ARCHIVÉ - Décision CRTC 2000-72
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Décision CRTC 2000-72 |
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Ottawa, le 1 mars 2000 | |
L'Office de la télécommunication éducative de l'Ontario (TVOntario) Toronto (Ontario) - 199902185 |
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Demande traitée par l'avis public CRTC 1999-173 du 22 octobre 1999 |
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Sommaire |
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Le Conseil refuse, par vote majoritaire, la demande de l'Office de la télécommunication éducative de l'Ontario (TVOntario) relative à la distribution au Québec, de son service de télévision éducative de langue française, TFO. La requérante avait demandé au Conseil d'obliger toutes les entreprises de distribution par câble et les SDM de classe 1 desservant le Québec, à distribuer TFO sur un volet analogique facultatif. Ce service aurait été facturé à l'abonné. | |
Il s'agissait, dans cette instance, de déterminer si le Conseil devait obliger les entreprises de distribution, en vertu de l'article 9(1)h) de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi), à distribuer TFO au Québec, contre une majoration des abonnements. Le Conseil est d'avis qu'il n'y a pas lieu d'approuver la demande de TFO. Il estime que les téléspectateurs du Québec, qui reçoivent déjà le service éducatif de Télé-Québec, ne devraient pas avoir à débourser pour un second service éducatif provenant d'une autre province. Cette demande suscite aussi quelques préoccupations relatives à la juste concurrence entre services. | |
Le Conseil reconnaît que de nombreuses interventions se sont avérées particulièrement élogieuses à l'égard de la programmation de TFO. Puisque TFO figure sur les listes des services par satellite admissibles du Conseil, les entreprises de distribution par câble du Québec et d'ailleurs au Canada peuvent distribuer TFO à titre facultatif, sans avoir à en demander la permission au Conseil. Ce dernier tient à souligner que les signaux des services par satellite de radiodiffusion directe (SRD) d'ExpressVu et de Star Choice qui desservent le Québec contiennent déjà le signal de TFO. De plus, le système de distribution multipoint (SDM) de Look Communications inc. qui dessert certaines régions du Québec est également autorisé à distribuer TFO à titre facultatif. Les Québécois peuvent donc avoir accès à TFO en s'abonnant à un distributeur qui offre ce service. | |
La requérante |
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1. |
L'Office de la télécommunication éducative de l'Ontario (TVOntario) est le télédiffuseur éducatif nommé par le gouvernement de l'Ontario en vertu des Instructions au CRTC (Inadmissibilité aux licences de radiodiffusion). Il fournit un service de télévision en français, connu sous le nom de TFO, et un service en anglais. |
2. |
Le gouvernement de l'Ontario assure la majeure partie du financement de TVOntario, qui génère aussi ses propres revenus par la vente d'émissions, la cotisation des membres, les souscriptions d'entreprises à des productions et la location de canaux de télédiffusion par satellite. |
3. |
En Ontario, les entreprises de distribution de classe 1 et 2 distribuent TFO au service de base, conformément au Règlement sur la distribution de radiodiffusion (le Règlement). |
La demande |
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4. |
TVOntario demandait que le Conseil impose aux entreprises de distribution de radiodiffusion de classe 1 du Québec, l'obligation de distribuer TFO. Le service serait distribué sur un volet analogique facultatif. |
5. |
De plus, la requérante comptait percevoir un paiement, facturéaux abonnés des entreprises tenues de distribuer TFO au Québec. Les prévisions financières de TVOntario faisaient état d'un tarif de gros mensuel pour la distribution de TFO de 0,24 $ l'abonné pour les entreprises de Vidéotron, et de 0,26 $ l'abonné pour les entreprises de Cogeco. Une majoration tarifaire serait donc imposée aux abonnés au volet analogique facultatif en question. |
6. |
Pour justifier sa demande, TVOntario a déclaré que les recettes de la distribution obligatoire de TFO au Québec compenseraient l'augmentation des coûts d'acquisition des droits de diffusion nationaux. La requérante a en effet précisé que depuis l'apparition de la distribution par SRD en 1996 et en 1997, et l'arrivée de nouveaux services de programmation spécialisée, les services de langue française achètent les droits nationaux pour leurs émissions. Cette pratique a engendré une augmentation du coût d'acquisition des émissions, pour TFO. |
7. |
TVOntario a aussi soutenu que les francophones du Québec devraient avoir accès au plus grand nombre possible de services de télévision de langue française. Elle a souligné que TFO est le seul service de langue française que les entreprises de distribution de classe 1 du Québec ne sont pas obligées de distribuer pour se conformer aux règles du Conseil en matière d'accès. |
8. |
De plus, la requérante a fait remarquer que la grille horaire de TFO se compose surtout d'émissions éducatives et culturelles, dont un grand nombre s'adresse aux enfants. Elle estime qu'une large distribution de TFO au Québec augmenterait le choix et la diversité de la programmation offerte aux téléspectateurs. |
9. |
La requérante a aussi précisé que la distribution de TFO assurerait une plus grande diffusion des idées et activités culturelles des francophones de l'Ontario auprès de ceux du Québec, contribuant ainsi à une meilleure compréhension entre les deux communautés. |
Interventions |
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10. |
La démarche de TVOntario a suscité de nombreuses réactions. Le Conseil a noté que 58% des 1 563 interventions favorables à la demande provenaient du Québec, mais que moins de 1 % ont abordé la question du prix facturé aux abonnées. Douze intervenants se sont opposés à la demande. |
11. |
Le principal élément invoqué en faveur de la demande se rapportait généralement à l'excellence de la programmation de TFO. On a souligné l'absence de publicité et la haute qualité de ses émissions éducatives, culturelles et pour enfants. Selon les intervenants, la diffusion de ces émissions et des longs métrages présentés par TFO accroîtrait la diversité et la qualité de la programmation offerte au Québec. Certains ont souligné aussi qu'une large distribution de TFO permettrait aux Québécois de recevoir des émissions issues d'une autre culture francophone du Canada. |
12. |
Les opposants à la demande de TVOntario, regroupaient notamment des associations représentant les industries de la télédiffusion, de la câblodistribution, des services spécialisés et de la production, ainsi qu'Action Réseau Consommateur, un organisme de consommateurs. Les objections des intervenants visaient, en particulier, la proposition de la requérante visant àfaire payer les abonnés qui recevraient TFO. Cinq d'entre eux ont souligné qu'ils appuieraient la distribution de TFO au Québec si elle était offerte gratuitement, et selon une entente ne constituant pas un traitement de faveur, par rapport à d'autres services de programmation. |
13. |
L'une des préoccupations soulevées par la proposition de TFO touchait le maintien du service par câble, à un coût abordable. Action Réseau Consommateur a rappelé qu'un fort pourcentage de la population n'a qu'une capacité limitée de payer pour des services de télévision. En dépit de cela, pour bon nombre de personnes à faible revenu, qui ne peuvent recevoir une gamme de services de télévision en direct, l'abonnement au câble demeure leur unique source de divertissement. L'organisme estime donc que le Conseil ne devrait pas adopter de mesures qui augmenteraient le tarif des abonnements. |
14. |
Certains intervenants ont fait valoir que la demande de TVOntario modifierait profondément la nature du service de TFO, le faisant passer de service éducatif à service spécialisé. Selon eux, pareil changement ne devrait être autorisé que dans le cadre d'un processus concurrentiel où TFO serait tenue de respecter les mêmes engagements que les services spécialisés. Ils ont ajouté que, dans un système de distribution obligatoire et payante, TFO serait injustement avantagée par rapport à d'autres services spécialisés, compte tenu de son financement direct par le gouvernement de l'Ontario. |
15. |
Selon plusieurs intervenants, l'approbation de la demande créerait une discrimination contre les autres télédiffuseurs éducatifs du Canada, puisqu'aucun d'eux n'a la garantie d'être distribué hors de sa province d'origine. |
16. |
Pour d'autres intervenants, l'utilisation de l'article 9(1)h) de la Loi dans les présentes circonstances s'avère un sujet d'inquiétude. Ils ont souligné que le Conseil n'y a eu recours auparavant qu'à deux reprises : d'abord pour faciliter la distribution nationale du réseau TVA, puis du Réseau de télévision des peuples autochtones (RTPA). |
La décision du Conseil |
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17. |
Il s'agit dans cette instance de déterminer si le Conseil doit obliger les entreprises de distribution, en vertu de l'article 9(1)h) de la Loi, à distribuer TFO au Québec, moyennant un coût supplémentaire pour les abonnés. |
18. |
Le Conseil tient à souligner que de nombreux intervenants ont fait l'éloge de l'excellente programmation de TFO. Il reconnaît que ses émissions éducatives et culturelles, de même que sa vaste programmation pour enfants contribuent à accroître la qualité et la diversité des émissions de télévision de langue française au Canada. |
19. |
Toutefois, après un examen minutieux des opinions des parties et des objectifs de la politique énoncés dans la Loi, le Conseil est majoritairement d'avis qu'il n'est pas dans l'intérêt public d'aquiescer à la demande. Ainsi qu'il est indiqué dans la décision CRTC 97-573 approuvant, à titre exceptionnel, une demande de TFO en vue de faire payer la distribution de son service au Nouveau-Brunswick, « le Conseil n'a pas pour politique d'autoriser des tarifs de gros pour la distribution au service de base ou des tarifs pour la distribution au volet facultatif de services de radiodiffusion conventionnels et de services éducatifs provinciaux ». |
20. |
Le Conseil note que TFO est un télédiffuseur éducatif qui diffuse en direct à partir de l'Ontario. Or, en vertu de l'article 17(1)b) du Règlement, les entreprises de distribution par câble du Québec ne sont pas tenues de distribuer TFO à titre de signal prioritaire, pour la raison suivante : il ne s'agit pas d'un service de programmation de télévision éducative dont l'exploitation relève d'une autorité éducative, nommée par la province où est située la zone de desserte autorisée de ces entreprises. |
21. |
En outre, le Conseil estime qu'il ne serait pas approprié d'obliger les abonnés du Québec à payer pour un service de télédiffusion de langue française exploité par le télédiffuseur éducatif de l'Ontario. En effet, par leurs impôts, ils paient déjà pour Télé-Québec, le télédiffuseur éducatif du Québec. L'abordabilité du service de câblodistribution et du service par SDM constitue une préoccupation constante du Conseil. |
22. |
Le Conseil craint par ailleurs, qu'en approuvant la distribution obligatoire de TFO et la majoration des tarifs d'abonnement au Québec, il lui accorde un avantage concurrentiel par rapport au service de télédiffusion éducative du Québec. TFO profiterait alors des recettes provenant des abonnés d'entreprises de distribution, tout en étant financée par le gouvernement de l'Ontario. Par contre, le télédiffuseur éducatif du Québec ne pourrait compter que sur deux sources principales de financement : les fonds publics et les recettes publicitaires. |
23. |
Comme il a été mentionné, TFO est actuellement distribuée au Nouveau-Brunswick par Fundy Cable Ltd./ltée (Fundy). Dans la décision CRTC 97-573, le Conseil a autorisé TVOntario à percevoir 0,13 $ par abonné par mois, auprès des entreprises de Fundy qui distribuent TFO au service de base, au Nouveau-Brunswick. Ce tarif a été autorisé afin de permettre à TVOntario de recouvrer ses frais afférents aux droits de licences pour la région de l'Atlantique et aux droits d'auteurs sur les productions de TFO. |
24. |
Le Conseil note cependant que la distribution de TFO au Nouveau-Brunswick s'est réalisée dans des circonstances particulières qui ne commandaient pas d'ordonnance de distribution obligatoire en vertu de l'article 9(1)h) de la Loi. Le Nouveau-Brunswick n'a pas de télédiffuseur éducatif provincial, alors que le Québec est desservi par Télé-Québec. Le Conseil souligne que dans le cas du Nouveau-Brunswick, le gouvernement provincial et le principal distributeur terrestre ont appuyé la distribution de TFO au tarif mensuel de gros de 0,13 $ par abonné. |
25. |
Toutefois, le Conseil appuie la distribution de TFO, au Québec et dans le reste du Canada, sur une base non obligatoire. Il note que TFO est inscrite sur les listes des services par satellite admissibles en vertu de la partie 2 et de la partie 3 qui se trouvent dans l'avis public CRTC 2000-7. Les entreprises de distribution par câble de classe 1 et 2 du Québec et d'ailleurs au Canada peuvent donc distribuer TFO à titre facultatif, sans avoir à en demander la permission au Conseil. Les entreprises de distribution par câble de classe 3 de l'extérieur de l'Ontario peuvent distribuer TFO au service de base ou à titre facultatif, pourvu que TFO ne s'y objecte pas. |
26. |
Le Conseil fait remarquer que les signaux des services par SRD d'ExpressVu et de Star Choice qui desservent le Québec contiennent déjà le signal de TFO. Le SDM de Look Communications inc. qui dessert certaines régions du Québec est également autorisé à distribuer TFO à titre facultatif. Les Québécois peuvent donc avoir accès à TFO en s'abonnant à un distributeur qui offre ce service. |
27. |
En conclusion, le Conseil refuse la demande par vote majoritaire. |
Document connexe du CRTC :
. Décision CRTC 97-573 : Distribution de TFO par Fundy Cable Ltd/ltée |
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Secrétaire général | |
La présente décision est disponible, sur demande, en média substitut et peut également être consultée sur le site Internet suivant : http://www.crtc.gc.cattp://www.crtc.gc.ca |
Opinion minoritaire du conseiller Stuart Langford |
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Je suis en désaccord avec la décision majoritaire dans cette affaire. Le refus de la demande en instance ne sert pas l'intérêt public et ne respecte pas l'esprit et la lettre manifestes de la politique canadienne de radiodiffusion établie depuis longtemps. | |
Cette demande donnait au Conseil une rare occasion de donner corps et âme à quelques-unes des dispositions clés de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi), l'élément moteur de la politique de radiodiffusion au pays. En disant non à la distribution par câble élargie de TFO au Québec, la majorité a laissé échapper cette occasion. Sur le plan culturel, c'est le Canada qui s'en trouve le grand perdant. | |
La demande : |
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TFO n'a pas demandé d'ordonnance obligeant les entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) par câble de classe 1 au Québec à distribuer son service de programmation de télévision éducative de langue française au service de base, même si, selon moi, elle aurait pu fortement justifier l'approbation d'une telle demande. Sa demande visait un redressement de bien moins grande portée. | |
Étant donné que TFO éprouve beaucoup de difficulté à persuader les grands câblodistributeurs du Québec d'offrir son service à des conditions acceptables, TVOntario a demandé l'aide du Conseil. Elle avait comme objectif de voir offrir son service de programmation aux abonnés à un volet de services analogiques facultatifs, tout comme les services spécialisés de langue française sont offerts au Québec. Les abonnés auraient alors le loisir soit de commander et de payer le volet contenant TFO, soit de consacrer leurs ressources de consommation à autre chose. Aucun téléspectateur ne se serait vu imposer le service contre sa volonté. | |
Rejeter une telle demande comme la majorité l'a fait, c'est aller à l'encontre de la nette intention du Parlement de créer un système de radiodiffusion qui « . offre, par sa programmation essentiellement en français et en anglais, un service public essentiel pour le maintien et la valorisation de l'identité nationale et de la souveraineté culturelle ». (article 3(1)b) de la Loi) | |
Le modèle canadien : |
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Ce n'est pas par hasard que les parlementaires ont retenu l'expression « service public » qui se trouve dans la citation ci-dessus, lorsqu'ils ont modifié la Loi en 1991. Elle a été choisie avec soin. C'est dans le Rapport du groupe de travail sur la politique de radiodiffusion, en 1986, dont les travaux ont précédé l'adoption de la nouvelle Loi, qu'on a cerné la notion d'un service public comme élément indispensable du système canadien de radiodiffusion. Les auteurs de ce rapport ont trouvé un motif de le faire dans l'article 36 de la Loi constitutionnelle de 1982. Cet article, portant le sous-titre Engagements relatifs à l'égalité des chances, stipule que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux du Canada s'engagent à « fournir à tous les Canadiens, à un niveau de qualité acceptable, les services publics essentiels ». | |
Dans ses tentatives de respecter le volet « égalité de chances » de ce mandat de service public, le Conseil tente depuis longtemps de relever le défi de fournir aux téléspectateurs de langue française du Québec et d'ailleurs un niveau de services de télévision comparable à celui qui est offert aux téléspectateurs de langue anglaise au Canada. Le passage suivant d'une allocation de la vice-présidente (Radiodiffusion) devant le Comité permanent de l'industrie de la Chambre des communes, prononcée le 2 décembre 1999, traduit bien l'ampleur de ce défi : | |
« . le marché francophone présente des défis uniques compte tenu de sa petitesse par rapport au marché anglophone. Bien que l'on compte environ 6,6 millions d'abonnés au câble dans le marché anglophone, le nombre potentiel d'abonnés francophones n'est que de 2 millions. Le marché francophone a par ailleurs un niveau de pénétration de 10 % inférieur à celui du marché anglophone. Ceci s'explique, en partie, par le fait qu'il existe moins de services en français offerts par rapport aux services en anglais. Les taux et les coûts de ces services sont généralement plus élevés en français, le marché étant plus petit. La dimension du marché crée ainsi des défis économiques de taille pour les entreprises de programmation en termes de publicité et de revenus générés par les abonnés et pour la création d'un contenu de programmation de qualité pertinent pour les Canadiens. » |
Mise à jour : 2000-03-01 |
- Date de modification :