Décision de télécom CRTC 2022-311

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Référence : Demande de la Partie 1 affichée le 2 octobre 2020

Ottawa, le 15 novembre 2022

Dossier public : 8690-R28-202006353

Rogers Communications Canada Inc. et Shaw Cablesystems G. P. – Demande concernant l’indemnisation pour le déplacement de lignes de transmission en Colombie-Britannique

Sommaire

Le Conseil ordonne au ministère des Transports et de l’Infrastructure (MTI) de la Colombie-Britannique, conformément au paragraphe 43(4) de la Loi sur les télécommunications (Loi) de verser une indemnisation à Rogers Communications Canada Inc. et à Shaw Cablesystems G. P. (collectivement les demandeurs) pour le déplacement de leurs lignes de transmission fixées à des poteaux en Colombie-Britannique en cas de déplacement entrepris par le MTI, à un taux au moins aussi avantageux que celui dont bénéficie TELUS Communications Inc. (TCI). Cette directive, conformément au paragraphe 43(4) de la Loi, s’applique jusqu’à ce que les pages de tarif modifiées de TCI soient approuvées par le Conseil de manière à permettre une indemnisation équitable aux entreprises rattachées. Le Conseil fait remarquer que le MTI peut s’acquitter de cette obligation soit en offrant aux demandeurs une indemnisation au moins aussi avantageuse que celle reçue par TCI, soit en cessant d’offrir une indemnisation à TCI.

Si le MTI choisit de continuer à indemniser TCI lorsqu’il exige le déplacement de poteaux, le Conseil ordonne au MTI, conformément au paragraphe 43(4) de la Loi, de conclure des ententes avec les demandeurs, en offrant une indemnisation selon des conditions au moins aussi avantageuse que celle que le MTI offre à TCI. Cette directive s’applique seulement jusqu’à ce que le Conseil approuve les pages de tarif modifiées de TCI.

De plus, le Conseil ordonne au MTI de conclure des ententes avec toute autre entreprise qui demande de conclure une entente et d’y inclure des conditions au moins aussi avantageuses que celles accordées à TCI. Cette mesure ne s’étendrait qu’aux poteaux appartenant à TCI et ne s’appliquerait que jusqu’à ce que le Conseil approuve les pages de tarif modifiées de TCI.

En même temps, le Conseil ordonne à TCI de déposer de nouvelles pages de tarif d’ici le 16 janvier 2023 avec un libellé proposé permettant une indemnisation équitable aux entreprises rattachées lorsque leurs installations doivent être déplacées à la demande du MTI.

Le Conseil ordonne à toute partie de la présente instance, soit le MTI, TCI et les demandeurs, de déposer auprès du Conseil tout protocole d’entente renégocié ou nouveau qui découle de la présente décision, dans les cinq jours de la conclusion de cette entente. De plus, toute autre modification ultérieure au protocole d’entente doit être déposée dans un délai de cinq jours après avoir été effectuée.

Contexte

  1. En Colombie-Britannique, en raison de sa présence sur le marchéNote de bas de page 1, la plupart des poteaux qui soutiennent les lignes de transmission appartiennent à TELUS Communications Inc. (TCI)Note de bas de page 2. TCI a conclu une entente, appelée protocole d’ententeNote de bas de page 3, avec le ministère des Transports et de l’Infrastructure (MTI) de la Colombie-Britannique. Le protocole d’entente énonce les conditions de l’utilisation continue par TCI des emprises routières provinciales pour son infrastructure de télécommunication.
  2. Le protocole d’entente garantit, entre autres, à TCI une indemnisation de la part du MTI lorsque ce dernier exige que TCI déplace ses poteaux le long des routes principales provinciales. Le MTI indemnise TCI à un taux fixe pour chaque poteau déplacé. Le MTI indemnise également TCI pour avoir exigé le déplacement de ses lignes de transmission à un taux fixe par mètre de gaine de ligne de transmission déplacée.
  3. TCI offre l’utilisation de ses poteaux aux entreprises concurrentes par l’intermédiaire d’un service de structures de soutènement tarifé. Ce service est réglementé par le Conseil, qui a approuvé les tarifs et les modalités. Le tarif du service de structures de soutènement de TCI indique expressément que les entreprises rattachées (également appelées ici titulaires de licence) ne reçoivent pas d’indemnisation pour des déplacements forcés entrepris par les autorités publiques comme le MTI.
  4. Le gouvernement de la Colombie-Britannique, au moyen de la politique de ligne de poteaux unique du MTINote de bas de page 4, limite généralement les lignes de poteaux le long des routes provinciales à une seule ligne. Le MTI dispose d’un processus d’autorisation à l’aide de laquelle il réglemente les installations des services publics le long des routes principalesNote de bas de page 5. Ce processus nécessite des approbations liées à diverses installations (telles que de nouveaux poteaux ou d’autres installations), mais il ne requiert aucun permis ou aucune autre approbation, ni même de préavis au MTI, lorsque des entreprises sous réglementation fédérale cherchent à fixer des lignes de transmission à un poteau existant.
  5. Au début de 2018, Rogers Communications Canada Inc. et Shaw Cablesystems G.P. (Shaw) [collectivement les demandeurs] ainsi que Bell Canada et Norouestel Inc. ont tenté de négocier conjointement des protocoles d’entente avec le MTI. TCI a également participé à quelques réunions pendant les négociations. Dès décembre 2019, les négociations ont atteint une impasse, le MTI refusant d’indemniser les entreprises rattachées pour les coûts de déplacement. En août 2022, en réponse à une demande de renseignements de la part du personnel du Conseil, le MTI et les demandeurs ont confirmé que les négociations étaient toujours dans l’impasse.

Décision de télécom 2009-462

  1. Les faits ayant mené à la décision de télécom 2009-462 sont presque identiques à ceux qui sont à la base de la présente demande. Shaw a demandé au Conseil une ordonnance pour invoquer le paragraphe 43(4) de la Loi sur les télécommunications (Loi) afin d’ordonner au MTI d’indemniser Shaw pour les coûts de déplacement des lignes de transmission occasionnés par les déplacements entrepris par le MTI en Colombie-Britannique. Shaw a réclamé une indemnisation au moins aussi avantageuse que celle que le MTI avait déjà versée à BC Hydro et à TCI.
  2. Dans la décision, le Conseil a expliqué que la question d’une indemnisation adéquate pour de tels déplacements relevait directement de la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi. Toutefois, la conclusion du Conseil reposait sur la question à savoir si la condition préalable prévue par la loi, c.-à-d. l’accès à une route principale ou à un lieu public avait été refusé, avait été respectée.
  3. Le Conseil a conclu que le MTI n’a pas exigé à Shaw d’obtenir son autorisation, par voie de permis ou autrement, dans le but de fixer ses lignes de transmission à des structures de soutènement appartenant à un tiers. Par conséquent, le Conseil a estimé que l’accès aux emprises routières provinciales n’avait pas été refusé. Étant donné que le consentement n’était pas en cause, le Conseil a conclu que sa compétence en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi n’était pas en cause.
  4. Par conséquent, le Conseil a refusé la demande de Shaw qui souhaitait que le Conseil ordonne au MTI de rembourser à Shaw ses coûts de déplacement.

Décision de télécom 2010-414

  1. À la suite de la publication de la décision de télécom 2009-462 du Conseil, Shaw a déposé une demande pour que le Conseil révise et modifie sa décision, ce qui a mené à la décision de télécom 2010-414.
  2. Shaw a indiqué qu’il y avait un doute réel quant au bien-fondé de la décision de télécom 2009-462, arguant que le Conseil avait commis une erreur de droit et de fait en concluant qu’il n’avait pas de compétence en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi. Shaw a argué que la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) était en cause, puisque Shaw n’avait pas obtenu le consentement du MTI pour garder ses lignes de transmission en place selon des modalités acceptables pour Shaw.
  3. Shaw a soutenu que les modalités d’accès aux poteaux électriques par les services publics, telles qu’elles sont énoncées dans le manuel des services publics du MTI, s’appliquent à Shaw parce qu’il s’agit d’un « service public » tel que défini dans le manuel. Shaw a également argué que le fait d’être autorisée à demander une indemnisation au MTI pour les coûts de déplacement pour seulement quelques-unes de ses installations de transmission, selon la propriété des structures de soutènement, était arbitraire.
  4. Shaw a fait valoir que le Conseil a omis de tenir compte d’un principe de base de l’ordonnance de télécom 2000-13Note de bas de page 6, selon lequel les titulaires de licence pour des structures de soutènement devraient réclamer une indemnisation pour les frais de déplacement directement auprès des tiers qui demandent le déplacement. Shaw a soutenu que ce principe avait été soulevé dans l’instance ayant mené à la décision de télécom 2009-462 et qu’il n’avait pas été traité, ce qui laisse planer un doute réel quant au bien-fondé de la décision.
  5. Dans la décision de télécom 2010-414, le Conseil a estimé que le MTI n’exigeait pas que Shaw obtienne son autorisation, par voie de permis ou autrement, pour rattacher ses installations à des structures de soutènement appartenant à un tiers et que le MTI n’avait pas non plus imposé des conditions ou de frais à Shaw comme condition d’accès aux structures de soutènement appartenant à des tiers. Le Conseil a estimé qu’il n’y avait donc pas de problème d’autorisation pour mettre en œuvre le paragraphe 43(4) de la Loi. Par conséquent, le Conseil a déterminé qu’il n’a pas commis d’erreur lorsqu’il a conclu, dans la décision de télécom 2009-462, que la demande de Shaw ne relevait pas de la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4).
  6. Le Conseil a également estimé, dans la décision de télécom 2009-462, qu’il n’était pas nécessaire d’examiner l’applicabilité du principe énoncé dans l’ordonnance de télécom 2000-13, puisque le Conseil a conclu qu’il n’avait pas la compétence, en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi. Ainsi, le Conseil a déterminé qu’il n’avait pas commis d’erreur dans la décision de télécom 2009-462 en n’abordant pas le principe lié à l’indemnisation dans l’ordonnance de télécom 2000-13.

Demande

  1. Le 28 septembre 2020, le Conseil a reçu une demande conjointe des demandeurs.
  2. Ces derniers ont affirmé dans leur demande qu’ils étaient arrivés à une impasse dans leurs négociations avec le MTI sur la question du remboursement des coûts encourus par les demandeurs associés au déplacement de leurs lignes de transmission à la suite des déplacements de structures de soutènement entrepris par le MTI.
  3. Les demandeurs ont demandé le redressement suivant :
    • Une ordonnance en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi, ordonnant au MTI de conclure des ententes de protocole distinctes avec Rogers Communications Canada Inc. et Shaw. De telles ententes fourniraient une indemnisation pour les coûts des demandeurs pour les déplacements obligatoires de leurs lignes de transmission, peu importe qui est le propriétaire des structures de soutènement. Les demandeurs ont proposé qu’une telle indemnisation soit égale au plus élevé des deux montants suivants : i) 50 % des coûts de déplacement du demandeur; ou ii) le pourcentage des coûts de déplacement des lignes de transmission de TCI qui sont remboursés par le MTI.
    • À titre subsidiaire, une ordonnance en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi, ordonnant à TCI de verser à chacun des demandeurs une part de toute l’indemnisation reçue par TCI de la part du MTI pour chaque déplacement de ligne de transmission, égale à la part respective des demandeurs des coûts totaux de déplacement de toutes les lignes de transmission des entreprises de télécommunication touchées par le déplacement, à moins et jusqu’à ce que TCI renégocie son protocole d’entente avec le MTI afin d’inclure une indemnisation aux demandeurs pour au moins 50 % de leurs coûts de déplacement de leurs lignes de transmission qui sont soutenues par des poteaux ou d’autres structures appartenant uniquement ou conjointement à TCI.
  4. Le Conseil a reçu les interventions de Bell Canada; de Bragg Communications Incorporated, exerçant ses activités sous le nom d’Eastlink (Eastlink); du MTI; de Québecor Média inc. au nom de Vidéotron ltée (Vidéotron); de TCI et d’un particulier. Le 14 décembre 2020, le dossier a été fermé à la suite de la réception des observations en réplique des demandeurs.

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • Le comportement de TCI représente-t-il une préférence indue en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi?
    • Quelle est la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi, et quelles sont les conclusions connexes du Conseil?

Le comportement de TCI représente-t-il une préférence indue en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi?

Positions des parties

Demandeurs
  1. Les demandeurs ont fait valoir que TCI bénéficie d’une préférence qu’elle s’accorde à elle-même. En effet, TCI est indemnisée pour les coûts de déplacement des lignes de transmission sur les routes principales de la Colombie-Britannique, alors que des concurrents comme les demandeurs, qui ont été obligés d’utiliser les structures de soutènement existantes, ne reçoivent aucune indemnisation.
  2. Les demandeurs ont fait valoir qu’en fait, ils sont pénalisés pour s’être conformés à la politique de ligne de poteaux unique du MTI et qu’ils subissent un désavantage anticoncurrentiel important en matière de coûts par rapport à TCI. Les demandeurs ont ajouté que ce résultat n’est pas conforme aux objectifs de la politique canadienne de télécommunication énoncés aux alinéas 7a), 7b) et 7c)Note de bas de page 7 de la Loi, ainsi qu’avec les sous-alinéas 1a)(i), 1a)(iii) et 1a)(iv)Note de bas de page 8 des Instructions de 2019Note de bas de page 9.
  3. Plus précisément, les demandeurs ont fait valoir que la préférence indue que TCI s’accorde soi-disant à elle-même compromet la capacité des concurrents tels que les demandeurs de se livrer à une concurrence efficace et d’offrir des services de grande qualité et abordables dans l’ensemble de la Colombie-Britannique tout en se conformant à la politique de ligne de poteaux unique.
Intervenants
MTI
  1. Le MTI a fait valoir qu’étant donné que l’autre requête des demandeurs les concerne et concerne TCI en particulier, il n’avait aucun commentaire à formuler, si ce n’est de faire remarquer qu’il n’est pas approprié pour les demandeurs de déduire que l’indemnisation, dont ils admettent ne pas connaître les détails dans leur demande, du MTI à TCI pour les déplacements est inadéquate. Le MTI a ajouté qu’il n’est pas approprié pour les demandeurs de chercher à obtenir une ordonnance du Conseil qui prévoie ou propose que le MTI et TCI renégocient leur entente afin d’y inclure expressément une indemnisation pour chaque demandeur d’au moins 50 % de ses coûts de déplacement.
TCI
  1. TCI a argué que l’indemnisation qu’elle reçoit du MTI n’est pas liée à la prestation d’un service de télécommunication ou à la facturation d’un tarif pour ce service, et qu’elle n’est pas non plus liée au service fourni aux demandeurs par TCI. TCI a plutôt fait valoir que l’indemnisation qu’elle reçoit est liée aux ententes d’accès de TCI avec le MTI, ce qui est nécessaire pour une entreprise lorsqu’elle construit ses lignes de transmission le long des routes principales de la Colombie-Britannique.
  2. Par conséquent, TCI a indiqué que, dans la mesure où elle reçoit une préférence en vertu de ses ententes d’accès avec le MTI, ceci ne relève pas de la portée d’une préférence en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi. Même si les ententes d’accès étaient assujetties au paragraphe 27(2), le fait que le propriétaire d’une structure de soutènement reçoive une certaine indemnisation pour le déplacement de ses installations n’est en aucun cas indu. De plus, lorsqu’un propriétaire de structure de soutènement reçoit une indemnisation pour un déplacement, c’est en raison du déplacement de l’infrastructure de la structure de soutènement.
  3. TCI a affirmé que l’indemnisation qu’elle reçoit du MTI n’est en aucun cas comparable à celle qu’a obtenue BC Hydro. Les parties ayant des coûts, des risques et des responsabilités différents auront des conditions en matière de protocole d’entente qui sont nécessaires pour tenir compte de circonstances diverses. Il s’agit d’une situation prévisible et commune, et qui n’est certainement pas indue ou inadéquate en vertu de la Loi.
  4. TCI a argué qu’en tant que propriétaire d’une structure de soutènement, sa relation avec le MTI est différente de celle que peut avoir une titulaire de licence, ce qui peut entraîner des conditions différentes en fonction de relations et de circonstances uniques. Ces différences ne permettent en aucun cas d’octroyer à TCI une préférence concernant les conditions d’indemnisation du MTI. TCI n’est pas un agent du MTI et ne peut être considérée comme s’accordant une préférence indue simplement parce que les demandeurs n’ont pas réussi à négocier une entente avec le MTI.
  5. TCI a fait valoir qu’il est déraisonnable et sans fondement pour les demandeurs d’associer l’indemnisation de déplacement d’un tiers à l’entente de TCI avec le MTI, étant donné que leurs préoccupations en matière d’indemnisation ne s’appliqueraient pas à TCI et qu’elles ne relèvent pas de la portée du paragraphe 27(2) de la Loi. L’incapacité des demandeurs à conclure une entente avec le MTI n’est en aucun cas liée à TCI, et TCI n’a aucune obligation de résoudre cet enjeu aux noms des demandeurs. TCI ne contrevient pas au paragraphe 27(2) même si certaines titulaires de licence préféreraient recevoir une indemnisation.
Bell Canada
  1. Selon Bell Canada, il serait déraisonnable que TCI, en tant qu’un tiers par rapport à la relation entre les demandeurs et le MTI, soit tenue responsable des coûts découlant des activités du MTI. Dans la mesure où TCI dispose d’un protocole d’entente avec le MTI qui comprend une clause concernant les déplacements, il serait également déraisonnable pour le Conseil d’ordonner à TCI de verser aux demandeurs une part de l’indemnisation qu’elle reçoit du MTI.
  2. Bell Canada a fait valoir que, selon toute vraisemblance, une telle indemnisation négociée entre le MTI et TCI est proportionnelle aux coûts encourus par TCI dans le cadre d’un déplacement, ou à une partie de ces coûts, et qu’elle n’inclut probablement pas les coûts pour les demandeurs. Bell Canada a fait valoir qu’une telle ordonnance du Conseil obligerait donc TCI à recouvrer encore moins de ses coûts découlant des déplacements.
  3. Bell Canada a indiqué que non seulement un tel résultat serait déraisonnable, mais qu’il serait également incompatible avec les précédents du Conseil concernant les accords d’accès municipal (AAM). Dans la décision de télécom 2019-19, le Conseil a fait remarquer que l’AMM ne devrait pas viser à établir les obligations des entreprises intimées par rapport aux tiers. Bell Canada a ajouté que le Conseil a donc estimé que l’AAM conclu entre les parties ne crée pas de responsabilité à l’égard des tiers qui n’existe pas autrement. Il n’empêche cependant pas les tiers à l’accord de négocier leur propre accord avec la ville.
Vidéotron
  1. Vidéotron a fait valoir que la préférence indue évidente accordée à TCI nuit à la capacité des demandeurs de déployer des services concurrentiels abordables dans l’ensemble de la Colombie-Britannique et, qu’en fin de compte, ce sont les consommateurs qui paieront pour cette situation injuste. Par conséquent, l’intervention du Conseil en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi est justifiée, et il doit intervenir en faveur des demandeurs.
Réplique des demandeurs
  1. Les demandeurs ont fait valoir que Bell Canada n’avait pas expliqué pourquoi une indemnisation partielle versée à TCI est plus appropriée que l’absence totale d’indemnisation des demandeurs. Bien que TCI affirme qu’il n’est pas injuste de recevoir une indemnisation pour le déplacement de ses structures de soutènement et que la préférence qui lui est accordée n’est pas liée à la prestation d’un service de télécommunication, l’entreprise omet de mentionner l’indemnisation qu’elle reçoit du MTI pour le déplacement de ses lignes de transmissionNote de bas de page 10. Ce qui est en cause, c’est l’indemnisation que TCI a reçue pour le déplacement de la ligne de transmission.
  2. Les demandeurs ont ajouté qu’il est tout simplement injuste qu’un concurrent profite de conditions d’accès préférentielles aux routes principales de la Colombie-Britannique, surtout lorsque ces conditions réduisent sensiblement les coûts de cette partie par rapport à ceux de ses concurrents. L’accès préférentiel de TCI aux routes principales de la Colombie-Britannique réduit ses coûts et lui confère une préférence injuste et anticoncurrentielle en matière de prestations de ses services de télécommunication.
  3. Les demandeurs ont fait valoir que les dispositions de l’AAM de Calgary que le Conseil a abordées dans la décision de télécom 2019-19, et auxquelles Bell Canada et TCI ont fait référence dans leurs interventions, ne sont pas non plus pertinentes pour les faits actuels. Plus précisément, rien dans cette instance ne pouvait suggérer ou prouver que la ville de Calgary refuserait de négocier un AAM prévoyant une indemnisation pour le déplacement des lignes de transmission d’une entreprise conformément aux conditions relatives aux coûts de déplacement établies par le Conseil. Ces conditions ne reposent pas sur la propriété des structures de soutènement.
Analyse du Conseil
  1. Selon le paragraphe 27(2) de la Loi : « Il est interdit à l’entreprise canadienne, en ce qui concerne soit la fourniture de services de télécommunication, soit l’imposition ou la perception des tarifs y afférents, d’établir une discrimination injuste, ou d’accorder — y compris envers elle-même — une préférence indue ou déraisonnable, ou encore de faire subir un désavantage de même nature. »
  2. Par conséquent, en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi, seule une entreprise de télécommunication canadienne peut être considérée comme s’être accordée une préférence indue ou à une autre partie ou a assujetti une autre partie à un désavantage indu. Étant donné que le MTI n’est pas une entreprise de télécommunication, le Conseil ne peut potentiellement pas juger qu’il a accordé une préférence indue à TCI ou qu’il a assujetti les demandeurs à un désavantage indu ou déraisonnable.
  3. Ainsi, l’évaluation de l’existence d’une préférence ou d’une discrimination indue dans le cas présent doit être examinée pour déterminer si TCI s’est accordée une préférence ou un avantage indu ou a assujetti les demandeurs à un désavantage indu, ou les a discriminés, en raison des conditions de son entente avec le MTI. Une telle préférence ou un tel désavantage serait également lié au service de télécommunication que TCI fournit aux demandeurs, à savoir son service de structures de soutènement, qui est soumis à un tarif et qui permet aux demandeurs d’assurer l’installation et l’entretien des lignes de transmission sur les structures de soutènement de TCI.
  4. L’analyse du Conseil d’une allégation de préférence indue en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi se déroule en deux phases. Tout d’abord, le Conseil doit déterminer si la conduite en question constitue une préférence. Dans l’affirmative, il doit alors décider si la préférence est indue ou déraisonnable. Conformément au paragraphe 27(4) de la Loi, il incombe au répondant de démontrer que la préférence n’est ni indue ni déraisonnableNote de bas de page 11.
Si la conduite en question constitue une préférence
  1. Selon les termes de l’entente, le MTI indemnise TCI pour ses coûts de déplacement à un taux fixe par poteau existant. Le MTI indemnise également TCI pour le déplacement de ses lignes de transmission, à un taux prédéterminé par mètre de gaine de câble, mais uniquement lorsqu’au moins une épissure du câble est concernée.
  2. Aucune disposition de l’entente n’oblige le MTI ou TCI à indemniser les entreprises tierces pour les coûts de déplacement de leurs lignes de transmission fixées à des poteaux électriques ou à d’autres structures de soutènement appartenant à TCI ou autorisées par elle.
  3. Aux fins du paragraphe 27(2) de la Loi, l’existence et les conditions de l’entente elles-mêmes ne constituent pas une préférence que TCI s’accorde, et elles n’imposent pas un désavantage aux demandeurs. De plus, aux fins du paragraphe 27(2), l’absence d’une entente entre le MTI et les demandeurs en vue de les indemniser des coûts associés au déplacement de leurs lignes de transmission ne signifie pas en soi que TCI s’accorde une préférence, ni qu’elle impose un désavantage aux demandeurs.
  4. Cependant, le fait que TCI ait conclu une entente contrairement aux demandeurs ne lui accorde pas clairement un avantage financier par rapport aux demandeurs et par rapport à toute autre entreprise tierce dont les lignes de transmission sont fixées aux structures de soutènement de TCI le long des emprises routières de la Colombie-Britannique. Cet avantage financier peut procurer à TCI un avantage concurrentiel sur les demandeurs. Étant donné que TCI fournit un service de télécommunication aux demandeurs par l’intermédiaire de son service de structures de soutènement, cette préférence et ce désavantage proportionnel ont trait à la prestation d’un service de télécommunication aux fins du paragraphe 27(2) de la Loi.
  5. De plus, le Conseil estime que l’entente de TCI avec le MTI, combinée aux dispositions tarifaires de TCI relatives à son service de structures de soutènement, selon lesquelles les titulaires de licence sont responsables de leurs propres coûts associés au déplacement de leurs lignes de transmission découlant des déplacements entrepris par un propriétaire, constitue une préférence que TCI s’accorde à elle-même. TCI reçoit une indemnisation pour les coûts associés au déplacement de ses propres lignes de transmission de la part du MTI, alors qu’en même temps, le service de structures de soutènement tarifé qu’elle fournit aux demandeurs ne permet pas une indemnisation semblable relativement aux lignes de transmission des demandeurs. La situation dans son ensemble représente une préférence que TCI s’accorde à elle-même, qui constitue un désavantage concurrentiel pour les demandeurs.
Si la préférence accordée à TCI est indue ou déraisonnable
  1. Conformément au paragraphe 27(4) de la Loi, le fardeau de prouver qu’une préférence n’est pas indue ou déraisonnable doit être imposé à l’entreprise présumée avoir la préférence. Dans sa réplique, TCI a fait valoir qu’elle ne bénéficie pas d’une préférence indue en recevant une indemnisation du MTI, et que les demandeurs sont libres de négocier directement avec le MTI. TCI a ajouté que les circonstances en cause n’ont pas changé de telle sorte que les décisions de télécom 2009-462 et 2010-414 devraient cesser d’être appliquées.
  2. Le Conseil fait remarquer que les dispositions du tarif de TCI qui précisent que les titulaires de licence sont responsables des coûts associés aux déplacements forcés des lignes de transport ne sont pas uniques à TCI. D’autres entreprises (en particulier, les entreprises de services locaux titulaires [ESLT]Note de bas de page 12) qui fournissent un service de structures de soutènement tarifé ont des clauses semblables.
  3. De plus, l’entente entre le MTI et TCI ne concerne pas ou ne contient pas de dispositions concernant la relation commerciale (directe ou indirecte) entre le MTI et les entreprises tierces dont les lignes de transmission sont fixées aux structures de soutènement de TCI. Ainsi, bien que TCI fournisse un service aux demandeurs au moyen de son service de structures de soutènement tarifé, les demandeurs ne sont pas parties à l’entente entre le MTI et TCI.
  4. Étant donné que les demandeurs sont libres de négocier leur propre protocole d’entente avec le MTI, le Conseil considère que la préférence que TCI s’accorde à elle-même n’est pas indue et qu’elle ne peut pas être considérée comme soumettant les demandeurs à un désavantage indu en raison de l’entente. Au contraire, TCI fournit un service tarifé aux demandeurs et remplit ses obligations en vertu de ce tarif.
  5. En résumé,
    • TCI n’est pas partie aux négociations entre les demandeurs et le MTI, et les demandeurs sont libres de négocier avec le MTI.
    • La préférence de TCI par rapport aux demandeurs ne devrait pas être jugée comme indue simplement en raison de son entente négociée avec le MTI.
  6. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que TCI s’est acquittée du fardeau de prouver que l’avantage dont elle bénéficie par rapport aux demandeurs, en vertu des termes de son entente avec le MTI, ne représente pas une préférence indue ou n’impose pas désavantage indu ou déraisonnable aux demandeurs.

Quelle est la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi, et quelles sont les conclusions connexes du Conseil?

Positions des parties

Demandeurs
  1. En plus de demander une ordonnance, en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi, en concluant que TCI a contrevenu à l’interdiction de conférer une préférence indue et en lui ordonnant d’indemniser les demandeurs, ces derniers ont demandé que, en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi, le Conseil ordonne au MTI de conclure un protocole d’entente avec les demandeurs afin de les indemniser pour le déplacement forcé des lignes de transmission.
  2. Les demandeurs ont fait valoir qu’ils tentent de négocier un protocole d’entente avec le MTI depuis janvier 2018. La question liée à l’indemnisation des coûts de déplacement des lignes de transmission entrepris par le MTI et situées sur, au-dessus, en dessous ou le long des routes principales de la Colombie-Britannique se trouve dans une impasse. Selon les demandeurs, le MTI refuse d’accepter de les indemniser pour les coûts de déplacement de leurs lignes de transmission.
  3. Les demandeurs ont expliqué que, dans l’intervalle, TCI continue de bénéficier d’une entente de longue date avec le MTI, qui comprend une indemnisation pour les coûts de TCI pour les déplacements entrepris par le MTI. Une telle indemnisation concerne à la fois les coûts de déplacement des poteaux de TCI et les coûts de déplacements des lignes de transmission de TCI.
  4. Les demandeurs ont fait valoir que cette indemnisation a une incidence anticoncurrentielle importante. En raison des monopoles de longue date sur l’infrastructure en Colombie-Britannique, ainsi que de la politique de ligne de poteaux unique du MTI, pratiquement toutes les lignes de transmission des demandeurs le long des routes principales de la Colombie-Britannique sont fixées à des poteaux appartenant à BC Hydro, à FortisBC ou à TCI. Selon les demandeurs, refuser de les indemniser met à risque leurs installations physiques actuelles et futures sur les routes principales de la Colombie-Britannique.
  5. Seulement au cours de la période de janvier à août 2020, Shaw prévoyait des dépenses importantes attribuables aux déplacements entrepris par le MTI.
    Rogers Communications Canada Inc. a pour sa part également prévu des dépenses en frais de déplacement au cours des prochaines années. Les demandeurs ont fait valoir qu’aucun de leurs coûts n’est couvert par les paiements du MTI, même si c’est ce dernier qui détermine à quel moment ces lignes doivent être déplacées. Le contraste est frappant avec la situation de TCI. TCI continue d’être au moins partiellement indemnisée pour ses coûts de déplacement pour les mêmes types de lignes. Les routes principales de la Colombie-Britannique représentent des liaisons de longue distance essentielles pour les réseaux de télécommunication filaires et sans fil des demandeurs. Si les demandeurs sont obligés de dépenser des centaines de milliers de dollars pour le déplacement des lignes de transmission, leurs plans de construction globaux dans la province seront réduits en raison de ces dépenses.
  6. Dans leur demande d’ordonnance du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi, les demandeurs ont argué que le MTI, d’un point de vue juridiqueNote de bas de page 13, consent à l’installation de leurs lignes de transmission sur les poteaux d’autres entreprises. Ils ont soutenu que, pour eux, un tel consentement n’est pas donné dans des conditions acceptables qui comprendraient une indemnisation pour les déplacements forcés. Toute indemnisation ordonnée par le Conseil devrait, selon les demandeurs, se conformer aux principes énoncés dans la décision de télécom 2001-23Note de bas de page 14.
  7. Les demandeurs ont fait valoir que le Conseil devrait publier une ordonnance en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi exigeant que le MTI conclue avec eux des protocoles d’entente, les indemnisant à hauteur de 50 % des coûts qu’ils ont encourus pour déplacer leurs lignes de transmission respectives ou à des conditions égales à celles que reçoit TCI, selon le plus élevé des deux montants. Cette ordonnance s’appliquerait quel que soit le propriétaire de la structure de soutènement, c’est-à-dire qu’elle s’appliquerait non seulement aux raccordements sur les poteaux de TCI, mais aussi aux raccordements sur les poteaux appartenant à BC Hydro ou à FortisBC.
  8. Les demandeurs proposent la solution de rechange à une ordonnance imposant à TCI de verser une partie de l’indemnisation qu’elle reçoit du MTI, proportionnellement à la part respective des demandeurs des coûts totaux de déplacement. Cet arrangement resterait en place jusqu’à ce que TCI renégocie son entente avec le MTI afin d’inclure une indemnisation pour les demandeurs d’au moins 50 % de leurs coûts.
Intervenants
MTI
  1. Le MTI a fait valoir que la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi n’est pas engagée puisqu’il n’y a pas de problème de consentement pour la construction d’une ligne de transmission. Selon le MTI, le Conseil n’a pas la compétence pour lui ordonner de conclure des ententes comprenant une indemnisation pour le déplacement des lignes de transmission, ou comprenant des exigences relatives aux lignes de transmission fixées aux structures de soutènement d’autres entreprises.
  2. Le MTI a expliqué que, par principe, il n’exige pas des demandeurs, ou de toute autre entreprise, qu’ils demandent un permis ou une autorisation pour accéder à leurs lignes de transmission ou pour les installer. Il n’existe aucun protocole d’entente avec les entreprises qui ont simplement fixé leurs lignes de transmission aux poteaux d’autres entreprises. Les protocoles d’entente sont plutôt tous conclus avec les propriétaires de poteaux. Le MTI n’exige même pas d’être informé par les entreprises lorsque ces dernières prévoient fixer des lignes de transmission. De plus, le MTI a argué que les demandeurs ne prétendent même pas s’être vu refuser l’accès.
  3. Rejetant l’affirmation contraire des demandeurs, le MTI a fait valoir que ni TCI ni aucun autre fournisseur de services publics ayant conclu un protocole d’entente avec le MTI n’est indemnisé pour les déplacements liés aux lignes fixées à des poteaux n’appartenant pas au fournisseur de services publics. En d’autres termes, le MTI a argué que TCI n’est pas traitée différemment des demandeurs.
  4. Le MTI a soulevé plusieurs effets préjudiciables qui pourraient découler du fait que le Conseil lui ordonne de conclure un protocole d’entente avec les entreprises. Le MTI a fait valoir que les résultats pourraient comprendre un avantage concurrentiel pour les demandeurs par rapport à d’autres entreprises rattachées (dont beaucoup ne sont même pas connues du MTI). De même, le principe de neutralité des coûts, que le MTI tire de la décision de télécom 2001-23, serait bouleversé. De plus, le gouvernement provincial pourrait devoir mettre en œuvre des modifications dans les politiques et les activités administratives susceptibles d’entraîner l’application de certains frais non précisés qui ne sont pas imposés actuellement.
  5. Le MTI a fait valoir que la décision de la Cour suprême Barrie Public Utilities c. Assoc. canadienne de télévision par câbleNote de bas de page 15, dans laquelle elle a déterminé que le paragraphe 43(5) de la Loi ne confère pas au Conseil la compétence sur les structures de soutènement appartenant aux entreprises de distribution d’électricité sous réglementation provinciale, devrait également s’appliquer dans le cas présent pour signifier que le paragraphe 43(4) de la Loi ne confère pas au Conseil la compétence en matière de coûts de déplacement des lignes de transmission qui se trouvent sur ou dans la structure de soutènement d’un service public, d’un organisme provincial ou d’une administration publique provinciale.
  6. Le MTI a expliqué que les faits sous-jacents n’ont pas changé depuis la conclusion du Conseil dans la décision de télécom 2009-462. Le MTI a fait valoir que son processus d’autorisation pour les services publics n’a pas changé de façon substantielle. Malgré l’existence d’un nouveau manuel de politiques des services publics, le MTI continue d’octroyer des permis de services publics uniquement pour les structures de soutènement sur les principales routes publiques provinciales et n’exige ni n’octroie de permis distincts pour les lignes installées dans ces structures de soutènement ou autrement fixées à celles-ci. Les demandeurs n’ont toujours pas besoin d’un permis pour fixer leurs lignes aux poteaux d’autres entreprises.
  7. De plus, le MTI a fait valoir que même si le paragraphe 43(4) de la Loi était appliqué, il serait prématuré de l’invoquer. Le MTI a ajouté qu’il est toujours disposé à négocier avec les demandeurs. Il est même ouvert à négocier l’indemnisation demandée, mais il semble que ce soit uniquement cette question qui motive le souhait des demandeurs de parvenir à une entente. Cette entente diffère des autres ententes mises en place par le MTI avec les propriétaires de poteaux, qui concernent d’autres enjeuxNote de bas de page 16.
  8. En ce qui concerne la solution de rechange proposée par les demandeurs, à savoir une ordonnance imposant à TCI de verser une partie de l’indemnisation ainsi que la renégociation de l’entente entre le MTI et TCI, le MTI a argué qu’il serait inapproprié de lui ordonner de renégocier son entente avec TCI.
TCI
  1. TCI a répondu à la demande en arguant que la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi n’est pas engagée parce qu’aucune condition d’accès n’est en cause. De plus, TCI a fait valoir que les faits n’ont pas changé de façon importante depuis la décision de télécom 2009-462. Par conséquent, les conclusions du Conseil dans les décisions de télécom 2009-462 et 2010-414 devraient continuer de s’appliquer.
Bell Canada
  1. Bell Canada a fait valoir que les entreprises canadiennes, notamment les demandeurs, ont droit à des frais de déplacement de la part des administrations publiques même lorsque leurs installations sont fixées aux structures de soutènement d’un tiers.
  2. Bell Canada a argué que la capacité du Conseil d’établir des conditions de répartition des coûts pour une entreprise qui utilise les structures de soutènement d’un tiers est étayée par une simple lecture de la Loi. Selon Bell Canada, une entente d’accès entre les demandeurs et le MTI pourrait, et devrait probablement comprendre une clause semblable concernant les coûts de déplacement qui accorderait aux demandeurs une certaine proportion de leurs coûts de déplacement dans le cas d’un déplacement entrepris par le MTI.
  3. Toutefois, Bell Canada a fait valoir que les demandeurs ont fait en sorte que le Conseil ne puisse pas approuver leur demande concernant le MTI. En effet, le Conseil ne peut pas tirer une conclusion sur le caractère raisonnable de la répartition de l’indemnisation des coûts de déplacement proposée sans avoir examiné au préalable les autres conditions d’accès dans une entente d’accès proposée. Bell Canada a fait valoir que les demandeurs ont répété la même erreur que celle commise par Shaw dans l’instance ayant mené à la décision de télécom 2009-462 en insistant indûment sur l’indemnisation plutôt que sur les conditions d’accès.
  4. Selon toute vraisemblance, une telle indemnisation négociée entre le MTI et TCI est proportionnelle aux coûts encourus par TCI dans le cadre d’un déplacement, ou à une partie de ces coûts, et elle n’inclut probablement pas les coûts pour les demandeurs. Bell Canada a fait valoir qu’une telle ordonnance du Conseil obligerait donc TCI à recouvrer encore moins de ses coûts découlant des déplacements.
  5. Bell Canada a indiqué que non seulement un tel résultat serait déraisonnable, mais qu’il serait également incompatible avec les précédents du Conseil concernant les accès municipaux. Dans la décision de télécom 2019-19, le Conseil a fait remarquer que l’AAM ne devrait pas viser à établir les obligations des entreprises intimées par rapport aux tiers. Le Conseil a estimé qu’une entente conclue entre les parties ne crée pas de responsabilité à l’égard des tiers qui n’existe pas autrement. Ceci n’empêche cependant pas les tiers de l’entente de négocier leur propre entente avec une administration publique.
Eastlink
  1. Eastlink a appuyé la requête des demandeurs et a exhorté le Conseil à corriger l’environnement actuel pour assurer la symétrie et l’équité concurrentielle entre les administrations gouvernementales, les propriétaires de structures de soutènement et les titulaires de licence. Eastlink a fait valoir que les dépenses supplémentaires engagées par les demandeurs pour le déplacement de leurs lignes de transmission confèrent à TCI un avantage concurrentiel important.
  2. Eastlink a argué que le paragraphe 43(4) de la Loi s’applique puisque la politique et le cadre juridique que le MTI met en pratique exigent que ce dernier donne son consentement, même s’il n’exige que des permis des propriétaires de poteaux plutôt que des titulaires de licence. Eastlink a ajouté que dans la mesure où un redressement est accordé, il devrait être appliqué à d’autres administrations. Eastlink a fait valoir qu’elle verse annuellement une somme importante pour les frais de déplacement.
  3. Eastlink a fait valoir que dans les décisions de télécom 2001-23 et 2008-91, le Conseil n’a établi aucune distinction entre les coûts de déplacement des lignes de transmission et les structures de soutènement de ces lignes. Il n’a pas non plus établi de distinction entre les lignes soutenues, ou non, par des structures appartenant à une entreprise de télécommunication. Accorder une indemnisation à une entreprise simplement parce qu’elle possède les poteaux est arbitraire et confère un avantage concurrentiel injuste aux entreprises qui profitent de ces politiques, surtout compte tenu de l’incapacité des entreprises de construire leurs propres structures de soutènement en raison de la politique de ligne de poteaux unique, qui prévaut dans la plupart des administrations.
Vidéotron
  1. Vidéotron a fait valoir qu’elle était complètement d’accord avec les demandeurs, y compris avec leur affirmation selon laquelle le Conseil a le pouvoir d’intervenir en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi. Vidéotron a soutenu que la propriété d’une structure de soutènement n’a rien à voir avec les trois facteurs énoncés par le Conseil pour évaluer la répartition des coûts de déplacementNote de bas de page 17.
  2. De plus, Vidéotron a argué que le fait de refuser aux demandeurs le droit d’être indemnisés pour leurs coûts de déplacement simplement parce qu’ils ne sont pas propriétaires des structures soutenant leurs lignes de transmission ne serait pas logique sur le plan des politiques et serait complètement arbitraire. La méthode de répartition des coûts de déplacement proposée par les demandeurs est pleinement justifiée et présente plusieurs avantages pour toutes les parties, en ce sens i) qu’elle est équitable; ii) qu’elle améliore la prévisibilité, simplifie la planification des projets; et iii) qu’elle réduirait le fardeau administratif associé au traitement des demandes de déplacement.
Réplique des demandeurs
  1. En réplique, les demandeurs ont argué que la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi n’est pas liée au refus d’accès; ce refus est plutôt provoqué par l’incapacité d’obtenir le consentement à la construction des lignes sous des conditions acceptables pour une entreprise. Ce seuil est clairement atteint dans le cas présent.
  2. Les demandeurs ont réitéré que le MTI consent à la fixation de lignes de transmission sur des structures de soutènement de tiers. Ainsi, selon les demandeurs, le MTI doit offrir des conditions acceptables pour eux, à savoir une indemnisation pour les coûts de déplacement. C’est le cas que l’accès à ces lignes a été ou non entravé.
  3. De plus, les demandeurs ont argué que le fait que le MTI choisisse de ne pas exiger un permis pour fixer des lignes de transmission à des poteaux de tiers ne modifie en rien l’exigence juridique pour les demandeurs d’obtenir le consentement du MTI pour le faire. Les demandeurs ont fait valoir que le MTI ne conteste pas ce fait.
  4. Les demandeurs ont soutenu que le Conseil a déterminé dans la décision de télécom 2005-36 que sa compétence en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi comprend le pouvoir de statuer sur les modalités de l’accès continu. Les demandeurs ont fait valoir que cette conclusion a été confirmée par la Cour d’appel fédérale lorsqu’elle a estimé que « [l]es articles 42 à 44 doivent être interprétés comme étant un ensemble complet et exclusif de règles régissant l’accès des entreprises de télécommunication aux lieux publics dans le but de construire, d’entretenir et d’exploiter des lignes de transmission. »Note de bas de page 18
  5. Enfin, comme mentionné au paragraphe 36 de la Loi, les demandeurs ont fait valoir que les dispositions de l’AAM de Calgary abordées dans la décision de télécom 2019-19, et auxquelles Bell Canada et TCI ont fait référence dans leurs interventions, ne sont pas pertinentes pour les faits actuels. Les demandeurs ont argué que rien ne pouvait suggérer ou prouver dans cette instance que Calgary refuserait de négocier une entente prévoyant une indemnisation pour le déplacement des lignes de transmission conformément aux conditions établies par le Conseil, qui ne dépendent pas de la propriété des structures de soutènement.

Analyse du Conseil

  1. La question de savoir si le Conseil peut invoquer le paragraphe 43(4) de la Loi dépend de l’interprétation juridique des termes de la disposition elle-même. Le paragraphe 43(4) se lit comme suit :


    Saisine du Conseil

    43(4) Dans le cas où l’administration leur refuse l’agrément ou leur impose des conditions qui leur sont inacceptables, l’entreprise canadienne ou l’entreprise de distribution peuvent demander au Conseil l’autorisation de construire les lignes projetées; celui-ci peut, compte tenu de la jouissance que d’autres ont des lieux, assortir l’autorisation des conditions qu’il juge indiquées.

    Comme pour tout exercice d’interprétation législative, l’approche interprétative bien établie est celle du texte, du contexte et de l’objetNote de bas de page 19. D’après le texte lui-même, il est évident que le paragraphe 43(4) de la Loi ne peut s’appliquer que lorsqu’une entreprise se voit « refuse[r] l’agrément Note de bas de page 20 » d’une « administration publique pour construire une ligne de transmission ».

  2. En pratique, le texte, le contexte et l’objet de cette disposition font que le paragraphe 43(4) de la Loi s’applique lorsque l’une ou l’autre de deux situations se présente.
  3. La première situation est celle où une administration publique (p. ex. le MTI) refuse l’accèsNote de bas de page 21 à une entreprise de télécommunication (p. ex. les demandeurs) ou à une entreprise de radiodiffusion pour la construction d’une ligne de transmission le long d’une route principale ou d’un autre lieu public.
  4. Dans ce contexte, et compte tenu de l’objet du régime de droits d’accès dont fait partie le paragraphe 43(4) de la Loi, le mot « construire » « ne se limite pas aux actes physiques d’installation ou de construction » et a été interprété par les tribunaux comme comprenant l’accès aux installations de transmission pour les entretenir et les exploiter après leur mise en placeNote de bas de page 22.
  5. La deuxième situation est celle où une administration publique, y compris un ministère du gouvernement provincial comme le MTINote de bas de page 23, permet un tel accès, mais impose des conditions sur cet accès qui sont inacceptables pour l’entreprise de télécommunication ou de radiodiffusion.
  6. Les demandeurs ont essentiellement fait valoir que c’est la deuxième situation qui se présente ici, et qu’ils ont pu obtenir le consentement du MTI pour accéder à des emprises routières, mais à des conditions qui ne sont pas acceptables pour eux. Ils ont argué que le refus du MTI de négocier un protocole d’entente avec les demandeurs s’apparente à une condition inacceptable, et que les demandeurs sont redevables d’une entente d’indemnisation acceptable puisque le MTI a tacitement consenti à l’installation de lignes de transmission.
  7. Les demandeurs ont longuement argué que le MTI donne effectivement son consentement, citant à l’appui de leur argument le Transportation Act de la Colombie-Britannique, le manuel de politiques des services publics du MTI et le paragraphe 43(3) de la Loi. Le paragraphe 43(3) indique « qu’il est interdit à l’entreprise canadienne[...] de construire des lignes de transmission sur une voie publique ou dans tout autre lieu public [...] sans l’agrément de l’administration municipale ou autre administration publique compétente ». Les demandeurs ont fait valoir que, par conséquent, d’un point de vue juridique, il est nécessaire que le MTI donne son consentement. L’argument essentiel repose sur le fait que puisque le MTI a la compétence de consentir, il doit donc accepter les conditions proposées par les demandeurs, que le MTI choisisse ou non d’exercer une telle compétence.
  8. Le MTI a répondu qu’il n’a pas besoin d’un protocole d’entente avec les demandeurs, et qu’il n’impose en aucun cas une condition d’accès en n’indemnisant pas les demandeurs comme ils le souhaiteraient. Le MTI a argué que les demandeurs ne se sont pas vu refuser l’autorisation de construire des lignes de transmission et qu’aucune condition ne leur a été imposée relativement à cette construction. En d’autres termes, étant donné que le MTI n’impose aucune exigence aux demandeurs, son consentement ne peut être suspendu ou assorti de conditions de quelque manière que ce soit.
  9. Le Conseil conclut que, bien que le MTI ait refusé d’exercer cette compétence dans le cas présent, il a néanmoins la compétence de refuser et d’imposer des conditions aux entreprises rattachées en vertu de la Transportation Act de la Colombie-Britannique et du paragraphe 43(3) de la Loi. Par conséquent, la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi est appliquée dans le cas présent.
  10. Le Conseil n’estime plus que ses conclusions antérieures soient justifiées pour les raisons énoncées ci-dessous. Le Conseil estime qu’un accès inégal ou qui fausse le marché est sans doute comparable à une condition d’accès. Lorsque le MTI indemnise une entreprise pour les coûts de déplacement des lignes de transmission sans indemniser les autres, il désavantage les demandeurs (et peut-être d’autres entités). Comme il a déjà été mentionné, la Cour d’appel fédérale a estimé que l’expression « construction de lignes de transmission » englobe non seulement l’accès pour la construction ou l’installation de lignes, mais également l’accès pour les entretenirNote de bas de page 24. Selon le Conseil, les termes « consentement » et « à des conditions qui lui sont acceptables » devraient être interprétés de manière aussi large. Comme pour l’interprétation de la Cour d’appel fédérale de la « construction de lignes de transmission », le « consentement » à des « conditions acceptables » pourrait supposer des conditions d’accès non moins favorables que celles des autres entreprises. En d’autres termes, les conditions défavorables et inéquitables accordées à une entreprise par rapport à une autre (ou à d’autres entités) constituent un refus de consentement pour l’entreprise désavantagée, même, dans le cas présent, lorsque l’administration publique refuse d’exercer son pouvoir de réglementer l’accès de certaines entreprises.
  11. Il existe suffisamment de raisons stratégiques pour lesquelles le Conseil devrait invoquer le paragraphe 43(4) de la Loi dans la présente instance. Le dossier de la présente instance indique clairement une distorsion du marché du fait que le MTI indemnise TCI pour le déplacement des lignes de transmission, mais n’indemnise pas les demandeurs pour le déplacement de lignes de même type. Les objectifs politiques de l’article 7 de la Loi comprennent, entre autres, la facilitation du développement ordonné du système de télécommunication. De plus, la neutralité concurrentielle et la concurrence en général a une place importante dans les Instructions de 2006Note de bas de page 25, et la concurrence est également un élément clé des Instructions de 2019. Remédier à cette situation inéquitable en Colombie-Britannique favoriserait la neutralité concurrentielle et permettrait de réduire l’avantage de TCI en tant que titulaire. Comme toutes les parties l’ont fait remarquer, les concurrents n’ont tout simplement pas la possibilité de construire leurs propres poteaux téléphoniques pour obtenir une indemnisation de la part de la Colombie-Britannique, compte tenu de l’objectif stratégique important consistant à prévenir le dédoublement et la prolifération des poteaux. Par conséquent, ces distorsions concurrentielles potentielles ne peuvent être réglées que dans le cadre de la relation indirecte entre le MTI, TCI et les demandeurs.
  12. Le Conseil reconnaît que cette situation est complexe. Bien que le Conseil ait conclu ci-dessus que TCI ne s’accorde pas une préférence indue dans les circonstances, l’absence de négociation de la part du MTI, combinée au fait que TCI n’a pas prévu répartir l’indemnisation avec les entreprises rattachées à ses poteaux, a créé une situation où une intervention réglementaire est nécessaire de la part du Conseil pour assurer l’atteinte des objectifs stratégiques de la Loi. Dans ces conditions, le Conseil estime qu’une approche en deux étapes, combinant ses pouvoirs en vertu du paragraphe 43(3) et de l’article 24Note de bas de page 26 de la Loi, représente le moyen le plus rapide, équitable et efficace de régler ce problème.
  13. Dans un premier temps, le Conseil estime que le fait de procéder rapidement en appliquant le paragraphe 43(4) de la Loi i) incarnerait mieux l’objectif de la Loi de faciliter le développement ordonné du système de télécommunication et ii) serait plus fidèle aux priorités concernant la neutralité concurrentielle et la promotion de la concurrence telles que présentées dans les Instructions de 2006 et de 2019. Toutefois, dans un deuxième temps, le Conseil estime également qu’il peut être plus efficace, et plus près de la réalité de la situation dans laquelle TCI est l’entreprise qui contrôle l’accès à ses poteaux, de traiter l’indemnisation aux entreprises rattachées en fonction du tarif de la structure de soutènement de TCI. Le fait d’offrir à TCI la possibilité de déposer des tarifs prévoyant une telle indemnisation i) donnera à TCI la possibilité de proposer une solution pour indemniser les titulaires de licence et ii) donnera aux parties la possibilité de formuler des commentaires sur ces détails. Le Conseil disposerait alors d’un dossier complet sur lequel s’appuyer pour déterminer le mécanisme le plus juste et raisonnable pour atteindre le résultat stratégique souhaité.
  14. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil ordonne au MTI, en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi, d’indemniser les demandeurs pour le déplacement de leurs lignes de transmission fixées à des poteaux en Colombie-Britannique dans le cas de déplacements entrepris par le MTI, et ce, à un taux au moins aussi avantageux que celui de TCI. Cette directive en vertu du paragraphe 43(4) s’applique jusqu’à ce que le Conseil approuve les pages de tarif modifiées de TCI afin de permettre une indemnisation équitable aux entreprises rattachées. Le Conseil fait remarquer que le MTI pourrait s’acquitter de cette obligation soit en offrant aux demandeurs une indemnisation au moins aussi avantageuse que celle reçue par TCI, soit en cessant d’offrir une indemnisation à TCI.
  15. Si le MTI choisit de continuer à indemniser TCI lorsqu’il exige le déplacement de poteaux, le Conseil ordonne au MTI, conformément au paragraphe 43(4) de la Loi, de conclure des ententes distinctes avec les demandeurs, en offrant une indemnisation selon des conditions au moins aussi avantageuse que celle que le MTI offre à TCI. Cette directive s’applique seulement jusqu’à ce que le Conseil approuve les pages de tarif modifiées de TCI.
  16. De plus, si le MTI choisit de continuer à verser une indemnisation à TCI lorsqu’elle a besoin de déplacer des poteaux, le Conseil ordonne à MTI de conclure des ententes distinctes avec toute autre entreprise qui en fait la demande et d’y inclure des conditions au moins aussi favorables que celles offertes à TCI. Cette mesure ne s’étendrait qu’aux poteaux appartenant à TCI et ne s’appliquerait que jusqu’à ce que le Conseil approuve les pages de tarif modifiées de TCI.
  17. En même temps, le Conseil ordonne à TCI de déposer de nouvelles pages de tarif d’ici le 16 janvier 2023 avec un libellé proposé permettant une indemnisation équitable aux entreprises rattachées lorsque le MTI exige le déplacement ou le retrait de leurs installations.
  18. Le Conseil ordonne à toute partie de la présente instance, soit le MTI, TCI et les demandeurs, de déposer auprès du Conseil tout protocole d’entente renégocié ou nouveau qui découle de la présente décision, dans les cinq jours de la conclusion de cette entente. De plus, toute autre modification ultérieure au protocole d’entente doit être déposée dans un délai de cinq jours après avoir été effectuée.
  19. Le Conseil fait remarquer que le protocole d’entente entre le MTI et TCI est complexe et comporte de nombreux types d’indemnisation différents. En remplissant les obligations qui leur sont imposées dans la présente décision, le MTI et TCI doivent faire en sorte que toute suppression de l’indemnisation pour le déplacement des lignes de transmission ne soit pas simplement compensée par des changements dans d’autres formes d’indemnisation dans le cadre de l’entente, étant donné que le Conseil ne considérerait pas une telle situation comme conforme à ses directives dans la présente décision.

Conclusion

  1. Le Conseil estime que TCI s’est acquittée du fardeau de la preuve que l’avantage dont elle bénéficie par rapport aux demandeurs, en vertu des conditions de son entente avec le MTI, ne représente pas une préférence indue ou n’impose pas désavantage indu ou déraisonnable aux demandeurs.
  2. Le Conseil ordonne au MTI, en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi, d’indemniser les demandeurs lorsque le MTI exige que ces derniers déplacent leurs lignes de transmission fixées aux poteaux en Colombie-Britannique à un taux au moins aussi favorable que celui de TCI. Cette directive en vertu du paragraphe 43(4) s’applique jusqu’à ce que le Conseil approuve les pages de tarif modifiées de TCI afin de permettre une indemnisation équitable aux entreprises rattachées. Le Conseil fait remarquer que le MTI peut s’acquitter de cette obligation soit en offrant aux demandeurs une indemnisation au moins aussi avantageuse que celle reçue par TCI, soit en cessant d’offrir une indemnisation à TCI.
  3. Si le MTI choisit de continuer à indemniser TCI lorsqu’il exige le déplacement de poteaux, le Conseil ordonne au MTI, conformément au paragraphe 43(4) de la Loi, de conclure des ententes distinctes avec les demandeurs, en offrant une indemnisation selon des conditions au moins aussi avantageuse que celle que le MTI offre à TCI. Cette directive s’applique seulement jusqu’à ce que le Conseil approuve les pages de tarif modifiées de TCI.
  4. De plus, le Conseil ordonne au MTI de conclure des ententes avec toute autre entreprise qui en fait la demande et d’y inclure des conditions au moins aussi avantageuses que celles accordées à TCI. Cette mesure ne s’étendrait qu’aux poteaux appartenant à TCI et ne s’appliquerait que jusqu’à ce que le Conseil approuve les pages de tarif modifiées de TCI.
  5. En même temps, le Conseil ordonne à TCI de déposer de nouvelles pages de tarif d’ici le 16 janvier 2023 avec un libellé proposé permettant l’indemnisation équitable aux entreprises rattachées lorsque le MTI exige le déplacement ou le retrait de leurs installations.
  6. Le Conseil ordonne à toute partie de la présente instance, soit le MTI, TCI et les demandeurs, de déposer auprès du Conseil tout protocole d’entente renégocié ou nouveau qui découle de la présente décision, dans les cinq jours de la conclusion de cette entente. De plus, toute autre modification ultérieure au protocole d’entente doit être déposée dans un délai de cinq jours après avoir été effectuée.
  7. Le Conseil fait remarquer que le protocole d’entente entre le MTI et TCI est complexe et comporte de nombreux types d’indemnisation différents. En remplissant les obligations qui leur sont imposées dans la présente décision, le MTI et TCI doivent faire en sorte que toute suppression de l’indemnisation pour le déplacement des lignes de transmission ne soit pas simplement compensée par des changements dans d’autres formes d’indemnisation dans le cadre de l’entente, étant donné que le Conseil ne considérerait pas une telle situation comme conforme à ses directives dans la présente décision.

Instructions

  1. Le Conseil est tenu, dans l’exercice de ses pouvoirs et de ses fonctions aux termes de la Loi, de mettre en œuvre les objectifs stratégiques énoncés à l’article 7 de la Loi, conformément aux Instructions de 2006 et de 2019. Conformément au sous-alinéa 1a)(i) des Instructions de 2019, le Conseil estime que les directives énoncées dans la présente décision feront progresser les objectifs stratégiques énoncés à l’alinéa 7c) de la Loi. Plus précisément, les directives du Conseil favoriseraient le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication et assureraient l’efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci serait nécessaire.
  2. Le Conseil conclut que ses directives portant sur la question plus générale à savoir si et comment les entreprises qui fixent leurs lignes de transmission à des structures de soutènement appartenant à des tiers devraient être indemnisées pour les coûts de déplacement de leurs lignes de transmission est conforme au sous-alinéa 1a)(ii) des Instructions de 2006. En effet, elles prennent des mesures qui sont efficaces et proportionnelles à leurs buts et qui ne font obstacle au libre jeu du marché concurrentiel que dans la mesure minimale nécessaire afin d’atteindre les objectifs de la politique.
  3. Comme mentionné plus haut, la neutralité concurrentielle et la concurrence en général figurent en bonne place dans les Instructions de 2006, et la concurrence est également un élément clé dans les Instructions de 2019. Remédier à cette situation inéquitable en Colombie-Britannique permettrait de promouvoir la neutralité concurrentielle et de favoriser la concurrence, conformément aux priorités présentées dans les Instructions de 2006 et 2019.

Secrétaire général

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