Décision de télécom CRTC 2019-122

Version PDF

Ottawa, le 29 avril 2019

Dossier public :8662-S183-201811167

SouthWestern Integrated Fibre Technology Inc. – Demande de révision et de modification de la politique réglementaire de télécom 2018-377

Le Conseil rejette la demande de SouthWestern Integrated Fibre Technology Inc. (SWIFT) visant la révision et la modification de la politique réglementaire de télécom 2018-377. SWIFT n’a pas démontré qu’elle existe un doute réel quant au bien-fondé des conclusions du Conseil, qui ne constituaient pas des erreurs de droit et de fait.

Contexte

  1. Dans la politique réglementaire de télécom 2016-496, le Conseil a établi l’objectif du service universel suivant : les Canadiens, dans les régions urbaines, ainsi que dans les régions rurales et éloignées, ont accès à des services vocaux et à des services d’accès Internet à large bande, sur des réseaux fixes et sans fil mobiles. Pour mesurer l’atteinte concluante de cet objectif, le Conseil a établi plusieurs critères, notamment que les abonnés canadiens de services d’accès Internet à large bande fixes de résidence et d’affaires doivent être en mesure d’avoir accès à des vitesses d’au moins 50 mégabits par seconde (Mbps) pour le téléchargement et 10 Mbps pour le téléversement, et de s’abonner à une offre de service proposant une allocation de données illimitée.
  2. Pour contribuer à l’atteinte de l’objectif du service universel, le Conseil a annoncé son intention d’établir un mécanisme de financement pour les services d’accès Internet à large bande.
  3. Dans l’avis de consultation de télécom 2017-112, le Conseil a amorcé une instance sur l’élaboration de son régime de financement de la large bande.Par conséquent, dans la politique réglementaire de télécom 2018-377, le Conseil a établi le cadre du Fonds pour la large bande, y compris les critères qu’il utiliserait pour évaluer les projets. Le Conseil a déclaré que l’objectif du Fonds pour la large bande consiste à financer des projets visant à construire ou à mettre à niveau l’infrastructure d’accès et de transport pour les services d’accès Internet à large bande fixes et sans fil mobiles en vue d’atteindre l’objectif du service universel, afin d’éliminer les écarts en matière de connectivité dans les régions mal desservies.
  4. Plus précisément, le Conseil a déterminé que pour être admissible à recevoir du financement pour la réalisation d’un projet de services d’accès Internet à large bande fixes, un demandeur doit proposer de construire ou de mettre à niveau une infrastructure dans une région géographique admissible, définie comme une cellule hexagonale de 25 km2 comprenant au moins un ménage, selon les données du dernier recensement de Statistique Canada, mais où aucun ménage n’a accès à un service d’accès Internet à large bande offrant des vitesses de téléchargement et de téléversement conformes à l’objectif du service universel (c.-à-d. 50 et 10 Mbps respectivement).
  5. Le Conseil a aussi déterminé qu’il ne mettrait pas en place un mécanisme de contestation pour les régions géographiques non admissibles.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande de SouthWestern Integrated Fibre Technology Inc. (SWIFT)Note de bas de page 1, datée du 19 décembre 2018, dans laquelle SWIFT lui demandait de réviser et de modifier la politique réglementaire de télécom 2018-377. SWIFT a contesté les conclusions du Conseil en ce qui a trait à i) l’utilisation de cellules hexagonales pour définir l’admissibilité géographique de projets de services d’accès Internet à large bande fixes et ii) l’exclusion des cellules hexagonales partiellement desservies des régions géographiques admissibles. SWIFT a fait valoir qu’elle existe un doute réel, tant en droit qu’en fait, quant au bien-fondé des conclusions du Conseil et qu’elles sont susceptibles d’avoir une incidence négative importante sur les collectivités dont la qualité du service Internet est plus faible dans le sud-ouest de l’Ontario et probablement dans le reste du Canada.
  2. En particulier, SWIFT a soutenu que le Conseil :
    • a fait passer les objectifs administratifs avant les objectifs réglementaires établis dans la Loi sur les télécommunications (Loi);
    • n’a pas pris en considération les éléments de preuve contre-factuels concernant l’utilisation de la une méthode fondée sur les cellules hexagonales;
    • a mis en place un nouveau principe voulant que, dans les cellules hexagonales partiellement desservies, le libre jeu du marché soit « susceptible » d’améliorer la connectivité;
    • n’a pas pris en considération les économies d’échelle et la qualité de projets lorsqu’il a formulé ses conclusions.
  3. SWIFT a demandé à ce que le Conseil accorde le redressement suivant :
    • redéfinir les limites de la région desservie comme la limite des zones d’exclusion, puis désigner tout autre endroit n’ayant pas accès aux services d’accès Internet à large bande atteignant les seuils de « service de base » du Conseil comme admissible à demander un financement provenant du Fonds pour la large bande;
    • permettre aux collectivités mal desservies de fournir d’autres éléments de preuve, comme les mesures normalisées des services Internet, pour prouver leurs besoins et donc, leur admissibilité à présenter une demande;
    • abandonner le nouveau principe voulant que, dans les cellules hexagonales partiellement desservies, le libre jeu du marché soit « susceptible » d’améliorer la connectivité;
    • préciser que les demandeurs dont les projets proposés i) serviraient les zones mal desservies dans les cellules hexagonales partiellement desservies et ii) sont situés près de cellules hexagonales entièrement mal desservies seront admissibles à présenter une demande de financement provenant du Fonds pour la large bande dans le cadre de projets plus importants couvrant de multiples cellules hexagonales.
  4. Le Conseil a reçu des interventions concernant la demande de SWIFT des parties suivantes : des fournisseurs de services de télécommunication comprenant Bell Canada, CoopTel conjointement avec Sogetel inc. (Sogetel) [collectivement CoopTel/Sogetel], Cybera Inc., Saskatchewan Telecommunications (SaskTel), SSi Micro Ltd. (SSi Micro), TELUS Communications Inc. (TCI) et Xplornet Communications Inc. (Xplornet); la Première nation Chippewas of Kettle and Stony Point; des groupes de défense comprenant l’Association des directeurs généraux, secrétaires et trésoriers municipaux de l’Ontario, le Centre pour la défense de l’intérêt public (CDIP) et la Fédération canadienne des municipalités (FCM); des organisations comprenant Bits & Pieces Studio, la Blue Sky Economic Growth Corporation (Blue Sky), Daveland Farm, la Economic Development Corporation of North Simcoe, la Fédération de l’agriculture de l’Ontario, Mimosa Breeding and Research, Prashita Inc., P-ROL Process Control Inc., le Réseau régional de l’Est ontarien (RREO), Skara Brae Strategy Consultants Ltd., la Société d’aide au développement des collectivités de Simcoe Nord (SADCSN), SpeedChecker Limited (SpeedChecker), Tall Pines Agricultural Research Ltd., la Wahnekewening Community Association, Weitzel Farms Ltd. et Winchester Poultry Inc.; des municipalités comprenant le canton d’Enniskillen, le canton de North Dumfries, le comté de Brandt, la Corporation of the County of Essex, la Corporation of the Township of St. Clair, la municipalité d’Oka, la municipalité régionale de comté (MRC) d’Arthabaska, la MRC de Mékinac, la MRC de la Nouvelle-Beauce, la MRC de Roussillon, la MRC de Rouville, la MRC de Vaudreuil Soulanges, la municipalité régionale de Halton (Halton), la ville de Caledon, la ville de Tecumseh et la ville de Windsor; et plus de 200 particuliers.

Critères de révision et de modification

  1. Le Conseil a précisé, dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, les critères qu’il utiliserait pour évaluer les demandes de révision et de modification présentées en vertu de l’article 62 de la Loi. En particulier, le Conseil a déclaré que les demandeurs doivent démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale, par exemple en raison : i) d’une erreur de droit ou de fait, ii) d’un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision, iii) du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans l’instance initiale ou iv) d’un nouveau principe découlant de la décision.

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • Le Conseil devrait-il modifier sa conclusion d’utiliser la méthode fondée sur les cellules hexagonales pour déterminer l’admissibilité géographique?
    • Le Conseil devrait-il modifier sa conclusion de ne pas incorporer de mécanisme de contestation pour les régions géographiques non admissibles?
    • Le Conseil a-t-il mis en place un nouveau principe voulant que, dans les cellules hexagonales partiellement desservies, le libre jeu du marché soit « susceptible » d’améliorer la connectivité?
    • Le Conseil devrait-il préciser que les projets proposés peuvent inclure à la fois des cellules hexagonales admissibles et non admissibles?

Le Conseil devrait-il modifier sa conclusion d’utiliser la méthode fondée sur les cellules hexagonales pour déterminer l’admissibilité géographique?

Positions des parties

  1. SWIFT a fait valoir que la méthode fondée sur les cellules hexagonales du Conseil exagère la taille des régions géographiques desservies, ce qui i) donne une impression trompeuse quant à la connectivité, ii) n’est pas intuitif pour les communications avec les parties prenantes et iii) n’est pas nécessaire. SWIFT a demandé au Conseil de déterminer plutôt les régions géographiques où les services d’accès Internet à large bande sont actuellement fournis à des niveaux qui répondent à l’objectif du service universel, puis de considérer toutes les autres régions géographiques comme admissibles à un financement provenant du Fonds pour la large bande.
  2. SWIFT a soutenu que le Conseil avait commis une erreur de droit en adoptant la méthode fondée sur les cellules hexagonales, car il a ainsi fait passer les objectifs administratifs avant les objectifs réglementaires établis dans la Loi. SWIFT a affirmé que les objectifs administratifs du Conseil de minimiser les coûts administratifs et d’améliorer les communications avec les partenaires du secteur privé ne constituent pas des motifs suffisants sur le plan juridique pour adopter des mesures stratégiques qui ne cadrent pas avec les objectifs de la politique établis dans la Loi.
  3. Plusieurs parties, y compris Bell Canada, le CDIP, SaskTel, SSi Micro et Xplornet, ont discuté du rôle que joue le Conseil pour trouver un équilibre entre les objectifs de la politique parfois contradictoires énoncés à l’article 7 de la Loi. Certaines parties, comme Bell Canada, TCI et Xplornet, ont convenu que l’équilibre trouvé par le Conseil se situait dans les limites du raisonnable compte tenu du fait que le financement provenant du Fonds pour la large bande ne permet pas de subventionner à lui seul le déploiement de services d’accès Internet à large bande qui atteignent l’objectif du service universel pour tous les Canadiens. De la même façon, le CDIP a indiqué qu’il était d’accord avec la conclusion du Conseil de concentrer le financement provenant du Fonds pour la large bande sur des régions géographiques qui, autrement, ne recevraient absolument aucun service d’accès Internet à large bande, plutôt que dans des régions où un service est déjà offert.
  4. Certaines parties, y compris SaskTel et TCI, ont également discuté des faits que la méthode fondée sur les cellules hexagonales a été utilisée avec succès dans plusieurs programmes de financement (y compris le programme Brancher pour innover [BPI] d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada [ISDE]) et que les InstructionsNote de bas de page 2 encouragent le Conseil à mettre en œuvre des approches qui simplifient ses processus. Xplornet a soutenu que la réduction du fardeau administratif obtenue grâce au fonctionnement simplifié du Fonds pour la large bande contribue directement à l’atteinte des objectifs de la politique énoncés dans la Loi.
  5. Bell Canada et TCI ont toutes les deux fait valoir que le cadre établi dans la politique réglementaire de télécom 2018-377 est raisonnable et est adéquatement appuyé par un dossier complet que le Conseil a pris en considération pour rendre ses conclusions stratégiques. Bell Canada a déclaré qu’il incombait à SWIFT de démontrer l’existence d’un doute réel quant au bien-fondé de cette décision, ce qu’elle n’a pas fait.
  6. Dans sa réponse, SWIFT a soutenu qu’il incombe au Conseil, et non à l’organisme ayant déposé une demande en vertu de la partie 1, de démontrer que les conclusions du Conseil cadrent avec l’article 7 de la Loi. Elle a déclaré que le Conseil n’en a pas fait correctement la démonstration dans la politique réglementaire de télécom 2018-377, conformément aux Instructions.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Le Conseil estime que les objectifs de la politique énoncés dans la Loi comprennent des objectifs administratifs. Par exemple, le fait de favoriser l’efficacité administrative en réduisant le fardeau réglementaire et administratif des demandeurs de financement provenant du Fonds pour la large bande s’inscrit dans le sens de l’alinéa 7f) de la Loi, ce qui comprend d’assurer l’efficacité et l’efficience de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire. De plus, le Conseil a indiqué dans la politique réglementaire de télécom 2018-377 que ses conclusions permettraient d’atteindre les objectifs de la politique énoncés aux alinéas 7a), 7b), 7c), 7f), 7g) et 7h) de la Loi.
  2. Le sous-alinéa 1a)(ii) de Instructions encouragent le Conseil à prendre des mesures qui sont efficaces et proportionnelles au but visé. La méthode fondée sur les cellules hexagonales existe déjà et a été utilisée avec succès par ISDE, ce qui en fait un mécanisme efficace qui peut facilement être exploité et qui n’occasionnera pas de retard ou n’imposera pas de fardeau supplémentaire aux demandeurs. À l’opposé, la création de nouveaux outils de cartographie que l’on connaît peu et qui n’ont pas été mis à l’essai ne satisferait pas à l’objectif établi dans le sous-alinéa 1a)(ii) des Instructions, car elle entraînerait des retards dans l’approbation du financement, ce qui retarderait le déploiement aux Canadiens de meilleurs services d’accès Internet à large bande.
  3. De plus, bien que le Conseil convienne qu’il est tenu de démontrer comment ses conclusions sont conformes aux objectifs de la politique énoncés dans la Loi et aux Instructions, SWIFT a démontré dans ses arguments qu’elle trouverait un différent équilibre parmi ces objectifs, non pas que le Conseil ait omis d’en tenir compte.
  4. Le Conseil estime qu’il est important pour tous les Canadiens d’avoir accès à des services à large bande qui respectent l’objectif du service universel. Toutefois, le Conseil a déterminé que, à ce stade, son rôle est de financer des projets dans des régions où il est probable que les Canadiens ne seraient autrement jamais en mesure de se prévaloir d’un service respectant l’objectif du service universel, le but étant de maximiser le financement disponible.
  5. Tel que l’a reconnu le Conseil dans la politique réglementaire de télécom 2016-496, l’élimination des écarts dans la disponibilité du service d’accès Internet à large bande au Canada représente un énorme défi financier, nécessitant du financement et des investissements totalisant des milliards de dollars, qui ne peut être relevé que par le partage des responsabilités. De plus, le Conseil a déclaré dans la politique réglementaire de télécom 2018-377 que le Fonds pour la large bande viendra compléter – et non remplacer – les investissements existants et futurs du secteur privé et d’autres fonds du gouvernement qui s’inscrivent dans l’écosystème de financement général.
  6. Par conséquent, le Conseil rejette la demande de SWIFT visant la modification de la conclusion du Conseil d’utiliser la méthode fondée sur les cellules hexagonales pour déterminer l’admissibilité géographique. SWIFT n’a pas démontré qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la conclusion du Conseil, qui ne constituait pas une erreur de droit.

Le Conseil devrait-il modifier sa décision de ne pas incorporer de mécanisme de contestation pour les régions géographiques non admissibles?

Positions des parties

  1. SWIFT a indiqué que le Conseil avait dérogé à la pratique exemplaire de permettre aux collectivités mal desservies de fournir des indicateurs de la qualité du service de la large bande, soulevant ainsi un doute réel quant au bien-fondé des cartes des régions pour améliorer l’accès à la large bande du Conseil.
  2. SWIFT a soutenu que le Conseil n’avait pas tenu compte des limites des données, ni du principe de précaution que SWIFT avait mis de l’avant, qu’elle n’a pas défini. SWIFT a indiqué qu’il y avait peu d’éléments de preuve justifiant le fait que le Conseil avait omis de tenir compte du principe de précaution en fonction des économies réalisées au chapitre des coûts administratifs ou une amélioration sur le plan de la communication avec l’industrie (p. ex. en réduisant le nombre de demandes de financement provenant du Fonds pour la large bande ou en utilisant des données connues de l’industrie).
  3. SWIFT a également affirmé que le Conseil avait commis une erreur de fait connexe en accordant la priorité à la réduction du fardeau administratif et des coûts reliés au mécanisme de contestation plutôt qu’à une communication efficace avec d’autres parties prenantes. SWIFT a décrit les coûts administratifs supplémentaires associés à son approche proposée comme n’étant pas plus élevés qu’une erreur d’arrondissement.
  4.  Bell Canada et Xplornet ont indiqué que, étant donné les ressources financières limitées disponibles, il était raisonnable pour le Conseil de déterminer la meilleure façon d’attribuer ces ressources. Le CDIP a fait valoir que l’argument de SWIFT selon lequel le Conseil n’avait pas tenu compte des principes de base conformément au critère énoncé à l’article 62 de la Loi n’est pas approprié, puisque cet argument semble en fait être que le Conseil aurait dû tenir compte des principes de base différemment. SSi Micro a fait valoir que c’est SWIFT, et non le Conseil, qui a introduit un nouveau principe puisque le principe de précaution est un concept qui n’a été exploré que tout récemment dans le contexte du droit international de l’environnement.
  5. Selon TCI, les demandeurs devraient être en mesure de présenter des éléments de preuve convaincants (p. ex. rapports d’ingénierie, mesures de la puissance du signal sans fil et analyses économiques) pour prouver qu’une zone géographique donnée de la cellule hexagonale est actuellement mal desservie et ne serait desservie pas sans subvention. Dans sa réponse, SWIFT a qualifié cette approche comme étant restrictive et peu pratique comparativement à l’emploi des données fournies par les collectivités. Blue Sky a indiqué que la qualité du service d’accès Internet à large bande dans les cellules hexagonales qui semblent bénéficier d’une couverture s’avère, dans bien des cas, nettement inférieure à ce que les fournisseurs de services Internet (FSI) ont affiché, et qu’il y a des écarts au sein de la cellule hexagonale. SpeedChecker a soutenu que sans les vitesses réelles pour l’utilisateur final, les conclusions du Conseil concernant l’admissibilité des projets seront tirées en fonction de données inexactes ou imprécises.
  6. De nombreuses parties, y compris Bell Canada et Xplornet, ont fait valoir que le fait d’autoriser les collectivités à fournir des éléments de preuve sur les raisons pour lesquelles une région géographique donnée devrait être admissible au financement provenant du Fonds pour la large bande entraînerait des retards et d’autres difficultés en raison des processus complexes en cause. Dans sa réponse, SWIFT a qualifié ces éléments de preuve comme étant essentiels à l’attribution judicieuse des fonds. Bell Canada a soutenu que le Conseil n’avait pas commis d’erreur en refusant d’incorporer un mécanisme de contestation. Xplornet a ajouté que l’approche proposée par SWIFT aurait pour effet d’accroître le risque que le Fonds pour la large bande fasse obstacle au libre jeu du marché, car elle ne tient pas compte des investissements futurs prévus. En réponse, SWIFT a indiqué que ces arguments ne suffisaient pas pour justifier l’emploi de données inexactes ou incomplètes.
  7. Certaines collectivités, comme Halton, la MRC d’Arthabaska, la MRC de Mékinac, la MRC de Rouville, la municipalité d’Oka, la NSCFDC, la ville de Caledon et la ville de Tecumseh, ont soumis des rapports et des cartes pour démontrer que l’état de la connectivité dans leur territoire n’est pas reflété avec exactitude sur les cartes du Conseil, et qu’elles devraient donc pouvoir présenter des éléments de preuve afin de rectifier ces inexactitudes. Selon le RREO, les cartes du Conseil surestiment radicalement le nombre de ménages dans les zones rurales qui ont accès à des services à large bande qui respectent l’objectif du service universel.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Il est peu probable que la demande faite par SWIFT, voulant que le Conseil permette aux collectivités de fournir des éléments de preuve supplémentaires visant à démontrer leur admissibilité au financement, modifierait sensiblement les cellules hexagonales que le Conseil juge admissibles. Dans la politique réglementaire de télécom 2018-377, le Conseil a estimé que tous les ménages d’une cellule hexagonale complète doivent être mal desservis pour que cette cellule soit considérée comme étant mal desservie et soit donc admissible au financement provenant du Fonds pour la large bande. Un écart dans le niveau de service entre les ménages au sein d’une cellule hexagonale non admissible n’a pas d’incidence sur l’inadmissibilité générale de la cellule hexagonale. Cela s’explique par le fait qu’une cellule hexagonale ne sera pas admissible au financement du Fonds pour la large bande même si un seul ménage de cette cellule dispose d’un service d’accès Internet à large bande qui répond à l’objectif du service universel.
  2. De plus, le fait que la terminologie et la méthodologie utilisées ne soient pas les mêmes pour toutes les cartes et tous les rapports fournis par certaines parties complique leur comparaison à ceux du Conseil, et les uns aux autres. C’est précisément la raison pour laquelle le Conseil a déterminé qu’il devrait adopter une méthodologie commune que les demandeurs connaissent et qui est en place depuis bon nombre d’années.
  3. Les données cartographiques du service d’accès Internet à large bande ont été recueillies, précisées et améliorées par le personnel du Conseil et d’ISDE pendant plus de dix ans. Le Conseil a mis en place de nombreux processus pour valider les données cartographiques, comme la communication avec ISDE, les demandes de renseignements aux fournisseurs de services de télécommunication et les renseignements recueillis dans le cadre de diverses instances.
  4. Concernant les prétentions de SWIFT mentionnées au paragraphe 26 ci-dessus, SWIFT n’a fourni aucun élément de preuve pour justifier ces prétentions ou pour démontrer que le Conseil avait commis une erreur. De plus, comme il est indiqué ci-dessus, le Conseil est autorisé à examiner le fardeau administratif de ses mesures réglementaires en vertu de la Loi et des Instructions. SWIFT a de nouveau démontré dans ses arguments qu’elle trouverait un différent équilibre, non pas que le Conseil ait omis de tenir compte des principes de base.
  5. En outre, c’est SWIFT qui a introduit un nouveau principe, le principe de précaution, qu’elle n’a pas défini. Comme SSi Micro l’a fait remarquer, ce principe découle du droit de l’environnement et n’a pas été examiné dans ce contexte auparavant. SWIFT n’a pas démontré comment ce principe est applicable en l’espèce.
  6. Par conséquent, le Conseil rejette la demande de SWIFT visant la modification de sa conclusion de ne pas mettre en place un mécanisme de contestation pour les régions géographiques inadmissibles. SWIFT n’a pas démontré qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la conclusion du Conseil de se fier aux données présentées dans les cartes du Conseil, qui ne constitue pas une erreur de fait.

Le Conseil a-t-il mis en place un nouveau principe voulant que, dans les cellules hexagonales partiellement desservies, le libre jeu du marché soit « susceptible » d’améliorer la connectivité?

Positions des parties

  1. SWIFT a fait valoir que le Conseil avait introduit un nouveau principe dans la politique réglementaire de télécom 2018-377 en déterminant que si un ménage est desservi, il est probable que le libre jeu du marché donne lieu à de meilleurs niveaux de service d’accès Internet à large bande aux autres ménages de la même cellule hexagonale. SWIFT a soutenu i) qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la conclusion du Conseil, puisque ce principe n’était envisagé ni dans l’avis de consultation de télécom 2017-112 ni par aucune partie à cette instance et ii) que le Conseil devrait donner aux parties une occasion de formuler des observations. En outre, SWIFT a argué que le Conseil n’avait offert aucune analyse ni aucun renvoi à un élément de preuve pour justifier ce nouveau principe ou pour étayer sa validité, par exemple, au moyen d’études techniques ou économiques.
  2. Plusieurs parties, y compris Blue Sky, CoopTel/Sogetel et NSCFDC, ont appuyé SWIFT en ce qui a trait à ce redressement. Bon nombre de ces parties ont soutenu que le libre jeu du marché n’avait jusqu’à présent pas permis d’étendre les réseaux plus loin dans leurs régions, ce qui constituait selon elles un bon indicateur de son incapacité à le faire dans l’avenir. TCI a reconnu qu’il est possible, dans certaines régions, que le libre jeu du marché ne conduise pas à la création de nouvelles installations pour un certain temps.
  3. Xplornet s’est opposée à la position de SWIFT, arguant que le fait d’accéder à la demande de SWIFT augmenterait la mesure dans laquelle le Fonds pour la large bande interfère avec les investissements privés, contrairement aux principes directeurs du Fonds.
  4. Bell Canada a soutenu que la position de SWIFT était déconcertante, soulignant que le Conseil avait discuté du libre jeu du marché à plusieurs reprises dans l’avis de consultation de télécom 2017-112 et que plusieurs intervenants avaient discuté du libre jeu du marché dans le dossier de l’instance connexe. Bell Canada a fait remarquer que, par exemple, en réponse à l’avis de consultation de télécom 2017-112, Rogers Communications Canada Inc. avait soutenu que le Conseil devrait se fier au libre jeu du marché dans les régions géographiques situées à proximité de régions qui ont déjà un service d’accès Internet à large bande, car ces régions sont plus faciles à atteindre.
  5. Le CDIP et SSi Micro ont de plus soutenu que le principe de se fier sur le libre jeu du marché pour atteindre les objectifs politiques établis par la Loi n’est pas nouveau, puisque ce principe est mentionné à l’article 7 de la Loi et dans les Instructions, ainsi que dans de nombreuses décisions rendues par le Conseil. Le CDIP a argué qu’il n’est donc ni déraisonnable ni incorrect pour le Conseil de compter sur le libre jeu du marché pour élargir la couverture du service d’accès Internet à large bande dans les régions où il est prouvé que le service est présentement offert.
  6. En réponse, SWIFT a soutenu que les conclusions du Conseil concernant le libre jeu du marché ne cadrent pas avec les principes de base de prise de décision fondée sur des données probantes, étant donné que le Conseil s’est appuyé sur de simples hypothèses.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Le libre jeu du marché n’est pas un concept nouveau qui est apparu dans la politique réglementaire de télécom 2018-377. La Loi et les Instructions obligent tous deux le Conseil à tenir compte du libre jeu du marché lorsqu’il tire ses conclusions, et la question du libre jeu du marché a manifestement été examinée dans l’instance qui a mené à cette décision.
  2. Le Conseil a tenté d’éviter d’interférer avec le libre jeu du marché, conformément à la Loi et aux Instructions, en considérant les cellules hexagonales partiellement desservies comme étant non admissibles au financement provenant du Fonds pour la large bande. En outre, rien dans la politique réglementaire de télécom 2018-377 n’empêche les FSI d’offrir un service d’accès Internet à large bande dans les régions géographiques non admissibles, conjointement avec les régions plus rurales et éloignées qui sont admissibles, comme il est expliqué ci-dessous.
  3. Par conséquent, le Conseil rejette la demande de SWIFT visant la modification de sa conclusion selon laquelle le libre jeu du marché est susceptible d’améliorer la connectivité. Le Conseil n’a pas mis en place de nouveau principe dans la politique réglementaire de télécom 2018-377, et SWIFT n’a pas démontré qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la conclusion du Conseil concernant le libre jeu du marché. 

Le Conseil devrait-il préciser que les projets proposés peuvent inclure à la fois des cellules hexagonales admissibles et non admissibles?

Positions des parties

  1. SWIFT a soutenu qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la conclusion du Conseil concernant l’admissibilité géographique dans la politique réglementaire de télécom 2018-377, puisque le Conseil n’avait pas tenu compte d’un deuxième ensemble de principes économiques de base, à savoir les économies d’échelle et la qualité de projets. SWIFT a demandé au Conseil de préciser que les demandeurs dont les projets proposés serviraient les régions mal desservies dans les cellules hexagonales partiellement desservies situées près de cellules hexagonales entièrement mal desservies seront admissibles à présenter une demande de financement provenant du Fonds pour la large bande dans le cadre de projets plus importants couvrant de multiples cellules hexagonales. SWIFT a affirmé que cela favoriserait : i)  la coopération, ii)  le développement de projets plus viables et de plus grande ampleur dans ces régions et iii) la participation du secteur privé et à l’engagement de dépenses en capital.
  2. SWIFT a soutenu que l’approche restrictive du Conseil fait en sorte que les régions mal desservies dans les cellules hexagonales partiellement desservies situées près de cellules hexagonales entièrement mal desservies ne pourront pas se regrouper pour développer des propositions de projets évolutifs et de plus grande ampleur. SWIFT a fait valoir que le fait que le Conseil n’ait pas tenu compte de ce principe de base ne respecte pas l’objectif d’attribution équitable et judicieuse du Fonds pour la large bande pour des projets évolutifs et durables qui sont viables et qui optimisent les contributions du secteur privé.
  3. Bell Canada, SaskTel et SSi Micro ont toutes fait valoir que les conclusions du Conseil rendues dans la politique réglementaire de télécom 2018-377 n’empêchent pas les demandeurs de proposer un projet incluant à la fois des régions géographiques admissibles et non admissibles. TCI a soutenu que le Conseil n’est pas tenu de se prononcer sur chaque point qui lui est présenté. Par conséquent, le fait que ces éléments n’aient pas été explicitement mentionnés dans la politique réglementaire de télécom 2018-377 ne signifie pas que le Conseil n’en a pas tenu compte.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Dans l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2018-377, le Conseil n’a pas omis de prendre en considération les économies d’échelle et la qualité de projets, comme le prétend SWIFT. Le Conseil a déterminé que seuls les coûts encourus dans les régions géographiques admissibles seraient remboursés, et non pas que les projets doivent desservir uniquement les régions géographiques admissibles. Le redressement qu’a demandé SWIFT n’est pas nécessaire parce que les conclusions du Conseil dans la politique réglementaire de télécom 2018-377 n’empêchent pas les demandeurs de présenter des projets qui comprennent des régions géographiques non admissibles, à condition que les projets ne soient pas viables sans le financement du Conseil.
  2. Par conséquent, le Conseil rejette la demande de SWIFT de préciser que les projets proposés peuvent inclure à la fois des cellules hexagonales admissibles et non admissibles. Le Conseil détermine qu’il n’existe pas de doute réel quant au bien-fondé de sa conclusion dans la politique réglementaire de télécom 2018-377.

Autres questions

  1. La FCM a encouragé le Conseil à déterminer quelles collectivités rurales ont des vitesses inférieures à 25 Mbps et à leur donner la priorité lors du premier appel de demandes. Le Conseil s’est déjà penché sur cette question dans le cadre de l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2018-377 et a déclaré dans cette décision qu’il ne donnerait la priorité à aucune région géographique précise. Cette demande de priorité n’entre donc pas dans la portée de la présente instance.
  2. TCI a demandé que le Conseil apporte des précisions quant à l’admissibilité des projets de services sans fil mobiles. Le Conseil estime que cette question n’entre pas dans la portée de la présente instance.
  3. Xplornet a fait valoir qu’il existe un doute réel quant au fait que le Conseil n’a pas tenu compte des investissements futurs prévus dans la procédure ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2018-377 et que le Conseil devrait mettre en œuvre des mesures de protection à cet effet afin de ne pas déplacer les investissements. Le Conseil estime que cette question n’entre pas dans la portée de la présente instance.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil rejette la demande de SWIFT visant la révision et la modification de la politique réglementaire de télécom 2018-377.

Secrétaire général

Documents connexes

Date de modification :