Décision de télécom CRTC 2019-325

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Ottawa, le 20 septembre 2019

Dossier public : 8640-B2-201900903

Bell Canada – Demande d’abstention de la réglementation d’ententes et d’accords liés aux services de télécommunication internationaux

Le Conseil s’abstient de réglementer i) les ententes ou les accords conclus entre les entreprises de télécommunication étrangères et certaines affiliées de Bell Canada, et ii) les ententes ou les accords que ces affiliées de Bell concluent avec une autre entreprise canadienne exclusivement pour l’acheminement du trafic à destination ou en provenance du Canada par l’une des parties de l’entente ou de l’accord.

En outre, parallèlement à la publication de la présente décision, le Conseil publie l’avis de consultation de télécom 2019-326 afin de déterminer si ses décisions d’abstention devraient s’appliquer à toutes les autres entreprises de télécommunication canadiennes qui concluent des ententes ou des accords de services de télécommunication internationaux pour l’acheminement du trafic à destination ou en provenance du Canada qui ne sont pas actuellement visées par une abstention de la réglementation.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande de Bell Canada au nom de sept sociétés affiliées (ci-après, les affiliées de Bell)Note de bas de page 1, datée du 6 février 2019, dans laquelle elle demandait au Conseil de s’abstenir de réglementer les ententes ou les accords que les affiliées de Bell concluent avec des entreprises de télécommunication étrangères (ou des entreprises étrangères).
  2. Plus précisément, Bell Canada a demandé au Conseil de s’abstenir, en vertu des paragraphes 34(1) et (2) de la Loi sur les télécommunications (Loi), d’appliquer l’article 29 de la Loi relativement aux ententes ou aux accords susmentionnés, comme il l’a fait à l’égard de Bell Canada et d’autres grandes entreprises de services locaux titulaires (ESLT) dans l’ordonnance Télécom 99-1202Note de bas de page 2.
  3. Le Conseil a reçu des interventions de la part de l’Independent Telecommunications Providers Association (ITPA) et de TBaytel, qui appuyaient la demande de Bell Canada et demandaient à ce que la même abstention de la réglementation, si elle est accordée, soit appliquée à toutes les petites ESLT.

Contexte

  1. Dans l’ordonnance Télécom 99-1202, le Conseil a indiqué qu’à cette époque les compagnies ex-membres de Stentor étaient les seules entreprises canadiennes tenues de déposer des ententes avec des entreprises étrangères auprès du Conseil pour fins d’approbationNote de bas de page 3. Le Conseil a estimé que les ententes des compagnies ex-membres de Stentor conclues avec des entreprises étrangères n’étaient pas anticoncurrentielles et que le marché des services de télécommunication internationaux était assez concurrentiel au point qu’il n’était pas nécessaire d’exiger que ces entreprises continuent de déposer auprès du Conseil aux fins d’approbation i) des ententes avec des entreprises étrangères ou ii) des ententes avec d’autres entreprises canadiennes pour l’acheminement du trafic international à destination ou en provenance du pays.
  2. Par conséquent, dans l’ordonnance Télécom 99-1202, le Conseil s’est abstenu de réglementer i) les ententes entre des entreprises étrangères et certaines grandes ESLT, et ii) les ententes que ces entreprises concluent avec d’autres entreprises canadiennes exclusivement pour l’acheminement du trafic international à destination ou en provenance du Canada par une des parties à l’ententeNote de bas de page 4.

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • Le Conseil devrait-il s’abstenir de réglementer, en vertu de l’article 29 de la Loi, les ententes ou les accords internationaux pour les affiliées de Bell comme il l’a fait pour les grandes ESLT dans ses décisions antérieures?
    • Le Conseil devrait-il s’abstenir de réglementer, en vertu de l’article 29 de la Loi, les ententes ou les accords internationaux pour toutes les autres petites ESLT comme il l’a fait pour les grandes ESLT dans ses décisions antérieures?

Le Conseil devrait-il s’abstenir de réglementer, en vertu de l’article 29 de la Loi, les ententes ou les accords internationaux pour les affiliées de Bell comme il l’a fait pour les grandes ESLT dans ses décisions antérieures?

Positions des parties

  1. Bell Canada a fait remarquer que le Conseil s’est déjà abstenu de réglementer les ententes entre des entreprises étrangères et la plupart des entreprises, c’est-à-dire toutes les entreprises non dominantes et les grandes ESLT. Elle a indiqué que le maintien d’une exigence réglementaire pour le dépôt des ententes ou des accords dont il est question représente une mesure réglementaire inefficace et dépassée qui va à l’encontre des objectifs de la politique de télécommunication énoncés à l’article 7 de la Loi (les objectifs de la politique).
  2. Bell Canada a indiqué que ses affiliées n’ont pas conclu d’entente ou d’accord avec des entreprises étrangères ou d’autres entreprises canadiennes exclusivement pour l’acheminement du trafic à destination ou en provenance du Canada depuis la publication de l’ordonnance Télécom 99-1202.
  3. Bell Canada a soutenu qu’elle demandait une abstention pour donner à ses affiliées la souplesse de conclure ces types d’ententes ou d’accords à l’avenir, lorsque cela est logique du point de vue de la structure organisationnelle.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Conformément aux paragraphes 34(1) et (2) de la Loi, le Conseil a le pouvoir de s’abstenir d’exercer certaines fonctions et certains pouvoirs que lui confère la Loi à l’égard des services de télécommunication ou des catégories de services. Il peut le faire dans les cas où il conclut que son abstention serait compatible avec les objectifs de la politique [paragraphe 34(1)]. Il doit le faire s’il conclut qu’un service ou une catégorie de services est suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des usagers [paragraphe 34(2)].
  2. En vertu du paragraphe 34(3) de la Loi, le Conseil ne peut s’abstenir de réglementer un service ou une catégorie de services s’il conclut qu’une telle mesure aurait vraisemblablement pour effet de compromettre indûment la création ou le maintien d’un marché concurrentiel pour leur fourniture.
  3. Comme l’a souligné Bell Canada, le Conseil s’est déjà abstenu de réglementer les ententes internationales des entreprises non dominantes et des grandes ESLT. Le Conseil s’est également largement abstenu de réglementer les ententes entre entreprisesNote de bas de page 5.
  4. Le Conseil estime que le marché des services internationaux demeure suffisamment concurrentiel au point qu’il n’est pas nécessaire que les affiliées de Bell déposent des ententes ou des accords connexes auprès du Conseil aux fins d’approbation afin de protéger les intérêts des usagers.
  5. Le maintien de cette exigence réglementaire représenterait un fardeau réglementaire inutile et serait, par conséquent, désavantageuse pour les affiliées de Bell dans la mesure où elles sont en concurrence avec de grandes ESLT et des entreprises non dominantes dans leurs divers territoires d’exploitation titulaires.
  6. De plus, une décision du Conseil de s’abstenir de la réglementation dans le présent cas comme il s’est abstenu de réglementer les grandes ESLT dans l’ordonnance Télécom 99-1202 et la décision 2000-150 offrirait un traitement uniforme à l’échelle des grandes ESLT et des autres fournisseurs titulaires.
  7. Par ailleurs, la décision de s’abstenir de la réglementation serait conforme aux objectifs de la politique énoncés aux articles 7c) et f) de la LoiNote de bas de page 6.
  8. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil détermine qu’il s’abstiendra de réglementer, en vertu du paragraphe 34(1) de la Loi, i) les ententes ou les accords conclus entre les entreprises étrangères et les affiliées de Bell, et ii) les ententes ou les accords que les affiliées de Bell concluent avec une autre entreprise canadienne exclusivement pour l’acheminement du trafic à destination ou en provenance du Canada par l’une des parties de l’entente ou de l’accord.
Instructions
  1. Le Gouverneur général en conseil a récemment donné au Conseil de nouvelles instructions, conformément à l’article 8 de la Loi (Instructions de 2019)Note de bas de page 7. Les Instructions de 2019 précisent que dans l’exercice des pouvoirs et fonctions que lui confère la Loi, le Conseil devrait examiner comment ses décisions peuvent, le cas échéant, promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation.
  2. De plus, dans ses décisions, le Conseil devrait démontrer sa conformité avec les Instructions de 2019 et préciser comment ses décisions peuvent promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation.
  3. Le Conseil estime que sa décision d’abstention dans la présente décision est conforme aux sous-alinéas 1(a)i), iii) et v) des Instructions de 2019, qui stipulent que le Conseil devrait examiner la mesure dans laquelle ses décisions :
    1. encouragent toutes formes de concurrence et d’investissement,
    2. font en sorte qu’un accès abordable à des services de télécommunication de haute qualité soit disponible dans toutes les régions du Canada, notamment les régions rurales,
    3. réduisent les obstacles à l’entrée sur le marché et à la concurrence pour les fournisseurs des services de télécommunications, qu’ils soient nouveaux, régionaux, ou  plus petits que les fournisseurs de services titulaires nationaux.
  4. Plus précisément, le Conseil estime que sa décision d’abstention permettra d’assurer un traitement uniforme à l’échelle des ESLT. Elle éliminera également un fardeau concurrentiel dans la mesure où les affiliées de Bell sont en concurrence avec de plus grands fournisseurs de services dans leurs divers territoires d’exploitation, généralement ruraux. Cela permettra au libre jeu du marché de fonctionner dans une plus large mesure au profit des consommateurs.
  5. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que sa décision de s’abstenir de la réglementation et de se fier au libre jeu du marché favorisera la concurrence, l’abordabilité et les intérêts des consommateurs. Le Conseil estime également que sa décision d’abstention est conforme au sous-alinéa 1(a)i) des Instructions de 2006Note de bas de page 8, qui stipule que le Conseil doit se fier, dans la plus grande mesure du possible, au libre jeu du marché comme moyen d’atteindre les objectifs de la politique.

Le Conseil devrait-il s’abstenir de réglementer, en vertu de l’article 29 de la Loi, les ententes ou les accords internationaux pour toutes les autres petites ESLT comme il l’a fait pour les grandes ESLT dans ses décisions antérieures?

Positions des parties

  1. Bell Canada a soutenu que si le Conseil accepte la demande de l’entreprise, il devrait également envisager d’amorcer une instance de justification pour déterminer si l’abstention devrait également s’appliquer aux ententes ou aux accords internationaux pour toutes les autres petites ESLT.
  2. L’ITPA et Tbaytel ont appuyé la demande de Bell Canada, mais elles se sont opposées à sa proposition d’amorcer une instance de justification. De leur point de vue, il n’y a aucune raison pour que le Conseil n’étende pas l’abstention de la réglementation à toutes les petites ESLT en même temps que pour les affiliées de Bell.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Le Conseil fait remarquer que les interventions de l’ITPA et de TBayTel ne représentent pas l’opinion de toutes les autres petites ESLT. Par conséquent, il ne serait pas approprié que le Conseil rende, dans le cadre de la présente décision, une conclusion qui toucherait toutes les petites ESLT sans leur donner la possibilité d’être entendues.
  2. En outre, le Conseil estime que si d’autres entreprises de télécommunication canadiennes ne sont pas visées par de telles décisions antérieures d’abstention, elles devraient également avoir la possibilité de formuler des observations sur la question de savoir si les mêmes décisions devaient s’appliquer à elles.
  3. Par conséquent, le Conseil publie aujourd’hui l’avis de consultation de télécom 2019-326 afin de déterminer si ses décisions d’abstention devraient s’appliquer à toutes les autres entreprises de télécommunication canadiennes qui concluent des ententes ou des accords de télécommunication internationaux pour l’acheminement du trafic à destination ou en provenance du Canada qui ne sont pas actuellement visées par uneabstention de la réglementation.

Secrétaire général

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