Politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2019-392

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Références : 2019-67-1 et 2019-67-2

Ottawa, le 3 décembre 2019

Dossier public : 1011-NOC2019-0067

Modification proposée par Bell Média inc., Corus Entertainment Inc. et Rogers Media Inc. à leur condition de licence exigeant que la programmation aux heures de grande écoute soit diffusée avec vidéodescription

Le Conseil reconnaît que la vidéodescription est essentielle à l’expérience d’écoute des Canadiens qui sont non voyants ou qui ont une déficience visuelle. L’échange d’expériences d’écoute communes encourage les interactions sociales et l’inclusion, et donne la chance à tous de participer à la vie en société. Au moment de prendre sa décision, le Conseil a tenu compte des objectifs du cadre réglementaire en matière de vidéodescription afin de réduire les obstacles donnant accès à la programmation pour ceux qui ont recours à la vidéodescription.

Par conséquent, le Conseil approuve avec modifications la condition de licence proposée par Bell Média inc., Corus Entertainment Inc. et Rogers Media Inc. (les titulaires). La condition de licence modifiée exigera que les titulaires offrent la programmation avec vidéodescription pour toute la programmation de langues anglaise et française qui est diffusée aux heures de grande écoute, à l’exception de la programmation provenant des États-Unis reçue moins de 24 heures avant la diffusion. Les titulaires devront en surveiller les conséquences sur les choix des téléspectateurs et cet enjeu sera examiné à leur prochain renouvellement de licence.

Le Conseil reconnaît l’engagement des titulaires à consulter les personnes qui sont non voyantes ou qui ont une déficience visuelle afin de réduire les obstacles en ce qui concerne l’accès à la vidéodescription. Conformément à cet engagement, le Conseil encourage les titulaires à tenir régulièrement des consultations avec les intervenants en matière de vidéodescription afin d’élaborer de façon conjointe, entre autres choses, une solution pour répondre à l’enjeu qui nécessite l’exception de 24 heures accordée par le Conseil dans la présente décision. Pour ces consultations, le Conseil encourage les titulaires à adopter un modèle de groupe de travail semblable à celui du Groupe de travail sur le sous-titrage et d’envisager et d’explorer des solutions qui tiennent compte des pratiques exemplaires, des innovations et des nouvelles technologies en matière de vidéodescription.

Afin de veiller à ce que tous les intervenants soient informés des efforts de consultation des titulaires, le Conseil exige des titulaires qu’ils déposent, tous les six mois à compter de la date de la présente décision jusqu’au prochain renouvellement de licence, un rapport d’étape à ce sujet auprès du Conseil. Les rapports doivent parvenir au Conseil au plus tard le 3 juin 2020, le 3 décembre 2020, le 3 juin 2021 et le 3 décembre 2021.

Cette approche encourage les titulaires à prendre des mesures concrètes pour remédier aux enjeux sous-jacents en collaboration avec les personnes qui sont non voyantes ou qui ont une déficience visuelle, conformément à la pratique exemplaire qui consiste à impliquer les personnes ayant un handicap dans l’élaboration de solutions, ce que l’on appelle couramment « rien à propos de nous sans nous ».

Cette approche se concentre essentiellement sur le retrait progressif des obstacles à l’accès au système canadien de radiodiffusion en mettant en place un environnement de collaboration et en incitant l’investissement et l’innovation dans l’infrastructure canadienne de vidéodescription.

Introduction

  1. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-104, le Conseil a déclaré qu’il comptait introduire une approche en paliers pour la prestation de services de vidéodescription. Cette approche permettrait d’accroître les exigences en matière de vidéodescription au fil du temps, selon la taille et les ressources des radiodiffuseurs.
  2. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2016-436, le Conseil a énoncé des conditions de licence établissant les niveaux initiaux de programmation avec vidéodescription. Toutefois, le Conseil a également noté dans cette politique réglementaire que, pour ce qui est des entreprises pour lesquelles une quantité plus importante serait appropriée, les exigences relatives à la vidéodescription feront l’objet de discussions avec celles-ci lors du renouvellement de licence et seront ensuite imposées au cas par cas. Par conséquent, lorsque le Conseil a renouvelé les licences de radiodiffusion des stations et services de langues française et anglaise appartenant à de grands groupes de propriété en 2017Note de bas de page 1, selon le dossier public de cette instance, il a imposé l’exigence suivante en ce qui concerne la vidéodescription :

    Le titulaire doit fournir, au plus tard le 1er septembre 2019, la vidéodescription pour toute la programmation de langue française et de langue anglaise diffusée aux heures de grande écoute (soit entre 19 h et 23 h) et tirée des catégories d’émissions 2b) Documentaires de longue durée, 7 Émissions dramatiques et comiques, 9 Variétés, 11a) Émissions de divertissement général et d’intérêt et 11b) Émissions de téléréalité, ou composée d’émissions pour enfants d’âge préscolaire (0-5 ans) et pour enfants (6-12 ans).

Demande

  1. Le 28 novembre 2018, Bell Média inc. (Bell), Corus Entertainment Inc. (Corus) et Rogers Media Inc. (Rogers) (collectivement les titulaires), ont déposé une demande de la partie 1 sollicitant la modification par le Conseil de leur condition de licence exigeant que toute la programmation aux heures de grande écoute (entre 19 h et 23 h) soit diffusée avec vidéodescription.
  2. Plus précisément, les titulaires demandent une exception de sorte qu’ils soient autorisés à diffuser sans vidéodescription des émissions non canadiennes lorsqu’elles sont reçues sans vidéodescription intégrée moins de 72 heures avant leur diffusion. Pour une telle programmation, les titulaires indiquent qu’ils fourniront ultérieurement cette programmation avec vidéodescription lorsque celle-ci serait à l’horaire plus de 72 heures après la livraison.
  3. Les titulaires allèguent que l’exception est nécessaire puisqu’ils reçoivent une quantité importante de contenu provenant des États-Unis sans vidéodescription intégrée très près du moment de la diffusion et qu’il n’y a pas assez de temps pour produire ou sous-traiter la vidéodescription dans de telles circonstances. Ils ajoutent que la vidéodescription en direct n’est pas une option viable. Ils proposent également que les diffuseurs soient tenus de conserver un registre qui précise la date de réception de toutes les émissions provenant des États-Unis reçues sans vidéodescription et diffusées aux heures de grande écoute. Les titulaires ont fourni un modèle à cette fin.
  4. La demande inclut des lettres provenant de fournisseurs de vidéodescription et de divers studios de distribution et de production basés aux États-Unis qui précisent le calendrier de livraison de séries de télévision de première diffusion au Canada.

Interventions

  1. Le Conseil a reçu plusieurs interventions de particuliers, ainsi que de radiodiffuseurs indépendants (DHX Television (DHX), Newfoundland Broadcasting Company (NTV) et le Groupe de diffuseurs indépendants (GDI)), un radiodiffuseur à but non lucratif (Accessible Media Inc.), les groupes et organismes représentant des personnes non voyantes ou ayant une déficience visuelle (Media Access Canada (MAC), la CNIB Foundation/Fondation INCA, Réadaptation en déficience visuelle, Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec, le Conseil canadien des aveugles, la Manitoba Blind Sports Association, l’Alliance pour l’égalité des personnes aveugles du Canada) et Rothschild & Co.
  2. DHX, NTV et IBG appuient la modification proposée et demandent que si le Conseil accorde un allègement aux titulaires, il doit leur accorder cet allègement en même temps. Ils ajoutent que les diffuseurs indépendants sont confrontés à des obstacles uniques puisqu’ils ont une moins grande capacité à exiger aux studios non canadiens de respecter de répondre à des demandes précises et moins de capacité à amortir les coûts de vidéodescription dans un réseau de diffusion entier et dans plusieurs marchés locaux. 
  3. Toutes les interventions de particuliers Canadiens et d’organisations représentant les personnes non voyantes et ayant une déficience visuelle étaient en opposition à la demande des titulaires. Certains de ces intervenants affirment que la modification proposée omet l’engagement d’augmenter la vidéodescription aux heures de grande écoute. D’autres soutiennent aussi que les titulaires n’ont montré aucun progrès jusqu’à maintenant et que, s’ils sont autorisés à continuer, ils ne feront aucun progrès avant le renouvellement de leur licence en 2022. Ils font valoir que, sur cette seule base, leur demande devrait être refusée.
  4. Certains intervenants en opposition à la modification soutiennent aussi que les consultations avec les utilisateurs devraient être terminées avant de faire la demande d’exemptions qui pourraient avoir des répercussions négatives sur les Canadiens ayant un handicap. Ils sont également préoccupés par la manière dont les clients de vidéodescription sauront quand les émissions seront rediffusées avec vidéodescription. Certains intervenants affirment que dans des circonstances extrêmes, comme lorsque la programmation est livrée tardivement « une certaine forme de vidéodescription est mieux qu’aucune vidéodescription ». 
  5. À cet effet, MAC ajoute que, pour la programmation qui arrive tardivement, la « vidéodescription de base » ou la « vidéodescription en direct » offrirait une mesure temporaire raisonnable pour assurer un certain degré de vidéodescription à court terme. Toutefois, selon MAC, il est peu probable que les titulaires remplacent la vidéodescription de base par des versions de plus grande qualité pour les diffusions futures.
  6. MAC soutient qu’en repoussant la disponibilité de programmation accessible avec vidéodescription aux heures de grande écoute, les spectateurs non voyants ou ayant une déficience visuelle ne sont pas sur un pied d’égalité avec leurs pairs puisqu’ils ne sont pas en mesure de partager l’expérience de la consommation des médias en même temps que ces derniers, ce qui nuit à leurs interactions sociales. MAC exprime son insatisfaction à l’effet que les titulaires ne définissent pas la manière dont les clients de la vidéodescription sauraient quand les émissions seraient rediffusées avec vidéodescription. Ceci forcera les Canadiens qui ont besoin de vidéodescription pour accéder à la programmation à continuer à se fier aux logos et aux annonces en ondes, ce qui réduirait les avantages et la valeur des enregistrements sur enregistreur personnel. MAC soutient aussi que les titulaires n’ont pas démontré qu’ils s’engageaient à répéter les diffusions aux heures de grande écoute.
  7. MAC souligne la nécessité de mener des consultations constructives avec les parties prenantes touchées par ces problèmes afin d’informer la communauté de ce problème et de chercher des solutions qui sont atteignables et acceptables pour la communauté. MAC soutient que si le Conseil n’avait pas entrepris une consultation publique au sujet de la présente demande, cette communauté n’aurait pas été informée du problème.
  8. MAC confirme qu’il appuierait l’imposition d’une structure en paliers plus détaillée pour les exigences de vidéodescription aux heures de grande écoute, menant à une conformité intégrale aux exigences en matière de rapports et de surveillance.  
  9. Rothschild & Co. ne s’oppose pas à la modification proposée par les titulaires, mais propose plutôt que le texte soit modifié comme suit (la modification demandée est en gras) :

    […] à l’exception des émissions non canadiennes qui sont reçues moins de 72 heures avant leur diffusion. Les reprises de telles émissions diffusées aux heures de grande écoute après un délai de 72 heures suivant leur livraison seront accompagnées d’une vidéodescription.

Réplique des titulaires

  1. Les titulaires soutiennent qu’ils ne peuvent pas négocier avec les studios américains pour fournir de la vidéodescription pour la programmation lorsque celle-ci n’existe pas. Ils précisent que les radiodiffuseurs canadiens n’ont pas la capacité d’influencer le processus de production en tant que tel. Les titulaires ajoutent que l’enjeu lié à l’approvisionnement de vidéodescription pourrait être réglé en temps utile par l’entremise des règles de la Federal Communications Commission (FCC) régissant la vidéodescription aux États-Unis. Les titulaires font remarquer qu’ils n’ont « jamais indiqué que les coûts étaient un facteur dans l’approvisionnement de vidéodescription » et qu’ils ont des liens et des contrats avec des fournisseurs de vidéodescription tiers pour la production de vidéodescription pour la programmation canadienne et les émissions provenant des États-Unis livrées plus de 72 heures avant leur diffusion. Ils affirment plutôt que l’enjeu en est un de « temps et d’offre ».
  2. Les titulaires indiquent que l’Institut national canadien pour les aveugles (INCA) a organisé une « séance de discussion ouverte par téléconférence » le 30 mai 2019, au cours de laquelle ils ont expliqué les enjeux à leurs clients de vidéodescription.

Analyse et décisions du Conseil

  1. Après avoir examiné le dossier public de la présente instance compte tenu des règlements et des politiques applicables, le Conseil estime que les questions sur lesquelles il doit se pencher sont les suivantes :
    • Quelle quantité de programmation est potentiellement en cause?
    • Quels efforts les titulaires ont-ils déployés depuis l’entrée en vigueur de la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-104 en vue de respecter leur condition de licence relative à la vidéodescription aux heures de grande écoute?
    • La modification proposée est-elle appropriée pour régler les problèmes des titulaires de manière efficace?
    • De quelle façon le Conseil peut-il s’assurer que l’exigence continue à répondre aux besoins des utilisateurs de vidéodescription?

Quelle quantité de programmation est potentiellement en cause?

  1. Bien que les titulaires aient initialement indiqué qu’une importante quantité de programmation populaire provenant des États-Unis acquise par les radiodiffuseurs canadiens et diffusée aux heures de grande écoute n’arrive pas avec de la vidéodescription et qu’il est peu probable que ce soit le cas dans un avenir rapproché, le Conseil note qu’en réponse aux questions du Conseil, les titulaires ont reconnu que le nombre d’émissions en question est faible et qu’il s’agit en grande partie d’émissions de première diffusion en direct, en léger différé ou sous embargo. Les titulaires ajoutent qu’il est plus probable que les épisodes en direct et les émissions frappées d’un embargo avant leur diffusion par les détenteurs de droits américains, afin de s’assurer qu’elles ne sont pas divulguées ou distribuées illégalement, soient fournies moins de 72 heures avant leur diffusion.
  2. À l’annexe A de leur demande, les titulaires présentent des données de programmation d’une semaine d’échantillonnage non précisée. L’analyse de ces données par le Conseil révèle que moins de 10 % de la programmation non canadienne de langue anglaise diffusée par Bell, Corus et Rogers aux heures de grande écoute est reçue i) sans vidéodescription et ii) moins de 72 heures avant sa diffusion.
  3. Le Conseil reconnaît que le calendrier des titulaires aux heures de grande écoute peut changer d’une année à l’autre et que les données soumises par les titulaires ne représentent qu’un aperçu ponctuel. Toutefois, les données semblent confirmer les affirmations des titulaires selon lesquelles la quantité de programmation qui serait touchée est limitée.

Quels efforts les titulaires ont-ils déployés depuis l’entrée en vigueur de la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-104 en vue de respecter leur condition de licence relative à la vidéodescription aux heures de grande écoute?

Règles de la FCC en matière de vidéodescription
  1. Le Conseil fait remarquer qu’il existe une confusion générale quant à savoir si les règles de la FCC en matière de vidéodescription permettront aux titulaires de respecter leur condition de licence relative à la vidéodescription aux heures de grande écoute d’ici le renouvellement de licence en 2022 et si le recours au marché américain constitue un mécanisme viable à cette fin.
  2. Les règles de la FCC en matière de vidéodescription sont conçues différemment des exigences établies pour les radiodiffuseurs canadiens. Aux États-Unis, elles sont axées sur le marché et sur les trimestres de radiodiffusion plutôt que sur l’imposition d’obligations pour un moment précis de la journée de radiodiffusion (c.-à-d. aux heures de grande écoute). Le rapport et l’ordonnance de la FCC mettant en œuvre la Twenty­First Century Communications and Video Accessibility Act stipulent que depuis juillet 2017, les règles de la FCC en matière de vidéodescription exigent que les affiliés locaux des réseaux américains des 60 principaux marchés diffusent 87,5 heures par trimestre de programmation en vidéodescription, dont 50 heures doivent être de la programmation pour enfants ou aux heures de grande écoute et 37,5 heures, de la programmation de n’importe quel type diffusée entre 6 h et minuit. Au Canada, le Conseil exige que les titulaires fournissent une programmation en vidéodescription pour les émissions de catégories pertinentes diffusées aux heures de grande écoute tous les jours de la semaine, ce qui peut représenter jusqu’à 28 heures par semaine.
  3. Le Conseil ne s’attend pas à ce que les exigences de la FCC augmentent pour le moment car, comme l’indique l’ordonnance de la FCC, l’augmentation à 87,5 heures par trimestre était l’augmentation maximale permise en vertu de la Twenty­First Century Communications and Video Accessibility Act. Par conséquent, le Conseil estime que le fait de se fier uniquement aux règles de la FCC ne suffira pas à combler les heures de grande écoute de manière à éviter aux titulaires la nécessité de déployer des efforts supplémentaires pour assurer la conformité à leurs conditions de licence relatives à la vidéodescription.
Approvisionnement
  1. En ce qui concerne l’approvisionnement, les titulaires obtiennent la programmation avec vidéodescription auprès de fournisseurs canadiens et états-uniens au moyen d’ententes ou d’accords commerciaux. Toutefois, en ce qui concerne la programmation américaine, Rogers et Corus indiquent qu’ils n’obtiennent la vidéodescription que dans la mesure de sa disponibilité. Les titulaires soutiennent qu’il n’est pas possible pour les radiodiffuseurs canadiens d’exercer une influence sur le processus de production comme tel aux États-Unis puisque cela aurait une incidence sur les délais de production et les dates d’échéance de livraison sur le marché américain. Les titulaires affirment également que le fait de payer les fournisseurs américains à l’avance pour qu’ils préparent des versions de la programmation avec vidéodescription n’offrirait pas suffisamment d’incitatifs pour que ces fournisseurs modifient leurs calendriers de production.
  2. MAC affirme que la demande devrait être refusée étant donné que les titulaires ne sont pas en mesure de fournir une explication raisonnable des efforts déployés pour régler ces problèmes à l’interne et avec leurs fournisseurs de contenu.
  3. Le Conseil estime que les titulaires n’ont pas fourni, en appui à leurs affirmations, de preuve d’efforts réels en vue d’influencer leurs fournisseurs américains.

La modification proposée est-elle appropriée pour régler les problèmes des titulaires de manière efficace?

Émissions non canadiennes
  1. Le Conseil note dans la modification proposée l’emploi de l’expression « programmation non canadienne », qui fait référence à la programmation reçue sans vidéodescription. L’essentiel de la programmation de 2018-2019 qui figure au dossier provient du Canada et des États-Unis, avec un faible pourcentage provenant d’autres pays. De plus, les problèmes en cause ont trait à l’offre de programmation en vidéodescription propre aux États-Unis, car les titulaires n’ont fait référence qu’à des fournisseurs des États-Unis.
  2. Par conséquent, compte tenu des arguments et des renseignements présentés par les titulaires, le Conseil conclut que le terme « non canadien » est plus large que nécessaire. Il estime approprié de remplacer « programmation non canadienne » par « programmation provenant des États-Unis ».
72 heures avant la diffusion
  1. Les titulaires soutiennent qu’il faut 72 heures sur le plan opérationnel pour fournir la vidéodescription de la programmation en cause. Ils ont joint à leur demande des lettres de maisons et de studios de production et de fournisseurs de vidéodescription. Les maisons et studios de production attestent qu’ils fournissent fréquemment des émissions américaines de première diffusion la journée de la diffusion et souvent quelques heures seulement avant l’heure de diffusion. Les fournisseurs de vidéodescription ont présenté des renseignements concernant le temps nécessaire pour la description de la programmation. Selon l’un de ces fournisseurs, RED BEE, en moyenne, la vidéodescription d’un segment de 30 minutes peut être fournie en 4 heures et celle d’un segment de 60 minutes en 8 heures. ONEXTRA indique que pour les documentaires et les émissions dramatiques, il faut généralement 9,5 heures, et moins pour les autres types de programmation.
  2. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que les titulaires n’ont pas réussi à démontrer la nécessité d’un délai de 72 heures, car la correspondance fournie par les fournisseurs de vidéodescription indique que la vidéodescription peut être fournie dans des délais plus courts. Par conséquent, le Conseil estime que le délai de 72 heures avant l’heure de diffusion n’est pas approprié et estime qu’un délai de 24 heures avant l’heure de diffusion est plus approprié et reflète mieux la preuve versée au dossier public.

De quelle façon le Conseil peut-il s’assurer que l’exigence continue à répondre aux besoins des utilisateurs de vidéodescription?

  1. Les intervenants qui se sont opposés à la modification, y compris MAC, soutiennent que les titulaires auraient pu ou auraient dû mieux consulter la communauté non voyante ou ayant une déficience visuelle pour régler les problèmes et trouver des solutions acceptables pour cette dernière. MAC recommande fortement que « des consultations significatives auprès des intervenants touchés par ces problèmes » aient lieu à l’avenir lorsqu’une demande d’exception relative aux exigences en matière d’accessibilité est déposée auprès du Conseil.
  2. Dans leur réponse, les titulaires indiquent qu’ils ont examiné attentivement les interventions publiques, car ils voulaient comprendre l’incidence de la modification sur les téléspectateurs non voyants ou ayant une déficience visuelle. Ils font également remarquer qu’ils ont organisé une « séance de discussion ouverte par téléconférence », menée par l’INCA le 30 mai 2019. Les titulaires affirment que la « séance de discussion ouverte par téléconférence » leur a donné l’occasion d’expliquer pourquoi une modification était nécessaire et de répondre aux préoccupations de la communauté. Cette discussion a également permis à la communauté de fournir une rétroaction et de faire part de leurs idées sur les changements à venir.
  3. Les objectifs liés à l’exigence actuelle de vidéodescription aux heures de grande écoute, tels qu’ils sont énoncés dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-104 et décrits dans la condition de licence actuelle, consistent à accroître la vidéodescription dans le système aux heures de grande écoute (de 19 h à 23 h), 7 jours par semaine, et à offrir aux Canadiens ayant un handicap une expérience harmonieuse lorsqu’ils accèdent au contenu de leur choix. Le Conseil estime que l’exigence de vidéodescription aux heures de grande écoute permet de réduire les obstacles de longue date à l’accessibilité et reconnaît que l’échange d’expériences de visionnement communes favorise l’interaction et l’inclusion sociales ainsi que des possibilités équitables de participation dans la société.
  4. Le Conseil reconnaît que les titulaires ont tenu une « discussion ouverte télévisée » et se sont engagés à tenir des consultations régulièrement à l’avenir et à étudier le forum qui serait le plus convenable pour ces consultations continues, ainsi que la fréquence à laquelle elles devraient avoir lieu.
  5. Le Conseil note qu’il existe des exemples du modèle de groupe de travail offrant un forum dans le cadre duquel les Canadiens ayant un handicap participent de façon significative à l’élaboration de solutions aux obstacles à l’accessibilité. Plus récemment, le Groupe de travail sur le sous-titrage, mis sur pied et appuyé par le Groupe de télédiffuseurs de langue anglaiseNote de bas de page 2, a offert un forum de collaboration à tous les intervenants, ce qui a permis d’élaborer une solution novatrice conçue pour le Canada, afin d’évaluer l’exactitude du sous-titrage codé en anglais en direct, laquelle est énoncée dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2019-308.
  6. Par conséquent, le Conseil encourage les titulaires à tenir régulièrement des consultations avec les acteurs de la vidéodescription, conformément à cet engagement, dans le but d’élaborer des solutions de manière collaborative pour régler la question liée à la nécessité que l’exception de 24 heures soit accordée par le Conseil dans la présente décision.
  7. En ce qui concerne ces consultations, le Conseil encourage les titulaires à adopter un modèle de groupe de travail semblable à celui du Groupe de travail sur le sous-titrage afin de travailler en consultation avec les personnes non voyantes ou ayant une déficience visuelle pour réduire les obstacles à l’accessibilité en ce qui a trait à l’offre de la vidéodescription. Le Conseil encourage également les titulaires à envisager et à explorer des solutions fondées sur les pratiques exemplaires en matière de vidéodescription élaborées dans d’autres contextes ainsi que sur les innovations et les nouvelles technologies.
  8. Afin de s’assurer que toutes les parties intéressées sont informées de l’avancement des activités du groupe de travail, le Conseil exige que les titulaires déposent auprès du Conseil un rapport d’étape tous les six mois à compter de la date de la présente décision, jusqu’au prochain renouvellement des licences. Les rapports doivent parvenir au Conseil au plus tard le 3 juin 2020, le 3 décembre 2020, le 3 juin 2021 et le 3 décembre 2021. Les rapports seront publiés sur le site Web du Conseil et seront examinés au cours de l’instance de renouvellement de licence des titulaires, qui expirent en 2022.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil approuve avec modifications la condition de licence de Bell Média inc., Corus Entertainment Inc. et Rogers Media Inc. relative à la programmation aux heures de grande écoute devant être diffusée avec vidéodescription. Les modifications à la condition de licence sont en gras :

    Le titulaire doit fournir, au plus tard le 1er septembre 2019, la vidéodescription pour toute la programmation de langue française et de langue anglaise diffusée aux heures de grande écoute (soit entre 19 h et 23 h) et tirée des catégories d’émissions 2b) Documentaires de longue durée, 7 Émissions dramatiques et comiques, 9 Variétés, 11a) Émissions de divertissement général et d’intérêt et 11b) Émissions de téléréalité, ou composée d’émissions pour enfants d’âge préscolaire (0-5 ans) et pour enfants (6-12 ans), à l’exception de la programmation provenant des États-Unis reçue sans vidéodescription moins de 24 heures avant la diffusion. Les reprises de telles émissions diffusées plus de 24 heures après leur livraison seront accompagnées d’une vidéodescription.

  2. Le Conseil rappelle aux titulaires que ceci est une mesure d’exception et qu’ils doivent faire tous les efforts en vue d’épuiser toutes les voies possibles pour obtenir les émissions ou les épisodes avec vidéodescription.
  3. Pour la programmation assujettie à l’exception, un logo devra être affiché au début de la première diffusion et un avis sonore indiquant que les reprises seront diffusées plus tard avec vidéodescription complète devra être joué.
  4. Le Conseil exige que les titulaires déposent auprès du Conseil, tous les six mois à compter de la date de la présente décision, un rapport d’étape sur les progrès réalisés par le groupe de travail, et ce, jusqu’au prochain renouvellement de licence. Les rapports doivent parvenir au Conseil au plus tard le 3 juin 2020, le 3 décembre 2020, le 3 juin 2021 et le 3 décembre 2021.
  5.  Le Conseil note que les titulaires proposent dans leur demande de conserver des registres indiquant la date de réception de toutes les émissions provenant des États-Unis reçues sans vidéodescription et diffusées aux heures de grande écoute afin d’effectuer une surveillance appropriée de la conformité des radiodiffuseurs. Le Conseil s’attend à ce que ces renseignements, y compris les renseignements à propos de la programmation provenant des États-Unis reçue sans vidéodescription avant le seuil de 24 heures prévu par l’exception et que les titulaires ont été tenus de décrire, soient, entre autres choses, inclus dans les demandes de renouvellement de licence des titulaires afin de pouvoir évaluer l’incidence de cette exception.
  6. Le Conseil estime que ce qui précède permettra l’approvisionnement de la programmation avec vidéodescription d’une manière qui répond aux besoins des Canadiens non voyants ou ayant une déficience visuelle.

Secrétaire général

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