Radiodiffusion Lettre du Conseil adressée à Peggy Tabet (Québécor Média Inc.) et Kevin Goldstein (BCE Inc.)
Ottawa, le 5 août 2020
Peggy Tabet
Vice-présidente
Affaires publiques et réglementaires
Québecor Média inc.
tabet.peggy@quebecor.com
Kevin Goldstein
Vice-président
Affaires réglementaires, Contenu et distribution
BCE inc.
kevin.goldstein@bellmedia.ca
Par courriel
Objet : Suivi de la décision de radiodiffusion CRTC 2019-427, plainte de Québecor, au nom de TVA, contre Bell, représenté par BCE, alléguant une préférence indue concernant l’assemblage de TVA Sports
Madame, Monsieur,
Dans la décision de radiodiffusion CRTC 2019-427 (décision 2019-427), le Conseil a conclu que Bell Canada et Bell ExpressVu inc. (l’associé commandité) ainsi que Bell Canada (l’associé commanditaire), faisant affaire sous le nom de Bell ExpressVu Limited Partnership (collectivement Bell) ont assujetti TVA Sports à un désavantage indu et ont accordé une préférence indue à RDS. Le Conseil a exigé à Bell de « remédi[er] à la situation et inclu[re] TVA Sports dans la même offre de programmation que son service RDS, et fa[ire] état au Conseil [...] d’une nouvelle structure d’assemblage qui ne désavantagera pas indûment TVA Sports ou ne favorisera pas indûment RDS ».
Bell a fait état de son nouveau plan d’assemblage le 5 février 2020. Il a indiqué qu’il cesserait d’offrir aux clients québécois l’option de s’abonner aux forfaits Bon, Mieux ou Meilleur. Pour les abonnés existants, Bell a indiqué qu’il établirait des droits acquis relativement à tous ses forfaits préassemblés. Les clients qui sont déjà abonnés au forfait Bon auraient l’option de choisir entre RDS ou TVA Sports. De plus, Bell a indiqué que dans le cas où les abonnés choisiraient de conserver RDS, ils recevraient désormais également RDS2. Les nouveaux clients pourraient seulement s’abonner au service de base de Bell, sous le nom de Départ, puis ajouter des canaux à la carte ou en créant un forfait personnalisé.
Le 6 février 2020, Québecor Média inc., au nom du Groupe TVA inc. (Québecor), a écrit au Conseil faisant valoir que le plan de Bell était inacceptable et qu’il perpétuerait le désavantage indu de TVA Sports. Elle a demandé au Conseil a) de reconnaître que Bell ne respecte pas la décision du Conseil, b) de refuser catégoriquement l’assemblage proposé par Bell, qui, en aucun cas, n’est conforme à la décision, et c) d’ordonner à Bell d’ajouter TVA Sports au forfait Bon, le forfait préassemblé le plus populaire de Bell.
Québecor a soutenu que, loin de mettre fin au désavantage indu ou à la préférence indue, cette nouvelle structure d’assemblage accorderait un avantage accru à RDS par l’ajout de RDS2 comme prime pour les abonnés actuels du forfait Bon. Pour avoir accès à TVA Sports, les abonnés auraient à choisir activement d’abandonner RDS en faveur de TVA Sports. Québecor a indiqué que la possibilité que les abonnés prennent des mesures pour abandonner RDS, qui fait partie du forfait Bon depuis longtemps, afin de choisir TVA Sports est très faible, ce qui perpétuerait la préférence indue ou le désavantage indu. Pour ce qui est du nouveau plan d’assemblage, tous les abonnés au forfait Bon continueraient d’avoir un accès automatique à RDS et non à TVA Sports. De plus, Bell doublerait l’avantage de RDS en ajoutant RDS2.
Dans sa réplique datée du 12 février 2020, Bell a soutenu que sa structure d’assemblage proposée est entièrement conforme à la décision du Conseil, puisque les services seraient inclus dans la même offre de programmation et que les abonnés au forfait Bon pourraient choisir d’obtenir soit TVA Sports ou RDS. Bell a indiqué que son plan d’assemblage permettrait aux abonnés de faire un choix éclairé quant au service qu’ils préfèrent obtenir dans leur forfait Bon, et de décider s’ils souhaitent choisir le deuxième service à la carte. Bell a également soutenu qu’il s’agit d’une pure spéculation d’affirmer que cette offre maintiendrait la préférence indue ou le désavantage indu, car il n’y a toujours aucun élément de preuve.
En ce qui concerne RDS2, Bell a fait remarquer qu’il est comparable au deuxième signal de TVA Sports, et que l’offre de RDS2 avec RDS traiterait RDS et TVA Sports de la même manière, offrant aux abonnés de Bon l’option de choisir soit RDS1 et RDS2 ou TVA Sports 1 et TVA Sports 2. Bell a indiqué que laisser RDS2 dans le forfait Mieux désavantagerait RDS2 et conférerait une préférence à TVA Sports 2.
Enfin, Bell a soutenu que, en fin de compte, Québecor souhaitait que TVA Sports soit imposé aux abonnés, peu importe s’ils veulent réellement le service et peu importe le prix – c.-à-d., en exigeant à Bell d’assembler TVA Sports avec RDS dans le forfait Bon.
Québecor a répondu à la réplique de Bell le 17 février 2020, et les deux parties ont déposé d’autres documents en réponse aux questions du personnel du Conseil le 6 mars 2020.
Analyse
Après avoir examiné les mémoires des parties, le Conseil conclut que la proposition de Bell permet de remédier au désavantage indu à l’avenir pour les nouveaux abonnés, car les deux services sont offerts comme options à la carte ou dans des forfaits sur mesure. Cependant, le Conseil craint que la préférence historique demeure largement la même en assujettissant le forfait Bon à un droit acquis, et ce, pour deux raisons :
- Premièrement, il existe un risque que l’inertie fait en sorte que la majeure partie des abonnés au forfait Bon de Bell conserve RDS. Plus particulièrement, les abonnés qui ne sont pas des amateurs de sports ou les amateurs de sports qui ont un « intérêt occasionnel » ne sont pas susceptibles de faire le choix de changer d’option. Étant donné qu’il n’y a aucune mesure incitative réelle pour modifier leur forfait existant, il est également probable qu’une grande partie des abonnés de Bon ne feront pas l’effort de changer d’option, laissant RDS dans une position plus avantageuse, et perpétuant ainsi le désavantage. De plus, il n’est pas clair de la façon dont les communications de Bell aux abonnés existants de Bon concernant ses nouvelles offres de programmation permettraient de remédier à cette situation.
- Deuxièmement, l’ajout de RDS2 semblerait accorder une « prime » pour conserver RDS. Bien que Bell ait soutenu que RDS et RDS2 sont comparables à TVA Sports 1 et 2 et que, par conséquent, la nouvelle structure d’assemblage accorde un traitement similaire aux deux ensembles de canaux, le Conseil fait remarquer que l’entente d’assemblage précédente n’appuie pas cette conclusion. Bien que TVA Sports 1, 2 et 3 sont des multiplexes et ont toujours été offerts ensemble, RDS et RDS2 sont des services distincts (autorisés séparément) et ils ont été commercialisés séparément par Bell depuis que RDS2 a été lancé en 2012 (dans le forfait Mieux avec TVA Sports). Dans le cadre de l’entente d’assemblage précédente, les abonnés au forfait Bon pouvaient ajouter RDS2 à leur liste de canaux, tout comme ils pouvaient ajouter TVA Sports, mais seulement au coût individuel supplémentaire de 14 $, ou en s’abonnant au forfait Mieux. Le Conseil estime que l’ajout de RDS2 au forfait Bon pour les abonnés qui choisissent de conserver RDS rend effectivement l’offre de RDS plus attrayante, voire récompense les abonnés qui conservent RDS, et continuera de perpétuer la préférence et le désavantage indus soulevés par le Conseil dans la décision 2019-427.
Conclusion
Compte tenu de ce qui précède, et en notant la conclusion du Conseil dans la décision 2019-427 selon laquelle l’exclusion de TVA Sports du forfait Bon, contrairement à RDS, a eu et continue d’avoir des répercussions négatives importantes sur les activités de TVA, le Conseil conclut que la structure d’assemblage mise de l’avant par Bell dans sa lettre datée du 5 février 2020 ne permet pas de remédier entièrement à la préférence et au désavantage indus. Bien que l’approche de Bell à l’égard de ses nouveaux clients réponde aux préoccupations du Conseil à l’avenir, le Conseil n’est pas convaincu qu’elle permettra de remédier à la situation en ce qui concerne les abonnés au forfait Bon ayant un droit acquis.
Par conséquent, le Conseil ordonne à Bell (à sa discrétion) d’ajouter TVA Sports au forfait Bon, au même titre que RDS, ou de retirer RDS du forfait Bon et d’offrir les deux services dans la même offre de programmation.
En ce qui concerne RDS2, le Conseil fait remarquer qu’il appartient à Bell de décider de la façon dont il offrira le service, notamment s’il l’offrira avec RDS ou non. Cependant, le Conseil prévient que ces offres ne devraient pas être faites de manière à perpétuer le désavantage indu imposé à TVA Sports.
Le Conseil rappelle aux parties qu’il s’agit de questions qui seraient traitées de façon plus appropriée dans le contexte des négociations en cours des parties.
Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes sentiments distingués.
Claude Doucet
Secrétaire général
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