Décision de télécom CRTC 2012-143

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Ottawa, le 9 mars 2012

Dryden Municipal Telephone System - Demande d’abstention de la réglementation des services de réseau étendu

Numéro de dossier : 8640-D3-201113167

Dans la présente décision, le Conseil s’abstient, à certaines conditions, d’exercer ses pouvoirs et ses fonctions en ce qui concerne la fourniture par Dryden Municipal Telephone System de services de réseau étendu.

Introduction

1.         Le Conseil a reçu une demande présentée par Dryden Municipal Telephone System (DMTS), datée du 26 septembre 2011, dans laquelle la compagnie demandait d’être soustraite à la réglementation des services de réseau étendu (RE) dans son territoire d’exploitation.

2.         Le Conseil a reçu une intervention de MTS Allstream Inc. (MTS Allstream) concernant la demande de DMTS. On peut consulter sur le site Web du Conseil le dossier public de l’instance, lequel a été fermé le 7 novembre 2011. On peut y accéder à l’adresse www.crtc.gc.ca, sous l’onglet Instances publiques, ou au moyen du numéro de dossier indiqué ci-dessus.

Contexte

3.         En vertu du paragraphe 34(1) de la Loi sur les télécommunications (la Loi), le Conseil peut s’abstenir de réglementer un service, ou une catégorie de services, dans les cas où il conclut que son abstention serait conforme aux objectifs de la politique canadienne de télécommunication. De plus, en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi, le Conseil doit s’abstenir, s’il conclut que le marché pour le service en question est ou sera suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des usagers. Cependant, en vertu du paragraphe 34(3) de la Loi, le Conseil ne peut s’abstenir, s’il conclut que cela aurait vraisemblablement pour effet de compromettre indûment la création ou le maintien d’un marché concurrentiel pour la fourniture de ce service.

4.         Dans la décision Télécom 94-19, le Conseil a établi un cadre pour évaluer s’il doit ou non s’abstenir de réglementer un service en vertu de l’article 34 de la Loi. Dans cette décision, le Conseil a fait remarquer que pour savoir s’il convient de s’abstenir, il faut d’abord définir le marché pertinent, lequel est formé essentiellement du plus petit groupe de produits et de la plus petite région géographique dans lesquels une entreprise qui a un pouvoir de marché peut imposer de façon rentable une hausse durable des prix. Le Conseil a également établi des critères dont il doit tenir compte pour déterminer si un marché est concurrentiel. Ces critères comprennent notamment les parts de marché des entreprises dominantes et concurrentes, les conditions de l’offre et de la demande, la probabilité d’entrée dans le marché, les obstacles à l’entrée dans le marché et une preuve de rivalité.

5.         Dans l’ordonnance 2000-553, le Conseil a défini les services RE1 et a accordé l’abstention de la réglementation aux services RE actuels et à venir fournis par la majorité des grandes entreprises de services locaux titulaires (ESLT). Dans des décisions ultérieures, le Conseil a accordé des abstentions similaires aux autres grandes ESLT de même qu’à d’autres petites ESLT.

Le Conseil devrait-il s’abstenir de réglementer les services RE de DMTS?

a)  Définition des services RE et accès aux services d’accès et de transport des services RE

6.         DMTS a fait remarquer qu’elle n’offre actuellement pas de services RE, mais qu’elle prévoit éventuellement le faire. Par conséquent, DMTS propose d’utiliser la définition du service et la portée du marché énoncées dans l’ordonnance 2000-553.

Résultats de l’analyse du Conseil

7.         Le Conseil conclut qu’il convient de considérer le marché pour les services RE comme régional (soit l’ensemble du territoire de desserte de DMTS), conformément à l’ordonnance 2000-553.

8.         Il conclut également qu’il convient d’appliquer la définition de service RE énoncée dans l’ordonnance 2000-553 aux services RE de DMTS qui font l’objet de la présente décision.

b)  Preuve d’un marché concurrentiel tel que défini par l’article 34 de la Loi

9.         DMTS a demandé l’abstention de la réglementation de ses services RE, faisant valoir, documentation à l’appui, qu’il y avait assez d’éléments de preuve confirmant que le marché des services RE était suffisamment concurrentiel dans son territoire d’exploitation pour permettre au Conseil de s’abstenir de réglementer ces services. Plus précisément, DMTS a indiqué que Bell Aliant Communications régionales, société en commandite et Bell Canada; Shaw Business Solutions; TBayTel et WireIE offrent toutes des services RE ou des services équivalents à l’intérieur et en périphérie de son territoire d’exploitation. DMTS a ajouté que les clients avaient également l’option d’exploiter leur propre RE en se procurant l’équipement nécessaire en vente chez divers fournisseurs d’équipement.

10.     DMTS a fait valoir qu’elle n’était pas en mesure de fournir d’estimations sur les parts de marché des services RE dans son territoire d’exploitation puisqu’elle n’offre actuellement pas ces services et ne détient, par conséquent, aucune part du marché ou de pouvoir au sein de celui-ci.

11.     DMTS a ajouté qu’il n’existait aucun obstacle important à l’entrée sur le marché de concurrents, car les services RE utilisent des interfaces normalisées, éliminant la question de l’interopérabilité du réseau et des dispositifs appartenant aux clients.

12.     MTS Allstream a fait valoir qu’elle ne s’opposait pas à la demande de DMTS, mais que des éléments sous-jacents du réseau qui sont nécessaires à la fourniture concurrentielle de services RE, comme les services d’accès Ethernet, doivent être disponibles à des taux tarifés.

13.     Plus particulièrement, MTS Allstream a soutenu que les conclusions du Conseil selon lesquelles le marché des RE de détail dans les territoires des grandes ESLT était suffisamment concurrentiel pour justifier l’abstention de la réglementation des services RE étaient fondées sur la prémisse que les concurrents auraient un accès continu aux composantes sous-jacentes d’accès et de transport du réseau des ESLT.

14.     DMTS a fait valoir que l’abstention de la réglementation des services RE ne devrait pas être fondée sur la prémisse d’accès aux services d’accès et de transport des services RE, étant donné les conditions concurrentielles actuelles existant dans son territoire et le fait que ces types de services sont en voie d’être graduellement éliminés par les grandes ESLT2.

Résultats de l’analyse du Conseil

15.     Le Conseil fait remarquer que des fournisseurs de services RE nationaux et régionaux sont en exploitation dans le territoire de DMTS. Le Conseil estime qu’il y a un bon nombre de fournisseurs concurrentiels, peu d’obstacles à l’entrée et des clients informés qui peuvent facilement changer de fournisseur de services RE. Il estime donc que DMTS n’a aucun intérêt à agir de façon anticoncurrentielle et de fixer des prix inférieurs au prix coûtant. Par conséquent, le Conseil est d’avis que les conditions d’abstention, énoncées dans la décision Télécom 94-19, sont présentes dans le territoire de DMTS en ce qui concerne les services RE.

16.     Le Conseil fait remarquer que la concurrence actuelle dans le territoire de DMTS s’est implantée sans l’accès de gros aux services d’accès et de transport de la compagnie. Par conséquent, le Conseil estime qu’il n’est pas nécessaire d’obliger DMTS à offrir ces services sous-jacents comme condition à l’abstention de la réglementation des services RE.

17.     À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut, comme question de fait et en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi, que la fourniture de services RE dans le territoire de DMTS est suffisamment concurrentielle pour protéger les intérêts des utilisateurs et qu’il doit s’abstenir de la réglementer dans la mesure indiquée dans la présente décision.

18.     Le Conseil conclut également, comme question de fait et en vertu du paragraphe 34(3) de la Loi, que s’abstenir de réglementer les services RE dans la mesure indiquée dans la présente décision ne nuira vraisemblablement pas au maintien d’un marché concurrentiel pour cette catégorie de services.

19.     Le Conseil conclut également, comme question de fait et en vertu du paragraphe 34(1) de la Loi, que s’abstenir d’exercer ses pouvoirs et de s’acquitter de ses responsabilités en ce qui concerne les services RE dans le territoire de DMTS, dans la mesure énoncée dans la présente décision, est conforme à la politique canadienne de télécommunication énoncée dans la Loi, et plus particulièrement aux objectifs énoncés aux alinéas 7c) et 7f) 3.

c)  Degré d’abstention

Article 24

20.     Le Conseil estime qu’il doit nécessairement conserver les pouvoirs que lui confère l’article 24 de la Loi pour s’assurer que la confidentialité des renseignements sur les clients continue d’être protégée. Le Conseil fait remarquer que les modalités de service de DMTS qui assurent la confidentialité des renseignements sur les clients pour les services réglementés ne s’appliquent pas aux services faisant l’objet d’une abstention. Le Conseil ordonne donc à DMTS, comme condition de fourniture des services RE, de respecter les conditions actuelles concernant la divulgation à des tiers de renseignements confidentiels sur les clients en ce qui concerne les services faisant l’objet d’une abstention de la réglementation dans la présente décision.

21.     Le Conseil enjoint également à DMTS, comme condition de fourniture des services RE, d’inclure, au besoin, dans tous les contrats et tous les arrangements visant des services faisant l’objet d’une abstention de la réglementation dans la présente décision, les conditions actuelles concernant la divulgation à des tiers de renseignements confidentiels sur les clients.

22.     Enfin, le Conseil estime qu’il est également justifié de conserver les pouvoirs que lui confère l’article 24 de la Loi afin d’imposer des conditions futures concernant la fourniture des services RE.

Article 25

23.     Compte tenu du dossier de l’instance, le Conseil estime qu’il ne convient pas d’ordonner à DMTS de soumettre à son approbation des tarifs applicables aux services faisant l’objet d’une abstention de la réglementation dans la présente décision. Par conséquent, le Conseil s’abstiendra d’exercer tous les pouvoirs et fonctions que lui confère l’article 25 de la Loi en ce qui concerne les services RE fournis par DMTS.

Article 27

24.     Le Conseil estime qu’il est inutile d’appliquer des normes réglementaires « justes et raisonnables » dans le cas des tarifs qui sont établis dans un marché concurrentiel. Par conséquent, le Conseil s’abstiendra d’exercer les pouvoirs et fonctions que lui confère le paragraphe 27(1) de la Loi à l’égard des services faisant l’objet d’une abstention de la réglementation dans la présente décision. Le Conseil s’abstiendra également d’exercer les pouvoirs et fonctions que lui confère le paragraphe 27(5) de la Loi étant donné qu’il se rapporte au paragraphe 27(1) de la Loi à l’égard duquel l’abstention est accordée. De plus, le Conseil s’abstiendra d’exercer les pouvoirs et fonctions que lui confère le paragraphe 27(6) de la Loi puisqu’il ne souhaite pas limiter la tarification des services faisant l’objet d’une abstention de la réglementation.

25.     Cependant, comme DMTS est un fournisseur titulaire en ce qui concerne les services et les installations d’accès et de transport dans son territoire d’exploitation, le Conseil estime qu’il doit nécessairement conserver les pouvoirs que lui confère les paragraphes 27(2) et 27(4) de la Loi afin de s’assurer que la compagnie n’exerce pas de discrimination injuste à l’endroit d’autres fournisseurs de services ou de clients, ou qu’elle ne se confère pas de préférence indue ou déraisonnable à l’égard de la fourniture des services RE faisant l’objet d’une abstention de la réglementation dans la présente décision.

26.     Le Conseil estime également qu’il doit nécessairement conserver les pouvoirs que lui confère le paragraphe 27(3) de la Loi concernant la conformité avec les pouvoirs et fonctions qu’il a conservés dans la présente décision.

Article 29

27.     Le Conseil estime qu’il n’y a plus lieu d’exiger que DMTS obtienne son approbation pour conclure des ententes avec d’autres entreprises de télécommunication en ce qui concerne les services RE faisant l’objet d’une abstention de la réglementation dans la présente décision. Par conséquent, le Conseil s’abstiendra d’exercer tous les pouvoirs et fonctions que lui confère l’article 29 de la Loi en ce qui concerne les services RE faisant l’objet d’une abstention de la réglementation dans la présente décision.

Article 31

28.     Le Conseil estime qu’il est approprié que DMTS limite sa responsabilité à l’égard des services RE de la même façon que peut le faire un fournisseur de services non réglementé. Par conséquent, le Conseil s’abstiendra d’exercer tous les pouvoirs et fonctions que lui confère l’article 31 de la Loi en ce qui concerne les services RE faisant l’objet d’une abstention de la réglementation dans la présente décision.

Déclaration en vertu du paragraphe 34(4) de la Loi

29.     À la lumière de ce qui précède, le Conseil déclare, conformément au paragraphe 34(4) de la Loi, qu’à compter de la date de la présente décision, les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi ne s’appliqueront plus aux services RE actuels et futurs de DMTS, à l’exception de ce qui suit :

Conformité avec les Instructions

30.     Le Conseil estime que l’abstention de la réglementation des services RE de DMTS est conforme aux Instructions4 selon lesquelles le Conseil doit (i) se fier, dans la plus grande mesure du possible, au libre jeu du marché comme moyen d’atteindre les objectifs de la politique canadienne de télécommunication; (ii) lorsqu’il a recours à la réglementation, prendre des mesures qui sont efficaces et proportionnelles aux buts visés et qui ne font obstacle au libre jeu du marché concurrentiel que dans la mesure minimale nécessaire pour atteindre les objectifs; (iii) lorsqu’il a recours à la réglementation, prendre des mesures qui ne doivent pas décourager un accès au marché qui est propice à la concurrence et qui est efficace économiquement, ni encourager un accès au marché qui est non efficace économiquement. De plus, le Conseil estime que les conclusions qu’il tire dans la présente décision favorisent l’atteinte des objectifs de la politique canadienne de télécommunication énoncés aux alinéas 7c) et 7f) de la Loi.

Secrétaire général

Documents connexes



Notes de bas de page :

[1]     Le Conseil a indiqué que les services RE faisant l’objet d’une abstention n’incluent pas les services d’interconnexion d’entreprises en mode de transfert asynchrone (MTA) ou les services en MTA qui fournissent l’interconnexion au réseau téléphonique public commuté (RTPC) ou des capacités de contrôle d’appels équivalentes à l’interconnexion au RTPC. Le Conseil a également indiqué que l’accès au RE est un service amélioré à valeur ajoutée (utilisant soit le MTA, Ethernet ou un protocole de réseau à jeton) accessible aux clients des services de RE, et qu’il fait partie des services RE. Enfin, le Conseil a conclu que le marché pour les services RE avait une portée nationale ou régionale et ne s’appliquait pas à une route en particulier, comme dans le cas des services de liaison spécialisée.

[2]     Dans la décision de télécom 2008-17, le Conseil a classé les services d’accès et de transport des services RE comme « non essentiels assujettis à l’élimination graduelle ». Les services faisant partie de cette catégorie sont ceux qui, d’après le Conseil, n’entrent pas dans la définition d’un service essentiel et qui n’ont pas été classés dans les catégories suivantes : non essentiels prescrits et conditionnels, bien public, interconnexion. L’expression « élimination graduelle » signifie l’élimination graduelle de l’accès obligatoire à la fin de la période de transition. Le Conseil fait remarquer que cette décision ne s’applique pas, pour le moment, à DMTS.

[3]     Les objectifs cités sont les suivants :

7c) accroître l’efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes;

7f) favoriser le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication et assurer l’efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire.

[4]     Décret donnant au CRTC des instructions relativement à la mise en œuvre de la politique canadienne de télécommunication, C.P. 2006-1534, 14 décembre 2006

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