Décision de télécom CRTC 2022-160

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Ottawa, le 15 juin 2022

Dossier public : 1011-NOC2021-0132

Imposition d’une sanction administrative pécuniaire à Bell Canada relativement au traitement de demandes de permis d’accès à des structures de soutènement et à l’octroi de tels permis conformément à son Tarif des services nationaux

Le Conseil impose une sanction administrative pécuniaire de 2,5 millions de dollars à Bell Canada pour chacune de ses trois violations de l’article 24 et des paragraphes 25(1) et 27(2) de la Loi sur les télécommunications, pour un montant total de 7,5 millions de dollars.

Contexte

  1. Le 16 juin 2020, Québecor Média inc. a déposé, au nom de Vidéotron ltée (Vidéotron), une demande réclamant au Conseil de rendre des ordonnances relatives au traitement par Bell Canada de demandes de permis d’accès à ses structures de soutènement et à l’octroi de tels permis, conformément au Tarif des services nationaux (Tarif) de Bell Canada.
  2. Dans la décision de télécom 2021-131 (Décision), le Conseil a conclu que
    Bell Canada avait enfreint la clause 2.8 du Contrat de licence relatif aux structures de soutènement (CLRSS), inclus à son Tarif, ainsi que l’article 901.3(h) du même tarif. Le Conseil a conclu que Bell Canada avait donc dérogé à l’article 24 et au paragraphe 25(1) de la Loi sur les télécommunications (Loi) en exigeant de Vidéotron qu’elle se conforme à des normes de construction qu’elle ne respecte pas elle-même.
  3. Dans la Décision, le Conseil a également conclu que par le refus d’accès, même temporaire, et les délais déraisonnables dans le traitement des demandes de permis de Vidéotron, en gérant des travaux préparatoires requis et en déployant son propre réseau de fibre optique jusqu’au domicile (FTTH) sur des structures de soutènement présentant des irrégularités, qui ont tous entraîné le refus des demandes de permis de Vidéotron, Bell Canada s’est accordé une préférence et a imposé un désavantage indu et déraisonnable à Vidéotron, contrairement au paragraphe 27(2) de la Loi.
  4. Après avoir déterminé que Bell Canada avait enfreint l’article 24 et les paragraphes 25(1) et 27(2) de la Loi, et compte tenu des répercussions des actions de Bell Canada sur les utilisateurs finals, le Conseil a émis dans la Décision son avis préliminaire selon lequel une sanction administrative pécuniaire (SAP) devrait être imposée à Bell Canada, et a indiqué qu’il amorcerait une instance de suivi par l’entremise d’un avis de consultation afin de déterminer si l’imposition d’une SAP était appropriée et, dans l’affirmative, le montant de celle-ci.

Instance

  1. Le 16 avril 2021, le Conseil a publié l’avis de consultation de télécom 2021-132 (avis), dans lequel il a réitéré son avis préliminaire selon lequel il serait approprié d’imposer une SAP à Bell Canada et a invité les intéressés à faire part de leurs observations concernant cet avis préliminaire et sur ce que devrait être la SAP, si une SAP était estimée appropriée. Dans le cadre de l’avis, le Conseil a demandé que les parties fournissent des justifications et tous les éléments de preuve sur lesquels elles se sont appuyées pour formuler leur position, en abordant, entre autres, les critères d’établissement d’une sanction, énoncés aux paragraphes 72.002(1) et 72.002(2) de la Loi.
  2. Le Conseil a reçu les interventions de la Canadian Communication Systems Alliance (CCSA), de la Community Fibre Company (CFC), de l’Independent Telecommunications Providers Association (ITPA), de Rogers Communications Canada Inc. (RCCI), de TekSavvy Solutions Inc. (TekSavvy)Note de bas de page 1, et de Vidéotron. Bell Canada a fourni des observations et a répondu aux interventions.

Contexte du régime général des SAP

  1. Depuis 2014, la Loi prévoit un régime général de SAP. Conformément à l’article 72.001 de la Loi, le Conseil peut imposer une SAP pour les contraventions à une disposition de la Loi et les contraventions à un règlement ou à une décision prise par le Conseil en vertu de la Loi. Cependant, le paragraphe 72.002(2) de la Loi qualifie ce pouvoir en prescrivant que l’objectif du régime général des SAP est de promouvoir la conformité et non de punir. Par conséquent, afin de déterminer s’il convient ou non d’imposer une SAP dans un cas donné, le Conseil doit se demander si l’imposition d’une SAP permettrait d’atteindre l’objectif réglementaire de promouvoir la conformité et de dissuader la non-conformité future, et non pas de chercher à punir une personne pour ses violations.

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • Est-il approprié d’imposer une SAP à Bell Canada?
    • S’il est approprié d’imposer une SAP à Bell Canada, quel devrait être le montant de cette SAP?

Est-il approprié d’imposer une SAP à Bell Canada?

Positions des parties
  1. Bell Canada a indiqué qu’elle n’est pas d’accord avec l’avis préliminaire du Conseil selon laquelle il serait approprié d’imposer une SAP pour plusieurs raisons.
  2. Bell Canada a argué que les renseignements supplémentaires qu’elle a fournis dans le cadre de l’instance de l’avis pour chacune des cinq demandes de permis d’accès de Vidéotron fournissent un contexte supplémentaire concernant les demandes de Vidéotron, et que ce contexte supplémentaire démontre qu’une SAP est injustifiée et inappropriée dans ce cas. Plus précisément, Bell Canada a déposé des observations, notamment des erreurs de bonne foi dans le déploiement de la FTTH sur des poteaux dont l’accès avait été précédemment retardé ou refusé à Vidéotron; la sécurité des techniciens et d’autres normes de construction comme raisons de retarder ou de refuser les demandes de permis de Vidéotron; et le fait que l’infaillibilité ne peut être la norme pour les propriétaires de poteaux qui font face à des milliers de projets de construction sur une base annuelle, chacun comportant des considérations et des défis uniques. Bell Canada a ajouté qu’elle subit également des retards dus aux travaux préparatoires et que les retards condamnés par Vidéotron ou d’autres fournisseurs de services de télécommunication (FST) sont les mêmes que ceux subis par Bell Canada.
  3. Bell Canada a fait valoir qu’en raison de la confidentialité des renseignements sur les clients de gros, ses équipes chargées du déploiement de la FTTH ne savaient pas, et ne pouvaient pas savoir, si un demandeur était en attente d’une approbation pour un poteau particulier. Elle a argué que, par conséquent, son déploiement de la FTTH sur des structures de soutènement auxquelles Vidéotron s’est vue refuser accès n’était pas intentionnel ou ne résultait pas d’une intention de se donner un avantage.
  4. Bell Canada a également indiqué qu’une SAP serait inappropriée compte tenu d’une série de mesures d’autocorrection qu’elle a prises afin de se conformer et des nouvelles mesures et mises à jour de processus qu’elle a mises en place en vue de simplifier l’accès à ses poteaux.
  5. Bell Canada a argué que, en réponse aux préoccupations selon lesquelles l’accès aux poteaux constituait un obstacle important au déploiement de la large bande, elle a créé une table de coordination avec Hydro-Québec, le gouvernement du Québec et TELUS Communications Inc. (TCI) afin de soutenir le déploiement de projets qui apportent l’Internet haute vitesse aux entreprises et aux citoyens des régions rurales du QuébecNote de bas de page 2. Bell Canada a ajouté que cette initiative a permis de simplifier ses procédures d’accès aux poteaux afin d’améliorer l’efficacité de l’accès à ses structures de soutènement et de réduire les retards, ce qui devrait peser contre l’imposition d’une SAP par le Conseil. Par exemple, Bell Canada a indiqué qu’elle :
    • a révisé les normes de construction applicables et son processus de travaux préparatoires afin d’accélérer les projets et l’accès aux poteaux (p. ex. Bell Canada a mis en place un processus permettant aux demandeurs de permis de proposer, dans le cadre des travaux préparatoires, l’utilisation d’installations temporaires afin de contourner un poteau problématique si l’on prévoit que les travaux entraîneront de longs retards);
    • a mis en place un nouveau centre d’assistance technique afin de mieux répondre aux questions des demandeurs de permis d’accès;
    • a affecté des gestionnaires techniques spécialisés afin de répondre aux questions et d’aider à la rédaction des rapports d’étape, et a mis en œuvre un processus d’accès accéléré au Québec, qui permet aux demandeurs de permis d’accès d’effectuer eux-mêmes les inspections préliminaires techniques, sous certaines conditions;
    • a lancé un nouveau processus d’essai permettant aux demandeurs de permis d’accès d’effectuer eux-mêmes certains travaux préparatoires;
    • a demandé au Conseil d’approuver des modifications aux tarifs qui permettraient à Bell Canada de déplacer ou de faire déplacer des équipements (installations) de tiers fixés à ses structures de soutènement, dans des circonstances précisesNote de bas de page 3.
  6. Bell Canada a ajouté que, dans l’ensemble des titulaires, les mesures pourraient réduire les retards pour environ 20 % des poteaux faisant l’objet de demandes d’accès qui avaient été retardées par des travaux préparatoires, et pour le même nombre de demandes à venir.
  7. Bell Canada a également fait valoir qu’en réponse à la demande de Vidéotron et à la Décision, elle a mis en œuvre des mesures en vue de minimiser davantage la possibilité que son déploiement de la FTTH soit achevé sans respecter les normes de construction applicables. Bell Canada a argué qu’elle a :
    • a envoyé à ses équipes chargées du déploiement de la FTTH des rappels concernant la nécessité de respecter les normes de construction applicables;
    • a exigé que ses vendeurs et ses techniciens participent à une formation d’appoint concernant l’importance de la conformité aux normes de construction applicables, qui doit être suivie chaque année;
    • a mis en place un niveau supplémentaire d’inspections au moyen d’un programme de vérification de ses déploiements de la FTTH, qui sont effectuées par le même entrepreneur en ingénierie que celui qui effectue les inspections pour les titulaires de gros, afin de faire en sorte que les poteaux examinés par les équipes de déploiement du réseau FTTH de Bell Canada répondent aux mêmes critères que ceux qui s’appliquent aux titulaires de gros (Bell Canada a ajouté que lorsque des cas de non-conformité sont observés par la vérification, elle prend des mesures afin d’accroître la formation des employés qui ne respectent pas ses normes ou prend des mesures disciplinaires lorsque cela est justifié).
  8. Bell Canada a indiqué qu’elle a commencé à participer à un groupe de travail, composé d’entreprises de distribution d’électricité, de municipalités, d’entreprises et du gouvernement de l’Ontario, afin d’accélérer le déploiement de la large bande en Ontario. Bell Canada a ajouté qu’elle s’est activement engagée à trouver des moyens d’accélérer le déploiement de la large bande dans cette province et a recommandé que plusieurs des initiatives adoptées au Québec soient adoptées par le gouvernement de l’Ontario.
  9. Bell Canada a argué qu’en raison des mesures susmentionnées, qui visent à promouvoir la conformité à la Loi, une SAP serait contraire au paragraphe 72.002(2) de la Loi, qui énonce que l’objet de la sanction est de promouvoir la conformité et non de punir. De plus, Bell Canada a déclaré que les améliorations apportées au processus d’accès à la structure de soutènement ont été bien accueillies par les intervenants.
  10. À l’exception de Bell Canada, toutes les parties ont appuyé l’avis préliminaire du Conseil selon lequel il serait approprié, dans la situation actuelle, d’imposer une SAP à Bell Canada, compte tenu des violations décrites dans la Décision. Certaines parties ont indiqué qu’elles ont également connu et cerné des cas de retards indus, ainsi que d’autres problèmes d’accès, directement causés par l’action et l’inaction de Bell Canada dans le traitement d’autres demandes d’accès aux structures de soutènement de Bell Canada. D’autres parties ont argué que les mesures mises en place par Bell Canada étaient inefficaces en vue de réduire les retards, n’étaient pas appliquées à l’échelle nationale ou n’étaient que de la poudre aux yeux.
  11. Vidéotron a indiqué que, dans la Décision, le Conseil a conclu que les violations commises par Bell Canada entravent le développement du réseau de télécommunication amélioré promis aux Canadiens, qu’elles sont clairement contraires à l’intérêt public et qu’elles devraient faire l’objet de mesures d’exécution importantes afin de décourager les violations futures. Vidéotron a également déclaré que les actions anticoncurrentielles de Bell Canada vont à l’encontre des objectifs du gouvernement et sont contraires à l’intérêt public.
  12. Vidéotron a également indiqué que les nouvelles mesures annoncées par Bell Canada en octobre 2020 (et énumérées au paragraphe 13 de la présente décision) n’étaient que de la poudre aux yeux. Elle a fait remarquer que :
    • sur les sept mesures qui révisent les normes de construction applicables, cinq s’appliquaient déjà et les deux nouvelles auront peu de répercussions sur les retards indus imposés à Vidéotron et aux autres; 
    • le nouveau centre d’assistance technique est le bienvenu, mais il ne peut à lui seul assurer un véritable (et nécessaire) dialogue opérationnel entre Bell Canada et les fournisseurs de services;
    • bien que Bell Canada ait mis en place un processus permettant à un titulaire de fixer son équipement sur des structures de soutènement avant la finalisation des travaux préparatoires, cela n’empêche pas Bell Canada de refuser l’accès aux titulaires en raison de problèmes de sécurité, même lorsqu’un rapport d’ingénierie confirme l’absence de tels problèmes.
  13. RCCI a indiqué que plusieurs facteurs appuient collectivement l’imposition d’une SAP dans le cas présent, comme le comportement non conforme intentionnel de
    Bell Canada en ce qui concerne l’accès à ses structures de soutènement afin d’améliorer sa position concurrentielle et de désavantager les autres FST. RCCI a également indiqué que les structures de soutènement de Bell Canada sont des services de bien publicNote de bas de page 4 et que l’accès en temps opportun à ces structures est essentiel au déploiement efficace des installations à large bande et à la fourniture de services à large bande abordables aux Canadiens, ce qui rend les actions de
    Bell Canada dans le cas présent encore plus répréhensibles. RCCI a ajouté que le gouvernement du Québec, en réponse aux problèmes d’accès aux poteaux de
    Bell Canada, d’Hydro-Québec et de TCI, a dû intervenir et créer la table de coordination pour tenter de simplifier les initiatives provinciales en vue d’apporter la large bande à toutes les zones rurales.
  14. La CCSA et l’ITPA ont également appuyé l’avis préliminaire du Conseil selon lequel une SAP devrait être imposée dans le cas présent. La CCSA a argué que ses membres font face, de façon continue, précisément aux mêmes types d’obstacles, de retards et d’entraves financières à la mise en place de structures de soutènement dont Vidéotron s’est plainte. L’ITPA a indiqué que, comme il s’agirait de la première SAP imposée pour des violations de la structure de soutènement, le Conseil devrait envoyer un message clair de dissuasion indiquant qu’un tel comportement ne sera plus toléré.
  15. La CFC a indiqué que les améliorations au processus d’accès aux structures de soutènement de Bell Canada mises de l’avant par la table de coordination du Québec ont été refusées aux fournisseurs de services exerçant leurs activités dans la province de l’Ontario.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Le Conseil fait remarquer que l’objectif de la présente instance n’est pas de réviser et de modifier la Décision, mais d’examiner la pertinence d’imposer une SAP et, dans l’affirmative, le montant de cette SAP. Par conséquent, ni les conclusions factuelles du Conseil concernant les cinq demandes de permis d’accès de Vidéotron ni ses conclusions dans la Décision concernant les violations de l’article 24 et aux paragraphes 25(1) et 27(2) de la Loi par Bell Canada ne seront réexaminées dans le cadre de la présente instance.
  2. Pour cette raison, le Conseil estime que la plupart des renseignements supplémentaires fournis par Bell Canada dans le cadre de la présente instance, notamment ses observations concernant les erreurs de bonne foi, la sécurité des techniciens, les autres normes de construction, une norme d’infaillibilité et les retards dans les travaux préparatoires auxquels elle est également confrontée, contestent les conclusions factuelles du Conseil concernant les cinq demandes de permis d’accès de Vidéotron et les conclusions de la Décision selon lesquelles Bell Canada a commis trois violations. En outre, le Conseil estime que la plupart de ces renseignements ont déjà été déposés dans le cadre du dossier public ayant mené à la Décision. Par conséquent, le Conseil est d’avis que les renseignements supplémentaires fournis par Bell Canada ne devraient pas être pris en compte, ou réexaminés, afin de déterminer s’il est approprié d’imposer une SAP à Bell Canada compte tenu des conclusions du Conseil selon lesquelles Bell Canada a enfreint l’article 24 et les paragraphes 25(1) et 27(2) de la Loi.
  3. De même, le Conseil estime que l’argument de Bell Canada, selon lequel une SAP ne serait pas appropriée parce que les violations dans la Décision n’étaient pas le résultat d’une conduite intentionnelle de sa part, ne devrait pas être réexaminé dans la présente instance. Le Conseil fait remarquer que l’intention de Bell Canada a été prise en compte pour conclure qu’elle s’était accordé une préférence et avait imposé un désavantage indu et déraisonnable à Vidéotron, en violation du paragraphe 27(2) de la Loi. Par conséquent, le Conseil est d’avis que sa conclusion concernant une violation du paragraphe 27(2) ne devrait pas être réexaminée dans le cadre de la présente instance.
  4. Le Conseil fait également remarquer que, puisque l’objectif de la présente instance est d’examiner le bien-fondé d’imposer une SAP compte tenu des violations de l’article 24 et des paragraphes 25(1) et 27(2) de la Loi commises par Bell Canada, il ne tirera pas de nouvelles conclusions de non-conformité dans le cadre de l’avis en ce qui concerne les observations des parties selon lesquelles elles ont également connu et déterminé des cas de non-conformité possibles de la part de Bell Canada dans le cadre d’autres demandes d’accès à ses structures de soutènement.
  5. Bien qu’il reconnaisse les actions prises par Bell Canada afin de mettre en œuvre des mesures en vue de simplifier l’accès aux structures de soutènement de l’entreprise, le Conseil s’interroge sur l’efficacité de certaines de ces mesures.
  6. Dans la Décision, le Conseil a fait remarquer qu’il avait des préoccupations concernant l’accès des concurrents aux structures de soutènement de Bell Canada et qu’il était d’avis que les actions de Bell Canada étaient révélatrices d’un problème systémique ou, à tout le moins, d’un ensemble de pratiques inefficaces de sa part. Par conséquent, bien que le Conseil soit favorable aux mesures destinées à réduire les retards pour les travaux préparatoires, ces mesures ne permettront de réduire les retards que pour 20 % des poteaux faisant l’objet de demandes d’accès bloqué par les travaux préparatoires. Compte tenu des préoccupations du Conseil concernant l’accès des concurrents aux structures de soutènement de Bell Canada, le Conseil se serait attendu à ce que Bell Canada, en tant que propriétaire de structures de soutènement, ait démontré qu’elle élabore, ou prévoit élaborer, des mesures en vue de réduire les retards et à simplifier l’accès à une plus grande partie de ses poteaux.
  7. De plus, les arguments de Vidéotron à l’égard des nouvelles mesures de Bell Canada contribuent à éclairer le Conseil concernant ses préoccupations relatives à l’efficacité de certaines des mesures mises en œuvre par Bell Canada afin de promouvoir la conformité et dissuader toute future non-conformité. Une préoccupation importante est l’observation de Vidéotron selon laquelle sur les sept mesures en vue d’améliorer l’accès aux poteaux de Bell Canada, cinq s’appliquent déjà et les deux nouvelles mesures auront peu de répercussions sur les retards indus imposés à Vidéotron et aux autres concurrents. Par conséquent, l’imposition d’une SAP pourrait faire en sorte que Bell Canada, en collaboration avec d’autres fournisseurs de services, continue de simplifier ses procédures d’accès aux poteaux pour améliorer l’efficacité et réduire les retards.
  8. Le Conseil estime également que les mesures présentées ci-dessus par Bell Canada ne traitent pas directement de sa non-conformité (c.-à-d. que Bell Canada a exigé que Vidéotron se conforme à des normes de construction que Bell Canada elle-même n’avait pas respectées).
  9. En ce qui concerne les mesures mises en œuvre par Bell Canada pour tenter de remédier à ses violations de la Loi (c.-à-d. que Bell Canada a exigé de Vidéotron qu’elle se conforme à des normes de construction que Bell Canada elle-même n’avait pas respectées), le Conseil a également des préoccupations quant à l’efficacité de certaines de ces mesures. Plus précisément, ces mesures ne répondent pas directement aux préoccupations du Conseil dans la Décision.
  10. Bien que Bell Canada ait fait remarquer qu’elle a mis en œuvre un programme de vérification de ses déploiements de la FTTH, elle a fourni peu de détails sur la façon dont le programme de vérification serait mis en œuvre, ce qui, selon le Conseil, soulève plusieurs questions.
  11. En particulier, bien que le programme de vérification soit probablement la meilleure mesure mise en œuvre par Bell Canada afin de réduire la non-conformité en cause dans la Décision, il s’agit d’une mesure qui ne permet de déceler la non-conformité qu’après qu’elle s’est produite et qui ne sera aussi efficace que les solutions correctives mises en place une fois la non-conformité décelée. Il est donc difficile d’évaluer son efficacité tant que la non-conformité n’est pas observée et que des solutions correctives ne sont pas mises en place. De plus, si une non-conformité est observée, Bell Canada a seulement cerné la formation des employés et les mesures disciplinaires comme des solutions correctives, plutôt que des changements au processus ou au système en place. De plus, le fournisseur de services qui demande l’accès aux structures de soutènement de Bell Canada sera encore désavantagé en devant attendre que les irrégularités soient corrigées, ce qui pourrait retarder l’accès du fournisseur de services aux structures de soutènement de Bell Canada.
  12. De plus, en plus de la formation accrue des employés lorsque la vérification révèle une non-conformité, Bell Canada propose de renforcer la conformité par une formation annuelle obligatoire. Cependant, comme l’indique l’intervention de
    Bell Canada, ses équipes chargées du déploiement ont reçu une formation pour se conformer aux normes de construction et ont reçu des rappels de la nécessité de se conformer avant et après la demande de Vidéotron. Il semble donc qu’il ne s’agisse pas d’une nouvelle mesure et qu’elle puisse avoir peu de répercussions sur la conformité.
  13. Par conséquent, le Conseil est d’avis que les mesures correctives de Bell Canada pourraient ne pas réussir à réduire ou pourrait ne pas réduire suffisamment le type de non-conformité en cause dans la Décision.
  14. En ce qui concerne l’argument de Bell Canada selon lequel ses lignes directrices internes régissant le traitement confidentiel des renseignements sur les clients de gros empêchent ses équipes chargées du déploiement de la FTTH d’être au courant des plans de déploiement des concurrents, le Conseil fait remarquer qu’il doit y avoir des moyens de faire en sorte que les travaux actuels et futurs sur un poteau soient interrompus pour toutes les équipes si un problème est découvert avec ce poteau, sans divulguer des renseignements confidentiels détenus par l’équipe des services de gros. Le Conseil souligne également que, quel que soit le traitement confidentiel des renseignements sur les clients de gros, toutes les équipes de Bell Canada doivent se conformer aux mêmes normes de construction applicables.
  15. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime qu’il est approprié d’imposer une SAP à Bell Canada. Bien que Bell Canada ait mis en œuvre des mesures pour simplifier l’accès à ses structures de soutènement et réduire davantage le risque que son déploiement de la FTTH soit effectué en n’étant pas conforme aux normes de construction applicables, le Conseil a des préoccupations concernant l’efficacité de ces mesures. En outre, le Conseil fait remarquer que ces mesures n’ont été annoncées qu’après la dénonciation publique de la non-conformité. Par conséquent, le Conseil conclut que l’imposition d’une SAP dans le cas présent servirait l’objectif réglementaire de promouvoir la conformité et de dissuader Bell Canada de ne pas se conformer à l’avenir.

S’il est approprié d’imposer une SAP à Bell Canada, quel devrait être le montant de cette SAP?

  1. Le paragraphe 72.001 de la Loi prévoit que la violation d’une disposition de la Loi, d’un règlement ou d’une décision prise par le Conseil en vertu de la Loi constitue une violation pour laquelle une personne peut être responsable, dans le cas d’une entité corporative, d’une SAP n’excédant pas 10 millions de dollars pour une première violation ou 15 millions de dollars pour toute violation subséquente.
  2. Afin de déterminer le montant de la SAP, le Conseil doit tenir compte des critères suivants énoncés au paragraphe 72.002(1) de la Loi :
    • la nature et la portée de la violation;
    • les antécédents de l’auteur de la violation en ce qui a trait au respect de la présente loi, des règlements ou des décisions prises par le Conseil sous le régime de la présente loi;
    • tout avantage qu’il a retiré de la commission de la violation;
    • sa capacité de payer le montant de la pénalité;
    • tout autre critère prévu par règlement;
    • tout autre élément pertinent.
Positions des parties
  1. Bell Canada a indiqué qu’aucune SAP n’est justifiée, mais que si le Conseil devait décider d’imposer une telle sanction, toutes les circonstances atténuantes, telles que la nature non intentionnelle des violations, la bonne foi de Bell Canada et les récentes mesures de conformité mises en place par Bell Canada, devraient atténuer ou réduire le montant imposé.
  2. Bell Canada a également indiqué qu’en vertu du paragraphe 72.002(2) de la Loi, il est clair qu’aucune SAP n’est appropriée dans le cas présent, puisque Bell Canada se conforme déjà à la fois à la Loi et à son tarif, et qu’elle a déjà pris des mesures afin de simplifier considérablement l’accès à ses poteaux.
  3. Bell Canada a argué qu’il n’y a aucun antécédent de non-conformité de sa part et qu’elle se conforme depuis longtemps à ses obligations réglementaires en matière d’accès aux structures de soutènement.
  4. La CCSA, la CFC, l’ITPA et Vidéotron ont suggéré que le Conseil impose une SAP importante à Bell Canada afin de décourager les violations futures. La CFC et Vidéotron ont spécifiquement suggéré que le montant maximal de 10 millions de dollars pour une première violation soit imposé à Bell Canada.
  5. Vidéotron a argué que plusieurs décisions du Conseil (2006-17, 2019-423 et 2020-106) et un procès-verbal de violation démontrent que Bell Canada a contrevenu à plusieurs reprises à la Loi et aux décisions du Conseil.
  6. Vidéotron a indiqué que Bell Canada a profité des violations parce qu’en bloquant ou en retardant l’accès des concurrents à ses structures de soutènement, elle pouvait étendre et mettre à niveau son propre réseau, et donc profiter de l’occasion pour conserver des clients qui auraient bénéficié d’autres solutions si ce n’était de la conduite de Bell Canada. Vidéotron a ajouté que les violations de Bell Canada ont touché au moins 1 400 portes (résidentielles ou commerciales) et que l’un des exemples fournis dans la demande de Vidéotron, et que le Conseil a par la suite déterminé comme une violation dans la Décision, a entraîné des pertes estimées à 181 135 $. Vidéotron a ajouté que dans la fourniture de services de télécommunication, même une courte avance dans la desserte d’un marché confère un avantage lucratif à long terme, puisqu’un client qui est desservi en premier par Bell Canada en raison de l’absence de concurrents aura tendance à rester un client de Bell Canada pendant de nombreuses années, permettant à l’entreprise de profiter de ses violations.
  7. Vidéotron a également argué que les violations commises par Bell Canada sont importantes en ce qu’elles touchent directement certains des objectifs de la Loi, comme la compétitivité du marché des services de télécommunication et l’accès du public à un système de télécommunication de première classe.
  8. La CFA a indiqué que la non-conformité de Bell Canada en ce qui concerne l’accès à ses structures de soutènement n’est pas seulement systémique, mais continue. RCCI et Vidéotron ont également indiqué que Bell Canada doit être dissuadée de continuer à ne pas se conformer, puisque ses actions causent encore des problèmes aux FST pour accéder aux structures de soutènement.
  9. La CCSA et l’ITPA n’ont pas proposé de montant précis pour la SAP, mais ont laissé entendre que la capacité de payer de Bell Canada n’est pas limitée et qu’elle pourrait facilement absorber le montant maximal par violation permis par la Loi sans qu’il s’agisse d’une mesure punitive. La CCSA affirme également que la nature des violations est très grave en ce qu’elle contrecarre un important objectif gouvernemental (c.-à-d. le raccordement en temps opportun des Canadiens aux réseaux à large bande) et qu’elle donne au propriétaire de la structure de soutènement en place un avantage anticoncurrentiel très précieux sur les FST concurrents.
  10. De nombreuses parties ont indiqué que Bell Canada a une importante capacité de payer. Plus précisément, Vidéotron s’est référée au Rapport annuel 2020 de BCE Inc. pour soutenir que la SAP la plus sévère n’aurait pas de répercussions importantes sur la rentabilité de Bell Canada, étant donné que ses revenus et son bénéfice net indiqués se chiffrent en milliards. La CFC a fait référence au Rapport aux actionnaires T1 2021 de BCE Inc. pour soutenir que Bell Canada a la capacité de payer la SAP maximale de 10 millions de dollars avec des répercussions négligeables sur sa capacité financière, étant donné que les activités filaires de Bell Canada ont généré des revenus de 3,081 millions de dollars. Par conséquent, la CFC a argué que, si une SAP de 10 millions de dollars était imposée, elle représenterait moins de 0,33 % des revenus du premier trimestre de Bell Canada.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Conformément à l’article 72.001 de la Loi, toute contravention à une disposition de la Loi constitue une violation exposant son auteur à l’imposition d’une SAP. Dans la Décision, le Conseil a conclu que Bell Canada avait enfreint l’article 24 et les paragraphes 25(1) et 27(2) de la Loi en exigeant que Vidéotron respecte des normes de construction que Bell Canada elle-même ne respectait pas. Par conséquent, le même ensemble de faits, et plus précisément la même non-conformité, a amené le Conseil à conclure que Bell Canada a commis les trois violations. Au lieu d’entreprendre une analyse distincte afin de déterminer le montant de la SAP pour chaque violation, le Conseil entreprendra une seule analyse en vue de déterminer le montant de la SAP, et appliquera ce montant à chacune des trois violations.  
Nature et portée des violations
  1. Dans la Décision, le Conseil a conclu que Bell Canada avait déployé son propre réseau FTTH sur des structures présentant des irrégularités qui ont entraîné le refus des demandes de permis de Vidéotron, et a donc exigé que Vidéotron respecte des normes de construction que Bell Canada elle-même ne respectait pas. Ce faisant, le Conseil a également conclu que Bell Canada avait appliqué ces normes de construction d’une manière qui a retardé et entravé de façon déraisonnable l’accès de Vidéotron aux structures de soutènement de Bell Canada, alors qu’elle bénéficiait d’un accès plus efficace et plus rapide lors du déploiement de la FTTH sur les mêmes structures de soutènement. Par conséquent, le Conseil a déterminé que les violations commises par Bell Canada ont entravé le développement du système de télécommunication canadien, ont eu des répercussions négatives sur la concurrence et les consommateurs, et étaient contraires à l’intérêt public. La nature des violations est donc grave.
  2. Les actions de Bell Canada étaient contraires à ses obligations réglementaires en vertu de la Loi et sont susceptibles d’avoir eu des répercussions sur la concurrence. Cet avantage concurrentiel peut, à son tour, avoir un effet durable et créer ainsi des répercussions importantes pour Vidéotron, le principal concurrent de Bell Canada au Québec.
  3. La portée des violations est également grave puisque les violations de Bell Canada ont fait en sorte que Vidéotron n’a pas pu avoir accès aux structures de soutènement de Bell Canada pendant une période prolongée. Selon Vidéotron, ces retards ont représenté des pertes de plusieurs centaines de milliers de dollars, montants qui n’ont pas été contestés par Bell Canada. Par conséquent, bien que le Conseil soit conscient que les retards ne sont peut-être pas entièrement attribuables aux actions de Bell Canada, il estime que ces retards auraient probablement été réduits si Bell Canada avait corrigé les irrégularités sur les structures de soutènement avant de déployer son équipement de FTTH.
  4. En ce qui concerne l’argument de Bell Canada concernant son intention de commettre les violations, le Conseil estime que, bien qu’il puisse s’agir d’un facteur qui réduit le montant de la SAP proposée, le Conseil ne peut pas l’apprécier pleinement sur la base du dossier public actuel et ne devrait donc pas constituer un facteur atténuant pour déterminer un montant de SAP inférieur dans le cas présent. En outre, le Conseil est d’avis qu’il a déjà tenu compte de l’intention et de l’argument de Bell Canada selon lesquels la non-conformité a été commise de bonne foi lorsqu’il a conclu dans la Décision que Bell Canada s’était octroyé un avantage concurrentiel.
  5. Par conséquent, la nature et la portée des violations, qui étaient graves et ont eu des répercussions importantes, suggèrent qu’un montant de SAP plus élevé serait approprié.  
Historique de conformité
  1. Pour évaluer les antécédents de Bell Canada en matière de conformité, le Conseil se penchera sur les décisions (2006-17, 2019-423 et 2020-106) et le procès-verbal de violation cités par Vidéotron à l’appui de sa position selon laquelle Bell Canada a contrevenu à plusieurs reprises à la Loi et aux décisions du Conseil. 
  2. Le Conseil fait remarquer que dans la décision de télécom 2019-423, ses conclusions visaient Câblevision du Nord de Québec inc. (Câblevision) et non Bell Canada. Bien que Câblevision soit une filiale en propriété exclusive de Bell Canada, le Conseil estime que la conduite de Câblevision dans cette décision ne devrait pas être qualifiée de non-conformité par Bell Canada et, par conséquent, ne devrait pas être prise en compte dans la détermination des antécédents de conformité de Bell Canada.
  3. En ce qui concerne les décisions de télécom 2006-17 et 2020-106, le Conseil estime que ces décisions démontrent que Bell Canada a des antécédents de non-conformité aux décisions du Conseil. Dans la décision de télécom 2006-17, le Conseil a conclu que Bell Canada violait les restrictions relatives à la reconquête des services locaux initialement établies dans une lettre publiée le 16 avril 1998, Décision du Conseil concernant le litige du Comité directeur sur l’interconnexion du CRTC portant sur les lignes directrices relatives à la reconquête du marché concurrentiel. Dans la décision de télécom 2020-106, le Conseil a conclu que le refus de Bell Canada de signer la proposition d’entente spéciale du cadre d’interconnexion locale était contraire au cadre du Conseil relatif aux entreprises de services locaux concurrentes, qui était en place depuis l’établissement de la concurrence locale dans la décision de télécom 97-8.
  4. De même, le Conseil estime que le procès-verbal de violation démontre que Bell Canada a des antécédents de non-conformité à la Loi. Le procès-verbal de violation a conclu que Bell Canada avait commis des violations à l’égard des Règles sur les télécommunications non sollicitées du Conseil, établies en vertu de l’article 41 de la Loi. Plus précisément, entre les dates du 1er janvier 2010 et du 31 octobre 2010, des télécommunications à des fins de télémarketing ont été effectuées au nom de Bell Canada par des télévendeurs indépendants retenus par l’entreprise. Par conséquent, dans un procès-verbal de violation, Bell Canada a dû payer une SAP de 1,3 million de dollars.
  5. Toutefois, les cas de non-conformité indiqués ci-dessus ne concernent pas spécifiquement l’accès aux structures de soutènement de Bell Canada et les normes de construction applicables. Par conséquent, bien que Bell Canada ait un historique limité de non-conformité à la Loi et aux décisions du Conseil, ces cas de non-conformité ne sont pas des violations répétées et ne concernent pas les normes de construction.
  6. Par conséquent, les antécédents de Bell Canada en matière de conformité suggèrent qu’un montant de SAP inférieur serait approprié.  
Avantage retiré de la commission des violations
  1. Le Conseil estime que, bien qu’aucun dépôt détaillé n’ait été fait au dossier de l’instance pour quantifier l’avantage financier que Bell Canada a pu tirer de ses violations, toute action qui procure un avantage concurrentiel devrait être prise au sérieux étant donné le risque de préjudice important sur le marché des services de télécommunication.
  2. Le Conseil estime qu’il est raisonnable de conclure que Bell Canada, en tant que propriétaire du poteau et du réseau FTTH, a tiré un avantage de ses violations étant donné que ces violations ont pu avoir des répercussions directes sur la capacité de Vidéotron à offrir ses services de qualité supérieure aux clients finals ou sur la rapidité des offres de services de Vidéotron. De plus, le Conseil estime que Bell Canada a bénéficié du report des demandes d’accès de Vidéotron à ses structures de soutènement, puisqu’elle a profité d’un accès plus efficace et plus rapide pour déployer la FTTH sur les mêmes structures de soutènement.
  3. Le Conseil est également d’accord avec l’argument de Vidéotron selon lequel une courte avance dans la desserte d’un marché pourrait conférer un avantage lucratif à long terme, puisqu’un client qui est desservi le premier par Bell Canada, parce que celle-ci a développé son réseau FTTH aux dépens de ses concurrents, aura tendance à rester un client de Bell Canada pendant de nombreuses années, permettant à l’entreprise de profiter de ses violations.
  4. Le Conseil estime donc que Bell Canada a probablement obtenu un avantage concurrentiel de ses violations, bien que le dossier public de ce processus ne lui permette pas de quantifier cet avantage. Par conséquent, l’avantage obtenu par Bell Canada en raison des violations suggère qu’un montant de SAP plus élevé serait approprié.
Capacité de payer la sanction
  1. D’après les revenus d’exploitation provenant d’activités de télécommunication de Bell Canada déposés auprès du ConseilNote de bas de page 5, qui comprennent les revenus d’activités de télécommunication canadiennes provenant des services locaux et d’accès, interurbains, de données, de ligne privée, Internet et sans fil, ainsi que les rapports financiers accessibles au public pour ses activités de télécommunication, le Conseil estime que Bell Canada a la capacité de payer tout montant de SAP dans la fourchette prescrite par la Loi pour chacune des trois violations.
  2. Le Conseil estime en outre que, compte tenu de l’importante capacité de payer de Bell Canada, l’imposition d’un montant de SAP plus élevé ne risque pas d’avoir de répercussions négatives sur le système de télécommunication canadien. Plus particulièrement, le Conseil est d’avis que l’imposition d’un montant de SAP plus élevé à Bell Canada ne serait pas contraire aux alinéas 7b) et 7c) de la LoiNote de bas de page 6, au sous-alinéa 1a)ii) des Instructions de 2006Note de bas de page 7, et à l’alinéa 1a) des Instructions de 2019Note de bas de page 8 (collectivement les Instructions), car il est peu probable que la SAP entrave la capacité de Bell Canada d’investir dans le système de télécommunication canadien ou ait des répercussions sur la stabilité financière des activités de télécommunication de Bell Canada.
  3. Le Conseil estime également que, compte tenu de l’importante capacité de payer de Bell Canada, le montant de la SAP devrait être suffisamment élevé pour atteindre l’objectif réglementaire de promotion de la conformité et de dissuasion de la non-conformité à la Loi à l’avenir.  
  4. Par conséquent, l’importante capacité de Bell Canada à payer une SAP suggère qu’un montant de SAP plus élevé serait approprié afin de faire en sorte que Bell Canada se conforme à la Loi à l’avenir.  
Critères prévus par règlement
  1. À l’heure actuelle, aucun autre critère n’a été établi.
Autres éléments pertinents
  1. Bell Canada a mis en œuvre des mesures en vue de simplifier l’accès à ses structures de soutènement et à réduire davantage le risque que son déploiement de la FTTH soit achevé sans respecter les normes de construction applicables. Bien qu’il ait quelques doutes quant à l’efficacité de ces mesures, le Conseil estime qu’elles devraient, au moins dans certains cas, réduire les retards entourant l’accès aux poteaux et diminuer, dans une certaine mesure, la probabilité d’une future non-conformité.
  2. Par conséquent, les mesures mises en œuvre par Bell Canada suggèrent qu’un montant de SAP inférieur serait approprié.
  3. Le Conseil estime qu’il devrait parvenir à un montant de SAP qui serait suffisant pour promouvoir la conformité et dissuader toute future non-conformité. Par conséquent, compte tenu des facteurs susmentionnés, le Conseil estime qu’une SAP de 2,5 millions de dollars pour chacune des trois violations commises par Bell Canada serait appropriée, pour un montant total de SAP de 7,5 millions de dollars.

Conclusion

  1. Le Conseil détermine qu’il est approprié d’imposer une SAP à Bell Canada pour ses violations de l’article 24 et des paragraphes 25(1) et 27(2) de la Loi, et impose une SAP totale de 7,5 millions de dollars à Bell Canada (2,5 millions de dollars pour chacune de ses trois violations).
  2. Ce montant de la SAP fera en sorte que Bell Canada, en collaboration avec d’autres fournisseurs de services, établisse d’autres mesures afin de prévenir de futurs cas de non-conformité et de continuer à simplifier ses procédures d’accès aux poteaux afin de réduire les retards au minimum.
  3. Bien que le Conseil s’attende à ce que l’imposition d’une SAP à Bell Canada favorise la conformité et dissuade toute future non-conformité dans l’octroi des permis d’accès aux structures de soutènement de Bell Canada, conformément aux normes de construction applicables, le Conseil continuera de surveiller la situation et, au besoin, prendra les mesures appropriées en cas de future non-conformité.

Instructions

  1. Le Conseil est tenu, dans l’exercice des pouvoirs et fonctions que lui confère la Loi, de mettre en œuvre les objectifs de la politique établis à l’article 7 de la Loi, conformément aux Instructions. Le Conseil estime que ses conclusions énoncées dans la présente décision sont conformes aux Instructions pour les raisons mentionnées ci-dessous.
  2. Le Conseil estime que les conclusions qu’il a tirées dans la présente décision favorisent l’atteinte des objectifs de la politique canadienne de télécommunication énoncés aux alinéas 7a), 7b), 7c), 7f) et 7h) de la LoiNote de bas de page 9. Le Conseil estime que ses conclusions font particulièrement progresser les alinéas 7a) et 7c), puisque le fait de dissuader toute violation future de la part de Bell Canada, par laquelle elle exigerait que Vidéotron se conforme à des normes de construction que Bell Canada elle-même n’a pas respectées, est susceptible de faciliter le développement ordonné du système de télécommunication canadien et d’en accroître son efficacité et sa compétitivité.
  3. Les Instructions de 2006 exigent que le Conseil se fie, dans la plus grande mesure du possible, au libre jeu du marché et qu’il réglemente, là où il est encore nécessaire de le faire, d’une manière qui ne fait obstacle au libre jeu d’un marché que dans la mesure minimale nécessaire pour atteindre les objectifs stratégiques de la Loi. Elles exigent également que le Conseil précise, lorsqu’il a recours à des mesures réglementaires, l’objectif stratégique que ces mesures permettent d’atteindre.
  4. Le Conseil estime que ses conclusions dans la présente instance, à savoir la pertinence d’un montant de SAP inférieur pour assurer la conformité future sans avoir de répercussions sur la stabilité financière des activités de télécommunication de Bell Canada, sont conformes aux Instructions de 2016, en particulier à l’énoncé selon lequel, lorsqu’il est nécessaire de recourir à la réglementation, le Conseil devrait le faire d’une manière efficace et proportionnelle à l’objet de la réglementation.
  5. Les Instructions de 2019 précisent que dans l’exercice des pouvoirs et fonctions que lui confère la Loi, le Conseil devrait examiner comment ses décisions peuvent promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation.
  6. Le Conseil estime que ses conclusions dans la présente instance sont conformes aux Instructions de 2019 et qu’elles favorisent la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation, notamment en ce qui concerne les sous-alinéas 1a)(i), 1a)(iii), 1a)(iv), 1a)(v) et 1a)(vi). Par exemple, les conclusions du Conseil énoncées ci-dessus visent à assurer la conformité à la Loi, au Tarif et à toute entente entre les parties. Ces conclusions visent également à favoriser une plus grande collaboration dans la fourniture de services de télécommunication afin que les consommateurs puissent bénéficier des avantages d’une concurrence saine entre les fournisseurs et avoir accès à des services différenciés, abordables et de haute qualité. Le Conseil estime que ses conclusions dans le cadre de la présente instance favoriseront la conformité, par tous les propriétaires de poteaux canadiens, à leurs obligations réglementaires et à la Loi, ainsi qu’un accès plus rapide aux structures de soutènement pour les titulaires.

Secrétaire général

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