Décision de télécom CRTC 2011-702
Ottawa, le 14 novembre 2011
Rapport de non-consensus du CDCI – Ébauche d’un code concernant les politiques de débranchement et de dépôt
Numéro de dossier : 8665-C12-201007229
Dans la présente décision, le Conseil approuve le code sur les débranchements et les dépôts soumis par le Comité spécial du CDCI chargé d’élaborer un code sur les débranchements et les dépôts dans son rapport de non-consensus DDRE0001 intitulé Ébauche d’un code concernant les politiques de débranchement et de dépôt.
Contexte
1. Dans la décision de télécom 2008-34, le Conseil a établi un plan en vue d’examiner les mesures de réglementation de nature sociale et non économique actuelles pour faire en sorte qu’elles soient mises en œuvre de façon conforme aux Instructions[1].
2. Dans la politique réglementaire de télécom 2009-424, le Conseil a examiné les modalités des entreprises de services locaux titulaires (ESLT) concernant la suspension ou la résiliation du service local (les politiques de débranchement et de dépôt)[2] dans le contexte des Instructions. Dans cette décision, le Conseil a conclu que (a) il maintiendrait les politiques de débranchement et de dépôt dans les marchés réglementés, puisque les consommateurs dans ces marchés n’ont pas accès à des solutions de rechange concurrentielles; et (b) ces politiques pourraient être rationalisées dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation afin de réduire au maximum toute interférence avec le libre jeu du marché concurrentiel tout en maintenant certaines mesures de protection nécessaires pour les consommateurs.
3. Le Conseil a aussi demandé que l’ombudsman de l’industrie des télécommunications, en l’occurrence le Commissaire aux plaintes relatives aux services de télécommunication inc. (CPRST), élabore et mette en œuvre un code de l’industrie relatif aux débranchements et aux dépôts. Ce code s’appliquerait aux services locaux offerts par toutes les entreprises de services locaux (ESL) dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation, et répondrait aux critères minimaux établis dans la politique réglementaire de télécom 2009-424. De plus, le Conseil a déterminé qu’il maintiendrait les politiques actuelles relatives aux débranchements et aux dépôts dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation jusqu’à ce que le CPRST ait procédé à la mise en œuvre du code.
4. Le 30 juin 2010, le CPRST a informé le Conseil qu’il avait tenté en vain d’élaborer le code, car divers intervenants avaient contesté le champ d’application, la portée et le style du projet de code. Le CPRST a précisé que l’adoption du code aurait nécessité un vaste consensus parmi ses administrateurs.
5. Pour régler le problème, le Conseil a présenté, dans la politique réglementaire de télécom 2011-46, une nouvelle approche pour l’élaboration et l’approbation de codes obligatoires qui seront mis en application par le CPRST. Le Conseil a établi que ces codes seraient élaborés par un groupe de travail du Comité directeur du CRTC sur l’interconnexion (CDCI), dont le CPRST ferait partie.
6. De plus, le Conseil a réclamé que le CDCI élabore un code concernant le débranchement et le dépôt qui sera mis en application par le CPRST et a précisé que le code devait répondre aux critères définis dans la politique réglementaire de télécom 2009-424. Le Conseil a demandé au CDCI de rendre compte de l’état d’avancement du code dans les six mois suivant la date de la politique réglementaire de télécom 2011-46.
Rapport du CDCI et projet de code
7. Le 8 juillet 2011, le Comité spécial du CDCI chargé d’élaborer un code sur les débranchements et les dépôts (le comité) a présenté le rapport de non-consensus DDRE0001 intitulé Ébauche d’un code concernant les politiques de débranchement et de dépôt. Le rapport, qui présente le projet de code, peut être consulté dans le site Web du Conseil, à l’adresse www.crtc.gc.ca, sous l’onglet Comité directeur du CRTC sur l’interconnexion.
8. Le comité a indiqué avoir obtenu un consensus sur le projet de code et a demandé au Conseil de l’approuver. Le comité a aussi demandé au Conseil de prendre une décision relativement à deux points de non-consensus : (i) faut-il ajouter au projet de code une section sur l’application des paiements partiels? et (ii) quand le CPRST doit-il commencer à appliquer le code?
Questions
9. Le Conseil estime que le rapport soulève les questions suivantes :
I. Le projet de code répond-il aux critères d’approbation établis par le Conseil?
II. Faut-il ajouter au projet de code une section pour régler la question de l’application des paiements partiels?
III. Quand le CPRST doit-il commencer à appliquer le code?
I. Le projet de code répond-il aux critères d’approbation établis par le Conseil?
10. Dans la politique réglementaire de télécom 2009-424, le Conseil a déterminé que le code concernant les politiques de débranchement et de dépôt doit au minimum contenir les éléments suivants : (i) une période d’avis raisonnable et une disposition raisonnable concernant le non-débranchement lorsque les frais sont légitimement contestés; et (ii) un montant de dépôt maximum raisonnable, une échéance raisonnable de consignation et un taux d’intérêt raisonnable sur les dépôts.
11. Le Conseil a examiné le projet de code et estime qu’il répond à tous les critères définis dans la politique réglementaire de télécom 2009-424.
II. Faut-il ajouter au projet de code une section pour régler la question de l’application des paiements partiels?
12. Le comité n’est pas parvenu à un consensus quant à savoir si la portée du code doit inclure l’application des paiements partiels. Il s’agit d’établir si le code doit préciser qu’une ESL doit, lorsqu’elle reçoit un paiement insuffisant pour couvrir les arriérés de tous les services auxquels le client est abonné (y compris les services interurbains, sans fil, Internet et de télévision), appliquer d’abord le paiement au service local afin d’éviter le débranchement injuste du service local du client.
13. Dans le rapport du CDCI, le Centre pour la défense de l’intérêt public (PIAC) faisait remarquer que, afin d’éviter le débranchement injuste du service local des clients qui n’ont pas accès à des solutions de rechange concurrentielles, le Conseil exigeait que les ESLT appliquent d’abord les paiements partiels à la portion de base du service local de résidence tarifé. De plus, les ESLT ne peuvent pas débrancher le service local d’un client si ce dernier effectue des paiements qui suffisent à couvrir les arriérés de la portion de base du service local, même si ces paiements ne suffisent pas à payer les services non tarifés.
14. Le PIAC et l’Union des consommateurs ont soutenu que cet aspect de la politique des ESLT concernant la résiliation du service par l’entreprise doit être inclus dans le code. Le PIAC a de plus soutenu que cette disposition devrait aussi faire en sorte que toutes les ESL appliquent tout paiement partiel d’abord au service local, plutôt qu’aux services sans fil, de télévision ou Internet.
15. Le CPRST a appuyé ce point de vue et a indiqué que le code devrait préciser que l’on ne peut débrancher un service local en raison du non-paiement d’autres services, comme les services sans fil ou Internet. Le CPRST estime que l’adoption de lignes directrices claires à cet égard réduirait toute ambiguïté et améliorerait les processus de traitement des plaintes.
16. Bragg Communications Inc., exerçant ses activités sous le nom d’EastLink; Cogeco Cable Inc.; Rogers Communications Partnership; Shaw Cablesystems G.P. et Vidéotron, société en nom collectif (collectivement les câblodistributeurs) ainsi que Bell Canada; Bell Aliant Communications régionales, société en commandite; Distributel Communications Limited (Distributel) et la Société TELUS Communications (STC) ont indiqué qu’une disposition demandant à toutes les ESL d’appliquer tous les paiements partiels d’abord au service local ne serait ni nécessaire ni appropriée dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation. Ces parties ont également indiqué que, contrairement aux consommateurs des marchés réglementés, ceux des marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation ont accès à des solutions de rechange concurrentielles pour ravoir le service local ou d’autres services téléphoniques, comme le service sans fil prépayé.
17. Les câblodistributeurs et Distributel ont indiqué que les ESL et le projet de code offrent aux clients suffisamment de possibilités pour établir des programmes de paiement répondant à leurs besoins particuliers. Ils ont soutenu qu’il n’avait pas été prouvé que tous les clients souhaitent que leurs paiements partiels soient appliqués d’abord à leur service local. Ils ont indiqué que certains clients abonnés à des services groupés peuvent souhaiter que les paiements partiels soient appliqués à leurs services Internet, sans fil ou de radiodiffusion.
18. Distributel a indiqué que, dans certains cas, il n’est pas techniquement faisable de maintenir le service local en l’absence d’un autre service. Distributel a soutenu que, par exemple, certaines ESL offrant les services de communication vocale sur protocole Internet (VoIP) ne peuvent maintenir le service local d’un client si ce dernier ne souscrit pas également au service Internet. Par conséquent, l’application des paiements partiels d’abord au service local dans de telles situations n’aiderait pas les clients à conserver leur accès au service téléphonique, ou forcerait les ESL à continuer d’offrir les services Internet sans contrepartie.
19. Bell Canada a indiqué que la création d’un modèle de répartition pourrait ne pas convenir pour les « services groupés à forfait » en l’absence d’un prix distinct pour le service local.
20. MTS Allstream Inc. (MTS Allstream) et Saskatchewan Telecommunications ont indiqué que, peu importe que le code donne suite à cette question ou non, elles respecteraient l’approche réglementée pour fournir leurs services locaux aussi bien dans les marchés réglementés que dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation, comme elles l’ont toujours fait.
21. Le Conseil estime que, comme il est établi dans la politique réglementaire de télécom 2009-424, le code a pour objet de définir une politique simplifiée concernant le débranchement et le dépôt qui pourrait être appliquée de façon symétrique aux ESLT et aux entreprises de services locaux concurrentes (ESLC) dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation, où les clients ont accès à des solutions de rechange concurrentielles. Par conséquent, le code impose de nouvelles obligations aux ESLC.
22. Le Conseil estime également que, comme il est établi dans la même décision, le code doit répondre à certains critères minimaux établis par le Conseil pour protéger les clients dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation; toutefois, il n’est pas nécessaire que le code prévoie toutes les règles actuellement définies dans les tarifs des ESLT. À cet égard, le Conseil note qu’il n’était pas nécessaire que le code aborde la question des paiements partiels pour être approuvé.
23. Le Conseil estime de plus que, bien que le contenu du code ne soit pas limité aux critères minimaux établis dans la politique réglementaire de télécom 2009-424, à la lumière de ce qui précède et des Instructions, d’autres points doivent être convenus par le comité ou étayés par des éléments de preuve avant d’être inclus dans le code. À cet égard, le Conseil note que le CPRST, le PIAC et l’Union des consommateurs ont soutenu que l’incorporation dans le code d’une disposition relative aux paiements partiels serait à l’avantage des consommateurs. Toutefois, ils n’ont pas fourni d’éléments de preuve à l’appui de leur point de vue selon lequel cette disposition proposée est nécessaire pour protéger l’intérêt des consommateurs dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation et dans lesquels des solutions de rechange concurrentielles sont offertes.
24. Le Conseil estime de plus qu’il pourrait être coûteux pour les ESLC d’adopter une disposition relative aux paiements partiels, et que, pour d’autres entreprises, comme certains fournisseurs de services VoIP, il pourrait être impossible de le faire.
25. À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut qu’il n’est pas nécessaire que le code aborde la question des paiements partiels. Toutefois, il estime que le CPRST devrait assurer le suivi des plaintes liées aux paiements partiels, et il demande au CPRST de rendre compte d’éventuelles plaintes de cette nature dans ses prochains rapports annuels.
III. Quand le CPRST doit-il commencer à appliquer le code?
26. Le comité n’a pu obtenir un consensus quant au moment où le CPRST devrait commencer à appliquer le code dans le contexte du règlement des plaintes. Le comité a demandé au Conseil de déterminer la « période de transition » appropriée pour l’adoption du code.
27. Les délais proposés sont : dès que possible (le CPRST); au cours des six prochains mois (MTS Allstream, le PIAC, la STC et l’Union des consommateurs); au cours des douze prochains mois (les câblodistributeurs et Distributel).
28. Les câblodistributeurs et Distributel ont soutenu que certaines dispositions du code équivalent à de nouvelles règles dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation qui imposeront de nouvelles obligations à certaines ESL. Ils ont également indiqué que certains aspects du code peuvent nécessiter des modifications aux systèmes de facturation et financiers; par exemple, l’exigence du versement d’intérêts sur les dépôts signifierait que les ELS qui ne versent pas actuellement d’intérêts sur les dépôts devraient améliorer leurs systèmes. Ils ont aussi signalé qu’il pourrait être nécessaire d’apporter des changements aux processus internes et d’assurer la formation du personnel de première ligne pour l’application du code.
29. Le Conseil estime que le code devrait entrer en vigueur dès que possible afin d’avantager les consommateurs. Toutefois, le Conseil reconnaît qu’il faut accorder un délai suffisant aux ESL pour qu’elles puissent mettre en œuvre les changements opérationnels nécessaires afin de respecter les conditions définies dans le code.
30. Le Conseil note que le code est à l’étude depuis 2009 et que le projet de code a été adopté en juillet 2011.
31. Par conséquent, le Conseil est d’avis qu’il est approprié que le CPRST commence à appliquer le code dans les six mois suivant la date de la présente décision.
Conclusion
32. À la lumière de tout ce qui précède, le Conseil approuve le code concernant les politiques de débranchement et de dépôt tel qu’il a été présenté par le CDCI, sans aucune modification.
33. Comme l’exigeait la politique réglementaire de télécom 2011-46, par suite de l’approbation du code dans la présente décision, le CPRST devra administrer le code à compter du 14 mai 2012, publier le code dans son site Web et rendre compte des plaintes relatives aux infractions au code dans ses rapports annuels ultérieurs.
Secrétaire général
Documents connexes
- Examen du Commissaire aux plaintes relatives aux services de télécommunication, Politique réglementaire de télécom CRTC 2011-46, 26 janvier 2011
- Demande visant à faire réviser et modifier certains éléments de la politique réglementaire de télécom 2009-424 concernant les politiques de débranchement et de dépôt pour les entreprises de services locaux, Politique réglementaire de télécom CRTC 2010-27, 20 janvier 2010
- Exigences réglementaires modifiées en matière de gestion des comptes-clients, Politique réglementaire de télécom CRTC 2009-424, 17 juillet 2009
- Plan d’action relatif à l’examen des mesures de réglementation de nature sociale et non économique à la lumière du décret C.P. 2006-1534, Décision de télécom CRTC 2008-34, 17 avril 2008
- Examen des diverses mesures de réglementation en matière de gestion des comptes-clients, Avis public de télécom CRTC 2008-16, 3 novembre 2008, modifié par l’Avis public de télécom CRTC 2008-16-1, 27 novembre 2008
- Abstention de la réglementation des services locaux de détail, Décision de télécom CRTC 2006-15, 6 avril 2006, modifiée par le décret C.P. 2007-532, 4 avril 2007
Notes de bas de page :
[1] Décret donnant au CRTC des instructions relativement à la mise en œuvre de la politique canadienne de télécommunication, C.P. 2006-1534, 14 décembre 2006
[2] Dans la décision de télécom 2006-15, le Conseil a exigé que les ESLT maintiennent les politiques de débranchement et de dépôt relativement au service local de base de résidence dans les marchés réglementés comme dans les marchés faisant l’objet d’une abstention de la réglementation.
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