Ordonnance de télécom CRTC 2021-146

Version PDF

Ottawa, le 30 avril 2021

Numéros de dossiers : 1011-NOC2019-0057 et 4754-633

Demande d’attribution de frais concernant la participation de EMF-OFF! et Marcel Durand à l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2021-130

Demande

  1. Dans une lettre datée du 17 août 2020, EMF-OFF! et M. Marcel Durand ont présenté une demande d’attribution de frais pour leur participation à l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2021-130 (l’instance). Lors de l’instance, le Conseil a examiné les services sans fil mobiles au Canada.
  2. Dans leur mémoire, EMF-OFF! et M. Durand ont décrit EMF-OFF! comme un organisme sans but lucratif qui vise à sensibiliser la population sur i) les effets des champs électromagnétiques, ii) les risques potentiels de la technologie 5G et des réseaux sur la vie privée ainsi que la santé et la sécurité humaine et iii) les effets cumulatifs des champs électromagnétiques sur la flore et la faune.
  3. TELUS Communications Inc. (TCI) a déposé une intervention, datée du 24 août 2020, en réponse à la demande d’EMF-OFF! et de M. Durand. Bell Mobilité inc. (Bell Mobilité) a déposé une intervention datée du 25 août 2020. EMF-OFF! et M. Durand ont déposé une réplique, que le Conseil a reçue le 1er septembre 2020.
  4. EMF-OFF! et M. Durand ont demandé au Conseil de fixer leurs frais à 123 377,18 $, soit 103 683,31 $ en honoraires d’avocat, 14 795,51 $ en honoraires de témoins experts, 365,74 $ en honoraires d’experts-conseils et analystes internes et 4 532,62 $ en débours. EMF-OFF! et M. Durand ont déposé un mémoire de frais avec leur demande.
  5. EMF-OFF! et M. Durand ont affirmé que Bell Mobilité; Québecor Media inc. au nom de Vidéotron ltée (Vidéotron); Rogers Communication Canada Inc. (RCCI); Shaw Communications Inc. (Shaw); TCI; et la ville de Montréal sont les parties appropriées qui devraient être tenues de payer les frais attribués par le Conseil (intimés).

Réponses

  1. Bell Mobilité et TCI ont soutenu qu’EMF-OFF! et M. Durand ne devraient pas se voir attribuer de frais. Leur argument se fonde sur le fait qu’EMF-OFF! et M. Durand n’ont pas satisfait aux conditions d’admissibilité et que les honoraires d’avocat facturés par M. Charles O’Brien sont déraisonnables au point d’invalider la demande d’attribution de frais dans son ensemble.
  2. TCI a soutenu que EMF-OFF! et M. Durand n’ont pas satisfait aux conditions d’admissibilité car i) ils ne représentaient pas une catégorie d’abonnés pour qui le dénouement de l’instance revêtait un intérêt, ii) leur mémoire était hors de la portée de l’instance et de la compétence du Conseil et iii) ils ne pouvaient donc pas aider le Conseil à mieux comprendre les questions examinées lors de l’instance.
  3. TCI a aussi soutenu que si EMF-OFF! et M. Durand se voient attribuer des frais :
    • les honoraires d’avocat devraient être réduits;
    • la demande de remboursement relative au rapport de Dominique Belpomme devrait être rejetée parce que le rapport n’a pas été préparé dans le cadre de l’instance;
    • les honoraires de témoin expert de Pedro Gregorio pour la préparation d’un rapport d’expertise d’un montant de 1 125 $ devraient être déduits, étant donné qu’il ne semble pas qu’un tel rapport ait été soumis.
  4. Bell Mobilité a soutenu que EMF-OFF! et M. Durand n’ont pas satisfait aux conditions d’admissibilité car i) ils ne représentaient pas une catégorie d’abonnés pour qui le dénouement de l’instance revêtait un intérêt, ii) leur mémoire n’était ni ciblé ni structuré et n’a finalement pas permis de répondre aux questions énoncées dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2019-57 et iii) ils n’ont pas participé à l’instance de manière responsable.

Réplique

  1. EMF-OFF! et M. Durand ont indiqué qu’ils avaient satisfait aux critères d’attribution de frais énoncés à l’article 68 des Règles de pratique et de procédure du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (Règles de procédure), car i) ils représentaient un groupe ou une catégorie d’abonnés pour qui le dénouement de l’instance revêtait un intérêt, ii) ils avaient aidé le Conseil à mieux comprendre les questions examinées et iii) ils avaient participé à l’instance de manière responsable.
  2. Plus précisément, EMF-OFF! et M. Durand ont indiqué qu’ils représentaient les Canadiens sensibles aux champs électromagnétiques qui, selon leur estimation, représentent au moins trois pour cent de tous les Canadiens. En outre, ils ont indiqué que les préoccupations qu’ils ont soulevées à propos de la vie privée s’étendaient à tous les abonnés.
  3. EMF-OFF! et M. Durand ont fait valoir que les honoraires d’avocat étaient raisonnables et nécessaires étant donné que leur domaine ne dispose pas de beaucoup d’avocats en exercice et que l’étudiant en droit à qui ils ont demandé de l’aide a décliné leur proposition.
  4. Sur la question de l’admissibilité, EMF-OFF! et M. Durand ont indiqué qu’ils représentent les Canadiens souffrant d’hypersensibilité électromagnétique, qu’ils ont déposé une étude pertinente et qu’ils ont offert une perspective distincte de manière responsable.
  5. EMF-OFF! et M. Durand ont suggéré de répartir la responsabilité du paiement des frais entre les intimés, une plus grande proportion des frais étant attribuée à TCI. Ils ont précisé que la raison en est la position et les affirmations déraisonnables contenues dans l’intervention de TCI. Ils ont proposé la répartition suivante pour le paiement des frais :
    • TCI : 43 %
    • Bell Mobilité : 23 %
    • RCCI : 23 %
    • Vidéotron : 5 %
    • Shaw : 3 %
    • ville de Montréal : 2 %Note de bas de page 1

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Les critères d’attribution de frais sont énoncés à l’article 68 des Règles de procédure, qui prévoit :

    68.    Le Conseil décide d’attribuer des frais définitifs et en fixe le pourcentage maximal en se fondant sur les critères suivants :

    1. le fait que le dénouement de l’instance revêtait un intérêt pour le demandeur ou pour le groupe ou la catégorie d’abonnés qu’il représentait;
    2. la mesure dans laquelle le demandeur a aidé le Conseil à mieux comprendre les questions qui ont été examinées;
    3. le fait que le demandeur a participé à l’instance de manière responsable.
  2. Comme il est énoncé dans la politique réglementaire de télécom 2010-963, les Lignes directrices pour l’évaluation des demandes d’attribution de frais indiquent qu’en vue d’évaluer si un demandeur a aidé à mieux comprendre les questions qui ont été examinées, le Conseil peut notamment tenir compte des facteurs suivants :
    1. si le demandeur a déposé des éléments de preuve;
    2. si la contribution était centrée et structurée;
    3. si la contribution a apporté un point de vue distinct.
  3. Le Conseil ajoute dans cette politique réglementaire que la liste ci-dessus n’est pas exhaustive et que les facteurs pris en compte sont entièrement à la discrétion du Conseil, en fonction des circonstances de chaque cas.
  4. Dans l’avis de consultation de télécom 2019-57, le Conseil a sollicité des mémoires sur trois principaux domaines :
    • la concurrence sur le marché des services sans fil mobiles de détail;
    • le cadre réglementaire actuel des services sans fil mobiles de gros, avec un accent sur l’accès des exploitants de réseau mobile virtuel (ERMV)Note de bas de page 2 à ce marché;
    • l’avenir des services sans fil mobiles au Canada, avec un accent sur la réduction des obstacles au déploiement de l’infrastructure.
  5. De plus, le Conseil a inclus une section pour les autres questions, dans laquelle il a demandé s’il y avait d’autres propositions, questions ou enjeux concernant les services sans fil mobiles, en plus de ceux énumérés dans l’avis de consultation, qu’il devrait connaître et sur lesquels il pourrait prendre des décisions dans le cadre de cette instance. Il a invité les intervenants à indiquer ces questions et à expliquer pourquoi elles sont pertinentes et à ajouter des propositions de solutions réglementaires. De plus, le Conseil a indiqué que le but général de cette instance était de s’assurer que son cadre réglementaire des services sans fil mobiles favorise une concurrence durable qui donnera lieu à des tarifs raisonnables et à des services novateurs, ainsi que des investissements continus dans des réseaux sans fil mobiles de haute qualité dans toutes les régions du pays.
  6. EMF-OFF! et M. Durand ont fait valoir que leur mémoire pour l’instance appartenait au troisième domaine principal : l’avenir des services sans fil mobiles au Canada. Ils ont soutenu que si le Conseil n’était pas d’accord que leur mémoire relevait de ce domaine, il ferait partie de la catégorie « autres questions ».
  7. Cependant, dans le mémoire qu’ils ont déposé pour l’instance, EMF-OFF! et M. Durand ont soulevé deux préoccupations principales en matière de politique qui, en fin de compte, n’ont pas aidé à mieux comprendre les questions examinées dans l’instance, même en ce qui concerne cette question large et générale.
  8. Dans leur mémoire pour l’instance, EMF-OFF! et M. Durand se sont principalement concentrés sur l’exposition à l’énergie électromagnétique radioélectrique provenant des installations sans fil. Ils ont lié cette question à la réglementation du spectre et de l’emplacement des antennes et à la manière dont ils peuvent nuire à la santé et à la sécurité publiques. Bien que le Conseil ait une certaine compétence pour déterminer les normes techniques des installations de télécommunication, il n’a aucune compétence sur les décisions concernant l’utilisation et l’attribution du spectre, l’imposition de conditions dans les licences d’utilisation du spectre ou l’emplacement des antennes, en soi. Ces questions relèvent de la compétence du ministre de l’Industrie en vertu de la Loi sur la radiocommunicationNote de bas de page 3. De plus, le mémoire d’EMF-OFF! et de M. Durand ne contenait généralement pas de proposition concrète sur la façon dont le Conseil pourrait exercer sa compétence pour répondre aux préoccupations soulevées. Par conséquent, le mémoire n’entrait pas dans la portée de l’instance et ne pouvait pas aider le Conseil à mieux comprendre les questions relatives aux services sans fil mobiles au sujet desquelles il avait lancé un appel aux observations.
  9. Le mémoire d’EMF-OFF! et de M. Durand déposé pour l’instance concernait également des questions de vie privée. La compétence du Conseil en matière de protection de la vie privée ne s’étend généralement qu’aux pratiques des entreprises et des fournisseurs de services de télécommunication (FST) canadiens. Toutefois, dans leur mémoire, EMF-OFF! et M. Durand s’inquiétaient de l’utilisation des réseaux et des technologies 5G par des tiers (p. ex. les fabricants de dispositifs de l’Internet des objets). EMF-OFF! et M. Durand ne s’en sont pas tenus à la collecte, l’utilisation et la divulgation de renseignements personnels par les FST eux-mêmes. Compte tenu de la compétence du Conseil, le mémoire d’EMF-OFF! et de M. Durand à ce sujet était forcément hors de la portée de l’instance.
  10. Compte tenu de ce qui précède, EMF-OFF! et M. Durand n’ont pas satisfait à la condition d’admissibilité, et le Conseil conclut donc qu’ils ne sont pas admissibles à une attribution de frais.
  11. Par conséquent, le Conseil rejette la demande d’attribution de frais présentée par EMF-OFF! et M. Durand en ce qui concerne leur participation à l’instance.

Instructions de 2019

  1. Le gouverneur en conseil a publié des instructions dans lesquelles il a demandé au Conseil d’examiner comment ses décisions peuvent promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation (les Instructions de 2019)Note de bas de page 4. Le Conseil estime que le rejet de l’attribution de frais dans ce cas est conforme au sous-alinéa 1(a)iv) des Instructions de 2019.
  2. En facilitant la participation d’un groupe qui représente des consommateurs pour qui le dénouement de l’instance revêt un intérêt et dont les mémoires aident à mieux comprendre les questions examinées, l’attribution de frais contribue à renforcer et à protéger les droits des consommateurs dans leurs relations avec les FST. Étant donné que les groupes de défense des consommateurs ont souvent besoin d’une aide financière pour participer efficacement aux instances du Conseil, celui-ci est d’avis que sa pratique d’attribution de frais permet à ces groupes de donner leur point de vue sur la façon dont les résultats des instances peuvent avoir une incidence sur les intérêts des consommateurs. Cependant, étant donné les conclusions du Conseil selon lesquelles le mémoire déposé par EMF-OFF! et M. Durand était hors de la portée de l’instance et n’a pas aidé à mieux comprendre les questions examinées, le rejet de la demande d’attribution de frais dans ce cas-ci favorise les intérêts des consommateurs et garantit l’efficacité des processus.

Secrétaire général

Documents connexes

Date de modification :