Décision de radiodiffusion CRTC 2020-216

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Référence : 2019-102

Ottawa, le 6 juillet 2020

Dossier public : 1011-NOC2019-0102

Conclusions sur la capacité du marché et la pertinence de lancer un appel de demandes radio pour desservir Vancouver

Le Conseil conclut que le marché de Vancouver (Colombie-Britannique) ne peut pas accueillir une autre station de radio à l’heure actuelle. Par conséquent, le Conseil retournera la demande déposée par Rogers Media Inc. en vue d’obtenir une licence de radiodiffusion afin d’exploiter une station de radio commerciale à Vancouver (Colombie-Britannique).

La présente décision tient compte du dossier public de la présente demande qui a été complété avant le début de la crise actuelle liée à la pandémie de la COVID-19.

Introduction

  1. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2019-102, le Conseil a annoncé qu’il avait reçu une demande de Rogers Media Inc. (Rogers) en vue d’obtenir une licence de radiodiffusion afin d’exploiter une station de radio commerciale pour desservir Vancouver (Colombie-Britannique).
  2. Le marché radiophonique de Vancouver est situé au sud-ouest de la Colombie-Britannique, environ 85 kilomètres à l’ouest de Chilliwack. Il partage les mêmes limites que la région métropolitaine de recensement de Vancouver. Le marché est actuellement desservi par 22 stations commerciales (13 FM et 9 AM), desquelles 16 sont des stations de langue anglaise et six sont des stations ethniques.
  3. Conformément à la politique réglementaire de radiodiffusion 2014-554 (la Politique), le Conseil a sollicité des observations sur la capacité du marché de Vancouver à accueillir une nouvelle station et sur la pertinence de publier un appel de demandes pour de nouvelles stations afin de desservir ce marché. La Politique prévoit que le Conseil évalue plusieurs facteurs tels que la capacité du marché, la disponibilité ou la pénurie du spectre et l’intérêt démontré à desservir le marché avant de prendre l’une des décisions suivantes :
    • publier la demande pour qu’elle soit examinée lors de la phase sans comparution d’une audience publique;
    • publier un appel de demandes;
    • déterminer que le marché ne peut pas accueillir une autre station, retourner la demande et publier une décision énonçant sa conclusion.

Interventions et réplique

  1. Le Conseil a reçu une intervention et une réplique de Rogers, ainsi qu’une intervention en opposition conjointe des titulaires Bell Média inc., Corus Entertainment Inc. et Groupe Stingray inc. (les Intervenants), de même qu’une expression d’intérêt à desservir le marché de la part d’I.T. Productions Ltd. (I.T. Productions).

Interventions

  1. Dans son intervention, Rogers soutient que sa demande ne devrait pas entraîner un appel de demandes étant donné qu’en tant que titulaire exploitant des stations de radio qui desservent présentement Vancouver, sa présence est déjà établie dans le marché. De plus, elle soutient qu’il n’y aurait pas d’incidences sur l’équilibre concurrentiel des stations de radio desservant Vancouver. Rogers fait remarquer que la demande pour une nouvelle licence pour desservir Vancouver est purement administrative et n’aurait pas l’incidence d’une véritable nouvelle station dans le marché puisque la station est exploitée dans les studios de Rogers à Vancouver depuis 2000, tel qu’énoncé dans la décision de radiodiffusion 2000-445. Rogers ajoute qu’elle a l’usage exclusif de la fréquence qu’elle utilise actuellement pour desservir Vancouver et n’a pas l’intention d’y renoncer, peu importe le dénouement de la présente demande. Finalement, Rogers concède que les revenus globaux et les niveaux de recrutement dans le marché de Vancouver continuent de décliner. Par contre, selon Rogers, ces déclins sont le résultat de fermetures et d’échecs de la mise en exploitation de stations.
  2. Dans leur intervention, les Intervenants précisent que les conditions actuelles du marché de Vancouver sont insuffisantes pour accueillir une nouvelle station de radio commerciale grand public puisque les revenus, plus particulièrement les revenus de publicité locale, sont en déclin. Ils projettent que le déclin se poursuivra pour passer de la radio terrestre aux médias numériques. Finalement, ils citent les difficultés et la fermeture de Roundhouse Radio comme indicateur clair que le marché ne peut pas accueillir une nouvelle station à l’heure actuelle.
  3. Les Intervenants déclarent par ailleurs que si le Conseil choisit d’accorder une nouvelle licence commerciale, elle ne devrait pas être émise à Rogers, qui a déjà tenté d’entrer sur le marché de Vancouver par de moyens détournés, puisque ce service a été mis en cause à deux reprises pour n’avoir pas fourni une programmation locale pertinente pour les régions de Chilliwack et Fraser Valley, comme énoncé dans les décisions de radiodiffusion 2007-148 et 2011-539. Ils indiquent également que le passage d’un émetteur de rediffusion de sa station de Chilliwack à une station de Vancouver desservant tout le marché représenterait l’introduction d’un nouveau concurrent pour les revenus de publicité locale de Vancouver et d’un concurrent fort pour l’auditoire de Vancouver.
  4. I.T. Productions, titulaire de CJRJ à Vancouver, déclare que si le Conseil émet un appel de demandes pour Vancouver, elle souhaite déposer une demande en vue d’utiliser la fréquence 106,9 FM, une fréquence non protégée présentement utilisée par une station de faible puissance à Surrey.

Réplique

  1. Dans sa réplique, Rogers convient avec les Intervenants que le marché de Vancouver ne peut pas accueillir un nouvel arrivant commercial, mais est en profond désaccord avec la qualification de la demande comme une tentative détournée d’entrer dans le marché de Vancouver, et réfute l’affirmation selon laquelle CKKS-FM-2, si elle est exploitée en tant qu’émetteur d’origine plutôt que comme émetteur de rediffusion, aurait une incidence importante sur le marché de Vancouver.
  2. En outre, Rogers soutient que même si les indicateurs économiques suggèrent que Vancouver ne peut pas accueillir une station de radio grand public entièrement nouvelle pour l’instant, CKKS-FM-2 sollicite déjà de la publicité dans le marché de Vancouver et offre actuellement de la programmation locale qui représente la communauté de Vancouver.
  3. Rogers soutient aussi que l’expression d’intérêt d’I.T. Productions et la demande de Rogers de convertir CKKS-FM-2 en station d’origine ne devrait pas nécessiter un appel de demandes concurrentielles puisque rien n’indique qu’un tel appel pourrait donner lieu à d’autres expressions d’intérêt.
  4. Rogers fait remarquer que les Intervenants en opposition partagent la majorité des parts d’écoute et de revenus du marché et surpassent Rogers à la fois en termes de revenus et de rentabilité. Rogers fait également remarquer qu’aucun des petits groupes de diffusion indépendants qui exercent actuellement leurs activités à Vancouver n’est intervenu dans la présente instance.

Analyse du Conseil

  1. Selon le rapport du Conference Board of Canada concernant les perspectives métropolitaines pour l’hiver 2020, la croissance économique et l’emploi au niveau local et provincial ont été relativement forts au cours des dernières années. Toutefois, même avant la pandémie, les indicateurs économiques prévus étaient moins optimistes que les récents sommets historiques.
  2. Malgré un historique de forte croissance économique, le marché de la radio de Vancouver a présenté des marges de profits sous la moyenne nationale avec des revenus en baisse. En 2018, les marges de profits globales du marché se situaient au neuvième rang des dix marchés désignés les plus peuplés.
  3. La région de Vancouver est actuellement desservie par une grande variété de groupes et de services de radio, avec un certain nombre de nouveaux services qui ne sont pas encore en exploitation. Aussi, la syntonisation de Vancouver est en déclin, avec très peu de syntonisation hors marché à partir de laquelle on peut rapatrier des auditeurs.
  4. Rogers, qui exploite trois stations commerciales dans le marché, sans compter l’émetteur de rediffusion CKKS-FM-2, représente actuellement un part proportionnelle des revenus et des auditeurs sur le marché.
  5. Malgré que le demandeur propose un service qui est déjà présent dans le marché, le Conseil est d’avis que Rogers minimise de façon significative l’incidence potentielle sur le marché de la conversion de son émetteur de rediffusion en station d’origine. Le Conseil fait remarquer, par exemple, que le revenu moyen par station pour une station FM commerciale de langue anglaise appartenant à un groupe à Vancouver en 2018 était environ le double du montant prévu par Rogers pour ce service.
  6. La seule autre expression d’intérêt provient d’I.T. Productions, propriétaire d’un service de radio ethnique existant à Vancouver, qui indique qu’elle prévoit soumettre une demande si le Conseil émet un appel de demandes. Par contre, aucune preuve de la capacité du marché pour un autre service n’a été fournie et le Conseil a accordé deux nouvelles licences pour des stations de radio ethnique dans la décision de radiodiffusion 2016-464, dont l’une des stations a récemment été mise en exploitation et l’autre n’est pas encore commencé ses activités. Par conséquent, il n’y a aucune preuve de la capacité du marché pour un autre service à l’heure actuelle.
  7. Bien que le dossier public de la présente instance ait été fermé avant la pandémie de la COVID-19, le Conseil note que la pandémie a eu des incidences négatives considérables sur l’économie canadienne.
  8. Bien qu’il n’existe aucune donnée sur l’effet de la pandémie sur le marché radiophonique de Vancouver pour le moment, le Conseil estime qu’il est probable que celle-ci exacerbera davantage les revenus du marché qui sont déjà en baisse.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil conclut que le marché radiophonique de Vancouver ne peut pas accueillir une autre station de radio commerciale pour le moment. Par conséquent, le Conseil retournera la demande déposée par Rogers Media Inc. en vue d’obtenir une licence de radiodiffusion afin d’exploiter une station de radio commerciale pour desservir Vancouver.
  2. De plus, conformément à son approche établie dans la Politique, le Conseil ne sera généralement pas disposé à accepter des demandes pour de nouvelles stations de radio commerciale en vue de desservir le marché radiophonique de Vancouver pendant les deux ans suivant la date de la présente décision.

Secrétaire général

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