Décision de télécom CRTC 2021-10

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Ottawa, le 14 janvier 2021

Dossier public : 8662-E17-202002731

Bragg Communications Incorporated, exerçant ses activités sous le nom d’Eastlink – Demande de révision et de modification de l’ordonnance de télécom 2020-60 relativement aux modalités d’accès aux services d’accès haute vitesse de gros groupés des entreprises de câblodistribution

Le Conseil rejette la demande de révision et de modification de l’ordonnance de télécom 2020-60 présentée par Eastlink parce que l’entreprise n’a pas démontré qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance.

Contexte

  1. Le Conseil réglemente les services d’accès haute vitesse (AHV) de gros fournis par les grandes entreprises de câblodistribution et compagnies de téléphone (collectivement les fournisseurs de services AHV de gros). Les concurrents, également appelés clients des services d’AHV de gros, peuvent utiliser ces services pour fournir leurs propres services Internet de détail et d’autres services. Les services AHV de gros groupés offerts par les grandes entreprises de câblodistribution sont aussi appelés services d’accès Internet de tiers (AIT).
  2. Dans la décision de télécom 2018-458, le Conseil a ordonné à Bragg Communications Incorporated, qui exerce ses activités sous le nom d’Eastlink (Eastlink), de modifier son Tarif général AIT pour i) inclure une modalité précise autorisant les clients des services AHV de gros à revendre le service AHV sur une base de gros et ii) exiger la suppression de toute modalité qui limite les services qu’un client des services AHV de gros peut offrir aux services Internet de détail et aux services de voix sur protocole Internet (VoIP) de détail.
  3. De plus, dans l’avis de consultation de télécom 2018-459, le Conseil a ordonné aux autres entreprises de câblodistribution, telles que Cogeco Communications inc. (Cogeco); Québecor Média inc., au nom de Vidéotron ltée (Vidéotron); Rogers Communications Canada Inc. (RCCI); et Shaw Cablesystems G.P. (Shaw) [collectivement avec Eastlink les entreprises de câblodistribution], de démontrer les raisons pour lesquelles les conclusions tirées par le Conseil dans la décision de télécom 2018-458 ne devraient pas s’appliquer à elles aussi.
  4. Les entreprises de câblodistribution ont ensuite déposé leurs pages de tarif proposées respectives intégrant les conclusions susmentionnées pour approbation du Conseil. Dans sa demande (avis de modification tarifaire [AMT] 40), Eastlink a proposé d’inclure une modalité supplémentaire dans son tarif qui lui permettrait d’appliquer une limite de crédit à ses clients des services AHV de gros. La disposition proposée en matière de limite de crédit, article 102.13.7, se lit comme suit :

    [Traduction]
    Une limite de crédit peut être fixée par Eastlink lorsqu’elle détermine raisonnablement, à sa seule discrétion, qu’il existe un risque de crédit ou un risque de perte. Le client doit fournir à Eastlink les renseignements financiers qu’Eastlink juge nécessaires pour déterminer la solvabilité du client. Eastlink peut réviser (et si nécessaire modifier) la limite de crédit du client de temps à autre. Le montant total dû par le client à Eastlink à tout moment ne doit pas dépasser la limite de crédit du client fixée par Eastlink. Si le client dépasse sa limite de crédit, Eastlink a le droit de suspendre ou de résilier les services jusqu’à ce que le client effectue un paiement suffisant pour ramener son compte respecte  la limite de crédit prévue.

  5. Dans l’ordonnance de télécom 2020-60, le Conseil a ordonné aux entreprises de câblodistribution de déposer des pages de tarif révisées reflétant les conclusions du Conseil sur les modalités de leurs services AHV de gros groupés respectifs, comme il est indiqué dans l’annexe de l’ordonnance. Entre autres, le Conseil a rejeté la demande d’Eastlink d’ajouter une disposition relative à la limite de crédit, estimant que les protections existantes dans le tarif, y compris la possibilité d’imposer des frais d’intérêt, étaient suffisantes pour protéger les intérêts d’Eastlink. Le Conseil a estimé que les limites de crédit pouvaient nuire à la concurrence sur le marché de services de détail si un client des services AHV de gros obtenait un nombre important de nouveaux utilisateurs finals en un mois, et donnaient trop de pouvoir à Eastlink dans sa relation avec ses clients des services AHV de gros.
  6. Conformément à l’ordonnance de télécom 2020-60, les entreprises de câblodistribution ont déposé leurs pages de tarif révisées respectives, que le Conseil a approuvées de manière définitive dans l’ordonnance de télécom 2020-277.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande d’Eastlink, datée du 13 mai 2020, dans laquelle l’entreprise lui demandait de réviser et de modifier l’ordonnance de télécom 2020-60. Eastlink a fait valoir qu’il existait un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance en raison d’erreurs de fait, de droit et de principe commises par le Conseil, ainsi qu’en raison d’un changement fondamental de circonstances survenu depuis la date de publication de l’ordonnance.
  2. Eastlink a précisé que le Conseil n’a pas reconnu que la principale préoccupation de l’entreprise n’est pas de se protéger contre les retards de paiement, mais plutôt d’atténuer le risque financier important en cas de non-paiement. Elle a indiqué que l’établissement de limites de crédit lui permettra de faire en sorte que les clients des services AHV de gros soient en mesure de payer le montant dû jusqu’à la limite de crédit, ce qui réduira le risque en cas de défaut de paiement. Pour Eastlink, cela n’est pas un obstacle pour ces clients, puisqu’ils peuvent simplement effectuer un paiement pour que leur compte respecte la limite de crédit et qu’ils puissent poursuivre leurs activités. Si les clients ne sont pas en mesure de payer les frais mensuels récurrents de leurs services AHV de gros ou choisissent de ne pas le faire, Eastlink supportera sans conteste les pertes financières liées à un défaut de paiement pouvant aller jusqu’à deux mois, voire plus.
  3. Eastlink a ajouté que les dispositions tarifaires existantes sont insuffisantes pour assurer la couverture du risque de non-paiement. Même si une disposition tarifaire a aidé à réduire le risque, ce n’est pas une raison suffisante pour lui refuser le droit d’appliquer une pratique commerciale commune sans élément de preuve suffisant qu’une telle procédure causerait un préjudice ou serait contraire aux objectifs de la Loi sur les télécommunications (Loi) ou des politiques du Conseil.
  4. Eastlink a fait valoir que dans l’AMT 40, elle avait simplement demandé d’appliquer une pratique habituelle dans toute relation commerciale pour les clients des services de résidence et d’affaires, qu’ils soient petits ou grands. Conformément à cette entente, aucun autre service ou fourniture n’est reçu tant qu’un paiement n’est pas effectué pour respecter la limite de crédit. Eastlink a fait remarquer que même les clients des services AHV de gros sont libres de fixer des limites de crédit pour leurs propres utilisateurs finals.
  5. Eastlink a argué qu’il n’existait aucun élément de preuve dans le dossier de l’instance liée à l’AMT 40 qui soutient que les limites de crédit sont des pratiques injustifiées, qu’elles sont préjudiciables ou qu’elles ne respectent pas les objectifs de la Loi ou d’autres politiques du Conseil. Eastlink a ajouté que la seule préoccupation concernant le préjudice que le Conseil a soulevée dans l’ordonnance de télécom 2020-60 était que les limites de crédit empêcheraient un client d’acquérir un grand nombre d’abonnés au cours d’un seul mois.
  6. Eastlink a fait valoir que les raisons du Conseil pour rejeter sa demande d’appliquer des limites de crédit n’étaient pas étayées par les faits. Elle a également fait valoir que le Conseil n’a pas tenu compte d’un principe de base selon lequel une entreprise devrait être en droit de gérer ses risques de paiement conformément aux pratiques commerciales, alors qu’il n’y avait pas d’élément de preuve évident qu’une telle pratique porterait préjudice aux clients des services AHV de gros.
  7. Eastlink a fait valoir que le Conseil n’avait pas reconnu qu’une limite de crédit protégerait l’entreprise d’une perte financière pouvant aller jusqu’à deux mois ou plus de paiements en souffrance, et que son rejet était injustifié et constituait une intervention réglementaire inappropriée sur sa capacité à gérer ses activités. Eastlink a également allégué que l’ordonnance de télécom 2020-60 n’était pas conforme aux Instructions de 2006Note de bas de page 1.
  8. Le Conseil a reçu des interventions de City Wide Communications Incorporated (City Wide), de Distributel Communications Limited (Distributel), des Opérateurs de réseaux concurrentiels Canadiens (ORCC), de TekSavvy Solutions Inc. (TekSavvy), de Shaw et de Vidéotron (collectivement les intervenants).

Critères de révision et de modification

  1.  Le Conseil a précisé, dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, les critères qu’il utiliserait pour évaluer les demandes de révision et de modification présentées conformément à l’article 62 de la Loi. En particulier, le Conseil a déclaré que les demandeurs doivent prouver qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale, par exemple en raison i) d’une erreur de droit ou de fait; ii) d’un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision; iii) du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans l’instance initiale; iv) d’un nouveau principe découlant de la décision.

Questions

  1.  Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente ordonnance :
    • Le Conseil a-t-il commis une erreur en fondant sa décision sur de nombreuses raisons non pertinentes ou non fondées?
    • Le Conseil a-t-il commis une erreur en ne tenant pas compte du principe selon lequel les limites de crédit sont une pratique commerciale normale?
    • Y a-t-il eu un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la publication de l’ordonnance de télécom 2020-60 qui requiert l’inclusion d’une disposition relative à la limite de crédit?
    • L’ordonnance de télécom 2020-60 est-elle conforme aux Instructions de 2006 et de 2019Note de bas de page 2?

Le Conseil a-t-il commis une erreur en fondant sa décision sur de nombreuses raisons non pertinentes ou non fondées?

Positions des parties

  1. Comme il est indiqué ci-dessous, Eastlink a argué que plusieurs des observations spécifiques sur lesquelles le Conseil a fondé sa conclusion n’étaient pas pertinentes, n’étaient pas étayées par des éléments de preuve ou étaient tout simplement erronées.
Le Conseil a fait des observations non pertinentes liées au retard de paiement, et non au non-paiement
  1. Eastlink a fait valoir que les affirmations du Conseil selon lesquelles elle sera indemnisée adéquatement pour les retards de paiement (grâce à la possibilité de facturer des intérêts et aux taux actuels des services AHV de gros) ne sont pas pertinentes, puisque les limites de crédit visent à réduire le montant du risque financier encouru par Eastlink, en faisant en sorte que les clients des services AHV de gros paient dans ces limites de crédit, et donc à réduire le risque de non-paiement, et non pas de retard de paiement.
  2. Eastlink a fait valoir qu’elle avait expliqué dans l’instance ayant mené à l’ordonnance de télécom 2020-60 pourquoi les dispositions tarifaires existantes, telles que le droit de facturer des intérêts et la menace de suspension ou de résiliation, étaient inefficaces pour prévenir ou limiter le risque financier découlant de situations de non-paiement. Selon Eastlink, ces éléments de preuve ont montré que certains clients des services AHV de gros étaient constamment en situation de non-paiement et qu’elle ne pouvait pas récupérer le paiement à moins de menacer de débranchement. Eastlink a fait valoir que la menace de résiliation ne résout pas le problème.
  3. Eastlink a indiqué que les tarifs actuels des services AHV de gros ne couvrent pas suffisamment les coûts nécessaires pour engager des ressources afin d’entamer des poursuites contre les clients pour cause de non-paiement, ce qui se traduit par une réduction des investissements et une incidence sur les collectivités qui pourraient ne pas recevoir de mises à niveau ou certaines caractéristiques de service.
  4. Distributel a fait valoir que, au paragraphe 99 de l’ordonnance de télécom 2020-60, le Conseil a pris en compte la position d’Eastlink. Elle a ajouté que le Conseil comprenait les différences entre le paiement à temps et la limitation des risques financiers, puisque recourir contre les actifs d’une autre partie ne résulte pas d’un retard de paiement, mais plutôt d’un défaut de paiement.
  5. City Wide, les ORCC et TekSavvy ont argué que le tarif d’Eastlink atténue suffisamment le risque de non-paiement par ses dispositions en matière de dépôt et de frais d’intérêt et que le risque de perte pour l’entreprise est confondu ou exagéré.
  6. City Wide et les ORCC ont fait valoir qu’Eastlink dispose de méthodes commerciales et juridiques pour atténuer le risque de non-paiement. Ils ont également suggéré que si Eastlink subit une perte financière en raison d’un défaut de paiement, l’entreprise pourrait gagner des abonnés supplémentaires de détail grâce aux clients des services AHV de gros qui ont cessé leurs activités.
  7. City Wide a également fait remarquer qu’Eastlink facture à l’avance les services AHV de gros qui seront fournis à l’avenir, ce qui lui permet de facturer à l’avance 50 % des frais mensuels récurrents.
  8. Shaw et Vidéotron ont indiqué qu’ils sont d’accord avec Eastlink que le Conseil a commis des erreurs de fait en qualifiant de manière erronée les limites de crédit comme un moyen de remédier aux paiements en souffrance et en ne tenant pas compte des éléments de preuve selon lesquels certains clients des services AHV de gros se trouvaient constamment en situation de non-paiement, entraînant des pertes représentant  plus de deux mois de frais.
  9. Eastlink a répondu que le régime de services AHV de gros n’a pas été conçu pour transformer les fournisseurs de services dotés d’installations en institutions financières qui sont obligées d’assumer les risques financiers des concurrents.
  10. Eastlink a également répondu que sa préoccupation ne porte pas sur la période de facturation, mais plutôt sur le fait qu’elle n’a aucun recours possible pour recouvrer les montants impayés dûs, jusqu’à ce que 60 jours se soient écoulés.
  11. En ce qui concerne la possibilité de récupérer les activités de détail des clients des services AHV de gros qui ont cessé leurs activitésEastlink a répondu qu’il n’y a aucune garantie qu’elle gagnera ces clients de détail pour ses activités de détail, puisqu’il y a un certain nombre d’entreprises sur le territoire de desserte d’Eastlink vers lesquelles ces utilisateurs finals pourraient se tourner, y compris d’autres clients des services AHV de gros et des fournisseurs.
Le Conseil n’avait aucun élément de preuve pour établir que les limites de crédit causeraient un préjudice aux concurrents
  1. Eastlink a argué que l’observation du Conseil selon laquelle les limites de crédit nuiraient à la concurrence sur le marché des services de détail n’est pas fondée, car il n’existe aucun élément de preuve pour établir que les limites de crédit porteraient préjudice aux concurrents ou les empêcheraient d’acquérir un grand nombre de clients sur le marché des services de détail en un mois. Eastlink a aussi argué qu’une limite de crédit n’empêche pas une entreprise de se développer et qu’elle ne constitue pas un obstacle à l’exploitation d’une entreprise.
  2. City Wide a signalé que la relation entre Eastlink et les clients des services AHV de gros n’est pas une relation commerciale normale, car le service AHV de gros est un service réglementé qui empêche Eastlink d’utiliser son pouvoir de marché pour imposer des modalités déraisonnables, y compris des limites de crédit, à ses clients.
  3. City Wide et les ORCC ont indiqué que les dépôts et l’établissement d’un montant de limite de crédit équivalent à un paiement anticipé, lequel avance des montants importants de fonds sans intérêt à Eastlink et limite la capacité des concurrents à offrir des services de télécommunication abordables à leurs utilisateurs finals, tout en subventionnant et en aidant efficacement Eastlink à renforcer son pouvoir de marché.
  4. Les ORCC ont fait valoir que de nombreux clients des services AHV de gros n’ont probablement pas de dépôts auprès d’Eastlink à l’heure actuelle et que la combinaison de limites de crédit et de dépôts d’Eastlink représente véritablement un prêt sans intérêt qui l’assure et la subventionne pour une période allant jusqu’à deux mois de frais mensuels récurrents.
  5. City Wide, Distributel, les ORCC et TekSavvy ont fait valoir que les limites de crédit pourraient compromettre la capacité d’un client de services AHV de gros d’acquérir un grand nombre de nouveaux abonnés au cours d’un mois donné. City Wide a précisé qu’un nouveau client qui réussit peut se trouver dans l’impossibilité de traiter toute nouvelle commande de services, à moins qu’il ne satisfasse rapidement à la disposition d’Eastlink concernant la limite de crédit. Les ORCC ont fait valoir que même les clients prospères qui ne présentent aucun risque de non-paiement peuvent avoir du mal à verser d’avance l’équivalent de deux mois de frais mensuels récurrents à Eastlink sur demande. TekSavvy a indiqué que les limites de crédit permettent à Eastlink de contrôler directement l’augmentation des abonnements du client.
  6. Shaw a fait valoir que le Conseil avait agi arbitrairement en concluant que les limites de crédit empêcheraient les concurrents d’acquérir un grand nombre d’utilisateurs finals au cours d’un même mois en ne tenant pas compte des éléments de preuve fournis par Eastlink selon lesquels i) les clients ajoutés au cours d’un mois seraient appliqués à la facturation du mois suivant; ii) l’acquisition d’utilisateurs finals augmenterait les revenus des concurrents, ce qui accroîtrait leur capacité de payer et d’augmenter le crédit disponible pour la facturation du mois suivant; et iii) les limites de crédit sont une pratique commerciale courante.
  7. Eastlink a répondu qu’une limite de crédit n’empêche pas l’acquisition d’un grand nombre de clients au cours d’un mois donné, car un client de services AHV de gros établirait un montant qu’il peut avoir en souffrance au moment où il reçoit sa facture avant que le paiement ne soit exigé. Elle a ajouté que le paiement ne doit pas nécessairement correspondre à la totalité du solde en souffrance. Il peut plutôt s’agir d’une partie du solde en souffrance de sorte que, une fois le paiement effectué, le solde en souffrance du client respectesa limite de crédit. Eastlink a en outre fait valoir qu’un client des services AHV de gros qui augmente son nombre d’abonnés, et donc ses revenus, aurait une capacité accrue à payer et à effectuer un paiement sur le compte pour réduire la limite de crédit.
  8. Eastlink a précisé que la limite de crédit pour chaque client de services AHV de gros serait déterminée en fonction de ses frais mensuels récurrents, de son historique de paiement et de son risque anormal de perte, et non pas en fonction de deux mois de frais mensuels récurrents. Eastlink a ajouté que le client pouvait appliquer le dépôt ou effectuer des paiements partiels à sa limite de crédit et que, lorsque la limite de crédit est atteinte, aucun autre service AHV de gros ne serait fourni.
Eastlink ne propose plus l’accès aux renseignements confidentiels dans le cadre de la disposition et le Conseil devrait approuver les limites de crédit
  1. Eastlink a fait valoir que la préoccupation du Conseil en ce qui concerne le fait qu’Eastlink disposerait d’un pouvoir discrétionnaire pour fixer et modifier les limites de crédit ainsi que pour obtenir des renseignements financiers confidentiels des clients afin de les utiliser dans sa stratégie concurrentielle ne constitue pas un motif suffisant pour rejeter la disposition relative à la limite de crédit. Elle a précisé que les renseignements financiers permettent de comprendre le risque de crédit afin d’évaluer le montant de la limite de crédit et qu’elle ne voit pas pourquoi le droit de fixer une limite de crédit préoccupe le Conseil.
  2. Toutefois, Eastlink a précisé qu’elle ne conservait pas le libellé proposé pour l’accès aux renseignements confidentiels compte tenu des préoccupations du Conseil, de sorte que la raison pour laquelle le Conseil a rejeté l’ajout de la disposition relative à la limite de crédit n’est plus pertinente. Toutefois, Eastlink a argué que le Conseil avait le pouvoir discrétionnaire de rejeter cette partie du libellé proposé s’il avait des préoccupations.
  3. Eastlink a indiqué que le Conseil a toute discrétion pour, et devrait, modifier sa conclusion et approuver, même en partie, le droit d’Eastlink d’appliquer des limites de crédit.
  4. Shaw a soutenu le point de vue selon lequel le Conseil avait l’option de modifier le libellé de l’article du tarif proposé, comme il l’a fait pour d’autres articles du tarif examinés dans l’ordonnance de télécom 2020-60, et que les préoccupations du Conseil concernant le libellé du tarif n’étaient pas suffisantes pour justifier le rejet total de la demande d’Eastlink.
La disposition relative aux dépôts est une mesure insuffisante sans limite de crédit
  1. Eastlink a fait valoir que l’observation du Conseil selon laquelle la disposition concernant le droit d’examiner les dépôts à intervalles de six mois constituait une protection suffisante était incorrecte. Elle a indiqué qu’il est courant que les frais mensuels récurrents d’un client augmentent de manière considérable et qu’un dépôt qui couvre des frais mensuels récurrents à ce moment-là est susceptible d’être insuffisant sur une période de 6 moisNote de bas de page 3. Eastlink a ajouté qu’une limite de crédit aiderait à atténuer sa perte si les frais mensuels récurrents augmentent au fil du temps.
  2. TekSavvy a fait valoir que, comme la plupart des autres entreprises, Eastlink est autorisée, en vertu de son tarif, à utiliser les dépôts comme outil pour atténuer le risque financier. TekSavvy a argué que, bien qu’elle s’oppose à toute utilisation inutile des dépôts puisqu’ils peuvent créer un stress financier extrême pour les concurrents, les dépôts ne sont pas anticoncurrentiels comme les limites de crédit, étant donné qu’ils ne contrôlent pas directement la croissance des concurrents grossistes.
  3. Les ORCC ont fait remarquer qu’Eastlink a la possibilité de demander des dépôts aux clients des services AHV de gros qui présentent un risque de perte anormal ou qui ont d’autres problèmes de crédit, et que le Conseil a déterminé que les dispositions relatives aux dépôts étaient suffisantes pour protéger Eastlink contre le risque de non-paiement. Les ORCC ont argué, en se fondant sur le manque quasi total d’éléments de preuve avancés par Eastlink, qu’il n’y a aucune raison de modifier cette observation.
  4. City Wide a signalé qu’Eastlink est en mesure d’ajuster le dépôt tous les six mois et de l’augmenter lorsque le client présente un risque anormal de perte ou d’autres critères pour lesquels Eastlink peut demander un dépôt en vertu de son tarif.
  5. Eastlink a répondu que, même si certains intervenants ont évoqué les dispositions relatives au dépôt comme des recours potentiels, ils ont également précisé que, selon eux, il existe des circonstances très limitées dans lesquelles un dépôt est justifié. Pour Eastlink, cela met en évidence les difficultés qu’elle rencontre lorsqu’elle tente de mettre en place des mesures pour réduire ses risques financiers.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. En ce qui concerne le premier argument d’Eastlink, selon lequel le Conseil a fait des observations non pertinentes liées aux retards de paiement, le Conseil reconnaît que l’analyse fournie dans l’ordonnance de télécom 2020-60 concernant les limites de crédit des clients traitait initialement la capacité d’Eastlink de recouvrer les coûts dans les cas de paiements en retard au moyen d’intérêts et des tarifs facturés à ses clients. Toutefois, dans son analyse, le Conseil a alors reconnu le « risque additionnel » (de non-paiement), pour lequel Eastlink a proposé d’inclure une nouvelle disposition dans les modalités de son tarif pour fixer une limite de crédit pour ses clientsNote de bas de page 4. Le Conseil a rejeté la demande d’Eastlink en partie, parce qu’il a estimé que fixer une limite de crédit pour traiter le risque additionnel de non-paiement affecterait négativement la concurrence sur le marché des services de détail. 
  2. Les intervenants dans la présente instance ont argué qu’Eastlink a toujours les moyens de recouvrer ses coûts, même en cas de non-paiement. Comme l’ont fait valoir City Wide et les ORCC, le Conseil estime qu’Eastlink dispose actuellement de méthodes suffisantes pour atténuer le risque de non-paiement, comme il l’a formulé dans ses observations initiales. Ces méthodes comprennent la possibilité i) de demander des dépôts aux clients des services AHV de gros, ii) de résilier le service d’un client des services AHV de gros et iii) d’utiliser des recours juridiques.
  3. En ce qui concerne le deuxième argument d’Eastlink, selon lequel le Conseil n’avait aucun élément de preuve que les limites de crédit causeraient un préjudice aux concurrents, plusieurs intervenants dans la présente instance ont fourni des éléments de preuve selon lesquels les limites de crédit pourraient compromettre la capacité d’un client des services AHV de gros à gagner un grand nombre de nouveaux abonnés au cours d’un mois donné. Bien qu’Eastlink ait expliqué le mécanisme proposé pour appliquer les limites de crédit et la raison pour laquelle ce mécanisme n’entraverait pas la concurrence, le Conseil estime que son observation initiale est étayée par les éléments de preuve présentés dans le cadre de la présente instance.
  4. En particulier, le Conseil estime qu’en vertu de la disposition proposée concernant la limite de crédit, un client des services AHV de gros devrait non seulement avancer les fonds nécessaires (c.-à-d. qu’il serait tenu d’effectuer un paiement d’un montant dépassant la limite de crédit établie dès qu’il reçoit la facture), mais il aurait également le fardeau de gérer sa limite de crédit sur une base récurrente. En outre, le Conseil est d’avis que la disposition relative aux limites de crédit donnerait à Eastlink un large pouvoir discrétionnaire de rejeter le service aux clients des services AHV de gros en cas d’échec des négociations entre les parties concernant les montants des limites de crédit. Le Conseil estime qu’une telle disposition introduirait une incertitude sur le plan de la concurrence pour le client des services AHV de gros, entravant sa capacité à exercer une concurrence efficace sur le marché.
  5. En ce qui concerne le troisième argument d’Eastlink, à savoir qu’elle ne propose plus d’exiger l’accès aux renseignements financiers dans le cadre de la disposition relative aux limites de crédit et que le Conseil devrait approuver les limites de crédit, le Conseil estime que ce changement ne justifie pas en soi l’approbation du reste de la disposition. Même après avoir examiné la concession d’Eastlink concernant l’accès aux renseignements financiers, le Conseil estime qu’il n’y a pas de doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance, pour les raisons exposées dans la présente décision.
  6. En ce qui concerne le quatrième argument d’Eastlink, selon lequel la disposition relative aux dépôts est une mesure insuffisante, le Conseil est d’avis que les éléments de preuve présentés dans le cadre de la présente instance montrent que les dépôts restent une mesure viable et raisonnable pour atténuer le défaut de paiement, puisqu’ils permettent de parvenir à un équilibre efficace entre les protections financières et concurrentielles de toutes les parties, indépendamment de l’approbation d’une disposition relative à la limite de crédit.
  7. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil conclut qu’Eastlink n’a pas réussi à démontrer qu’il avait commis une erreur en fondant sa décision sur de nombreuses raisons non pertinentes ou non fondées.

Le Conseil a-t-il commis une erreur en ne tenant pas compte du principe selon lequel les limites de crédit sont une pratique commerciale normale?

Positions des parties

  1. Eastlink a fait valoir que le Conseil n’avait pas tenu compte d’un principe de base selon lequel une entreprise doit être en droit de gérer ses risques de paiement conformément aux pratiques commerciales. Elle a fait valoir que le Conseil ne devrait pas refuser à Eastlink la possibilité d’appliquer une pratique commerciale commune, à moins qu’il n’y ait des éléments de preuve évidents que cette pratique causerait un préjudice aux clients des services AHV de gros qui l’emporterait sur l’avantage qu’elle en tirerait si le Conseil lui accordait ce droit. Eastlink a fait valoir qu’il n’existe aucun élément de preuve ou observation de préjudice pour les clients des services AHV de gros.
  2. Eastlink a ajouté que ses fournisseurs appliquent des intérêts aux paiements en retard et peuvent suspendre ou résilier les accords de services si Eastlink ne paie pas ses frais mensuels récurrents, mais qu’ils fixent néanmoins des limites de crédit pour gérer les risques.
  3. City Wide a argué que la relation entre Eastlink et ses clients des services AHV de gros n’est pas une relation commerciale normale et que la relation d’Eastlink avec ses fournisseurs, qui ne sont pas des concurrents, ne peut justifier l’application de limites de crédit à ses clients des services AHV de gros. City Wide a en outre argué que le Conseil doit examiner avec suspicion les propositions ayant pour but d’appliquer des limites de crédit, lesquelles restreignent la capacité des clients des services AHV de gros à se faire concurrence et à immobiliser leurs capitaux. Pour City Wide, la nature de la relation entre Eastlink et ses clients de services AIT signifie qu’il existe un risque très réel qu’Eastlink agisse de manière déraisonnable en fixant des limites de crédit et que des limites de crédit déraisonnables aient pour effet d’entraver le développement de la concurrence sur le territoire de desserte d’Eastlink.
  4. Vidéotron a fait remarquer qu’elle est soumise à des limites de crédit de la part de certains de ses fournisseurs et a argué que rien ne justifie l’exclusion des clients des services AHV de gros de l’application de cette pratique commerciale courante. Vidéotron a ajouté qu’aucun élément de preuve n’a été présenté au cours des instances ayant mené à l’ordonnance de télécom 2020-60 qui permettrait de conclure que la force concurrentielle des clients des services AHV de gros pourrait être réduite s’ils étaient soumis à des limites de crédit raisonnables.
  5. Eastlink a répondu que les clients des services AHV de gros devraient être soumis aux mêmes modalités que dans toute autre relation commerciale où des limites de crédit sont appliquées pour protéger l’entreprise qui leur fournit des services contre le risque important de perte.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Le Conseil a reconnu que les observations d’Eastlink concernant le principe selon lequel les limites de crédit constituent une pratique commerciale normale pour gérer les risques, au paragraphe 99 de l’ordonnance de télécom 2020-60, bien qu’il n’y ait pas explicitement répondu.
  2. C’est un principe bien établi en droit administratif que les décideurs doivent prendre les arguments de fond en considération, mais ils ne sont pas tenus de répondre à chaque argument dans une instanceNote de bas de page 5. Le principe selon lequel les limites de crédit sont une pratique commerciale normale a peut-être été un argument central dans l’instance ayant mené à l’ordonnance de télécom 2020-60, que le Conseil a refusé  d’aborder. Toutefois, ceci n’a pas été fondamental à la conclusion et, quoi qu’il en soit, les raisons exposées ci-dessous remédient à  l’absence de réponse explicite.
  3. Sur la base des éléments de preuve recueillis dans le cadre de la présente instance, le Conseil estime que les limites de crédit ont une place incontestée dans la pratique commerciale courante. Toutefois, le Conseil fait remarquer que la relation entre Eastlink et ses clients des services AHV de gros n’est pas celle d’une pratique commerciale courante. Plus précisément, une telle relation s’inscrit dans le contexte du contrôle d’une installation qui nécessite une surveillance réglementaire afin, entre autres, de garantir la concurrence. En raison de la nature de cette relation, l’établissement de limites de crédit ralentirait la concurrence. Cette analyse soutient l’ordonnance de télécom 2020-60.
  4. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut qu’Eastlink n’a pas réussi à démontrer qu’il a commis une erreur en ne considérant pas le principe selon lequel les limites de crédit sont une pratique commerciale normale.

Y a-t-il eu un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la publication de l’ordonnance de télécom 2020-60 qui requiert l’inclusion d’une disposition relative à la limite de crédit?

Positions des parties

  1. Eastlink a fait valoir qu’il y avait eu un changement fondamental de circonstances depuis la publication de l’ordonnance de télécom 2020-60. En effet, l’entreprise avait traité avec un client des services AHV de gros qui accusait des frais mensuels récurrents élevés et qui, selon elle, avait posé des problèmes importants en ce qui concerne l’obtention d’un dépôt. Eastlink a pris des mesures pour résoudre le problème de non-paiement du client conformément à ses modalités de services AHV de gros. Eastlink a argué que ces mesures étaient, selon elle, inadéquates pour gérer son risque de perte financière.
  2. Eastlink a ajouté qu’elle avait traité avec un client des services AHV de gros ayant des frais mensuels récurrents élevés qui était en défaut de paiement, mais qu’elle ne pouvait pas traiter le compte comme étant en souffrance tant qu’il ne restait pas impayé pendant 30 jours. Elle ne pouvait pas non plus envoyer un avis d’intention de débranchement à moins de donner un préavis de 30 jours, ce qui entraînait un non-paiement de deux mois. Eastlink a en outre fait valoir qu’elle n’a pas pu demander un dépôt à certains de ses clients des services AHV de gros et que, lorsqu’elle a pu en obtenir un, le client a demandé que le dépôt soit appliqué à sa facture mensuelle impayée.
  3. City Wide, les ORCC et TekSavvy ont signalé que l’affirmation d’Eastlink selon laquelle elle fournissait des éléments de preuve suffisants est injustifiée, car elle ne fait référence qu’à un seul cas de non-paiement d’un client, et elle n’indiquait pas avoir exercé d’autres recours. City Wide et les ORCC ont fait valoir qu’il serait inapproprié que les torts d’un seul client des services AHV de gros entraînent un changement de politique qui aurait une incidence négative sur tous les clients de ce type.
  4. City Wide a ajouté que l’ampleur potentielle d’une perte alléguée par Eastlink n’est pas la même que celle du risque que cette perte se matérialise. Elle a également fait valoir qu’Eastlink devrait toutefois être tenue de justifier l’écart par rapport au taux d’intérêt pour les retards de paiement affiché sur la facture de City Wide, ce qui est contraire aux modalités tarifaires.
  5. Eastlink, soutenue par Vidéotron, a également fait valoir que la pandémie actuelle de la COVID-19 constitue un changement fondamental de circonstances qui a généré un risque accru de non-paiement des clients des services AHV de gros, et qu’elle ne devrait pas avoir à fournir de multiples exemples de défaut de paiement puisque toute perte se traduit par un préjudice direct sous la forme d’une réduction des investissements et d’une incidence sur les collectivités qui pourraient ne pas recevoir de mises à niveau ou des services.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Eastlink n’a fourni aucune indication démontrant que la situation qu’elle a décrite avec le client des services AHV de gros n’a pas été résolue en fin de compte, et elle n’a présenté qu’un seul cas de ce qu’elle a considéré comme un défaut de paiement du client dans son introduction d’une nouvelle circonstance comme élément de preuve.
  2. Il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve dans le dossier de la présente instance pour établir un problème courant, ou une tendance, de non-paiement avec d’autres clients des services AHV de gros d’Eastlink, soit actuellement, soit à l’avenir. En outre, la pandémie de la COVID-19 est un événement mondial qui touche la plupart, voire la totalité, des activités commerciales, et pas seulement celles d’Eastlink. Par conséquent, il serait injustifié de faire des exceptions aux modalités normalisées du tarif en acceptant la demande d’Eastlink.
  3. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut qu’Eastlink n’a pas réussi à démontrer l’existence d’un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2020-60 en raison d’un changement fondamental de circonstances ou de faits depuis la publication de cette ordonnance.

L’ordonnance de télécom 2020-60 est-elle conforme aux Instructions de 2006 et de 2019?

Positions des parties

  1. Eastlink a fait valoir que le rejet de limites de crédit n’est pas conforme aux Instructions de 2006, car il est contraire aux objectifs de la politique de télécommunication énoncés aux alinéas 7a), 7b), 7c) et 7f) de la Loi, comme suitNote de bas de page 6 :
    • alinéas 7a) et 7b) – Eastlink se voit rejeter le droit de gérer ses activités avec comme incidence ultime l’interruption de service non payé pour les consommateurs et Eastlink qui en subit les répercussions économiques;
    • alinéa 7c) – renforcer la concurrence ne signifie pas donner aux clients des services AHV de gros la possibilité d’éviter les obligations de paiement et forcer Eastlink à absorber les pertes financières créées par des clients irresponsables;
    • alinéa 7f) – le libre jeu du marché signifie ne pas interdire les pratiques commerciales normales, ce qui constitue une intervention inutile et injustifiable.
  2. City Wide et les ORCC ont fait valoir que l’application de limites de crédit comme moyen d’atteindre les objectifs de la politique compromettra le libre jeu du marché, immobilisera des capitaux et réduira les fonds à consacrer à l’innovation. Cela limitera l’efficacité et le développement de la concurrence et découragera un accès au marché des services de télécommunication efficace du point de vue économique en augmentant considérablement les coûts de cet accès pour les concurrents.
  3. En ce qui concerne les Instructions de 2019, City Wide et les ORCC ont fait valoir que l’application de limites de crédit immobilisera les capitaux et les investissements des concurrents, nuira à leur capacité à offrir des services de télécommunication abordables et à bas prix sur les territoires de desserte des titulaires et dans les zones rurales et détournera les capitaux des concurrents qu’ils devront utiliser pour rembourser des limites de crédit arbitraires au lieu de lesinvestir dans la croissance et l’innovation de leurs entreprises.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Les Instructions de 2006 précisent que, dans l’exercice des pouvoirs et fonctions que lui confère la Loi, le Conseil doit mettre en œuvre les objectifs de la politique énoncés à l’article 7 de la Loi, conformément aux alinéas 1a), 1b) et 1c) des Instructions de 2006. Tout en guidant le Conseil sur la manière dont les Instructions de 2006 doivent être mises en œuvre, les Instructions de 2019 prévoient que le Conseil devrait examiner comment ses décisions peuvent promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation.
  2. Dans l’ordonnance de télécom 2020-60, les mesures réglementaires qui étaient à l’étude portaient sur les modalités des services AHV de gros. Par conséquent, le Conseil a affirmé que les sous-alinéas 1a)(i), 1a)(ii)Note de bas de page 7, 1b)(i), 1b)(iii) et 1b)(iv)Note de bas de page 8 des Instructions de 2006 s’appliquent à ses conclusions. Ces mêmes dispositions sont pertinentes pour l’analyse de la présente demande.
  3. Le Conseil est d’avis que l’ordonnance de télécom 2020-60 est conforme aux Instructions de 2006 pour les raisons suivantes :
    • sous-alinéa 1a)(i) – les concurrents et les titulaires peuvent compter sur le libre jeu du marché dans toute la mesure du possible pour acquérir des clients sans être gênés par des limites de crédit, ce qui fait en sorte que toutes les parties sont sur un pied d’égalité lorsqu’elles se font concurrence sur le marché;
    • sous-alinéa 1a)(ii) – les dispositions relatives au dépôt, aux pénalités pour paiement en retard et à la résiliation qui figurent actuellement dans les tarifs des services AHV de gros pour traiter les enjeux concernant le paiement (y compris le retard et le non-paiement) sont efficaces et proportionnelles aux buts visés et ne font obstacle au libre jeu du marché concurrentiel que dans la mesure minimale nécessaire;
    • sous-alinéa 1b)(i) – les objectifs de la politique énoncés aux articles 7a), 7b), 7c) et 7f) de la Loi sont atteints et conformes aux Instructions de 2006, étant donné que les concurrents peuvent se concentrer sur leurs efforts de marketing pour acquérir des clients sur les marchés ruraux et urbains sans être gênés par les limites financières résultant des limites de crédit; les consommateurs bénéficieront d’un choix accru de fournisseurs tandis qu’Eastlink touchera les revenus des services de gros connexes, créant ainsi un marché concurrentiel sain et dynamique; et la concurrence est renforcée par le libre jeu du marché en n’ajoutant pas le fardeau financier supplémentaire d’une limite de crédit aux concurrents tout en instaurant des mesures réglementaires appropriées, équilibrées et efficaces, telles que des dispositions relatives aux dépôts et aux retards de paiement;
    • sous-alinéa 1b)(iii) – l’application cohérente des modalités en matière de dépôt et de retard de paiement pour les services AIT pour tous les fournisseurs de services dotés d’installations fait en sorte que ces mesures sont mises en œuvre de manière symétrique et neutre sur le plan de la concurrence dans toute la mesure du possible;
    • sous-alinéa 1b)(iv) – en n’entravant pas inutilement la capacité des concurrents à acquérir des clients par l’utilisation des limites de crédit, les ententes d’interconnexion de réseaux ou les régimes d’accès aux réseaux sont neutres sur le plan concurrentiel et ne favorisent artificiellement ni les entreprises canadiennes ni les revendeurs.
  4. Le Conseil estime que son rejet de la demande d’Eastlink est conforme aux Instructions de 2019, puisqu’il favorisera la concurrence, l’abordabilité et les intérêts des consommateurs en encourageant la concurrence et en réduisant les obstacles à l’entrée sur le marché et à la concurrence pour les fournisseurs des services de télécommunication, qu’ils soient nouveaux, régionaux ou plus petits que les fournisseurs de services titulaires nationaux. Cela est principalement réalisé en rejetant la disposition proposée par Eastlink concernant la limite de crédit, qui gêne la capacité des concurrents d’acquérir de nouveaux clients en raison des limitations financières imposées par les limites de crédit et peut ajouter un obstacle à l’entrer sur le marché et à la  concurrence. Une telle analyse est conforme à l’approche initiale du Conseil dans l’ordonnance de télécom 2020-60.
  5. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil conclut qu’Eastlink n’a pas réussi à démontrer qu’il existe d’un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2020-60 qui n’est pas conforme aux Instructions de 2006. En outre, le Conseil conclut que sa conclusion initiale était conforme à la fois aux Instructions de 2006 et à celles de 2019.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil rejette la demande de révision et de modification de l’ordonnance de télécom 2020-60 présentée par Eastlink parce que l’entreprise n’a pas réussi à démontrer l’existence d’un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance.
  2. Le Conseil estime que les conclusions figurant dans la présente décision sont conformes aux Instructions de 2006 et de 2019 pour les raisons énoncées ci-dessus.

Secrétaire général

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