ARCHIVÉ - Décision de télécom CRTC 2004-22

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Décision de télécom CRTC 2004-22

  Ottawa, le 2 avril 2004
 

Rogers Communications Inc. et Call-Net Enterprises Inc. c. Bell Canada − Allégation de non-conformité aux règles relatives au groupement

  Référence : 8661-R2-200317679

1.

Le Conseil a reçu de Rogers Communications Inc. et de Call-Net Enterprises Inc. (collectivement, les requérantes) une demande présentée le 25 novembre 2003, en vertu de la partie VII des Règles de procédure du CRTC en matière de télécommunications, dans laquelle elles allèguent que Bell Canada a enfreint les règles du Conseil relatives au groupement en assujettissant la disponibilité de quatre forfaits distincts composés de services faisant l'objet d'une abstention (les forfaits) à l'abonnement au service local de Bell Canada. Les requérantes ont demandé au Conseil d'ordonner à Bell Canada de cesser d'offrir ces forfaits jusqu'à ce qu'il approuve un tarif et une étude de coûts à l'égard de chaque forfait. Les requérantes ont également demandé qu'à l'avenir, avant de lancer des forfaits, Bell Canada soit tenue de soumettre les documents internes et externes à l'examen du Conseil pour qu'il vérifie s'ils respectent les règles relatives au groupement.

2.

Le 23 février 2004, le Conseil a avisé les parties qu'il trancherait la question rapidement, dans le cadre du processus accéléré établi dans la circulaire Procédure accélérée de règlement des questions de concurrence, Circulaire de télécom CRTC 2004-2, 10 février 2004.

3.

Un comité d'audition formé de trois conseillers a entendu la question le 26 mars 2004. Outre la partie avec comparution de l'instance et la demande du 25 novembre 2003, le Conseil a examiné les observations écrites d'Allstream Corp., de l'Association canadienne de télévision par câble et de FCI Broadband, division de Futureway Communications Inc., déposées le 22 décembre 2003, la réponse de Bell Canada du 29 décembre 2003 de même que son sommaire et ses réponses du 8 mars 2004 aux demandes de renseignements du Conseil, et les observations en réplique des requérantes du 8 janvier 2004 ainsi que leur sommaire et leurs réponses du 8 mars 2004 aux demandes de renseignements du Conseil.
 

Cadre de réglementation

4.

Dans la décision Examen du cadre de réglementation, Décision Télécom CRTC 94-19, 16 septembre 1994, le Conseil a précisé que le terme « groupement » s'entendait généralement d'une situation où un seul tarif couvrait un certain nombre d'éléments de services ou encore de situations où des éléments tarifaires distincts s'appliquaient à chaque élément de service mais où un certain nombre d'éléments de services étaient regroupés aux fins d'application de rabais au volume, de sorte qu'il était plus économique de s'abonner aux éléments de services groupés que de les acheter séparément.

5.

Dans la décision GT Group Telecom Services Corp. c. Bell Canada - Non-conformité aux règles relatives au groupement, Décision de télécom CRTC 2002-58, 20 septembre 2002, le Conseil a établi que la réduction des frais d'interurbain que Bell Canada offrait aux clients à condition qu'ils s'abonnent à son service local constituait un service groupé dont le tarif devait être approuvé.

6.

Dans la décision Call-Net Enterprises Inc. - Demande de suppression des restrictions à l'égard de la fourniture des services Internet de ligne d'abonné numérique de détail, Décision de télécom CRTC 2003-49, 21 juillet 2003, le Conseil a jugé que la pratique des entreprises de services locaux titulaires (ESLT) selon laquelle elles offraient des services de ligne d'abonné numérique (LAN) si le client s'abonnait aux services locaux de l'ESLT ne constituait pas un groupement. En tirant cette conclusion, le Conseil a fait remarquer que le service LAN et le service local n'étaient pas fournis aux termes d'une seule structure tarifaire et que le client ne faisait aucune économie en se procurant les deux services.
 

Question

7.

Il s'agit de savoir si dans son matériel publicitaire ou dans l'information fournie par ses représentants des services à la clientèle (RSC), Bell Canada assujettit la disponibilité des forfaits à l'abonnement à son service local ou à la souscription à l'option « Facture unique » qu'elle offre uniquement aux clients de son service local. Le cas échéant, Bell Canada contreviendrait aux règles du Conseil relatives au groupement, règles selon lesquelles les forfaits qui incluent un élément de service tarifé doivent faire l'objet d'un tarif approuvé.
 

Position des parties

8.

De l'avis des requérantes, le matériel publicitaire de Bell Canada pour les forfaits semble suggérer qu'en liant le fait de recevoir une seule facture pour tous les services du forfait à l'option Facture unique offerte uniquement aux clients de son service local, que le client doit s'abonner au service local de Bell Canada pour avoir droit aux forfaits.

9.

Les requérantes ont en outre fait valoir que les RSC de Bell Canada avaient informé les non-clients du service local de Bell Canada qu'ils devaient s'abonner au service local de la compagnie pour être admissibles aux forfaits.

10.

Les requérantes ont fait valoir qu'en dépit de la formation additionnelle et de l'information à jour que Bell Canada a données à ses RSC, ceux-ci continuaient de mal informer les appelants dans 40 % des appels, comme l'ont révélé les appels-surprises effectués au nom de Bell Canada les 2 et 3 décembre 2003. À leur avis, Bell Canada aurait pu prévenir cette non-conformité et pourrait encore le faire en indiquant clairement et expressément à ses RSC que les non-clients de son service local sont admissibles aux forfaits. Les requérantes ont fait valoir que la mésinformation nuisait à leur compétitivité.

11.

Bell Canada a fait valoir que les forfaits avaient toujours été offerts aux non-clients de son service local au même prix et aux mêmes conditions que ceux offerts à ses propres clients du service local, peu importe s'ils souscrivaient à l'option Facture unique. Bell Canada a fait remarquer qu'au début, elle n'avait offert l'option Facture unique qu'aux clients de son service local parce que le marquant nécessaire pour recevoir l'option était le numéro de téléphone des clients du service local. Bell Canada a ajouté qu'après avoir changé le système et le processus, elle offre maintenant l'option Facture unique à des non-clients de son service local.

12.

Bell Canada a déclaré que les forfaits sont conçus spécifiquement en fonction des règles du Conseil relatives au groupement. Bell Canada a fait valoir que ses documents de formation qu'elle utilise auprès de ses RSC indiquent que les non-clients de son service local sont admissibles aux forfaits. Bell Canada a reconnu que le libellé ambigu de ses documents de formation initiaux avait créé de la confusion chez ses RSC. Bell Canada a ajouté qu'après avoir constaté que ses RSC transmettaient de l'information inexacte à certains clients, elle a immédiatement pris des mesures pour corriger la situation. Bell Canada a fait valoir que dans la formation additionnelle et les documents de formation à jour qu'elle fournit aux RSC, elle précise que les clients ne sont pas tenus de s'abonner à son service local pour profiter des forfaits. Bell Canada a ajouté qu'un sondage effectué au cours des trois derniers mois a révélé que dans au moins 95 % des cas, ses RSC informent correctement les non-clients de son service local qu'ils sont admissibles aux forfaits.

13.

Même s'il est possible que des erreurs se glissent de temps à autre dans l'information donnée par les RSC, Bell Canada a fait valoir que le Conseil ne devrait pas s'attendre à la perfection lorsqu'il détermine s'il y a eu contravention avec la réglementation.
 

Analyse et conclusion du Conseil

14.

Le Conseil examinera d'abord si, en faisant la promotion d'une facture unique alors que l'option Facture unique n'était offerte qu'aux clients du service local de Bell Canada, le matériel publicitaire de Bell Canada pour les forfaits donne l'impression qu'il faut être abonné au service local de la compagnie pour être admissible aux forfaits. Le Conseil estime que le matériel publicitaire aurait pu être plus explicite. Toutefois, il fait remarquer que les forfaits étaient offerts à des non-clients du service local de Bell Canada, au même prix et aux mêmes conditions que ceux que la compagnie offrait aux clients de son service local, même s'ils ne souscrivaient pas à l'option Facture unique. Le Conseil fait également remarquer que, même si l'option Facture unique n'était offerte initialement qu'aux clients du service local de Bell Canada, dès le début de 2002, bien avant qu'elle n'élabore et ne commence à offrir les forfaits en août et en septembre 2003, la compagnie avait entrepris de modifier les systèmes en vue d'offrir l'option à des non-clients de son service local. Le Conseil fait en outre remarquer que l'option Facture unique est maintenant offerte aux clients de Bell Canada, quel que soit leur fournisseur de service local.

15.

Par conséquent, le Conseil conclut qu'il n'est pas possible de déterminer, d'après le matériel publicitaire de Bell Canada, si la compagnie a assujetti la disponibilité des forfaits à l'abonnement à son service local.

16.

Le Conseil examinera ensuite si l'information fournie par les RSC de Bell Canada assujettissait les forfaits à l'abonnement au service local de la compagnie. Le Conseil fait remarquer que dans ses documents de formation initiaux, la compagnie indiquait simplement que les clients du service local « n'ayant pas Bell comme EIB » n'étaient pas inadmissibles aux forfaits mais ne précisait pas qu'il n'était pas obligatoire d'être abonné à son service local pour souscrire aux forfaits. Le Conseil fait également remarquer que certains RSC de Bell Canada informaient les clients que pour être admissibles aux forfaits, ils devaient s'abonner au service local de la compagnie. Voilà pourquoi Bell Canada a mis en oeuvre une série de mesures correctives, dont des cours de formation supplémentaires et la mise à jour de documents de formation à l'intention de ses RSC, au sujet de l'admissibilité aux forfaits. Le Conseil fait remarquer qu'en dépit de ces correctifs, des appels-surprises que Bell Canada a effectués au début de décembre 2003 ont révélé que ses RSC indiquaient encore à tort que les forfaits étaient assujettis à un abonnement au service local de Bell Canada dans 40 % des appels.

17.

Le Conseil prend note de la déclaration de Bell Canada selon laquelle le Conseil ne devrait pas s'attendre à la perfection lorsqu'il est question de savoir s'il y a eu contravention avec la réglementation. Toutefois, dans le cas présent, le Conseil conclut que Bell Canada ne s'est pas conformée aux règles relatives au groupement dans les cas où ses RSC ont obligé des clients à s'abonner au service local pour pouvoir recevoir les forfaits.

18.

Le Conseil fait remarquer que les documents de formation stipulent maintenant que les clients qui ne sont pas abonnés au service local de Bell Canada peuvent souscrire aux forfaits. Le Conseil prend note également de la déclaration de Bell Canada selon laquelle, depuis les trois derniers mois, ses RSC fournissent des renseignements exacts au sujet de l'admissibilité aux forfaits, au moins 95 % du temps.

19.

Le Conseil estime que la formation et les documents de formation fournis initialement aux RSC étaient inadéquats et que Bell Canada aurait dû s'assurer avec plus de diligence que ses RSC transmettaient fidèlement les exigences en matière d'admissibilité aux forfaits.

20.

Le Conseil estime également qu'à cause du grand nombre de nouveaux RSC que Bell Canada embauche chaque mois, soit près d'une centaine, elle doit mettre sur pied un vaste programme de formation continue.

21.

Par conséquent, pour réduire à l'avenir les risques de non-respect de la réglementation, le Conseil ordonne à Bell Canada, dorénavant, lorsqu'elle offre des forfaits qui ne sont pas assujettis à un abonnement à son service local ou à d'autres de ses services tarifés, de stipuler expressément, tant dans ses documents internes qu'externes, y compris ses documents de formation, ses brochures et son matériel publicitaire, que les clients qui ne souscrivent pas au service local ou à d'autres services tarifés de la compagnie sont admissibles à ses forfaits.

22.

Dans le but d'assurer l'exactitude des renseignements fournis par les RSC au sujet des forfaits, c.-à-d. indiquer que les forfaits ne sont pas assujettis à un abonnement au service local ou à d'autres services tarifés de Bell Canada, le Conseil ordonne également à la compagnie de lui soumettre à chaque trimestre, jusqu'à nouvel avis, un rapport d'une tierce partie exposant en détail les résultats de la vérification des renseignements fournis par ses RSC, qui doivent inclure la vérification des exigences en matière d'admissibilité à chaque forfait non assujetti à l'abonnement au service local ou à d'autres services tarifés de Bell Canada.
  Secrétaire général
  Ce document est disponible, sur demande, en média substitut et peut également être consulté sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca

Mise à jour : 2004-04-02

Date de modification :