ARCHIVÉ - Décision de radiodiffusion CRTC 2005-544

Cette page Web a été archivée dans le Web

Information archivée dans le Web à des fins de consultation, de recherche ou de tenue de documents. Les décisions, avis et ordonnances (DAO) archivés demeurent en vigueur pourvu qu'ils n'aient pas été modifiés ou annulés par le Conseil, une cour ou le gouvernement. Le texte de l'information archivée n'a pas été modifié ni mis à jour depuis sa date de mise en archive. Les modifications aux DAO sont indiquées au moyen de « tirets » ajoutés au numéro DAO original. Les pages archivées dans le Web ne sont pas assujetties aux normes qui s'appliquent aux sites Web du gouvernement du Canada. Conformément à la Politique de communication du gouvernement du Canada, vous pouvez obtenir cette information dans un autre format en communiquant avec nous.

 

Décision de radiodiffusion CRTC 2005-544

  Ottawa, le 18 novembre 2005
  TVN Niagara Inc.
St. Catharines (Ontario)
  Demande 2003-1498-0
Audience publique à Niagara Falls (Ontario)
6 juin 2005
 

Station de télévision de langue anglaise à St. Catharines

  Le Conseil refuse une demande en vue d'obtenir une licence de radiodiffusion afin d'exploiter une station de télévision commerciale de langue anglaise pour desservir St. Catharines et la région du Niagara.
 

Introduction

1.

Le Conseil a reçu une demande de TVN Niagara Inc. (TVN) en vue d'obtenir une licence de radiodiffusion afin d'exploiter une entreprise de programmation de télévision commerciale de langue anglaise à St. Catharines (Ontario). TVN proposait que la nouvelle station soit exploitée au canal 22C avec une puissance apparente rayonnée de 401 000 watts et fournisse une programmation pour la ville de St. Catharines et la région du Niagara.

2.

Selon la démarche habituelle en pareil cas, le Conseil a lancé un appel de demandes aux autres parties intéressées et a précisé que les demandes devaient lui être soumises au plus tard le 7 février 20051. Le Conseil n'a reçu aucune demande en réponse à cet appel.

3.

Le Conseil a étudié la demande de TVN lors de l'audience publique du 6 juin 2005 à Niagara Falls (Ontario).
 

La demande

4.

TVN est une entreprise commerciale à capital social qui ne détient présentement aucune entreprise de radiodiffusion. TVN a proposé d'implanter la première station de télévision en direct pour desservir spécifiquement St. Catharines et d'autres secteurs de la région du Niagara, au sud de l'Ontario. Le studio principal se situerait à St. Catharines, et il y en aurait d'autres à Welland, Niagara Falls et Oshweken. La requérante a indiqué que la station proposée ciblerait avant tout les baby-boomers entre 47 et 53 ans, ainsi que les téléspectateurs plus âgés de 54 à 69 ans. Bien que la station soit destinée avant tout aux téléspectateurs de la région du Niagara, le plan d'entreprise de TVN en prévoyait la distribution prioritaire par les entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) desservant la plus grande part du marché élargi de Toronto.

5.

La programmation canadienne de TVN serait constituée principalement d'émissions produites à St. Catharines et dans la région du Niagara. Sa grille horaire comprendrait 34,5 heures de programmation originale par semaine reflétant les besoins et les intérêts locaux, dont 19,5 heures de bulletins de nouvelles produits par la station. Le reste de la programmation locale de TVN engloberait toute une variété d'émissions pour répondre aux intérêts propres à la région du Niagara, comme ses communautés ethniques, ses assises économiques, ses institutions du savoir, ses activités de sport et de loisirs. Une émission intitulée Six Nations Report serait produite par la communauté autochtone de la Première Nation Oshweken et une autre, intitulée Village Square, refléterait les diverses communautés multiculturelles de la région du Niagara. TVN a exprimé son intention de dépenser au total 3,96 millions de dollars en émissions locales durant sa première année d'exploitation, dont 2,4 millions en nouvelles. Pour le reste, le contenu canadien serait assuré surtout par la reprise des émissions locales originales décrites ci-dessus.

6.

La requérante a proposé de plus, à compter de sa seconde année de radiodiffusion, de diffuser annuellement 55 heures d'émissions prioritaires originales telles que définies dans Définitions des nouveaux types d'émissions prioritaires; révisions aux définitions des catégories de teneur à la télévision; définitions des dramatiques canadiennes admissibles à des crédits de temps aux fins des exigences en matière de programmation prioritaire, avis public CRTC 1999-205 , 23 décembre 1999. Cette programmation serait financée par des dépenses d'au moins un million de dollars par année provenant du Niagara Priority Programming Fund.

7.

Les émissions non canadiennes de TVN seraient surtout constituées de ce que TVN a appelé des films classiques, c'est-à-dire des longs métrages datant d'au moins sept ans. TVN prévoyait que sa programmation de films obtiendrait une cote d'écoute de 0,5 parmi les téléspectateurs âgés de 25 à 54 ans dans le marché élargi de Toronto.2 Ces films classiques seraient présentés par des animateurs et diffusés à divers moments de la journée durant la semaine, y compris en soirée à partir de 19 heures. La requérante croyait pouvoir se procurer les droits de diffusion pour ces films classiques moyennant une somme d'environ 5 000 $ chacun, somme qui représenterait, si elle était amortie sur trois à cinq projections, une dépense horaire moyenne de 770 $ par film. Les revenus réalisés grâce à ces films classiques serviraient à financer la programmation locale canadienne de TVN. Dans sa première année d'exploitation, TVN a prévu un budget total de 2 millions de dollars pour l'achat de ces films.

8.

Selon la requérante, 45 % de ses revenus en publicité lui viendraient d'annonceurs locaux, intéressés surtout à placer leurs annonces dans les émissions locales de TVN comme le bulletin de nouvelles de 22 heures. La portion restante de 55 % des revenus publicitaires viendrait d'annonceurs nationaux attirés principalement par les cotes d'écoute des films classiques de TVN sur le marché élargi de Toronto. La requérante était consciente que les ventes aux annonceurs nationaux ne viendraient qu'une fois que ceux-ci seraient convaincus de la capacité de la station à rejoindre des auditoires significatifs. Pour les premières années de sa période de licence, TVN compterait donc surtout sur les annonceurs locaux pour ses revenus de publicité.

9.

TVN a également déclaré qu'elle avait l'intention de produire toutes ses émissions avec un équipement numérique à haute définition, et qu'elle s'efforcerait d'obtenir la version numérique à haute définition pour tous les films. TVN a fait savoir que si la présente demande était approuvée, elle présenterait aussitôt une demande en vue d'obtenir une licence d'entreprise de télévision numérique transitoire.
 

Interventions

10.

Le Conseil a reçu de nombreuses interventions à l'appui de la demande de TVN, émanant de conseils locaux, d'élus municipaux, d'entreprises et d'associations du milieu des affaires de la région du Niagara, d'établissements d'enseignement, de producteurs d'émissions et de téléspectateurs éventuels. Beaucoup de ces intervenants étaient d'avis que les stations de télévision à Toronto et à Hamilton ne se préoccupent pas suffisamment de la région du Niagara et qu'il y a grand besoin d'une station locale de télévision ayant le mandat clair de diffuser des nouvelles locales. M. Timothy Rigby, maire de la Ville de St. Catharines, l'a exprimé en ces termes : [traduction]
 

La présence de TVN Niagara dans notre communauté serait l'occasion pour la région du Niagara de s'exprimer de sa propre voix et de développer une infrastructure de communications extrêmement bénéfique et rassurante pour notre communauté d'affaires et notre tissu social.

11.

D'autres parties ont commenté la demande, notamment des titulaires de diverses EDR par câble du marché élargi de Toronto, qui ont fait valoir entre autres que l'ajout d'une nouvelle station de télévision en direct dans le service de base entraînerait des réalignements de canaux. La ville de Hamilton a aussi présenté une intervention dans laquelle elle expose sa crainte que l'attribution d'une licence à une station de télévision pour desservir la région du Niagara puisse détourner des revenus de la région de Hamilton, empêchant ainsi la mise sur pied d'une autre station de télévision axée exclusivement sur Hamilton.

12.

Les interventions défavorables ont été présentées par CTV Television Inc. (CTV), CHUM limitée (CHUM), Rogers Broadcasting Limited (Rogers), Crossroads Television System (CTS), CanWest MediaWorks Inc. (CanWest)3 et Quebecor Média inc. (Quebecor) (appelées collectivement les télédiffuseurs du marché de Toronto), tous propriétaires dans une certaine proportion de stations de télévision traditionnelle desservant le marché élargi de Toronto.

13.

Les télédiffuseurs du marché de Toronto ont fait remarquer que TVN, tout en proposant d'orienter son service sur la région du Niagara, comptait sur le fait que son signal serait capté dans le marché élargi de Toronto et qu'elle pourrait s'y attirer des auditeurs et des revenus. Les télédiffuseurs du marché de Toronto ont rappelé que le Conseil a attribué une licence à deux nouvelles stations de télévision à Toronto en 20024 et que, à leur avis, le marché n'a pas encore entièrement assimilé l'arrivée de ces deux nouvelles stations. Ils ont ajouté qu'avec les récents déclins du nombre de téléspectateurs, des revenus et des bénéfices des stations de télévision de Toronto, on devrait s'attendre à ce que l'arrivée d'une nouvelle station ait un impact négatif sur les stations de télévision traditionnelle de Toronto et diminue leur capacité à remplir leurs obligations.

14.

Quebecor a fait savoir que sa station CKXT-TV (SUN TV)5, anciennement propriété de Craig Media Inc. (Craig), a subi une perte nette d'environ 21 millions de dollars à sa première année d'exploitation et qu'elle continue de fonctionner à perte. Selon Quebecor, SUN TV serait particulièrement touchée par la station proposée par TVN puisque SUN TV mise, elle aussi, sur la présentation de films plus anciens. CTS a affirmé pour sa part que TVN aurait un impact négatif sur sa station, qui cible tout comme TVN les personnes plus âgées. Enfin, CanWest a déclaré que dans la foulée du lancement de SUN TV, les revenus du marché avaient chuté de façon significative en 2004, alors que les dépenses liées à la programmation continuaient d'augmenter à cause de l'arrivée d'un nouveau concurrent sur le marché pour les émissions disponibles. Selon CanWest, ces facteurs ont affecté les résultats financiers de CHCH-TV Hamilton qui sont passés d'un modeste profit à une perte très marquée entre 2000 et 2004.

15.

Les télédiffuseurs du marché de Toronto ont aussi insisté sur le fait que le plan d'entreprise de TVN n'était ni réaliste ni viable, étant donné la concurrence à laquelle TVN devrait faire face sur le marché élargi de Toronto. Selon CHUM et Quebecor, les sommes que TVN a l'intention de consacrer à l'achat des droits sur des films classiques sont loin d'être suffisantes pour lui permettre d'offrir un ensemble de films susceptibles d'attirer assez de téléspecteurs pour obtenir une cote d'écoute de 0,5. En s'appuyant sur sa longue expérience de la diffusion de longs métrages en période de grande écoute et à d'autres heures, CHUM a soutenu que la somme minimum qu'un télédiffuseur du marché élargi de Toronto doit s'attendre à dépenser pour aspirer à une cote d'écoute de 0,5 est de 15 000 $ par titre, soit 1 700 $ ou 1 800 $ de l'heure. Quebecor s'est montrée elle aussi sceptique à l'idée que TVN puisse obtenir une cote d'écoute de 0,5 sur le marché élargi de Toronto pour des films classiques au coût horaire de 770 $.

16.

CHUM, CTV et CanWest étaient toutes d'avis que la proposition de TVN en matière d'émissions locales était sérieusement sous-financée. Selon CHUM, les projections de la requérante représenteraient environ la moitié ou le tiers des coûts réels pour une programmation de cette envergure. CTV a rappelé qu'à Kitchener, un marché à peu près de la même taille que celui de la région du Niagara, CKCO-TV dépense presque deux fois la somme que TVN a prévue pour ses nouvelles, alors que CKCO-TV ne diffuse que 15,5 heures de nouvelles locales par semaine. Pour sa part, CanWest a affirmé que, pour les 36,5 heures de programmation locale diffusée par CHCH-TV, elle dépense près de quatre fois la somme que TVN comptait allouer à la diffusion de 34,5 heures d'émissions locales originales sur les ondes de la station proposée.

17.

Les télédiffuseurs du marché de Toronto ont aussi soutenu que les projections de TVN en matière de publicité locale n'étaient pas réalistes. Par exemple, CTS a mis en doute l'affirmation de TVN selon laquelle 45 % de ses revenus en publicité lui viendraient d'annonceurs locaux, étant donné que la moyenne actuelle pour les stations de télévision de l'Ontario est de 15 %, selon le rapport sur les ventes de temps d'antenne du Bureau de la télévision du Canada. Rogers a révélé que ses stations OMNI, qui s'adressent majoritairement aux communautés ethniques locales, tirent moins de 20 % de leurs revenus des annonceurs locaux. CanWest a renchéri en affirmant que, même si CHCH-TV fournit un service régional axé en particulier sur les communautés locales, la publicité locale n'a représenté que 12 % de l'ensemble de ses revenus publicitaires en 2004.

18.

CHUM craignait que le fonds de démarrage, évalué par TVN à 19,5 millions de dollars, ne soit insuffisant. Elle a rappelé que Craig avait essuyé avec SUN TV une perte d'environ 60 millions de dollars, si l'on compte son investissement, et qu'elle avait dû, en conséquence, vendre la station. L'inquiétude de CHUM était que TVN, si elle connaît des débuts difficiles, soit tentée d'abandonner son plan initial de se consacrer à la région du Niagara pour se tourner plutôt vers le marché du grand Toronto.

19.

Pour finir, CanWest a fait valoir que CHCH-TV dessert déjà la région du Niagara. Elle a signalé que 10 % à 15 % des nouvelles rapportées par CHCH-TV se rattachent directement à la région du Niagara et qu'il y a un journaliste et un caméraman sur place à St. Catharines. En outre, d'après CanWest, chaque fois que nécessaire, CHCH-TV affecte à la région du Niagara une équipe de reportage de Hamilton.
 

Position de la requérante à l'égard de ses opposants

20.

En ce qui concerne l'impact que produirait éventuellement la station proposée sur les télédiffuseurs du marché de Toronto, TVN a fait valoir que tout constat de faiblesse dans le marché élargi de Toronto est un phénomène à court terme. Elle a rappelé que les ventes de messages publicitaires nationaux étaient de 600 millions de dollars par année sur le marché élargi de Toronto, alors que la part qu'elle-même visait était à peine de 6,4 millions de dollars. En ce qui concerne l'impact éventuel sur SUN TV, TVN a fait valoir que SUN TV vise le même type de films que ceux diffusés par CITY-TV, alors qu'elle-même, en présentant des films classiques sur TVN, attirerait un auditoire plus mature. Elle a ajouté que sa station ne ferait pas non plus concurrence à CTS, qui exploite une station à caractère religieux.

21.

Concernant l'attrait éventuel de ses films classiques, TVN a soutenu que la formule des films classiques a été à l'origine du succès initial de plusieurs superstations américaines et que CHCH-TV, avec une formule axée sur les films, a connu elle-même des succès du temps de son ex-propriétaire. Selon TVN, l'analyse des émissions ayant présenté des films sur le marché de Toronto dans les trois dernières années indique que les films obtiennent une cote d'écoute de 0,7 à 2,9, et celle de 0,5 qu'elle a prévue pour des films classiques était donc raisonnable.

22.

À l'égard de son budget pour la programmation locale, TVN a déclaré son intention de rationaliser ses coûts. Elle a indiqué qu'elle utiliserait les mêmes personnes pour produire ses deux émissions de nouvelles, de 18 h et de 22 h, et que sa programmation locale viserait à plaire à la région du Niagara plutôt qu'au marché concurrentiel de Toronto. TVN a aussi fait valoir que l'équipement numérique à haute définition qu'elle avait l'intention d'utiliser lui permettrait de produire ses émissions locales en deçà du prix de revient payé par les télédiffuseurs qui fonctionnent en mode analogique. Comme l'a dit TVN [traduction], « nous comptons que TVN serve de modèle à une nouvelle génération de stations locales et régionales rentables qui adopteront une technologie de radiodiffusion moderne pour fonctionner à des coûts beaucoup moins élevés qu'il n'était possible de le faire jusqu'à maintenant ».

23.

En ce qui concerne la part relativement élevée de publicité qu'elle s'attendait à recevoir localement, TVN a affirmé que d'autres stations dans des petits marchés, en Ontario tout comme en Saskatchewan, arrivent à dégager d'importants revenus de publicité locale. La requérante a fait valoir que 1 800 entreprises locales de la région du Niagara se sont déclarées prêtes à annoncer sur la nouvelle station. TVN a ajouté que son personnel avait suffisamment d'expérience pour produire des annonces locales à coût modique.

24.

En ce qui a trait aux déclarations traitant de l'insuffisance de son fonds de démarrage, TVN a expliqué que l'investissement initial de 19,5 millions de dollars était constitué de 5,5 millions sous forme de crédit-bail pour l'acquisition de l'équipement technique, de 8,945 millions représentant la part des actionnaires et de 5 millions sous forme de crédit autorisé, disponible au besoin. Par ailleurs, TVN a déclaré que les actionnaires ont l'obligation légale, advenant un appel de liquidités, de verser une somme additionnelle égale à 20 % de leur mise de départ. Ce pourcentage de 20 % représente environ 1,9 million de dollars de plus en capitaux propres.

25.

Concernant le service que CHCH-TV fournit à la région du Niagara, la requérante a signalé que CHCH-TV dispose d'un seul journaliste dans cette région et met l'accent sur les crimes majeurs qui y sont commis. Pours sa part, TVN emploierait 25 personnes sur place, si l'on inclut l'équipe de soutien technique aux nouvelles, afin de traiter les nouvelles et les actualités de la région sous toutes leurs facettes.
 

Analyse et décision du Conseil

26.

La région du Niagara se situe dans l'axe de deux grands marchés, Toronto et Buffalo et on peut y capter en direct les émissions de tous les réseaux américains et canadiens. De plus, les émissions de nombreuses stations de télévision canadiennes et non canadiennes ainsi que de services payants et spécialisés sont distribués à grande échelle par les EDR. Malgré le fait que le Conseil ait lancé un appel de demandes visant à desservir la région du Niagara, aucune demande concurrente à celle de TVN n'a été déposée. Le Conseil considère que cela pourrait bien attester du fait qu'une nouvelle station de télévision située dans la région du Niagara se trouverait placée dans un marché extrêmement concurrentiel.

27.

Le Conseil reconnaît que l'approbation de la demande de TVN pourrait doter la région du Niagara d'une station de télévision répondant à ses besoins et à ses intérêts spécifiques. Cela est attesté par les nombreuses interventions favorables qui soulignent les avantages pour la région du Niagara de l'implantation de la station proposée.

28.

La station de télévision proposée par TVN offrirait des émissions canadiennes produites localement et axées en grande partie sur la région du Niagara, auxquelles s'ajouteraient des émissions non canadiennes constituées de films classiques acquis à coût modique et visant les téléspectateurs dans le marché élargi de Toronto. Les revenus réalisés grâce à la publicité contenue dans cette programmation de films serviraient à financer les émissions locales canadiennes produites par TVN. Cette dernière proposait donc un modèle très différent de celui adopté par la plupart des stations de télévision traditionnelle canadiennes de langue anglaise, lesquelles se font une forte concurrence pour acquérir des productions originales non canadiennes populaires et vendus à fort prix qui sont également diffusées par des stations des États-Unis, pour ensuite augmenter leur auditoire grâce à la substitution simultanée, le cas échéant.

29.

Le Conseil reconnaît la démarche novatrice de TVN pour doter la région du Niagara d'un service de télévision mais considère que le plan d'entreprise de TVN est préoccupant sous plusieurs aspects. Sur la foi des preuves présentées en cours d'audience, le Conseil convient avec TVN que les films sont capables de recueillir une cote d'écoute de 0,5 sur le marché élargi de Toronto. Toutefois, le budget alloué par TVN pour acheter les droits des films classiques qu'elle compte diffuser préoccupe grandement le Conseil. Se fiant à l'expérience d'autres stations dans le marché en matière d'achat et de présentation de films, le Conseil craint que le montant de 770 $ l'heure prévu par la requérante soit beaucoup trop faible pour aspirer à une cote d'écoute de 0,5 dans le marché élargi de Toronto et que l'incapacité d'atteindre une telle cote d'écoute pourrait sérieusement remettre en question son plan d'entreprise.

30.

Le Conseil se demande aussi comment TVN arriverait à produire une quantité aussi impressionnante d'émissions locales attrayantes avec le budget qu'elle a prévu. Le coût horaire que propose TVN pour ses émissions locales est non seulement beaucoup plus bas que celui des stations du marché de Toronto, mais, si le Conseil s'en réfère aux rapports annuels qui lui sont soumis, il est aussi beaucoup plus bas que pour les stations de télévision situées dans d'autres marchés urbains de la taille de St. Catharines et de la région du Niagara. Bien que le Conseil reconnaisse qu'on peut faire des économies en utilisant un équipement de production numérique à haute définition, il est difficile pour le moment de dire au juste combien, puisqu'on commence à peine à s'en servir de façon soutenue.

31.

Le Conseil constate en outre qu'une nouvelle station de télévision, en particulier si elle doit affronter la concurrence dans un marché important pour trouver son auditoire et ses revenus, subit généralement des pertes plus importantes que prévu dans les premières années de son exploitation. Comme l'a rappelé CHUM, Craig a dû se résoudre à vendre SUN TV tant les pertes au démarrage avaient dépassé de beaucoup les prévisions. La marge de crédit d'exploitation dont bénéficie TVN, même avec l'éventualité, comme prévu, d'un appel de liquidités auprès des actionnaires, constitue une bien faible source de financement supplémentaire pour faire face à un manque à gagner ou à des dépassements de crédit. Comme d'autres stations de télévision en ont fait l'expérience, dont CIVI-TV Victoria, une station autorisée depuis peu et qui oriente sa programmation locale vers l'île de Vancouver mais exerce en même temps une concurrence auprès des auditoires du marché élargi de Vancouver, il se pourrait que TVN ait à trouver du financement additionnel important au cours des premières années d'exploitation. Le Conseil est d'avis que trouver du financement additionnel dans de telles circonstances peut s'avérer aussi coûteux que périlleux et peut remettre en question la capacité de TVN à réaliser son plan d'entreprise.

32.

Le Conseil constate de plus que deux nouvelles stations de télévision, SUN TV et OMNI.2, ont été autorisées en 2002 dans le marché élargi de Toronto et que, depuis leur lancement, les stations de télévision traditionnelle dans l'ensemble avaient accusé des baisses d'auditoires et de revenus publicitaires. Comme le rapporte Global, la station CHCH-TV est passée d'un modeste profit à une perte très marquée entre 2000 et 2004. De son côté, Quebecor signale que SUN TV a subi une perte nette de l'ordre de 21 millions de dollars au cours de sa première année d'exploitation et qu'elle continue à perdre de l'argent. Dans ce contexte, le Conseil craint que l'arrivée d'un nouveau concurrent dans le marché élargi de Toronto ne compromette la capacité des stations de télévision traditionnelle existantes à respecter leurs engagements de programmation.

33.

À la lumière de tout ce qui précède, le Conseil refuse la demande présentée par TVN Niagara Inc. en vue d'obtenir une licence de radiodiffusion afin d'exploiter une entreprise de programmation de télévision commerciale de langue anglaise à St. Catharines (Ontario).
 

Service dispensé par CHCH-TV à la région du Niagara

34.

Au cours de cette instance, plusieurs participants ont déploré le genre et le volume de nouvelles diffusées par CHCH-TV concernant la région du Niagara. Vu l'étendue de sa zone de desserte, le Conseil reconnaît que CHCH-TV est tenue de couvrir des événements qui se déroulent non seulement dans la région du Niagara mais aussi à Hamilton et dans les environs. Toutefois, le Conseil estime que la couverture régulière des nouvelles et divers événements dans la région du Niagara représente une part importante du mandat de CHCH-TV. Le Conseil note que le comité consultatif indépendant de CHCH-TV lui fait chaque année rapport sur le rendement de la station. En vue de mieux surveiller le rendement de CHCH-TV à l'égard de la région du Niagara, le Conseil s'attend à ce que dorénavant, les rapports du comité consultatif indépendant dressent la liste détaillée mois par mois de tout ce que CHCH-TV a produit au cours de l'année en reportages et en comptes rendus d'événements directement liés à la région du Niagara.
  Secrétaire général
  La présente décision est disponible sur demande en média substitut et peut également être consultée en version PDF ou en HTML sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca  
  Notes de bas de page:
1 Appel de demandes de licence de radiodiffusion visant l'exploitation d'une entreprise de programmation de télévision pour desservir la région de Niagara, avis public de radiodiffusion CRTC 2004-84 , 8 novembre 2004. 

2La cote d'écoute correspond à l'auditoire moyen au quart d'heure d'une émission, exprimé en pourcentage de la population au sein d'un groupe démographique donné qui se trouve dans une zone géographique précise. Le marché élargi de Toronto est une zone géographique définie par Sondages BBM et qui comprend le Grand Toronto ainsi que Durham, Dufferin, Hamilton, Niagara et Haldimand.

3Cette intervention a été déposée par Réseau de Télévision Global inc. Toutefois, Réseau de Télévision Global inc., Global Communications Limited, CanWest Media Inc. et d'autres filiales de CanWest ont fusionné le 1er septembre 2005, sous le nom de CanWest MediaWorks Inc.

4 Voir Nouvelle station de télévision pour desservir Toronto/Hamilton, décision de radiodiffusion CRTC 2002-81 , 8 avril 2002, et Nouvelle station de télévision multilingue à caractère ethnique pour desservir Toronto, décision de radiodiffusion CRTC 2002-82, 8 avril 2002.

5SUN TV était auparavant appelée Toronto One.

Mise à jour : 2005-11-18

Date de modification :