Décision de télécom CRTC 2024-90

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Référence : Demande de la Partie 1 affichée le 10 mars 2022

Ottawa, le 1 mai 2024

Dossier public : 8640-M22-202201177

Groupe Maskatel Québec LP – Demande visant une abstention de réglementation des services de réseau étendu

Sommaire

Le Conseil approuve une demande du Groupe Maskatel Québec LP qui souhaite obtenir une abstention de réglementation des services de réseau étendu dans son territoire d’exploitation, qui comprend les circonscriptions de Notre-Dame-du-Bon-Conseil, de Sainte-Rosalie, de Saint-Éphrem, de Saint-Victor et d’Upton (Québec).

Contexte

  1. Lorsque des particuliers ou des entreprises se connectent à Internet, ils le font généralement au moyen d’un réseau local. Un réseau local est un petit réseau qui relie des ordinateurs et d’autres appareils dans une zone géographique limitée, comme une maison, une école ou un immeuble de bureaux. Un réseau Wi-Fi de résidence qui se connecte à Internet au moyen d’un routeur est un exemple courant de réseau local. Les services de réseau étendu (RE) permettent aux clients de relier deux ou plusieurs réseaux locaux sur une vaste zone géographique.
  2. Les services RE sont généralement utilisés pour faciliter la transmission sécurisée de données entre des sites géographiquement dispersés. Par exemple, les entreprises disposant de centres de données dans plusieurs villes, provinces ou pays peuvent utiliser des services RE au lieu de l’Internet public pour transférer des données entre ces sites. Les services RE offrent généralement des vitesses de transfert de données plus constantes, peuvent fournir une connectivité de transport de gros et sont plus sûrs.
  3. Le paragraphe 34(1) de la Loi sur les télécommunications (Loi) prévoit que le Conseil peut s’abstenir de réglementer les modalités de service, les tarifs, les ententes de travail et les limitations de responsabilité liés à un service ou à une catégorie de services fournis par une entreprise canadienne, s’il estime qu’une telle abstention serait conforme à la Loi.
  4. En outre, le paragraphe 34(2) de la Loi exige que le Conseil s’abstienne lorsqu’il y a suffisamment de concurrence pour protéger les intérêts des clients, tandis que le paragraphe 34(3) prévoit qu’il ne doit pas s’abstenir s’il estime que cela porterait atteinte à la concurrence.
  5. Dans la décision de télécom 94-19, le Conseil a établi un cadre d’évaluation de l’abstention en vertu de l’article 34 de la Loi. Dans ce cadre, la première étape de l’évaluation de la pertinence d’une abstention consiste à définir le marché pertinent, c.-à-d. le plus petit groupe de produits, dans la plus petite zone géographique, pour lequel une entreprise disposant d’un pouvoir de marché peut imposer de manière rentable une augmentation durable des prix. Le Conseil a également établi plusieurs autres critères qui pourraient être examinés pour déterminer si un marché est concurrentiel. Il s’agit notamment des parts de marché des entreprises dominantes et concurrentes, des conditions de l’offre et de la demande, de la probabilité d’entrée sur le marché, des barrières à l’entrée sur le marché et des éléments prouvant une rivalité.
  6. Dans le cadre de l’ordonnance de télécom 2000-553, le Conseil a défini les services RENote de bas de page 1 et s’est abstenu de réglementer les services RE actuels et futurs fournis par la plupart des grandes entreprises de services locaux titulaires (ESLT). Dans des décisions ultérieures, le Conseil s’est abstenu de réglementer les services RE offerts par toutes les grandes ESLT et de nombreuses petites ESLT qui n’étaient pas comprises dans l’ordonnance de télécom 2000-553Note de bas de page 2.

Demande

  1. Le 8 mars 2022, le Conseil a reçu une demande du Groupe Maskatel Québec LP (Maskatel) sollicitant une abstention de réglementation des services de réseau étendu dans son territoire d’exploitation, qui comprend les circonscriptions Notre-Dame-du-Bon-Conseil, de Sainte-Rosalie, de Saint-Éphrem, de Saint-Victor et d’Upton (Québec). Maskatel est une filiale de Bell Canada et est l’ESLT dans son territoire d’exploitation.
  2. Maskatel a proposé d’utiliser la définition des services RE établie par le Conseil dans l’ordonnance de télécom 2000-553. Maskatel n’a pas pu fournir d’estimations de la part de marché des services RE dans son territoire d’exploitation, car elle n’offre pas actuellement ces services. Maskatel a toutefois fait valoir que Cogeco inc. (Cogeco) dispose de la technologie et de l’infrastructure nécessaires pour fournir des services RE dans le territoire d’exploitation de Maskatel.
  3. Compte tenu de la capacité de Cogeco à faire concurrence dans le territoire de Maskatel, cette dernière a soutenu que, si sa demande était approuvée, l’abstention permettrait la fourniture de services RE à des tarifs basés sur le marché et soutiendrait la concurrence, l’abordabilité, les services de haute qualité et l’innovation, ce qui profiterait aux consommateurs.
  4. Maskatel a affirmé que les services offerts seraient soumis à une concurrence suffisante pour protéger les intérêts des utilisateurs et que le fait de ne pas réglementer les services RE ne porterait pas préjudice à l’établissement ou au maintien d’un marché concurrentiel.
  5. Maskatel a fait valoir que le fait de s’abstenir de réglementer les services RE à Notre-Dame-du-Bon-Conseil, à Sainte-Rosalie, à Saint-Éphrem, à Saint-Victor et à Upton serait donc conforme au cadre d’abstention établi dans la décision de télécom 94-19 et aux objectifs stratégiques de la Loi.
  6. Le Conseil n’a reçu aucune intervention en réponse à la demande.

Analyse du Conseil

  1. Dans la décision de télécom 94-19, le Conseil a établi que toute décision de sa part de s’abstenir de réglementer un service nécessiterait une évaluation de la concurrence existante relative à ce service. Pour procéder à cette évaluation, il convient de définir le marché des services et des produits concernés.

Définition de marché de services et de produits

  1. Le Conseil fait remarquer qu’il a appliqué la définition du marché de produits de manière constante pour les services RE comme établie dans l’ordonnance de télécom 2000-553. En l’absence de preuve du contraire dans le dossier de la présente instance, le Conseil est d’avis qu’il serait approprié d’appliquer cette définition du marché de services et de produits en ce qui concerne la demande.

Preuve de l’existence d’un marché concurrentiel

  1. Le Conseil fait remarquer que Maskatel n’offre pas actuellement de services RE. Par conséquent, toutes les parts de marché sont détenues par des concurrents.
  2. Le Conseil fait remarquer qu’en réponse à une demande de renseignements, Cogeco a confirmé qu’elle offre des services RE dans toutes les circonscriptions mentionnées dans la demande, à l’exception de Saint-Éphrem, où elle ne dispose pas de capacité de réseau disponible.
  3. Concernant la circonscription de Saint-Éphrem, le Conseil fait remarquer que, bien que Cogeco n’ait pas actuellement de capacité de réseau disponible pour offrir des services RE, elle dispose de l’infrastructure requise (c.-à-d. le réseau de fibre sous-jacent) et serait en mesure de fournir ces services. Le Conseil estime que, en réponse à l’évolution du marché ou de la demande des clients, Cogeco pourrait réorienter ou augmenter la capacité du réseau et décider d’offrir des services RE à tout moment. Le Conseil est d’avis que cela est suffisant pour constituer une présence concurrentielle à Saint-Éphrem.
  4. Le Conseil estime donc que si Maskatel offrait des services RE dans son territoire d’exploitation, les clients potentiels auraient accès à d’autres fournisseurs de services RE; il s’agit là d’une composante d’un service concurrentiel.
  5. En ce qui concerne les barrières potentielles à l’entrée, le Conseil fait remarquer que les services RE utilisent des interfaces standard qui ont facilité l’interopérabilité entre l’équipement appartenant aux clients et le réseau. En outre, le Conseil souligne que l’innovation et l’évolution sur le plan technique dans le marché des services RE, notamment les solutions définies par logiciel, élargissent le choix offert aux consommateurs et réduisent davantage les obstacles à l’entrée.
  6. Le Conseil fait également remarquer qu’il examine actuellement la question plus large de la concurrence dans les services de transport et que ses conclusions à cet égard pourraient entrer avoir une incidence lors de l’analyse de demandes similaires à l’avenir. Toutefois, en ce qui concerne la présente demande, le Conseil est d’avis que le marché en question est suffisamment concurrentiel et que les conditions d’abstention énoncées dans la décision de télécom 94-19 sont remplies sur le territoire de Maskatel en ce qui concerne les services RE.

Conformité aux objectifs stratégiques

  1. Le Conseil estime qu’une abstention de la réglementation des services RE dans le territoire d’exploitation de Maskatel ferait progresser les objectifs stratégiques énoncés aux alinéas 7c) et 7f) de la LoiNote de bas de page 3.
  2. Le Conseil estime également qu’une abstention serait conforme aux paragraphes 2a) et 7c) des Instructions de 2023Note de bas de page 4, qui précisent que le Conseil devrait encourager toutes les formes de concurrence et d’investissement, et veiller à ce qu’un accès abordable à des services de télécommunication de haute qualité, fiables et résilients soit disponible dans toutes les régions du Canada.

Conclusion

  1. Conformément au paragraphe 34(2) de la Loi, le Conseil conclut que, comme question de fait, la fourniture de services RE dans le territoire d’exploitation de Maskatel est suffisamment concurrentielle pour protéger les intérêts des utilisateurs et justifier une abstention dans la mesure indiquée dans la présente décision.
  2. Conformément au paragraphe 34(3) de la Loi, le Conseil conclut que, comme question de fait, s’abstenir de réglementer les services RE dans le territoire d’exploitation de Maskatel ne risque pas d’entraver indûment le maintien d’un marché concurrentiel pour cette catégorie de services.
  3. En vertu du paragraphe 34(1) de la Loi, le Conseil conclut comme question de fait que s’abstenir d’exercer ses pouvoirs et ses fonctions à l’égard des services RE dans le territoire d’exploitation de Maskatel, dans la mesure énoncée dans la présente décision, est conforme aux objectifs de la politique canadienne de télécommunication énoncés dans la Loi, en particulier ceux énoncés aux alinéas 7c) et 7f).
  4. Le Conseil approuve donc la demande de Maskatel.
  5. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil déclare, conformément au paragraphe 34(4) de la Loi, qu’à compter de la date de la présente décision, les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi ne s’appliqueront plus aux services RE actuels et futurs de Maskatel, à l’exception de ce qui suit :
    • les conditions en vertu de l’article 24 de la Loi énoncées dans la présente décision concernant la confidentialité des renseignements sur les clients;
    • toute condition future que le Conseil peut imposer à l’égard des services RE conformément à l’article 24 de la Loi;
    • les pouvoirs conférés au Conseil par les paragraphes 27(2) et 27(4) de la Loi à l’égard de la discrimination injuste et de la préférence indue en ce qui concerne la fourniture de services RE;
    • les pouvoirs conférés au Conseil par le paragraphe 27(3) de la Loi concernant la conformité avec les pouvoirs et fonctions qu’il a conservés.

Secrétaire général

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