ARCHIVÉ -  Avis Public CRTC 94-10

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Avis public

Ottawa, le 10 février 1994
Avis public CRTC 1994-10
Le Fonds de production
Dans l'avis public CRTC 1993-74 intitulé Audience publique portant sur la structure de l'industrie, le Conseil a annoncé la création d'un nouveau fonds de production pouvant générer environ 300 millions de dollars sur cinq ans pour la production de nouvelles émissions canadiennes.
Le Conseil a décidé que le financement de ce fonds se ferait au moyen d'une modification au Règlement de 1986 sur la télédistribution (le Règlement), grâce auquelle des changements seraient apportés à la disposition de "temporisation" qui se trouve au paragraphe 18(6) du Règlement:
 ...compte tenu de la nécessité de fournir des fonds additionnels pour la production d'émissions canadiennes, le Conseil, par vote majoritaire, compte suspendre la mise en oeuvre des réductions requises par la disposition de "temporarisation" dans le cas des titulaires qui contribuent à un nouveau fonds à l'égard des émissions canadiennes l'équivalent de 50 % du montant dont le tarif de base serait autrement réduit.
Dans l'avis public CRTC 1993-137 daté du 7 octobre 1993, le Conseil a demandé au public de formuler des observations au sujet de modifications projetées au Règlement sur la télédistribution qui visaient à donner effet à cette proposition ainsi qu'à d'autres projets de politique. Par la suite, dans l'avis public CRTC 1994-7 du 3 février 1994, le Conseil a annoncé sa décision concernant les modifications projetées au Règlement sur la télédistribution dont, entre autres choses, l'adoption d'une modification au paragraphe 18(6) qui donne effet à la suspension de la disposition de temporarisation. Plus tôt, dans l'avis public CRTC 1993-105 du 15 juillet 1993, le Conseil a sollicité des observations sur les politiques les plus appropriées à l'égard de l'admissibilité des émissions, de l'accessibilité au fonds, de mécanismes de financement précis et de l'administration du fonds de production. Le Conseil a reçu 79 observations dont celles de membres intéressés du public, de sociétés de production, d'associations de production, de radiodiffuseurs privés, de syndicats, de guildes et d'associations représentant des artistes et des artisans, d'organismes de financement, de radiodiffuseurs publics, du gouvernement, d'établissements d'enseignement, d'associations représentant les industries du câble et de la télévision, d'artistes et de particuliers ainsi que de groupes et d'associations représentant des intérêts spéciaux comme les personnes handicapées, les autochtones et les communautés multilingues.
Chacune des questions soulevées dans l'avis public CRTC 1993-105 a fait l'objet de commentaires très variés, mais plus particulièrement les sujets touchant le mécanisme de financement le plus approprié et les critères relatifs à l'accessibilité au fonds de production.
Les radiodiffuseurs privés estimaient généralement que le fonds devrait les aider à défrayer les droits de diffusion qu'ils versent aux producteurs indépendants, de manière à réduire le coût net de l'acquisition d'émissions canadiennes à un niveau qui se comparerait davantage aux prix payés pour des émissions étrangères. Certains ont proposé qu'à cette fin, on consente aux radiodiffuseurs privés une réduction pouvant aller jusqu'à 30 % de ce qui leur en coûte pour acquérir des émissions auprès de producteurs indépendants.
Les producteurs indépendants ont soutenu majoritairement que le financement du fonds pour les émissions produites par des indépendants devrait prendre la forme de subventions directes aux producteurs eux-mêmes. Selon eux, les radiodiffuseurs ne devraient pas avoir accès au fonds. Les radiodiffuseurs publics étaient de cet avis. Même si l'industrie de la télédistribution affirme que les producteurs indépendants et les radiodiffuseurs devraient avoir accès au fonds pour soutenir le coût des nouvelles productions, elle a précisé que la majeure partie du financement devrait aller aux émissions produites par des indépendants.
Après avoir examiné tous les mémoires, le Conseil conclut ce qui suit au sujet des diverses questions se rapportant à l'établissement et à l'exploitation du fonds.
1. Financement des émissions canadiennes
Lorsqu'il a annoncé ses plans concernant la création d'un fonds, le Conseil a fait remarquer que :
 À cause de la taille du marché canadien, il demeure difficile de financer la création d'émissions canadiennes concurrentielles. Si les producteurs américains peuvent recouvrer la majorité de leurs coûts de production grâce aux droits de licence sur le plan national, les droits de licence que génèrent au Canada la plupart des producteurs d'émissions canadiennes ne représentent seulement qu'une fraction de leurs coûts de production globaux.
Les désincitatifs financiers qu'ont les radiodiffuseurs en ce qui a trait à l'acquisition de dramatiques, de documentaires et d'émissions pour enfants d'origine canadienne ont entraîné une véritable sous-représentation de ces émissions sur nos écrans de télévision canadiens. En règle générale, les émissions canadiennes ne coûtent pas plus cher à produire que les émissions non canadiennes. Cependant, les radiodiffuseurs canadiens doivent payer plus cher pour les acquérir. Même si une émission canadienne et une émission non canadienne attirent le même nombre de téléspectateurs et de recettes publicitaires, la marge entre le coût de l'émission canadienne et les recettes qu'elle génère tend à être beaucoup plus petite que celle de l'émission non canadienne de popularité équivalente, et peut même signifier une perte nette pour le radiodiffuseur. D'après le Conseil, le fonds de production devrait viser avant tout à faciliter la radiodiffusion, au cours des heures de grande écoute, d'émissions canadiennes de qualité appartenant à des catégories sous-représentées. Pour ce faire, le fonds de production doit soutenir les productions qui respectent ces critères.
Pour produire des émissions de qualité, il faut un financement adéquat. Même si les producteurs indépendants font valoir depuis longtemps que les droits de diffusion dans le marché canadien sont trop faibles, les radiodiffuseurs canadiens soutiennent que, financièrement, ils ne peuvent augmenter les droits de diffusion qu'ils paient.
De l'avis des producteurs indépendants de l'extérieur du Québec, une certaine forme de subvention ou de mécanisme d'investissement en capital serait souhaitable pour combler le manque à gagner provenant des droits de diffusion. Ils reconnaissent, cependant, qu'en vertu du programme de crédits d'impôt du Québec, les crédits d'impôt d'un producteur indépendant de cette province seraient réduits du montant de la subvention qu'il recevrait, ce qui annulerait les bénéfices.
Pour ce qui est des investissements en capital, le Conseil fait remarquer que, souvent par le passé, les producteurs indépendants ont dit craindre que ces investissements, qu'ils viennent des radiodiffuseurs ou d'un fonds, puissent servir à diluer le contrôle du producteur sur la production. Les producteurs indépendants se préoccupent également du fait que, contrairement aux droits de diffusion, les investissement en capital sont remboursables à long terme et qu'ils ne servent donc pas à attirer des investissements privés additionnels.
En conséquence, le Conseil a établi que le meilleur moyen de stimuler la production canadienne serait de hausser les droits de diffusion, en contribuant à maintenir et à accroître la qualité des émissions et en attirant des investissements privés grâce à l'augmentation des recettes provenant des émissions canadiennes. Par ailleurs, il reconnaît que, pour être entièrement efficace, le fonds de production devrait procurer des bénéfices à la fois aux producteurs et aux radiodiffuseurs. Comme les radiodiffuseurs paient souvent davantage pour des émissions canadiennes que ce qu'ils peuvent espérer en retirer des ventes de publicité, le Conseil estime que le fonds de production devrait couvrir une partie des droits de diffusion accrus qui seraient requis pour amorcer sa contribution.
2. Principes fondamentaux d'exploitation
a) Catégories admissibles d'émissions
Ne seront admissibles au fonds de production que les dramatiques, les émissions de musique, de danse et de variétés telles que définies à l'annexe A du Règlement de 1987 sur la télédiffusion; les émissions s'adressant aux enfants d'au plus 12 ans; et, sous réserve de leur conformité avec la définition donnée par Téléfilm Canada, les documentaires.
Téléfilm Canada définit comme suit les documentaires :
 ... soit les oeuvres de création où un sujet est traité d'un point de vue d'auteur en s'ap-puyant sur une construction narrative et visuelle originale. Chaque documentaire admissible doit traiter d'une problématique spécifique et avoir une durée d'au moins 30 minutes.
 Sont exclus : les commandites, les magazines, les émissions animées en studio ("talk shows"), les émissions d'affaires publiques (productions factuelles, souvent non autonomes ou généralement destinées à être intégrées à une émission d'information ou à un bulletin de nouvelles, traitant d'événements ou de sujets d'actualité à partir d'une démarche journalistique et pouvant avoir un caractère éditorial), les productions faisant partie de programmes éducatifs. (notre accentuation) Les émissions appartenant aux catégories nouvelles, reportages et actualités, sports, jeux-questionnaires et intérêt général ne sont pas admissibles à des contributions du fonds de production.
b) Accent sur les dramatiques
Au moins 80 % des décaissements du fonds de production devraient être consacrés aux dramatiques et aux émissions pour enfants et au plus 20 % des décaissements peuvent aller à des documentaires, ainsi qu'à des émissions de variétés, de musique et de danse.
c) Pointage
En général, pour être admissibles au fonds, les émissions doivent obtenir au moins 8 points sur l'échelle que le Conseil et le Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens (BCPAVC) utilisent pour certifier des productions canadiennes.
Certains ont soutenu dans leurs observations qu'en plus des critères susmentionnés, il faudrait tenir compte plus particulièrement des émissions qui présentent des protagonistes qu'on peut identifier comme canadiens et des endroits au Canada, et qui sont basées sur une oeuvre littéraire ou un événement historique canadien.
Bien que le Conseil n'estime pas que ces critères additionnels s'imposent, il fait observer que le contrôle et la responsabilité des décisions se rapportant à la production visuelle d'une émission, du début à la fin, relèvent du producteur. Il est donc essentiel que le producteur, ou toute personne en assumant les fonctions, soit canadien, sous réserve des exemptions qui sont habituellement permises par le BCPAVC et le Conseil.
En dépit de ce qui précède, les coproductions et les coentreprises officielles avec des producteurs étrangers peuvent être admissibles à la condition qu'elles satisfassent à l'exigence minimale susmentionnée de 8 points.
Au sujet du contrôle canadien, le Conseil tient à ce que les Canadiens demeurent les véritables propriétaires des émissions qu'ils produisent. Il estime donc que, lors de l'examen des demandes, le fonds de production ne devrait pas financer de productions contrôlées par des étrangers. Pour ce faire, le meilleur moyen serait sans doute la collaboration entre les administrateurs du fonds et d'autres organismes de financement s'il y a lieu et(ou) l'examen des contrats pertinents et d'autres documents se rapportant à une production afin de s'assurer que les Canadiens demeurent les véritables propriétaires des projets financés par le fonds de production.
d) Heures de grande écoute
Les décaissements du fonds de production seront assujettis à l'inclusion, dans l'entente de diffusion, de dispositions prévoyant que toutes les catégories d'émissions autres que les émissions pour enfants seront diffusées au cours des heures de grande écoute, soit de 19 à 23 h. Les émissions s'adressant aux enfants doivent être diffusées lorsque le plus grand nombre d'enfants sont à l'écoute.
e) Sous-titrage codé
Les décaissements du fonds de production seront assujettis à la condition que les émissions où il y a narration, dialogue ou paroles chantées dans l'une ou l'autre des deux langues officielles soient sous-titrées. Comme certaines langues autochtones n'utilisent pas l'alphabet romain, le sous-titrage n'est pas obligatoire pour les émissions en langues autochtones.
f) Droits de diffusion canadiens
Dans le cas des droits de diffusion, les décaissements du fonds ne sont possibles que si un droit de licence d'une entreprise de programmation canadienne autorisée représente, selon l'émission et tel que prescrit ci-dessous, un pourcentage minimum du budget de l'émission. Le fonds de production devrait permettre aux requérantes d'avoir accès à des émissions devant être diffusées par des radiodiffuseurs privés et publics.
g) Accessibilité
Au moins 67 % des décaissements du fonds de production seront alloués à des émissions acquises de producteurs indépendants, et au plus 33 % des décaissements le seront pour des émissions produites par des producteurs affiliés à des radiodiffuseurs privés.
Toutefois, le fonds de production ne peut servir à financer des productions internes de télédiffuseurs (productions faites et diffusées par la même titulaire) ou des productions de sociétés affiliées à la SRC ou à d'autres radiodiffuseurs publics.
h) Le mécanisme
Pour permettre la contribution du fonds à des productions dramatiques, le Conseil a établi qu'un droit de diffusion représentant au moins 35 % du budget total d'une émission serait exigé des entreprises de programmation canadiennes. Les autres types d'émissions sous-représentées doivent obtenir des titulaires canadiennes des droits de diffusion représentant au moins 15 % du budget total. Le Conseil est convaincu que, dans la plupart des cas, ces droits représenteraient une augmentation des recettes actuelles des producteurs canadiens indépendants.
Le fonds de production fournira des paiements représentant 30 % des droits de diffusion. La partie du droit de diffusion couverte par le fonds de production doit être payée directement au producteur de l'émission.
Pour les fins d'engager les dépenses requises au titre des émissions canadiennes exprimées sous forme d'attentes ou dans des conditions jointes à leurs licences, les radiodiffuseurs privés seront autorisés à réclamer le plein montant du droit de diffusion, y compris la partie contribuée par le fonds, comme des dépenses admissibles au titre des émissions canadiennes. La SRC et les autres radiodiffuseurs publics ne seront pas autorisés à inclure la contribution du droit de diffusion provenant du fonds de production comme faisant partie de leurs dépenses au titre des émissions canadiennes.
i) Affectations selon la langue et la région
Un certain nombre de propositions ont été présentées au sujet de ce qui constituerait une affectation appropriée des décaissements du fonds entre les émissions produites dans les deux langues officielles et dans les différentes régions du pays. Comme la politique publique en matière de financement des productions en attribue généralement un tiers aux émissions de langue française et deux tiers aux émissions de langue anglaise, le Conseil estime qu'il devrait en être de même pour le fonds.
Des fonds peuvent également être disponibles pour des émissions en langues autochtones. Bien qu'aucune "enveloppe" spécifique ne doive être prévue pour les émissions autochtones, le financement de ces projets, de toutes les catégories admissibles, peut provenir des 20 % du fonds de production affectés aux catégories autres que les dramatiques ou les émissions pour enfants.
Bien que certains soient en faveur d'affectations selon la région, le Conseil craint que la création d'enveloppes régionales ne dilue l'impact du fonds de production. Toutefois, le Conseil s'attend à ce que les administrateurs du fonds soient sensibles aux besoins des producteurs et des radiodiffuseurs de toutes les régions.
j) Autres organismes de financement
Le fonds de production sera accessible, peu importe si les productions reçoivent ou non une aide financière d'autres organismes de financement. La participation ou le manque de participation d'autres organismes de financement ne devrait pas être une condition d'admissibilité d'une demande.
3. Conseil d'administration
a) Composition et représentation du conseil d'administration
Le fonds de production sera administré par un conseil d'administration indépendant composé de représentants de la communauté des producteurs canadiens, de l'industrie de la télédistribution et des radiodiffuseurs canadiens, comme suit :
 L'Association canadienne des radiodiffuseurs et l'Association canadienne de télévision par câble doivent désigner chacune trois membres au conseil d'administration.
 La Canadian Film and Television Producers Association et l'Association des producteurs de film et de télévision du Québec doivent nommer ensemble trois membres.
 L'Association for Tele-Education of Canada et la SRC doivent nommer chacun un membre. Ensemble, les titulaires des diverses entreprises de services spécialisés et de télévision payante doivent nommer un membre.
En nommant leurs représentants au conseil d'administration, les organismes qui présentent un candidat devraient tenir compte de la nécessité de refléter la composition linguistique et géographique du Canada.
Le conseil d'administration, à sa discrétion, peut rechercher des représentants d'autres secteurs et peut augmenter le nombre de membres en conséquence.
Les organismes qui présentent un candidat devraient informer le Conseil, dans les 90 jours de la date du présent avis, des personnes qui les représenteront au conseil d'administration.
b) Responsabilités du conseil d'administration
Le conseil d'administration devrait se fonder sur les lignes directrices de base établies par le Conseil et mettre en place un processus efficace et pratique permettant une évaluation objective des demandes, sans aucune évaluation subjective des mérites créateurs de chaque projet.
c) Rapports annuels
Le conseil d'administration fera rapport chaque année au Conseil de ses activités. Le premier rapport doit couvrir la période du 1er janvier 1995 au 31 août 1995 et doit être reçu avant la fin de l'année civile. Par la suite, le conseil d'administration rendra compte de ses activités pour la période du 1er septembre au 31 août.
d) Coûts d'administration
Afin qu'on prenne exemple sur lui, le conseil d'administration devrait s'assurer que les coûts d'administration du fonds de production soient les plus bas possible.
4. Conclusion
Le Conseil est persuadé que les producteurs indépendants et les titulaires d'entreprises de programmation du Canada, qui comptent parmi les éléments les plus essentiels du système de radiodiffusion, sauront apporter leur collaboration afin que les téléspectateurs canadiens puissent profiter au maximum des retombées bénéfiques du fonds de production.
Le Secrétaire général
Allan J. Darling

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