Ordonnance de télécom CRTC 2024-183

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Ottawa, le 21 août 2024

Dossiers publics : Avis de modification tarifaire 10, 10/A et 10/B

9163-7918 Québec inc. (CoopTel) – Introduction de frais de refus de demande de service local

Sommaire

Le Conseil approuve la demande tarifaire de 9163-7918 Québec inc. (CoopTel) en vue d’ajouter l’article 503, Frais de refus de demande de service local (DSL), à la Partie E de son Tarif général 21630.

Contexte

  1. Lorsqu’un client change d’entreprise, la nouvelle entreprise envoie un formulaire de demande de service local (DSL) rempli à l’entreprise qui fournit le service au client afin de transférer les services de ce dernier. Ce formulaire contient tous les renseignements sur le client nécessaires au transfert efficace des services d’une entreprise à l’autre. Les formulaires de DSL qui contiennent des erreurs sont refusés et retournés à l’entreprise qui les a envoyés.
  2. Dans l’ordonnance de télécom 2009-805, le Conseil a conclu qu’il convenait d’autoriser Bell Aliant Communications régionales, société en commandite et Bell Canada à instaurer des frais pour le refus d’une DSL. Le Conseil a également fixé des limites quant au taux de refus. Les limites établissent le taux acceptable de refus de DSL, de sorte que des frais applicables au refus de DSL ne peuvent s’appliquer qu’au nombre de refus de DSL dépassant les limites acceptables. Dans la politique réglementaire de télécom 2012-523, le Conseil a déterminé que les entreprises de services locaux pouvaient dorénavant appliquer des frais pour le refus d’une DSL. Dans cette même politique réglementaire, le Conseil a également augmenté les limites quant au taux acceptable de refus de DSL avant que des frais puissent s’appliquer.

Demande

  1. Le 26 mars 2024, le Conseil a reçu une demande, soit l’avis de modification tarifaire (AMT) 10, de 9163-7918 Québec inc. (CoopTel) afin d’ajouter l’article 503, Frais de refus de demande de service local (DSL), à la Partie E de son Tarif général 21630. CoopTel a déposé des modifications à cette demande, soit l’AMT 10/A du 1er mai 2024 et l’AMT 10/B du 23 mai 2024.
  2. CoopTel a déclaré que sa demande est liée à l’ordonnance de télécom 2009-805 et à la politique réglementaire de télécom 2012-523. CoopTel a indiqué que, jusqu’à maintenant, elle n’avait pas le volume nécessaire pour appliquer ces frais de refus. Cependant, l’ouverture de nouveaux secteurs permet maintenant à l’entreprise de commencer à facturer les frais.
  3. Les frais de refus de DSL s’appliqueraient pour chaque DSL refusée, au-delà de la limite applicable, faite par une entreprise de services locaux, un fournisseur de services sans fil ou un fournisseur de services Internet. Les frais seraient évalués sur une base mensuelle et ne s’appliqueraient pas lorsque le refus serait causé par une erreur de CoopTel, une activité de reconquête de CoopTel ou une désactivation du numéro de téléphone après le dépôt de la DSL.
  4. CoopTel a proposé des frais de service mensuels identiques à ceux approuvés pour les entreprises de services locaux titulaires. Aussi, au sujet des limites concernant le taux de refus, CoopTel a proposé une transition sur deux ans, comme suit :
    • un seuil de taux de refus de DSL mensuel de 12,8 % en 2024, de 10,4 % en 2025 et 8 % après deux (2) ans s’applique à chaque FST [fournisseur de services de télécommunication] qui soumet plus de 500 DSL dans un mois, à moins que 75 % des DSL soumises pour ce mois concernent des services d’affaires;
    • un seuil de taux de refus de DSL mensuel de 25,6 % en 2024, 20,8 % en 2025 et 16 % après deux (2) ans s’applique à chaque FST qui soumet 500 DSL ou moins dans un mois, et à chaque FST pour lequel au moins 75 % des DSL soumises pour ce mois concernent des services d’affaires.
  5. CoopTel a demandé que la date d’entrée en vigueur soit le 10 juin 2024.
  6. Le Conseil n’a pas reçu d’intervention concernant la demande de CoopTel.

Analyse du Conseil

  1. La proposition de CoopTel respecte les taux indiqués dans l’ordonnance de télécom 2009-805 et la politique réglementaire de télécom 2012-523 ainsi que la dernière version (version 36) du modèle tarifaire des entreprises de services locaux concurrentes. En ce qui concerne l’imposition de frais de service, CoopTel a proposé des montants identiques à ceux approuvés pour les entreprises de services locaux titulaires. Ceci est conforme à la directive encourageant les entreprises de services locaux concurrentes à utiliser le taux approuvé d’une entreprise de services locaux titulaire. Quant aux modalités, elles sont similaires à celles qui apparaissent dans le modèle tarifaire des entreprises de services locaux concurrentes.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil approuve, par décision majoritaire, la demande tarifaire de CoopTel. Des pages de tarif modifiées doivent être publiées dans les 10 jours civils suivant la date de la présente ordonnance. Les pages de tarif modifiées peuvent être présentées au Conseil sans page de description ni demande d’approbation; une demande tarifaire n’est pas nécessaire.
  2. Une opinion minoritaire du conseiller Bram Abramson est jointe à la présente ordonnance.

Secrétaire général

Documents connexes

Opinion minoritaire du conseiller Bram Abramson

  1. Les demandes de service local (DSL), formatéesNote de bas de page 1 et envoyéesNote de bas de page 2 conformément aux Lignes directrices relatives aux commandes locales canadiennes (LDCL-C), sont fondamentales pour les processus concurrentiels que le Conseil supervise.
  2. Autrefois, elles étaient principalement utilisées pour donner effet aux décisions des utilisateurs finals de changer de compagnie de téléphone. Aujourd’hui, les fournisseurs de services les utilisent également pour la migration d’abonnements aux services de téléphonie mobile, Internet à large bande ou de télévisionNote de bas de page 3. Elles sont devenues une infrastructure de base, « nécessaires à l’échange efficace d’information entre les FST interconnectés [et les entreprises de distribution de radiodiffusion] et au développement et au maintien d’un marché concurrentiel »Note de bas de page 4.
  3. Pour donner effet à une DSL, l’ancien fournisseur de services qui la reçoit compare ses dossiers avec le texte – dont une grande partie est constituée de renseignements personnels Note de bas de page 5 – intégré, dans la DSL, par le nouveau fournisseur. En cas d’inadéquation, le processus échoue, des retards s’ensuivent et les utilisateurs finals sont mécontents.
  4. Pourquoi y aurait-il un décalage? Il se peut que le personnel du nouveau fournisseur de services ait négligé de remplir les champs ou encore de vérifier les formulaires remplis par l’abonné, dont le texte se retrouve dans la DSL. Il se peut que le nouveau fournisseur de services mette en forme les initiales des clients ou encore les abréviations des noms de rue différemment de l’ancien fournisseur. Il se peut aussi que la base de données de l’ancien fournisseur de services contienne des erreurs ou des données d’adresses anciennes. Peut-être s’agit-il également de toute autre chose.
  5. Comment limiter au minimum ces décalages afin de réduire les tâtonnements des fournisseurs de services et de satisfaire les utilisateurs finals?
  6. En partie grâce au bon comportement des fournisseurs de services qui ont intérêt à ce que le système fonctionne bien. L’examen diligent et périodique de la mise en œuvre des LDCL-C constitue une bonne pratique. Il en va de même pour les motifs de rejet des DSL. Il en va de même pour la collaboration en vue de « la source des problèmes concernant les commandes » Note de bas de page 6. Il en va de même, d’ailleurs, du respect des procédures convenues pour contester les DSL qui ont été rejetées sans qu’il y ait faute de la part du nouveau fournisseur de services Note de bas de page 7.
  7. Toutefois, il est possible d’inciter à un bon comportement en imposant un coût aux comportements moins bons, en faisant payer les nouveaux fournisseurs de services lorsqu’ils commettent trop d’erreurs. Quel est le montant à facturer? Combien d’erreurs faut-il pour que ce soit trop? Dans quelles conditions cette incitation par les prix se dissocie-t-elle pour créer des incitations perverses?
  8. Comme l’explique la décision majoritaire, le Conseil a répondu à ces questions dans des décisions qui font désormais figure de modèles. Nous avons examiné d’un œil critique la proposition de Bell Canada de parvenir à une formule ainsi qu’à un prix en 2009. Nous l’avons ensuite ajusté en 2012, sur la base d’autres hypothèses concernant l’augmentation moyenne des taux d’erreur lorsque les bases de données clients de l’ancien fournisseur de services n’ont pas de fenêtre à laquelle se reporter.
  9. C’était toutefois il y a plus de dix ans. L’utilisation des DSL par plusieurs fournisseurs pour traiter les commandes de services comme la large bande à domicile et la télévision par abonnement n’en était alors qu’à ses balbutiements. Le degré d’automatisation de la manipulation des DSL était différent. Il en va aussi de même pour la structure de l’industrie.
  10. Je n’ai pas de différend fondamental avec le résultat de la décision majoritaire du Comité des télécommunications, au nom du Conseil Note de bas de page 8, dans cette affaire. La demande de CoopTel reproduit la formule que le Conseil a établie il y a de cela des années. En l’absence de raisons impérieuses contraires, on peut dire que CoopTel possède une confiance légitime dans la poursuite de l’application de la formule. En effet, continuer à appliquer les formules que nous avons établies jusqu’à ce que nous soyons confrontés à des changements qui doivent être pris en compte constitue, à bien des égards, une pratique de longue date du Conseil.
  11. Toutefois, j’aurais souhaité que, pour en arriver là, certains éléments de preuve aient été soit déposés par le demandeur, soit demandés par le Comité des télécommunications au moyen d’une demande de renseignements, et ce, afin de rassurer le Comité quant à l’adéquation de cette approche.
  12. Le Tribunal fédéral a souligné il y a quelques années que « […] bien que le CRTC puisse mentionner les décisions qu’il a déjà rendues et puisse s’en inspirer, ces décisions ne peuvent pas dicter ses décisions ultérieures. Le CRTC n’est pas lié par les précédents et il est légalement tenu de ne pas limiter son pouvoir discrétionnaire » Note de bas de page 9. Plus il s’est écoulé de temps depuis la formule originale que l’on nous demande d’imiter dans une demande tarifaire à la carte, plus nous nous rapprochons de cette ligne lorsque nous traitons la formule comme une incantation magique plutôt que comme une présomption renforcée par de nouveaux éléments de preuve, même limités, que nous avons expressément pris en considération.
  13. Les parties qui demandent au Conseil d’être convaincues d’appliquer un précédent ne doivent pas se contenter de démontrer que leur demande est simplement compatible avec le précédent sur lequel elles s’appuient. Elles doivent également montrer que le Conseil souhaite appliquer ce précédent, et ce, parce qu’il reste approprié dans les circonstances. L’importance d’une telle approche est d’autant plus grande que le temps s’écoule entre une telle demande et le précédent sur lequel il cherche à s’appuyer.
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