Décision de télécom CRTC 2024-324

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Références : Demandes en vertu de la Partie 1 affichées le 24 novembre 2023 et le 15 janvier 2024

Ottawa, le 11 décembre 2024

Dossiers publics : 8633-G110-202306480, 8633-B2-202400050 et 8633-G110-202402809

Demandes concernant les appels interurbains dans les prisons de l’Ontario

Sommaire

Dans la présente décision, le Conseil fournit des précisions sur des questions liées à l’historique des frais de téléphone dans les prisons de l’Ontario.

En octobre 2021, Goldblatt Partners LLP, au nom de Ransome Capay et Vanessa Fareau (demandeurs du recours collectif), a déposé un projet de recours collectif contre Bell Canada et la province de l’Ontario au sujet des tarifs des appels interurbains facturés par Bell Canada lorsqu’elle exploitait le système téléphonique dans les prisons de l’Ontario.

Les deux parties ont déposé des demandes d’éclaircissements auprès du Conseil sur des questions de réglementation des télécommunications qui ont été soulevées dans la procédure judiciaire. Cette instance a été mise en suspens en attendant la décision du Conseil.

Le Conseil fournit les précisions suivantes sur les questions mentionnées dans les demandes :

Bien que l’instance actuelle soit très ciblée, elle a souligné les préoccupations plus larges à propos des tarifs facturés aux détenus et à leurs familles, ainsi que la disponibilité des options d’appel dans les prisons. Synergy Inmate Phone Solutions Inc. a depuis remplacé Bell Canada à titre de fournisseur de services dans les prisons ontariennes. Les éléments de preuve dans le dossier public indiquent que les tarifs pour les appels interurbains des détenus ont diminué de façon importante depuis. Toutefois, aucun élément de preuve n’a été déposé en ce qui concerne la situation dans les autres provinces et territoires ainsi que dans les établissements correctionnels fédéraux. Bien que les éléments de preuve indiquent que la situation en Ontario s’est améliorée, le Conseil est préoccupé par la fourniture globale de services de télécommunication dans l’ensemble des établissements correctionnels au Canada.

Ainsi, le Conseil recueillera davantage de renseignements pour évaluer toute mesure supplémentaire nécessaire, y compris une possible intervention réglementaire.

Contexte

  1. De 2013 à 2021, Bell Canada avait un contrat exclusif avec la province de l’Ontario (Ontario) pour exploiter le système de gestion téléphonique des détenusNote de bas de page 1. Le système de gestion téléphonique des détenus offre des services téléphoniques aux détenus dans les prisons de l’Ontario. Selon ce système, les détenus utilisaient des téléphones payants pour faire des appels à frais virés locaux ou interurbains. Ces appels étaient facturés au destinataire de l’appel.
  2. En octobre 2021, Goldblatt Partners LLP, au nom de Ransome Capay et de Vanessa Fareau (demandeurs du recours collectif), a déposé une proposition de recours collectif contre Bell Canada et l’Ontario au sujet des tarifs des appels interurbains facturés par Bell Canada pendant qu’elle exploitait le système de gestion téléphonique des détenus. On a demandé au Conseil de préciser si les tarifs des appels interurbains des détenus ont fait l’objet d’une abstention de la réglementation entre 2013 et 2021. Le recours collectif proposé est en attente de la décision du Conseil.

Demandes

  1. Le Conseil a reçu des demandes distinctes et connexes des demandeurs du recours collectif et de Bell Canada, datées respectivement du 10 novembre 2023 et du 11 janvier 2024. Le Conseil a examiné les deux demandes ensemble dans le cadre de la présente instance.
  2. Le Conseil a reçu des interventions de Bell Canada, du Centre pour la défense de l’intérêt public (CDIP), de la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision inc. (CPRST), de l’Ontario, et de TELUS Communications Inc. (TCI).

Questions

  1. Les demandes des demandeurs du recours collectif et de Bell Canada portaient sur plusieurs questions interreliées, notamment l’abstention, la conformité réglementaire, l’application de tarifs justes et raisonnables, les options de redressement et la compétence appropriée.
  2. Il y a deux questions devant être éclaircies dans la présente instance. La première étant de savoir si les tarifs facturés aux détenus pour les services interurbains ont fait l’objet d’une abstention de la part du Conseil ou s’ils demeurent assujettis à l’approbation du Conseil. La deuxième est, si le Conseil s’est bel et bien abstenu, de savoir quelles sont les options de redressement possibles.
  3. Par défaut, tous les services de télécommunication offerts par les entreprises canadiennes sont assujettis à la réglementation du Conseil. Cela est prévu au paragraphe 25(1) de la Loi, qui exige que les entreprises canadiennes déposent des tarifs. Tous les tarifs facturés par les entreprises canadiennes doivent également être justes et raisonnables, conformément au paragraphe 27(1) de la Loi.
  4. Toutefois, en vertu de l’article 34 de la Loi, le Conseil peut s’abstenir d’exercer, en tout ou en partie, les pouvoirs à l’égard d’un service de télécommunication. Le Conseil s’abstient d’exercer ses pouvoirs s’il conclut qu’il y a suffisamment de concurrence pour protéger les intérêts des usagers. Lorsque l’abstention est accordée, le service en question devient assujetti au libre jeu du marché, et les tarifs facturés pour le service ne nécessitent plus l’approbation du Conseil. La question de l’abstention est particulièrement importante dans la présente instance parce qu’elle précisera les options de redressement qui s’offrent aux demandeurs du recours collectif.

Le Conseil s’est-il abstenu de réglementer les tarifs facturés par Bell Canada pour les appels interurbains des détenus?

Positions des parties
  1. Toutes les parties ont fait remarquer que Bell Canada avait un tarif pour les services aux détenus s’appliquant au service de 2013 à 2021, lesquels font l’objet du recours collectif proposé. Toutes les parties ont également fait remarquer que le Conseil s’est abstenu de réglementer les services interurbains dans la décision de télécom 97-19, sauf dans les circonstances étroites où il n’y avait pas de commutateurs offrant l’égalité d’accès dans une circonscriptionNote de bas de page 2. Toutefois, les parties sont en désaccord sur la façon dont les décisions d’abstention du Conseil dans la décision de télécom 97-19 ont influé sur le tarif des services aux détenus, et en particulier sur la question de savoir si cette décision comprenait l’abstention des tarifs pour les appels interurbains des détenus.
  2. Bell Canada et l’Ontario ont fait valoir que le Conseil ne s’est pas abstenu de réglementer les tarifs des appels interurbains des détenus, étant donné que ces tarifs étaient réglementés en vertu d’une tarification approuvée par le Conseil. Elles ont fait valoir que les tarifs facturés pour les appels à frais virés au moyen du système de gestion téléphonique des détenus étaient les mêmes ou inférieurs aux tarifs facturés pour les appels à frais virés effectués à partir de téléphones payants, conformément au tarif des services aux détenus de Bell Canada. De plus, elles ont fait remarquer que l’approbation du Conseil est requise pour imposer des taux autres que ceux déjà établis dans un tarif.
  3. Bell Canada a fait valoir que, bien que son tarif des services aux détenus ne comprenne pas de tarif précis pour les appels interurbains des détenus, il contient un mécanisme d’établissement des tarifs approuvé par le Conseil, ce qui est suffisant pour démontrer qu’un tarif n’est pas soustrait. Bell Canada a indiqué qu’il existe un précédent pour prescrire un mécanisme qui fixe les tarifs au moyen d’une tarification plutôt que d’attribuer une valeur numérique précise. Elle a ajouté que les intérêts sur les dépôts sont un exemple de mécanisme de taux tarifés. Dans ce cas, plutôt que de préciser une valeur numérique, le tarif énonce que « le taux d’intérêt sur les dépôts est le taux cible de la Banque du Canada majoré de 1,25 %Note de bas de page 3 ».
  4. Bell Canada et l’Ontario ont fait valoir que le Conseil a conservé ses pouvoirs d’établissement des tarifs en vertu du paragraphe 27(1) de la Loi dans les régions sans égalité d’accès lorsqu’il s’est abstenu de réglementer les tarifs des appels interurbains dans la décision de télécom 97-19Note de bas de page 4. Elles ont fait remarquer que le Conseil a défini une région sans égalité d’accès comme une région où un consommateur ne peut pas changer pour le fournisseur de services interurbains de son choix et a fait valoir que cette définition s’applique aux prisons de l’Ontario.
  5. TCI a fait valoir que les tarifs des appels interurbains à frais virés en question font l’objet d’une abstention partielle et conditionnelle. Elle a fait remarquer que le Conseil conservait ses pouvoirs en vertu de l’article 24 d’imposer des conditions à l’offre et à la fourniture de services d’appels interurbains et qu’il conservait, en partie, ses pouvoirs en vertu de l’article 27 de veiller à ce que les tarifs soient justes et raisonnables, et non pas discriminatoires ou faisant l’objet d’une préférence indue.
  6. Les demandeurs du recours collectif et le CDIP ont fait valoir que le Conseil s’était abstenu de réglementer les tarifs des appels interurbains à frais virés des détenus dans la décision de télécom 97-19. Ils ont indiqué que le tarif des services aux détenus de Bell Canada n’est pas une tarification liée aux tarifs en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi parce qu’il n’établit pas de tarif maximal ou minimal, ou tout taux, comme l’exige le paragraphe 25(1).
  7. Les demandeurs du recours collectif et le CDIP ont également fait valoir que les prisons de l’Ontario ne sont pas considérées comme des régions sans égalité d’accès. Le CDIP a fait valoir que les bureaux principaux de Bell Canada qui fournissent des services aux prisons de l’Ontario ont des commutateurs compatibles avec l’égalité d’accès, mais que ceux-ci sont bloqués par le modèle à fournisseur unique du service aux détenus et ne créent donc pas une région sans égalité d’accès.
Analyse du Conseil
  1. La section suivante traite des trois principaux arguments sur la question de savoir si le service interurbain pour les détenus de Bell Canada fait l’objet d’une abstention de la réglementation des tarifs.
Argument 1 : La nature du tarif des services aux détenus de Bell Canada
  1. Dans la décision de télécom 97-19, le Conseil s’est abstenu de réglementer les tarifs des services interurbains (c.-à-d. les services interurbains). Cette conclusion relative à l’abstention comprenait les appels interurbains effectués à partir de téléphones publics (c.-à-d. des téléphones payants).
  2. Le Conseil doit examiner si un type particulier d’appels interurbains – à savoir les appels interurbains à frais virés effectués par des détenus dans les prisons de l’Ontario – relève de cette conclusion générale d’abstention, ou s’il demeure assujetti à la réglementation des tarifs. Pour répondre à cette question, le Conseil a examiné la nature du tarif des services aux détenus de Bell Canada et son lien avec son tarif relatif aux téléphones payants.
  3. Le service aux détenus de Bell Canada est un service réglementé assujetti à un tarif approuvé par le ConseilNote de bas de page 5. Le tarif se compose de trois paragraphes. Le premier paragraphe décrit brièvement le service. Le deuxième paragraphe explique que les appels des détenus peuvent être assujettis à un certain nombre de contrôles et de restrictions. Le troisième paragraphe explique que les appels des détenus sont tarifés de la même manière que les appels provenant d’autres téléphones publics, mais avec des options de paiement limitées. Cela ne comprend pas de taux tarifé précis pour les appels locaux ou interurbains effectués par les détenus.
  4. Les tarifs pour les appels provenant de téléphones publics sont établis dans le tarif du service de téléphone public de Bell CanadaNote de bas de page 6. Selon ce tarif, le taux pour les appels locaux effectués à partir de téléphones payants est fixé à 1 $ par appel. Il s’agit d’un taux approuvé par le Conseil étant donné que les appels locaux à partir de téléphones payants sont assujettis à la réglementation des tarifs. En ce qui concerne le tarif des services aux détenus de Bell Canada, cela signifie que les bénéficiaires des appels à frais virés des détenus doivent également payer 1 $ par appel local. Pour que ce taux change, Bell Canada doit déposer un avis de modification tarifaire aux fins d’approbation par le Conseil.
  5. Le tarif du service de téléphone public de Bell Canada ne précise pas de taux pour les appels interurbains. Cela s’explique par le fait que le Conseil s’est abstenu de réglementer les tarifs des appels interurbains, dont les appels acheminés à partir de téléphones payants, dans la décision de télécom 97-19.
  6. Le Conseil doit déterminer si cette conclusion d’abstention incluait également les appels interurbains effectués à partir de téléphones payants dans les prisons de l’Ontario. À cet égard, Bell Canada a fait valoir que, même si le tarif ne précise pas de taux (c.-à-d. un montant en dollars à charger), les appels interurbains en vertu de son tarif de service aux détenus étaient assujettis à un mécanisme d’établissement de tarifs qui a été approuvé par le Conseil. En effet, il explique la façon de déterminer quel tarif chargé aux usagers, à savoir que ces appels doivent « être évalués de la même manière que les appels provenant d’autres téléphones publics. » [traduction]
  7. Toutefois, le Conseil estime que le service aux détenus de Bell Canada n’est pas un service entièrement distinct de son service téléphonique public. Il s’agit plutôt d’un sous-ensemble du service téléphonique public de Bell Canada et il doit être considéré dans ce contexte.
  8. À cet égard, le paragraphe 3 du tarif des services aux détenus n’est pas une disposition d’établissement des taux au sens traditionnel de l’établissement du maximum, du minimum ou du taux exact pour le service. Il indique plutôt que « les appels effectués par les détenus sont tarifés de la même façon que les appels effectués au moyen des téléphones publics ordinaires, sauf que les modalités de paiement peuvent être limitées en raison des exigences de l’établissement, des limites de la technologie ou des politiques de recouvrement de la CompagnieNote de bas de page 7. »
  9. Lorsqu’on lit la disposition dans son entièreté, il est clair qu’elle vise principalement à différencier les méthodes de paiement disponibles pour les appels des détenus de celles offertes au grand public en vertu du tarif des téléphones publics. Par conséquent, le Conseil n’a pas approuvé de mécanisme précis d’établissement des tarifs pour les appels téléphoniques payants des détenus; il a plutôt approuvé l’utilisation d’options de paiement limitées.
Argument 2 : L’absence du tarif des services aux détenus de Bell Canada à l’annexe de la décision de télécom 97-19
  1. Le Conseil fait remarquer que la décision de télécom 97-19 comprenait une annexe énumérant les tarifs qui, selon les compagnies membres de StentorNote de bas de page 8, seraient touchés par la décision de s’abstenir de réglementer les tarifs des appels interurbains. Le tarif des services aux détenus de Bell Canada n’a pas été inclus dans cette annexe. Bell Canada a considéré que cela signifiait que son tarif des services aux détenus et les tarifs connexes pour les appels interurbains des détenus n’ont pas fait l’objet d’une abstention de la réglementation dans la décision de télécom 97-19.
  2. À cet égard, le Conseil estime qu’il n’était pas nécessaire d’inscrire le tarif des services aux détenus de Bell Canada à l’annexe de la décision de télécom 97-19. Premièrement, le tarif ne fait aucune mention d’un service interurbain et ne comprend aucun tarif connexe. Deuxièmement, le service aux détenus de Bell Canada, tout comme son service téléphonique public, permet d’acheminer des appels locaux. Par conséquent, il n’aurait pas été approprié que le Conseil approuve le retrait du tarif des services aux détenus, puisque les appels locaux à partir des téléphones payants étaient assujettis à la réglementation des tarifs à l’époque, comme c’est le cas aujourd’hui.
Argument 3 : L’argument de Bell Canada en matière d’égalité d’accès
  1. En ce qui concerne l’argument de Bell Canada en matière d’égalité d’accès, la raison pour laquelle les détenus ont un choix limité n’est pas de nature technique et n’est pas liée à la capacité d’un commutateur d’offrir un accès égal. Il s’agit plutôt du résultat d’un contrat entre l’Ontario et le fournisseur de services du système de gestion téléphonique des détenus – dans ce cas, Bell Canada – qui restreint les options d’appel des détenus pour des raisons de sécurité.
  2. Le dossier public confirme que les prisons de l’Ontario sont toutes situées dans des régions dotées de commutateurs compatibles avec l’égalité d’accès. Une conclusion précise aurait été nécessaire pour indiquer clairement que le Conseil estime que certaines poches (comme les établissements correctionnels) dans une plus grande région offrant l’égalité d’accès sont équivalentes à des régions sans égalité d’accès. Le Conseil n’a pas tenu compte de cette question et n’en est pas venu à une telle conclusion dans la décision de télécom 97-19 ni dans aucune autre décision. Par conséquent, le Conseil estime que les appels interurbains provenant des téléphones payants dans les prisons de l’Ontario relèvent de la conclusion de l’abstention générale sur les appels interurbains dans la décision de télécom 97-19.
Conclusion
  1. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que les tarifs pour les appels interurbains dans les prisons de l’Ontario ont fait l’objet d’une abstention de la réglementation dans la décision de télécom 97-19 et n’ont pas été soumis à l’approbation du Conseil depuis.

Si le Conseil s’est abstenu, quelles sont les options qui s’offrent pour obtenir un redressement?

Positions des parties
  1. Les demandeurs du recours collectif demandent des précisions pour savoir si le Conseil peut accorder un redressement en établissant rétroactivement les tarifs des appels interurbains des détenus s’il est déterminé que le service a fait l’objet d’une abstention de la réglementation des tarifs.
  2. Les demandeurs du recours collectif se sont demandé si la CPRST était l’organisme le plus approprié pour entendre l’affaire et éventuellement accorder un redressement s’il est déterminé que les tarifs des appels interurbains facturés par Bell Canada et l’Ontario étaient déraisonnablement élevés.
  3. Bell Canada, le CDIP, l’Ontario et TCI ont fait valoir que le Conseil n’a pas le pouvoir juridique ou la compétence d’établir des tarifs rétroactifs à moins qu’ils n’aient déjà été établis à titre de tarifs provisoires. L’Ontario a fait valoir que l’ouverture rétroactive de la tarification approuvée serait injuste, perturberait les attentes établies des parties qui s’y fiaient et créerait de l’incertitude. Bell Canada a ajouté que si ses tarifs des services aux détenus faisaient l’objet d’une abstention, ce qu’elle a nié, ces tarifs seraient toujours présumés justes et raisonnables conformément à la conclusion antérieure du Conseil selon laquelle l’abstention était appropriée.
  4. Les parties ont ajouté qu’en vertu de l’article 62 de la Loi, le Conseil peut, sur demande ou de sa propre initiative, réviser, annuler ou modifier ses décisions, ou entendre à nouveau une question avant de rendre de telles décisions. Toutefois, cette disposition ne fonctionne que dans des situations ultérieures et ne peut être appliquée rétroactivement.
  5. TCI a fait valoir que le Conseil a conservé les pouvoirs que lui confère le paragraphe 27(2) de la Loi en ce qui concerne la discrimination injuste et la préférence indue et qu’il a de vastes pouvoirs d’accorder un redressement en cas de violation de ce paragraphe, même lorsque les tarifs font l’objet d’une abstention.
  6. Bell Canada, le CDIP et l’Ontario ont fait valoir que le mandat de la CPRST l’empêche de se prononcer sur le prix des services interurbains, qui sont les services en cause dans la présente instance. Le CDIP a ajouté que les consommateurs ont un accès continu aux tribunaux même après avoir reçu une décision de la CPRST.
Analyse du Conseil
  1. En général, le Conseil ne peut pas établir des tarifs de manière rétroactive ou rétrospectiveNote de bas de page 9. Comme les appels interurbains des détenus ont fait l’objet d’une abstention de la réglementation des tarifs et ont été assujettis au libre jeu du marché pendant la période pertinente, le Conseil ne peut pas accorder le redressement que les demandeurs du recours collectif espèrent obtenir.
  2. Bien que le Conseil se soit abstenu d’approuver au préalable des tarifs justes et raisonnables dans un tarif pour les appels interurbains effectués au moyen du service aux détenus dans la décision de télécom 97-19, le Conseil a conservé ses pouvoirs en vertu de l’article 24 de la Loi d’établir des conditions de service. Il a également conservé les pouvoirs que lui a accordés le paragraphe 27(2) de la Loi en ce qui concerne la préférence indue et la discrimination injuste. Toutefois, aucune partie dans la présente instance n’a soulevé d’arguments concernant une violation du paragraphe 27(2) de la Loi en ce qui concerne les services interurbains aux détenus, et aucune partie n’a suggéré de mesure de redressement si une telle violation s’était produite.
  3. Le Conseil a le pouvoir d’examiner et de modifier des décisions antérieures. Par exemple, le Conseil pourrait amorcer une instance afin de constituer un dossier et d’examiner s’il convient de réaffirmer ses pouvoirs pour établir des tarifs pour un service faisant l’objet d’une abstentionNote de bas de page 10. Toutefois, toute décision de réaffirmer les pouvoirs en matière de tarifs s’appliquerait à l’avenir.
  4. En ce qui concerne la demande d’éclaircissements des demandeurs du recours collectif pour déterminer si la CPRST est l’organisme approprié pour se pencher sur la question, le Conseil fait remarquer que les préoccupations au sujet des tarifs sont expressément exclues du mandat de la CPRST. Par conséquent, la CPRST ne peut s’intéresser aux questions soulevées par les demandeurs du recours collectif.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil conclut que les tarifs des appels interurbains dans les prisons de l’Ontario ont fait l’objet d’une abstention de la réglementation dans la décision de télécom 97-19 et qu’ils n’ont pas été assujettis à l’approbation du Conseil depuis ce temps.
  2. De plus, le Conseil conclut que, en vertu de la Loi, il n’a pas les pouvoirs d’accorder un redressement rétroactif ou rétrospectif aux demandeurs du recours collectif.

À l’avenir

  1. La fourniture de services de télécommunication dans les prisons de l’Ontario a changé. Synergy Inmate Phone Solutions Inc. a repris le contrat d’administration du système de gestion téléphonique des détenus, en remplacement de Bell Canada. Le dossier public montre que les tarifs pour les appels interurbains des détenus en Ontario ont considérablement diminué depuis.
  2. Bien que la portée de la présente instance soit très ciblée, les éléments de preuve figurant au dossier public soulèvent des préoccupations réglementaires potentielles concernant les tarifs chargés et les options d’appel offertes dans les établissements correctionnels partout au Canada. Bien que la présente instance a fourni des renseignements sur les appels interurbains des détenus dans les prisons de l’Ontario, aucun élément de preuve n’a été déposé pour les autres provinces et territoires ni dans les établissements correctionnels fédéraux.
  3. Par conséquent, le Conseil recueillera des renseignements et évaluera si d’autres mesures, notamment une éventuelle intervention réglementaire, sont nécessaires.

Secrétaire général

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