Décision de radiodiffusion CRTC 2020-137

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Références : 2019-358-1 et 2020-114

Ottawa, le 28 avril 2020

Leclerc Communication inc.
Montréal (Québec)

Dossier public de la présente demande : 2019-0952-4
Audience publique à Montréal (Québec)
12 février 2020

CJPX-FM Montréal – Acquisition d’actif et modifications de licence

Le Conseil approuve, sous réserve de certaines modifications, une demande déposée par Leclerc Communication inc. (Leclerc) en vue d’obtenir l’autorisation d’acquérir de Média ClassiQ inc. l’actif de la station de radio commerciale spécialisée de langue française CJPX-FM Montréal et d’obtenir une nouvelle licence de radiodiffusion afin d’en poursuivre l’exploitation.

Le Conseil approuve également la demande de Leclerc en vue de modifier les conditions de licence de CJPX-FM afin de faire passer la station d’une formule spécialisée à une formule commerciale grand public.

La présente décision complète la décision de radiodiffusion 2020-114 et énonce les motifs qui ont sous-tendu la décision de radiodiffusion 2020-114 et les approbations en découlant. Cette décision ne remplace pas la décision de radiodiffusion 2020-114, mais la complète.

Demande

  1. Leclerc Communication inc. (Leclerc) a déposé une demande en vue d’obtenir l’autorisation d’acquérir de Média ClassiQ inc. (Média ClassiQ), l’actif de la station de radio commerciale spécialisée (Musique classique) de langue française CJPX-FM Montréal, et d’obtenir une nouvelle licence de radiodiffusion afin d’en poursuivre l’exploitation. Cette demande a été approuvée par le Conseil, sous réserve de certaines modifications, dans la décision de radiodiffusion 2020-114.
  2. Leclerc a également déposé une demande en vue de modifier les conditions de licence de CJPX-FM afin de passer d’une formule spécialisée à une formule musicale grand public (musique adulte alternatif – Triple A et Adulte contemporain). En outre, Leclerc s’engage à diffuser 25 % de ses rotations de pièces de musique vocale de langue française (MVF) provenant d’artistes émergents de langue française sur les ondes de la station. Cette demande a également été approuvée dans la décision de radiodiffusion 2020-114.
  3. Leclerc indique que ses demandes sont indissociables et qu’elle ne pourrait pas procéder à l’acquisition de l’actif de CJPX-FM sans l’approbation du Conseil des demandes de modifications aux conditions de licence proposées.
  4. Jacques Leclerc détient 99,7 % des droits de vote de Leclerc et exerce le contrôle effectif des entreprises de radiodiffusion. Nicolas Leclerc et Jean-François Leclerc détiennent chacun 0,15 % des droits de vote. Tous les directeurs de l’entreprise sont Canadiens. Par conséquent, le Conseil conclut que la demande de Leclerc est conforme aux Instructions au CRTC (Inadmissibilité de non-Canadiens).
  5. Média ClassiQ est détenu à 100 % par Groupe Radio Greg inc. dont le contrôle effectif est exercé par Gregory Charles, qui détient 100 % des droits de votes de Groupe Radio Greg inc.
  6. Leclerc propose d’acquérir l’actif pour une valeur de 3 780 000 $ et la valeur de la transaction proposée aux fins du calcul des avantages tangibles est de 4 889 163 $. Les avantages tangibles proposés représentent 6 % de la valeur de la transaction, ce qui équivaut à une somme totale de 293 350 $.
  7. Le Conseil a reçu 22 interventions à l’égard de la présente demande, dont une intervention conjointe de la part de 31 intervenants en appui, huit en opposition et 13 commentaires. Entre autres, la principale intervention en opposition provient du Conseil québécois de la musique (CQM) et de sept autres particuliers qui appuient la position du CQM. Les principaux commentaires ont été déposés par l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) et Cogeco Communications (Cogeco). Leclerc a répliqué aux interventions.

Cadre réglementaire

  1. En vertu de l’article 5(1) de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi), le mandat du Conseil consiste à réglementer et surveiller tous les aspects du système canadien de radiodiffusion en vue de mettre en œuvre la politique canadienne de radiodiffusion énoncée à l’article 3(1) de la Loi. De plus, il doit être convaincu que l’approbation de la transaction proposée favorise l’intérêt public, tel que défini par les objectifs énoncés à l’article 3(1) de la Loi. L’examen des transactions de propriété fait partie intégrante du mandat de réglementation et de surveillance du Conseil en vertu de la Loi.
  2. Puisque le Conseil ne sollicite pas de demandes concurrentes en vue de modifier le contrôle effectif d’entreprises de radiodiffusion, il incombe au demandeur de démontrer que l’approbation sert l’intérêt public, que les avantages découlant de la transaction sont proportionnels à l’importance et à la nature de la transaction, et que la demande représente la meilleure proposition possible dans les circonstances.
  3. Le Conseil doit examiner le bien-fondé de chaque demande en tenant compte des circonstances qui lui sont propres.

Analyse et décisions du Conseil

  1. Après examen du dossier public de la présente demande en vertu des règlements et politiques applicables, le Conseil estime que les questions sur lesquelles il doit se pencher sont les suivantes :
    • la valeur de la transaction et les avantages tangibles;
    • les modifications de licence et l’incidence sur le marché;
    • la période de licence et l’analyse de la conformité.

Valeur de la transaction et avantages tangibles

Valeur de la transaction
  1. La politique du Conseil relative au paiement des avantages tangibles est énoncée dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2014-459 (la politique sur les avantages tangibles). Dans cette politique, le Conseil a estimé qu’il était approprié d’exiger le versement d’avantages tangibles lors d’une modification du contrôle effectif de toute entreprise de programmation de radio ou de télévision. Pour calculer la valeur des avantages tangibles, le Conseil examine la valeur globale de la transaction, y compris le montant de la dette brute reprise, du fonds de roulement à transférer à la clôture de la transaction, des ententes connexes, ainsi que des baux repris s’appliquant uniquement à des propriétés immobilières (immeubles, studios, bureaux) et des installations de transmission. La valeur des baux est calculée sur une période de cinq ans. Si ces éléments sont pertinents, ils sont ajoutés au prix d’achat.
  2. Dans le cadre de sa demande, Leclerc propose une valeur de la transaction qui inclut le bail pour l’antenne ainsi que des ententes connexes. La valeur de la transaction proposée par Leclerc inclut également une entente d’une valeur de 100 000 $ relative aux campagnes publicitaires que Leclerc mettra à la disposition de Média ClassiQ.
  3. Le Conseil note que le calcul de la valeur de la transaction proposé par Leclerc est conforme au cadre réglementaire et aux pratiques du Conseil. Le Conseil détermine donc que la valeur de la transaction s’établit à 4 889 163 $
Avantages tangibles
  1. En vertu de la politique sur les avantages tangibles pour les stations de radio commerciale, les avantages tangibles doivent représenter au moins 6 % de la valeur de la transaction telle que déterminée par le Conseil et être répartis entre le Fonds Radiostar ou Radio Starmaker Fund (3 %), MUSICACTION ou la FACTOR (1,5 %), tout projet de développement de contenu canadien (DCC) admissible, à la discrétion de l’acheteur (1 %) et le Fonds canadien de la radio communautaire (FCRC) (0,5 %).
  2. Tel que susmentionné, Leclerc propose un pourcentage d’avantages tangibles s’élevant à  6 % de la valeur de la transaction.
  3. Conformément à la politique sur les avantages tangibles, le Conseil exige que Leclerc verse la somme de 293 350 $ en avantages tangibles, laquelle doit être versée en paiements annuels égaux sur sept années de radiodiffusion consécutives et répartie comme suit :
    • 3 % (146 675 $) au Fonds Radiostar;
    • 1,5 % (73 337 $) à MUSICACTION;
    • 1 % (48 892 $) à des projets de DCC admissibles;
    • 0,5 % (24 446 $) au FCRC.
Avantages tangibles découlant d’une transaction antérieure
  1. En 2015, le Conseil a approuvé une demande de Média ClassiQ, en vue d’acquérir de Radio-Classique Montréal inc. et Radio-Classique Québec inc. l’actif des entreprises de programmation de radio commerciale spécialisée de langue française CJPX-FM Montréal et CJSQ-FM Québec (Québec), respectivement, et d’obtenir de nouvelles licences de radiodiffusion afin de poursuivre l’exploitation de ces stations. Dans le cadre de cette décision, Média ClassiQ devait verser des avantages tangibles sur une période de sept années consécutives de radiodiffusion, se terminant le 31 août 2022.
  2. De plus, le Conseil note l’entente conclue entre Leclerc et Média ClassiQ concernant les avantages tangibles liés à l’acquisition des stations CJSQ-FM Québec et CJPX-FM Montréal par MédiaClassiQ en 2015, selon laquelle Média ClassiQ assumera le montant résiduel de 120 607 $ attribuable à sa station CJSQ-FM Québec, et Leclerc assumera la portion restante de 219 514 $ attribuable à la station CJPX-FM Montréal, laquelle doit être versée en paiements annuels égaux sur trois années de radiodiffusion consécutives et répartie comme suit :
    • 3 % (109 755 $) au Fonds Radiostar;
    • 1,5 % (54 879 $) à MUSICACTION;
    • 1 % (36 585 $) à des projets de DCC admissibles;
    • 0,5 % (18 294 $) au FCRC.
  3. Le Conseil s’attend à ce que tous les avantages tangibles découlant de la décision de radiodiffusion 2015-400 soient versés comme prévu d’ici la fin de l’année de radiodiffusion 2021-2022.

Modifications de licence et incidence sur le marché

  1. Leclerc désire acquérir l’actif de CJPX-FM en vue d’exploiter une station dans le marché de Montréal et vise à améliorer la viabilité financière de la station. Pour ce faire, Leclerc demande des modifications aux conditions de licence de CJPX-FM afin que la station passe d’une formule spécialisée à une formule musicale grand public (Musique adulte alternatif – Triple A et Adulte contemporain). CJPX-FM est actuellement exploitée comme station commerciale spécialisée de langue française de musique classique.
  2. Plus précisément, Leclerc demande le retrait des conditions de licence 2 et 3 énoncées à l’annexe de la décision de radiodiffusion 2015-400, qui se lisent comme suit :

    2. La station doit être exploitée selon la formule spécialisée telle que définie dans Examen de certaines questions concernant la radio, avis public CRTC 1995-60, 21 avril 1995, et dans Catégories et sous-catégories de teneur révisées pour la radio, politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2010-819, 5 novembre 2010.

    3. Le titulaire doit consacrer, au cours de toute semaine de radiodiffusion, au moins 20 % des pièces musicales de catégorie de teneur 3 (Musique pour auditoire spécialisé) qu’il diffuse à des pièces musicales canadiennes diffusées intégralement et les répartir de façon raisonnable sur chaque journée de radiodiffusion.

  3. Ainsi, advenant l’approbation de la modification par le Conseil, CJPX-FM serait assujettie à toutes les conditions de licence imposées aux stations de radio commerciale AM et FM, telles qu’énoncées dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2009-62.
  4. À l’appui de sa demande de modification, Leclerc indique que le modèle d’affaires de CJPX-FM n’est pas rentable à court, moyen ou long terme. Elle souligne que la station a essuyé des pertes considérables au cours des dernières années. De plus, elle précise que lorsque Média ClassiQ a fait l’acquisition de CJPX-FM en 2015, la station connaissait déjà une baisse importante du nombre d’auditeurs et de parts d’écoute dans le marché de Montréal. Leclerc prévoit que le repositionnement de la station dans le marché amènera une augmentation du nombre d’auditeurs et des parts d’écoutes, ce qui se traduirait par une augmentation des revenus. Par conséquent, Leclerc est d’avis que pour faire l’acquisition de CJPX-FM et atteindre la viabilité économique, le Conseil doit approuver le changement de formule proposé.
  5. Leclerc propose d’offrir une formule musicale grand public (Musique adulte alternatif Triple A et Adulte contemporain) composée de 60 % de musique et de 40 % de création orale au cours de chaque semaine de radiodiffusion. La programmation proposée serait inspirée de la formule et du format utilisés par sa station CJEC-FM Québec, connue sous l’appellation WKND, qui connaît du succès. Il compte ainsi rejoindre les intérêts des adultes de 25 à 54 ans. 
Interventions
  1. Le Conseil a reçu une intervention conjointe en appui déposée par Leclerc dans le cadre de sa demande. Des 31 particuliers qui appuient la demande, 18 sont des artisans de l’industrie et 13 sont des artistes québécois dont la musique est diffusée par Leclerc sur sa station de Québec, CJEC-FM. Les intervenants soulignent la diversité de la programmation que Leclerc apporte dans le marché de Québec ainsi que son ouverture à promouvoir les artistes émergents et à leur accorder du temps d’antenne. Les intervenants notent aussi l’implication de Leclerc dans la communauté et soutiennent qu’aucune station du genre n’existe à Montréal.
  2. Le Conseil a reçu huit interventions en opposition à la demande. La principale intervention provient du CQM. Les sept autres interventions proviennent de particuliers qui appuient la position du CQM et qui déplorent la perte du seul service radiophonique commercial de langue française dédié à la musique classique dans le marché de Montréal. Le CQM déplore les impacts négatifs potentiels du changement de formule musique proposé par Leclerc dans le marché radiophonique de Montréal, principalement la diminution de la diversité musicale, la diminution du soutien direct aux artistes canadiens et locaux de la musique classique et l’impact économique de la modification demandée (fractionnement de l’auditoire).
  3. Le Conseil a reçu 11 commentaires de la part de particuliers qui soulèvent les mêmes enjeux que ceux soulevés par le CQM. Les principaux commentaires ont été déposés par l’ADISQ et Cogeco. L’ADISQ estime que la disparition d’une station de radio classique à Montréal constitue une perte importante dans ce marché radiophonique. L’ADISQ est d’avis que le marché de Montréal manque de diversité musicale puisqu’il est dominé par Bell Média inc. (Bell Média) et Cogeco et que l’arrivée d’une entreprise indépendante peut constituer un ajout pour la diversité des voix. L’ADISQ demande au Conseil d’imposer une condition de licence à CJPX-FM pour qu’au moins 25 % des pièces de MVF diffusées au cours de chaque semaine de radiodiffusion soient consacrées à des artistes émergents de langue françaises et qu’un rapport soit déposé à cet effet.
  4. Pour sa part, Cogeco soutient qu’une évaluation de la capacité du marché à accueillir une nouvelle station commerciale grand public n’a pas été effectuée et s’oppose aux modifications de conditions de licence proposées par Leclerc. Cogeco estime que la demande telle que présentée par Leclerc ne garantit pas la diversité musicale, risque de nuire à l’équilibre concurrentiel déjà fragile du marché radiophonique de Montréal et devrait être examinée seulement après le processus d’examen du cadre réglementaire relatif la radio commerciale de langue française.
Réplique de Leclerc
  1. En réponse aux commentaires, Leclerc souligne la position prédominante de Cogeco dans le marché de la radio de langue française et anglaise à Montréal et indique que son arrivée dans le marché comme joueur indépendant n’aurait pas d’incidence indue sur la diversité des voix puisque sa formule musicale proposée n’est pas offerte en ce moment dans le marché de Montréal et pourrait favoriser une plus grande concurrence dans un marché dominé par deux titulaires, Cogeco et Bell Média. Leclerc précise également que la Société Radio-Canada (SRC) (ICI Musique), Groupe Stingray inc. (Stingray) et Sirius XM Canada inc. (SiriusXM) offrent déjà de la programmation de musique classique aux auditeurs.
  2. En ce qui concerne la proposition de l’ADISQ d’augmenter à 25 % les rotations de pièces de MVF devant être consacrées aux artistes émergents de langue française au cours de chaque semaine de radiodiffusion, Leclerc confirme être prêt à faire passer son engagement initial de 20 % à 25 %.

Analyse et décisions du Conseil

  1. En examinant la demande de Leclerc, le Conseil a tenu compte des questions relatives à la diversité des voix et de la diversité de programmation, du besoin économique invoqué en faveur du changement de formule de la station, de l’incidence financière des modifications proposées sur les stations autorisées dans le marché de Montréal, ainsi que de l’intégrité du processus d’attribution de licences.
Diversité des voix et diversité de programmation
  1. En ce qui concerne la diversité des voix, l’entrée de Leclerc à titre de nouveau joueur dans le marché de Montréal maintiendrait une voix radiophonique distincte dans ce marché, car il remplacerait Média ClassiQ, qui n’exploite actuellement qu’une station à Montréal et qui est également une entreprise de radiodiffusion indépendante.
  2. En ce qui concerne les préoccupations exprimées par le CQM, l’ADISQ et Cogeco relativement au changement de formule de CJPX-FM, le Conseil est d’avis que l’arrivée de Leclerc maintiendrait une diversité musicale à Montréal, bien qu’il s’agirait d’une offre différente de celle présentement diffusée par la station.
  3. La combinaison de la formule spécialisée précisée à la condition de licence 2 et des exigences de musique canadienne précisées à la condition de licence 3 offre moins de souplesse à la station pour modifier son offre musicale qu’une station commerciale grand public. Ainsi, Leclerc indique que l’élimination de ces conditions de licence est nécessaire afin de rejoindre un plus large public et ainsi augmenter les revenus de la station et d’atteindre la rentabilité. Leclerc prévoit aussi diffuser 126 heures de programmation locale portant sur des sujets qui touchent l’auditoire cible, dont les voyages, les nouvelles technologies, le mieux-vivre, la famille, la musique, la télévision, le cinéma et les activités à faire localement. Pour chaque semaine de radiodiffusion, Leclerc prévoit diffuser 2 heures 30  minutes de bulletins de nouvelles, de météo et de circulation.
  4. Leclerc prévoit d’ailleurs diffuser deux émissions simultanément, produites à partir de Montréal, sur les ondes de CJPX-FM et de CJEC-FM. La première émission, Studio WKND, émission dédiée à 100 % à la scène musicale francophone québécoise serait diffusée du lundi au vendredi de 13 h à 14 h et la deuxième, dont le format reste à déterminer serait diffusée les fins de semaine de 16 h à 17 h.
  5. En ce qui a trait aux commentaires indiquant que la perte de la formule musicale spécialisée de musique classique dans le marché diminuerait de façon importante la diversité de la programmation, le Conseil reconnait l’apport unique de la formule spécialisée de musique classique de CJPX-FM, mais note que ses faibles parts d’écoute témoignent de l’impact limité que le changement de formule aurait sur l’ensemble des auditeurs dans le marché de Montréal. De plus, comme le soulignent Leclerc et l’ADISQ, la programmation proposée par Leclerc pour l’exploitation de CJPX-FM permettrait à de nombreux artistes canadiens de langue française, particulièrement les artistes émergents, d’obtenir plus de visibilité. Par conséquent, le Conseil estime que la formule musicale proposée par Leclerc contribuerait à la diversité de programmation musicale dans le marché de Montréal, car aucune autre station commerciale en exploitation dans le marché de Montréal n’offre la même formule telle que proposée par Leclerc. De plus, tel que l’a mentionné Leclerc, la SRC (ICI Musique), Stingray et SiriusXM offrent déjà de la programmation de musique classique aux auditeurs.
  6. Enfin, le Conseil note qu’à la suite de la période d’intervention, Leclerc et l’ADISQ sont arrivées à une entente, qui prévoit que Leclerc déposera des rapports annuels auprès de l’ADISQ démontrant dans quelle mesure la station offrira de la diversité de programmation dans le marché de Montréal grâce à son appui aux artistes émergents de langue française de l’ordre de 25 % des pièces de MVF diffusées au cours de chaque semaine de radiodiffusion seront consacrées aux artistes émergents de langue française. Une attente relative à engagement pris par Leclerc dans son entente avec l’ADISQ est énoncée à l’annexe de la présente décision.
Besoin économique
  1. Le Conseil fait remarquer que la station est présentement tenue de s’assurer qu’un minimum de 30 % de la musique diffusée par semaine de radiodiffusion soit de catégorie de teneur 3 (Musique pour auditoire spécialisé), ce qui comprend la sous-catégorie 31 (Musique de concert) et doit s’assurer qu’au moins 20 % des pièces musicales de catégorie de teneur 3 soient canadiennes (condition de licence 3). Média ClassiQ n’a pas été en mesure de rentabiliser CJPX-FM depuis qu’elle en a fait l’acquisition. La station a fait état d’une diminution des revenus totaux de 35 % entre 2013 et 2018 et n’a pas été rentable depuis 2014. Le Conseil fait remarquer que la formule axée sur la musique classique ne permet pas la même souplesse réglementaire que la formule grand public et que l’auditoire visé par cette formule est limité. Par conséquent, il estime que Leclerc a démontré un besoin économique justifiant le changement de formule proposé. D’ailleurs, selon le Conseil, la modification de formule proposée par Leclerc lui permettrait d’avoir de meilleures chances d’assurer la viabilité de CJPX-FM qu’avec la formule actuelle.
  2. De plus, le Conseil estime que l’élimination des conditions de licence 2 et 3 pour CJPX-FM ferait en sorte que la station aurait les mêmes exigences de programmation que celles applicables à CJEC-FM, ce qui faciliterait les synergies de programmation entre les deux stations.
Incidence des modifications proposées sur les stations de radio commerciale à Montréal
  1. Leclerc a fourni des projections financières pour l’exploitation de CJPX-FM. Pour les quatre prochaines années, elle prévoit que les revenus de la station représenteraient un peu moins de 3 % des revenus totaux des stations commerciale de langue française de Montréal en 2019. Bien que cela représenterait un montant moindre que les revenus de CJEC-FM Québec, la station à succès de Leclerc exploitée selon la formule proposée pour CJPX-FM, le Conseil estime que ces projections sont raisonnables, car le marché radiophonique de Montréal est plus concurrentiel que celui de Québec et Leclerc aura besoin d’un certain nombre d’années pour établir la station dans le marché de Montréal.
  2. Leclerc estime que 55 % des revenus supplémentaires proviendraient des stations titulaires dans le marché. Compte tenu de la taille du marché de la radio de langue française  à Montréal et de la baisse des revenus au cours des dernières années (baisse de 8,7 % depuis 2016), le Conseil est d’avis qu’il existe actuellement un potentiel de croissance limité dans le marché de la radio de langue française à Montréal. Par conséquent, le Conseil estime que l’affirmation de Leclerc selon laquelle la majorité des revenus supplémentaires proviendraient des stations existantes dans le marché est valide.
  3. La part d’écoute des francophones pour les services de langue française à Montréal a augmenté de 78 % en 2018 à 81,3 % en 2019. Le Conseil estime que cette part de revenus que Leclerc prévoit générer ne représente pas une part importante des revenus totaux du marché radiophonique de langue française de Montréal, dont la grande majorité des revenus sont générés par Bell Média et Cogeco.
  4. Le Conseil fait remarquer que dans ses commentaires à la demande de Leclerc, Cogeco énonce ses préoccupations par rapport à l’incidence financière de la modification proposée sur les stations présentes dans le marché. Cogeco soutient que l’augmentation du transfert de l’auditoire de langue française dans le marché est une preuve que le marché ne peut pas soutenir une autre station exploitée selon la formule Adulte contemporain.
  5. Le Conseil fait aussi remarquer que dans la décision de radiodiffusion 2019-125, il a approuvé la demande de Leclerc en vue de supprimer certaines conditions de licence de CKLX-FM afin de permettre au demandeur d’exploiter la station selon une formule adulte contemporaine (Hot AC). Alors que la transaction ne s’est ultimement pas concrétisée, le Conseil faisait remarquer que l’augmentation des revenus ne représentait pas une portion significative des revenus totaux du marché radiophonique de langue française à Montréal, lequel est dominé par Bell Média et Cogeco.
  6. Selon le plan d’affaires proposé par Leclerc, le Conseil n’anticipe pas que CJPX-FM aura une incidence notable sur la capacité des stations de langue française présentes dans le marché de générer des revenus étant donné que la formule musicale proposée se veut différente de celles présentement offertes dans ce marché et Leclerc pourrait donc cibler un auditoire différent. Il est anticipé qu’il y aura une incidence économique sur Bell Média et Cogeco, qui détiennent une position plus que favorable dans le marché.
  7. Le Conseil estime également que la répartition des revenus ne changerait pas de façon importante étant donné que le nombre de joueurs dans le marché de Montréal demeurerait inchangé à la suite de la transaction et que la formule musicale proposée se veut différente de celles présentement offertes sur le marché. De plus, de tous les joueurs du marché de Montréal, seul Cogeco s’est prononcé contre la demande de modifications de licence.
  8. Par conséquent, le Conseil estime que l’approbation de la demande de modification de licence n’aurait pas d’incidence négative indue sur les stations autorisées à Montréal.
Intégrité du processus d’attribution de licence
  1. Le Conseil s’attend généralement à ce que les titulaires de stations de radio qui se voient accorder une licence à l’issue d’un processus concurrentiel maintiennent leurs conditions de licence originales, du moins pendant la première période de licence. CJPX-FM a été lancée en 1998 et est exploitée selon une formule spécialisée depuis ce lancement. Étant donné que Média ClassiQ a obtenu la licence de radiodiffusion de CJPX-FM en 2015 (voir la décision de radiodiffusion 2015-400) et qu’elle a depuis honoré ses engagements de programmation liés à l’exploitation d’une formule spécialisée, le Conseil estime que l’approbation de la demande de modifications de licence déposée par Leclerc ne nuirait pas à l’intégrité de son processus d’attribution de licences.
Conclusion
  1. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil approuve la demande de Leclerc Communication inc. en vue de supprimer les conditions de licence 2 et 3 et de modifier la condition de licence 1 de CJPX-FM afin que la station passe d’une formule spécialisée à une formule musicale grand public (Musique adulte alternative – Triple A et Adulte contemporain).

Période de licence et analyse de la conformité

Période de licence
  1. Leclerc demande une nouvelle licence de radiodiffusion et de nouvelles conditions de licence concernant la programmation afin de poursuivre l’exploitation de CJPX-FM, telles que précisées dans sa demande.
  2. Par ailleurs, le Conseil refuse la demande de Leclerc en vue d’obtenir une nouvelle licence de radiodiffusion pour une durée de sept ans. Le Conseil estime qu’il est plutôt approprié d’accorder une période de licence de deux ans et, ainsi, d’établir la même date d’expiration pour les licences de CJPX-FM Montréal et de CJEC-FM Québec au 31 août 2022, date d’expiration actuelle de la licence de CJEC-FM, puisque Leclerc a indiqué dans sa demande que les deux stations partageraient de la programmation. Dans ce contexte, le Conseil est d’avis qu’il est préférable d’examiner la performance et la conformité des deux stations au même moment.
Analyse de la conformité
  1. Média ClassiQ n’avait pas fourni de données en ce qui concerne les contributions au titre du DCC pour les années de radiodiffusion 2015-2016, 2016-2017 et 2017-2018. Leclerc précise qu’en 2015-2016, Média ClassiQ n’avait pas accès à l’information soumise par les anciens propriétaires en ce qui a trait à l’année de radiodiffusion 2015-2016 et qu’elle n’était pas en mesure d’établir le montant associé à ces obligations puisque les DCC de bases sont calculés en fonction des revenus de l’année de radiodiffusion précédente.
  2. En ce qui concerne les années de radiodiffusion 2016-2017 et 2017-2018, Média ClassiQ précise que les calculs ont été faits et que les montants ont été remis. Par manque de connaissance, les contributions avaient été versées entièrement à MUSICACTION, mais la situation a été régularisée et un chèque équivalent à la somme due pour ces deux années de radiodiffusion a été déposé auprès du FCRC.
  3. Le Conseil estime que le titulaire a fourni suffisamment de preuves de contributions pour les années de radiodiffusion de 2015-2016, à 2017-2018 dans le cadre de la présente demande. Le Conseil est convaincu que le titulaire a maintenant respecté ses obligations et que le manque à gagner au FCRC a été corrigé. Par conséquent, le Conseil est d’avis qu’il n’est pas nécessaire, dans les circonstances, d’imposer des mesures correctives pour ce qui est du dépôt tardif de preuves de contributions pour les années de radiodiffusion en cause.
  4. Pour ce qui est des manquements aux contributions au FCRC pour les années de radiodiffusion 2016-2017 et 2017-2018, le Conseil conclut que les explications de Leclerc sont satisfaisantes et n’estime pas approprié, dans les circonstances, d’imposer des mesures correctives puisque les contributions ont ultimement été payées malgré un retard.

Conclusion

  1. Le Conseil conclu que l’acquisition de l’actif de l’entreprise de radiodiffusion CJPX-FM Montréal par Leclerc Communication inc. servira l’intérêt public et permettra d’atteindre les objectifs de la Loi énoncés à l’article 3(1), notamment l’article 3(1)f) de la Loi qui prévoit que toutes les entreprises de radiodiffusion doivent utiliser au maximum les ressources canadiennes, l’article 3(1)g) qui précise que la programmation offerte par les entreprises de radiodiffusion doit être de grande qualité et l’article 3(1)i)(iv) qui prévoit que la programmation offerte par le système canadien de radiodiffusion devrait, dans la mesure du possible, offrir au public l’occasion de prendre connaissance d’opinions divergentes sur des sujets qui l’intéressent. De plus, la transaction contribuera la diversité des voix et à la diversité musicale à Montréal. La transaction apportera des avantages tangibles au montant de 293 350 $. Enfin, Leclerc a démontré le besoin économique pour le changement de formule musicale de CJPX-FM et que l’approbation de la demande n’aura pas d’incidence financière indue sur les stations présentes dans le marché radiophonique de Montréal.
  2. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil approuve, sous réserve de certaines modifications, la demande présentée par Leclerc Communication inc. afin d’obtenir l’autorisation d’acquérir de Média ClassiQ inc. l’actif de l’entreprise de programmation de radio commerciale spécialisée de langue française CJPX-FM Montréal (Québec).
  3. Le Conseil approuve également la demande de Leclerc Communication inc. en vue de supprimer les conditions de licence de CJPX-FM portant sur la formule spécialisée afin que la station passe à une formule commerciale grand public (Musique adulte alternative – Triple A et Adulte contemporain).
  4. Le Conseil s’attend à ce que Leclerc Communication inc. respecte son engagement à consacrer, au cours de chaque semaine de radiodiffusion, 25 % des pièces de MVF diffusées aux artistes émergents de langue française et à déposer un rapport annuel auprès de l’ADISQ.
  5. Leclerc Communication inc. doit aviser le Conseil dès la clôture de la transaction et à la rétrocession de la licence actuellement détenue par Média ClassiQ, le Conseil attribuera une nouvelle licence de radiodiffusion à Leclerc qui viendra à échéance le 31 août 2022. Les modalités et conditions de licence pour cette station sont énoncées à l’annexe de la présente décision.

Secrétaire général

Documents connexes

La présente décision doit être annexée à la licence.

Annexe aux décisions de radiodiffusion CRTC 2020-114 et 2020-137

Modalités, conditions de licence, attentes et encouragement pour l’entreprise de programmation de radio FM commerciale de langue française CJPX-FM Montréal (Québec)

Modalités

La licence expirera le 31 août 2022.

Conditions de licence

  1. Le titulaire doit se conformer aux conditions énoncées dans Conditions de licence propres aux stations de radio commerciale AM et FM, politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2009-62, 11 février 2009, ainsi qu’aux conditions énoncées dans la licence de radiodiffusion de l’entreprise.
  2. Le titulaire peut utiliser deux canaux du système d’exploitation multiplexe de communications secondaires afin de diffuser un service radiophonique principalement en langues pendjabi, hindi, ourdou, bengali, tamoule et cinghalais sur le premier canal, ainsi qu’un service principalement en langue portugaise avec des émissions reçues de Radio Club Montréal (94 %) et d’autres sources (6 %) sur le deuxième canal.

Attentes

Le Conseil s’attend à ce que le titulaire respecte son engagement de consacrer 25 % de la musique vocale de langue française diffusée sur les ondes de CJPX-FM à des artistes émergents de langue française.

Le Conseil s’attend à ce que le titulaire respecte son engagement de déposer sur une base annuelle auprès de l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo un rapport témoignant de l’apport à la diversité de la station dans le marché de Montréal et particulièrement sur la diffusion de musique d’artistes émergents.

Conformément à la convention d’achat d’actif avec Média ClassiQ, le Conseil s’attend à ce que le titulaire verse, d’ici la fin de l’année de radiodiffusion 2021-2022, les engagements en avantages tangibles non réalisés de 219 514 $ attribuables à CJPX-FM Montréal découlant de la transaction de 2015 tels qu’énoncés dans CJPX-FM Montréal et CJSQ-FM Québec – Acquisition d’actif et modification de licence, décision de radiodiffusion CRTC 2015-400, 26 août 2015.

Le Conseil s’attend à ce que les pratiques du titulaire en matière de programmation et d’embauche reflètent la diversité culturelle du Canada.

Encouragement

Conformément à Mise en œuvre d’une politique d’équité en matière d’emploi, avis public CRTC 1992-59, 1er septembre 1992, le Conseil encourage le titulaire à tenir compte des questions d’équité en matière d’emploi lors de l’embauche du personnel et en ce qui a trait à tous les autres aspects de la gestion des ressources humaines.

 

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