Ordonnance de télécom CRTC 2011-786

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Ottawa, le 16 décembre 2011

Demande d’attribution de frais concernant la participation de la Clinique d’intérêt public et de politique d’Internet du Canada Samuelson-Glushko et de son client OpenMedia.ca à l’instance de l’avis de consultation de télécom 2011-77

Numéros de dossiers : 8661-C12-201102350 et 4754-390

1.         Dans une lettre datée du 1er septembre 2011, la Clinique d’intérêt public et de politique d’Internet du Canada Samuelson-Glushko (CIPPIC) a, en son nom et celui de son client OpenMedia.ca, présenté une demande d’attribution de frais pour leur participation à l’instance amorcée par l’avis de consultation de télécom 2011-77 (l’instance).

2.         Le 12 septembre 2011, Bell Aliant Communications régionales, société en commandite et Bell Canada (collectivement les compagnies Bell); Quebecor Média inc. (QMI), au nom de Vidéotron, société en commandite; Shaw Cablesystems G.P. (Shaw) et la Société TELUS Communications (STC) ont déposé des réponses à la demande de la CIPPIC. La CIPPIC a déposé une réplique à ces réponses et a répondu aux questions du personnel du Conseil le 15 octobre 2011.

Demande

3.         La CIPPIC a indiqué qu’elle avait satisfait aux critères d’attribution de frais énoncés à l’article 68 des Règles de pratique et de procédure du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (les Règles de procédure), du fait qu’elle représentait un groupe ou une catégorie d’abonnés pour qui le dénouement de l’instance revêt un intérêt, que de par sa participation elle avait aidé le Conseil à mieux comprendre les questions qui ont été examinées et qu’elle avait participé à l’instance de manière responsable.

4.         La CIPPIC a demandé au Conseil de fixer ses frais à 33 539,18 $, soit 28 770,00 $ en honoraires d’avocat, 2 025,00 $ en honoraires de témoin expert et 2 744,18 $ en débours.

5.         La CIPPIC n’a pas précisé qui devrait être tenu de payer les frais attribués par le Conseil (les intimés).

Réponse

6.         En réponse à la demande, les compagnies Bell et la STC ont argué que le client de la CIPPIC, OpenMedia.ca, a obtenu une aide financière pour sa participation à l’instance et que ce montant devrait être déduit des frais admissibles de la CIPPIC.

7.         Pour appuyer cette allégation, les compagnies Bell et la STC ont mentionné deux lettres publiées les 22 et 23 février 2011 sur le site Web d’OpenMedia.ca (les lettres). Dans la première lettre, OpenMedia.ca sollicitait un financement du public, affirmant que la somme d’argent recueillie dans une période de 48 heures serait égalée, jusqu’à concurrence de 15 000 $, par les fournisseurs de services Internet Acanac Inc. et TekSavvy Solutions Inc. (collectivement les entreprises participantes). Dans sa deuxième lettre, OpenMedia.ca a indiqué qu’elle avait dépassé son objectif de recueillir 15 000 $ et que les entreprises participantes s’étaient engagées à consacrer 5 000 $ de plus pour égaler les fonds supplémentaires amassés dans les 24 heures restantes.

8.         Les compagnies Bell et la STC ont fait valoir que ces fonds constituaient une aide financière fournie à OpenMedia.ca pour sa participation à l’instance. Citant l’une des lettres, elles ont indiqué que l’argent allait servir à « créer un front uni composé de groupes de défense de l’intérêt public, de créateurs, de fournisseurs de services Internet indépendants, de fournisseurs de services en ligne et d’un demi-million de Canadiens en vue de présenter un mémoire bien fondé au CRTC » [traduction]. Elles ont également fait remarquer que les lettres d’OpenMedia.ca faisaient mention de l’avis énonçant leur intention de participer à l’instance sous la rubrique « Mises à jour clés de la campagne : l’instance du CRTC est amorcée » [traduction]. De plus, elles ont avancé qu’OpenMedia.ca aurait dû défrayer la CIPPIC au moyen des fonds recueillis. Enfin, elles ont indiqué que, compte tenu de la teneur des lettres, il est probable qu’OpenMedia.ca ait recueilli suffisamment d’argent pour recouvrer les frais réclamés dans la demande de la CIPPIC.

9.         À la lumière de ces faits, les compagnies Bell et la STC ont fait valoir que, conformément aux Lignes directrices pour l’évaluation des demandes d’attribution de frais du Conseil (les Lignes directrices)[1], il y a lieu de déduire la somme reçue en réponse aux lettres du total des frais admissibles énoncés dans la demande de la CIPPIC. De plus, elles ont demandé au Conseil d’ordonner à la CIPPIC et à OpenMedia.ca de déclarer la somme totale d’aide financière reçue pour leur participation à l’instance afin que le montant de frais admissibles soit réduit en conséquence. Elles ont affirmé que, dans le cas contraire, la demande d’attribution de frais devrait être rejetée dans son ensemble.

10.     QMI et Shaw ont toutes deux appuyé les présentations des compagnies Bell et de la STC.

Demande de renseignements du Conseil

11.     Le 6 octobre 2011, le personnel du Conseil a envoyé une demande de renseignements à la CIPPIC dans laquelle il lui demandait de déclarer la somme d’argent reçue par OpenMedia.ca en réponse aux lettres publiées, et ce, autant les contributions des entreprises participantes que celles du grand public.

Réplique

12.     Dans sa réplique[2], la CIPPIC a indiqué que toute somme reçue par OpenMedia.ca en réponse aux lettres publiées ne devrait pas être prise en compte en ce qui concerne sa demande d’attribution de frais, car, à titre de clinique d’aide juridique offrant des services gratuitement, elle ne reçoit aucuns honoraires de ses clients. La CIPPIC a également indiqué que dans Bell Canada c. Association des consommateurs du Canada, [1986] 1 R.C.S. 190, la Cour suprême du Canada a reconnu les liens uniques qui peuvent exister entre groupes d’intérêt public collaborant dans une instance du Conseil. En outre, elle a fait valoir que sa participation à l’instance consistait surtout à mener des recherches de natures technique et juridique, à assurer une coordination, à travailler auprès de spécialistes, à analyser des politiques et à formuler des positions à leur égard, ainsi qu’à rédiger et à présenter des mémoires. Par opposition, les efforts d’OpenMedia.ca se concentraient sur l’engagement public, l’éducation et la sensibilisation, la formation d’une coalition et le lobbying. Enfin, la CIPPIC a affirmé que son choix de collaborer avec OpenMedia.ca dans la présentation d’un mémoire pour réduire les dépenses et gagner en efficacité ne devrait pas l’empêcher de recouvrer les dépenses qu’elle a engagées.  

13.     La CIPPIC a également indiqué que les fonds reçus en réponse aux lettres publiées avaient été sollicités dans le cadre de la campagne générale d’OpenMedia.ca intitulée « Non au compteur » et qu’ils n’étaient qu’indirectement liés à sa participation à l’instance. De plus, elle a avancé que les compagnies Bell et la STC avaient cité les lettres hors contexte de sorte à omettre le fait que ces dernières parlaient d’un financement destiné à un large éventail d’activités précises, dont la coordination d’une journée d’action et d’annonces publiées dans les journaux, la participation à une prochaine réunion du Conseil pour les intervenants concernant la diffusion en ligne ainsi que le travail général relatif aux politiques et à la sensibilisation. Elle a indiqué que les fonds recueillis s’apparentaient au financement général de base que reçoivent parfois divers groupes d’intérêt public participant aux instances du Conseil, et qu’habituellement, ce financement n’était pas déduit des frais admissibles déclarés.

14.     Enfin, la CIPPIC a fait valoir que, dans la mesure où les fonds reçus en réponse aux lettres étaient liés à la participation d’OpenMedia.ca à l’instance, ils compensent des frais qui ne peuvent pas être recouvrés au moyen du cadre d’attribution de frais du Conseil; par exemple, le salaire du personnel d’OpenMedia.ca ayant participé à l’instance. La CIPPIC a avancé qu’étant donné que les fonds recueillis grâce aux lettres et les frais énoncés dans sa demande ne comportent pas d’éléments communs, il ne s’agit pas d’un double recouvrement. De plus, elle a indiqué que la politique du Conseil ne devrait pas être interprétée de sorte à réduire le montant de frais admissibles d’un organisme en raison des campagnes que ce dernier organise pour financer les activités non recouvrables par les mécanismes du Conseil. Elle a aussi indiqué que ce genre d’interprétation empêcherait les organismes de lancer des campagnes efficaces visant à financer les activités nécessaires et coûteuses liées à la participation aux instances et dont les frais ne sont pas recouvrables.

15.     La CIPPIC a indiqué que le recouvrement de frais est une préoccupation sérieuse en ce qui concerne sa participation aux instances du Conseil et que si elle n’est pas en mesure de recouvrer ses coûts, il lui sera difficile de continuer de participer aux instances du Conseil.

16.     Étant donné ses observations selon lesquelles les fonds reçus en réponse aux lettres ne devraient pas être déduits des frais admissibles, la CIPPIC n’a pas fourni de déclaration des montants reçus. Elle a fait valoir que, pour éviter d’influencer la décision du Conseil relativement à l’attribution de frais, toute déclaration fournie devrait comporter de l’information détaillée sur les diverses manières dont les fonds ont été utilisés dans la campagne « Non au compteur ». Elle a également fait valoir qu’une telle déclaration constituerait une entreprise onéreuse, comme l’a reconnu le Conseil dans la politique réglementaire de télécom 2010-963 lorsqu’il a refusé les demandes de certaines parties visant à obliger les demandeurs d’attribution de frais de déclarer leurs sources de financement.

17.     Par conséquent, la CIPPIC a demandé au Conseil de revoir sa demande de renseignements ou bien de trouver une manière de comptabiliser la totalité des coûts non recouvrables liés à la campagne « Non au compteur » lorsqu’il décidera du montant à déduire des coûts admissibles de la CIPPIC, le cas échéant.

Résultats de l’analyse du Conseil

18.     Le Conseil conclut que la CIPPIC a satisfait aux critères d’attribution de frais énoncés à l’article 68 des Règles de procédure. En particulier, le Conseil conclut que la CIPPIC représente un groupe ou une catégorie d’abonnés pour qui le dénouement de l’instance revêt un intérêt, que de par sa participation elle avait aidé le Conseil à mieux comprendre les questions qui ont été examinées et qu’elle avait participé à l’instance de manière responsable.

19.     Le Conseil fait remarquer que les taux réclamés à l’égard des honoraires d’avocat et d’expert-conseil ainsi que les débours sont conformes aux taux établis dans les Lignes directrices. Le Conseil est convaincu que les fonds amassés par OpenMedia.ca en réponse aux lettres étaient liés à une campagne de financement général visant une grande diversité d’activités et qu’ils n’avaient pas été amassés dans le but précis de participer à cette instance. Le Conseil accepte également l’allégation de la CIPPIC, à savoir qu’à titre de clinique d’aide juridique offrant des services gratuitement, elle n’a reçu aucune somme de la part d’OpenMedia.ca. Par conséquent, le Conseil conclut que le montant total réclamé par la CIPPIC correspond à des dépenses nécessaires et raisonnables et qu’il y a lieu de l’attribuer.

20.     Le Conseil estime qu’il convient dans le cas présent de sauter l’étape de la taxation et de fixer le montant des frais attribués, conformément à la démarche simplifiée établie dans l’avis public de télécom 2002-5.

21.     Le Conseil conclut que les intimés appropriés dans le cas de la demande d’attribution de frais déposée par la CIPPIC sont Cogeco Cable Inc. (Cogeco); les compagnies Bell; Distributel Communications Limited (Distributel); MTS Allstream Inc. (MTS Allstream); Primus Telecommunications Canada Inc. (Primus); QMI; Rogers Communications Partnership (RCP); Saskatchewan Telecommunications (SaskTel); Shaw et la STC.

22.     Le Conseil fait remarquer qu’il répartit généralement la responsabilité du paiement des frais entre les intimés en fonction de leurs revenus d’exploitation provenant d’activités de télécommunication (RET)[3], critère qu’il utilise pour déterminer la prépondérance et l’intérêt relatifs des parties à l’instance. Dans le cas présent, le Conseil estime qu’il convient de répartir les frais entre les intimés en proportion de leurs RET déclarés dans leurs plus récents états financiers vérifiés. Toutefois, en vertu de l’article 48 des Lignes directrices, le Conseil juge approprié d’exclure Distributel de la répartition des frais, car elle devrait verser un montant inférieur à 100 $. Le Conseil conclut donc qu’il convient de répartir la responsabilité du paiement comme suit :

Compagnies Bell 30,0 %
STC 27,1 %
RCP 27,0 %
MTS Allstream 5,0 %
QMI 3,6 %
SaskTel 3,0 %
Shaw 2,6 %
Cogeco 1,0 %
Primus 0,7 %

23.  Le Conseil fait remarquer que Bell Canada a déposé des mémoires au nom des compagnies Bell. Conformément à l’approche générale énoncée dans l’ordonnance de frais de télécom 2002-4, le Conseil désigne Bell Canada responsable du paiement au nom des compagnies Bell et il laisse aux membres des compagnies Bell le soin de déterminer entre eux leur part respective.

Directives relatives aux frais

24.  Le Conseil approuve la demande d’attribution de frais présentée par la CIPPIC, en son nom et celui de son client OpenMedia.ca, pour leur participation à l’instance.

25.  Conformément au paragraphe 56(1) de la Loi sur les télécommunications, le Conseil fixe à 33 539,18 $ les frais devant être versés à la CIPPIC.

26.  Le Conseil ordonne à Bell Canada, au nom des compagnies Bell; à la STC; à RCP; à MTS Allstream; à QMI; à SaskTel; à Shaw; à Cogeco et à Primus de payer immédiatement à la CIPPIC le montant des frais attribués, dans les proportions établies au paragraphe 22.

Secrétaire général

Documents connexes



Notes de bas de page:

[1] Ces lignes directrices sont énoncées dans la politique réglementaire de télécom 2010-963.

[2] Le Conseil fait remarquer que la réponse de la CIPPIC a été déposée après le délai de 10 jours établi dans les Règles de procédure. Il accepte l’explication de la CIPPIC, à savoir que ce retard était causé par la complexité des questions soulevées, et il a autorisé le dépôt de sa réponse au dossier.

[3]     Les RET correspondent aux recettes des télécommunications canadiennes provenant des services locaux et d’accès, de l’interurbain, de la transmission de données, des liaisons spécialisées, d’Internet et du sans-fil.

 
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