Décision de Conformité et Enquêtes CRTC 2019-111

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Ottawa, le 23 avril 2019

Numéro de dossier : EPR 9094-2015-00414-001

Brian Conley – Responsabilité des violations aux termes de la Loi canadienne anti-pourriel commises par nCrowd, Inc.

Le Conseil conclut que nCrowd, Inc. a commis une violation de l’alinéa 6(1)a) et une violation de l’alinéa 6(2)c) de la Loi canadienne anti-pourriel (Loi) relativement aux messages électroniques commerciaux envoyés à des destinataires au Canada. Le Conseil conclut également que Brian Conley est responsable de ces violations, aux termes de l’article 31 de la Loi. Par conséquent, le Conseil impose une sanction administrative pécuniaire de 100 000 $ à Brian Conley.

Introduction

  1. Du 25 septembre 2014 au 21 juin 2015, le Conseil a reçu 246 signalements par l’entremise du Centre de notification des pourriels (CNP) en lien avec des courriels qui semblaient avoir été envoyés par nCrowd, Inc. ou par ses filiales, nCrowd Commerce, Inc. et nCrowd Limited (collectivement nCrowd).
  2. Une enquête a été menée relativement à ces signalements et, le 14 décembre 2016, en vertu de l’article 22 de la Loi visant à promouvoir l’efficacité et la capacité d’adaptation de l’économie canadienne par la réglementation de certaines pratiques qui découragent l’exercice des activités commerciales par voie électronique et modifiant la Loi sur le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, la Loi sur la concurrence, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques et la Loi sur les télécommunications (Loi ou Loi canadienne anti-pourriel [LCAP])Note de bas de page 1, une personne désignée par le Conseil a dressé un procès-verbal de violation à l’endroit de Brian ConleyNote de bas de page 2.
  3. Dans le procès-verbal de violation, la personne désignée a informé M. Conley qu’il était tenu responsable, aux termes de l’article 31 de la LoiNote de bas de page 3, des violations suivantes commises par nCrowd pendant la période allant du 25 septembre 2014 au 1er mai 2015 :
    • une violation de l’alinéa 6(1)a) de la Loi, selon lequel il est interdit d’envoyer à une adresse électronique un message électronique commercial (MEC)Note de bas de page 4, de l’y faire envoyer ou de permettre qu’il y soit envoyé, sauf si la personne à qui le message est envoyé a consenti expressément ou tacitement à le recevoir;
    • une violation de l’alinéa 6(2)c) de la Loi, selon lequel le MEC doit comporter la description d’un mécanisme d’exclusion conforme au paragraphe 11(1)Note de bas de page 5.
  4. Le procès-verbal de violation prévoyait une sanction administrative pécuniaire (SAP) de 100 000 $ et il a été signifié à M. Conley le 13 février 2017.
  5. Conformément aux alinéas 22(2)c) et 22(2)d) de la Loi, le procès-verbal de violation mentionnait à M. Conley de payer la sanction ou présenter des observations au Conseil dans les 30 jours civils suivant la signification du procès-verbal concernant les violations qu’aurait commises nCrowd, sa responsabilité à l’égard de ces violations et le montant de la sanction prévue dans le procès-verbal de violation.
  6. Le Conseil a reçu les observations de M. Conley le 16 mars 2017. Dans ses observations, M. Conley a soutenu, en résumé, qu’il ne devrait pas être tenu responsable des violations et qu’il ne pouvait se permettre de payer la SAP proposée dans le procès-verbal de violation.

Questions

  1. Selon le dossier de la présente instance, le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • nCrowd a-t-elle commis les violations?
    • Dans l’affirmative, Brian Conley est-il responsable des violations?
    • Dans l’affirmative, le montant de la SAP est-il raisonnable?

nCrowd a-t-elle commis les violations?

Nature et expéditeur des messages électroniques en cause
  1. Le paragraphe 1(1) de la Loi définit un « message électronique » comme un « message envoyé par tout moyen de télécommunication, notamment un message textuel, sonore, vocal ou visuel ».
  2. Le paragraphe 1(2) de la Loi prévoit qu’un MEC est un message électronique dont il est raisonnable de conclure, vu son contenu et tout hyperlien ou toute information qu’il donne sur la personne à contacter, qu’il a pour but, entre autres, d’encourager la participation à une activité commerciale. Cela comprend les messages électroniques qui comportent « une offre d’achat, de vente, de troc ou de louage d’un produit, bien, service, terrain ou droit ou intérêt foncier » ou qui en font la publicité ou la promotion.
  3. Le paragraphe 12(1) de la Loi prévoit qu’« [i]l n’y a contravention à l’article 6 que si un ordinateur situé au Canada est utilisé pour envoyer ou récupérer le message électronique ».
  4. Les messages électroniques en cause étaient très variés, mais ils faisaient tous, au minimum, la promotion de produits ou de services offerts par divers commerçants grâce à la vente en ligne de bons correspondants sur la plateforme de nCrowd.
  5. Les messages électroniques indiquaient de façon constante leur expéditeur en tant que l’une des dénominations commerciales sous lesquelles nCrowd, Inc. ou ses filiales étaient exploitées, ou se rapportaient aux sites Web associés à ces dénominations commercialesNote de bas de page 6.
  6. Parmi les messages électroniques mentionnés dans les signalements reçus par le CNP, 111 messages ont été envoyés à des adresses électroniques associées à des entreprises canadiennes, à des domaines canadiens (.ca) inscrits au Canada ou à des fournisseurs de services Internet canadiens. De plus, trois plaignants ayant fourni des déclarations de témoin écrites à la personne désignée ont confirmé qu’ils résidaient au Canada et qu’ils utilisaient des ordinateurs de leurs domiciles pour accéder aux messages.
  7. Dans ses observations, M. Conley n’a pas contesté ces éléments du rapport d’enquête.
  8. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut, selon la prépondérance des probabilités, que nCrowd a envoyé les 246 messages électroniques en cause, que les messages constituaient des MEC aux termes de la Loi, et qu’ils ont été envoyés à un certain nombre de destinataires situés au Canada.
Consentement en vue de la transmission de MEC
  1. Selon l’alinéa 6(1)a) de la Loi, il est interdit d’envoyer à une adresse électronique un MEC, de l’y faire envoyer ou de permettre qu’il y soit envoyé, sauf si la personne à qui le message est envoyé a consenti expressément ou tacitement à le recevoir.
  2. L’article 13 de la Loi prévoit que la preuve du consentement nécessaire à l’accomplissement de tout acte qui serait par ailleurs interdit au titre de l’un des articles 6 à 8 de la Loi incombe à la personne qui en allègue l’existence.
  3. La date à laquelle le consentement a été obtenu est essentielle pour prouver l’existence soit d’un consentement exprès valide, soit d’un consentement tacite par l’entremise d’une relation d’affaires en cours ou d’une relation privée en cours, puisque le consentement doit être obtenu dans la période de deux ans précédant immédiatement le jour où le message a été envoyé, ou au cours de la période de six mois précédant immédiatement le jour où le message a été envoyé, dans le cas d’une demande de renseignementsNote de bas de page 7.
  4. Dans leurs signalements au CNP, des plaignants ont indiqué qu’ils ne croyaient pas avoir donné leur consentement à recevoir les messages en cause. De plus, dans les déclarations de témoin susmentionnées, les plaignants ont fait part de l’absence du consentement à recevoir des messages de nCrowd, Inc. ou de ses filiales.
  5. Au cours de l’enquête, nCrowd a déclaré qu’elle avait obtenu le consentement à envoyer des MEC à toutes les adresses électroniques figurant sur sa liste de diffusion par courriel et qu’elle avait obtenu le consentement exprès par l’entremise du site Web de Couch Commerce Inc. (Couch Commerce) ou celui de nCrowd.
  6. La liste que nCrowd a fournie à une personne désignée aux fins d’application de l’article 17 de la LoiNote de bas de page 8contenait 1 928 015 adresses électroniques, dont la plupart ont été achetées à Couch Commerce le 24 septembre 2014.
  7. Selon les renseignements figurant sur cette liste, le consentement exprès pour envoyer des MEC à 1 566 144 adresses électroniques figurant sur cette liste a été obtenu en une seule journée, soit le 13 août 2014. nCrowd a expliqué que la date en question était la date à laquelle Couch Commerce a transféré ses dossiers de courriels d’un fournisseur de services de courriels à un autre. Aucune autre pièce justificative n’a été fournie et aucun renseignement n’a été fourni sur ce à quoi les consommateurs auraient pu consentir, précisément.
  8. Selon les éléments de preuve au dossier de la présente instance, le 25 septembre 2014, soit le lendemain de l’achat de la liste de diffusion par courriel de Couch Commerce, nCrowd a commencé à envoyer des MEC aux adresses électroniques figurant sur cette liste.
  9. Dans ses observations, M. Conley n’a abordé aucune des questions liées au consentement portées à son attention dans le rapport d’enquête.
  10. Le Conseil fait remarquer que la réponse de nCrowd à la personne désignée ne démontre pas que l’entreprise avait reçu des consentements exprès à l’envoi des MEC aux adresses électroniques figurant sur la liste. En raison de l’absence d’une date valide à laquelle le consentement aurait été obtenu, il est impossible de vérifier que le consentement exprès ou tacite aurait été obtenu pendant la période de deux ans précédant immédiatement le jour où le MEC a été envoyé par nCrowd, ou pendant la période de six mois précédant immédiatement le jour où le MEC a été envoyé par nCrowd dans le cas d’une demande de renseignements.
  11. De plus, le Conseil note que la liste contenait plusieurs adresses électroniques générales habituellement réservées au soutien technique et à la gestion de sites Web de grandes entreprises. Il est peu probable que les utilisateurs autorisés de ces adresses électroniques aient expressément consenti à recevoir des MEC d’une entreprise d’offres quotidiennes telle que nCrowd. Il est plus probable que ces adresses électroniques aient été publiées et consultées en ligne.
  12. Par conséquent, le Conseil détermine que nCrowd n’a pas réussi à démontrer les mesures qu’elle a prises, le cas échéant, afin de s’assurer qu’elle avait obtenu le consentement exprès ou tacite à envoyer les MEC aux adresses électroniques figurant sur sa liste.
  13. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que, selon la prépondérance des probabilités, nCrowd a envoyé les MEC en cause sans le consentement des destinataires, contrevenant ainsi à l’alinéa 6(1)a) de la Loi.
Mécanisme d’exclusion de nCrowd et traitement des demandes d’exclusion
  1. L’alinéa 6(2)c) de la Loi indique que le MEC doit respecter les exigences réglementaires et comporter la description d’un mécanisme d’exclusion conforme au paragraphe 11(1).
  2. L’article 11 de la Loi prévoit que i) les mécanismes d’exclusion doivent pouvoir être utilisés sans frais, ii) le consommateur doit pouvoir se désabonner pour ne pas recevoir d’autres messages de la personne qui a envoyé le message ou de celle au nom de qui il a été envoyé et iii) le consommateur doit pouvoir faire des demandes d’exclusion soit à une adresse électronique précise ou grâce à un lien accessible par l’entremise d’un navigateur Web. L’adresse électronique ou le lien doit être valide pendant au moins 60 jours après l’envoi du message, et il faut donner suite aux demandes d’exclusion sans tarder, au plus tard dans les dix jours ouvrables suivant l’envoi de la demande, et sans nécessiter d’autre intervention de la part de la personne qui en fait la demande. De plus, conformément au paragraphe 3(2) du Règlement sur la protection du commerce électronique (CRTC), comme il est indiqué dans la politique réglementaire de télécom 2012-183, le mécanisme d’exclusion visé à l’alinéa 6(2)c) de la Loi doit pouvoir s’exécuter facilement.
  3. Plusieurs personnes parmi celles qui ont envoyé des signalements au CNP et les trois personnes qui ont fourni des déclarations de témoin ont indiqué i) que les liens d’exclusion dans les MEC qu’ils ont reçus ne fonctionnaient pas, ii) qu’il n’a pas été donné suite à leurs demandes d’exclusion dans les dix jours ouvrables ou iii) des mesures supplémentaires de leur part étaient nécessaires pour effectuer leurs demandes d’exclusion.
  4. Au cours de l’enquête, nCrowd a omis de fournir à la personne désignée tout document énonçant les politiques et les procédures relatives à son mécanisme d’exclusion.
  5. Dans ses observations, M. Conley n’a abordé aucune des questions liées au désabonnement portées à son attention dans le rapport d’enquête.
  6. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut, selon la prépondérance des probabilités, que nCrowd a contrevenu à l’alinéa 6(2)c) de la Loi.

Brian Conley est-il responsable des violations?

  1. L’article 31 de la Loi prévoit qu’en cas de commission par une personne morale d’une violation, ceux de ses dirigeants, administrateurs ou mandataires qui l’ont ordonnée ou autorisée, ou qui y ont consenti ou participé, sont responsables de la violation, que la personne morale fasse ou non l’objet de procédures en violation.
  2. Selon le procès-verbal de violation, M. Conley est responsable des violations commises par nCrowd, Inc. pendant la période allant du 25 septembre 2014 au 1er mai 2015, car il a consenti à la commission de ces violations alors qu’il était président et premier dirigeant de cette personne morale.
  3. En l’absence d’une définition précise dans la Loi, le Conseil définit le terme « consentir » en se fondant sur son sens ordinaire et sur la jurisprudence canadienne, comme le fait de convenir à quelque chose de façon tacite, silencieuse, passive ou sans oppositionNote de bas de page 9.
  4. Selon l’évaluation de la personne désignée, les listes de diffusion par courriel étaient au cœur des activités de nCrowd, M. Conley était conscient de leur importance et il connaissait la plateforme de nCrowd utilisée pour les gérer, et M. Conley a participé personnellement à l’acquisition de ces listes. Il devait donc connaître les problèmes liés aux listes de nCrowd ou avoir sciemment fermé les yeux sur ces questions.
  5. Les éléments de preuve présentés dans le rapport d’enquête montrent que M. Conley était l’un des quatre coinventeurs de l’outil de marketing par courriel de nCrowd, qui comprenait l’envoi de MEC ciblés en fonction des intérêts et des préférences du destinataire.
  6. Ces éléments de preuve montrent également que, le 24 septembre 2014, M. Conley a personnellement signé une convention d’achat et de vente dans le cadre de laquelle nCrowd a acquis les actifs de Couch Commerce, y compris sa liste de diffusion par courriel. La convention prévoit que [traduction] « le vendeur se conformera à la Loi canadienne anti-pourriel, à la satisfaction de l’acheteur, à sa seule discrétion ». Comme il a été mentionné précédemment, le lendemain, nCrowd a commencé à se servir de la liste pour envoyer des MEC qui, selon le Conseil, contreviennent aux alinéas 6(1)a) et 6(2)c) de la Loi.
  7. En présentant ses observations, M. Conley a affirmé qu’il n’avait jamais consenti aux violations mentionnées dans le procès-verbal de violation et qu’il ne devrait pas être tenu responsable de celles-ci. M. Conley a déclaré qu’il était impossible pour un premier dirigeant d’entreprise d’avoir une connaissance directe de millions d’adresses électroniques ou de la fonctionnalité d’un mécanisme d’exclusion.
  8. M. Conley a également souligné les observations présentées par Couch Commerce selon lesquelles sa liste était conforme à la Loi lorsqu’elle a été vendue à nCrowd. Il a ajouté qu’avant de conclure l’achat des actifs de Couch Commerce, une [traduction] « enquête indépendante sur les processus liés au courrier électronique [de Couch Commerce] avait alors révélé que, jusque-là, aucune accusation de violation présumée de la législation canadienne relative au marketing par courriel n’avait été portée contre Couch [Commerce] ». Il a également ajouté que [traduction] « nCrowd n’a jamais eu l’intention d’envoyer des courriels à des personnes qui ne voulaient pas les recevoir et nous avons fait tout notre possible pour éviter que cette situation ne se produise ».
  9. M. Conley a en outre soutenu qu’il avait quitté son poste de premier dirigeant de nCrowd avant que la personne désignée ne communique avec nCrowd pour la première fois et qu’il n’avait jamais eu personnellement connaissance des violations qui auraient été commises par nCrowd avant de recevoir le procès-verbal de violation. Pour appuyer son allégation, il a joint à ses observations une décision écrite de la United States District Court for the Northern District of Georgia, découlant d’un différend contractuel entre nCrowd et d’autres entreprises. La décision indique que M. Conley a quitté son poste en tant que premier dirigeant de nCrowd et en tant que membre du conseil d’administration de nCrowd le 22 mai 2015.
  10. Le Conseil estime que, à la lumière des éléments de preuve concernant l’expérience de M. Conley en matière de plateformes de diffusion par courriel (ayant inventé une plateforme) et de l’importance de cette méthode de marketing pour son entreprise, M. Conley connaissait bien les fonctionnalités d’envoi de MEC et des mécanismes d’exclusion. Le Conseil fait également remarquer que M. Conley a participé personnellement à l’acquisition de listes de diffusion par courriel pour son entreprise. La convention d’achat et de vente pour l’acquisition importante au centre de la présente affaire – la liste acquise de Couch Commerce – comprenait des modalités indiquant que M. Conley était au courant de la Loi en général et des modalités exigeant que nCrowd prenne des mesures pour s’assurer que Couch Commerce respectait la Loi. Toutefois, M. Conley n’a fourni aucun élément de preuve pour démontrer qu’il, ou nCrowd, avait effectivement pris de telles mesures.
  11. De plus, M. Conley n’a réfuté aucun des arguments de la personne désignée en ce qui concerne sa connaissance de l’entreprise, sa connaissance de la plateforme de diffusion par courriel ou sa participation directe à l’acquisition de la liste de diffusion par courriel utilisée lors de la commission des violations. Le Conseil estime qu’il n’est pas raisonnable de croire que M. Conley a joué un rôle actif et personnel quant à l’acquisition des actifs d’une entreprise un jour, comme le démontrent les éléments de preuve, mais qu’il n’a eu aucune connaissance de la façon dont ces actifs étaient mis en œuvre au sein de sa propre entreprise le lendemain même.
  12. Enfin, le Conseil estime que la date de démission de M. Conley n’est pas pertinente puisque le procès-verbal de violation indique que M. Conley n’est tenu responsable que des violations liées aux MEC envoyés par nCrowd entre le 25 septembre 2014 et le 1er mai 2015, période durant laquelle M. Conley était président et premier dirigeant de nCrowd.
  13. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut, selon la prépondérance des probabilités, que M. Conley a consenti à la commission des violations des alinéas 6(1)a) et 6(2)c) de la Loi commises par nCrowd pendant la période du 25 septembre 2014 au 1er mai 2015, et est donc tenu responsable de ces violations, conformément à l’article 31 de la Loi.

Le montant de la SAP est-il raisonnable?

  1. Le procès-verbal de violation prévoyait une SAP de 100 000 $.
  2. Selon le paragraphe 20(3) de la Loi, pour la détermination du montant de la sanction administrative pécuniaire, il est tenu compte des éléments suivants :
    1. le but de la sanction;
    2. la nature et la portée de la violation;
    3. les antécédents de l’auteur de la violation, à savoir violation à la présente loi, comportement susceptible d’examen visé à l’article 74.011 de la Loi sur la concurrence et contravention à l’article 5 de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques;
    4. ses antécédents au regard des engagements contractés en vertu du paragraphe 21(1) de la Loi et des consentements signés en vertu du paragraphe 74.12(1) de la Loi sur la concurrence concernant des actes ou omissions qui constituent des comportements susceptibles d’examen visés à l’article 74.011 de cette loi;
    5. tout avantage financier qu’il a retiré de la commission de la violation;
    6. sa capacité de payer le montant de la sanction;
    7. tout versement d’une somme qu’il a fait volontairement, à titre de dédommagement, à toute personne touchée par la violation;
    8. tout critère prévu par règlement;
    9. tout autre élément pertinent.
  3. Le but de la sanction est de favoriser le respect de la Loi et non de punir. Ainsi, le montant de la SAP doit être proportionnel à la nature de la non-conformité et doit dissuader la récidive.
  4. Bien que nCrowd ait cessé ses activités et ait été dissoute dans les mois suivant la période au cours de laquelle les violations se sont produites, le rapport d’enquête fait état du fait que M. Conley a continué à s’occuper des actifs restants de nCrowd et de secteurs d’activité similaires. M. Conley n’a pas fourni de preuve du contraire dans ses observations.
  5. Le Conseil estime que la sanction peut contribuer à favoriser le respect de la Loi de la part de M. Conley et permettre de s’assurer qu’il se conforme aux exigences de la Loi dans toute entreprise future qu’il pourrait entreprendre qui comprend l’envoi de MEC aux consommateurs canadiens.
  6. En ce qui concerne la nature et la portée des violations, le Conseil estime qu’elles sont graves. Non seulement elles se sont produites, mais certains éléments de ces violations qui ont été portées à l’attention de nCrowd au cours de l’enquête n’ont pas été corrigés, et rien n’indique que nCrowd avait mis en place des politiques ou procédures qui auraient permis de les éviter. M. Conley n’a fourni aucune preuve selon laquelle il avait mis en œuvre de telles politiques à titre de président et premier dirigeant de nCrowd, et il ne les a pas expliquées dans ses observations, si elles existaient bien.
  7. M. Conley n’a pas d’antécédents en matière de violation de la LCAP, de la Loi sur la concurrence, ni de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques et il n’a contracté aucun engagement en vertu de ces lois.
  8. En ce qui concerne l’avantage financier retiré, le Conseil estime qu’il est raisonnable de supposer, selon la prépondérance des probabilités, que certains consommateurs ont été dirigés vers les sites Web de nCrowd au moyen d’un hyperlien intégré dans un MEC non conforme, et qu’ils ont pu ensuite effectuer un achat en ligne, à l’avantage de nCrowd. Toutefois, le dossier de l’instance ne contient aucune preuve directe démontrant que nCrowd ou M. Conley ait obtenu directement un avantage financier par suite des violations.
  9. En ce qui concerne la capacité de payer, la personne désignée a évalué que M. Conley avait une valeur nette minimale personnelle supérieure à 1 million de dollars et qu’il a la capacité de payer la SAP proposée de 100 000 $. Cette évaluation était fondée sur la valeur de ses propriétés, son poste de président et premier dirigeant de nCrowd pendant les années où elle était en exploitation, ses investissements personnels dans nCrowd et son statut d’actionnaire dans d’autres entreprises, dont le plus important créancier de nCrowd.
  10. Dans ses observations, M. Conley a contesté cette évaluation et a déclaré que i) tous les actifs qu’il possédait étaient largement financés par emprunts; ii) il était dans l’incapacité de rembourser la dette sur ces actifs; iii) il a perdu toutes ses économies lorsque nCrowd a échoué et iv) il n’était pas en mesure de payer la sanction de 100 000 $. Toutefois, M. Conley n’a fourni aucune preuve à l’appui de ces affirmations.
  11. Le Conseil a déjà fait remarquer dans la politique réglementaire de Conformité et Enquêtes 2015-109 que lorsqu’une personne qui formule des observations en réponse à un procès-verbal de violation soutient son incapacité de payer, il est raisonnable d’exiger que cette personne fournisse des documents ou des renseignements détaillés pour étayer sa position ou réfuter l’analyse de ce facteur dans le procès-verbal de violation. Le Conseil a ajouté que la seule affirmation d’une personne présentant des observations qu’elle n’est pas en mesure de payer ne représente pas en soi un facteur d’atténuation suffisant.
  12. De plus, le procès-verbal de violation informait M. Conley que ses observations devaient inclure des arguments détaillés, y compris tout document ou élément de preuve à l’appui de sa position.
  13. Aucun renseignement du dossier de l’instance n’indique que l’entreprise a versé une indemnité aux personnes touchées par les violations, et aucun autre facteur établi par les dispositions législatives n’était applicable.
  14. Compte tenu des points susmentionnés, le Conseil conclut, selon la prépondérance des probabilités, que la SAP proposée de 100 000 $ ne dépasserait pas la capacité à payer de M. Conley et qu’elle est raisonnable et nécessaire pour favoriser le respect de la Loi.

Conclusion

  1. Le Conseil conclut, selon la prépondérance des probabilités, que nCrowd a commis les deux violations énoncées dans le procès-verbal de violation.
  2. De plus, le Conseil conclut, selon la prépondérance des probabilités, que M. Conley est responsable, en vertu de l’article 31 de la Loi, de la commission de ces violations et impose une sanction de 100 000 $ à M. Conley.
  3. Par la présente, le Conseil informe M. Conley de son droit d’interjeter appel de cette décision devant la Cour d’appel fédérale dans un délai de 30 jours après avoir reçu la signification d’une copie de la présente décision. Un appel portant sur une question de fait est subordonné à l’autorisation de la Cour d’appel fédérale, et la demande d’autorisation doit être présentée dans les 30 jours suivant la signification de la décision.
  4. La somme de 100 000 $ doit être payée au plus tard le 23 mai 2019  et versée conformément aux instructions incluses dans le procès-verbal de violation. Tout montant en souffrance après le 23 mai 2019 sera assujetti à des intérêts composés calculés mensuellement au taux bancaire moyen en vigueur, majoré de 3 %. Ces intérêts s’appliqueront à toute la période comprise entre la date d’échéance susmentionnée et le jour précédant la date de réception du paiement.
  5. Si le paiement n’est pas reçu dans les 30 jours de la date de la signification de la décision, le Conseil entend prendre des mesures pour recouvrer le montant exigible, lesquelles pourraient inclure l’établissement d’un certificat pour le montant en souffrance et l’enregistrement de ce dernier à la Cour fédérale.

Secrétaire général

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