ARCHIVÉ -  Décision CRTC 94-288

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Décision

Ottawa, le 6 juin 1994
Décision CRTC 94-288
Altawest Television Ltd.
Calgary et Lethbridge (Alberta)- 930210000Edmonton et Red Deer (Alberta)- 930211800Calgary, Lethbridge et Drumheller (Alberta) - 931463400Edmonton et Red Deer (Alberta)- 931464200
Rejet de demandes concurrentes proposant de nouveaux services de télévision indépendants de langue anglaise en Alberta
À la suite d'une audience publique tenue à Calgary à partir du 25 janvier 1994, le Conseil, par vote majoritaire, rejette les demandes concurrentes susmentionnées visant à établir, en Alberta, de nouvelles entreprises de télévision indépendantes de langue anglaise (quatrième service).
Historique
Dans l'avis public CRTC 1993-79 du 3 juin 1993, le Conseil a annoncé qu'il avait reçu des demandes visant à offrir un nouveau service de télévision indépendant en Alberta. Conformément à ses procédures, il a invité les autres personnes souhaitant offrir un service semblable à lui soumettre une demande.
Les demandes qui ont donné lieu à l'appel ont été soumises par l'Altawest Television Ltd. (l'Altawest), filiale à part entière de la CanWest Global Communications Corp. (la CanWest Global) contrôlée en bout de ligne par M. I.A. Asper de Winnipeg. M. Asper contrôle indirectement CIII-TV-4 Toronto et ses divers réémetteurs en Ontario de même que d'autres entreprises de télévision indépendantes desservant Vancouver, Regina, Saskatoon, Winnipeg, Saint John et Halifax.
En réponse à son appel, le Conseil a reçu des demandes de The Alberta Channel Inc. (la A-Channel), société contrôlée indirectement par M. Stuart A. Craig de Brandon. En outre, M. Craig contrôle indirectement la Craig Broadcast Systems Ltd., titulaire de la station indépendante CHMI-TV Portage la Prairie, d'une affiliée de la SRC CKX-TV Brandon, d'une station FM à Selkirk ainsi que d'une station AM et une station FM desservant Brandon.
L'Altawest et la A-Channel ont toutes deux proposé d'établir de nouvelles entreprises de programmation : une à Edmonton, avec un réémetteur à Red Deer, et une à Calgary, avec un réémetteur à Lethbridge. La A-Channel a en outre proposé de construire à Drumheller un second réémetteur de sa station de Calgary.
Une troisième requérante, l'Alberta Interactive Multimedia Inc., a également répondu à l'appel, mais a par la suite retiré ses demandes.
Dans son appel, le Conseil a déclaré qu'il n'avait pas conclu à la viabilité d'un nouveau service de télévision indépendant en Alberta et qu'il ne fallait donc pas en déduire que l'appel équivalait à ce moment-ci à une autorisation éventuelle dudit service. Sans limiter la portée des questions devant être examinées, le Conseil a déclaré que les requérantes seraient tenues de fournir une preuve indiquant clairement l'existence d'un marché et d'une demande pour le service de programmation proposé; et d'examiner, entre autres choses, la façon dont le service proposé contribuerait à atteindre les objectifs établis dans la Loi sur la radiodiffusion (la Loi), ainsi que les répercussions prévues du service proposé sur les auditoires des entreprises de programmation en place.
Incidence sur le marché
Lorsqu'il examine une demande proposant l'introduction d'un nouveau service dans un marché, le Conseil doit notamment évaluer dans quelle mesure le service peut accaparer les téléspectateurs et les recettes des services déjà autorisés dans ce marché. Les autres facteurs mis à part, le Conseil ne serait généralement disposé à autoriser un nouveau service que s'il est convaincu que cette incidence de la concurrence n'empêchera pas les services en place d'assumer leurs responsabilités en matière de programmation.
Quand il évalue l'incidence sur le marché, le Conseil doit prendre soin d'examiner un large éventail de facteurs financiers, économiques et autres. En général, malgré le fait qu'on prétende que la récession soit finie et que la reprise économique soit imminente, il est difficile de prévoir avec précision l'ampleur de la relance et le moment où elle surviendra. Des facteurs comme la longue durée de la récession actuelle et les faibles taux de croissance des dernières années font que toute prévision est hasardeuse dans le climat économique actuel. L'incertitude que ces facteurs engendrent dans l'examen des présentes demandes augmente lorsqu'on regarde les indicateurs récents du rendement de l'industrie de la radiodiffusion en Alberta en particulier.
La marge des bénéfices moyens avant intérêts et impôts (BMII) des télédiffuseurs en place est un des indicateurs de la capacité d'un marché d'absorber l'impact d'un nouveau concurrent. Dans le cas de la radio, la marge des BMII en 1993 pour toutes les stations commerciales au Canada se situait à moins 0,13 %. L'année dernière, la marge négative des stations radiophoniques commerciales en Alberta était encore plus accentuée (moins 3,8 %).
Pour ce qui est de la télévision, il est vrai que la marge des BMII des télédiffuseurs privés de l'Alberta a toujours été supérieure à la moyenne nationale. Cependant, le Conseil fait remarquer que même si les recettes publicitaires de la télévision dans cette province ont augmenté de 3,1 % en 1993, la hausse est inférieure à la moyenne des cinq années précédentes. Les résultats financiers de 1993 reflètent également une baisse d'environ 13 % des marges des BMII des télédiffuseurs privés de l'Alberta. Ce déclin en 1993 a été plus marqué encore pour les stations de télévision desservant de petits marchés albertains dont la rentabilité a toujours été beaucoup plus faible que celle des stations de Calgary et d'Edmonton et a baissé en général au cours de la période de 1988 à 1993.
Néanmoins, chaque requérante a invoqué la marge des BMII relativement bonne de l'industrie de la télévision en Alberta à l'appui de l'argument voulant que le marché puisse soutenir la concurrence plus vive que son service engendrera. Les deux requérantes ont également fait valoir que le marché albertain est sur le point d'entrer dans une phase de croissance, ce qui faciliterait encore plus l'entrée d'un nouveau service. Les requérantes, cependant, ont semblé prêtes à reconnaître que leurs arguments concernant les répercussions sur le marché ne tenaient plus aussi bien lorsqu'on les appliquait aux stations de télévision desservant de plus petits marchés de l'Alberta. En fait, les deux requérantes ont pris des engagements qui, à leur avis, contribueraient à préserver les recettes publicitaires locales des petits télédiffuseurs.
Au début, l'Altawest a déclaré qu'elle ne solliciterait pas de publicité locale dans les localités desservies par les réémetteurs qu'elle propose à Red Deer et à Lethbridge. À l'audience, elle s'est dit prête à accepter comme condition de licence de ne pas exploiter ces réémetteurs avant le 1er janvier 1997. Pour sa part, la A-Channel s'est également engagée à ne pas solliciter de publicité locale dans les trois petites localités qu'elle propose de desservir avec ses réémetteurs. Elle a en outre ajouté qu'elle prévoirait du temps pour permettre aux télédiffuseurs locaux en place d'ajouter des annonces locales.
Bien que les titulaires de petits marchés n'aient pas eu l'occasion de répondre à l'offre qu'a faite l'Altawest de retarder l'implantation du service à Lethbridge et à Red Deer, le Conseil estime que les intervenants ont raison de craindre que l'une ou l'autre des requérantes nuise considérablement à la viabilité financière de leurs stations et que cette incidence serait attribuable principalement à l'érosion de leurs recettes provenant du temps d'antenne national et régional par opposition à local.
Le Conseil observe une nette tendance chez les annonceurs nationaux à consacrer leurs achats de temps d'antenne dans les marchés plus grands et à consacrer des pourcentages proportionnellement plus faibles de leurs budgets aux télédiffuseurs de petits marchés. Pour ce qui est de l'Altawest, il est probable que l'ajout proposé de stations à Calgary et à Edmonton à la liste des stations que la Canwest Global possède actuellement ailleurs au Canada ne rende encore plus attrayant ce groupe de stations à des annonceurs nationaux et que cette tendance s'en trouve ainsi accentuée aux dépens des petits télédiffuseurs dans toutes les régions du pays, et en Alberta en particulier.
Dans le cas de la A-Channel, la volonté de la requérante d'offrir aux télédiffuseurs locaux en place du temps d'antenne à ses réémetteurs était considérée par un des intervenants comme offrant peu d'avantages significatifs à la lumière de l'actuel surplus de l'inventaire publicitaire à ses propres stations.
En ce qui concerne la radio, selon l'Alberta Broadcasters' Association (l'ABA), la concurrence directe accrue au chapitre des recettes publicitaires entre la radio et la télévision et l'érosion progressive de la part des recettes publicitaires disponibles détenue par la radio est l'un des facteurs qui a contribué aux difficultés financières des stations radiophoniques en Alberta. L'ABA a soutenu dans son intervention que l'implantation d'un nouveau service de télévision en Alberta exacerberait la situation.
Le Conseil a examiné la preuve dont il est saisi, y compris l'état actuel et les perspectives de l'économie, les mesures du rendement financier global des radiotélédiffuseurs de l'Alberta, de même que les incidences de ces facteurs sur l'orientation future de l'industrie dans cette province. Bien qu'il soit conscient de l'incertitude liée au processus de prévision économique, il estime que l'implantation dans le marché d'un quatrième service de télévision commercial aurait une incidence significative sur les auditoires et les recettes des radiotélédiffuseurs en place.
De toute évidence, lorsqu'il examine la question de savoir s'il faut autoriser un nouveau service en direct de télévision commerciale dans les circonstances, le Conseil doit être convaincu que la demande pour le service et les contributions de la programmation au système canadien de radiodiffusion l'emportent sur les risques inhérents à l'autorisation d'un tel service.
Les projets de programmation des requérantes
a)L'Altawest
Comme elle l'a proposé, la programmation produite par la station de l'Altawest devait consister en 14 heures par semaine de nouvelles régionales produites en majeure partie au centre de production principal du service situé à Calgary, y compris une heure de diffusion chaque soir de la semaine, à 19 h. Il devait également y avoir un bureau journalistique distinct à Edmonton pouvant fournir des reportages réguliers et des émissions spéciales pour le service. Pratiquement aucune émission régulière produite par la station dans d'autres catégories n'a été proposée. Les autres émissions régulières consistaient principalement en des émissions canadiennes et étrangères acquises par la Canwest Global au nom de la requérante.
À l'audience, la requérante a reconnu que la totalité des 21 heures d'émissions étrangères présentées aux heures de grande écoute dont la Canwest Global détient les droits de diffusion nationaux sont actuellement revendus sous licence à des stations de télévision de l'Alberta. En ce qui a trait aux émissions canadiennes de la Canwest Global, il semble qu'elles soient pour la plupart diffusées sur les écrans de télévision de l'Alberta et que parmi celles qui restent, très peu entrent dans la catégorie des émissions de qualité aux heures de grande écoute. En outre, le Conseil fait remarquer que les télédiffuseurs albertains en place se sont dit prêts à signer un contrat d'achat d'émissions à long terme avec la Canwest Global qui garantirait effectivement que les téléspectateurs de l'Alberta continuent d'avoir accès aux meilleures émissions étrangères de la Canwest Global ainsi qu'à presque toute la production canadienne présentée aux heures de grande écoute.
Selon l'Altawest, la période de plus grande écoute pour le service qu'elle propose se situe entre 19 h et 22 h et elle s'est engagée à présenter entre 35 % et 45 % de contenu canadien au cours de cette période. Bien que le bulletin de nouvelles d'une heure présenté à 19 h puisse sembler offrir une diversité aux téléspectateurs, la requérante n'a pas avancé d'argument convaincant d'une demande ou même d'un désir particulier de la part des téléspectateurs de l'Alberta pour les émissions de nouvelles additionnelles proposées. En outre, un examen de la grille-horaire proposée entre 20 h et 23 h révèle que les émissions de divertissement canadiennes ne totaliseraient que 3 heures par semaine, soit moins de 17 %.
De l'avis du Conseil, le service proposé par l'Altawest ajouterait peu sur le plan du reflet local, à part ses émissions de nouvelles, et seulement une faible diversité à la gamme des émissions canadiennes et étrangères actuellement fournies par les services conventionnels et spécialisés disponibles dans ce marché.
b)La A-Channel
Le service de la requérante devait inclure 16 heures par semaine d'émissions appartenant à diverses catégories produites en collaboration et diffusées simultanément à ses stations de Calgary et d'Edmonton, ainsi que 19,5 heures par semaine d'émissions de nouvelles produites et diffusées séparément par chacune de ses stations de Calgary et d'Edmonton.
La grille-horaire proposée par la requérante comprend notamment la diffusion de jusqu'à huit longs métrages étrangers par semaine, dont six commencent entre 20 h et 23 h. La A-Channel a précisé qu'il s'agissait de la période de plus grande écoute. En outre, elle devait présenter un long métrage canadien chaque semaine aux heures de grande écoute et environ deux autres films canadiens par mois au cours d'autres périodes.
La A-Channel a également proposé d'offrir un pourcentage important d'autres émissions de divertissement canadiennes aux heures de grande écoute, la plupart étant produites localement. Cette programmation de même que le film canadien proposé chaque semaine devaient représenter environ 36 % de la grille-horaire entre 20 h et 23 h.
Le Conseil fait remarquer que les pourcentages de production locale et d'émissions canadiennes aux heures de grande écoute que la A-Channel propose dépassent largement les niveaux proposés par l'Altawest à ces égards. Toutefois, comme dans le cas de l'Altawest, la A-Channel n'a pas convaincu le Conseil que les émissions de nouvelles qu'elle propose répondent à un besoin ou à un désir manifeste des téléspectateurs albertains. De plus, la grille-horaire de la A-Channel au cours des heures de grande écoute ne renferme aucune série dramatique canadienne régulière acquise par la requérante, autre que les reprises de séries diffusées antérieurement en Alberta.
Le Conseil est également préoccupé par le fait que la requérante compte beaucoup sur les films étrangers présentés aux heures de grande écoute. Cette proposition augmenterait le nombre de films étrangers offerts aux téléspectateurs de l'Alberta mais il est peu probable que ces métrages étrangers accroissent de façon significative la qualité globale des films étrangers que les stations de télévision en place en Alberta offrent actuellement.
Quant à l'engagement que la A-Channel a pris d'ajouter un long métrage canadien par semaine aux films étrangers prévus dans sa grille-horaire au cours des heures de grande écoute, le Conseil observe que la plupart des films canadiens convenant pour la télévision ont déjà été achetés soit par la SRC, soit par le réseau CTV. Il est peu probable que la requérante, même en collaboration avec d'autres, réussisse à arracher à ces concurrents les droits de diffusion nationaux pour ces mêmes films et que pour respecter cet engagement, il lui faudrait ainsi compter sur des films moins populaires et à petit budget ainsi qu'à des productions pour la télévision.
En général, le Conseil estime que le service proposé par la A-Channel et sa grille-horaire aux heures de grande écoute en particulier auraient pour effet de fragmenter l'auditoire actuel sans ajouter grand-chose à ce qui est déjà disponible dans le marché et sans contribuer de façon significative à l'atteinte d'un des objectifs prioritaires du Conseil qui consiste à accroître le nombre de dramatiques canadiennes de qualité aux heures de grande écoute.
Conclusion
Le Conseil a évalué les répercussions négatives que l'une ou l'autre proposition pourrait avoir sur les télédiffuseurs en place qui desservent les grand centres de Calgary et d'Edmonton, ainsi que sur ceux qui desservent les localités plus petites de Red Deer et de Lethbridge où des réémetteurs étaient proposés. Tel qu'indiqué précédemment, le Conseil a jugé qu'elles seraient importantes.
Après avoir examiné les projets et engagements de programmation mis de l'avant par les
requérantes, le Conseil a conclu qu'aucun n'offre un service qui répondrait à une demande manifeste, notamment en ce qui a trait aux émissions d'information locales. Fait plus important encore, ni l'un ni l'autre service ne possède globalement la qualité, le caractère distinctif ou la diversité nécessaires pour contrebalancer le risque que ses répercussions empêchent les télédiffuseurs en place d'apporter leur contribution prévue au système canadien de radiodiffusion et de remplir leurs obligations en vertu de la Loi.
Le Conseil fait état de toutes les interventions soumises à l'égard de ces demandes, y compris le grand nombre à l'appui de l'une ou de l'autre par des producteurs indépendants, des groupes communautaires, des élus et d'autres membres intéressés du public.
Le Secrétaire général
Allan J. Darling
Opinion minoritaire de M. Garth Dawley, conseiller régional du Manitoba, pour la Décision CRTC 94-288
Je ne partage pas les conclusions de la majorité au sujet de l'incidence sur le marché et je suis convaincu que celui-ci est suffisamment ferme pour soutenir un nouveau service de télévision. J'estime également que les demandes soumises par l'Altawest et la A-Channel, quoique essentiellement différentes, offraient la possibilité d'offrir aux Albertains un service de télévision distinct.

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