Décision de radiodiffusion CRTC 2023-308

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Références : 2022-0019-5, 2022-267, 2022-267-1, 2022-267-2 et 2022-267-3

Ottawa, le 5 septembre 2023

Bell Canada; Cogeco Communications inc.; Bragg Communications Incorporated, faisant affaire sous le nom d’Eastlink; et Saskatchewan Telecommunications
L’ensemble du Canada

Dossiers publics : 2022-0019-5 et 1011-NOC2022-0267

Proposition d’augmentation du prix de détail maximal du service de base

Sommaire

Le Conseil refuse la demande déposée par Bell Canada, Cogeco Communications inc., Bragg Communications Incorporated, faisant affaire sous le nom d’Eastlink, et Saskatchewan Telecommunications en vue d’augmenter le prix de détail maximal du service de base de 25 $ à 28 $ par mois et de mettre en place un mécanisme d’indexation annuelle en fonction de l’inflation.

Le Conseil est d’avis que les demandeurs n’ont pas présenté ni fourni d’éléments de preuve indiquant que le prix plafond actuel de 25 $ n’est plus économiquement viable pour eux en tant que détaillants. Qu’il soit viable ou non, le service de base est un instrument conçu pour profiter au consommateur en facilitant le choix et les décisions économiques sur un marché où les entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) disposent de multiples options pour couvrir leurs coûts.

En outre, les demandeurs n’ont pas fourni d’analyse détaillée et chiffrée démontrant que les coûts assumés par les EDR pour la fourniture du service de base ont augmenté en raison de l’inflation ou d’autres facteurs, au point de justifier une augmentation permanente de 12 % du tarif de détail maximal autorisé et la mise en œuvre d’un indice annuel d’inflation.

Compte tenu de la solidité de l’industrie des EDR, le Conseil estime qu’il n’existe aucune justification financière à l’augmentation proposée qui l’emporterait sur l’objectif de fournir à la population canadienne un service de base d’entrée de gamme à un prix abordable.

Le Conseil est d’avis que les demandeurs n’ont pas apporté de preuves justifiant de manière irréfutable l’augmentation proposée du prix de détail maximal du petit service de base et ne voit pas d’avantage direct à approuver la demande pour la population canadienne. Il fait remarquer que les EDR conservent une marge de manœuvre en matière de tarification pour la plupart des services qu’elles proposent.

Contexte

  1. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-96, le Conseil a annoncé que les entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) autorisées étaient tenues de fournir aux clients un petit service de base d’entrée de gamme, à compter de mars 2016.
  2. Comme énoncé aux articles 17.1 et 46.1 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion (Règlement), un titulaire ne peut exiger d’un client plus de 25 $ par mois pour la distribution du service de base, sous réserve des conditions de sa licence. Ce service de base est composé des services de programmation qui doivent ou peuvent être inclus dans le forfait de base conformément aux articles 17 et 46 du RèglementNote de bas de page 1, y compris des services désignés par le Conseil en vertu de l’alinéa 9.1(1)h)Note de bas de page 2 de la nouvelle Loi sur la radiodiffusionNote de bas de page 3 pour la distribution obligatoire au service de base.
  3. Le Conseil a fixé un prix plafond de 25 $ par mois que les EDR peuvent exiger de leurs clients pour le service de base, à l’exclusion de l’équipement comme les boîtiers décodeurs, afin d’offrir le choix à la population canadienne entre un service d’entrée de gamme à prix raisonnable et un forfait de distribution du premier volet d’un fournisseur de services de télévision. Ce prix plafond mensuel est le même depuis mars 2016.
  4. Au moment de l’instance ayant mené à la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-96, plusieurs EDR qui sont intervenues ont indiqué que le prix mensuel maximal de 25 $ devrait être assujetti à un ajustement annuel en fonction de l’inflation. Cependant, le Conseil a choisi de ne pas inclure de mécanisme d’ajustement annuel en fonction de l’inflation, mais a indiqué qu’il pourrait choisir de revoir le montant à l’avenir.

Demande d’augmentation du prix de détail maximal du service de base

  1. En janvier 2022, Bell Canada, Cogeco Communications inc., Bragg Communications Incorporated, faisant affaire sous le nom d’Eastlink, et Saskatchewan Telecommunications (ci-après les demandeurs) ont déposé une demande en vertu de la Partie 1 des Règles de pratique et de procédure du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes en vue d’augmenter le prix de détail maximal du service de base de 25 $ à 28 $ par mois. Les demandeurs proposent que le prix plafond de 28 $ entre en vigueur le 1er avril 2022.
  2. Les demandeurs proposent également que le prix plafond soit ajusté sur une base annuelle à compter du 1er avril 2023, en fonction de l’indice des prix à la consommation (IPC) annuel pour la période se terminant le 31 décembre de l’année civile précédente. Les demandeurs indiquent que l’utilisation de l’IPC plutôt que de l’indice des prix du produit national brut (IP-PNB) entraînerait une augmentation plus modérée des prix de détail pour le moment.
  3. À ce titre, les demandeurs proposent l’imposition de la condition de licence (maintenant une condition de service) suivante :

    À titre d’exception à l’article 17.1 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion, à compter du 1er avril 2022, le titulaire ne peut exiger d’un abonné plus de 28 $ par mois pour la distribution du service de base, montant qui sera ajusté annuellement en fonction de l’inflation, à compter du 1er avril de chaque année, à partir de 2023, selon l’indice des prix à la consommation annuel canadien, tel que rapporté par Statistique Canada pour la période se terminant le 31 décembre de l’année civile précédente..

  4. Les demandeurs estiment également que cette condition de licence devrait s’appliquer de la même manière à toutes les EDR autorisées. Par conséquent, ils demandent que le Conseil modifie les Autorisations générales pour les entreprises de distribution de radiodiffusion afin d’inclure la condition de licence ci-dessus comme autorisation. Les demandeurs indiquent que cela donnerait au Conseil le temps nécessaire pour modifier en conséquence l’article 17.1 du Règlement, pour lequel ils proposent la formulation suivante :

    Sous réserve des conditions de sa licence, à compter du 1er avril 2022, le titulaire ne peut exiger d’un client plus de 28 $ par mois pour la distribution du service de base, montant qui sera ajusté annuellement en fonction de l’inflation le 1er avril de chaque année, à compter de 2023, selon l’indice des prix à la consommation annuel canadien déclaré par Statistique Canada pour la période se terminant le 31 décembre de l’année civile précédente.

Appel aux observations

  1. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil a publié l’avis de consultation de radiodiffusion 2022-267 afin de solliciter des observations sur la proposition des demandeurs d’augmenter le prix de détail maximal du petit service de base et de mettre en œuvre un mécanisme d’indexation annuelle en fonction de l’inflation. Plus précisément, le Conseil a sollicité des observations au sujet des points suivants :
    • la pertinence d’augmenter le montant du prix plafond;
    • la pertinence de mettre en place tout mécanisme d’indexation;
      • la pertinence d’utiliser, comme proposé par les demandeurs, l’IPC comme indice d’inflation pour le mécanisme d’indexation, ou si une autre base de calcul devait être envisagée;
      • l’idée de mettre en place un mécanisme d’indexation annuelle par rapport au prix plafond du petit service de base, ou de tenir des instances à cette fin à des intervalles fixes, sans indexation annuelle;
      • la pertinence de la date du 1er avril pour les ajustements annuels ou d’une autre date, comme le début de chaque année civile (1er janvier), ou avec le début de chaque année de radiodiffusion (1er septembre);
    • la possibilité d’accroître le prix plafond par l’augmentation en dollars des tarifs de gros payés par l’EDR pour les services en vertu de l’alinéa 9(1)h);
    • l’option d’accroître le prix plafond à un montant fixe pour un nombre d’années déterminées, sans aucun mécanisme d’indexation annuelle.
  2. Afin de permettre une approche consultative plus globale, y compris l’évaluation du besoin, des effets et des répercussions des changements proposés par les demandeurs, le Conseil a désigné comme parties à cette instance les autres EDR actuellement tenues de soumettre des rapports annuels cumulés. Ces EDR sont exploitées par Québecor Média inc., Rogers Communications inc., Shaw Communications inc. et TELUS Communications inc. Le Conseil a envoyé trois demandes de renseignements aux demandeurs et une à toutes les parties.
  3. La consultation a été rouverte ou modifiée à trois reprises (voir les avis de consultation de radiodiffusion 2022-267-1, 2022-267-2 et 2022-267-3) à la suite de requêtes procédurales de la part du Centre pour la défense de l’intérêt public (CDIP) et du Forum for Research and Policy in Communication (FRPC), afin qu’ils puissent répondre aux renseignements soumis dans les demandes de renseignements.

Interventions

  1. Le Conseil a reçu des interventions en appui à la demande ainsi que des interventions en opposition, auxquelles les demandeurs ont répondu.
  2. Les parties en faveur de la demande comprenaient un petit nombre d’EDR, dont Access Communications Co-operative Limited (Access) et la Canadian Communication Systems Alliance (CCSA), Pelmorex Weather Networks (Television) Inc. (Pelmorex)Note de bas de page 4, Corus Entertainment Inc. (Corus) et Rogers Communications inc. (Rogers).
  3. Presque tous les particuliers canadiens qui ont fait des observations se sont opposés à la demande. D’autres, notamment des organisations d’intérêt public comme la Consumer Association of Saskatchewan (CASK), le CDIP et la Fédération nationale des retraités (FNR) (collectivement, CDIP-FNR), et le FRPC, ainsi que le ministère de la Culture et des Communications, l’Independent Broadcast Group/Le groupe de diffuseurs indépendants (IBG/GDI), et Anthem Sports and Entertainment (Anthem), se sont fermement opposés à la demande pour des raisons liées à l’accès, au caractère abordable et au manque de preuves soumises pour justifier l’approbation des requêtes.
  4. Les préoccupations des intervenants sont prises en compte tout au long de la présente décision.

Cadre réglementaire

  1. Bien que la Loi sur la diffusion continue en ligne, laquelle a modifié la Loi sur la radiodiffusion, ait reçu la sanction royale après la clôture du dossier de la présente instance, mais avant la publication de la présente décision, le cadre réglementaire pour le traitement de la demande reste le même. Le sous-alinéa 3(1)t)(ii) de la Loi sur la radiodiffusion stipule que les entreprises de distribution devraient assurer efficacement la fourniture de la programmation à des tarifs abordables. Le Conseil estime en outre que le fait d’exiger la distribution des services qui font partie du forfait de base contribue à l’intérêt public et à la réalisation de l’objectif énoncé au sous-alinéa 3(1)t)(i) de la Loi sur la radiodiffusion, en donnant la priorité à la fourniture des services de télévision canadienne et ce en particulier par les stations locales canadiennes. Ces services reflètent non seulement les attitudes, les opinions, les idées, les valeurs et la créativité canadiennes, mais aussi, dans le cas des stations locales, fournissent à la population canadienne des nouvelles et des informations immédiates sur des questions locales, régionales, nationales et internationales.
  2. En outre, l’alinéa 3(1)d) de la Loi sur la radiodiffusion stipule que le système de radiodiffusion canadien devrait :

    (i) servir à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure culturelle, politique, sociale et économique du Canada,

    (ii) favoriser l’épanouissement de l’expression canadienne en proposant une très large programmation qui traduise les attitudes, les opinions, les idées, les valeurs et la créativité artistique canadiennes, qui mette en valeur les divertissements faisant appel à des artistes canadiens et qui fournisse de l’information et de l’analyse concernant le Canada et l’étranger considérés d’un point de vue canadien, et créer un environnement propice au développement de programmes canadiens et à leur exportation à l’échelle mondiale[.]

L’approche du Conseil dans l’examen de la demande

  1. Après avoir examiné le dossier de la présente demande compte tenu des règlements et politiques applicables, le Conseil estime qu’il est approprié d’évaluer ce qui suit :
    • le nombre d’abonnés concernés;
    • l’incidence de la proposition sur les consommateurs canadiens;
    • la justification économique de la proposition;
    • la situation financière de l’industrie des EDR;
    • la pertinence d’utiliser l’IPC comme indice d’ajustement.

Nombre d’abonnés concernés

  1. Afin de mieux comprendre les répercussions de l’approbation de la demande, le Conseil a envoyé des demandes de renseignements aux demandeurs et aux autres parties afin d’obtenir des précisions sur les points suivants :
    • le nombre d’abonnés qui bénéficient actuellement du forfait de base;
    • le nombre d’abonnés qui seraient touchés par le changement de tarification proposé.
  2. Les réponses à la première question n’étaient pas uniformes. Les parties ont modifié leurs réponses à cette question dans chacune des demandes de renseignements concernant le nombre d’abonnés qui bénéficient actuellement du forfait de base. Le Conseil estime que les renseignements fournis par les demandeurs ne sont pas suffisamment clairs pour lui permettre de déterminer le nombre actuel d’abonnés au service de base qui seraient touchés par l’augmentation proposée.
  3. En ce qui concerne la deuxième question, le Conseil conclut, en fonction des renseignements fournis, qu’au moins 1 515 708 abonnés pourraient être assujettis à une augmentation de leur facture mensuelle, ce qui représente 15,3 % de tous les abonnés des EDR au Canada en 2021. Le Conseil fait toutefois remarquer que les EDR autres que les demandeurs n’ont pas confirmé qu’elles appliqueraient cette augmentation.
  4. Le Conseil a également demandé aux demandeurs de fournir le nombre d’abonnés au forfait de base qui regroupent leur service de télévision avec un autre service non télévisuel (comme le téléphone filaire ou Internet), ainsi que le nombre d’abonnés qui ne reçoivent pas de crédit à leur compte, quel qu’il soit. Les chiffres fournis pour ces questions montrent que la grande majorité des abonnés au forfait de base regroupent le forfait de base avec un autre service et reçoivent un crédit à leur compte. En fin de compte, cela permet aux EDR d’obtenir des revenus supplémentaires.
  5. Cela laisse supposer que le forfait de base apporte aux EDR des avantages intangibles qui vont au-delà du tarif de 25 $, car d’autres possibilités commerciales se matérialisent à mesure que les consommateurs recherchent la commodité de regrouper leurs services auprès d’un seul fournisseur.

Incidence de la proposition sur les consommateurs canadiens

Interventions
  1. En général, les particuliers canadiens qui se sont opposés à la demande considèrent que la télévision de base est un service essentiel qui doit rester accessible au plus grand nombre de personnes possible, y compris aux personnes à faible revenu.
  2. Le FRPC et la CASK craignent que l’augmentation du prix ait un effet négatif disproportionné sur les abonnés à faible revenu. Ils précisent qu’il serait erroné de supposer que les abonnés peuvent compter sur le service Internet pour remplacer le service moins cher des EDR, car le service Internet n’est pas fiable dans de nombreuses communautés. Le FRPC fait également plusieurs recommandations, notamment que le Conseil devrait :
    • refuser la demande ou suspendre l’instance jusqu’à ce que les EDR fournissent des preuves claires et pertinentes;
    • étudier le concept d’un service local de base gratuit.
Analyse du Conseil
  1. Le Conseil est préoccupé par le préjudice potentiel qui résulterait de l’exclusion des groupes vulnérables de la population de l’accès à un service qui contribue de manière importante à la réalisation des objectifs énoncés dans la Loi sur la radiodiffusion, en particulier en ce qui concerne l’accès aux stations locales canadiennes.
  2. L’objectif du prix plafond de 25 $ pour le service de base était d’offrir à la population canadienne un service d’entrée de base dans le système à un prix plus petit et plus raisonnable, conformément au sous-alinéa 3(1)t)(ii) de la Loi sur la radiodiffusion. Bien que les demandeurs aient proposé des ajustements pour tenir compte de l’inflation en fonction de l’IPC, le Conseil craint que la nécessité de maintenir le prix plafond ne soit en fait plus grande en raison des taux d’inflation élevés que l’on connaît actuellement. En effet, le Conseil estime que les consommateurs sont plus susceptibles d’être touchés négativement par les augmentations de prix que les EDR. Un service de base à prix raisonnable permet également à la population canadienne d’avoir accès à une programmation qui répond aux objectifs énoncés à l’alinéa 3(1)d) de la Loi sur la radiodiffusion. Ces services comprennent les stations de télévision traditionnelle qui fournissent des nouvelles et des informations locales, les services de la Société Radio-Canada (SRC), les services éducatifs et les services dont le Conseil a exigé la distribution en vertu de l’alinéa 9.1(1)h) de la Loi sur la radiodiffusionNote de bas de page 5.
  3. Comme l’indiquent à titre de mise en garde des groupes de consommateurs et des particuliers canadiens, les personnes à faible revenu pourraient être contraintes de se désabonner si une augmentation du prix plafond était mise en œuvre. Ces personnes perdraient leur accès à des services qui reflètent non seulement les attitudes, les opinions, les idées, les valeurs et la créativité canadiennes, mais aussi, dans le cas des stations locales, qui fournissent à la population canadienne des nouvelles et des informations immédiates sur des questions locales, régionales, nationales et internationales. S’ils souhaitent conserver le service de base, les Canadiens les plus vulnérables pourraient devoir faire des compromis à l’égard d’autres biens et services essentiels. Dans les deux cas, l’approbation des modifications demandées aurait des résultats non souhaités.
  4. En outre, le fait d’autoriser une augmentation annuelle du coût du service de base réduirait l’écart de prix entre le service de base et les offres du premier volet, ce qui rendrait les consommateurs vulnérables à la vente incitative et irait à l’encontre de l’objectif de l’exigence.
  5. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que les demandeurs n’ont pas fourni d’arguments suffisants pour démontrer que l’augmentation proposée du prix du service de base l’emporte sur le préjudice potentiel subi par la population canadienne.

Justification économique de la proposition

  1. Pour justifier la demande réglementaire proposée, les demandeurs affirment que l’ajustement inflationniste est nécessaire pour garantir que le prix maximum autorisé de ce service ne diminue pas au fil du temps, en termes réels. Ils ajoutent que le fait d’autoriser ces ajustements aboutirait à un régime de réglementation des tarifs pour les EDR qui serait cohérent avec celui qui s’applique aux fournisseurs de services de télécommunication, pour lesquels les ajustements inflationnistes des prix réglementés ont été, et continuent d’être, autorisés.

Interventions

  1. Access soutient la demande, estimant que les ajustements sont nécessaires pour garantir que le prix maximal du service de base ne diminue pas au fil du temps.
  2. La CCSA affirme que ses EDR membres exemptées seraient touchées, indirectement et positivement, par le changement dans les pressions exercées par la concurrence et que ses membres autorisés bénéficieraient de la souplesse accrue que l’approbation de la demande leur offrirait.
  3. Pelmorex indique qu’il est important de veiller à ce que le service de base reste complet et durable et que, si les éléments de preuve le justifient, le Conseil devrait augmenter le prix plafond. Corus soutient que, comme les autres entreprises, les EDR devraient être autorisées à réagir aux fluctuations macroéconomiques en modifiant les prix de détail. Corus encourage le Conseil à imposer moins de restrictions sur les chaînes qui peuvent être diffusées sur le service de base. Elle affirme également que les titulaires canadiens d’une licence de radiodiffusion ont besoin de souplesse pour faire évoluer leurs activités et faire concurrence aux acteurs numériques dans un cadre réglementaire équitable.
  4. Parmi les intervenants en opposition, le FRPC et la CASK soulignent les divergences dans les chiffres fournis par les EDR et soutiennent que ces EDR n’ont pas fourni au Conseil les preuves nécessaires à l’approbation de la demande.
  5. Anthem met en garde contre le fait que l’augmentation du prix profiterait principalement aux entités intégrées verticalement. Elle fait remarquer que les distributeurs intégrés verticalement accordent régulièrement la priorité à leurs propres produits et chaînes dans l’élaboration des forfaits de services mis à la disposition des consommateurs et que toute augmentation du prix des services de base profiterait donc principalement à ces distributeurs directement, tout en créant un risque plus important pour les chaînes d’Anthem. Elle propose que le Conseil se réserve le droit de mener des consultations et de réexaminer le prix plafond dans l’avenir.
  6. L’IBG/GDI précise que les EDR devraient fournir davantage de renseignements sur la manière dont leurs coûts sous-jacents et leurs coûts de réseaux partagés sont pris en compte dans le cadre du service de base. Elle ajoute que le coût de gros des services de base obligatoires ne représente qu’une petite fraction du tarif de base total et que les parties n’ont fourni aucun renseignement justifiant que les EDR désignent ce facteur comme étant pertinent pour leur proposition.
  7. Le CDIP-FNR estime qu’aucun élément de preuve n’a été apporté par les demandeurs pour démontrer des difficultés financières et qu’en fait, les EDR ont augmenté les coûts des forfaits autres que de base et leurs marges de profit. Selon lui, le Conseil devrait rejeter la demande et exiger des EDR qu’elles mettent en œuvre des mesures d’économie et qu’elles réduisent le coût du tarif de base pour atteindre l’objectif de 0 $. Le CDIP-FNR estime également que 1,5 million d’abonnés représente un nombre significatif de consommateurs qui seraient directement touchés par l’augmentation.

Analyse du Conseil

  1. Les demandeurs n’ont pas présenté ni fourni d’éléments de preuve indiquant que le taux maximum actuel de 25 $ n’est plus économiquement viable pour eux en tant que détaillants. Qu’il soit viable ou non, le service de base est un instrument conçu pour profiter au consommateur en facilitant le choix et les décisions économiques sur un marché où les EDR disposent de multiples options pour couvrir leurs coûts.
  2. En outre, les demandeurs n’ont pas fourni d’analyse détaillée et chiffrée démontrant que les coûts assumés par les EDR pour la fourniture du service de base ont augmenté en raison de l’inflation ou d’autres facteurs, au point de justifier une augmentation permanente de 12 % du tarif de détail maximal autorisé et la mise en œuvre d’un indice annuel d’inflation.
  3. Dans le cadre de leur demande, les demandeurs présentent les éléments de preuve quantitatifs suivants, qui témoignent d’une augmentation de leurs coûts de fourniture du service de base :

    De plus, les frais de gros des services visés par l’alinéa 9(1)h) ont été un facteur dont le Conseil a tenu compte pour fixer le prix maximal de 25 $ pour le petit service de base dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-96. Depuis que cette décision a été rendue, les tarifs de gros de ces services ont augmenté de 18,5 % sur le marché de langue anglaise et de 13 % sur le marché de langue française (avec un potentiel d’augmentation de 21 % et 18 %, respectivement, si les demandes tarifaires de la SRC/CBC sont approuvées) [Traduction].

  4. Bien que le Conseil soit d’accord avec les pourcentages mentionnés dans le paragraphe ci-dessus, les augmentations des tarifs de gros représentent 0,26 $ pour les marchés de langue anglaise et 0,24 $ pour les marchés de langue française, soit environ 1 % du prix maximal de 25 $. Ces augmentations ne représentent que 8,7 % et 8,0 %, respectivement, de l’augmentation demandée de 3,00 $. Appliquées aux abonnés et aux dépenses de 2021, ces augmentations représentent 0,45 % des dépenses totales des EDR.
  5. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que les demandeurs n’ont pas fourni de justification économique suffisante pour la demande d’augmentation du prix plafond du service de base.

Situation financière de l’industrie des EDR

  1. Les EDR canadiennes de télévision par câble, sur protocole Internet et par satellite continuent à dégager de fortes marges d’exploitation malgré la baisse des revenus et des abonnements. De 2018 à 2021, l’industrie des EDR a affiché des marges d’exploitation supérieures à 14 % pour chaque année de radiodiffusion. Au cours de la même période, les dépenses ont diminué dans toutes les catégories, à l’exception des ventes et de la promotion.
  2. Le Conseil estime qu’il est peu probable que les dépenses des EDR augmentent de manière significative au fil du temps. Outre les coûts de programmation, les coûts d’infrastructure pour les services des EDR sont en grande partie des coûts fixes amortis sur plusieurs années et sur plusieurs services, y compris les services de télécommunication. Bien qu’il soit possible que le coût de l’installation et de l’entretien des boîtiers décodeurs ait augmenté au fil des ans, les frais de location de ces boîtiers ne sont pas réglementés par le Conseil.
  3. Compte tenu de la solidité de l’industrie des EDR, le Conseil estime qu’il n’existe aucune justification financière à l’augmentation proposée qui l’emporterait sur l’objectif de fournir à la population canadienne un service de base d’entrée de gamme à un prix abordable.

Pertinence d’utiliser l’IPC comme indice d’ajustement

  1. Outre l’augmentation permanente de 12 % du tarif de détail maximal autorisé proposée dans leur demande, les demandeurs proposent que le montant soit soumis à des ajustements annuels ultérieurs pour tenir compte de l’inflation, en fonction de l’IPC. L’utilisation de l’IPC se justifie par le fait qu’il s’agit d’une mesure en matière de consommation qui est facile à comprendre, qui est publiée en temps opportun et qui ne fait pas l’objet d’ajustements historiques importants.
  2. Les demandeurs précisent également que les ajustements des prix en fonction de l’inflation constituent un mécanisme réglementaire commun, qui a été utilisé par le Conseil dans différents contextes, y compris lors de la dernière révision de la politique sur la télévision locale et communautaire en ce qui concerne la contribution admissible à l’expression locale.
  3. Les demandeurs font également remarquer que le Conseil applique le changement en pourcentage de l’inflation comme facteur standard afin de déterminer les prix autorisés pour de nombreux services de télécommunication réglementés pour les grandes et petites entreprises de services locaux titulaires. Ils indiquent que permettre de tels ajustements en fonction de l’inflation pour le prix plafond du service de base mènerait à un régime de réglementation des tarifs pour les EDR qui serait conforme à celui qui s’applique aux fournisseurs de services de télécommunication.

Intervention

  1. Rogers indique que l’ajustement inflationniste permettrait aux EDR de compenser les coûts d’exploitation et d’investissement importants qu’elles engagent pour maintenir et fournir le service de base aux consommateurs.

Analyse du Conseil

  1. Le Conseil fait remarquer que l’IPC représente les variations de prix telles qu’elles sont subies par les consommateurs canadiens en « comparant, au fil du temps, le coût d’un panier fixe de biens et de servicesNote de bas de page 6 ». Les produits qui composent le panier sont censés refléter les habitudes de consommation du Canadien moyen.
  2. Le Conseil estime que la proposition d’adopter l’IPC comme indice d’inflation pour le petit service de base soulève deux préoccupations.
  3. Premièrement, l’IPC aborde l’inflation du point de vue particulier du consommateur. L’indice est censé refléter les habitudes de dépenses des particuliers qui s’efforcent d’atteindre un certain niveau de vie. Lors de la négociation des prix des biens et services intermédiaires, une EDR dispose d’un pouvoir de marché nettement plus important que celui du consommateur canadien moyen et profite de rabais de volume pour maintenir les prix à un niveau bas.
  4. Deuxièmement, si l’on peut raisonnablement affirmer que certains biens et services représentatifs qui composent l’IPC (comme l’énergie et l’essence) ont une incidence sur le prix de la prestation des services des EDR, ce n’est pas le cas de la grande majorité d’entre eux. Les principaux facteurs d’inflation en 2022 étaient l’énergie, la nourriture et le logementNote de bas de page 7 – ces deux derniers éléments constituant une part négligeable des dépenses d’une EDR. Si l’IPC était adopté comme indice inflationniste pour le petit forfait de base, cela permettrait aux EDR d’augmenter les prix en fonction des bouleversements du marché sur des biens et services liés ou non, augmentant ainsi artificiellement leurs prix. Ces augmentations seraient entièrement assumées par les consommateurs, qui ont déjà été plus touchés par ces bouleversements que les EDR elles-mêmes.
  5. Les demandeurs indiquent que des ajustements de prix basés sur l’inflation ont été utilisés par le Conseil dans la dernière révision de la politique sur la télévision locale et communautaire en ce qui concerne la contribution admissible à l’expression locale énoncée dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2012-154. Dans cette politique, le Conseil a déterminé que la contribution maximale à l’expression locale de chaque titulaire d’EDR terrestre sera basée sur le niveau de contribution de 2010 et que ce montant sera ajusté annuellement en fonction de l’inflation basée sur l’IPC annuel, tel que rapporté pour la période se terminant le 31 décembre de l’année civile précédente. Toutefois, lorsqu’il a revu sa politique sur la télévision locale et communautaire dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2016-224, le Conseil a établi de nouvelles priorités (p. ex. le financement de nouvelles locales) et a modifié son cadre de contribution à l’expression locale, qui ne comprend plus d’ajustement en fonction de l’inflation.
  6. Les demandeurs soutiennent également que le Conseil a utilisé des ajustements basés sur l’inflation dans sa réglementation des télécommunications. Dans la politique réglementaire de télécom  2011-291, le Conseil a autorisé la hausse annuelle du seuil de prix pour les entreprises de services locaux titulaires (ESLT) en fonction de l’indice des IP-PNB. Cependant, le Conseil utilise une méthodologie détaillée basée sur les coûts dans les télécommunications en raison de l’exigence légale que les tarifs soient justes et raisonnablesNote de bas de page 8. Cela a été interprété comme signifiant que les tarifs doivent être justes et raisonnables en tout temps, ce qui suppose que si les coûts sous-jacents de la fourniture d’un service augmentent, les entreprises ont le droit de voir cette augmentation reflétée dans leurs tarifs. En revanche, étant donné qu’il n’existe pas de critère légal semblable en radiodiffusion, le Conseil s’est principalement préoccupé de l’accessibilité financière générale et de l’intérêt public lorsqu’il a fixé le tarif de base de 25 $ par mois pour le petit service de base.
  7. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut qu’il n’existe pas de corrélation suffisante entre l’IPC et les structures de coûts des EDR pour justifier des ajustements inflationnistes annuels du prix maximal du petit forfait de base en fonction de l’IPC.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil refuse la demande déposée par Bell Canada, Cogeco Communications inc., Bragg Communications Incorporated, faisant affaire sous le nom d’Eastlink, et Saskatchewan Telecommunications en vue d’augmenter le prix de détail maximal du service de base de 25 $ à 28 $ par mois et de mettre en place un mécanisme d’indexation annuelle en fonction de l’inflation.
  2. Le Conseil est d’avis que les demandeurs n’ont pas apporté de preuves justifiant de manière irréfutable l’augmentation proposée du prix maximal du petit service de base et ne voit pas d’avantage direct à approuver la demande pour la population canadienne. Il fait remarquer que les EDR conservent une marge de manœuvre en matière de tarification pour la plupart des services qu’elles proposent.
  3. Par conséquent, les demandeurs n’ont pas démontré que la nécessité d’une telle augmentation l’emporte sur le préjudice potentiel pour le système qui résulterait de l’exclusion des groupes vulnérables de la population de l’accès à un petit service de base. Le prix plafond de 25 $ pour le service de base offre à la population canadienne un point d’entrée dans le système à un prix plus petit et plus raisonnable, conformément au sous-alinéa 3(1)t)(ii) de la Loi sur la radiodiffusion. Un service de base à prix raisonnable permet à la population canadienne d’avoir accès à une programmation qui répond aux objectifs énoncés à l’alinéa 3(1)d) de la Loi sur la radiodiffusion.

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