Décision de télécom CRTC 2019-131

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Ottawa, le 7 mai 2019

Dossier public : 8622-E25-201802885

Execulink Telecom Inc. – Demande de redressement concernant les services de communication vocale fournis par 676766 Ontario Limited, exploitée sous le nom de KWIC Internet

Le Conseil rejette la demande de redressement d’Execulink Telecom Inc. De plus, le Conseil précise que la décision de télécom 2005-28 n’empêche pas les revendeurs ayant déjà des clients de services locaux, et qui deviennent des entreprises de services locaux concurrentes (ESLC) en acquérant ou en exploitant des installations de transmission, de continuer à fournir des services locaux à leurs clients existants et à offrir des services locaux à de nouveaux clients. Toutefois, les revendeurs doivent prendre les mesures nécessaires pour s’inscrire comme ESLC.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande d’Execulink Telecom Inc. (Execulink), datée du 1er mai 2018, dans laquelle elle demandait au Conseil de rendre une ordonnance exigeant que 676766 Ontario Limited, exploitée sous le nom de KWIC Internet (KWIC), qui est un revendeur et une entreprise de services locaux concurrente (ESLC) de type IVNote de bas de page 1 proposée, prenne les mesures suivantes :
    • suspendre le branchement aux services de communication vocale pour les clients nouveaux et en attente de KWIC jusqu’à ce que celle-ci soit inscrite à titre d’ESLC de type IV à part entière;
    • aviser par écrit les clients actuels de services de communication vocale de KWIC que celle-ci exerce ses activités en tant qu’ESLC non inscrite et que, par conséquent, KWIC n’est pas un fournisseur de services de communication vocale légal au Canada;
    • libérer les clients de services de communication vocale de KWIC de toute obligation contractuelle et déclarer les contrats nuls;
    • permettre aux clients de services de communication vocale de KWIC de passer à une entreprise de services locaux inscrite, et ce, sans pénalité.
  2. Execulink a déclaré avoir appris que KWIC offrait actuellement des services de communication vocale sur protocole Internet (VoIP), y compris des services 9-1-1 et des services interurbains, dans la circonscription de Delhi, en Ontario. Execulink a fait remarquer que KWIC est inscrite auprès du Conseil à titre d’entreprise non dominante et d’ESLC proposée, mais pas à titre d’ESLC. Execulink a soutenu que KWIC doit exercer ses activités à titre d’ESLC de type IV inscrite.
  3. Execulink a indiqué qu’elle avait tenté de remédier à la situation de façon informelle en demandant à KWIC de suspendre sa promotion des services de communication vocale et de cesser de les offrir, en particulier dans la circonscription de Delhi.

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • Un revendeur qui devient une ESLC en acquérant ou en exploitant des installations de transmission peut-il continuer à fournir des services locaux à ses clients existants et à offrir des services locaux à de nouveaux clients en attendant son inscription à titre d’ESLC?
    • KWIC a-t-elle fait preuve de diligence pour répondre aux exigences d’inscription à titre d’ESLC?
    • La décision de télécom 2008-106 peut-elle servir de précédent pour trancher la demande d’Execulink?

Un revendeur qui devient une ESLC en acquérant ou en exploitant des installations de transmission peut-il continuer à fournir des services locaux à ses clients existants et à offrir des services locaux à de nouveaux clients en attendant son inscription à titre d’ESLC?

Positions des parties

  1. Execulink a indiqué que le Conseil a déterminé dans la décision de télécom 2005-28 que : i) les services VoIP sont assujettis au cadre de réglementation régissant la concurrence locale défini dans la décision de télécom 97-8; ii) il ne conviendrait pas de modifier les droits et obligations, énoncés dans la décision de télécom 97-8, des entreprises canadiennes qui fournissent des services locaux dans le cas de la fourniture de services VoIP locaux et iii) les entreprises canadiennes non dominantes doivent respecter les exigences des ESLC et les procédures d’entrée sur le marché énoncées dans la décision de télécom 97-8.
  2. Execulink a soutenu qu’en continuant à offrir des services alors qu’elle n’est pas inscrite, KWIC fait preuve d’un mépris flagrant du cadre de réglementation des services locaux au Canada établi de longue date, et que les nouveaux venus sur le marché concurrentiel des services locaux ne peuvent être traités différemment des entreprises qui exercent actuellement leurs activités selon le cadre établi. Execulink a ajouté que si le Conseil permet sciemment à KWIC de continuer d’exercer ses activités à titre d’ESLC non inscrite, le Conseil rejetterait le concept de la symétrie réglementaire.
  3. KWIC a répondu que la demande d’Execulink est sans fondement et a demandé au Conseil de la refuser.
  4. KWIC a déclaré qu’elle ne fait pas abstraction du cadre de réglementation du Conseil en matière d’inscription, mais que la transition du statut de revendeur à celui d’ESLC exige des démarches qui demandent du temps et des efforts, particulièrement en ce qui concerne les ententes cadres d’interconnexion locale (MALI).

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Dans la décision de télécom 2005-28, le Conseil a conclu i) que les services VoIP locaux devaient être réglementés à titre de services locaux et étaient donc assujettis au cadre de réglementation établi dans la décision de télécom 97-8, ii) qu’il ne conviendrait pas de modifier les droits et obligations des entreprises canadiennes dans le cas de la fourniture de services VoIP locaux et iii) qu’afin de fournir des services locaux au Canada, les entreprises canadiennes non dominantes doivent respecter les exigences des ESLC et les procédures d’entrée sur le marché énoncées dans la décision de télécom 97-8.
  2. Bien que les entreprises non dominantes qui souhaitent fournir des services locaux doivent répondre aux exigences d’une ESLC avant de fournir des services, il y a une période de transition entre le moment où un revendeur ayant des clients existants s’inscrit comme ESLC proposée et le moment où il obtient le statut d’ESLC à part entière (ci-après la période de transition). Dans la décision de télécom 2005-28, le Conseil n’a pas abordé explicitement les situations dans lesquelles des revendeurs ayant déjà des clients de services locaux deviennent des entreprises non dominantes en acquérant des installations de transmission.
  3. Le Conseil estime qu’il n’avait pas l’intention, dans cette décision, de décourager les revendeurs ayant déjà des clients de services locaux d’acquérir ou d’exploiter des installations de transmission i) en forçant ces revendeurs à abandonner leur clientèle et à cesser d’offrir leurs services et ii) en forçant les clients à passer à une autre entreprise pendant la période de transition.
  4. Une telle intention serait contraire à certains des objectifs de la politique de télécommunication énoncés dans la Loi sur les télécommunications, par exemple aux alinéas 7b), 7c), 7f) et 7h)Note de bas de page 2. De plus, une telle intention serait contraire aux objectifs de la politique énoncés aux sous-alinéas 1a)(i) et 1a)(ii)Note de bas de page 3 des InstructionsNote de bas de page 4.
  5. Par conséquent, le Conseil précise que son cadre de réglementation n’empêche pas un revendeur ayant déjà des clients de services locaux, et qui devient une ESLC en acquérant ou en exploitant des installations de transmission, de continuer à fournir des services locaux aux clients existants et à offrir de tels services à de nouveaux clients à partir du moment où l’entreprise s’inscrit comme ESLC proposée jusqu’au moment où elle obtient le statut d’ESLC à part entière.
  6. Toutefois, dans un souci de symétrie réglementaire, le Conseil précise également que ces possibilités en période de transition ne s’appliquent qu’aux entités ayant déjà des clients de services locaux qui agissent avec diligence pour répondre en temps opportun aux exigences pour devenir des ESLC inscrites.

KWIC a-t-elle fait preuve de diligence pour répondre aux exigences d’inscription à titre d’ESLC?

Positions des parties

  1. KWIC a fait valoir qu’elle a commencé à offrir des services de communication vocale en tant que revendeur, conformément à la réglementation du Conseil, et qu’elle a ensuite commencé à construire son réseau de fibres optiques. KWIC a indiqué que lorsqu’elle a appris que, puisqu’elle utilisait des installations de fibres optiques pour fournir les services, elle n’était plus considérée comme un revendeur et était devenue une ESLC, elle a immédiatement pris les mesures nécessaires pour se conformer entièrement à la réglementation du Conseil.
  2. KWIC a fait remarquer qu’elle s’est inscrite auprès du Conseil à titre d’entreprise non dominante, qu’elle a demandé et obtenu une licence d’exploitation de services de télécommunications internationales de base et qu’elle a demandé le statut d’ESLC proposée. KWIC a fait valoir qu’elle était en voie de répondre à toutes les obligations afin d’obtenir son statut d’ESLC de type IV.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Lorsqu’Execulink a déposé sa demande, KWIC était inscrite à titre de revendeur, d’entreprise non dominante et d’ESLC proposée. Par conséquent, KWIC figure actuellement sur la liste des ESLC proposées du Conseil et travaille à répondre aux diverses obligations afin d’obtenir le statut d’ESLC de type IV à part entière.
  2. KWIC a déposé son Tarif des services d’accès des ESLC en mai 2018, que le Conseil a approuvé provisoirement dans l’ordonnance de télécom 2018-203 et de manière définitive dans l’ordonnance de télécom 2018-225. De plus, KWIC i) a répondu à la plupart de ses autres obligations d’ESLC, y compris l’inscription à titre d’ESLC proposée pour fournir des services dans la circonscription de Delhi, en Ontario, et dans d’autres circonscriptions et ii) est en bonne voie de répondre à ses obligations pour déposer des MALI dans toutes les circonscriptions où elle propose d’exercer ses activités.
  3. Par conséquent, le Conseil estime que KWIC prend au sérieux ses obligations visant à devenir une ESLC de type IV.
  4. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil détermine que KWIC a fait preuve de diligence pour répondre aux exigences d’inscription des ESLC. Toutefois, si KWIC devait se retirer du processus d’inscription à titre d’ESLC, le Conseil pourrait prendre des mesures d’application de la loi qui pourraient inclure l’imposition de sanctions administratives pécuniaires.

La décision de télécom 2008-106 peut-elle servir de précédent pour trancher la demande d’Execulink?

Positions des parties

  1. Execulink a fait valoir que, dans la décision de télécom 2008-106, le Conseil a ordonné à un câblodistributeur, qui exerçait ses activités hors des limites du cadre régissant les ESLC, de cesser immédiatement d’offrir des services de communication vocale dans la circonscription en question et de rebrancher ses clients à leur ancien fournisseur de services. Execulink a indiqué que cette décision constituait un précédent pour les mesures qu’elle demandait dans la présente demande.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Dans la décision de télécom 2008-106, le Conseil a déterminé que Bluewater TV Cable Ltd. (Bluewater), un câblodistributeur, fournissait des services locaux non autorisés à des clients dans le territoire d’exploitation de Tuckersmith Communications Co-operative Ltd. (Tuckersmith). Le Conseil a ordonné à Bluewater de mettre fin immédiatement à cette pratique et de veiller à ce que les clients visés soient rebranchés à Tuckersmith.
  2. Bluewater ne s’était pas inscrite à titre d’ESLC proposée dans la circonscription de Bayfield, en Ontario, avant que la décision de télécom 2008-106 ne soit rendue, et elle n’avait pas déposé avec diligence une proposition de MALI aux fins d’approbation pour cette circonscription. En revanche, dans la présente situation, KWIC a commencé à offrir des services locaux en tant que revendeur conformément à la réglementation du Conseil, s’est inscrite en tant qu’entreprise canadienne non dominante et ESLC proposée dans les circonscriptions où elle a l’intention d’offrir des services et travaille à répondre aux exigences en vue d’obtenir le statut d’ESLC de type IV à part entière.
  3. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil détermine que la décision de télécom 2008-106 n’a pas de valeur de précédent pour trancher la demande d’Execulink.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil rejette la demande d’Execulink.

Secrétaire général

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