclut que tous les services administratifs liés à la sélection d'un FST interurbain, les services d'interconnexion par TA et CD ainsi que les services d'accès à la base de données de VNF et du SFP doivent être classés dans la catégorie des services d'interconnexion.
Interconnexion entre les réseaux sans fil et filaires
109. Le Conseil fait remarquer que les services d'interconnexion sans fil comprennent le service d'accès au fournisseur de services sans fil (FSSF), les services de radio mobile privé, le service d'accès aux télécommunications mobiles par satellite et les services de radiomessagerie. Le Conseil convient avec les parties, y compris les ESLT, qui soutiennent que les services d'interconnexion sans fil devraient être classés dans la catégorie des services d'interconnexion.
110. En conséquence, le Conseil estime que les services liés à l'échange de trafic entre les ESL et les FSSF doivent être classés parmi les services d'interconnexion.
f) Services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle
111. Les services de la catégorie des services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle sont ceux qui, d'après le Conseil, n'entrent pas dans la définition d'un service essentiel et qui n'ont pas été classés dans les catégories des services non essentiels obligatoires et conditionnels, de bien public ou d'interconnexion. L'expression « élimination graduelle » signifie l'élimination graduelle de l'accès obligatoire à la fin de la période de transition.
Installations de transport pour le RNC à basse vitesse
112. Les installations de transport pour le RNC à basse vitesse sont les installations DS-0 et DS-1 qui fournissent des voies de transport numérique spécialisées entre les centraux des ESLT.
113. Bell Canada et autres ainsi que la STC ont fait valoir que le marché en aval relatif aux installations RNC basse vitesse est concurrentiel et que de nombreuses possibilités s'offrent aux concurrents, y compris les installations de fibre optique, les installations du câble, les installations sans fil et les services de détail des ESLT.
114. Le Conseil souligne que, d'après le dossier, de nombreux concurrents s'auto-approvisionnent ou font appel à des tiers pour obtenir les installations de transport du RNC à basse vitesse.
115. Le Conseil estime que les installations à fibre optique offrent aux concurrents une solution de rechange aux installations de transport du RNC à basse vitesse, car les exigences relatives à la largeur de bande à chaque central de desserte peuvent être groupées. Le Conseil estime également que lorsqu'un concurrent est co-implanté dans un central d'une ESLT, il peut fournir aux autres concurrents une solution de rechange de services de gros aux installations de transport du RNC à basse vitesse de l'ESLT.
116. En conséquence, le Conseil estime que les installations de transport du RNC à basse vitesse des ESLT doivent être classées dans la catégorie des services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle.
Accès et transport par fibre et services connexes
117. Le Conseil fait remarquer que les services d'accès et de transport par fibre comprennent les vitesses DS-3, OC-3, OC-12 du RNC ainsi que les services Ethernet.
118. Le Conseil fait remarquer que, d'après le dossier, un nombre élevé de concurrents s'auto-approvisionnent ou s'approvisionnent d'une autre façon pour les installations d'accès et de transport par fibre. Le Conseil estime que le niveau d'approvisionnement de rechange indiqué démontre l'existence d'une concurrence sur le marché en amont pour ces installations.
119. En conséquence, le Conseil conclut que les installations d'accès et de transport par fibre à haute vitesse et les services connexes doivent être classés parmi les services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle.
Autres services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle
120. Le Conseil a relevé plusieurs autres services de gros, d'après le dossier de la présente instance, que les concurrents peuvent reproduire eux-mêmes ou en ayant recours à des services de rechange offerts par des tiers fournisseurs. Ces services de gros comprennent notamment les services de base de données sur la transférabilité des numéros locaux, le stockage dans la base de données de VNF et les services de téléphoniste. Par ailleurs, certains autres services de gros ne peuvent être reproduits par les concurrents, notamment la lecture de cartes par glissement et l'interconnexion au réseau intelligent évolué. Toutefois, le Conseil n'estime pas que le retrait de l'accès obligatoire à ces services risquerait de réduire ou d'empêcher sensiblement la concurrence. En conséquence, le Conseil conclut que ces services, dont la liste complète figure à l'annexe, doivent être classés dans la catégorie de services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle.
Restriction relative à l'utilisation
121. Bell Canada et autres ont recommandé, lorsque le Conseil rend obligatoire l'accès de gros à une installation donnée, qu'il impose également une restriction quant à l'utilisation de cette installation. Ils ont également proposé les exemples de restriction suivants : i) interdire que les lignes dégroupées pour les services téléphoniques soient utilisées pour les services vidéo et ii) interdire que les lignes dégroupées d'affaires soient utilisées à des fins résidentielles dans les marchés où les lignes dégroupées d'affaires font l'objet d'une réglementation. Bell Canada et autres ont également indiqué que, sans l'imposition d'une restriction quant à l'utilisation, le marché de détail subira des distorsions et la concurrence sera compromise.
122. En général, les parties qui ont commenté cette question ne soutenaient pas qu'il faille imposer une restriction relative à l'utilisation. Les motifs de leur désaccord avaient trait notamment à la non-pertinence sur le marché en aval, c'est-à-dire que la domination sur le marché en aval n'est pas une condition nécessaire pour déterminer si l'intrant du marché en amont est essentiel; aux effets négatifs sur la concurrence, lesquels pourraient se traduire par une baisse de l'investissement de la concurrence, un ralentissement dans l'expansion des services et une diminution des avantages pour les clients; ainsi qu'à l'absence de mécanismes de contrôle efficaces. Certaines parties ont dénoncé également l'affirmation de Bell Canada et autres selon laquelle le marché subirait des distorsions en l'absence de restrictions relatives à l'utilisation des services obligatoires.
123. En vertu de son mandat conféré par la Loi, le Conseil doit s'assurer que la réglementation, lorsqu'elle est nécessaire, est efficace et efficiente. Le Conseil fait remarquer que les parties n'ont présenté aucune preuve ou argument convaincant pour justifier une restriction de l'utilisation et conclut donc que cette mesure ne devrait pas être mise en oeuvre.
Principes de tarification des catégories de services
124. Les parties de la présente instance ont proposé deux modes de tarification des services essentiels. Certaines parties ont proposé un mode de tarification fondé sur le marché qui serait basé sur la négociation pour fixer les prix. D'autres parties ont proposé le maintien du mode de tarification actuel utilisé pour fixer les prix des services de gros, qui est fondé sur les prévisions de coûts différentiels connexes (coûts de la Phase II) plus un supplément.
Approche fondée sur le marché
125. Bell Canada et autres ont proposé que les parties soient autorisées à négocier leurs propres ententes commerciales « hors tarif » dans le cas des services appartenant aux six catégories. QMI a fait valoir que les prix des services de gros classés comme services essentiels, essentiels conditionnels, non essentiels assujettis à l'élimination graduelle ainsi que non essentiels obligatoires et conditionnels devraient être négociés entre les parties.
126. Le Conseil estime que si les ESLT étaient autorisées à négocier des ententes commerciales sur une base sélective pour les services essentiels et les autres services de gros obligatoires, cela pourrait donner lieu à des préférences indues ou à des discriminations injustes et ainsi nuire au régime de réglementation des services de gros établi par le Conseil dans la présente instance.
127. En conséquence, le Conseil estime qu'à l'exception des services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle mentionnés ci-dessous, la nature des services essentiels et des autres services obligatoires est telle qu'il ne sera pas convenable d'adopter une approche fondée sur le marché à partir d'ententes négociées.
Approche fondée sur les coûts
a) Services essentiels (y compris les services essentiels conditionnels)
128. En général, les parties ont proposé que les tarifs des services essentiels et ceux des services essentiels conditionnels soient fondés sur les coûts de la Phase II plus un supplément de 15 %. Bell Canada et autres ont indiqué qu'elles appuieraient la fixation des prix tarifés d'après les coûts de la Phase II plus un supplément convenable et qu'elles ne proposaient aucune modification à la majoration actuelle dans la présente instance.
129. La STC a proposé un certain nombre de principes de tarification, comme la « compensation suffisante » et le « marché efficace » pour guider la fixation des prix des services essentiels. La STC a également soutenu ce qui suit :
- la présente instance traite de principes de tarification et non l'établissement des prix actuels, et que l'établissement de prix fondé sur les coûts de la Phase II plus un supplément de 15 %, comme l'ont suggéré les diverses parties, n'est simplement qu'une formule et non un principe de tarification;
- il serait prématuré de fixer les prix des services essentiels ou des services non essentiels en utilisant les coûts de la Phase II plus un supplément durant une période de transition;
- le Conseil n'a jamais fourni de justification pour la majoration de 15 % relativement à un principe visant à déterminer la proportion de l'écart des coûts historiques à inclure dans la majoration.
130. La STC a fait valoir que, parce que la méthode révisée de la Phase II n'a pas encore été établie et parce que cette méthode touche les coûts à recouvrer dans la majoration, il est impossible pour l'instant de déterminer la majoration à utiliser avec les coûts de la Phase II pour fixer des prix entièrement compensatoires.
131. La STC a demandé au Conseil d'établir une instance de suivi pour fixer les prix des services de gros précisés durant une période de transition en se servant des principes de tarification proposés par la STC, en fonction de la méthode révisée de la Phase II établie dans la décision de télécom 2008-14. La STC a également demandé que, dans l'instance de suivi proposée, le Conseil se prononce sur la part convenable des coûts communs fixes et l'écart des coûts historiques à recouvrer au moyen des prix de ces services.
132. Le Conseil fait remarquer qu'il a répondu à de nombreuses préoccupations de la STC dans la décision de télécom 2008-14 concernant la méthodologie de la Phase II et son application.
133. La plupart des parties de la présente instance, dont toutes les ESLT à l'exception de la STC, ont indiqué que le supplément actuel de 15 % appliqué aux coûts de la Phase II pour déterminer les prix des services essentiels est toujours approprié. Le Conseil fait remarquer que les parties n'ont présenté aucun argument ou preuve convaincant pour justifier une modification à la majoration actuelle. Par conséquent, le Conseil estime qu'il convient de maintenir les principes de tarification actuels pour l'établissement des prix des services essentiels, y compris les services essentiels conditionnels, en fonction des coûts de la Phase II plus un supplément.
134. En conséquence, le Conseil conclut que, pour chaque ESLT, sauf Télébec et la STC dans son territoire d'exploitation au Québec, les services essentiels et les services essentiels conditionnels définis dans la présente décision seront, pour l'instant, tarifés aux coûts de la Phase II de l'entreprise plus un supplément de 15 %. Dans le cas de Télébec et de la STC dans son territoire d'exploitation au Québec, les services essentiels et les services essentiels conditionnels continueront d'être tarifés en fonction des coûts de la Phase II de l'entreprise plus un supplément de 25 %, comme il a été déterminé dans la décision de télécom 2005-4.
135. En ce qui concerne le service d'accès à la LNPA, qui est considéré comme un service essentiel conditionnel, le Conseil ordonne aux ESLT de présenter des pages de tarifs proposés et des études de coûts pour mettre en oeuvre les décisions rendues dans la présente décision, et ce, dans un délai de 30 jours à partir de la date de la décision du Conseil relativement à l'instance de suivi amorcée par la décision de télécom 2008-14.
b) Services non essentiels obligatoires et conditionnels
136. En général, les parties ont proposé que les tarifs des services non essentiels obligatoires et conditionnels soient fondés sur les coûts de la Phase II plus un supplément de 15 %. Bell Canada et autres ont proposé que les compagnies disposent d'une souplesse qui leur permettrait de majorer périodiquement les prix des services non essentiels, et ce, jusqu'à concurrence de 25 %, six mois après le début de la période d'élimination graduelle et tous les douze mois par la suite, la majoration totale ne pouvant excéder 75 %.
137. En ce qui concerne la souplesse en matière de tarification que proposent Bell Canada et autres, le Conseil conclut que les principes de tarification actuels devraient continuer de s'appliquer vu l'importance des services en cause et le fait qu'ils resteront obligatoires. En conséquence, le Conseil conclut que les services non essentiels obligatoires et conditionnels définis dans la présente décision continueront d'être tarifés selon la formule actuelle.
c) Bien public
138. De nombreuses parties ont proposé que les services de bien public continuent d'être tarifés selon l'approche actuelle, tandis que certaines autres parties ont proposé qu'ils soient tarifés selon les coûts de la Phase II plus un supplément de 15 %. Dans le cas particulier des structures de soutènement, Bell Canada et autres ont proposé que les taux soient fixés en fonction des conditions du marché, en tenant compte des taux demandés par les autres fournisseurs de structures de soutènement, comme les compagnies d'électricité.
139. Le Conseil fait remarquer qu'il a déterminé les taux actuels des services de bien public dans diverses décisions antérieures, puis qu'il les a confirmés dans les décisions de télécom 2007-27 et 2007-60. Le Conseil estime que l'approche de tarification actuelle demeure convenable pour les services de bien public, y compris les structures de soutènement. En conséquence, le Conseil conclut que les services de bien public définis dans la présente décision continueront d'être tarifés selon la formule actuelle.
d) Interconnexion
140. En général, les parties ont proposé que les tarifs des services d'interconnexion demeurent fondés sur les coûts de la Phase II plus un supplément de 15 %. QMI a proposé que les tarifs des services de raccordement du trafic soient fondés sur les coûts différentiels sans supplément.
141. Le Conseil estime que les revenus provenant des services d'interconnexion d'une ESL devraient servir à compenser les dépenses communes fixes de cette ESL et l'écart des coûts historiques; sinon, ce fardeau serait assumé par les autres services de l'ESL.
142. Par conséquent, le Conseil conclut que les tarifs des services d'interconnexion seront fondés sur les mêmes facteurs que ceux actuellement établis.
Hausses tarifaires prévues pour les services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle
143. Bell Canada et autres ont indiqué qu'il conviendrait de permettre aux ESLT de majorer périodiquement les tarifs des services non essentiels jusqu'à concurrence de 25 % six mois après le début de la période d'élimination graduelle et jusqu'à concurrence de 25 % tous les douze mois par la suite (hausses tarifaires prévues). Bell Canada et autres ont également indiqué que de telles hausses encourageraient davantage les concurrents à négocier d'autres dispositions d'approvisionnement. La STC a indiqué que des hausses tarifaires devraient être permises relativement aux services non essentiels et que les tarifs des services non essentiels faisant jadis partie des services aux concurrents de catégorie I devraient être augmentés à un niveau que l'entreprise considère pleinement compensatoire.
144. Les concurrents autres que QMI, Shaw Communications Inc. (Shaw) et Execulink Telecom Inc. ont signifié en général leur opposition à ces propositions. Certains concurrents ont expliqué que l'élimination graduelle des tarifs prescrits suffisait à inciter les concurrents à établir d'autres dispositions d'approvisionnement.
145. À la lumière des changements importants apportés par la présente décision au cadre de réglementation des services de gros et compte tenu du but de la période d'élimination graduelle des services non essentiels, comme il est indiqué ci-dessous, le Conseil estime que, lorsque cela est possible, la stabilité des tarifs de ces services devrait être maximisée durant la période d'élimination graduelle. De plus, compte tenu des changements apportés à la réglementation et du fait que les services non essentiels ne seront plus assujettis à la réglementation à la fin de leur période d'élimination graduelle, comme il est indiqué ci-dessous, le Conseil estime que les concurrents n'ont pas besoin d'incitatifs supplémentaires sous forme de hausses tarifaires prévues des services pour revoir leurs dispositions d'approvisionnement.
146. Par conséquent, le Conseil conclut que les hausses tarifaires prévues ne sont pas appropriées pour les services non essentiels assujettis à une élimination graduelle.
Application du facteur de compensation de la productivité dans le cadre du plafonnement des prix
147. Certaines parties ont présenté leurs points de vue sur l'application d'une restriction tarifaire égale à l'inflation moins une compensation de la productivité (I-X).
148. Conformément aux conclusions énoncées dans la décision de télécom 2007-27, le Conseil estime que les services de gros classés dans la présente décision en tant que services essentiels, services essentiels conditionnels, services non essentiels prescrits et conditionnels ainsi que services d'interconnexion ne sont pas assujettis à des forces concurrentielles suffisantes pour assurer le partage des gains de productivité avec les utilisateurs des services. Par conséquent, le Conseil conclut qu'un rajustement I-X annuel devrait continuer à s'appliquer aux tarifs des services qui n'étaient pas exemptés de l'application de ce facteur dans les décisions de télécom 2002-34 et 2002-43.
149. En ce qui concerne les services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle au sens de la présente décision, le Conseil estime, compte tenu des modalités de fourniture de ces services, que ceux-ci font l'objet de forces concurrentielles suffisantes pour assurer le partage des gains de productivité avec les utilisateurs. Par conséquent, le Conseil estime qu'il serait illogique d'appliquer un rajustement I-X annuel aux tarifs de ces services, là où I est inférieur ou égal à X. Toutefois, si I est supérieur à X, le Conseil est d'avis que les ESLT peuvent présenter des demandes au besoin.
150. En ce qui concerne les services de bien public au sens de la présente décision, le Conseil fait remarquer qu'ils étaient assujettis à des traitements tarifaires différents conformément aux décisions de télécom 2007-27 et 2007-60, selon leur classification à ce moment-là. Par exemple, le Conseil a établi que les tarifs du service de relais téléphonique et les services 9-1-19 devaient demeurer gelés aux niveaux existants.
151. Par conséquent, conformément au traitement établi à l'égard de ces services de sécurité publique et services sociaux dans les décisions de télécom 2007-27 et 2007-60, le Conseil établit que, sauf pour les tarifs applicables aux services de structures de soutènement, les tarifs des services de bien public seront gelés aux niveaux existants. En ce qui concerne les structures de soutènement, les tarifs resteront plafonnés aux niveaux existants et aucune restriction tarifaire I-X ne sera appliquée.
Période d'élimination graduelle des services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle
But et structure de la période d'élimination graduelle
152. Les parties étaient d'avis qu'une période d'élimination graduelle pour la tarification prescrite applicable aux services non essentiels serait requise afin que les concurrents puissent revoir leurs dispositions d'approvisionnement en vigueur et en prendre d'autres, au besoin.
153. Le Conseil estime qu'une période d'élimination graduelle est requise pour les services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle. Selon le Conseil, cette période accordera aux concurrents un délai et des incitatifs suffisants pour revoir leurs dispositions d'approvisionnement et les modifier au besoin, compte tenu des changements importants apportés au cadre de la réglementation des services de gros dans la présente décision.
154. Certaines parties ont indiqué que tous les services devraient être assujettis à la même période d'élimination graduelle. D'autres ont indiqué que cette période devrait varier selon les services, en fonction du temps requis pour assurer le passage à des dispositions d'approvisionnement fondées sur le marché, grâce à l'aménagement d'installations ou aux termes de négociations, et qu'une période d'élimination graduelle plus longue serait appropriée pour certains services, notamment les services d'accès. Bell Canada et autres ont indiqué qu'une période d'élimination graduelle de cinq ans ne représenterait pas un incitatif suffisant pour négocier des ententes et aménager des installations, et que cette période d'élimination devrait être beaucoup plus courte. La STC a indiqué qu'une période d'élimination graduelle de cinq ans serait appropriée pour les installations d'accès.
155. Afin de déterminer la durée et la structure de la période d'élimination graduelle pour chaque service non essentiel assujetti à l'élimination graduelle, le Conseil a pris en considération la nature du service, le temps requis pour négocier d'autres dispositions pour la fourniture du service, les obstacles à son remplacement par l'auto-approvisionnement et le nombre relativement élevé de services qui sont assujettis à l'élimination graduelle. Le Conseil conclut que structurer l'élimination graduelle des services non essentiels suivant deux périodes établit un équilibre acceptable entre les facteurs susmentionnés et l'efficacité associée à un nombre minimal de périodes d'élimination graduelle.
156. Le Conseil estime qu'une période d'élimination graduelle de trois ans à compter de la date de la présente décision est suffisante pour la plupart des services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle. Toutefois, le Conseil estime également que les facteurs associés au remplacement des installations d'accès et des services connexes de multiplexage et d'interface, ainsi que des installations de transport intracirconscriptions basse vitesse, sont tels qu'une période d'élimination graduelle de cinq ans à compter de la date de la présente décision convient pour ces services. Ces facteurs comprennent les coûts de construction par rapport aux revenus générés par les services ainsi que la nécessité de négocier des ententes avec les municipalités et d'autres ententes.
157. Les conclusions du Conseil relativement à la période d'élimination graduelle pour chaque service non essentiel visé sont énoncées à l'annexe de la présente décision.
Ententes négociées
158. Bell Canada et autres ainsi que la STC ont indiqué que les ESLT et les concurrents devraient être autorisés à négocier des ententes hors tarifs pour la prestation de services non essentiels. Selon eux, le maintien de la tarification des services non essentiels pendant la période d'élimination graduelle protégerait les concurrents. Ils ont également indiqué que le Conseil devrait s'abstenir de réglementer les ententes négociées en vertu du paragraphe 34(1) de la Loi. Bell Canada et autres ont aussi proposé que le Conseil s'abstienne de réglementer ces ententes en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi.
159. D'autres parties ont manifesté leur opposition aux ententes négociées pour les services non essentiels pendant la période d'élimination graduelle. Elles estimaient en général que le pouvoir de négociation des concurrents qui ne sont pas des ESLT n'est pas pareil que celui des ESLT.
160. Le Conseil fait remarquer que les tarifs de l'ensemble des services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle demeureront en vigueur pendant la période d'élimination graduelle. Il ajoute donc que les ententes négociées dont il est question dans la présente section peuvent s'appliquer à la prestation d'un seul service non essentiel selon des tarifs et des modalités qui diffèrent des tarifs et modalités prescrits pour ce service. Les ententes peuvent également prendre la forme d'ententes générales qui visent plus d'un service non essentiel selon des tarifs et des modalités qui diffèrent de la tarification en place, et peut-être même d'autres services tarifés ou services faisant l'objet d'une abstention. En vertu du cadre de réglementation actuel du Conseil, de telles ententes générales feraient habituellement l'objet d'un tarif et devraient satisfaire au critère d'imputation.
161. Toutefois, dans le cas d'un seul service et des ententes générales négociées entre un FST et son concurrent pour la prestation d'un service non essentiel selon des tarifs ou des modalités qui diffèrent de la tarification et des modalités en place (ententes avec les concurrents) pour ce service, le Conseil estime que l'application de prix inférieurs au prix coûtant par le FST ne constitue pas une grande préoccupation parce que le client en question est le concurrent du FST. En ce qui concerne les déclarations des parties au sujet de l'inégalité du pouvoir de négociation entre les FST et les concurrents, le Conseil fait remarquer qu'un tarif par défaut demeurera en vigueur pour chaque service non essentiel pendant la période d'élimination graduelle.
162. Dans ces circonstances, le Conseil conclut que les ententes avec les concurrents qui visent des services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle, selon la définition établie dans la présente décision, devraient être permises. Le Conseil conclut en outre que les entreprises n'auront pas à obtenir l'autorisation du Conseil pour établir de telles ententes pendant la période d'élimination graduelle du service. Le Conseil fait remarquer que l'option de négocier des ententes permet plus facilement aux concurrents de modifier leurs dispositions d'approvisionnement pendant cette période et qu'elle est conforme au principe selon lequel on s'en remet le plus possible aux forces du marché pour atteindre les objectifs de la politique établis par la Loi. Le Conseil conclut également que de telles ententes avec les concurrents peuvent aussi inclure tout service qui fait l'objet d'une abstention de la réglementation.
163. Conformément au paragraphe 34(1) de la Loi, le Conseil peut s'abstenir de réglementer s'il juge que cette abstention serait conforme aux objectifs de la politique de la Loi. Étant donné que chaque service non essentiel assujetti à l'élimination graduelle, selon la définition établie dans la présente décision, demeurera tarifé pendant cette période d'élimination graduelle et à la lumière du but de la période d'élimination graduelle, le Conseil conclut, comme question de fait, que de s'abstenir de réglementer ledit service dans la mesure indiquée ci-dessous serait conforme aux objectifs de la Politique canadienne de télécommunication établis aux alinéas 7(c), (f) et (h) de la Loi et aux instructions, sous réserve que ledit service soit visé par une entente avec le concurrent conclue pendant la période d'élimination graduelle du service.
164. Conformément au paragraphe 34(3) de la Loi, le Conseil conclut que le fait de s'abstenir de réglementer ledit service, dans la mesure précisée et sous réserve qu'il soit visé par une entente conclue avec le concurrent pendant la période d'élimination graduelle du service, n'est pas susceptible de compromettre indûment à la création ou le maintien d'un marché concurrentiel pour la fourniture du service non essentiel en question.
165. Conformément au paragraphe 34(4) de la Loi, le Conseil déclare qu'à compter de la date de la présente décision, les articles 25, 29 et 31 et les paragraphes 27(1), 27(5) et 27(6) de la Loi ne s'appliquent pas à un service non essentiel assujetti à l'élimination graduelle, selon la définition établie dans la présente décision, qui est fourni conformément à une entente conclue avec le concurrent pendant la période d'élimination graduelle de ce service.
166. Le Conseil fait remarquer qu'il a pour but, en s'abstenant de réglementer les services fournis conformément à des ententes conclues avec des concurrents, de permettre aux FST de conclure différentes ententes avec différents concurrents. Le Conseil s'attend à ce que les FST négocient des ententes sans l'intervention du Conseil. Toutefois, le Conseil estime que pendant la période d'élimination graduelle, les paragraphes 27(2) et 27(4) de la Loi devraient constituer le dernier recours pour résoudre toute situation de discrimination injuste ou de préférence indue, selon le cas.
167. Le Conseil estime également qu'il doit conserver les pouvoirs que lui confère l'article 24 de la Loi afin d'assurer la protection des renseignements de nature confidentielle relatifs aux clients. Par conséquent, le Conseil ordonne aux entreprises d'intégrer, s'il y a lieu, les dispositions en vigueur concernant la divulgation des renseignements confidentiels des clients à des tiers dans tous les contrats et autres ententes de prestation de services soustraits à la réglementation en vertu de la présente décision. Le Conseil estime qu'il doit conserver des pouvoirs suffisants en vertu de l'article 24 de la Loi pour imposer les conditions futures relatives aux services faisant l'objet d'une abstention, au besoin. Le Conseil estime qu'étant donné qu'il conserve ses pouvoirs en vertu de l'article 24 et du paragraphe 27(2), il devra également maintenir l'application du paragraphe 27(3) parce qu'il porte sur l'exercice de ses pouvoirs conférés par ces articles. Le Conseil estime également qu'il est nécessaire de conserver les pouvoirs que lui confère le paragraphe 27(3) de la Loi en ce qui concerne la conformité avec les pouvoirs et fonctions qui ne font pas l'objet d'une abstention en vertu de la présente décision.
168. Afin de mettre ces décisions en application, le Conseil ordonne à chaque ESLT et entreprise de câblodistribution de produire, dans les 30 jours suivant la date de la présente décision, des pages de tarifs révisées pour chaque service non essentiel assujetti à l'élimination graduelle, selon la définition établie dans la présente décision, et d'y inclure la disposition suivante :
L'entreprise peut également fournir le service tarifé selon un tarif et des modalités qui diffèrent du tarif et des modalités applicables si le service est fourni conformément à une entente conclue entre l'entreprise et un concurrent parce que le Conseil s'est abstenu, dans la Décision de télécom CRTC 2008-17, de réglementer ce service.
Frais de résiliation anticipée
169. Certains tarifs de services aux concurrents et certaines ententes approuvées contiennent des dispositions relatives aux frais qui doivent être assumés par le concurrent qui décide de résilier son contrat avant la fin de la période pour laquelle il s'était engagé (frais de résiliation anticipée ou FRA).
170. Les concurrents ont en général indiqué que l'application de FRA associés aux services non essentiels pendant la période d'élimination graduelle ne serait pas conforme à l'objectif de la période d'élimination graduelle.
171. Bell Canada et autres ainsi que la STC ont expliqué que les services non essentiels ne devraient pas être exemptés des FRA. Bell Canada et autres ont ajouté qu'elles s'attendaient à ce que de nombreux concurrents prennent d'autres dispositions d'approvisionnement avec l'ESLT qui leur fournit actuellement des services tarifés et à ce que les ententes négociées relativement à ces services enlèvent toute portée pratique à l'application des FRA. Bell Canada et autres ainsi que la STC ont aussi expliqué que toute directive obligeant les ESLT à renoncer aux FRA ne serait pas conforme à l'objectif de la politique fondé sur le principe des forces du marché. Bell Canada et autres craignaient que si le Conseil oblige une ESLT à renoncer aux FRA applicables aux services non essentiels pendant la période d'élimination graduelle, il peut obliger également l'ESLT à renoncer aux FRA prévus aux ententes négociées pendant cette période.
172. Le Conseil estime que les FRA encouragent les entreprises à ne pas résilier leurs ententes de services à une date anticipée. Le Conseil fait remarquer que les ententes en question portent sur des services qui sont assujettis à une approbation de nature réglementaire et que la présente décision apporte des changements importants au cadre de réglementation en vertu duquel ces ententes ont été conclues. Le but de la période d'élimination graduelle est de permettre aux concurrents de prendre de nouvelles dispositions d'approvisionnement ou d'ententes selon les circonstances. Le Conseil estime que, compte tenu des changements apportés au cadre de réglementation pour les services non essentiels, les FRA ne devraient pas être un élément de négociation pour la conclusion d'ententes avec les concurrents.
173. Par conséquent, le Conseil détermine que, 30 jours suivant la date de la présente décision et pour le reste de la période d'élimination graduelle, les ESLT et les entreprises de câblodistribution devront renoncer aux FRA associés aux services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle, selon la définition établie dans la présente décision, lorsqu'un concurrent met fin de manière anticipée à un contrat de services non essentiels conclu avant la présente décision, et ce, pour toute raison que ce soit.
174. En ce qui a trait à la préoccupation soulevée par Bell Canada et autres selon laquelle le Conseil pourrait exiger des ESLT qu'elles renoncent à l'avenir aux FRA prévus aux ententes avec les concurrents, le Conseil estime que les raisons pour lesquelles il ordonnerait aux ESLT de renoncer aux FRA associés aux services non essentiels pendant la période d'élimination graduelle ne s'appliqueront pas aux ententes avec les concurrents conclues pendant cette période.
175. Afin de mettre cette décision en application, le Conseil ordonne à chaque ESLT et entreprise de câblodistribution de produire, dans les 30 jours suivant la date de la présente décision, des pages tarifaires révisées et des ententes approuvées révisées pour chaque service non essentiel assujetti à l'élimination graduelle, selon la définition établie dans la présente décision, qui contiennent des dispositions relatives aux FRA, et d'y inclure la disposition suivante :
Pour tout service tarifé auquel le client a souscrit ou pour tout contrat approuvé conclu avant le 2 avril 2008, les frais de résiliation anticipée, selon la définition établie dans la Décision de télécom CRTC 2008-17, ne seront pas appliqués si le client décide de résilier son contrat à une date anticipée pour toute raison que ce soit.
Nouvelle demande
176. Bell Canada et autres ont proposé que les ESLT ne soient pas tenues d'accepter de nouveaux clients ou de nouvelles demandes de services non essentiels tarifés pendant la période d'élimination graduelle. Selon Shaw, l'approche de Bell Canada et autres encouragerait les concurrents à prendre d'autres dispositions. RCI et le Centre pour la défense de l'intérêt public se sont opposés à de telles restrictions. RCI a indiqué que les concurrents devraient être autorisés à augmenter la demande existante de services non essentiels tarifés.
177. Le Conseil détermine que, pendant la période d'élimination graduelle, les ESLT doivent accepter de nouveaux clients et des nouvelles demandes ou des demandes de changement provenant de clients existants relativement aux services non essentiels tarifés assujettis à l'élimination graduelle. Le Conseil estime que cette approche est conforme au but de la période d'élimination graduelle parce qu'elle permet aux concurrents de prendre de nouvelles dispositions d'approvisionnement adaptées à leur situation.
Possibilité d'abstention relativement aux services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle
178. Bell Canada et autres ont indiqué que le Conseil devrait prendre une décision relativement à une abstention conditionnelle, qui entrerait en vigueur à la fin de la période d'élimination graduelle, pour les services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle. Selon elles, cette mesure éliminerait la nécessité de mettre en place un processus d'abstention à la fin de la période de transition. Cette approche qui prévoit un « arrêt immédiat » a été également appuyée par la STC et Cogeco.
179. Bell Canada et autres ont indiqué que l'expression « non essentiel » laissait entendre une alternative en matière d'approvisionnement pour aujourd'hui et la possibilité de reproduire le service dans un avenir rapproché. Selon elles, le Conseil devrait donc s'abstenir, de manière complète et inconditionnelle, d'exercer ses pouvoirs en vertu des articles 25, 27, 29 et 31 de la Loi, et ne conserver que ses pouvoirs d'imposer les conditions de réglementation non économique en vertu de l'article 24. La STC a expliqué que cette abstention ferait progresser les objectifs de la Loi et serait plus efficace que la réglementation pour éliminer tout fardeau injustifié relativement à l'établissement ou au maintien du marché parce que la réglementation découragerait l'entrée en concurrence.
180. Cybersurf Corp., Primus et Globility ont indiqué que, compte tenu des risques associés à l'incertitude des conditions du marché de la concurrence et de la réglementation éventuelle, un arrêt immédiat de toutes les mesures existantes de réglementation des services de gros réduirait les investissements dans les réseaux concurrentiels. MTS Allstream a indiqué que l'octroi d'une abstention fondée sur des prévisions ou des attentes relativement à une alternative en matière d'approvisionnement, sans qu'on vérifie si une telle alternative est vraiment offerte, irait à l'encontre des dispositions de l'article 34 de la Loi.
181. En réponse aux observations formulées par MTS Allstream, Bell Canada et autres ont expliqué que, lorsque le Conseil désigne des services comme non essentiels, cette décision suppose qu'il a vérifié que ces services sont assujettis à une concurrence suffisante pour protéger les intérêts des utilisateurs et que ces services devraient faire l'objet d'une abstention à la fin de la période d'élimination graduelle sans qu'il soit nécessaire de présenter des demandes d'abstention ou de retrait.
182. En ce qui concerne les observations des parties voulant qu'un arrêt immédiat de la réglementation des services de gros réduirait les investissements dans les réseaux concurrentiels, le Conseil fait remarquer que certaines parties sont d'avis que l'accès obligatoire décourage l'investissement, tandis que d'autres y voient plutôt un incitatif. À cet égard, le Conseil estime que le cadre mis en place grâce à la présente décision augmentera les incitatifs en matière d'innovation, d'investissement et d'aménagement dans le secteur des installations de réseaux de télécommunication concurrentielles.
183. Le Conseil s'attend à ce qu'avant la fin de la période d'élimination graduelle, de nombreux concurrents aient signé des ententes négociées avec les ESLT pour la prestation de services tels que ceux d'installations offrant des services d'accès et de transport par fibre optique. Toutefois, si aucune entente négociée n'est conclue, le Conseil fait remarquer que la fonctionnalité fournie par de tels services continuera d'être offerte aux concurrents au moyen de services de détail des ESLT.
184. En ce qui concerne le paragraphe 34(1) de la Loi, le Conseil estime que la possibilité d'abstention indiquerait clairement à l'industrie quand l'accès obligatoire prendrait fin et quand les forces du marché prendraient la relève. Le Conseil estime que cette mesure fournirait à toutes les parties concernées une certitude sur le plan réglementaire, notamment relativement à la planification, à l'investissement et à l'innovation en matière de réseaux. De plus, le Conseil fait remarquer que la possibilité d'abstention éliminerait la nécessité d'établir un processus d'abstention à la fin de la période de transition.
185. En revanche, le Conseil estime qu'un processus en fin de période de transition, comme une instance portant sur l'abstention, supposerait que la période de transition pourrait être prolongée, ce qui créerait de l'incertitude, laquelle pourrait nuire à l'efficacité des décisions d'investissement dans les réseaux et retarder possiblement la transition requise pour s'en remettre aux forces du marché.
186. Par conséquent, le Conseil estime que la certitude sur le plan réglementaire associée à la possibilité d'abstention serait conforme aux objectifs de la politique établis aux alinéas 7c), f) et g) de la Loi, ainsi qu'aux instructions précisées ci-dessous.
187. En ce qui concerne le paragraphe 34(3) de la Loi, le Conseil fait remarquer qu'en prenant la décision que certains services représentent des services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle, il a recueilli des données prouvant que ces fonctions ont été reproduites. Le Conseil fait également remarquer que, dans le cas de certains autres services, les parties ne lui ont communiqué aucune observation confirmant que les concurrents ont besoin de ces services.
188. Par conséquent, le Conseil conclut que la possibilité d'abstention relativement aux services qu'il a déterminés non essentiels et assujettis à l'élimination graduelle n'aura vraisemblablement pas pour effet de compromettre indûment la création ou le maintien d'un marché concurrentiel pour ces services.
189. Conformément au paragraphe 34(4) de la Loi, le Conseil déclare qu'en date d'effet de l'expiration de la période d'élimination pertinente, les articles 25, 29 et 31 ainsi que les paragraphes 27(1), 27(5) et 27(6) de la Loi ne s'appliqueront pas aux services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle, selon la définition établie dans la présente décision. Toutefois, le Conseil estime que les paragraphes 27(2) et 27(4) de la Loi devraient être conservés pour résoudre toute question de discrimination injuste ou de préférence indue.
190. Le Conseil estime également qu'il doit conserver les pouvoirs que lui confère l'article 24 de la Loi afin d'assurer la protection des renseignements de nature confidentielle relatifs aux clients. Par conséquent, le Conseil ordonne aux entreprises d'intégrer, s'il y a lieu, les dispositions en vigueur concernant la divulgation des renseignements confidentiels des clients à des tiers dans tous les contrats et autres ententes de prestation de services soustraits à la réglementation en vertu de la présente décision. Le Conseil estime qu'il doit également conserver des pouvoirs suffisants en vertu de l'article 24 de la Loi pour imposer les conditions futures relatives aux services faisant l'objet d'une abstention, au besoin. Le Conseil estime qu'étant donné qu'il conserve ses pouvoirs en vertu de l'article 24 et du paragraphe 27(2), il devra également maintenir l'application du paragraphe 27(3) parce qu'il porte sur l'exercice de ses pouvoirs conférés par ces articles. Le Conseil estime également qu'il est nécessaire de conserver les pouvoirs que lui confère le paragraphe 27(3) de la Loi en ce qui concerne la conformité avec les pouvoirs et fonctions qui ne font pas l'objet d'une abstention en vertu de la présente décision.
Directives pour la fin de la transition
191. En ce qui concerne chaque service non essentiel assujetti à l'élimination graduelle, le Conseil ordonne à l'entreprise touchée de fournir un avis écrit, au Conseil ainsi qu'à tous les clients de ce service, afin de permettre à ces clients d'examiner et de modifier leurs dispositions d'approvisionnement de la façon appropriée. L'avis écrit doit être envoyé au moins six mois avant la fin de la période d'élimination graduelle de ce service, il doit indiquer quelles pages de tarifs seront retirées et il doit décrire les intentions de l'entreprise en ce qui concerne la prestation continue de ce service dans chaque marché géographique où il est offert à ce moment. Le Conseil fait remarquer qu'il peut, à tout moment, demander aux entreprises touchées de fournir des renseignements supplémentaires sur ces services faisant l'objet d'une abstention à des fins de collecte de données ou autres.
III. À quel moment devrait-on réaliser les prochains examens concernant les services essentiels et le cadre de réglementation concernant les services de gros?
192. Certaines parties ont suggéré que le Conseil pourrait planifier les prochains examens à intervalles réguliers, allant de trois à cinq ans, afin de déterminer si chacun des services aux concurrents existants continue à être essentiel ou s'il est pertinent qu'il continue à être prescrit adéquatement. D'autres parties ont proposé qu'on attende au moins cinq ans après la publication de la présente décision avant d'effectuer un tel examen afin d'assurer une certitude sur le plan de la réglementation.
193. D'autres parties ont suggéré que, plutôt que d'effectuer des examens réguliers, le Conseil pourrait évaluer tous les deux, trois ou cinq ans la nécessité d'entreprendre un examen. Enfin, plusieurs parties ont proposé qu'à tout moment, une partie pourrait présenter une demande propre à un service pour proposer la modification de la classification du service en question, de sorte que le Conseil évaluerait ces demandes au cas par cas.
194. Le Conseil fait remarquer que l'évolution future de l'industrie, y compris les progrès technologiques, risquent d'avoir une incidence sur la pertinence de la classification d'un service au fil du temps. Ainsi, le Conseil estime qu'il serait approprié, dans l'avenir, d'évaluer si la classification des services de gros obligatoires demeure appropriée (examen tous azimuts).
195. Au moment d'évaluer les éléments sur lesquels sera fondé un tel examen, le Conseil a tenu compte des questions d'efficacité et de certitude sur le plan de la réglementation. Le Conseil a également pris en compte le fait qu'une ESLT peut également présenter une demande à tout moment afin d'établir que la condition selon laquelle un service a été classé comme un service essentiel conditionnel ou un service non essentiel prescrit et conditionnel a été satisfaite.
196. Le Conseil estime que le fait d'effectuer des examens tous azimuts tous les deux ou trois ans ou de tenir une instance pour déterminer si un examen est nécessaire serait un fardeau trop lourd et engendrerait une incertitude indue sur le plan de la réglementation, ce qui irait à l'encontre de l'alinéa 1a) des instructions. Le Conseil estime également que le fait d'effectuer un examen tous azimuts après la fin de la période d'élimination graduelle s'échelonnant sur cinq ans permettrait d'établir un équilibre adéquat entre les préoccupations portant sur l'efficacité de même que sur la certitude sur le plan de la réglementation et la nécessité de s'assurer que ces services demeurent classés adéquatement au fil du temps, conformément à l'idée générale des instructions.
197. Par conséquent, le Conseil examinera les catégories d'attribution de tous les autres services de gros obligatoires dans six ans à partir de la date de la présente décision.
IV. Les conclusions de la présente décision sont-elles conformes aux instructions?
198. Les instructions mentionnent que, dans l'exercice des pouvoirs et fonctions que lui confère la Loi, le Conseil doit mettre en oeuvre les objectifs de la politique énoncés à l'article 7 de la Loi conformément aux alinéas 1a), b) et c) des instructions.
199. L'alinéa 1a) des instructions prévoit que le Conseil doit se fier, dans la plus grande mesure, au libre jeu du marché comme moyen d'atteindre les objectifs de la politique. Par exemple, le Conseil permet les ententes négociées faisant l'objet d'une abstention durant la période d'élimination graduelle en ce qui concerne les services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle ainsi que l'abstention en ce qui concerne ces services à la fin de la période d'élimination graduelle.
200. Le Conseil estime que la tarification continue des services non essentiels durant leur période d'élimination graduelle de même que la tarification continue des autres services de gros sont nécessaires parce que le libre jeu du marché ne sera pas suffisant pour permettre l'atteinte des objectifs de la politique. Le Conseil estime également que ces mesures sont efficaces et proportionnelles aux buts visés, et qu'elles ne font obstacle au libre jeu du marché que dans la mesure minimale nécessaire pour atteindre les objectifs de la politique.
201. En ce qui concerne l'alinéa 1b) des instructions, étant donné que les services à l'étude dans la présente instance sont des services d'entreprise que les concurrents utilisent comme intrants pour leurs services de détail, le Conseil estime que les conclusions contenues dans la présente décision qui sont fondées sur la réglementation contribuent à l'atteinte des objectifs énoncés aux alinéas 7a), c), f) et h) de la Loi.
202. Le Conseil estime que, pour les raisons mises de l'avant dans la présente décision, ses conclusions relativement à la réglementation économique ne découragent pas un accès aux marchés de gros et de détail qui est propice à la concurrence et efficace économiquement, ni n'encouragent un accès au marché non efficace économiquement. Dans les cas où le Conseil a continué à se fier à une réglementation qui n'est pas d'ordre économique, il l'a fait de manière symétrique et neutre sur le plan de la concurrence, et ce, dans toute la mesure du possible. En ce qui concerne les services d'interconnexion de réseaux, les installations d'accès de client et les services de structures de soutènement, le Conseil estime que ces arrangements sont neutres sur le plan de la technologie et de la concurrence dans toute la mesure du possible, qu'ils permettent aux nouvelles technologies de faire concurrence et qu'ils ne favorisent pas artificiellement les entreprises canadiennes ou les revendeurs.
203. Le Conseil estime que ses conclusions contenues dans la présente décision sont également conformes au sous-alinéa 1c)(ii) des instructions.
204. À cet égard, le Conseil fait remarquer que la définition d'un service essentiel adoptée dans la présente décision, qui est la clé de son cadre de réglementation révisé, est fondée sur les principes économiques associés à la politique sur la concurrence et adaptés au contexte réglementaire des télécommunications. Par conséquent, le Conseil estime que le cadre révisé pour les services de gros envoie les bons signaux à tous les FST en ce qui concerne la réglementation, ce qui permet ainsi d'accroître les incitatifs pour l'innovation, l'investissement et la construction relativement aux installations de réseaux de télécommunication concurrentielles. Le Conseil s'attend à ce que les incitatifs pour l'innovation relativement aux services et aux installations augmentent également.
205. De plus, le Conseil fait remarquer qu'au cours de l'élaboration et de l'application de sa définition révisée d'un service essentiel, il a pris en compte les principes de la neutralité sur les plans de la technologie et de la concurrence ainsi que la capacité des ESLT de continuer d'occuper une position dominante sur les marchés de gros et de détail.
206. Enfin, lorsqu'il a effectué son examen, le Conseil a pris en compte les obstacles auxquels se heurtent les nouveaux FST de même que ceux déjà établis lorsqu'ils souhaitent mettre sur pied des installations de réseaux concurrentielles, et ce, tant pour appliquer la définition d'un service essentiel que pour déterminer la durée et la structure de la période d'élimination graduelle des services non essentiels.
Secrétaire général
Documents connexes
- Examen de certaines questions liées à l'établissement des coûts de la Phase II, Décision de télécom CRTC 2008-14, 21 février 2008
- Suivi de la décision 2007-27 - Mémoire de justification concernant l'application du régime de plafonnement des prix à Télébec, Société en commandite, Décision de télécom CRTC 2007-60, 30 juillet 2007, modifiée par la Décision de télécom CRTC 2007-60-1, 10 août 2007
- Plan d'action relatif à l'examen des mesures de réglementation du Conseil à la lumière du décret C.P. 2006-1534,Décision de télécom CRTC 2007-51, 11 juillet 2007
- Cadre de plafonnement des prix applicable aux grandes entreprises de services locaux titulaires,Décision de télécom CRTC 2007-27, 30 avril 2007
- Examen du cadre de réglementation concernant les services de gros et la définition de service essentiel, Avis public de télécom CRTC 2006-14, 9 novembre 2006, modifié par les Avis publics de télécom CRTC 2006-14-1, 15 décembre 2006; 2006-14-2, 15 février 2007; 2006-14-3, 16 mars 2007; et 2006-14-4, 20 mars 2007
- Abstention de la réglementation des services locaux de détail, Décision de télécom CRTC 2006-15, 6 avril 2006, modifiée par le décret C.P. 2007-532, 4 avril 2007
- Mise en oeuvre de la concurrence dans les marchés des services locaux et des téléphones payants locaux dans les territoires de la Société en commandite Télébec et de l'ancienne TELUS Communications (Québec) Inc., Décision de télécom CRTC 2005-4, 31 janvier 2005
- Mise en oeuvre de la réglementation des prix pour Télébec et TELUS Québec, Décision de télécom CRTC 2002-43, 31 juillet 2002
- Cadre de réglementation applicable à la deuxième période de plafonnement des prix, Décision de télécom CRTC 2002-34, 30 mai 2002, modifiée par la Décision de télécom CRTC 2002-34-1, 15 juillet 2002
- Service 9-1-1 - Tarifs applicables aux fournisseurs de services sans fil, aux abonnés du service Centrex et aux abonnés du service multiligne/consultation manuelle de la base de données d'affichage automatique d'adresses, Décision Télécom CRTC 99-17, 29 octobre 1999
- Concurrence locale, Décision Télécom CRTC 97-8, 1er mai 1997
- Concurrence dans la fourniture de services téléphoniques publics vocaux interurbains et questions connexes relatives à la revente et au partage, Décision Télécom CRTC 92-12, 12 juin 1992
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Notes de bas de page
[1] Dans la présente décision, le terme « entreprises de câblodistribution » désigne Cogeco Cable Inc. (Cogeco), Rogers Communications Inc. (RCI), Shaw Cablesystems G.P. (Shaw) et Vidéotron ltée (Vidéotron).
[2] Consultez Review of the Section 251 Unbundling Obligations of Incumbent Local Exchange Carriers, Order on Remand, FCC 04‑290.
[3] La position dominante sur le marché désigne généralement la capacité d'une entreprise à agir indépendamment de la discipline concurrentielle dans une mesure importante, c.‑à‑d. la capacité d'une entreprise à forcer les composants de la concurrence relatifs aux prix ainsi que les éléments hors prix, comme la qualité, l'éventail de produits offerts, le service, etc., à s'éloigner considérablement des niveaux concurrentiels pour une période continue, en vue d'en tirer avantage. Consultez, par exemple, le Bureau (CRTC)12avril07‑103.
[4] Le Bureau reconnaît également cette complication en ajoutant un critère « sans » à son évaluation de la position dominante sur le marché en aval, c.‑à‑d. que la concurrence devrait être évaluée en fonction de ce que devraient être les forces concurrentielles en aval « sans » l'accès obligatoire aux installations de gros des ESLT.
[5] Dans la présente décision, le terme « installation » désigne une installation, une fonction ou un service (ou les trois), selon le contexte.
[6] Dans ces définitions, le terme « entreprise » comprend un groupe d'entreprises qui occupent conjointement une position dominante.
[7] Pour consulter une définition de l'« élimination graduelle », voir le paragraphe 111 ci‑dessous.
[8] CCS7 s'entend du système de signalisation par canal sémaphore no 7.
[9] Dans la décision de télécom 99‑17, le Conseil a modifié la méthode de tarification du service 9‑1‑1, de sorte que ces tarifs sont maintenant modifiés sur une base annuelle.
Annexe
Services de gros par catégorie
La présente liste est à jour en date du 15 janvier 2008. Elle inclut les services aux concurrents approuvés par le Conseil après la publication de l'avis public de télécom 2006-14.
a) Services essentiels
Fichiers d'échange d'inscriptions ordinaires
Service de fichiers répertoires
b) Services essentiels conditionnels
Lignes dégroupées
Accès RNC aux débits DS-0 et DS-1
Services d'accès LAN
Centre de commutation distant, information sur le MALAN et information sur la zone de couverture LNPA
c) Services non essentiels prescrits et conditionnels
Co-implantation (y compris l'espace dans les gaines d'ascension du central, les liaisons d'interconnexion d'EI à EI)
Liaisons de raccordement de central (y compris l'espace dans les gaines d'ascension au besoin)
Comprend les liaisons de raccordement A et B (pour lignes dégroupées), les liaisons en cuivre permettant le raccordement au central, les liaisons optiques de raccordement au central et les liaisons de raccordement au central Ethernet.
Services d'accès groupés LNPA
Accès Internet de tiers (AIT)
Service d'accès des ESLC aux SSE
Service d'accès manuel aux relevés d'équipement pour les ESLC
Lignes d'accès direct
Lignes d'accès de base aux services téléphoniques payants
d) Bien public
Accès des ESLC au 9-1-1
Service d'acheminement des appels d'urgence "0"
Service de coordination par téléphoniste des appels d'urgence
Service 9-1-1 évolué - Fournisseurs de services sans fil
Service d'acheminement des appels 9-1-1 VoIP
Service de relais téléphonique
Structures de soutènement
Vérification d'occupation de ligne
e) Interconnexion
Service interurbain
Comprend le raccordement direct, le raccordement de transit d'accès, l'interconnexion au réseau CCS7 au besoin, les frais d'identification d'entreprise sans frais d'interurbain, les frais de traitement des entreprises intercirconscriptions de base, l'accès à la base de données de validation des numéros facturés et le changement de profil du réseau de l'entreprise.
Service local
Comprend, selon le cas, les frais liés au déséquilibre du trafic local, l'acheminement du trafic dans les zones de SR, l'acheminement des appels interurbains sans frais en provenance des ESLC et l'interconnexion au réseau CCS7.
Service sans fil
Comprend la radiotélécommunication, le téléappel, le satellite et l'interconnexion au réseau CCS7 au besoin.
Services de transit
Comprend le service local, le service interurbain et le CCS7, au besoin.
Service de facturation et de perception
Transmission du numéro demandé
Messages réseau pour abonnés d'entreprises de service intercirconscription avec groupe de fonctions D débranchées du réseau
Transfert en bloc d'abonnés entre des entreprises de service intercirconscription avec groupe de fonctions D
Service d'accès téléphonique Internet
Service sans frais d'interurbain - Compensation par appel
Accès pour service réseau personnel
Raccordements de types 1 et 2
Service de supervision de réponse
Installations d'essai
Circuits de réserve
f) Services non essentiels assujettis à l'élimination graduelle
Services RNC
Comprend l'accès aux vitesses DS-3, OC-3 et OC-12, le transport intracirconscription et intercirconscription métropolitain (toutes les vitesses) et le multiplexage au central.
Périodes d'élimination graduelle : cinq ans pour le transport intracirconscription DS-0 et DS-1, l'accès aux vitesses DS-3, OC-3 et OC-12 et le multiplexage connexe; trois ans pour les autres services RNC
Accès Ethernet
Période d'élimination graduelle : cinq ans
Service de transport sur réseau Ethernet
Période d'élimination graduelle : trois ans
Équipement fourni par l'abonné co-implanté
Période d'élimination graduelle : trois ans
Accès des télécommunicateurs à la sélection d'acheminement multitélécommunicateur sans frais d'interurbain
Période d'élimination graduelle : trois ans
Interrogation TNL, traduction d'appellation globale pour numéros de 10 chiffres (TAG 10) et acheminement des appels - NAE manquant
Période d'élimination graduelle : trois ans
Service de base de données de validation du numéro à facturer
Période d'élimination graduelle : trois ans
Relevés de données du client
Période d'élimination graduelle : trois ans
Service de messagerie vocale intégrée et renvoi automatique sur occupation/non-réponse
Période d'élimination graduelle : trois ans
Service d'accès par balayage de carte (de base et évolué)
Période d'élimination graduelle : trois ans
Services de téléphonistes et services connexes (autres que la vérification/interruption de ligne sur occupation)
Comprend les services de téléphonistes, d'information-annuaire, de raccordement, etc.
Période d'élimination graduelle : trois ans
Service d'accès électronique aux bases de données de l'annuaire
Période d'élimination graduelle : trois ans
Utilisation de tours et d'édifices pour l'installation d'antennes
Période d'élimination graduelle : trois ans
Points de présence virtuels pour l'accès direct
Période d'élimination graduelle : trois ans
Service d'interface réseau à réseau
Période d'élimination graduelle : cinq ans pour l'accès; sinon, trois ans
Connectivité de données
Période d'élimination graduelle : trois ans
Service de gestion de protocole Internet
Période d'élimination graduelle : trois ans
Services d'interconnexion de réseau intelligent évolué
Période d'élimination graduelle : trois ans
Acheminement du trafic de transit local sur le même circuit et du trafic des ESLC dans les zones SR
Période d'élimination graduelle : trois ans
Service local de gros
Période d'élimination graduelle : trois ans
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