Décision de télécom CRTC 2013-603

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Ottawa, le 12 novembre 2013

Société TELUS Communications – Demande de révision et de modification de la décision de télécom 2013-73

Numéro de dossier : 8662-T66-201307703

Dans la présente décision, le Conseil rejette la demande présentée par la STC dans le but que soit révisée et modifiée la décision de télécom 2013-73. Toutefois, après un examen approfondi des coûts associés au service d’accès haute vitesse de gros de 6 mégabits par seconde de la STC, le Conseil modifie, de sa propre initiative, le tarif du service afin qu’il soit en vigueur le 15 novembre 2011.

Contexte

1. Les services d’accès haute vitesse (AHV) de gros qu’offrent les grandes entreprises de services locaux titulaires et les entreprises de câblodistribution (collectivement les entreprises titulaires) permettent aux fournisseurs de services indépendants d’offrir des services Internet de détail et autres services à leurs propres utilisateurs finals. En raison de la disponibilité des services AHV de gros, les utilisateurs finals des services de résidence et d’affaires ont un choix accru de services. Les services AHV de gros sont offerts en vertu de modalités que le Conseil doit approuver, alors qu’il s’abstient de réglementer les tarifs et la plupart des modalités applicables aux services Internet de détail.

2. Dans les politiques réglementaires de télécom 2011-703 et 2011-704, le Conseil a approuvé les tarifs et les modalités applicables aux services AHV de gros. Par la suite, il a reçu un certain nombre de demandes présentées par les entreprises titulaires et les fournisseurs de services indépendants dans le but que certaines conclusions dans ces politiques soient révisées et modifiées.

3. Dans la décision de télécom 2013-73, le Conseil a modifié les tarifs et les modalités applicables aux services AHV de résidence et d’affaires de gros, en réponse à diverses questions que le Consortium des Opérateurs de Réseaux Canadiens Inc. (CORC) a soulevées dans sa demande de révision et de modification des politiques réglementaires de télécom 2011-703 et 2011-704. En particulier, le Conseil i) a apporté certaines modifications aux tarifs de la Société TELUS Communications (STC) pour corriger des erreurs d’établissement des coûts et ii) a modifié sa politique relative aux suppléments applicables aux services AHV d’affaires de gros de sorte que les tarifs correspondent aux tarifs applicables aux services AHV de résidence de gros comparables. De plus, le Conseil a décidé que les modifications tarifaires résultant des corrections des erreurs d’établissement des coûts s’appliqueront rétroactivement à la date à laquelle les décisions initiales ont été publiées.

Demande

4. Le Conseil a reçu une demande de la STC, datée du 22 mai 2013, dans laquelle la compagnie réclamait que le Conseil revoie et modifie la décision de télécom 2013-73. La STC a indiqué que le Conseil avait fait des erreurs de droit ou de fait dans trois aspects de la décision, soit : i) le tarif approuvé pour le service AHV de gros de 6 mégabits par seconde (Mbps) de la STC; ii) la décision d’exiger que les tarifs des services AHV de résidence et d’affaires de gros soient équivalents; et iii) l’application rétroactive des tarifs des services AHV de gros approuvés dans ladite décision.

5. Le Conseil a reçu des observations concernant la demande de la STC de la part de la British Columbia Broadband Association (BCBA), du CORC, de MTS Inc. et d’Allstream Inc. (collectivement MTS Allstream), de Primus Telecommunications Canada Inc. (Primus) et de Vaxination Informatique (Vaxination). On peut consulter sur le site Web du Conseil le dossier public de l’instance, lequel a été fermé le 12 juillet 2013. On peut y accéder à l’adresse www.crtc.gc.ca, sous l’onglet Instances publiques ou au moyen du numéro de dossier indiqué ci-dessus.

6. Dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, le Conseil a indiqué les critères qu’il utilisera pour évaluer les demandes de révision et de modification déposées en vertu de l’article 62 de la Loi sur les télécommunications (Loi). En particulier, il a indiqué que les demandeurs doivent démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale, résultant, par exemple, i) d’une erreur de droit ou de fait, ii) d’un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision, iii) du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans l’instance initiale ou iv) d’un nouveau principe découlant de la décision.

Questions

7. Le Conseil estime qu’il doit, dans la présente décision, se prononcer sur les questions suivantes :

I. Le Conseil a-t-il commis une erreur de fait ou de droit lorsqu’il a évalué les coûts de la STC liés à la fourniture de son service AHV de gros de 6 Mbps?

II. Le Conseil a-t-il commis une erreur de fait en fixant les mêmes tarifs des services AHV d’affaires de gros de la STC que ceux applicables aux services AHV de résidence de gros comparables?

III. Le Conseil a-t-il commis une erreur de droit en exigeant que les tarifs des services AHV de gros de la STC s’appliquent rétroactivement? 

I. Le Conseil a-t-il commis une erreur de fait ou de droit lorsqu’il a évalué les coûts de la STC liés à la fourniture de son service AHV de gros de 6 Mbps?

8. La STC a indiqué que les tarifs approuvés pour les services AHV de gros, dans la décision de télécom 2013-73, reposaient sur les études de coûts que la STC avait déposées et les rajustements effectués par le Conseil. De plus, la STC a indiqué que, dans ladite décision, le Conseil a fait remarquer que les coûts associés au serveur d’accès à distance à large bande (SADLB) connexes au service de 6 Mbps de la STC étaient réduits de 76 %. La STC a indiqué qu’elle avait conclu, dans ses efforts pour appliquer les rajustements de coûts du Conseil, que les coûts associés au SADLB avaient été réduits de plus de 95 %. En outre, la STC a fait valoir qu’un tel rajustement était irréaliste puisqu’il est basé sur des hypothèses d’utilisation non valables. De plus, la STC a soutenu que le tarif approuvé ne correspondait pas au tarif que le Conseil avait approuvé pour des services comparables offerts par Bell Aliant Communications régionales, société en commandite et Bell Canada (collectivement les compagnies Bell). 

9. Le CORC, Primus et Vaxination ont indiqué que les comparaisons tarifaires de la STC sont sans fondement, car elles sont basées sur la comparaison entre le tarif approuvé pour le service AHV traditionnel de gros de 6 Mbps de la STC et le tarif du service AHV associé au réseau de fibre optique jusqu’au nœud (réseau FTTN) de gros de 6 Mbps des compagnies Bell. De plus, elles ont indiqué qu’on ne devrait pas tenir compte de l’analyse de la STC au sujet des erreurs présumées du Conseil puisque celle-ci n’avait pas été versée au dossier public. Le CORC a indiqué qu’une analyse des relations entre les tarifs approuvés par le Conseil concernant les divers services AHV de gros de la STC démontrait, le cas échéant, que le tarif du service AHV de gros de 6 Mbps de la STC était trop élevé.

10. La STC a indiqué que l’utilisation du mot « traditionnel » pour décrire son service AHV de gros de 6 Mbps ne reflète pas la technologie de réseau qu’elle utilise pour offrir le service. De plus, la STC a indiqué que l’étude de coûts relative au service qu’elle offre tient compte du fait que le service est offert au moyen de la technologie FTTN. Par conséquent, la STC a indiqué que sa comparaison avec le service AHV de gros de 6 Mbps des compagnies Bell est valable.

Résultats de l’analyse du Conseil

11. Le Conseil fait remarquer que la STC a convenu que les coûts associés au SADLB qu’elle avait déposés pour appuyer sa proposition initiale concernant le service AHV de gros de 6 Mbps étaient surévalués et nécessitaient d’être modifiés. De plus, le Conseil fait remarquer que la STC n’a fourni aucune preuve pour étayer le bien-fondé de son affirmation selon laquelle le Conseil avait réduit les coûts associés au SADLB de plus de 95 %. Toutefois, après examen du dossier de l’instance ayant mené à la décision de télécom 2013-73, le Conseil a constaté que la réduction des coûts associés au SADLB de la STC était incorrectement indiquée au paragraphe 88 de ladite décision comme étant de 76 %, alors qu’on devrait y lire qu’elle est de 85 %. Le Conseil confirme qu’il a appliqué une réduction de 85 % concernant les coûts du SADLB lorsqu’il a fixé le tarif de la STC.

12. En ce qui concerne la comparaison qu’effectue la STC entre son tarif du service AHV traditionnel de gros de 6 Mbps avec celui du service AHV associé au réseau FTTN de gros de 6 Mbps des compagnies Bell, le Conseil fait remarquer qu’il a comparé les études de coûts associés aux services et confirme que les différences de tarifs sont valides et justifiées.

13. De plus, un examen des rajustements de coûts effectués pour déterminer le tarif du service AHV de gros de 6 Mbps de la STC a révélé des erreurs commises par le Conseil à l’égard de trois éléments de coût, soit la prestation des services, la gestion du produit et les coûts d’immobilisation.

14. En ce qui concerne les coûts associés à la prestation des services, le coût lié à la qualification de ligne a été appliqué par erreur au nombre d’utilisateurs à la fin d’une année sur deux lors de la période d’étude, alors qu’il aurait dû s’appliquer au nombre d’utilisateurs qui se sont ajoutés chaque année de la période d’étude. La correction de cette erreur réduit le coût du service AHV de gros de 6 Mbps de la STC.

15. En ce qui a trait aux coûts de la gestion du produit, les coûts ponctuels connexes ont également été appliqués par erreur au nombre d’utilisateurs à la fin d’une année sur deux lors de la période d’étude, alors qu’ils auraient dû s’appliquer au nombre d’utilisateurs qui se sont ajoutés chaque année de la période d’étude. La correction de cette erreur réduit encore plus le coût du service AHV de gros de 6 Mbps de la STC.

16. Quant aux coûts d’immobilisation, dans le cadre de l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2011-703 et en réponse aux demandes de renseignements du Conseil, la STC a déposé des données détaillées et complémentaires sur lesquelles le Conseil s’est basé pour fixer le tarif du service AHV de gros de 6 Mbps de la compagnie. En examinant les rajustements de coûts, le Conseil a découvert des erreurs de calcul et d’hypothèses ayant entraîné une sous-évaluation des coûts d’immobilisation associés aux composantes d’accès du service. La correction de cette erreur a eu pour effet de faire augmenter le coût du service AHV de gros de 6 Mbps de la STC.

17. Le Conseil fait remarquer que la correction des coûts associés au service AHV de gros de 6 Mbps de la STC pour tenir compte de ces trois erreurs entraîne une hausse du tarif global des services de 1,21 $ par mois par utilisateur final. Avec l’augmentation de coûts, le tarif du service sera haussé pour s’établir à 19,18 $ par mois par utilisateur final.

18. À la lumière de ce qui précède, le Conseil estime que la STC n’a pas prouvé qu’il avait commis une erreur de droit ou de fait dans son évaluation des coûts de la STC liés à la prestation de son service AHV de gros de 6 Mbps. Par conséquent, le Conseil rejette la demande de la STC dans le but que soit modifié le tarif qu’il a approuvé pour le service qu’elle offre.

19. Cependant, le Conseil, de sa propre initiative, modifie le tarif du service et le fixe à 19,18 $ par mois par utilisateur final afin de corriger les erreurs qu’il a constatées dans la procédure utilisée pour établir les coûts associés au service. Étant donné que le tarif reposait sur des coûts erronés, et que le nouveau tarif remplace celui établi dans la politique réglementaire de télécom 2011-703, le Conseil fixe l’entrée en vigueur du nouveau tarif rétroactivement au 15 novembre 2011, soit la date à laquelle la décision a été publiée.

20. Le Conseil fait remarquer qu’il a publié une lettre, datée du 12 juillet 2013, dans laquelle il a établi une nouvelle procédure pour le dépôt des demandes tarifaires liées aux services de gros. Le Conseil s’attend à ce que les nouvelles exigences en matière de dépôt puissent mieux l’aider à effectuer les analyses et réduisent les risques d’erreurs liées aux méthodes d’établissement des coûts, aux hypothèses et aux calculs utilisés pour déterminer les coûts et les tarifs des services de gros.

II. Le Conseil a-t-il commis une erreur de fait en fixant les mêmes tarifs des services AHV d’affaires de gros de la STC que ceux applicables aux services AHV de résidence de gros comparables?

21. La STC a indiqué que le Conseil avait commis une erreur de fait lorsqu’il a décidé, dans la décision de télécom 2013-73, de fixer les mêmes tarifs des services AHV d’affaires de gros de la compagnie que ceux applicables aux services AHV de résidence de gros comparables. La STC a fait valoir que le Conseil avait commis une erreur parce que sa décision limitait les fournisseurs de réseaux à un supplément équivalent pour les services de résidence et d’affaires de gros, même si, sur le marché de détail, la clientèle de gros peut offrir des services d’affaires d’une valeur supérieure aux services de résidence.

22. La STC a indiqué que la valeur supérieure liée au marché de détail des services d’affaires se reflétait normalement dans les tarifs supérieurs des services d’affaires de détail par rapport aux tarifs des services de résidence de détail comparables, tant en ce qui concerne les entreprises titulaires que les fournisseurs de services indépendants.

23. De plus, la STC a fait valoir que les utilisateurs finals des services d’affaires exigent de leurs fournisseurs de services un degré supérieur de soutien et d’aide technique. La situation entraîne des coûts supérieurs pour les entreprises titulaires, car les fournisseurs de services indépendants communiquent avec les entreprises titulaires plus souvent au sujet des services AHV de gros pour des problèmes liés aux utilisateurs finals des services d’affaires que pour des problèmes liés aux utilisateurs finals des services de résidence.

24. En tenant compte de ces considérations, la STC a proposé que les suppléments applicables aux services AHV d’affaires de gros soient augmentés de 40 à 60 %, alors que les suppléments applicables aux services AHV de résidence de gros demeurent inchangés. De plus, la STC a proposé que si le Conseil devait décider que des tarifs équivalents doivent s’appliquer aux services AHV de résidence et d’affaires de gros, le supplément commun applicable aux services devrait être fixé à 50 %.  

25. De plus, la STC a fait valoir que les suppléments communs applicables aux services AHV de gros, approuvés dans la décision de télécom 2013-73 (soit 40 % pour les services AHV de gros offerts au moyen du réseau FTTN et 30 % pour les services offerts au moyen d’un réseau traditionnel) ne reflètent pas un taux de rendement approprié pour les entreprises titulaires. La STC a soutenu qu’un supplément représente un recouvrement proportionné des coûts courants et fixes, une compensation pour les risques liés aux investissements dans les installations du réseau, et un rendement adéquat pour les actionnaires. La STC a soutenu que ces trois éléments du supplément s’avèrent tous essentiels pour maintenir les investissements actuels et futurs dans le réseau.

26. La BCBA, le CORC, MTS Allstream, Primus et Vaxination ont contesté le bien-fondé des propositions de la STC et n’étaient pas d’avis que la décision de télécom 2013-73 comportait des erreurs. Ils ont fait valoir que toute valeur additionnelle pouvant être attribuée aux services d’affaires de détail est basée sur des fonctions additionnelles et des différenciations de services qu’offrent les fournisseurs de services indépendants. Ils ont soutenu que la STC n’avait fourni aucune preuve quant aux différences réelles de coûts entre les services AHV de résidence et d’affaires de gros et que, de toute façon, les tarifs approuvés des services AHV d’affaires de gros étaient compensatoires.  

27. MTS Allstream a indiqué que même si la STC avait engagé des coûts plus élevés pour fournir les services AHV d’affaires de gros, ces coûts ne justifiaient pas d’attribuer un supplément supérieur, puisque ceux-ci étaient intégrés dans les coûts différentiels des services. De plus, MTS Allstream a indiqué que la valeur pour les utilisateurs finals est déterminée pour ainsi dire à l’échelle du marché de détail concurrentiel et non du marché de gros. Selon MTS Allstream, un supplément supérieur applicable aux services AHV d’affaires de gros permettrait au fournisseur de réseaux d’exercer un contrôle sur le marché de détail et forcerait les utilisateurs finals à payer des tarifs artificiellement supérieurs pour les services de détail. 

28. De plus, MTS Allstream a fait valoir que les allégations de la STC relativement au caractère inadéquat de la compensation approuvée associée aux suppléments concernant les services AHV d’affaires de gros et à son incidence potentielle sur la motivation de la STC à faire de nouveaux investissements sont démenties par les résultats financiers de la compagnie indiquant que ses coûts et tout risque lié aux investissements actuels sont couverts.

29. La STC a fait valoir que le rapport qu’établit MTS Allstream entre ses résultats financiers globaux et le supplément applicable aux services AHV n’est pas valable, car les éléments que compare MTS Allstream reposent sur des concepts financiers totalement différents, et les différences rendent les comparaisons impossibles.

Résultats de l’analyse du Conseil

30. Le Conseil fait remarquer que la STC a reconnu que les services AHV de résidence et d’affaires de gros sont fournis essentiellement au moyen du même réseau, et que les fournisseurs de réseaux engagent essentiellement les mêmes coûts d’immobilisation pour fournir les services. Le Conseil estime que la STC n’a pas réussi i) à prouver qu’il existe des différences réelles dans les dépenses d’exploitation liées à la prestation des services AHV de résidence et d’affaires de gros et ii) si une telle différence existe, pourquoi elle ne pourrait se refléter dans les coûts différentiels. 

31. Le Conseil fait remarquer qu’il ne réglemente pas les tarifs des services Internet de détail offerts au moyen de ces réseaux. Si le Conseil devait fixer les tarifs de gros en fonction des tarifs de détail, il exigerait effectivement que les utilisateurs des services AHV de gros recouvrent les coûts additionnels auprès de la clientèle de détail. Le Conseil estime qu’une telle façon de fixer les tarifs des services de gros irait à l’encontre du libre jeu d’un marché concurrentiel au sein des services de détail, contrairement aux Instructions[1], selon lesquelles le Conseil doit faire en sorte de ne pas faire obstacle au libre jeu du marché que dans la mesure minimale nécessaire pour atteindre les objectifs de la politique énoncés dans la Loi

32. En ce qui a trait à l’argument de la STC selon lequel les suppléments approuvés dans la décision de télécom 2013-73 offrent une compensation inadéquate aux fournisseurs de réseaux et les dissuadent d’investir dans les infrastructures, le Conseil fait remarquer que la STC n’a fourni aucune preuve pour appuyer son point de vue, se basant plutôt sur des demandes présentées lors d’instances antérieures concernant différents services. Dans le même ordre d’idées, le Conseil fait remarquer que la STC n’a étayé d’aucune preuve concrète le caractère approprié des suppléments qu’elle a proposés.  

33. Le Conseil fait également remarquer que la décision d’exiger que les entreprises titulaires fournissent, aux fournisseurs de services indépendants, les services AHV d’affaires de gros aux tarifs approuvés qui s’appliquent aux services AHV de résidence de gros équivalents a été prise en vertu de considérations de principe énoncées dans la politique réglementaire de télécom 2013-70, dont celle expressément énoncée d’une compensation appropriée pour les entreprises titulaires qui fournissent les services AHV de gros. Le Conseil estime qu’il a tenu compte, au moment de fixer le supplément approprié applicable aux services AHV de gros, de l’incidence de ladite décision sur la motivation des titulaires à investir dans de nouvelles infrastructures.

34. Le Conseil fait remarquer que le supplément associé aux coûts de la Phase II a pour but de permettre de recouvrer les coûts courants et fixes non liés à un service en particulier. Dans la politique réglementaire de télécom 2010-632, le Conseil a approuvé, concernant les services AHV de gros que fournissent les entreprises de services locaux titulaires, l’ajout d’un supplément de 10 % aux coûts liés à la fourniture de tels services au moyen de nouvelles installations de réseau i) reconnaissant que les coûts d’immobilisation associés aux nouvelles installations pouvaient être supérieurs aux coûts d’immobilisation approuvés pour utilisation dans les études réglementaires, ii) plutôt que d’évaluer le montant supérieur des coûts d’immobilisation. L’approche a réglé la question précise dont le Conseil était saisi, mais elle n’avait pas pour but de modifier l’objectif fondamental des suppléments associés aux coûts de la Phase II, contrairement à l’argument de la STC.

35. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que les demandes de la STC dans le but que les suppléments soient fixés en tenant compte d’une compensation liée au risque ou pour pouvoir offrir un rendement aux actionnaires vont à l’encontre des principes liés à l’établissement des coûts de la Phase II. En outre, le Conseil conclut que la hausse du supplément associé aux services AHV de gros que la STC a proposée n’est étayée d’aucune preuve selon laquelle les suppléments approuvés dans la décision de télécom 2013-73 sont inadéquats.

36. À la lumière de ce qui précède, le Conseil estime qu’il n’a commis aucune erreur de fait lorsqu’il a exigé, dans la décision de télécom 2013-73, que les tarifs des services AHV d’affaires de gros qu’offrent les entreprises titulaires correspondent aux tarifs des services AHV de résidence de gros équivalents. Le Conseil rejette donc la demande présentée par la STC dans le but que cette obligation soit annulée et que le supplément applicable aux services AHV de gros soit augmenté.

III. Le Conseil a-t-il commis une erreur de droit en exigeant que les tarifs des services AHV de gros de la STC s’appliquent rétroactivement?

37. La STC a indiqué que le Conseil avait commis une erreur de droit lorsqu’il a déterminé, dans la décision de télécom 2013-73, que les tarifs approuvés pour les services AHV de gros s’appliqueraient rétroactivement au 15 novembre 2011. La STC a signalé que les tarifs étaient définitifs, et que le Conseil réglemente les tarifs en vertu d’un processus d’approbation. Selon la STC, en vertu de ce processus, seuls les tarifs provisoires peuvent s’appliquer rétroactivement.

38. La STC a indiqué que plusieurs demandes de révision et de modification avaient été déposées auprès du Conseil à la suite de la publication de la politique réglementaire de télécom 2011-703, et qu’aucune de ces demandes ne contestait la validité des tarifs définitifs approuvés pour les services AHV de gros de la STC.

39. De plus, la STC a fait valoir que la Cour d’appel fédérale soutient qu’une décision du Conseil au sujet d’un tarif peut être annulée et modifiée rétroactivement à la date de la décision initiale, s’il est possible de prouver que celle-ci a été prise en l’absence de toute preuve permettant d’étayer son bien-fondé. La STC a soutenu que les circonstances ne s’appliquent pas dans son cas, puisque les décisions initiales du Conseil au sujet de tarifs, prises dans la politique réglementaire de télécom 2011-703, reposaient sur le dossier complet de l’instance ayant mené à la décision.

40. Le CORC a indiqué que le Conseil peut, de sa propre initiative, revoir les tarifs approuvés dans la politique réglementaire de télécom 2011-703 et les modifier rétroactivement au 15 novembre 2011, en vertu de l’article 62 de la Loi

41. De plus, le CORC a fait valoir que même si aucune décision judiciaire n’avait tranché en particulier au sujet du pouvoir du Conseil de modifier rétroactivement un tarif définitif, dans le cadre de son droit de revoir et de modifier une décision, la Cour suprême du Canada a, dans certains cas, jugé que les pouvoirs de révision et de modification semblables à ceux dont dispose le Conseil pouvaient s’appliquer rétroactivement.  

42. La STC a répliqué que la jurisprudence qu’invoque le CORC ne s’appliquait pas au pouvoir du Conseil en vertu de la Loi et qu’elle reposait sur des interprétations qui ne tiennent pas compte du contexte général entourant la Loi

Résultats de l’analyse du Conseil

43. Le Conseil fait remarquer que la STC a soutenu à juste titre qu’aucune partie à l’instance ayant mené à la décision de télécom 2013-73 n’a contesté les coûts sur lesquels reposent les tarifs des services AHV de gros de la STC approuvés dans les politiques réglementaires de télécom 2011-703 et 2011-704. Cependant, le Conseil fait également remarquer qu’il peut, de sa propre initiative, revoir et modifier ses décisions.

44. Le Conseil demeure d’avis que, comme il a été établi dans la décision de télécom 2013-73, lorsque les tarifs reposent sur des coûts erronés, les tarifs ne sont ni justes ni raisonnables, et que des rajustements sont requis afin que ces tarifs soient conformes à la Loi. Dans de tels cas, il est à la fois nécessaire et approprié d’appliquer les rajustements rétroactivement à la date de mise en œuvre des services, pour veiller à ce que les tarifs soient justes et raisonnables en tout temps et appuient les objectifs de la politique énoncés dans la Loi. Le Conseil estime que la STC n’a pas fourni de preuve suffisante pour prouver qu’il avait commis une erreur de droit à cet égard.

45. À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut qu’il n’a commis aucune erreur de droit soulevant un doute réel quant au bien-fondé de la décision de télécom 2013-73 lorsqu’il a exigé, dans celle-ci, que les tarifs des services AHV de gros de la STC s’appliquent rétroactivement au 15 novembre 2011. Par conséquent, le Conseil rejette la demande présentée par la STC dans le but de faire annuler la décision relative à l’application rétroactive des tarifs de la STC.  

Secrétaire général

Documents connexes

Note de bas de page

[1]  Décret donnant au CRTC des instructions relativement à la mise en œuvre de la politique canadienne de télécommunications, C.P. 2006-1534, 14 décembre 2006

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