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Ottawa, le 1er mai 1989
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Décision Télécom CRTC 89-5
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PARADYNE CANADA LTD - RACCORDEMENT D'ÉQUIPEMENTS TERMINEAUX FOURNIS PAR L'ABONNÉ AU SERVICE DATAROUTE
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I INTRODUCTION
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Le 25 avril 1988, le Conseil a reçu une requête de la Paradyne Canada Ltd. (la Paradyne) visant à obtenir une ordonnance enjoignant à Bell Canada (Bell) de dégrouper les tarifs applicables aux Arrangements d'accès Dataroute afin de permettre le raccordement d'équipements terminaux fournis par l'abonné au service Dataroute. Bell a répondu à la requête de la Paradyne le 26 mai 1988 et celle-ci a répliqué le 6 juin 1988.
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Le 27 juin 1988, le Conseil a publié l'avis public Télécom CRTC 1988-28 dans lequel il demandait au public de formuler des observations au sujet de la requête de la Paradyne. Il a également joint la Compagnie de téléphone de la Colombie-Britannique (la B.C. Tel) comme partie à l'instance. Dans l'avis public Télécom CRTC 1988-35 du 28 juillet 1988, il a révisé la procédure applicable à l'instance afin de permettre un échange de demandes de renseignements entre la Paradyne et les compagnies de téléphone.
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Plusieurs parties ont soumis des observations au sujet de la requête de la Paradyne, notamment: l'Amdahl Communications Inc. (l'Amdahl); l'ACT Computer Services Ltd.; l'Association of Competitive Telecommunications Suppliers (l'ACTS); la province de la Colombie-Britannique; la British Columbia Systems Corporation; l'Alliance canadienne des télécommunications de l'entreprise (l'ACTE); la Dataline Inc.; The Depository and Clearing Coporation; la Gandalf Data Limited; la Glengarry Transport Limited; les Hamilton Computers; IBM Canada Ltée (IBM); l'Independent Data Communications Manufacturers Association, Inc. (l'IDCMA); la New Brunswick Telephone Company, Limited (la N.B. Tel); la Newfoundland Telephone (la Newfoundland Tel); le gouvernement de l'Ontario, ministère de la Culture et des Communications (l'Ontario); Hydro-Ontario; la Prudential Assurance Co. Ltd.; le gouvernement de la Saskatchewan; la R.L. Crain Inc.; et la Telecomsyst Services Inc.
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II HISTORIQUE
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Telecom Canada offre le service Dataroute depuis 1973. Il s'agit d'un service numérique de transmission de données point à point de ligne directe comportant différentes vitesses de transmission des données. Dans le cas de services numériques comme le Dataroute, l'équipement se trouvant chez l'abonné se compose de ce qui suit: (1) une composante de service des données qui code et décode les données de l'abonné, et (2) une composante de service de voies qui est raccordée à la voie de transmission et qui interagit avec l'équipement de la compagnie de téléphone pour effectuer les tests diagnostiques du rendement du réseau. En général, ces deux composantes sont combinées en une seule pièce d'équipement appelée équipement terminal à liaison numérique (ETLN).
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III REQUETE DE LA PARADYNE
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Dans sa requête, la Paradyne a demandé des ordonnances qui obligeraient Bell à (1) dégrouper les tarifs applicables à une voie à quatre fils et à l'ETLN qui fait partie des Arrangements d'accès Dataroute; et (2) à permettre le raccordement d'ETLN fourni par l'abonné au service Dataroute de Bell.
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La Paradyne a fait valoir que le présent tarif qui prévoit des Arrangements d'accès Dataroute contrevient au paragraphe 321(2) (maintenant le paragraphe 340(2)) de la Loi sur les chemins de fer puisqu'ii confère à Bell une préférence ou un avantage indu dans la prestation de l'ETLN, et exerce une discrimination à l'égard de la Paradyne et d'autres fournisseurs et fabricants d'ETLN et la désavantage par rapport à Bell et au fournisseur de celle-ci, l'Amdahl.
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La Paradyne a fait savoir que la décision Télécom CRTC 82-14 du 23 novembre 1982 intitulée Raccordement d'équipements terminaux fournis par l'abonné devrait servir de base aux lignes directrices régissant la participation de Bell dans le marché de l'équipement terminal Dataroute. Elle a également suggéré qu'on modifie le plus tôt possible la norme d'homologation NH-03 du Comité consultatif du programme de raccordement de terminaux (CCPRT) ainsi que les procédures d'homologation connexes de manière à inclure l'ETLN.
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Selon la Paradyne, une politique libéralisée en matière de raccordement d'ETLN entraînerait une baisse des prix, un choix accru d'équipements et de sources d'approvisionnement ainsi qu'une souplesse et une efficacité accrues pour les abonnés du service d'affaires en particulier.
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IV RÉPONSE DE BELL
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Dans sa réponse du 26 mai 1988, Bell a fait valoir que le service Dataroute se caractérise fondamentalement par le fait qu'un seul fournisseur est responsable de l'installation, de l'essai et de la maintenance de bout en bout et que cet élément a contribué à son succès.
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En réponse à l'affirmation de la Paradyne selon laquelle les Arrangements d'accès Dataroute confèrent une préférence ou un avantage indu à Bell, cette dernière a fait remarquer que le tarif avait été approuvé par le Conseil comme juste et raisonnable. La compagnie a affirmé que les Arrangements d'accès Dataroute actuels sont encore appropriés et conformes à toutes les exigences de la Loi sur les chemins de fer. Elle a soutenu que la Paradyne n'avait pas établi que les ordonnances demandées sont justifiées dans l'intérêt public.
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La compagnie a noté que les capacités de surveillance et d'essai du réseau sont inhérentes à l'ETLN installé dans les locaux d'un abonné du service Dataroute. Elle a en outre observé que cet équipement est actuellement classé comme équipement de réseau et que le Conseil a traité de sa classification comme telle dans des instances antérieures.
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Plus particulièrement, Bell a souligné que, dans la décision Télécom CRTC 84-11 du 30 mars 1984 intitulée Bell Canada et Compagnie de téléphone de la Colombie-Britannique - Mise en oeuvre de la décision permettant le raccordement d'équipements terminaux fournis par l'abonné, il lui avait été ordonné d'informer le Conseil des services dans le cadre desquels l'équipement terminal était groupé avec l'accès au service de transmission. En réponse, la compagnie a déposé l'avis de modification tarifaire 1247 dans lequel elle a déclaré que l'équipement terminal se trouvant chez l'abonné et associé aux arrangements d'accès de données pour des services comme le Dataroute n'avait pas été considéré comme de l'équipement terminal. Bell a déclaré que le Conseil avait approuvé l'avis de modification tarifaire 1247 tel que déposé.
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Bell a également fait remarquer que, dans la décision Télécom CRTC 86-5 du 20 mars 1986 intitulée Participation de Bell Canada et de la Compagnie de téléphone de la Colombie-Britannique dans le marché des équipements terminaux multilignes et de données (la décision 86-5), le Conseil avait établi qu'au moment de la décision et pour les fins de la décision, l'expression équipement terminal de transmission de données devrait être considérée comme renvoyant à de l'équipement se trouvant chez l'abonné qui ne fait pas partie intégrante de l'exploitation de la voie fournie par le transporteur.
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Selon la compagnie, aucun des développements ou des changements survenus ne devrait modifier la classification de l'ETLN comme équipement de réseau.
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Bell a fait savoir que, lorsque le service Dataroute a été mis en place, les normes chez les fournisseurs et les fabricants faisaient défaut. La compagnie a donc été obligée de choisir un schéma de signalisation standard et elle en a adopté un qui avait été élaboré par le prédécesseur de l'Amdahl. Elle a fait remarquer qu'afin de satisfaire les exigences de la compagnie et celles de ses abonnés, l'ETLN a évolué en divers dispositifs et que divers genres d'installations d'accès local sont utilisés avec le service Dataroute. Ainsi, six différents types d'ETLN sont actuellement en usage.
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Bell a déclaré que, lorsque l'ETLN est considéré comme de l'équipement de réseau et qu'il est fourni par les transporteurs, ceux-ci sont libres d'utiliser diverses techniques dans différentes régions de leurs territoires d'exploitation ou de modifier les caractéristiques et les techniques des voies du réseau en réponse aux nouveaux développements. Les transporteurs peuvent ainsi offrir le service le plus efficace et le plus rentable à leurs abonnés et pour lesquels tout changement apporté à la technique d'accès local est apparent.
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Selon Bell, l'ETLN remplit deux fonctions distinctes: (1) des fonctions diagnostiques et d'essai pour le réseau; et (2) des fonctions d'appareil de transmission de données numériques pour l'abonné. Elle a fait savoir que, si la requête de la Paradyne est approuvée, deux composantes distinctes exécuteraient ces deux fonctions, l'une fournie par le transporteur et l'autre par l'abonné. Elle a ajouté que le dispositif fourni par le transporteur devrait être disponible dans différents modèles afin d'être compatible avec les différentes techniques d'accès local utilisées par Bell et d'autres membres de Telecom Canada. D'après elle, un tel dispositif n'existe pas actuellement. Avec la technologie actuelle, il n'existe pas, à son avis, de dispositif capable de remplir les deux fonctions et qui soit compatible avec les diverses techniques d'accès local. Selon elle la proposition de la Paradyne n'était pas réalisable sur le plan technique.
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La compagnie a en outre soutenu que, si les problèmes techniques étaient résolus, il en coûterait néanmoins très cher d'apporter tous les changements nécessaires pour mettre en oeuvre la proposition de la Paradyne. Bell a fait valoir qu'il serait insensé d'exiger que les abonnés du service Dataroute paient ces frais additionnels sans que la nature ou la qualité du service qu'ils reçoivent ne s'en trouve améliorée. Elle a conclu que la Paradyne n'avait pas prouvé que les changements qu'elle a proposés procureraient des avantages matériels aux utilisateurs du service Dataroute.
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V EXPOSÉS DES INTERVENANTS
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A. Intervenants favorables
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Les intervenants favorables ont avancé que l'approvisionnement concurrentiel de l'ETLN offrirait des avantages, dont un choix accru, des coûts moins élevés, l'innovation technique, une souplesse accrue pour les utilisateurs, un accès accru à la technologie actuelle et une utilisation plus efficace des ressources du réseau.
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L'ACTE a maintenu que les avantages pour les abonnés de posséder leur équipement terminal sont clairement établis et que le dégroupement et l'approvisionnement concurrentiel de l'ETLN permettraient aux abonnés du service Dataroute de profiter des avantages. Elle a ajouté que la constatation du Conseil dans la décision 86-5 selon laquelle les terminaux Dataroute font partie intégrante du réseau reflétait l'opinion du Conseil à ce moment-là, et que celui-ci avait reconnu que dans l'avenir, il faudrait sans doute rajuster la définition d'équipement terminal.
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L'ACTE a proposé que l'équipement de central de Bell soit modifié de manière à pouvoir accepter les signaux d'équipement d'autres compagnies que l'Amdahl ou que Bell soit tenue de publier le protocole de signalisation de l'Amdahl. Elle a ajouté que la décision Télécom CRTC 77-6 du 23 décembre 1977 intitulée Challenge Communications Ltd. c. Bell Canada, est un précédent pour cette dernière option. Elle a précisé que les problèmes que posent les diverses techniques d'accès utilisées par Bell pourraient être réduits si Bell informait l'abonné de la technique d'accès particulière mise en place.
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L'IDCMA a fait observer qu'aux États-Unis, la Federal Communications Commission (la FCC) qui avait traité une demande analogue, avait décidé d'autoriser l'abonné à posséder l'équipement se trouvant dans ses locaux et associé au Digital Dataphone Service (DDS), l'équivalent américain du service Dataroute. Elle a déclaré que dans l'instance américaine, Bell System avait avancé les mêmes arguments que les transporteurs canadiens et que la FCC les avait rejetés. Le fait pour l'abonné de posséder l'ETLN, a-t-elle précisé, n'avait pas causé de préjudice au réseau, mais avait procuré d'importants avantages aux utilisateurs.
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Hydro-Ontario a soutenu que les transporteurs n'avaient pas justifié le fait qu'elle assure la prestation exclusive et permanente de l'ETLN. Elle a fait observer que les arguments mis de l'avant par les transporteurs étaient essentiellement les mêmes que ceux qui avaient été avancés dans des instances antérieures portant sur le raccordement d'équipements terminaux. Hydro-Ontario estimait que des arguments semblables seraient mis de l'avant dans des instances à venir. Elle a proposé que le Conseil rende une décision de grande portée dans la présente instance, afin de régler la question de la propriété de l'équipement se trouvant chez l'abonné. Elle a également affirmé que le rejet de la requête créerait un dangereux précédent pour de nouvelles techniques, comme le Réseau numérique à intégration de services (RNIS).
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Selon l'ACTS, Bell ne devrait pas être autorisée à "se cacher" derrière des spécifications exclusives pour justifier des tarifs discriminatoires.
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L'Ontario a fait savoir qu'il faut empêcher les transporteurs d'offrir des services qui groupent des composantes monopolistiques et concurrentielles. Elle a noté qu'aux États-Unis, l'équipement terminal de réseau est offert sur une base concurrentielle. Selon elle, l'approvisionnement concurrentiel de cet équipement n'est pas incompatible avec la bonne maintenance du réseau. A son avis, l'équipement terminal Dataroute devrait donc être fourni sur une base concurrentielle, sous réserve de normes d'homologation appropriées.
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IBM estimait que les tarifs Dataroute actuels confèrent une préférence ou un avantage indu à Bell et à la B.C. Tel ainsi qu'à leurs fournisseurs exclusifs d'ETLN. A son avis, l'ETLN actuellement fabriqué peut maintenant offrir d'importantes capacités de gestion et de reconfiguration qui peuvent être adaptées aux besoins individuels des abonnés uniquement dans un milieu concurrentiel. Elle a fait valoir que les fonctions réseau exécutées par l'ETLN sont relativement simples et qu'elles pourraient être remplies par de l'équipement fourni sur une base concurrentielle.
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IBM n'était pas d'accord avec le fait que l'approbation de la requête créerait certains problèmes techniques. Elle a affirmé qu'avec la technologie actuelle, quatre modèles différents d'ETLN pourraient accommoder les six techniques d'accès local distinctes identifiées par Bell. Elle a indiqué que certains de ces modèles utilisent des techniques non exclusives.
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B. Intervenants défavorables
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L'Amdahl a souligné que son prédécesseur avait conçu le schéma de signalisation utilisé dans le réseau Dataroute. Elle n'était donc pas disposée à permettre l'accès à sa propriété intellectuelle sans en tirer un avantage financier important. Elle a fait valoir que des comparaisons entre les marchés canadien et américain ne conviennent pas. En effet, les transporteurs américains ne sont pas tenus d'offrir un service numérique de bout en bout qui inclut l'essai diagnostique de l'interface de machine de bureau; ces fonctions étant plutôt laissées à l'abonné. Au Canada, le réseau Dataroute fournit l'essai diagnostique jusqu'au niveau de l'ETLN inclusivement. L'Amdahl a précisé que ces fonctions améliorent la disponibilité du réseau ainsi que l'efficience opérationnelle. Sur cette base et compte tenu d'autres différences, l'Amdahl a mis en doute l'hypothèse selon laquelle les abonnés canadiens du service Dataroute bénéficieraient du dégroupement de la même manière que les abonnés américains du DDS.
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La Newfoundland Tel et la N.B. Tel ont présenté des arguments semblables à ceux que Bell avait soumis à l'appui de l'approvisionnement exclusif et permanent de l'ETLN. Elles ont maintenu que l'approbation de la requête ne servirait pas l'intérêt public. Le gouvernement de la Saskatchewan s'est également opposé à la requête de la Paradyne pour des raisons analogues.
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La Glengarry Transport, la R.L. Crain et les Hamilton Computers ont exprimé des craintes au sujet de la requête de la Paradyne. Ils estimaient que l'approbation de la requête pourrait créer des problèmes de service. Ils estimaient que le service actuellement assuré est fiable et bien géré et que son dégroupement pourrait donner lieu à des temps d'arrêt plus longs ainsi qu'à des problèmes de réparation, en particulier si Telecom Canada ne pouvait plus offrir le service de bout en bout.
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VI PLAIDOYER
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A. Bell
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Dans son plaidoyer final, Bell a répété que les Arrangements d'accès Dataroute actuels contenus dans son tarif et approuvés par le Conseil continuaient de convenir. Elle a répété qu'à son avis, la Paradyne n'avait pas établi que les ordonnances sollicitées sont justifiées dans l'intérêt public.
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Bell a affirmé que, pour plusieurs raisons, les questions que soulèvent la requête de la Paradyne diffèrent de celles qui se rapportent au raccordement de l'équipement terminal au réseau téléphonique public commuté (RTPC). Premièrement, le service Dataroute est un service concurrentiel, qui concurrence directement des installations intercirconscriptions analogiques utilisées avec des modems, ainsi qu'avec les services Anikom 200 et 500 de Télésat Canada et le service Infodat du CNCP
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Deuxièmement, Bell a fait observer que l'accès au RTPC nord-américain est normalisé depuis de nombreuses années. Toutefois, le service Dataroute comprend des composantes exclusives uniques élaborées et financées par un fournisseur non affilié, le prédécesseur de l'Amdahl. Le schéma de signalisation conçu par ce prédécesseur est devenu standard pour le réseau Dataroute. Bell a déclaré que seule l'Amdahl l'utilise dans tous ses multiplexeurs et ses produits d'accès et pas seulement dans ceux qui sont employés dans le service Dataroute. Elle a ajouté qu'elle n'est pas libre de publier ou de divulguer les spécifications exclusives de l'Amdhal.
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Troisièmement, Bell a fait remarquer que contrairement à l'équipement terminal raccordé au RTPC, l'ETLN fait partie intégrante du réseau Dataroute. De plus, il y a une interdépendance entre l'ETLN et les multiplexeurs du réseau Dataroute pour ce qui est des alarmes, des essais, de la transmission des codes de contrôle et des diagnostiques de défectuosités. Elle a ajouté que l'ETLN offre une capacité apparente de raccordement entre les machines de bureau et étend les capacités d'essais du réseau aux locaux de l'abonné.
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Quatrièmement, Bell a indiqué que plusieurs types diférents d'installations d'accès local sont utilisés dans la prestation du service Dataroute. Le réseau Dataroute emploie six différents types d'ETLN. Le RTPC, par ailleurs, n'utilise qu'un arrangement d'accès local qui fonctionne avec tous les équipements terminaux du RTPC.
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Bell a soutenu qu'en raison des caractéristiques spéciales et uniques du service Dataroute, le fait pour l'abonné de posséder l'ETLN entraînerait des problèmes et des coûts. Elle a indiqué deux approches qui permettraient à l'abonné de devenir propriétaire de l'ETLN sans la publication ou l'autorisation du schéma de signalisation de l'Amdahl. Selon la première, un protocole public serait élaboré pour fins d'utilisation avec l'ETLN fourni par l'abonné. Dans ses locaux, l'abonné aurait besoin d'un dispositif distinct pour convertir le protocole public en protocole exclusif utilisé par le réseau. Selon la deuxième, il y aurait conversion du protocole public au moyen d'un dispositif se trouvant au central. Selon Bell, bien qu'elles soient réalisables, l'une ou l'autre des approches serait coûteuse et signifierait des modifications majeures à l'équipement de la compagnie. Elle a ajouté que ce sont les abonnés qui paieraient ultimement les coûts additionnels.
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Bell a affirmé que les circonstances du présent cas diffèrent sensiblement de celles de la cause Challenge Communications. Elle a précisé que le service Dataroute n'est pas un nouveau service, mais plutôt un service bien établi sur lequel de nombreux abonnés peuvent compter. De plus, la spécification en question se rapporte à un service concurrentiel et non au RTPC. En outre, la spécification du service Dataroute n'a pas été conçue par Bell, mais bien par un fournisseur non affilié qui l'utilise dans tous ses multiplexeurs et produits d'accès. Bell estimait qu'il ne conviendrait pas que le Conseil ordonne la divulgation de la spécification. A son avis, le Conseil n'est pas habilité à ordonner la divulgation de la propriété intellectuelle de l'Amdahl.
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Bell a déclaré que, parce qu'elle emploie six techniques différentes dans son installation de ligne d'accès, le fait pour l'abonné d'être propriétaire de l'ETLN exigerait une conception de différents appareils d'ETLN. Le choix d'accès de la compagnie ne serait pas apparent pour l'utilisateur, et il faudrait assurer une coordination supplémentaire entre l'abonné et la compagnie. Cette situation allongerait le processus d'approvisionnement.
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Bell a soutenu que les avantages pouvant découler du fait que l'ETLN devienne la propriété de l'abonné seraient annulés par les coûts et les inconvénients. Elle estimait que les avantages du dégroupement ont été exagérés dans la présente instance et que bon nombre des capacités qui, selon la Paradyne, découleraient du fait que l'abonné possède l'ETLN sont déjà disponibles commercialement sous la forme de dispositifs pouvant être raccordés au réseau Dataroute.
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Bell a mis en doute l'argument selon lequel les capacités de gestion efficace du réseau ne sont possibles que par le contrôle de l'abonné sur l'ETLN. Selon elle, c'est l'équipement intégré qui a accès à de l'information du réseau qui constitue la meilleure garantie d'une bonne gestion du réseau pour un service comme le Dataroute. En fait, de déclarer Bell, certaines fonctions de gestion du réseau ne peuvent être exécutées que par l'équipement qui se trouve au central.
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Bell a également mis en doute l'affirmation selon laquelle la propriété par l'abonné de l'ETLN se traduirait par des innovations technologiques. Elle a affirmé qu'aucun exemple concret n'avait été fourni de ces innovations aux États-Unis où l'on autorise l'abonné à posséder l'équipement associé au DDS. Elle a fait valoir que la seule innovation importante du réseau DDS est venue du fournisseur réseau, l'American Telephone and Telegraph (l'AT&T)
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Bell a pris note des arguments selon lesquels le rejet de la requête de la Paradyne pourrait créer un dangereux précédent pour des services comme le RNIS. Elle a précisé que le Conseil n'avait pas à considérer la présente cause comme un précédent. La compagnie a indiqué que dans un proche avenir, elle prévoyait dégrouper certains équipements utilisés dans ses services de transmission de données Megastream et Centrex III. Elle était également en faveur de la propriété par l'abonné et par le transporteur de l'équipement remplissant des fonctions d'interface NJ-1 dans les futurs services RNIS. A son avis, chaque cas devrait être étudié individuellement.
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En dernier lieu, Bell a pris note de l'affirmation d'IBM selon laquelle un schéma de signalisation standardisé pour les services numériques de réseau en Amérique du Nord s'impose depuis longtemps. Selon elle, une telle norme, c'est-à-dire la norme RNIS, en est actuellement à l'étape de mise au point.
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B. La B.C. Tel
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La B.C. Tel s'est opposée à la requête de la Paradyne. Elle a appuyé l'opinion de Bell selon laquelle l'ETLN fait partie intégrante de l'équipement et des installations réseau nécessaires pour offrir le service Dataroute. Elle a également appuyé l'opinion de Bell qui veut que lorsque les transporteurs fournissent l'ETLN, ils sont libres d'utiliser différentes techniques afin d'offrir un service efficace et économique.
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La B.C. Tel a fait valoir qu'il ne conviendrait pas que le Conseil, outrepassant son autorité, se prononce "unilatéralement" sur le schéma de signalisation exclusif de l'Amdahl.
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La B.C. Tel a convenu avec Bell pour dire que la responsabilité d'un seul fournisseur a accru l'essor et le succès du service Dataroute. Elle a ajouté que sa position comme service national géré par des membres de Telecom Canada en vertu d'une structure tarifaire et de modalités de service uniformes a contribué dans une large mesure au succès du service Dataroute. La compagnie a précisé que, si le Conseil ordonnait à Bell et à la B.C. Tel de dégrouper le service Dataroute, rien ne garantissait que d'autres membres de Telecom Canada suivraient. Ainsi, les tarifs et les modalités de service pourraient varier entre les zones de desserte Dataroute groupées et dégroupées. Les abonnés du service en dehors des limites territoriales d'un transporteur connaîtraient donc des complications techniques et administratives. En outre, le processus d'approvisionnement serait allongé dans les zones de desserte Dataroute où le service serait dégroupé, parce qu'il faudrait coordonner chaque arrangement d'accès local particulier avec chaque abonné.
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La B.C. Tel a soutenu qu'équiper les centraux de manière qu'ils puissent capter les signaux autres que ceux de l'Amdahl signifierait des coûts très élevés qui seraient ultimement payés par les abonnés. Tout comme Bell, la B.C. Tel a fait savoir que la plupart des capacités invoquées comme avantages du dégroupement étaient déjà disponibles grâce à des dispositifs que les utilisateurs peuvent acheter et raccorder au réseau Dataroute. A son avis, la proposition de la Paradyne, si elle est approuvée, ne procurerait pas d'avantages importants qui ne sont pas déjà offerts par d'autres moyens prévus dans le cadre du service Dataroute en place. La compagnie a ajouté que la proposition de dégroupement signifie des coûts et des fardeaux que ne peuvent justifier les gains modestes possibles.
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C. La Paradyne
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La Paradyne a pris note de l'argument de Bell selon lequel le tarif Dataroute avait été approuvé comme juste et raisonnable. Elle a déclaré que dans la décision Télécom CRTC 79-12 du 7 juin 1979 intitulée Colins Inc. et al c. Bell Canada, et dans la cause Challenge Communications, les tarifs pertinents avaient également été approuvés comme justes et raisonnables. Ils ont toutefois été rejetés à la lumière des éléments de preuve montrant que ces tarifs conféraient une préférence ou un avantage indu à Bell. Elle a soutenu que les Arrangements d'accès Dataroute sont contraires au paragraphe 340(2) de la Loi sur les chemins de fer.
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La Paradyne a fait valoir que, conformément à l'article 340 de la Loi sur les chemins de fer, il appartient à la compagnie de prouver que la discrimination n'est pas injuste ou que la préférence n'est pas indue ou déraisonnable. A son avis, Bell ne l'avait pas fait.
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La Paradyne a précisé que le fait qu'un service groupé soit concurrentiel n'a rien à voir avec la question de savoir si le transporteur devrait être autorisé à offrir de l'équipement monopolistique se trouvant chez l'abonné. A son avis, il s'agit de savoir si l'approvisionnement concurrentiel d'équipement fourni par l'abonné est faisable et si un monopole exercé par un transporteur dans l'approvisionnement crée un avantage indu pour celui-ci.
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La Paradyne a précisé que l'approbation par le Conseil de l'avis de modification tarifaire 1247 n'empêche pas un nouvel examen de la liste d'équipements terminaux qui devraient être dégroupés des services réseau. Elle a en outre ajouté que dans la décision 86-5, le Conseil avait traité de la question de la séparation structurelle; il ne s'était pas penché sur celles de savoir si l'équipement de transmission des données fait partie intégrante des activités réseau ou si l'approvisionnement concurrentiel de l'ETLN est mérité. Elle a indiqué que, dans la décision 86-5, le Conseil a souligné expressément que les développements futurs peuvent exiger une redéfinition de la catégorie équipements terminaux aux fins de l'établissement du prix de revient.
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D'après la Paradyne, l'ETLN ne fait pas plus partie "intégrante," fonctionnellement, des activités réseau que d'autres genres d'équipements fournis par l'abonné pour lesquels un raccordement a été autorisé.
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Paradyne a soutenu que le Conseil n'a pas empêché à ce jour l'approvisionnement concurrentiel d'équipements terminaux parce que cet équipement fait Partie intégrante du réseau. Elle a déclaré que le Conseil n'avait avancé aucun critère général quant à ce qui constitue l'"intégralité du réseau" pour ce qui est de l'équipement terminal. De l'avis de la Paradyne, le critère devrait tourner autour de la question de savoir si l'équipement terminal concurrentiel peut être fourni selon les normes qui empêchent le préjudice au réseau et qui prévoit une "intercommunication appropriée terminal/terminal et terminal/réseau."
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La Paradyne a déclaré que le Conseil, d'autres organismes canadiens de réglementation des sociétés exploitantes de télécommunications et la FCC ont conclu que les normes techniques pour protéger le réseau et assurer l'intercommunication ont permis le raccordement d'équipement terminal concurrentiel. La Paradyne a admis que la publication d'une norme d'intercommunication est tout ce qu'il faut. Elle a noté que deux de ces normes existent déjà : (1) la norme de signalisation Dataroute, et (2) les DDS Channel Interface Specifications publiées par l'AT&T.
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La Paradyne a également noté que même le plus simple équipement d'accès au RTPC de l'abonné doit communiquer avec l'équipement diagnostique de central au moyen d'un schéma de signalisation standard.
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La Paradyne a également qualifié de non pertinente la tentative de Bell de différencier l'ETLN Dataroute des terminaux fournis sur une base concurrentielle en s'appuyant sur le fait que le service Dataroute emploie plusieurs arrangements d'accès. Cette situation ne constitue pas selon elle un obstacle important à la proprité par l'abonné. Elle a noté que 95 % des arrangements d'accès Dataroute utilisent des installations numériques directes équipées d'un ou de plusieurs genres standard d'ETLN de l'Amdahl. Elle a également fait remarquer que la plupart des arrangements d'accès restants utilisent soit des protocoles analogiques soit des protocoles DDS qu'un dispositif distinct permet de convertir en protocole de l'Amdahl. Elle a précisé que ces arrangements d'accès n'entravent aucunement sur le plan technique l'approvisionnement concurrentiel et elle a poursuivi en disant qu'il n'y a aucune raison de refuser l'approvisionnement concurrentiel avec le DDS et les arrangements analogiques, étant donné qu'il existe de l'équipement normalisé pour ces applications.
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D'après la Paradyne, les transporteurs devraient être libres d'utiliser différentes techniques dans la prestation de ce service. Elle estimait cependant que l'abonné devrait être informé du type de technique employée, afin de choisir l'équipement terminal de Bell ou d'un autre fournisseur qui convient le mieux.
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La Paradyne a traité de deux coûts possibles de dégroupement cités par les transporteurs : (1) les modifications d'équipement pour permettre la conversion d'une norme de signalisation publiée à celle de l'Amdahl; et (2) un temps d'approvisionnement accru. Elle a noté que l'installation d'un convertisseur de signalisation serait la seule modification à apporter à l'équipement. Elle a fait valoir qu'un convertisseur ne serait utile que si le Conseil refusait d'exiger que Bell et la B.C. Tel publient les paramètres de signalisation de central Dataroute, ou si ces paramètres ne pouvaient être établis par rétrotechnique ou n'étaient pas assurés par voie d'une licence commerciale. De l'avis de la Paradyne, une décision appropriée du Conseil rendrait un convertisseur superflu. Selon elle, ce dispositif donnerait lieu à des dépenses non productives et inutiles, perpétuerait la fausseté qu'il existe quelque chose qu'il ne faut pas divulguer dans le schéma de signalisation de l'Amdahl, et qui pourrait également empêcher les abonnés d'utiliser pleinement les capacités accrues de fonctionnement e. gestion du réseau résultant du raccordement de l'ETLN fourni par l'abonné.
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La Paradyne a mis en doute l'affirmation de Bell et de la B.C. Tel selon laquelle le temps d'approvisionnement serait accru. Elle a ajouté que ces poblèmes d'approvisionnement qui ont existé avaient été créés par les transporteurs et qu'on pouvait facilement les résoudre sans qu'il en coûte un sou au transporteur ou à l'abonné.
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La Paradyne a également mis en doute les arguments selon lequels les avantages de l'approvisionnement concurrentiel de l'ETLN avaient été exagérés. A l'appui de sa position, elle a discuté de certaines innovat que permettrait l'ETLN Dataroute intégré. Elle a également indiqué certains avantages additionnels qui pourraient résulter du dégroupement service Dataroute.
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La Paradyne a exhorté le Conseil à rejeter les arguments voulant qu'exiger des transporteurs qu'ils divulguent suffisamment de renseignements pour permettre à d'autres fournisseurs de fabriquer de l'équipement terminal pouvant fonctionner comme l'ETLN Dataroute signifierait s'ingérer dans la propriété intellectuelle de l'Amdahl. Elle a précisé qu'accepter cet argument créerait un dangereux précédent pour la concurrence future dans le domaine des télécommunications. Elle a ajouté que cette acceptation signifierait permettre à des transporteurs de juridiction fédérale d'empêcher le raccordement d'équipement concurrentiel ou l'interconnexion de système dans de nouveaux services par des clauses contractuelles régissant le caractère confidentiel. Elle a fait savoir qu'il est essentiel dans l'intérêt public que le Conseil arrête que les transporteurs ne peuvent "se cacher derrière des arrangements avec des tierces parties" pour empêcher la divulgation de normes de réseau nécessaires pour offrir l'accès au réseau conformément aux exigences de la Loi sur les chemins de fer.
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La Paradyne a fait valoir qu'afin de prévoir l'approvisionnement concurrentiel de l'ETLN Dataroute, le Conseil n'a pas besoin d'exiger que Bell et que la B.C. Tel fournissent toutes les spécifications concernant le fonctionnement de l'équipement du réseau Dataroute. Il suffit aux fournisseurs éventuels d'ETLN de savoir ce que l'ETLN doit faire pour communiquer avec l'équipement du réseau Dataroute. La Paradyne a ajouté que la divulgation de ces renseignements n'entraverait pas la capacité de l'Amdahl de livrer une concurrence efficace dans la prestation de l'ETLN Dataroute; elle n'entraverait pas non plus le statut de l'Amdahl comme fournisseur exclusif d'équipement de central Dataroute à Bell et à la B.C. Tel.
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La Paradyne a soutenu que plusieurs facteurs dans le dossier de la présente instance suggèrent que le schéma de signalisation Dataroute ne devrait pas être considéré comme "propriété intellectuelle" dans le sens d'un ensemble de connaissances qu'il faut protéger en vertu de la loi ou de la politique publique. Elle a fait remarquer que le schéma n'a jamais été breveté et que ni l'Amdahl, ni Bell, ni la B.C. Tel n'a suggéré qu'il est sous copyright. D'après elle, les paramètres de signalisation ne peuvent, en droit, constituer un secret de marché. Elle a ajouté que plusieurs facteurs révèlent que le schéma de signalisation de l'Amdahl, dans la mesure où il devrait être divulgué dans une norme d'interface de réseau, ne constitue pas quelque chose de matériel ou de fonctionnellement différent des normes d'interface de voies DDS plus avancées qui ont été élaborées par la suite.
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La Paradyne a déclaré que dans la cause Challenge Communications, le Conseil avait noté dans ses raisons pour rejeter l'affirmation de Bell selon laquelle les normes d'interface ne devraient pas etre divulguées, que Bell n'avait pas obtenu une protection par brevet pour la technologie en question. Citant la cause Challenge Communications, la Paradyne a fait valoir que le Conseil est habilité à exiger que les transporteurs fournissent des normes techniques afin d'autoriser l'interconnexion d'équipement. Elle a précisé que le Conseil devrait prendre cette décision dans le cas présent parce que l'information requise pour une norme publique ne peut être considérée comme une forme acceptable de propriété intellectuelle et parce que la clause de caractère confidentiel dans le contrat de Bell avec la Paradyne devrait être considérée comme subordonnée à une mesure de réglementation du gouvernement, comme une ordonnance de divulgation pour assurer la conformité avec la Loi sur les chemins de fer.
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VII CONCLUSIONS
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Le paragraphe 340(2) de la Loi sur les chemins de fer porte que :
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340.(2) Une compagnie ne peut, en ce qui concerne les taxes ou en ce qui concerne les services ou installations qu'elle fournit à titre de compagnie de télégraphe ou de téléphone:
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a) établir de discrimination injuste contre une personne ou une compagnie;
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b) instaurer ou accorder une préférence ou un avantage indu ou déraisonnable à l'égard ou en faveur d'une certaine personne ou d'une certaine compagnie ou d'un certain type de trafic, à quelque point de vue que ce soit;
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c) faire subir à une certaine personne, une certaine compagnie ou un certain type de trafic un désavantage ou préjudice indu ou déraisonnable, à quelque point de vue que ce soit.
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Lorsqu'il est démontré que la compagnie établit une discrimination ou accorde une préférence ou un avantage, il incombe à la compagnie de prouver que cette discrimination n'est pas injuste ou que cette préférence n'est pas indue ou déraisonnable.
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(3) La Commission peut déterminer, comme questions de fait, si le trafic se fait et s'est fait dans des circonstances et conditions sensiblement analogues et s'il y a eu, dans quelque cas que ce soit, une discrimination injuste, ou une préférence, un avantage, un préjudice ou un désavantage indu ou déraisonnable au sens du présent article....
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Le Conseil a établi son approche à l'égard du paragraphe 340(2) dans la cause Challenge Communications. En effet, il y a fait observer que deux éléments essentiels doivent exister pour fonder une requête en vertu de cet article : (1) discrimination, préférence, avantage, préjudice ou inconvénient; et (2) absence de justification. Le Conseil a déclaré entre autres choses que: le terme discrimination renvoie au traitement différent que la compagnie accorde à différentes personnes qui sont assujetties à des conditions très semblables; les alinéas 340(2)a), b) et c) se rapportent tous au traitement comparatif que la compagnie accorde à différentes personnes qui peuvent par la suite profiter ou souffrir de ce traitement; les termes avantage et désavantage renvoient à la nature, à l'étendue et au résultat d'un traitement favorable ou défavorable accordé par la compagnie; et l'alinéa 340(2)b) embrasse tout dans son interdiction de toute préférence ou de tout avantage indu ou déraisonnable à quelque point de vue que ce soit.
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Dans la cause Challenge Communications, le Conseil a constaté que l'avantage que Bell s'était conféré en se rendant le seul fournisseur du service de radiotéléphonies mobiles automatiques (AMTS) était, en soi, une préférence ou un avantage au sens de l'alinéa 340(2)b). Dans le cas présent, il observe que les deux compagnies, en se rendant les seuls fournisseurs d'ETLN, se sont conféré une préférence ou un avantage, par rapport à d'autres fournisseurs possibles d'ETLN, au sens de l'alinéa 340(2)b). Il note de la même façon qu'en faisant de l'Amdahl le fournisseur exclusif d'ETLN raccordé à leurs réseaux, les deux compagnies lui ont conféré une préférence ou un avantage par rapport à d'autres fabricants d'ETLN. Il remarque en outre qu'elles ont traité différemment d'autres fournisseurs et fabricants d'ETLN, même si ces fournisseurs et fabricants, en cherchant à commercialiser l'ETLN, vivaient des situations très semblables aux leurs et à celles de l'Amdahl. Bell et la B.C. Tel ont donc exercé une discrimination contre les fournisseurs et les fabricants.
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Après avoir établi que Bell et la B.C. Tel s'étaient conféré une préférence ou un avantage, qu'elles en avaient conféré à l'Amdahl et qu'elles avaient exercé une discrimination à l'égard d'autres fournisseurs et fabricants d'ETLN, le Conseil doit considérer si le dossier de l'instance établit qu'une préférence ou un avantage ne sont pas indus ou déraisonnables et que la discrimination n'est pas injuste. Cette considération doit être prise à la lumière de l'intérêt public et exige qu'on étudie la question de savoir si les avantages découlant de l'approvisionnement concurrentiel pour les abonnés de l'ETLN pourraient l'emporter sur les coûts afférents.
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En de nombreuses occasions, le Conseil a commenté les avantages de la concurrence dont un choix accru de fournisseurs et d'équipements, l'innovation technologique et des coûts plus bas. Pour ce qui est du cas particulier à l'étude, il convient avec la Paradyne et les intervenants favorables que l'approvisionnement concurrentiel d'ETLN procurerait des avantages. Il estime que ces avantages ressembleraient à ceux qui résultent de la concurrence dans d'autres secteurs du marché des équipements terminaux.
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Le Conseil note les arguments soumis par Bell et la B.C. Tel ainsi que par certains intervenants selon lesquels l'approvisionnement concurrentiel d'ETLN nuirait au service Dataroute. Ces arguments concernent principalement (1) le temps d'approvisionnement et les coûts accrus; et (2) les difficultés possibles à identifier les mauvais fonctionnements du réseau, ce qui menace ainsi l'intégrité du réseau.
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Plus particulièrement, le Conseil note les arguments concernant la variété de techniques d'accès utilisées dans le service Dataroute et le fait que le choix d'ETLN pour tout abonné particulier dépend de la technique utilisée pour lui fournir l'accès. Bell et la B.C. Tel ont soutenu que, si l'approvisionnement concurrentiel d'ETLN était autorisé, ce genre de techniques d'accès pourrait créer des problèmes d'approvisionnement. Toutefois, comme la Paradyne l'a souligné, 95 % des abonnés utilisent l'un des deux types normalisés d'interface numérique. Le Conseil est cependant d'avis que l'utilisation de diverses techniques d'accès poserait beaucoup moins de problèmes si les abonnés étaient bien informés de la technique en place.
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Certains intervenants se sont opposés à la requête de la Paradyne à cause des problèmes qui pourraient survenir si les abonnés étaient obligés de louer des services de réseau auprès des transporteurs, tout en obtenant l'ETLN d'un fournisseur distinct. Ils ont soutenu qu'il en résulterait des problèmes de service et de réparation, et conséquemment un temps d'arrêt plus long si Telecom Canada ne pouvait plus offrir le service de bout en bout. Toutefois, ils n'ont pas proposé qu'on interdise aux transporteurs de fournir l'ETLN. Si la requête de la Paradyne était agréée, les abonnés qui le désirent continueraient de recevoir le service de bout en bout des membres de Telecom Canada.
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Bell et la B.C. Tel ont fait valoir que l'ETLN fait partie intégrante du réseau et que son approvisionnement concurrentiel compromettrait l'intégrité du réseau et nuirait au fonctionnement de celui-ci. De l'avis du Conseil, le fondement de ces arguments contre l'approvisionnement concurrentiel tomberait si l'ETLN fourni sur une base concurrentielle fonctionnait selon la même norme de signalisation que l'équipement des compagnies de téléphone.
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Bell et la B.C. Tel ont soutenu que d'importants coûts additionnels seraient engagés si, en remplacement de la publication ou d'une autorisation du schéma de signalisation Dataroute actuel, elles devaient prévoir l'approvisionnement concurrentiel d'ETLN en élaborant et en mettant en oeuvre un nouveau protocole public. Le Conseil accepte les arguments des transporteurs sur ce point et il estime qu'une telle approche ne servirait pas l'intérêt public dans les circonstances de la présente affaire.
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Les transporteurs ont signalé qu'une ordonnance du Conseil visant la divulgation du schéma de signalisation Dataroute ne conviendrait pas et ne serait pas du ressort du Conseil. En effet, le dossier de la présente instance renferme de nombreuses références au schéma de signalisation "exclusif" de l'Amdahl et à sa "propriété" intellectuelle. Toutefois, rien dans le dossier ne persuade le Conseil que le schéma de signalisation devrait être qualifié de "propriété" ou être décrit comme "exclusif"; rien n'indique que le schéma a été breveté ou protégé par copyright.
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Dans la cause Challenge Communications, le Conseil a décrit comme suit un argument avancé par Bell (l'intimée) pour justifier la discrimination ou pour accorder une préférence ou un avantage :
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Finalement, l'intimée proposa une justification plus générale pendant les procédures, à l'effet que l'AMTS était un service nouveau et innovateur, mis au point aux frais de Bell et qu'il serait injuste de permettre à d'autres "de s'accaparer les avantages" (traduction) de ce service. En considération de ses investissements dans ce nouveau service, Bell devrait donc pouvoir en tirer des bénéfices et ceci justifierait l'exclusion des autres fournisseurs.
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Dans sa discussion de cet exposé, le Conseil a noté ce qui suit :
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Cependant, si Bell développe des caractéristiques brevetables de son matériel, elle pourrait en tirer profit dans cette mesure. Néanmoins, de l'avis du Conseil, ceci ne devrait pas empêcher des individus tels que Challenge d'offrir du matériel de base qui rencontre les exigences de signalisation ou d'accès au réseau et, de ce fait, de poursuivre la concurrence touchant la croissance et l'amélioration du [MTS].
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En statuant sur la cause Challenge Communications, le Conseil a ordonné à Bell de lui signifier à lui, à la requérante et à toute autre partie qui le demande, une copie de toutes les spécifications de l'équipement Access 450 et de tout autre équipement ou installation nécessaire pour la conception et la production d'équipement de service radiotéléphonique mobile sur la fréquence UHF.
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De l'avis du Conseil, l'affaire dont il est actuellement saisi se compare directement à la cause Challenge Communications, sauf que la personne ayant supposément le droit de restreindre la divulgation et ainsi "de s'accaparer les avantages" de la spécification en question est une tierce partie, et que la spécification est assujettie à une clause contractuelle entre Bell et cette tierce partie. Selon lui, refuser de diffuser cette spécification signifierait que les transporteurs, sur la base de ces différences seules, pourraient contourner les exigences de la Loi sur les chemins de fer en utilisant des dispositions contractuelles. Il estime que des dispositions contractuelles régissant le caractère confidentiel ne justifient donc pas de façon satisfaisante le fait que des transporteurs de juridiction fédérale exercent une discrimination ou s'accordent une préférence ou un avantage à eux-mêmes ou en accordent à d'autres.
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Le Conseil observe que le service Dataroute a été institué en 1973 et que l'Amdahl a eu la chance de réaliser des profits sur son investissement. Comme la Paradyne l'a fait remarquer, la publication du schéma de signalisation n'empêcherait pas l'Amdahl de concurrencer efficacement la prestation de l'ETLN Dataroute; elle n'affecterait pas le statut de la compagnie comme fournisseur exclusif d'équipement de central Dataroute à Bell et à la B.C. Tel.
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Il ne s'agit pas d'un point fondamental dans la présente décision, mais le Conseil note également que le contrat des transporteurs avec l'Amdahl porte que les restrictions sur l'utilisation de "renseignements exclusifs et confidentiels" ne s'appliquent à aucune information qui est ou qui devient publique sans que "la partie qui reçoit" dans le cas présent, Bell et la B.C. Tel, y soit pour quelque chose. Cette disposition semble viser des circonstances comme une ordonnance du Conseil demandant la divulgation de renseignements.
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Compte tenu de ce qui précède, le Conseil établit que, conformément au paragraphe 340(3) de la Loi sur les Chemins de fer, les actuels Arrangements d'accès Dataroute exercent une discrimination injuste à l'égard des fabricants d'ETLN autres que Bell et la B.C. Tel. Il constate parallèlement que ces arrangements confèrent une préférence indue et déraisonnable à Bell et à la B.C. Tel ainsi qu'à l'Amdahl.
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Ces jugements deviendraient inopérants si Bell et la B.C. Tel étaient autorisées à garder secrètes les spécifications relatives au raccordement d'ETLN au réseau Dataroute. Il est donc ordonné à Bell et à la B.C. Tel de déposer et de signifier copie à toutes les parties à l'instance, le 31 juillet 1989 au plus tard, (1) des pages de tarifs proposées prévoyant le dégroupement des tarifs applicables aux Arrangements d'accès Dataroute afin de prévoir l'approvisionnement concurrentiel d'ETLN; et (2) des renseignements permettant la conception de l'ETLN Dataroute fourni sur une base concurrentielle. Lors du dépôt de ces documents, le Conseil décidera quel autre processus, le cas échéant, s'impose à l'égard de cette question.
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Le Secrétaire général
Fernand Bélisle
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