Explorer l’avenir des règlements sur le contenu canadien à la radio

Auteur : Kennedy French-Toller

Université d’attache : Département des communications, des médias et des productions cinématographiques, Université de Calgary

Niveau d’études : Étudiante à la maîtrise – études en communications et en médias

Introduction

En janvier 2020, un examen des lois canadiennes existantes sur les communications a été publié par un groupe indépendant d’experts convoqué par le ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique (ISDE) – désormais le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie – et le ministre du Patrimoine canadien. Cet examen exhaustif a reconnu la nécessité d’une législation modernisée qui continuera de guider le secteur des communications au Canada. Le présent document vise à discuter des recommandations formulées dans le rapport qui ont des répercussions précises sur les industries de la musique au Canada, en fonction des recherches universitaires, des observations présentées au groupe d’experts, et d’une analyse du rapport final lui-même, afin d’obtenir une vue d’ensemble de l’avenir que les Canadiens souhaitent pour les industries de la musique.

Depuis la popularisation de la radio, les Canadiens ont été aux prises avec plusieurs obstacles dans l’établissement d’une industrie nationale de la musique solide, qui permet aux Canadiens d’entendre les voix canadiennes. Pour la sphère de la musique populaire, ce sont des règlements imposés par des organismes gouvernementaux qui ont favorisé le développement des industries culturelles et qui ont permis la diffusion à grande échelle de la musique canadienne. Ces exigences en matière de contenu canadien, qui ont été établies à partir de rien dans les années 1970, ont été adaptées aux évolutions de l’industrie par différentes modifications des politiques, mais elles continuent de reposer sur une réglementation axée sur l’attribution de licences. Toutefois, ce que les organismes de réglementation n’ont pas réussi à adopter aujourd’hui, ce sont des politiques exhaustives relatives au contenu canadien diffusé par les solutions de rechange à la radio, notamment les services de diffusion de musique en continu qui ont récemment gagné en popularité. Une voie a été tracée par les lois passées et actuelles relatives au contenu canadien à la radio, et celle-ci doit continuer à évoluer au même rythme que la technologie et l’auditoire, afin de garantir le succès continu des Canadiens qui travaillent dans les industries culturelles.

Revue de la littérature

Afin de comprendre l’état actuel de la musique au Canada, il faut d’abord examiner l’évolution de la réglementation et de la technologie. La présente revue de la littérature donne un aperçu des forces qui contribuent à la production et à la distribution de la musique. Au Canada, ces forces existent en raison des règlements précis qui régissent l’industrie; toutefois, des services de diffusion de musique en continu dont les activités échappent à la portée de ces règlements ont connu une croissance importante et doivent être examinés d’un œil critique afin de comprendre l’évolution du marché de la musique.

Racines culturelles de l’industrie

Selon Hirsch (1972), les produits culturels se définissent comme des « biens non matériels, destinés à un public de consommateurs pour qui ils servent généralement une fonction esthétique ou expressive plutôt que clairement utilitaire » (127). Dans le contexte canadien, les premières technologies de communication qui avaient la capacité de diffuser des produits culturels se sont développées rapidement, mais elles n’avaient pas les produits culturels pour suivre l’infrastructure développée (Charland, 1986). Ce « nationalisme technologique » signifiait que le Canada était connecté en tant que pays, mais cette connexion a seulement servi à transmettre la culture populaire américaine, qui a comblé le vide laissé par un manque de produits culturels canadiens (Straw, 2002).

Pour qu’un produit culturel connaisse du succès, il doit être consommé. La diffusion à grande échelle des produits culturels américains aux débuts de la radiodiffusion au Canada a fait en sorte que les produits culturels canadiens doivent « attirer un auditoire dans un marché défini par le système culturel américain » (Charland, 1986; 215). De plus, les produits culturels canadiens doivent faire concurrence à une industrie culturelle américaine solide. Ce document porte particulièrement sur l’industrie de la musique populaire, et, selon la définition de Hirsch, la musique populaire existe en tant que bien culturel. Le développement de l’industrie de la musique populaire s’inscrit dans la foulée de cette domination américaine, comme le précise la section suivante.

Il est important de noter, dans cette section, l’absence d’une définition cohérente de la culture canadienne. Straw (2002) propose deux positions selon lesquelles la culture et la politique culturelle peuvent être examinées : la position essentialiste, où des traits thématiques existent dans l’ensemble du contenu canadien qu’on peut et devrait relever, et la position contemporaine, où la culture canadienne n’a pas de fond distinctif, mais existe plutôt pour combler les lacunes dans les produits culturels internationaux. Les chercheurs qui participent à des projets de recherche sur la musique populaire se situent d’un côté ou de l’autre de cette distinction. Toutefois, la majorité des chercheurs cités ici – Straw, Edwardson et Spalding, plus explicitement, adoptent la position contemporaine. Pour ces chercheurs, il n’y a pas un style de musique canadien distinctif, mais les Canadiens partagent des histoires et des perspectives canadiennes dans leur musique, ce qui peut créer un « sentiment d’appartenance » par « l’incorporation naturelle » de l’influence de l’industrie canadienne (Henderson, 2008).

Débuts de l’industrie

Toujours d’après Hirsh (1972), des facteurs définissent le système de l’industrie culturelle et son organisation : une incertitude de la demande, en raison des changements et des préférences, et une technologie « peu coûteuse », qui crée des surplus dans le système. Aux débuts de la musique populaire, ce surplus provenait d’une exposition dans les médias de masse, car les ventes en volume d’un seul article couvraient habituellement les pertes antérieures et produisaient des rendements additionnels. Dans ce système, l’avantage concurrentiel appartenait aux entreprises qui réussissaient le mieux à établir des liens entre les artistes et les canaux de distribution fiables et établis organisés par l’entreprise (Hirsch, 1972). Aux débuts de la musique populaire, l’industrie américaine avait des « ressources économiques, techniques et humaines que le Canada ne pouvait pas égaler » (Charland, 1986). Les maisons de disque américaines ont produit en excès pour réagir aux changements de goût, avec des investissements relativement faibles, car les chaînes de production étaient déjà établies (Hirsch, 1972).

Ce système efficace a donné lieu à une domination américaine de la production de musique populaire, et à une domination subséquente de la radiodiffusion. Cette domination s’appuyait sur la dominance qui existait aux débuts de la radiodiffusion, mentionnée ci-dessus, avant l’essor des stations de musique populaire. En 1930, « au moins 50 % du temps d’écoute canadien était consacré à de la programmation américaine » (Charland, 1986; 208). Les canaux de production américains ont pu se renforcer et se diversifier au rythme de l’évolution de la programmation de radio. Lorsque la production de la musique populaire s’est mise à battre son plein, la domination américaine sur les ondes canadiennes n’a fait que croître. En 1968, seulement de 4 à 7 % des chansons diffusées à la radio étaient canadiennes (Audley, 1983).

Dans les premiers temps de la production de la musique populaire, les maisons de disque dépendaient de la radio pour leur exposition et leur promotion (Hirsh, 1972), car la radio fournissait un système de distribution internationale pour les disques (Berland, 1990). Les canaux de production créés par des entreprises ne s’arrêtaient pas simplement à un produit culturel fini, mais s’étendaient à la distribution et à la promotion de la musique d’un artiste. Le contrôle de la sélection des nouveautés était détenu par les programmateurs de station de radio, qui sont devenus des contrôleurs importants de l’industrie (Hirsch, 1972). En étudiant cette période de la musique populaire, il est évident que ce sont les puissantes entreprises américaines qui disposaient des canaux de production et de distribution les plus efficaces.

Première réglementation au Canada

Le CRTC a établi des conditions distinctes qui répondent aux questions soulevées par Straw et d’autres chercheurs quant à ce qui est considéré comme du contenu canadien. Pour être considérée comme du contenu canadien, une pièce musicale doit généralement remplir au moins deux des conditions suivantes : M (musique) – la musique doit être entièrement composée par un Canadien; A (artiste interprète) – la musique ou les paroles sont principalement interprétées par un Canadien; P (production) – la pièce musicale est une prestation en direct qui est soit enregistrée en entier au Canada, soit interprétée en entier au Canada et diffusée en direct au Canada; L (paroles lyriques) – les paroles sont entièrement écrites par un Canadien (Armstrong, 2010, 99). Dans ce cadre, un Canadien est un citoyen, un résident permanent ou « une personne dont le lieu ordinaire de résidence était situé au Canada durant les six mois qui ont précédé son apport à une œuvre musicale, à un spectacle ou à un concert » (CRTC, 2009). Il convient de noter que ces conditions contournent la position essentialiste, en utilisant des classifications bureaucratiques qui ne montrent pas clairement les avantages culturels du contenu canadien. De plus, ces classifications évitent d’aborder l’aspect économique de la production musicale, en utilisant des définitions qui ne cherchent qu’à cocher des cases culturelles – ce qui laisse toutes les questions économiques à d’autres règlements.

Les mandats de contenu canadien fixés par ce qui était alors le Conseil de la radio-télévision canadienne, et qui est maintenant le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), ont été mis en place en 1971. Les lois sur le contenu de l’époque exigeaient que 25 % de la diffusion radiophonique soit de la musique canadienne, telle que définie ci-dessus. L’adoption de ces lois a augmenté les temps d’antenne de la musique canadienne dans l’ensemble. Toutefois, ce ne sont pas toutes les stations de radio qui étaient d’accord avec les quotas de contenu canadien exigés par la loi, et certaines stations ont réussi à contourner ces quotas en faisant jouer leur contenu canadien principalement entre minuit et 6 h, les heures dites « ghettos » (Rickwood, 2009). Ces stations respectaient encore techniquement les mandats du CRTC, mais leurs pratiques allaient à l’encontre des objectifs des exigences en matière de contenu canadien. Par conséquent, des mises à jour à la politique ont été apportées à la fois pour restreindre les pratiques injustes et pour promouvoir davantage la musique canadienne, car les exigences révisées devaient être respectées entre 6 h et 18 h (Armstrong, 2010). Les mises à jour aux politiques à cette époque ont également tenu compte des tendances d’écoute, alors qu’on semblait s’éloigner de l’écoute AM en faveur de l’écoute FM (Armstrong, 2010). Cette évolution des politiques a obligé les stations à accorder un temps d’antenne équitable et populaire aux artistes canadiens. Afin de promouvoir davantage les artistes canadiens, les quotas de contenu canadien ont été augmentés deux fois par le CRTC au fil des décennies qui ont suivi leur introduction initiale. À la première hausse du pourcentage, les quotas ont augmenté à 30 %, et une autre hausse de 5 % des quotas a porté le pourcentage de contenu canadien à la radio à son niveau actuel de 35 % (Henderson, 2008).

Ces règlements reposent sur un cadre d’attribution de licences, car les stations sont réparties en différentes catégories selon leur programmation et ont donc des exigences précises (Armstrong, 2010). Les quotas ci-dessus sont propres aux stations de musique populaire, qui peuvent être considérées comme la catégorie la plus en adéquation avec l’utilisation des services de diffusion en continu pour la consommation de la musique et la plus efficace aux fins de comparaison dans ce document. Selon Armstrong (2010) :

Quand une licence d’exploitation d’un service de radiodiffusion est accordée ou renouvelée, le titulaire conclut essentiellement une entente contractuelle avec le CRTC par laquelle il accepte de se conformer aux exigences du Conseil, y compris à ses exigences en matière de contenu canadien, en échange du privilège de détenir la licence. Si le titulaire ne respecte pas son entente avec le CRTC, le Conseil peut imposer certaines sanctions, y compris des conditions de licence plus lourdes et une période de licence plus courte ou, dans les cas extrêmes, il peut convoquer le titulaire à une audience et suspendre ou révoquer sa licence (96).

Le modèle d’attribution de licences est une entente contractuelle avec des conséquences pour les titulaires, dans ce cas-ci, les stations de radio, qui ne respectent pas leur contrat. Ce modèle exige la surveillance directe du CRTC, ainsi que la conformité du radiodiffuseur. Par conséquent, le CRTC a recherché un équilibre afin de promouvoir des objectifs culturels non liés au marché tout en maintenant des conditions de marché viables pour les stations de radio commerciales (Berland, 1990). Cet équilibre signifie que les stations ne sont réglementées que dans une mesure qui favorise les objectifs du CRTC, sans contrôle total ni interférence brutale dans le marché.

Évolution récente de la réglementation

Depuis la mise en place des exigences en matière de contenu canadien à la radio traditionnelle, des solutions de rechange à la radio AM et FM traditionnelle ont vu le jour à partir du début des années 2000. La première de ces solutions de rechange à avoir suscité une intervention réglementaire est la radio satellite payante, qui offre aux abonnés des services radiophoniques sans publicité avec des canaux propres aux genres et aux artistes sur une superficie d’écoute qui couvre des millions de kilomètres carrés.

Le CRTC a réagi à cette nouvelle évolution du système en adaptant son modèle d’attribution de licences existant. En 2005, les premiers services de radio satellite par abonnement ont obtenu une licence du CRTC à condition d’inclure un certain nombre de canaux canadiens qui maintiennent leurs propres quotas de contenu canadien précis, qui sont considérablement plus élevés que ceux de la radio traditionnelle (Armstrong, 2010). Ces fournisseurs de radio satellite étaient tenus d’offrir au moins huit canaux originaux produits au Canada dans l’ensemble de leur programmation, avec un maximum de neuf canaux non produits au Canada par canal canadien offert (Fauteux, 2016). En vertu de ces règlements, un canal est considéré comme canadien s’il est produit au Canada et qu’il diffuse un minimum de 50 % de programmation canadienne (Fauteux, 2016). Quand cette licence a été renouvelée en 2012, le libellé des dispositions de la licence a été modifié pour indiquer qu’au moins 10 % du nombre total de canaux doit être composé de canaux originaux produits au Canada (Fauteux, 2016).

Les mesures prises par le CRTC pour réglementer la radio satellite montrent à la fois une capacité ainsi qu’une volonté de la part du CRTC de s’adapter aux nouveaux acteurs du marché de la consommation de musique. Toutefois, depuis l’adoption de la réglementation pour la radio satellite, d’autres services liés à l’écoute de musique sont devenus de plus en plus populaires. Au cœur du sujet de ce document, la réglementation du CRTC sur le contenu canadien a arrêté d’évoluer après la radio satellite, et ne tient pas compte des services de diffusion de musique en continu en ligne.

Financement et rentabilité de l’industrie

Comme l’a noté Henderson (2008), l’objectif principal des politiques sur le contenu du CRTC est en fait un objectif culturel qui encourage une exposition accrue des interprètes, des paroliers et des compositeurs de musique canadiens auprès des publics canadiens. Cet objectif culturel s’accompagne d’un objectif « industriel » qui vise à renforcer l’industrie de la musique canadienne, tant au niveau de la création que de la production (Henderson, 2008). Non seulement la réglementation sur le contenu a diffusé les voix canadiennes, mais elle a également permis à ces voix d’être entendues en encourageant le développement national au sein des industries de la musique. Pour avoir des quotas de contenu canadien, il faut d’abord avoir un contenu canadien à diffuser, comme le souligne Straw (2000). D’après Spalding (2008; 313), « la réglementation du contenu a non seulement fourni des réseaux à ces groupes, mais elle a également contribué à la mise en place d’une infrastructure viable, y compris des salles de concert et des studios ».

Afin de soutenir l’industrie du disque, des organismes publics et privés ont été créés au Canada avec le soutien du gouvernement. Le CRTC a exigé, dans le cadre de son accord de licence avec les radiodiffuseurs, que ces derniers fournissent du soutien financier à l’industrie du disque au Canada en fonction des revenus (Spalding, 2008). Ce soutien se traduit par l’obligation des radiodiffuseurs de verser des contributions annuelles pour le développement des talents musicaux canadiens (Armstrong, 2010). C’est pourquoi des organismes sans but lucratif et des fonds précis ont été créés afin d’aider financièrement les Canadiens qui participent à l’industrie du disque à divers degrés. Le Fonds de la musique du Canada et la Foundation Assisting Canadian Talent on Recordings (FACTOR) sont deux de ces organisations qui fournissent du soutien financier à l’industrie de la musique canadienne, notamment pour l’enregistrement, la production de vidéoclips et les tournées (Spalding, 2016). La position contemporaine de la politique culturelle appuie précisément ces initiatives, car elle considère que les politiques publiques devraient orienter des ressources vers les producteurs culturels canadiens qui pourraient connaître un succès commercial (Straw, 2002). De plus, Terry (2013) a tenu des entretiens avec plusieurs acteurs importants de l’industrie canadienne, et a constaté que le financement est un aspect essentiel du succès des artistes sur les radios commerciales. Toutefois, la législation actuelle limite les exigences en matière de financement aux radiodiffuseurs traditionnels titulaires d’une licence en vertu des lignes directrices du CRTC. Dans une industrie mondialisée, avec l’émergence de nouveaux acteurs dans la diffusion de musique en continu en ligne, le détournement des bénéfices de la radio traditionnelle vers les services de diffusion en continu en ligne rend le financement de l’industrie nationale vulnérable.

Succès des politiques relatives au contenu canadien

Les recherches universitaires soulignent le succès des politiques relatives au contenu canadien. Il y a une « scène » musicale canadienne, et l’infrastructure nécessaire pour créer de la musique populaire canadienne (Henderson, 2008). Cet environnement qui a permis à une industrie nationale de s’épanouir est le résultat direct d’une politique efficace (Muia, 2020). L’industrie de la musique canadienne existe grâce aux politiques exhaustives présentées ci-dessus, qui englobent le développement et la distribution du contenu canadien. Bien qu’une industrie culturelle nationale solide ait été créée pour employer des Canadiens, la musique populaire a évolué d’une manière qui pourrait rendre l’ancienne politique inefficace.

La radio n’occupe plus la position qu’elle occupait auparavant, car de nouveaux canaux de distribution de musique ont gagné en popularité, ce qui a perturbé les lignes de distribution traditionnelles par de nouvelles technologies (Wikhamn et Knights, 2016). À mesure que les lignes de distribution se tourneront vers des technologies non réglementées, les politiques de distribution du contenu canadien en subiront les conséquences. De plus, les revenus de la radio ont chuté en raison de la popularité croissante des nouvelles technologies d’écoute, ce qui met en péril les sources de financement qui permettent la production de contenu canadien (Association canadienne des radiodiffuseurs, 2019).

Essor de la diffusion de musique en continu

En 2008, Henderson s’est penché sur l’émergence de la musique numérique et a conclu que « dans ce nouveau large fossé, ce fossé numérique, la nation existe encore, même dans un endroit où la nation n’a pas réellement d’importance » et « qu’un examen plus nuancé révèle une industrie prospère prête à tirer parti d’une nouvelle ère de la musique populaire » (314). Son étude des statistiques relatives à l’écoute en ligne, par l’intermédiaire du site Last.fm (un site qui fait le suivi de l’écoute en ligne) a montré que les Canadiens écoutaient encore du contenu canadien selon les palmarès numériques, mais pas du tout au même niveau qu’à la radio en direct. La popularité de la diffusion de musique en continu a connu une montée considérable, et cette plateforme est même devenue un élément central des habitudes d’écoute, étant donné que les nouvelles technologies des services de diffusion en continu sont en mesure de répondre aux désirs des auditeurs (Hesmondhalgh et Meier, 2018).

Spotify s’est imposé, et demeure, le leader mondial des services de diffusion de musique en continu, mais d’autres fournisseurs de services, tels que Apple Music, Amazon Music Unlimited, Google Play Music et YouTube Music, se sont taillés une place dans le marché (MarketLine, 2020). Spotify détient maintenant une part de marché supérieure à celle détenue par les détaillants ou les stations de radio à l’ère du numérique, et s’impose clairement comme un favori dans les services de diffusion de musique en continu, avec une part déclarée de 37 % du marché de la diffusion en continu par abonnement en 2017 (Aguiar et Waldfoge, 2018). Le marché de la musique populaire s’est éloigné de la consommation physique et numérique, au profit de la diffusion comme principal moyen de consommation (Hesmondhalgh et Meier, 2018).

Compréhension de la diffusion de la musique en continu

Bien que la portée du présent document ne s’étende pas à une étude exhaustive des recherches universitaires sur les rouages internes des services de diffusion de musique en continu, ce document doit démontrer que les services de diffusion de musique en continu sont suffisamment puissants pour justifier une réglementation. La section ci-dessus fait état de la montée en popularité des services de diffusion en continu, mais ce sont les pratiques de ces services qui devraient intéresser les organismes de réglementation. Étant donné que Spotify est au centre de la plupart des recherches universitaires sur les services de diffusion de musique en continu, cette section traitera des recherches portant sur Spotify en particulier. Toutefois, ce document ne suggère pas que Spotify est le seul service de diffusion de musique en continu qui devrait être soumis à la réglementation. Il est important de noter que Spotify a été qualifié de « boîte noire », et que les chercheurs n’ont pas été en mesure d’accéder aux données en vue d’une étude complète du service (Eriksson et coll., 2019). Les recherches examinées se sont appuyées sur des entrevues, des données signalées ou recueillies par les utilisateurs, et certaines données recueillies par des applications.

Les listes de lecture détenues par Spotify sont dictées par des éditeurs de contenu musical humains qui sont employés par Spotify, par des algorithmes, ou par une combinaison des deux (Bonini et Gandini, 2018). Ces listes de lecture font l’objet d’une forte promotion de la part de Spotify, directement sur ses médias sociaux, mais aussi par leur mise en évidence sur l’interface utilisateur (Prey, 2020). L’interface de l’application limite également ce que les utilisateurs peuvent faire sur Spotify, en limitant la découverte de musique à une barre de recherche, aux recommandations générées par Spotify ou à la navigation dans les listes de lecture (Besseny, 2019). La présence sur les listes de lecture est devenue de plus en plus importante pour les artistes, car le placement dans des listes de lecture détenues par Spotify qui ont beaucoup d’abonnés est en corrélation directe liée à l’augmentation du nombre d’écoutes pour les artistes (Aguiar et Waldfoge, 2018). Dans l’ensemble, les recherches font état d’un pouvoir croissant des listes de lecture dans la découverte de musique – alors que les stations de radio exposaient auparavant le public à de la nouvelle musique, ce sont maintenant les listes de lecture qui le font.

Ce qui est le plus remarquable dans les recherches portant sur Spotify qui ont été étudiées dans l’élaboration de ce document, c’est leur sous-promotion du contenu national; en effet, Aguiar et Waldfoge (2018) ont souligné la promotion des grandes maisons de disque et de la musique américaine au détriment du contenu canadien tant sur les listes de lecture générées par algorithme que celles sélectionnées par des humains. Bien que des lacunes existent dans les recherches sur l’intersection entre le contenu canadien et Spotify, le manque de promotion du contenu canadien de la part de Spotify indique que le service de diffusion en continu ne fera pas efficacement la promotion des artistes canadiens au Canada. Le contrôle de l’industrie est clairement passé des professionnels de la radiodiffusion traditionnelle aux équipes d’éditeurs influencées par l’orientation de l’entreprise, avec l’aide d’algorithmes (Bonini et Gandini, 2018).

Bien que l’aspect de la distribution des services de diffusion de musique en continu soit analysé dans les recherches, l’aspect de production y est moins présent. Prey (2020) a constaté que Spotify a payé des producteurs pour créer des titres sous de faux noms afin qu’ils soient mis en vedette dans les listes de lecture instrumentales ou d’ambiance de Spotify. Cela démontre que Spotify a intérêt à financer du contenu qui sert ses propres intérêts, mais des recherches supplémentaires sont nécessaires pour bien comprendre la mesure dans laquelle Spotify finance des activités de production, et ses objectifs relatifs à ce financement.

Les recherches portant Spotify qui ont été étudiées dans le cadre du présent document ont montré que Spotify occupe désormais la position de pouvoir qu’occupait auparavant la radio. Spotify fait efficacement la promotion de musique par des listes de lecture créées à l’interne, et a la capacité de financer la production de musique avec ses revenus. Le présent document est d’avis que si les politiques relatives au contenu canadien ont porté leurs fruits, elles devront être adaptées pour mieux convenir à l’environnement actuel. Dans cette optique, ce document examinera comment les acteurs de l’industrie ont reconnu la nécessité de moderniser la réglementation de la musique, et leurs suggestions quant aux politiques à l’avenir.

Méthode

Le présent document sera rédigé selon la méthode d’analyse critique du discours, en combinaison avec l’analyse des politiques, afin de jeter un regard critique sur les soumissions écrites présentées au groupe d’examen du cadre législatif ainsi que sur le rapport final produit par ce groupe. Cette méthode s’inspire particulièrement de l’exploration de Fisher de l’analyse critique du discours comme outil pour l’analyse des politiques. Fischer (2003) propose une exploration approfondie de l’analyse du discours, en utilisant l’ouvrage fondamental Discourse and Social Change de Fairclough (1992). L’exploration de Fischer s’appuie sur le texte Discourse and Social Change de Fairclough (1992). Selon la définition de Fischer (2003; 1), « l’analyse des politiques peut être formellement définie comme une discipline des sciences sociales appliquées qui utilise différentes méthodes d’enquête et d’argumentation pour produire et transformer des informations pertinentes pour les politiques qui peuvent être utilisées dans des contextes politiques pour résoudre des problèmes de politique ». Dans le cadre de cette recherche, les informations pertinentes pour les politiques sont tirées des soumissions au Groupe d’examen du cadre législatif en matière de radiodiffusion et de télécommunications ainsi que du rapport final de ce groupe, L’avenir des communications au Canada : le temps d’agir.

L’exploration de Fischer de la méthode d’analyse critique du discours appliquée aux politiques publiques fournit un support méthodologique utile pour ce cas d’examen lié aux politiques. Comme le fait remarquer Fischer, la plupart des recherches et des méthodologies en matière de politiques publiques « mettent l’accent sur une analyse quantitative rigoureuse, la séparation objective des faits et des valeurs, et la recherche de résultats généralisables dont la validité serait indépendante du contexte social particulier d’où ils ont été tirés » (2003; 4). C’est dans cette séparation du contexte social que l’analyse critique du discours serait particulièrement utile pour ce domaine de recherche, où les études politiques et les études culturelles s’entremêlent. Avec les principes de l’analyse critique du discours appliqués à la pratique de l’analyse politique, cette analyse des textes relatifs à la critique des politiques sera plus vaste, et prendra en considération à la fois le pouvoir et les relations sociales. L’analyse critique du discours orientera la méthode dans le présent document, tout particulièrement concernant les relations de pouvoir et l’inégalité, mais elle ne s’étendra pas à une analyse linguistique précise.

La revue de la littérature ci-dessus éclairera également l’analyse des soumissions écrites, en plus de la section de discussion finale. Jusqu’à présent, ce document cherche à souligner le succès des politiques antérieures ainsi qu’à dresser un tableau de l’industrie actuelle. En gardant ce passé et ce présent à l’esprit, ce document explore l’avenir potentiel des industries de la musique canadienne.

Conclusions tirées des soumissions

Les conclusions présentées ici sont tirées des soumissions de l’Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR), la Coalition pour une politique musicale canadienne (CPMC) et le CRTC. Le rapport de l’ACR (2019) a été publié par un comité composé de représentants de plus de 500 stations de radio AM et FM à l’échelle du Canada qui représentent au total plus de 95 % des revenus totaux de l’industrie de la radio. Cette soumission reflète le point de vue de l’industrie de la radio commerciale privée. La CPMC (2019) est composée d’organisations professionnelles de la musique et d’organisations des droits musicaux du Canada, et représente un échantillon représentatif de l’industrie canadienne. Cette soumission reflète les points de vue combinés des maisons de disques, des éditeurs de musique, des gestionnaires et des distributeurs, ainsi que des artistes qui œuvrent à la base. Le CRTC (2019) présente son rapport du point de vue du tribunal administratif indépendant qui supervise la réglementation de l’industrie de la musique au Canada. Dans l’ensemble, ces sélections cherchent à représenter les points de vue des acteurs de la radio, de l’industrie du disque et des organismes de réglementation chargés d’appliquer la politique relative au contenu canadien. Les sections suivantes portent sur les questions fondamentales qui ont été examinées dans ces soumissions.

Il est important de noter dans cette section l’absence de soumissions de Spotify, Apple (Apple Music), Amazon (Amazon Music Unlimited) ou d’autres services de diffusion de musique en continu. Toutefois, des soumissions ont été reçues de la part de toutes les autres grandes entreprises technologiques – Facebook, Netflix et Google (sans mention précise à Google Play Music). Netflix a expressément écrit au groupe d’experts pour clarifier ses investissements existants dans la production et le contenu canadiens, en affirmant qu’on ne devrait pas conclure que sa position de fournisseur de services en ligne signifie que l’entreprise devrait être réglementée à titre de radiodiffuseur, et a affirmé que le libre jeu du marché serait suffisant pour atteindre les objectifs de la politique culturelle (Netflix, 2019; 1 et 2). Spotify et d’autres services de diffusion de musique en continu auraient pu écrire pour faire écho à n’importe quelle de ces opinions du point de vue de la diffusion de musique en continu, ou même pour suggérer un cadre réglementaire dans le cadre duquel ils estiment pouvoir mener leurs activités. Toutefois, leur manque de soumissions pourrait suggérer un manque d’intérêt à participer à l’élaboration de la politique, ou un manque de conviction que la politique aura des répercussions sur eux. Il se peut aussi que Spotify et les autres évitent intentionnellement toute interaction avec les organismes de réglementation des communications jusqu’à ce qu’ils soient précisément visés par la réglementation, car le fait de reconnaître les organismes de réglementation confère une légitimité à l’idée qu’ils devraient être réglementés.

Rentabilité

Les inquiétudes concernant la rentabilité des artistes dans le monde moderne de la diffusion en continu ressortent clairement de la soumission de la CPMC. « Là où, en général, une maison de disque indépendante pouvait espérer dégager un profit en écoulant 15 000 exemplaires d’un album physique, il faut 30 millions de diffusions en continu de toutes les chansons d’un album combinées pour arriver à dégager un profit dans le cas des services de musique en ligne, un seuil qui est rarement atteint par les artistes canadiens indépendants et encore plus rarement par les artistes canadiens francophones » (CPMC, 2019; p. 8). Le comité de l’ACR est également témoin des répercussions de la diffusion en continu sur leurs bénéfices, et elle cite une baisse d’auditoire de radio de 7,6 % sur quatre ans (de 2012 à 2016), avec une baisse potentielle de 15 % sur dix ans, et une baisse des bénéfices en raison du déclin de l’auditoire de la radio privée (ACR, 2019).

Le nouveau paysage numérique a contribué de différentes façons à ces baisses de rentabilité. Pour les artistes et les maisons de disque, un nouveau modèle de distribution numérique provoqué par des avancées technologiques nécessite une diversification de la part des producteurs de contenu, mais ne dégage « qu’une fraction des revenus générés il y a deux décennies » (CPMC, 2019). Pour les stations de radio, il en découle un « exode des revenus publicitaires vers les plateformes numériques », car les annonceurs choisissent de répartir leurs budgets de marketing dans les différentes plateformes publicitaires numériques à leur disposition (ACR, 2019). Les soumissions de la CPMC et de l’ACR montrent clairement que le paysage dans lequel elles existent change et qu’elles n’arrivent pas à suivre.

Découvrabilité

La soumission de la CPMC explore les défis auxquels font face les artistes canadiens indépendants et émergents « si la découverte de leur musique est limitée par les paramètres utilisés par les algorithmes de recommandation des services de musique en ligne » (CPMC, 2018). Cette opinion fait écho aux recherches explorées par ce document concernant les limites de la découvrabilité de la musique sur Spotify. L’ACR et la CPMC relèvent toutes les deux dans leurs soumissions le manque d’incitation pour les plateformes de diffusion en continu de financer ou de promouvoir le contenu canadien.

La soumission du CRTC explore la consommation de contenu dans le cadre du marché actuel. Le contenu canadien doit de plus en plus rivaliser avec un contenu non canadien abondant, attrayant et bien financé. Les priorités des Canadiens quant au contenu qu’ils consomment et à la manière dont ils décident de l’obtenir ont radicalement changé. Les Canadiens consacrent plus de temps que jamais aux sources de contenu non canadiennes. (2018, 9)

Toutefois, cette soumission du CRTC ne traite pas de la manière dont le contenu canadien doit être promu afin de combattre précisément les problèmes mentionnés ci-dessus. Au contraire, le rapport indique plutôt que « le gouvernement devrait également contribuer à cet effort en accordant du financement et des aides fiscales pour la promotion et la découvrabilité » (CRTC, 2019).

Qui doit être réglementé et comment?

Le rapport précis du CRTC de 2019 soumis au groupe d’examen du cadre législatif et étudié dans le présent document n’offre pas de suggestion réglementaire précise, mais souligne la nécessité d’instaurer une nouvelle réglementation.

Le CRTC a besoin d’un ensemble d’outils réglementaires à jour pour pouvoir s’adresser aux nouveaux acteurs exerçant des activités au Canada, quelle que soit leur nationalité, afin de maintenir la force et la variété du système de radiodiffusion canadien dans le but de servir le mieux possible les Canadiens, que ce soit à titre de citoyens, de consommateurs ou de créateurs. Une telle approche doit inclure toutes les entités qui exploitent du contenu audio et vidéo sur le marché canadien et qui en tirent des revenus, peu importe la plateforme ou la nationalité de l’entité (CRTC, 2019; 10).

Les soumissions de l’ACR et de la CPMC font cette même affirmation. Les entités étrangères doivent être réglementées afin de maintenir la compétitivité du marché. La soumission de l’ACR indique que la Loi sur la radiodiffusion existante a compétence sur ces services audio et de médias numériques étrangers, et a la capacité d’imposer des exigences à ces services (2019). La soumission diffère à cet égard, en indiquant que les entités étrangères « contournent » les règles auxquelles les Canadiens dans le système se conforment, et qu’elles sont exemptées de la plupart des réglementations gouvernementales (CPMC, 2019). Bien que ces soumissions présentent des positions divergentes concernant la nécessité de mettre à jour le cadre réglementaire pour inclure les nouveaux acteurs, elles soulignent toutes deux l’importance de la réglementation pour uniformiser les règles du jeu. Afin de rendre les règles du jeu plus équitables, la soumission de l’ARC comprenait une suggestion d’assouplissement de la réglementation pour la radio, plus précisément la réglementation actuelle qui empêche le droit de posséder plus de deux stations FM dans un seul marché (ARC, 2019).

Chacune des soumissions discutées dans le présent document propose des solutions au groupe d’experts, même si elles sont parfois vagues. La soumission de l’ARC (2019) admet que la transplantation de la politique de la radio sur les services audio étrangers serait irréalisable. Elle cite l’adaptation de la politique de la radio traditionnelle à la radio satellite comme un exemple de mesure efficace prise par le CRTC, en précisant qu’il appartient à nouveau à l’organisme de réglementation de déterminer une politique efficace pour les nouveaux acteurs supplémentaires du système. La soumission de la CPMC (2019) est beaucoup plus claire dans ses suggestions. Elle suggère des quotas en pourcentage pour les recommandations de contenu canadien aux utilisateurs canadiens qui choisissent de recourir aux fonctions de recommandation offertes par les services de diffusion en continu, et souligne la sophistication des algorithmes pour suggérer du contenu canadien qui correspond aux goûts de l’auditeur. Elle propose la mesure et le contrôle des données comme une solution pour assurer le respect des quotas ainsi que l’utilisation de métadonnées afin d’identifier le contenu canadien. La soumission de l’ARC (2019) suggère ce type d’approche de manière plus vague, en évoquant la possibilité d’une promotion au moyen « d’affichages et d’algorithmes », mais en la qualifiant de difficile à réglementer.

Conclusions du groupe d’examen

Le groupe d’examen formule des recommandations précises et numérotées dans son rapport, dont quelques-unes sont pertinentes pour cette recherche, et pour l’avenir de la réglementation de la musique canadienne. Dans le présent document, les recommandations de la section 3 sont analysées : la création, la production et la découvrabilité du contenu canadien. Tout d’abord, les recommandations précises seront examinées, puis d’autres conclusions du chapitre 3 seront présentées afin d’expliquer les recommandations de manière plus approfondie.

La première recommandation pertinente est une mise à jour aux objectifs de la Loi sur la radiodiffusion, la recommandation 53, qui porte en partie sur les investissements dans le développement, la création et la distribution de contenu canadien de qualité et la promotion de l’essor d’un solide secteur canadien de la production. Ces objectifs serviraient à guider la Loi, et maintiendraient le contenu canadien dans les objectifs de la politique.

La recommandation 54 est également utile à cette recherche, en suggérant que l’expression « entreprise de contenu médiatique », qui remplacerait la locution « entreprise de radiodiffusion » dans la loi, comprendrait le terme « entreprises d’édition de média », qui décrirait les services de diffusion en continu, comme Spotify. Les recommandations 55 et 56 suggèrent que « la Loi sur la radiodiffusion soit modifiée afin d’établir que la législation s’applique aux entreprises qui exercent en partie leurs activités au Canada, qu’elles aient ou non un établissement commercial au Canada » et que « le régime d’attribution de licences actuellement prévu par la Loi sur la radiodiffusion soit accompagné d’un régime d’enregistrement ». Ces recommandations combinées soumettraient les services de diffusion de musique en continu à la réglementation canadienne, en vertu d’un nouveau cadre d’enregistrement. La recommandation 56 va plus loin, avec l’établissement de « catégories d’entreprises enregistrées » et l’imposition d’exigences pour ces entreprises enregistrées, y compris le paiement de frais d’enregistrement et la possibilité d’imposer des peines « en cas de défaut de se conformer aux conditions d’enregistrement ». Toutefois, la recommandation 58 retire la certitude de ces règlements :

58. Nous recommandons que le CRTC ait le pouvoir d’exempter de l’enregistrement toute entreprise ou catégorie d’entreprises de contenu médiatique dans les cas où, en raison de son contenu ou de son format spécialisé, de ses revenus ou pour toute autre raison, la réglementation n’est ni nécessaire ni pertinente pour atteindre les objectifs de la politique relative au contenu médiatique. (ISDE 2020, 32)

Les recommandations 60 à 63 portent sur les exigences en matière de dépenses et de découvrabilité qui seraient imposées à toutes les entreprises de contenu médiatique. La recommandation 64 traite de la collecte de renseignements et des données sur la consommation auprès des entreprises de contenu médiatique en ligne et de leur publication par le CRTC. Ensemble, ces recommandations appuieraient l’industrie actuelle de la musique canadienne par de nouveaux canaux, en vertu d’un nouveau cadre.

Le rapport d’ISDE de 2020 donne davantage de renseignements sur leurs recommandations dans le chapitre 3. Cette section, comme il a été mentionné, porte sur la création, la production et la découvrabilité du contenu canadien. Dans l’introduction de cette section, le rapport indique clairement que le paysage de la radiodiffusion a changé, en notant tout particulièrement la transition vers des services d’abonnement exploités par des fournisseurs étrangers. Les recommandations dans ce chapitre cherchent à redéfinir selon une « perspective ouverte sur l’avenir [...], les activités et les acteurs assujettis à la réglementation d’une façon neutre sur le plan technique » par des objectifs qui comprennent « un modèle durable de création, de production et de découvrabilité du contenu canadien auquel tous les acteurs du secteur auront à contribuer de façon appropriée » (116). L’introduction de ce chapitre évite d’utiliser un vocabulaire précis, car il porte sur le contenu canadien de façon générale, y compris les nouvelles, les vidéos et d’autres types de contenu médiatique.

La section 3.3.1 (ISDE, 2020) définit les acteurs et les activités, et le rapport relève la dimension mondiale du marché actuel et les nouvelles solutions de rechange à la radiodiffusion en direct, particulièrement en reconnaissant que cette évolution se poursuit rapidement (129). Cette section n’hésite pas à noter qu’Internet a eu un impact sur le secteur audio au Canada, et que des redéfinitions sont nécessaires afin de réglementer efficacement. Dans cette section, le rapport suggère une définition du terme « modération » de la recommandation 54 et énumère précisément Spotify comme exemple (130). Bien que Spotify soit le seul service de diffusion de musique en continu indiqué, cette inclusion montre une reconnaissance claire des services de diffusion de musique en continu comme fournisseur de contenu médiatique exerçant un contrôle éditorial. En ce qui concerne la nature étrangère de ces entreprises, le rapport affirme que la compétence du CRTC s’applique aux services Internet étrangers « qui tirent des revenus importants des abonnés canadiens » (134). Bien que la Loi sur la radiodiffusion actuelle puisse, en fait, réglementer des acteurs étrangers, le rapport suggère d’apporter certaines clarifications à la législation afin de renforcer davantage cette position.

La section 3.3.2 (ISDE 2020) passe ensuite à l’examen des mécanismes réglementaires, en expliquant les modèles d’attribution de licences actuels et leurs objectifs. Le rapport note que ce mécanisme ne convient pas aux nouvelles entreprises de média, et propose un modèle d’enregistrement comme suggestion pour réglementer ces entités, tout en conservant le modèle d’attribution de licences pour les services traditionnels. Comme pour le modèle d’attribution de licences actuel, les entreprises enregistrées seraient classées en catégories selon les activités qu’elles exercent, ce qui signifie que les services de diffusion, tels que Spotify, seraient réglementés comme des entreprises de modération de média. Cette section n’aborde toutefois pas la suggestion de frais d’enregistrement ou de peines en cas de défaut de se conformer. Bien qu’il ne soit pas dans la portée du rapport de suggérer des valeurs monétaires exactes, le manque d’explication retarde la prise de décision relative à un éventuel processus d’enregistrement. Dans le prolongement de la recommandation 58, le rapport fait simplement état du risque d’étendre indûment la portée par la mise en place de nouveaux modèles d’enregistrement, et qu’il faut que le CRTC ait le pouvoir « d’exempter de l’obligation d’enregistrement certaines entreprises ou catégories d’entreprises de contenu médiatique » (135 et 136). Ce pouvoir d’abstention de la réglementation s’appliquerait dans les cas où la réglementation n’est ni nécessaire ni pertinente pour « atteindre les objectifs de la politique culturelle », notamment les entreprises dont les revenus sont faibles ou « dont le contenu ou le format est spécialisé » (136). Cette recommandation élimine la responsabilité du CRTC de réglementer chaque nouvelle entreprise de contenu médiatique qu’il rencontre. La formulation demeure vague, tant dans la recommandation que dans les explications supplémentaires, ce qui reflète l’abstention de la réglementation actuellement dans la Loi. Cet ajout n’est pas surprenant, car une réglementation totale des entreprises de contenu médiatique s’avérerait impossible dans un monde numérique.

La section 3.4.1 (ISDE, 2020) discute des préoccupations financières dans l’industrie concernant la baisse des parts de revenus détenues par les médias traditionnels, l’instabilité du secteur, et le risque pour les régimes de financement du contenu (142). La section suivante, c’est-à-dire la section 3.4.2, répond à ces préoccupations en formulant des recommandations. La recommandation 60 concerne la demande des intervenants visant à uniformiser les règles en jeu, et affirme que des contributions financières devraient être équitables. Sur ce point, le rapport a trouvé « qu’un nombre croissant d’États affirment leur souveraineté culturelle en imposant des obligations aux services médiatiques qui offrent du contenu à leurs auditoires nationaux » (143). Bien qu’une fois de plus, le financement exact et les mesures de surveillance ne soient pas expliqués, la recommandation sert à introduire des objectifs de politique qu’on pourrait appliquer plus tard. Selon les explications de la recommandation 61, les fonds seraient établis afin de soutenir la production et la distribution de contenu canadien, sans donner de précisions. En ce qui concerne le deuxième point de cette recommandation qui est mis en évidence dans cette analyse, le rapport relève des difficultés à trouver ou à reconnaître le contenu canadien, et fait valoir que « les algorithmes et les processus fondés sur l’intelligence artificielle ont une énorme influence sur les recommandations de contenu et, par conséquent, sur la découvrabilité du contenu » (144). Sur cette base, le rapport recommande des exigences en matière de découvrabilité pour les entreprises de contenu médiatique, mais sans suggérer à quoi ces exigences pourraient ressembler. La recommandation 62, qui porte sur les contributions financières des entreprises de modération de média, s’avère plus précise dans son déploiement. Cette section suggère des exigences en matière de dépenses pour d’autres entreprises de modération de média, mais propose des redevances dans le cas des services de diffusion en continu de contenu audio en ligne, compte tenu de leur modèle d’affaires différent. Sur ce point, le rapport affirme que le CRTC doit demeurer flexible et offrir un choix entre les dépenses et les redevances. Encore une fois, aucun chiffre exact n’a été discuté, mais le rapport offre plusieurs solutions. La recommandation 63 au sujet de la découvrabilité indique que « parallèlement aux mesures pour soutenir la création de contenu, il est important que les entreprises de contenu médiatique des secteurs public et privé soutiennent la découvrabilité du contenu canadien » (147). Cette section mentionne à nouveau les algorithmes, et recommande que les exigences relatives aux entreprises de contenu médiatique soient plus transparentes par rapport aux facteurs sur lesquels leurs recommandations se fondent, ce qui obligerait ces fournisseurs de services à offrir plus de choix de contenu canadien. Le rapport recommande de la souplesse en ce qui concerne les exigences en matière de découvrabilité, et du côté de la surveillance de la consommation du contenu canadien en ligne, le rapport suggère une collaboration entre le CRTC et l’industrie.

Discussion

Dans l’ensemble, les éléments des soumissions ci-dessus reflètent les sentiments des organisations qui les ont soumis. Le rapport de l’ACR offre le point de vue d’une industrie qui se trouve dans une position vulnérable. Le rapport se concentre sur les préoccupations de la radio publique qui sont apparues à mesure que la diffusion en continu et les médias numériques ont gagné en popularité par rapport aux médias traditionnels. La soumission se préoccupe avant tout de la rentabilité future de la radio commerciale. L’ACR fait pression pour la déréglementation dans les domaines où la radio commerciale est limitée afin de rester compétitive, et pour la réglementation des acteurs qui menacent sa rentabilité.

La soumission de la CPMC se préoccupe de tous les acteurs de l’industrie. La soumission s’intéresse à l’avenir du secteur de la musique canadienne en général. La CPMC aborde les difficultés auxquelles sont aux prises les artistes et les maisons de disque dans un climat musical en évolution. Elle propose des suggestions précises au groupe d’experts concernant un nouveau cadre réglementaire qui protégerait une industrie de la musique canadienne solide qui demeure importante à l’ère numérique.

La soumission du CRTC témoigne d’un engagement en faveur de changements à la réglementation, sans pour autant définir précisément de nouveaux cadres. Le rapport met plutôt l’accent sur l’adaptabilité de la politique à l’évolution des environnements de communication et sur les nouveaux outils adaptés à l’ère numérique. Il note les modèles émergents et les choix faits par les Canadiens dans un système en évolution, tout en faisant la promotion des valeurs existantes en ce qui concerne la nécessité de contenu canadien.

Ces recommandations, si elles sont mises en œuvre, créeraient un cadre entièrement nouveau pour la réglementation des services de diffusion en continu étudiés dans ce document. La recommandation 58 est conforme à l’abstention de la réglementation actuelle du CRCT, et laisse planer la possibilité qu’un organisme de réglementation choisisse de ne pas réglementer en premier lieu. Toutefois, les autres recommandations discutées dans le présent document sont porteuses d’espoir pour l’industrie canadienne de la radiodiffusion et de l’enregistrement de musique. L’examen montre une préoccupation pour l’avenir des Canadiens qui travaillent dans les industries culturelles, en abordant le financement et le soutien du contenu canadien. Parallèlement, le rapport aborde la crainte ressentie par l’industrie face à la perspective de voir les activités des services de diffusion de musique en continu se poursuivre au Canada sans qu’ils contribuent aux objectifs ultimes de la politique culturelle du pays.

Les acteurs de l’industrie ont fait part de leurs préoccupations concernant la rentabilité, la découvrabilité et l’absence de conditions réglementaires équitables. En ce qui concerne la rentabilité, le rapport aborde les défis auxquels sont confrontés les médias traditionnels, mais ne se penche pas directement sur les enjeux soulevés par la CPMC et mis en évidence par les statistiques de MarketLine qui montrent la diminution des revenus des artistes lorsqu’ils distribuent leurs œuvres sur les services de diffusion en continu. Bien que le financement équitable soit abordé, le rapport ne propose aucun mandat pour un accès équitable à ces fonds. Si le financement fourni par les plateformes de diffusion de musique en continu est contrôlé de manière privée, ces fonds pourraient être spécifiquement alloués aux artistes qui relèvent d’entreprises qui ont des relations avec le service de diffusion en continu. Les détails concernant le financement seront laissés à la discrétion du CRTC, qui sera finalement chargé de créer un contexte de financement qui tient compte des relations complexes entre les plateformes et les maisons de disque. Comme il a été indiqué dans la revue de la littérature du présent document, Spotify détient une part considérable d’un marché très rentable. Afin de continuer à disposer d’un financement adéquat pour la production de contenu canadien, il est essentiel que les géants de la diffusion en continu contribuent aux fonds musicaux canadiens. Ce financement est particulièrement important dans un environnement où les artistes risquent de ne pas tirer les mêmes bénéfices des services de diffusion en continu que de la radio traditionnelle.

En ce qui concerne la découvrabilité, le rapport aborde la nécessité d’établir des exigences en matière de découvrabilité, et, fait important, souligne le rôle que les algorithmes jouent dans la sélection des pièces musicales sur les plateformes de diffusion en continu, comme l’indiquent les soumissions. Toutefois, le rapport ne relève pas les complexités de la découvrabilité liées aux algorithmes et aux éditeurs. Encore une fois, le CRTC sera responsable d’élaborer les exigences précises en matière de découvrabilité. La mention précise des algorithmes fournit un point de départ pour la découvrabilité, mais la participation humaine dans la sélection des listes de diffusion devra être notée lorsque les exigences seront définies. Pour être efficace, la découvrabilité doit également cibler précisément les listes de diffusion créées par Spotify. Les recherches ont montré l’importance considérable du positionnement sur les listes de diffusion pour la découvrabilité des artistes, et ce positionnement devrait être un élément central de la réglementation sur la découvrabilité.

Enfin, la question de savoir qui sera réglementé et comment est abordée à de nombreux égards dans le rapport. La compétence du CRTC est notée, avec une recommandation visant à préciser davantage cette position. Le rapport se penche sur le besoin d’uniformiser les règles du jeu au moyen d’une nouvelle politique, un autre sujet qui est traité dans les soumissions. Ce nouveau cadre politique décrit dans le rapport ne répond pas à la suggestion de la CPMC concernant les quotas, mais il tient compte de la surveillance et de la déclaration de la consommation de contenu canadien. Le nouveau cadre d’enregistrement est conforme à la suggestion de l’ACR selon laquelle la politique devrait être novatrice. Le rapport ne présente pas les détails généraux de la réglementation, mais l’engagement de créer une scène équitable pour la musique sur les ondes et en ligne est clair.

Les libellés et les détails restent vagues, mais la réglementation de Spotify et d’autres « entreprises de modération de média » devrait être incluse dans la législation sur les communications selon le groupe d’examen. Le groupe n’a pas ignoré les préoccupations des intervenants de l’industrie de la musique, même si ces préoccupations peuvent être perçues comme étant relativement faibles dans le cadre d’un total de presque 100 recommandations. Le rapport laisse les détails à l’organisme de réglementation, mais propose un cadre équitable qui tient compte des préoccupations précises de l’industrie. Bien que le rapport ne tienne pas compte de toutes les nouvelles technologies et tendances en matière d’habitudes d’écoute étudiées dans la recherche sur la diffusion de musique en continu, il constitue un point de départ pour la nouvelle législation.

Conclusion

La popularité croissante de la diffusion de musique en continu est évidente au Canada, où plus de 50 p. cent des Canadiens de 18 à 34 ans, et 25 p. cent de tous les Canadiens signalent avoir un abonnement à un service de diffusion de musique en continu (ISDE 2020; 120). À l’heure actuelle, ces services ne sont toujours pas réglementés par le CRTC, tandis que la radio traditionnelle et la radio satellite restent soumises aux exigences relatives au contenu canadien qui obligent la radiodiffusion de voix canadiennes, ainsi que des contributions financières pour ces artistes. Cependant, dans un système en évolution, les plateformes de diffusion principales exercent un contrôle sur la consommation de musique, et les plateformes de diffusion, comme Spotify, ont le pouvoir d’influer directement sur les décisions de consommation (Aguiar et Waldfoge, 2018). Par conséquent, les professionnels de l’industrie ont réclamé une politique qui exige que ces plateformes fassent la promotion d’artistes canadiens et soutiennent l’industrie nationale. Les recherches universitaires appuient cette demande, en montrant que Spotify et d’autres services de diffusion utilisent de nouvelles technologies qui ont modifié les habitudes de consommation de musique d’une façon qui rend la législation actuelle inefficace pour soutenir les industries de la musique canadienne actuelles. Cet appel a été répondu par le rapport d’examen de la politique de l’ISDE de 2020, L’avenir des communications au Canada : le temps d’agir, qui recommande une nouvelle politique axée sur l’enregistrement et visant à tenir les plateformes de diffusion de musique en continu responsables de leur engagement envers le contenu canadien. Toutefois, l’efficacité d’un nouveau cadre législatif pour la gestion de la réglementation des communications moderne dépendra en fin de compte du CRTC, qui décidera des détails de l’application d’une nouvelle loi sur la radiodiffusion ou d’une loi révisée.

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