ARCHIVÉ -  Décision CRTC 98-213

Cette page Web a été archivée dans le Web

Information archivée dans le Web à des fins de consultation, de recherche ou de tenue de documents. Les décisions, avis et ordonnances (DAO) archivés demeurent en vigueur pourvu qu'ils n'aient pas été modifiés ou annulés par le Conseil, une cour ou le gouvernement. Le texte de l'information archivée n'a pas été modifié ni mis à jour depuis sa date de mise en archive. Les modifications aux DAO sont indiquées au moyen de « tirets » ajoutés au numéro DAO original. Les pages archivées dans le Web ne sont pas assujetties aux normes qui s'appliquent aux sites Web du gouvernement du Canada. Conformément à la Politique de communication du gouvernement du Canada, vous pouvez obtenir cette information dans un autre format en communiquant avec nous.

Décision

Ottawa, le 8 juillet 1998

Décision CRTC 98-213

CHUM Limitée

L'ensemble du Canada - 199716784

Conditions de licence suspensives pour Bravo!

1. Dans l'avis public CRTC 1997-157 du 23 décembre 1997, le Conseil a annoncé une demande présentée par la CHUM Limitée visant à faire suspendre l'application des conditions de licence relatives à la représentation non sexiste des personnes et la violence à la télévision tant que la titulaire du service spécialisé Bravo est membre en règle du Conseil canadien des normes de la radiotélévision.

2. Le Conseil, par vote majoritaire, approuve cette demande. En conséquence, les conditions de licence 7 et 9 en vigueur sont supprimées et remplacées par ce qui suit :

7. La titulaire doit respecter les lignes directrices relatives à la représentation non sexiste des personnes exposées dans le Code d'application concernant les stéréotypes sexuels à la radio et à la télévision de l'Association canadienne des radiodiffuseurs (l'ACR), telles que modifiées de temps à autre et approuvées par le Conseil. La condition de licence susmentionnée ne s'appliquera pas tant que la titulaire (c.-à-d. Bravo) est membre en règle du Conseil canadien des normes de la radiotélévision (CCNR).

9. La titulaire doit respecter les lignes directrices relatives à la violence à la télévision exposées dans le Code d'application volontaire concernant la violence à la télévision publié par l'ACR, telles que modifiées de temps à autre et approuvées par le Conseil. La condition de licence susmentionnée ne s'appliquera pas tant que la titulaire (c.-à-d. Bravo) est membre en règle du CCNR.

3. Le Conseil a reçu d'Évaluation-médias une intervention défavorable à l'égard des conditions suspensives proposées pour Bravo parce qu'une station radiophonique de Montréal, propriété de la CHUM Limitée, continue de diffuser The Howard Stern Show, une émission qui a fait l'objet de plaintes et que le CCNR a jugé contrevenir à la fois au Code d'éthique et au Code concernant les stéréotypes sexuels de l'ACR.

4. En réplique à l'intervention, la titulaire a déclaré que la demande en instance vise le service spécialisé Bravo qui s'est toujours conformé au processus d'auto-réglementation et dont les émissions ont fait l'objet de très peu de plaintes. Elle a ajouté qu'elle entend se conformer à toutes les conditions de licence de Bravo et aux codes d'autoréglementation de l'industrie de la radiodiffusion.

5. Le Conseil est convaincu que l'approbation de cette demande est conforme à sa démarche relative à l'auto-réglementation de l'industrie. Il est également convaincu qu'en ce qui a trait aux codes de l'industrie, on ne peut rattacher la situation de Bravo à des plaintes au sujet d'une émission diffusée par une station radiophonique dont la CHUM Limitée est aussi titulaire, mais que le CCNR reconnaît comme membre distinct.

La présente décision devra être annexée à la licence.

La secrétaire générale
Laura M. Talbot-Allan

Ce document est disponible, sur demande, en média substitut.

Opinion minoritaire du conseiller Andrew Cardozo

Je suis en désaccord avec la décision majoritaire pour les raisons suivantes :

Le Conseil a reçu une demande de Bravo visant à faire suspendre l'application des conditions de licence relatives à la représentation non sexiste des personnes et à la violence à la télévision, de manière que le Conseil canadien des normes de la radiotélévision (le CCNR) surveille ces questions. Le Conseil a également reçu d'un groupe de défense de l'intérêt public, Évaluation-médias, une intervention défavorable à la demande. (Évaluation-médias est d'avis que CHOM-FM continue de diffuser The Howard Stern Show en contravention avec les lignes directrices du CCNR, et que la CHUM Limitée (la CHUM), qui détient CHOM-FM et Bravo, devrait ultimement être tenue responsable de toutes ses titulaires.) J'estime que deux options viables ont été présentées au Conseil.

La première option qui s'offrait au Conseil était d'approuver la demande de Bravo en reconnaissant que Bravo et CHOM-FM détiennent des licences distinctes et, par conséquent, sont des membres distincts du CCNR. La majorité des membres du Conseil a choisi cette option.

La seconde option consistait à refuser la demande de Bravo pour l'instant. Ce choix aurait été fondé sur le fait que, bien que Bravo et CHOM-FM soient exploités suivant deux licences distinctes, ils font partie de la même société, à savoir la CHUM. Celle-ci détient les licences des deux entreprises et, comme société/titulaire, elle peut s'acquitter de sa responsabilité et exercer sa fonction sociale comme elle l'entend. J'estime qu'il aurait été plus approprié pour le Conseil de refuser la demande pour l'instant.

Le fait d'appartenir à une grande entreprise comporte des avantages certains. Il y a d'une part les avantages internes se rattachant aux économies d'échelle, au partage des ressources et aux synergies créatrices. D'autre part, les requérantes de licences de radiodiffusion qui font partie de grandes entreprises profitent de divers avantages sur le plan de la réglementation. Elles jouissent d'un avantage dans le processus d'examen de demandes concurrentes parce qu'elles ont l'expérience du processus de présentation de demandes et ont fait leurs preuves dans les domaines de la radiodiffusion, de la planification d'entreprise et du marketing.

Le Conseil interagit couramment avec des sociétés telles que la CHUM ainsi qu'avec des cadres d'entreprises, lesquels peuvent représenter les intérêts de la totalité ou d'une partie de leurs diverses composantes. Je crois que, dans le cas de ces sociétés, il est équitable pour le Conseil d'avoir certaines attentes ou exigences en ce qui a trait à des questions d'intérêt public.

Il est pertinent que, dans la décision autorisant l'exploitation de Bravo (la décision CRTC 94-281), le Conseil constate que :

Bravo! sera une division de la CHUM qui, en plus de posséder 21 stations de radio à travers le pays, constitue le plus important groupe de sociétés dans l'industrie de la radio canadienne. La CHUM... possède et exploite également MuchMusic, service spécialisé original de vidéoclips de musique de langue anglaise et est copropriétaire (avec Radiomutuel) de MusiquePlus, service spécialisé de vidéoclips de musique de langue française. Elle est en outre propriétaire de six stations de télévision...

The Howard Stern Show

Le CCNR a jugé l'émission comme étant gravement problématique et l'a vertement critiquée. Dans son intervention, Évaluation-médias a également soutenu que [TRADUCTION] « les observations continuellement sexistes et les décisions en matière de programmation de Stern créent un climat de misogynie et de violence envers les femmes ». Je ne suis pas convaincu que la CHUM a fait tout ce qui s'imposait pour régler ce grave problème.

Les coupures dans l'émission, faites en réponse aux rapports du CCNR, ne visent que les observations les plus grossières. La véritable question qu'il faut se poser au sujet de l'émission consiste à savoir si le badinage continuel, qu'il se fasse dans un contexte humoristique ou sérieux, contient une trop grande part de contenu sexuellement explicite et sexiste, en plus d'autres types de matériel offensant.

De plus, je ne suis pas convaincu que l'émission satisfait à l'exigence de " haute qualité " de l'article 3(1)g) de la Loi sur la radiodiffusion.

La menace pour les valeurs canadiennes au coeur des préoccupations

Bien que l'émission de Howard Stern, produite aux États-Unis et diffusée au Canada depuis septembre 1998, se trouve maintenant bien implantée, elle représente nettement une grave menace pour les valeurs et les normes de la radio de notre pays. Compte tenu des vues clairement exprimées par le CCNR, je crains que l'émission The Howard Stern Show ne représente une des plus graves menaces pour la radio canadienne, surtout pour la radio à prépondérance verbale. De plus, étant donné que l'émission attire surtout les adolescents, je crains que nous n'élevions toute une génération de jeunes hommes dans la croyance que le badinage continuel de nature sexiste et offensante est acceptable. C'est là ma principale préoccupation au sujet de l'émission.

Cette émission soulève des questions troublantes :

- Les auditeurs canadiens deviennent-ils imperméables à ce type de langage? Cette émission est-elle devenue la norme acceptable au Canada?

- Les plaignants s'épuisent-ils en vain alors que le radiodiffuseur en question dispose de ressources inépuisables pour poursuivre le combat? Les plaignants croient-ils encore au CCNR et, par extension, au CRTC?

- Les stations de radio d'autres villes que Toronto et Montréal en viendront-elles bientôt à distribuer également l'émission de Stern?

- Les concurrents dans chaque ville seront-ils forcés de livrer concurrence en étant moins sévères quant à ce qui est acceptable au Canada?

Bien qu'à mon avis, cette émission ne soit pas acceptable selon les normes canadiennes, il vaut la peine de mentionner que la Federal Communications Commission des États-Unis a vivement condamné l'émission et imposé à celle-ci des amendes considérables. Je ne veux pas laisser entendre que l'émission respecte les normes américaines, je veux simplement signaler qu'elle est produite aux États-Unis et ne peut être comparée à aucune émission produite au Canada.

Dossier de la CHUM Limited

Après avoir fait état de mes préoccupations relatives à l'émission The Howard Stern Show, j'aimerais dire ce que je pense de la CHUM. À bien des égards, j'ai beaucoup d'admiration pour la CHUM et les diverses entreprises pour lesquelles elle détient des licences - CITY-TV, Pulse24 (CP24), MuchMusic, MusiquePlus et même Bravo. L'approche innovatrice de la CHUM rejoint directement les jeunes. La programmation de MuchMusic et de MusiquePlus a clairement démontré la capacité de ces services d'être à la fois attrayants pour les téléspectateurs, rentables et responsables sur le plan de l'intérêt public. Ces services, de même que CITY-TV, sont également des chefs de file de l'industrie pour la façon dont ils reflètent et incorporent la diversité culturelle des Canadiens et la réalité du Canada d'aujourd'hui. À mon avis, ce genre de programmation offert par la CHUM jusqu'à ce jour devrait être un modèle à suivre pour les autres radiodiffuseurs.

Dans une grande mesure, l'émission de Stern ne correspond pas à l'image de la CHUM. Inévitablement, du fait des aspects excessifs de personnages comme Howard Stern, sa personnalité devient une facette importante de l'image de la CHUM. C'est ce qui se produit, avec un résultat négatif ou positif, pour de nombreuses personnalités de la radiodiffusion. Le milieu de la radiodiffusion se souviendra que c'est la CHUM, de concert avec WIC Radio Ltd. (CILQ-FM Toronto), qui a introduit The Howard Stern Show au Canada.

L'intervention d'Évaluation-médias a donné au Conseil l'occasion de demander à la CHUM de prouver qu'à l'égard de toutes ses licences, elle peut exercer une bonne conscience sociale canadienne en ce qui a trait à la représentation non sexiste des personnes et à la violence. Je crois que la persuasion est nettement préférable à d'autres mécanismes de réglementation. Plus les radiodiffuseurs prennent des décisions responsables dans l'intérêt public, moins il est nécessaire au CRTC d'intervenir.

Dossier d'Évaluation-médias

Je dois également complimenter Évaluation-médias pour ses nombreuses années à servir l'intérêt public dans le but d'éliminer le sexisme dans les médias. Son intervention a grandement influé sur ma prise de position à ce sujet. Ceci devrait encourager les groupes de défense de l'intérêt public et l'ensemble de la population à intervenir plus souvent dans le processus de consultation publique du CRTC.

Appui au CCNR

Par mon désaccord, j'entends également démontrer un appui solide à l'égard du processus d'auto-réglementation du CCNR, qui a été mis sur pied de façon appropriée par l'Association canadienne des radiodiffuseurs.

Appui à la demande de Bravo concernant les minutes de publicité

Il convient de souligner que le Conseil a approuvé à l'unanimité la demande de Bravo visant à modifier la condition de licence de façon à faire passer de 8 à 12 les minutes de matériel publicitaire autorisé par heure d'horloge (décision CRTC 98-150 du 8 mai 1998). J'ai appuyé cette décision parce qu'elle ne se rattache pas à la question de l'auto-réglementation. À mon avis, la question de l'auto-réglementation et celle de la publicité peuvent être séparées, tandis que celle de la responsabilité de l'entreprise devrait s'appliquer uniformément à toutes les divisions d'une société.

Pour toutes ces raisons, j'aurais préféré que le Conseil refuse la demande de Bravo pour l'instant.

The Howard Stern Show à la TV

Le 15 juin 1998, la CHUM annonçait qu'à l'automne, CITY-TV diffuserait l'émission de télévision de Howard Stern. Je n'élabore pas sur cette question pour deux raisons : d'abord, cette nouvelle ne fait pas partie de la demande concernant Bravo. Ensuite, il serait prématuré pour moi, en tant que membre du Conseil, de porter un jugement sur l'émission avant qu'elle n'ait été diffusée.

Date de modification :