Décision de télécom CRTC 2020-342

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Ottawa, le 28 septembre 2020

Dossier public : 8662-C12-2019012502

Demande de suspension de la mise en application de l’ordonnance de télécom 2019-288 concernant les tarifs définitifs des services d’accès haute vitesse de gros groupés

Le Conseil approuve les demandes de Bell Canada et de Cogeco, d'Eastlink, de RCCI; de Shaw et de Vidéotron de suspendre la mise en application de l’ordonnance de télécom 2019-288 concernant les tarifs définitifs des services d’accès haute vitesse de gros groupés jusqu’à ce que le Conseil complète son examen de cette ordonnance.

Contexte

  1. Les services d’accès haute vitesse (AVH) de gros groupés sont fournis par Bell Canada; Bell MTS, une division de Bell Canada (Bell MTS); Bragg Communications Incorporated, faisant affaire sous le nom d’Eastlink (Eastlink); Cogeco Communications Inc. (Cogeco); Québecor Média Inc., au nom de Vidéotron ltée. (Vidéotron); Rogers Communications Canada Inc. (RCCI); Saskatchewan Telecommunications (SaskTel); Shaw Cablesystems G.P. (Shaw); et TELUS Communications Inc. (TCI) [collectivement les fournisseurs de services d’AHV de gros groupés] pour permettre aux concurrentsNote de bas de page 1 de fournir leurs propres services Internet de détail et d’autres services à leurs utilisateurs finals.
  2. Dans les ordonnances de télécom 2016-396 et 2016-448, le Conseil a examiné les tarifs des services d’AHV de gros groupés proposés par les fournisseurs de services d’AHV de gros.
  3. Dans l’ordonnance de télécom 2019-288, le Conseil a établi les tarifs définitifs concernant les services d’AHV de gros groupés.
  4. Bell Canada et Bell MTS, ainsi que Cogeco, Eastlink, RCCI, Shaw, et Vidéotron (collectivement les entreprises de câblodistribution), ont déposé des requêtes en autorisation d’appeler en ce qui concerne l’ordonnance de télécom 2019-288 auprès de la Cour d’appel fédérale. Le 27 septembre 2019, la Cour d’appel fédérale a accordé une suspension de l’ordonnance de télécom 2019-288 en attendant le résultat de l’instance de la Cour. En ce faisant, la Cour d’appel fédérale a appliqué les critères énoncés par la Cour Suprême du Canada dans l’arrêt RJR-MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général) [1994] 1 R.C.S. 311 (RJR-MacDonald). Ces critères sont appelés le test RJR-MacDonaldNote de bas de page 2. En utilisant le test RJR-MacDonald, la Cour d’appel fédérale a conclu i) qu’il y avait une question sérieuse à juger, sans argument convaincant à l'effet contraire; ii) que l'argument du préjudice irréparable n'était pas hypothétique, et que la mise en application de l'ordonnance en question pouvait entraîner une distorsion sur le marché qu'aucune ordonnance de la Cour ne pourrait corriger par la suite; et iii) que la prépondérance des inconvénients favorisait le statu quo.
  5. Le 10 septembre 2020, la Cour d’appel fédérale a rejeté les appels, levant ainsi la suspension de l’ordonnance de télécom 2019-288.

Demandes

  1. Le Conseil a reçu une demande de TCI, datée du 13 novembre 2019, ainsi qu’une demande de Bell Canada et une demande conjointe des entreprises de câblodistribution toutes deux datées du 13 décembre 2019, dans laquelle elles demandaient que le Conseil révise et modifie l’ordonnance de télécom 2019-288.
  2. Dans ces demandes, un redressement a été demandé dans deux grandes catégories :
    • Bell Canada et les entreprises de câblodistribution ont demandé que le Conseil prolonge la suspension de la mise en application des tarifs définitifs établis dans l’ordonnance de télécom 2019-288 si et au moment où la suspension accordée par la Cour d’appel fédérale est levée,
    • Bell Canada, les entreprises de câblodistribution et TCI ont demandé que le Conseil rende ses conclusions sur plusieurs demandes de révision et de modification.
  3. Le Conseil a reçu des interventions concernant les demandes d’Allstream Business Inc. (Allstream), de Bell Canada, de la British Columbia Broadband Association (BCBA), de Distributel Communications Limited (Distributel), des entreprises de câblodistribution, des Opérateurs des réseaux concurrentiels canadiens (ORCC)Note de bas de page 3, de TCI et de TekSavvy Solutions Inc. (TekSavvy).
  4. Le Conseil traitera les demandes de révision et de modification plus tard. Dans la présente décision, il traitera les demandes de prolongation de la de suspension de la mise en application des tarifs définitifs énoncés dans l’ordonnance de télécom 2019-288. Étant donné que les demandes de révision et de modification ont été combinées en une seule instance, le Conseil estime qu’il est approprié de réviser les deux demandes ensemble.

Le Conseil devrait-il approuver les demandes de Bell Canada et des entreprises de câblodistribution de prolonger la suspension de la mise en application des tarifs définitifs des services d'AHV de gros groupés établis dans l'ordonnance 2019-288 ?

  1. La pratique générale du Conseil est d’exiger que le demandeur d’un redressement démontre que sa demande répond aux trois critères du test RJR-MacDonald.

Critère i) : une question sérieuse à juger

Positions des parties
  1. Bell Canada et les entreprises de câblodistribution ont fait valoir que la norme minimale permettant de conclure qu'il y a une question sérieuse à juger est atteint, puisqu'il existe un doute réel entourant le bien-fondé de l'ordonnance de télécom 2019-288, pour les raisons énoncées dans leurs demandes.
  2. Bell Canada a également indiqué que le sérieux des questions soulevées est également illustré par le nombre de parties qui ont exprimé des inquiétudes quant à l'ordonnance de télécom 2019-288 et à ses effets.
  3. Allstream, la BCBA, Distributel, les ORCC, et TekSavvy se sont opposés à la suspension proposée.
  4. Plus particulièrement, les ORCC ont fait valoir que Bell Canada et les entreprises de câblodistribution ont seulement fait référence à leurs demandes respectives dans leur ensemble et n’ont pas réussi à satisfaire à la norme minimale pour démontrer l’existence d’une question sérieuse.
  5. Les ORCC ont précisé que le Conseil a établi des tarifs définitifs justes et raisonnables pour les services d’AHV de gros groupés conformément au paragraphe 27(1) de la Loi sur les télécommunications (Loi) en exerçant son pouvoir discrétionnaire dans la sélection des moyens pour établir les tarifs et la méthode d'établissement des coûts afférente. Par conséquent, la compétence du Conseil pour approuver de tels tarifs et les rendre applicables rétroactivement est inattaquable.
  6. Bell Canada a répliqué que la portée de la compétence et du pouvoir discrétionnaire du Conseil n'est pas, en soi, un élément de preuve suffisant pour démontrer qu'il n'y a pas de question sérieuse à juger, et que le processus de révision et de modification est un exemple du fait que des questions sérieuses peuvent être soulevées justifiant un réexamen.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Le seuil permettant de conclure qu'il s'agit d'une question sérieuse à juger est bas. Si une demande n'est pas manifestement frivole, elle répondra généralement au premier critère du test RJR-MacDonald. La partie qui demande une suspension n'est pas obligée de démontrer que son argument est convaincant ou solide, mais seulement qu'elle pose une question légitime.
  2. Les demandeurs ont soulevé plusieurs questions complexes dans leurs demandes respectives, allant des questions de méthodologie aux questions informatiques concernant des conclusions énoncées dans l'ordonnance de télécom 2019-288 qui touchent i) les tarifs mensuels pour une capacité de 100 mégabits par seconde (Mbps), ii) les tarifs d'accès mensuels par utilisateur final et iii) les tarifs associés aux frais de service. Le Conseil estime qu'il s'agit de questions légitimes et qu'elles ne sont pas frivoles.
  3. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que les demandeurs ont répondu au premier critère du test RJR-MacDonald. 

Critère ii) : préjudice irréparable si le redressement n’est pas accordé

Positions des parties
  1. Bell Canada a indiqué que si une suspension n'était pas accordée, elle subirait un préjudice irréparable 
    • sous la forme de paiements rétroactifs irrécupérables versés à des concurrents;
    • à ses intérêts commerciaux, notamment la perte permanente de revenus et d’une part de marché dans les marchés de gros et de détail.
  2. Les entreprises de câblodistribution ont fait valoir que si une suspension n’était pas accordée, leurs investissements et leur part du marché de détail subiraient un préjudice irréparable jusqu’à ce que le Conseil conclue un examen complet de la méthode d'établissement des tarifs et de son incidence sur les tarifs définitifs des services d'AHV de gros.
Paiements rétroactifs irrécupérables versés à des concurrents
  1. Bell Canada a fait valoir qu'environ 150 concurrents sont abonnés à son service d'AHV de gros. Au cours des 12 mois avant le dépôt de sa demande de révision et de modification, 14 concurrents ont été débranchés pour cause de non-paiement et 10 se sont vu adresser des avis de facture en souffrance. Bell Canada a indiqué que la distribution de paiements rétroactifs entraînerait probablement des remboursements rétroactifs qui ne seraient pas récupérables si les tarifs définitifs sont ajustés.
  2. De plus, Bell Canada a indiqué que plusieurs concurrents appartiennent à des intérêts privés et pourraient distribuer des dividendes; leur distribution des fonds à des particuliers pourrait rendre impossible le recouvrement des montants dus. Bell Canada a argué que cette préoccupation, qui est similaire à une préoccupation dans Société Radio-Canada et Astral Média Inc. c. SODRAC, 2013 CAF 60 (SODRAC), examinée par la Cour d’appel fédérale, a été prise en compte afin d’accorder une suspension dans ce cas particulier.
  3. Allstream a précisé que le préjudice présumé est fondé sur deux hypothèses irréalistes soit que i) les réductions des tarifs sont entièrement infirmées et ii) chaque concurrent individuel louant actuellement un service d’AVH de gros groupé de Bell Canada fera faillite et sera incapable de rembourser quelconques montants dus.
  4. Les ORCC ont fait valoir que les affirmations de Bell Canada, selon lesquelles les concurrents utiliseront les remboursements rétroactifs pour verser des dividendes aux actionnaires au point de devenir insolvables, sont purement hypothétiques et ne sont appuyées d'aucun élément de preuve.  
  5. Les ORCC ont argué que, même si les plus petits concurrents risquaient de ne pas être capables d'effectuer des remboursements les montants dus, leur proportion serait petite, et le risque de non-paiement serait insignifiant par rapport au montant total des remboursements rétroactifs.
  6. Les ORCC ont ajouté que Bell Canada a de l'expérience dans le recouvrement relatif aux factures en souffrance, et que même si une minorité de cas n'étaient pas réglés après les efforts de recouvrement, Bell Canada aurait une cause simple qu'elle pourrait choisir d'amener devant les tribunaux appropriés. 
  7. Les ORCC ont fait valoir que la cause SODRAC est clairement différente et implique de circonstances particulières (p. ex., un intermédiaire qui distribue des fonds) qui ne s'appliquent pas à la préoccupation de Bell Canada concernant les paiements rétroactifs irrécupérables. 
  8. Distributel a précisé que les affirmations de Bell Canada, selon lesquelles les concurrents représentent un risque financier, sont non fondées. En appui à ce point de vue, Distributel a fait valoir qu'elle exerce ses activités depuis 1989 et qu'il est absurde de soutenir qu'elle pourrait empocher les paiements rétroactifs et quitter le marché.
  9. Bell Canada a répliqué que le test du préjudice irréparable évalue la nature du préjudice, comme indiqué dans RJR-MacDonald, et non sa gravité. Bell Canada a également répliqué que quelconque portion des paiements rétroactifs irrécupérables donne lieu à un préjudice irréparable.
Perte permanente de revenus et d’une part de marché dans les marchés de gros et de détail
  1. Bell Canada a soutenu que l’ordonnance de télécom 2019-288 fausse le marché du service d'AHV de gros en fixant des tarifs des services d'AHV de gros groupés pour les entreprises de câblodistribution qui sont tous inférieurs à ceux du service d’AHV de gros groupé offert par Bell Canada. En raison de cela, Bell Canada a argué que les concurrents seront incités à acheter le service des entreprises de câblodistribution à moindres prix.
  2. De plus, Bell Canada a indiqué que les tarifs définitifs imposés par l’ordonnance de télécom 2019-288 sont inférieurs aux coûts réels. Si Bell Canada choisissait de conserver ses clients de gros en réduisant ses tarifs ou de maintenir ses tarifs pour limiter ses pertes par utilisateur final et de laisser sa base de clients de gros s'éroder, les conséquences sur son service d'AHV de gros seraient majeures.
  3. En ce qui concerne le préjudice relatif aux marchés de gros, Bell Canada et les entreprises de câblodistribution ont fait valoir que les tarifs définitifs auront pour conséquence que les concurrents seront capables de réduire considérablement leurs prix de détail, entraînant une perte d'abonnés des fournisseurs de services d’AVH de gros. Bell Canada a également fait valoir qu'un préjudice irréparable sera causé, parce que les abonnés perdus sont difficiles à récupérer et vont probablement migrer vers d'autres services, provoquant une perte de revenus dans plusieurs gammes de produits.
  4. Les entreprises de câblodistribution ont précisé que les pertes d’une part de marché et les pertes pour le public imputables à une réduction des investissements ne sont ni quantifiables ni récupérables.
  5. Les entreprises de câblodistribution ont indiqué que les tarifs définitifs auraient pour conséquence que les concurrents gagneraient une part de marché en leur permettant d’établir des tarifs de gros qui empêchent la récupération des coûts basés sur la vitesse. Les entreprises de câblodistribution ont argué que cela minerait leur capacité à exiger des tarifs de détail qui permettent de récupérer les investissements basés sur la vitesse. En appui à cet argument, ils ont fait remarquer que les concurrents ont été en mesure d’offrir des tarifs de détail dans certaines régions où offrait un service à des tarifs avec lesquels Eastlink ne pouvait pas rivaliser.
  6. Les entreprises de câblodistribution ont aussi fait valoir que si une suspension n'est pas accordée dans l'attente de la fin de l'examen de la méthode utilisée pour établir les tarifs des services d'AHV de gros, les marchés des services de la large bande filaire au Canada pourraient subir une profonde distorsion et être fortement déstabilisés, ce qui causerait une coûteuse inefficacité et de l'incertitude pour tous les intervenants.
  7. Les ORCC ont précisé que les affirmations de Bell Canada concernant la distorsion du marché des services d'AHV de gros, les pertes majeures, les tarifs qui sont inférieurs aux coûts réels, et l'érosion de la base de clients de gros de la compagnie ne constituent pas un préjudice irréparable et sont hypothétiques. Les ORCC ont également précisé que de simples pertes financières ne représentent pas un préjudice irréparable.
  8. Les ORCC ont argué que les affirmations de Bell Canada, selon lesquelles la plupart, voire la totalité, des utilisateurs finals s’abonnant aux services fournis par l’entremise  du service d’AVH de gros de Bell Canada migreront vers des offres de services plus rapides, ne sont pas crédibles, parce qu'elles ne tiennent pas compte du fait qu'une grande partie des Canadiens ne sont actuellement pas abonnée à des services Internet de détail dont les vitesses dépassent 50 Mbps.
  9. Les ORCC ont également argué que les affirmations de Bell Canada, selon lesquelles les concurrents seront incités à vendre des services d'AHV de gros des entreprises de câblodistribution à des prix inférieurs, ne tiennent pas compte des coûts liés à la capacité que doivent payer les concurrents, lequel, pour les entreprises de câblodistribution, est plus du double du tarif mensuel de Bell Canada établi pour une capacité de 100 Mbps.
  10. Les ORCC ont fait valoir que les affirmations de Bell Canada, selon lesquelles les utilisateurs finals migreront vers les concurrents en raison de prix plus, bas ne sont pas fondées. En appui à ce point de vue, les ORCC ont précisé que le Bureau de la concurrenceNote de bas de page 4 a signalé que le prix est un facteur important dans le choix des consommateurs, mais que d'autres facteurs, pris ensemble, sont plus importants.
  11. Les ORCC ont aussi signalé que, lorsque les tarifs provisoires des services d'AHV de gros ont été révisés, ce qui comprenait une forte réduction des tarifs mensuels pour une capacité de 100 Mbps, la part du marché des abonnés aux services Internet de résidence n'a pas changé, en 2016 et en 2017.
  12. Les ORCC ont argué que contrairement à l'affirmation de Bell Canada, selon laquelle les pertes d'abonnés entraîneraient des pertes dans plusieurs gammes de produits, les abonnés à plusieurs produits sont moins susceptibles de changer de fournisseur de services en raison de contrats de service.
  13. Allstream a argué que les paiements rétroactifs de Bell Canada ne causeraient pas un préjudice irréparable à une compagnie aussi grande et diversifiée, et que cela vaut sans doute également pour les entreprises de câblodistribution.
  14. Bell Canada a répliqué que les circonstances ont considérablement changé entre le moment où les tarifs des services d'AHV de gros ont été établis comme provisoires et le moment où ils ont été rendus définitifs, et qu'on ne peut pas présumer que la part du marché ne changera pas beaucoup à la suite de l'application des tarifs définitifs établis dans l'ordonnance de télécom 2019-288.
  15. Bell Canada était d’accord avec les ORCC sur le fait que des pertes financières ne constituent pas un préjudice irréparable; toutefois un préjudice irréparable comprend les situations où une partie subira une perte permanente d’une part de marché ou des dommages irréparables à sa réputation commerciale. Bell Canada a argué qu'une perte de clients majeure et probablement permanente, advenant le refus d'une suspension, correspond à la définition de préjudice irréparable.
  16. Bell Canada a ajouté que les services offrant des vitesses plus élevées impliquent des coûts de capacité supérieurs à ceux des services offrant des vitesses basses. Bell Canada a argué que si les utilisateurs des forfaits offrant des vitesses élevées génèrent, en moyenne, plus de trafic par seconde, ils ne génèrent pas du trafic supplémentaire proportionnellement à la différence de vitesse, ce qui fait que les tarifs totaux pour l'accès et l'utilisation des services par câble sont plus attrayants.
Préjudice irréparable aux investissements
  1. Les entreprises de câblodistribution ont fait valoir que si une suspension n'est pas accordée dans l'attente de la fin de l'examen de la méthode utilisée pour établir les tarifs, les investissements subiront un préjudice irréparable. En appui à ce point de vue, les entreprises de câblodistribution ont présenté le rapport BrattleNote de bas de page 5, qui démontre que les tarifs définitifs nuiront considérablement à la capacité et des incitatifs des entreprises de câblodistribution à investir dans leur réseau, au détriment du service, de l'innovation et de la concurrence.
  2. Les entreprises de câblodistribution ont également fait référence au rapport du Bureau de la concurrence, qui selon elles, fournit la preuve concrète des effets négatifs sur la rentabilité et les investissements découlant des traitements réglementaires différents, surtout dans les régions rurales et éloignées où les coûts sont élevés, en marge des réseaux filaires existants. Les entreprises de câblodistribution ont argué que l'ordonnance de télécom 2019-288 multipliera incontestablement ces effets négatifs.
  3. Les ORCC ont argué que les conclusions du rapport Brattle ne sont pas fondées et, en appui à ce point de vue, ont présenté un rapportNote de bas de page 6 qui a conclu que le rapport Brattle n'établit pas la preuve d'une réduction des incitatifs à investir et formule des hypothèses erronées.
  4. Les ORCC ont fait valoir que le rapport du Bureau de la concurrence a fait une observation générale que l'impact négatif de l'établissement de tarifs de gros inappropriés sera vraisemblablement plus fort dans les régions où la population est peu dense et que le rapport ne s’est pas prononcé sur la question de savoir si les tarifs de gros ont été établis correctement.
  5. Les ORCC ont argué qu'il n'y a aucune raison de croire que l'impact négatif de l'ordonnance de télécom 2019-288 sur les flux de trésorerie d'exploitation des entreprises de câblodistribution, s'il y en a un, sera plus faible dans les régions où la population est peu dense. Les ORCC ont fait valoir que les concurrents se concentrent sur les marchés dans les régions très denses et que, par conséquent, l'ordonnance de télécom 2019-288 aura peu de répercussions sur les régions rurales et éloignées.
  6. Les entreprises de câblodistribution ont répliqué que les critiques formulées par les ORCC à l'endroit du rapport Brattle sont déplacées et non fondées. En appui à ce point de vue, elles ont déposé le rapport de réfutation BrattleNote de bas de page 7 qui indique que l'ordonnance de télécom 2019-288 provoquera une baisse drastique des revenus, et donc des fonds disponibles aux fins d'investissement.
  7. Les entreprises de câblodistribution ont également répliqué que le déploiement de réseaux dans les régions rurales et éloignées dépend des revenus dégagés dans les zones urbaines et est en partie financé par ceux-ci. Par conséquent, une baisse importante des revenus et des marges d'exploitation dans les régions où les concurrents sont concentrés aura un impact direct sur les fonds disponibles pour développer les services à large bande dans les régions rurales et éloignées.
Le préjudice irréparable invoqué n'est pas hypothétique
  1. Bell Canada et les entreprises de câblodistribution ont fait valoir que le préjudice invoqué n'était pas hypothétique et a été confirmé dans une ordonnance du juge Boivin à la Cour d'appel fédéraleNote de bas de page 8. Bell Canada a également fait valoir qu’une ordonnance du juge de Montigny à la Cour d’appel fédéraleNote de bas de page 9 soutenait ce point de vue.
  2. Les entreprises de câblodistribution ont argué que le préjudice irréparable n’est pas hypothétique, puisqu’Eastlink a déjà fortement réduit ses investissements en immobilisations prévus en 2019 et que Vidéotron a éliminé son service d'accès Internet de détail offrant la vitesse la plus élevée. Les entreprises de câblodistribution ont aussi précisé que Shaw avait récemment annoncé qu'elle avait modifié son plan de lancement d'un nouveau niveau de service Internet offrant une vitesse plus élevée à cause des tarifs établis dans l'ordonnance de télécom 2019-288, et que d'autres entreprises de câblodistribution réévaluaient leurs plans d'immobilisations.
  3. Les entreprises de câblodistribution ont fait valoir qu'aucun nouvel élément de preuve qui modifie les conclusions tirées de l’ordonnance du juge Boivin n'a été déposé.
  4. Les ORCC ont indiqué que Bell Canada n'a pas démontré avec des éléments de preuve le préjudice présumé et qu'un préjudice hypothétique ne constitue pas un préjudice irréparable.
  5. Les ORCC et TekSavvy ont argué qu'il n'y a aucune corrélation entre l'ordonnance de télécom 2019-288 et l'élimination du service d'accès Internet de détail de Vidéotron offrant la vitesse la plus élevée, car les rapports sur les valeurs mobilières de Vidéotron ont indiqué que la compagnie avait un financement suffisant pour couvrir les besoins en liquidités pour les investissements en immobilisations. 
  6. Les ORCC ont signalé que les affirmations des entreprises de câblodistribution, selon lesquelles les investissements seront réduits et subiront par conséquent un préjudice irréparable, sont hypothétiques et ne correspondent pas à un tel préjudice.
  7. Les ORCC ont ajouté que les demandes ne contenaient aucune estimation du préjudice pécuniaire et, comme dans le cas d’une demande antérieure similaireNote de bas de page 10, ne démontraient pas un préjudice irréparable.
  8. Les entreprises de câblodistribution ont ajouté que l'élimination du service d'accès Internet de détail de Vidéotron offrant la vitesse la plus élevée était imputable à l'ordonnance de télécom 2019-288, et que le service a été éliminé de manière à ce qu'il n'y ait pas un trop gros impact sur les besoins en liquidités pour les investissements.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Le second critère du test RJR-MacDonald exige que la partie qui demande une suspension démontre qu’elle subira un préjudice irréparable advenant le refus de la suspension et que le préjudice n’est pas hypothétique. Cette portion du test requiert une analyse de la nature du préjudice, plutôt que de la gravité. Un préjudice est plus susceptible d'être irréparable lorsqu'il y a une perte non quantifiable ou une perte que le demandeur n'est pas certain de pouvoir récupérer, ou une perte qu’une ordonnance définitive peut ne pas être en mesure de corriger.
  2. En ce qui concerne le préjudice irrécupérable concernant les paiements rétroactifs irrécupérables aux concurrents, Bell Canada a fourni des éléments de preuve historiques pour étayer son affirmation voulant que certains concurrents puissent être financièrement incapables de rembourser les montants dus découlant de modifications des tarifs définitifs approuvés si le Conseil approuve entièrement ou partiellement les demandes de révision et de modification.
  3. Bien que les intervenants aient soulevé la possibilité que la portion des paiements rétroactifs irrécupérables pour les concurrents à risque soit petite et que, par conséquent, le risque de non-paiement soit négligeable par rapport au montant total des paiements rétroactifs, le Conseil fait remarquer que le test de préjudice irréparable exige seulement l'analyse de la nature du préjudice et non de sa gravité, ce qui est plutôt considéré à la troisième étape du test.
  4. En ce qui concerne le processus de recouvrement utilisé par Bell Canada auprès de concurrents incapables de rembourser les montants dus, aucun élément de preuve n'a été soumis pour démontrer que le processus découle de recouvrements effectués auprès de concurrents qui ont été débranchés pour cause de non-paiement. Le Conseil estime que le risque de ne pas être en mesure de recouvrer une créance auprès d'un concurrent qui a été débranché pour cause de non-paiement est élevé et qu'il est très probable que les paiements rétroactifs ne puissent être recouvrés. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que le préjudice identifié est irréparable.
  5. Le Conseil estime que le préjudice n’est pas de nature hypothétique, puisque les concurrents débranchés pour cause de non-paiement qui étaient admissibles à des paiements rétroactifs, qu'ils soient petits ou grands, ne pourraient probablement pas rembourser les montants dus et Bell Canada a fourni les éléments de preuve montrant le nombre de concurrents qui ont été débranchés pour cause de non-paiement et le nombre d'entre eux ayant reçu des avis de non-paiement au cours des 12 derniers mois.
  6. Le Conseil conclut ainsi qu’en ce qui concerne les paiements rétroactifs irrécupérables, les demandeurs ont démontré i) un préjudice irréparable, et ii) que le préjudice n’est pas hypothétique. Par conséquent, le Conseil estime que les demandes ont répondu au deuxième critère du test RJR-MacDonald.
  7. Étant donné que le test a été satisfait en ce qui concerne les paiements rétroactifs, le Conseil estime qu’une analyse supplémentaire des autres préjudices soumis n’est pas nécessaire.

Critère iii) : prépondérance des inconvénients

Positions des parties
  1. Bell Canada et les entreprises de câblodistributions ont fait valoir que la prépondérance des inconvénients jouait en faveur d'une suspension, étant donné le préjudice grave et irréparable qu'elles subiraient si une suspension était refusée.
  2. Bell Canada a également fait valoir qu'aucun intérêt ne subirait de préjudice si une suspension était accordée, et qu'une suspension serait bénéfique à l'intérêt public.
  3. Bell Canada et les entreprises de câblodistribution ont argué que la mise en application de l’ordonnance de télécom 2019-288 n'est pas urgente et qu'un bref report ne causerait aucun préjudice aux concurrents, puisque plus de trois années se sont écoulées entre le moment où les tarifs des services d'AHV de gros groupés ont été établis et celui où l'ordonnance de télécom 2019-288 a été publiée.
  4. Bell Canada a également indiqué que les concurrents ont acquis une part considérable du marché pendant la période où les tarifs étaient provisoires, et que rien ne prouve qu'un concurrent subirait un préjudice si la réception des paiements rétroactifs ou la mise en application des tarifs définitifs étaient retardées.
  5. Bell Canada a ajouté qu’un retard dans le versement d’un paiement unique forfaitaire dans l'attente du règlement de la question ne causerait pas un grave préjudice, comme la Cour d'appel fédérale l'a déterminé dans la cause SODRAC.
  6. En ce qui concerne la promotion de l'intérêt public, Bell Canada a précisé que si les demandes de révision et de modification étaient accueillies et qu'une suspension était refusée, les fournisseurs de services d'AHV de gros reverraient leurs dépenses d’immobilisations dans l'infrastructure, ce qui créerait une lacune dont les Canadiens des régions rurales et éloignées souffriraient le plus. Bell Canada a aussi soutenu que les conséquences que subiraient les fournisseurs de services d'AHV de gros et les Canadiens seraient graves et probablement irréversibles.
  7. Les entreprises de câblodistribution ont indiqué que, si une suspension était refusée, les répercussions négatives de l'ordonnance de télécom 2019-288 sur eux et sur l'intérêt public, causeraient des dommages irréparables à l’investissement efficace et durable, à l’innovation et à la concurrence.
  8. Les entreprises de câblodistribution ont fait valoir que l'ordonnance du juge Boivin a conclu que la prépondérance des inconvénients jouait en faveur du maintien des tarifs provisoires, et qu'aucun nouvel élément de preuve qui modifiant cette conclusion n'avait été présenté.
  9. La BCBA a précisé que les tarifs définitifs établis dans l'ordonnance de télécom 2019-288 n'entraveraient pas le développement de l'infrastructure au Canada, et que les exploitants des régions rurales devraient toujours affronter la concurrence féroce des services fournis par les entreprises de services locaux concurrentiels dans ces régions.
  10. Allstream et TekSavvy ont signalé que les concurrents subiront un préjudice plus grave que le préjudice présumé aux demandeurs si l’ordonnance de télécom 2019-288 est suspendue. Allstream et TekSavvy ont également signalé que Bell Canada et les entreprises de câblodistribution subissent un moins grand préjudice comparativement aux concurrents, toute proportion gardée, et que ce préjudice n’est presque certainement pas irréparable.
  11. Distributel a indiqué que les avantages que l'ordonnance de télécom 2019-288 a apportés aux concurrents qui sont destinés à profiter aux clients tardent à se matérialiser à cause des retards dans la mise en application de l'ordonnance.
  12. Les ORCC ont fait valoir que, dans le pire des cas, Bell Canada et les entreprises de câblodistribution subiront des inconvénients négligeables si une suspension n'est pas accordée, alors que si une suspension est accordée, cela causera un préjudice majeur sous la forme d’une prolongation des distorsions sur le marché qui ont désavantagé les concurrents depuis des années tout en retardant les paiements rétroactifs aux concurrents. Plus précisément, les ORCC ont argué qu’en revenant aux tarifs provisoires qui ont été jugés injustes et déraisonnables, les concurrents continueraient de payer les tarifs qui entravent le libre jeu du marché depuis des années, et donc que la distorsion du marché serait maintenue.
  13. En ce qui concerne le préjudice causé par le report des paiements rétroactifs aux concurrents, les ORCC ont argué que les paiements rétroactifs remontent à 2016, et qu'une suspension ne ferait que prolonger cette situation et ferait augmenter les paiements rétroactifs ultérieurs, sans intérêts à payer, et entraînerait d'importants coûts de renonciation, aggravant les inconvénients que subissent déjà les concurrents.
  14. Les CORC ont aussi soutenu que la situation de domination de Bell Canada et des entreprises de câblodistribution sur le marché leur permet de surmonter tout inconvénient financier transitoire, alors que les concurrents seront disproportionnellement touchés.
  15. Les ORCC ont fait valoir qu'il est dans l'intérêt public de refuser la demande de suspension, parce que certains concurrents ont immédiatement réduit leurs tarifs de détail en réaction à l'ordonnance de télécom 2019-288. Les ORCC ont fait remarquer que plus de 125 000 Canadiens ont envoyé des lettres demandant la mise en application de cette ordonnance.
  16. Les ORCC ont argué que les affirmations, selon lesquelles l'intérêt public sera touché négativement par la réduction des investissements, ne sont pas crédibles. De telles affirmations ne tiennent pas compte du fait que d'autres fournisseurs et programmes gouvernementaux compenseront la réduction des investissements de Bell Canada et des entreprises de câblodistribution, le cas échéant.
  17. Bell Canada a fait valoir que le critère de la prépondérance des inconvénients, lorsque toute chose est par ailleurs égale, incite à la prudence et au maintien du statu quo.  
  18. Bell Canada a argué qu'aucun intervenant n'a fourni d'élément de preuve convaincant pour montrer comment il serait incommodé par le maintien des tarifs provisoires pendant une courte période de temps, à savoir jusqu'à ce que le Conseil rende ses conclusions relativement aux demandes, particulièrement depuis que les tarifs provisoires sont en place depuis plus de trois ans.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Le troisième critère exige qu'une évaluation soit faite dans le but de déterminer quelles parties subiraient le plus grand préjudice selon que l'on accorde ou non une suspension, jusqu'à ce qu'une conclusion définitive soit rendue relativement aux questions en litige. En outre, l’évaluation à ce stade prend en compte l'intérêt public et l'une ou l'autre des parties peut soulever des arguments concernant le préjudice causé à l'intérêt public.
  2. Le Conseil estime que Bell Canada a démontré que si une suspension est refusée, Bell Canada subirait un préjudice irréparable sous la forme de paiements rétroactifs irrécouvrables versés à certains concurrents. Cependant, Bell Canada n'a pas quantifié ou estimé les remboursements rétroactifs qui seraient irrécouvrables. Le Conseil fait remarquer que plusieurs intervenants ont identifié que les parts du marché des abonnés du service Internet haute vitesse de résidence sont demeurées en grande partie les mêmes entre 2016 et 2017, lorsque les tarifs provisoires pour ces services ont été révisés. Par conséquent, le Conseil est d’avis que, pendant qu’il examine les demandes de révision et de modification, la part du marché des abonnés des concurrents ne sera probablement pas affectée négativement sur une courte période de temps.
  3. La part du marché des abonnés des concurrents sur une plus longue période de temps, soit de 2014 à 2018, a augmenté chaque annéeNote de bas de page 11. Le Conseil estime que puisque que les concurrents ont gagné une part du marché, pendant la période durant laquelle les tarifs étaient provisoires, un report de la mise en application des tarifs définitifs établis dans l'ordonnance de télécom 2019-288 ne leur causera probablement pas de préjudice indu en attendant l’achèvement de l’examen du Conseil des demandes de révision et de modification.  
  4. En ce qui concerne les préoccupations relatives au report du versement du paiement forfaitaire en attendant la conclusion du litige, le Conseil estime qu’un tel report n’équivaudrait pas à un préjudice grave.
  5. Le Conseil estime qu’il est dans l’intérêt public de mettre en application ses conclusions et qu’en se faisant, cela mène généralement à une certitude réglementaire. Toutefois, la Cour d'appel fédérale a ordonné la suspension de la mise en application des tarifs définitifs établis dans l'ordonnance de télécom 2019-288, qui étaient en vigueur de septembre 2019 à septembre 2020. Pendant cette période, une évaluation des demandes de révision et de modification était en cours et les tarifs définitifs n’avaient pas été établis.
  6. Par conséquent, le Conseil estime que le maintien de la suspension permettrait un examen plus approfondi des demandes de révision et de modification, et mènerait ainsi à un résultat définitif plus certain, évitant des perturbations supplémentaires au marché pendant cette période.
  7. Étant donné i) que Bell Canada et les entreprises de câblodistribution ont démontré qu'une question sérieuse doit être jugée; ii) qu’un préjudice irréparable surviendrait si une suspension est accordée; iii) les concurrents ne subiraient pas un préjudice plus grave si une suspension était accordée; et iv) qu’il est dans l’intérêt public d’avoir une certitude réglementaire concernant cette question, le Conseil estime que la prépondérance des inconvénients favorise d’accorder la suspension de l’ordonnance de télécom 2019-288.
  8. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que les demandeurs ont répondu au troisième critère du test RJR-MacDonald.

Conclusion

  1. Compte tenu des conclusions que les demandeurs ont répondu aux trois critères du test RJR-MacDonald, le Conseil approuve les demandes de Bell Canada et des entreprises de câblodistribution de suspendre la mise en application des tarifs définitifs établis dans l’ordonnance de télécom 2019-288 en attendant ses décisions définitives sur les demandes de révision et de modification.

Instructions

  1. Le Gouverneur général en conseil a récemment émis les Instructions de 2019Note de bas de page 12. Les Instruction de 2019 précisent que dans l’exercice des pouvoirs et fonctions que lui confère la Loi, le Conseil devrait examiner comment ses décisions peuvent, le cas échéant, promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation.
  2. De plus, dans ses décisions, le Conseil devrait démontrer sa conformité avec les Instructions de 2019 et préciser comment ces décisions peuvent promouvoir la concurrence, l’abordabilité, les intérêts des consommateurs et l’innovation.
  3. Le Conseil estime que sa conclusion dans le présent avis de suspendre la mise en application des tarifs définitifs établis dans l’ordonnance de télécom 2019-288 est conforme aux sous-alinéas 1(a)i), ii), iii) et v) des Instructions de 2019, qui énoncent que le Conseil devrait examiner la mesure dans laquelle ses décisions  
    • encouragent toutes formes de concurrence et d’investissement;
    • favorisent l’abordabilité et des prix plus bas, notamment lorsque les fournisseurs de services de télécommunication exercent un pouvoir de marché;
    • font en sorte qu’un accès abordable à des services de télécommunication de haute qualité soit disponible dans toutes les régions du Canada, notamment les régions rurales;
    1. réduisent les obstacles à l’entrée sur le marché et à la concurrence pour les fournisseurs de services de télécommunication, qu’ils soient nouveaux, régionaux, ou plus petits que les fournisseurs de services titulaires nationaux.
  4. Plus particulièrement, le Conseil estime que ses conclusions de suspendre la mise en application des tarifs définitifs établis dans l’ordonnance de télécom 2019-288
    i) ne changera rien aux conditions du marché en place depuis 2016, apportant de la stabilité à la concurrence et aux investissements dans le marché des services Internet haute vitesse, et ii) fera en sorte que les tarifs des services d'AHV de gros groupés sont correctement examinés pour s'assurer qu'ils sont justes et raisonnables.
  5. De plus, les Instruction de 2006Note de bas de page 13 exigent que le Conseil, dans la mise en œuvre des objectifs stratégiques énoncés à l'article 7 de la Loi (les objectifs stratégiques) se fie, dans la plus grande mesure du possible, au libre jeu du marché comme moyen d'atteindre les objectifs stratégiques. Par ailleurs, lorsqu'il a recours à la réglementation, le Conseil devrait prendre des mesures qui sont efficaces et proportionnelles aux buts et qui ne font obstacle au libre jeu du marché concurrentiel que dans la mesure minimale nécessaire afin d'atteindre les objectifs stratégiques.
  6. Le Conseil estime que sa conclusion de suspendre la mise en application des tarifs définitifs établis dans l’ordonnance de télécom 2019-288 est conforme aux Instructions de 2006, plus précisément les sous-alinéas 1(a)ii) et 1(b)iii), parce qu’elle fait en sorte que les tarifs des services d’AHV de gros groupés sont examinés correctement pour garantir qu’ils sont justes et raisonnables, qu’elle évite de perturber les mesures en vertu desquelles le marché est exploité depuis 2016, et qu’elle le fait de manière efficace et proportionnelle et neutre sur le plan de la concurrence.

Secrétaire général

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