Décision de télécom CRTC 2019-398

Version PDF

Ottawa, le 5 décembre 2019

Dossier public : 8662-D78-201902312

Comité consultatif sur les services sans fil des Sourds du Canada – Demande de révision et de modification de l’ordonnance de télécom 2018-437

Le Conseil refuse une demande du Comité consultatif sur les services sans fil des Sourds du Canada (CSSSC) en vue de réviser et de modifier l’ordonnance de télécom 2018-437, dans laquelle le Conseil a attribué au CSSSC la moitié des frais qu’il avait demandés relativement à un sondage qu’il avait mené. Le Conseil conclut qu’il n’existe aucun doute réel quant au bien-fondé de la décision qu’il a rendue dans cette ordonnance.

Contexte

  1. Dans l’ordonnance de télécom 2018-437, le Conseil a attribué au Comité consultatif sur les services sans fil des Sourds du Canada (CSSSC) une partie des frais que celui-ci avait réclamés pour sa participation à l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2018-466 (instance principale), dans laquelle le Conseil a examiné le cadre réglementaire régissant les services de relais téléphonique (SRT) fondés sur le texte.
  2. Plus précisément, le Conseil a attribué au CSSSC la moitié des frais qu’il avait réclamés relativement à un sondage qu’il a mené en langue des signes américaine (ASL), en anglais, en français et en langue des signes québécoise (LSQ). Le sondage portait sur les points de vue des Canadiens sourds, sourds-aveugles et malentendants sur les questions liées aux SRT. Bien que le Conseil ait déterminé que le CSSSC l’avait aidé à mieux comprendre les expériences et les points de vue des membres de cette communauté en ce qui a trait aux SRT, il n’a pas conclu que les frais totaux réclamés pour le sondage étaient nécessaires ou raisonnables.
  3. Le Conseil a déterminé que la complexité de l’instance principale ne justifiait pas le nombre total d’heures réclamées par le CSSSC relativement au sondage et au rapport connexe, notant que ce nombre d’heures dépassait de beaucoup les heures totales réclamées par les divers participants et les frais connexes accordés à ces derniers dans le cadre d’instances semblables, plus précisément celles qui concernent les services de relais vidéo (politiques réglementaires de télécom 2014-187 et 2014-659 [collectivement les instances du SRV]). De plus, le Conseil a estimé que certaines sections du sondage et du rapport connexe n’abordaient pas directement les questions qui relevaient du cadre de l’instance principale. Plus précisément, certaines sections du sondage et du rapport connexe portant sur les appels de téléscripteur à téléscripteur débordaient du cadre de l’instance.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande du CSSSC, datée du 2 mai 2019Note de bas de page 1, dans laquelle le CSSSC lui demandait de réviser et de modifier l’ordonnance de télécom 2018-437 de façon à lui attribuer le montant total des frais qu’il avait réclamés quant au sondage. Subsidiairement, le CSSSC a fait valoir que le Conseil devrait lui accorder 98,4 % de ses frais associés au sondage.
  2. Dans sa demande, le CSSSC a fait valoir que les questions de son sondage qui portaient sur les appels de téléscripteur à téléscripteur comportaient une logique des enchaînements pour vérifier que chaque répondant avait un téléscripteur avant de poser des questions sur le service de relais par téléscripteur. Le CSSSC a soutenu qu’une réduction de 50 % de ses frais associés au sondage signifiait que la moitié du sondage et du rapport connexe n’étaient consacrés qu’aux appels de téléscripteur à téléscripteur, ce qui, selon lui, n’était pas appuyé par les faits dont le Conseil était saisi. Le CSSSC a fait valoir que, si le Conseil ne lui accorde pas le montant total des frais associés au sondage qu’il avait demandé, le Conseil devrait alors réduire ces coûts de 1,6 % pour refléter le pourcentage de son rapport consacré aux appels de téléscripteur à téléscripteur.
  3. Le CSSSC a également soutenu que sans son sondage et son rapport connexe, le Conseil n’aurait pas tiré profit des renseignements recueillis auprès des 437 répondants au sondage et que l’issue de l’instance principale aurait très probablement été différente sans son travail.
  4. Le Conseil a reçu des interventions de Bell Canada, de l’Association des Sourds du Canada (ASC), de la Deafness Advocacy Association Nova Scotia (DAANS) et de Maple Communications Group Inc. (Maple) concernant la demande du CSSSC.

Critères de révision et de modification

  1. Aux termes de l’article 62 de la Loi sur les télécommunications (Loi), le Conseil peut, sur demande ou de sa propre initiative, réviser, annuler ou modifier ses décisions, ou entendre à nouveau une demande avant d’en décider.
  2. Le Conseil a précisé, dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, les critères qu’il utiliserait pour évaluer les demandes de révision et de modification présentées en application de l’article 62 de la Loi. En particulier, le Conseil a indiqué que les demandeurs doivent démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale, résultant, par exemple : i) d’une erreur de droit ou de fait, ii) d’un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision, iii) du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans l’instance initiale ou iv) d’un nouveau principe découlant de la décision.

Le Conseil a-t-il commis une erreur de droit ou de fait dans l’ordonnance de télécom 2018-437, de sorte qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de sa décision d’attribuer au CSSSC la moitié des frais réclamés concernant le sondage?

Positions des parties

  1. En général, l’ASC, la DAANS et Maple ont appuyé l’argument du CSSSC selon lequel une réduction de 50 % des coûts associés au sondage était disproportionnée, compte tenu du fait que le sondage du CSSSC comprenait un nombre limité de questions relatives aux appels de téléscripteur à téléscripteur et que le rapport connexe ne comprenait que quelques paragraphes traitant de cette question.
  2. La DAANS a ajouté que les 443,75 heures réclamées par le CSSSC dans sa demande initiale d’attribution de frais ne sont pas attribuables à la complexité des questions couvertes par l’instance principale. Ces heures étaient plutôt attribuables à la nécessité de mener un sondage quadrilingue en anglais/ASL simple et en français/LSQ simple afin d’obtenir un ensemble de points de vue pertinents des Canadiens sourds, sourds-aveugles et malentendants pour contribuer au dossier de l’instance principale.
  3. Bell Canada a fait valoir que le CSSSC n’a abordé qu’une seule des raisons pour lesquelles le Conseil a réduit de 50 % le montant des frais attribués au CSSSC, à savoir que les sections du sondage et du rapport connexe portant sur les appels de téléscripteur à téléscripteur débordaient du cadre de l’instance. Bell Canada a indiqué que le Conseil avait également réduit les frais attribués au CSSSC au motif que la complexité de l’instance principale ne justifiait pas le montant total réclamé et que ce montant total était excessif dans les circonstances. Bell Canada a soutenu que, puisque le CSSSC n’a pas abordé ce motif dans sa demande ni justifié le caractère raisonnable du temps réclamé dans le contexte du sondage et du rapport connexe, le CSSSC n’avait pas démontré de doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance.

Résultats de l’analyse du Conseil

Sections du sondage qui débordent du cadre
  1. Dans l’ordonnance de télécom 2018-437, le Conseil a indiqué que le CSSSC avait satisfait aux critères d’attribution de frais et que certaines sections du sondage l’ont aidé à mieux comprendre les questions examinées. Toutefois, le Conseil a noté qu’il faut veiller à ce que le montant total des coûts engagés soit nécessaire et raisonnable dans le cadre de l’instance, comme l’exige le paragraphe 70(2) des Règles de pratique et de procédure du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (Règles de procédure).
  2. En vue d’établir si le temps que le CSSSC a consacré était excessif ou non, le Conseil a tenu compte de certains des facteurs énumérés dans les Lignes directrices pour l’évaluation des demandes d’attribution de frais (Lignes directrices), établies dans la politique réglementaire de télécom 2010-963, notamment la complexité de l’instance par rapport au temps réclamé et aux frais connexes attribués dans le cadre d’instances similaires. De plus, le Conseil a déterminé que des parties du sondage débordaient du cadre de l’instance principale.
  3. Bien que le Conseil ait déterminé que certaines sections du sondage n’abordaient pas les questions visées par l’instance, il ne s’agissait pas de la seule raison que le Conseil a donnée dans son évaluation pour réduire les frais associés au sondage du CSSSC. Par conséquent, l’argument du CSSSC, selon lequel une réduction de 50 % des frais associés au sondage donne à penser que la moitié du sondage et du rapport connexe ne portaient que sur les appels de téléscripteur à téléscripteur, ne tient pas compte de l’analyse supplémentaire effectuée par le Conseil. De plus, la réduction proposée de 1,6 % des frais associés au sondage qui, selon le CSSSC, reflète les sections du rapport connexe qui débordent du cadre, ne tient pas compte du fait que la réduction n’était pas uniquement liée à cette question.
  4. Par conséquent, le Conseil estime que son évaluation des sections du sondage et du rapport connexe qui débordent du cadre dans le contexte de la réduction globale des frais du CSSSC ne constitue pas une erreur de fait qui pourrait soulever un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2018-437.
Complexité de l’instance et considérations en matière d’accessibilité
  1. Pour évaluer si les frais sont nécessaires et raisonnables, le Conseil a indiqué, dans l’ordonnance de télécom 2018-437, qu’il tient compte de toutes les demandes d’attribution de frais compte tenu de leurs circonstances uniques. Le Conseil a également reconnu que le CSSSC en particulier, en tant qu’organisme qui met l’accent sur les questions d’accessibilité, pourrait devoir engager des frais supplémentaires pour représenter les abonnés intéressés. Toutefois, le Conseil a soutenu à la fois dans les Lignes directrices et dans le contexte d’ordonnances d’attribution de frais particulières, y compris dans le contexte de l’ordonnance en question, que les frais réclamés doivent toujours être engagés de manière nécessaire et raisonnable dans le cadre de l’instance principale, conformément au paragraphe 70(2) des Règles de procédure.
  2. En ce qui concerne l’argument de la DAANS selon lequel le nombre d’heures réclamées relativement aux frais du sondage était attribuable à la nécessité de mener un sondage quadrilingue plutôt qu’à la complexité de l’instance, le Conseil avait tenu compte des considérations en matière d’accessibilité et des circonstances uniques du CSSSC pour déterminer si les frais réclamés étaient nécessaires et raisonnables. Toutefois, bien que ces considérations en matière d’accessibilité aient été un facteur pertinent dans l’évaluation par le Conseil des frais réclamés, elles ne constituaient pas le seul facteur.
  3. À cet égard, le Conseil a fait référence à des articles précis des Lignes directrices qui établissent les considérations à prendre en compte pour déterminer si le temps qu’un réclamant a consacré à la préparation de sa participation est excessif dans les circonstances et les facteurs qui peuvent être pris en compte, comme le temps réclamé et les frais connexes attribués dans le cadre d’instances similaires. Le Conseil a ensuite conclu que les frais réclamés par le CSSSC dépassaient largement les heures totales réclamées et les frais connexes attribués dans le cadre des instances du SRV. Le Conseil estime que cette comparaison était appropriée étant donné que les instances de SRV portaient également sur des questions particulièrement pertinentes pour les groupes de promotion de l’accessibilité et comprenaient en grande partie des demandeurs de frais qui étaient des groupes de promotion de l’accessibilité, dont bon nombre représentaient des personnes ayant une déficience auditive.
  4. Comme il est mentionné ci-dessus, le Conseil a également déterminé que des parties du sondage et du rapport connexe débordaient du cadre de l’instance principale. Ainsi, le Conseil a exercé son pouvoir discrétionnaire afin de réduire les frais associés au sondage réclamés en fonction de la complexité de l’instance principale et des parties qui relevaient de l’instance principale.
  5. Par conséquent, le Conseil détermine que l’existence d’une erreur de droit ou de fait qui soulèverait un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2018-437 n’a pas été établie dans le cadre de son évaluation des considérations en matière d’accessibilité.

Conclusion

  1. Le Conseil accorde de l’importance à la contribution que les groupes de promotion de l’accessibilité comme le CSSSC peuvent apporter à ses instances et a déterminé dans l’ordonnance de télécom 2018-437 que des sections du sondage et du rapport connexe du CSSSC ont aidé le Conseil à mieux comprendre les questions examinées dans le cadre de l’instance principale. Le Conseil a tenu compte des circonstances particulières du CSSSC dans son évaluation de la demande d’attribution des frais et a soupesé tous les facteurs pertinents dans les circonstances pour exercer son pouvoir discrétionnaire et accorder au CSSSC la moitié de ses frais associés au sondage. De plus, les décisions du Conseil étaient conformes aux Lignes directrices et aux Règles de procédure.
  2. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil détermine qu’il n’a pas commis d’erreur de droit ou de fait de sorte qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de sa décision d’attribuer au CSSSC la moitié des frais réclamés concernant le sondage. Par conséquent, le Conseil refuse la demande du CSSSC en vue de réviser et de modifier l’ordonnance de télécom 2018-437.

Secrétaire général

Documents connexes

Date de modification :