Décision de télécom CRTC 2018-18

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Ottawa, le 17 janvier 2018

Dossier public : 8640-B2-201702200

Bell Canada – Demande de modification concernant la fourniture de divers services de gros

Le Conseil prescrit la fourniture de services de gros, qui sont des services que les entreprises de télécommunication se fournissent entre elles, conformément au cadre qu’il a établi dans la politique réglementaire de télécom 2015-326.

Bell Canada a présenté une demande afin que deux services de gros traditionnels, soit le service de partage de lignes et le service de liaisons de raccordement des lignes locales dégroupées (LLD), ne soient plus prescrits par le Conseil et qu’ils fassent l’objet d’une abstention de la réglementation. Bell Canada a également demandé au Conseil de geler les tarifs actuels du service de partage de lignes et de trois autres services de gros traditionnels.

Dans la présente décision, le Conseil conclut que le service de partage de lignes et le service de liaisons de raccordement des LLD de Bell Canada ne satisfont pas aux conditions de l’évaluation du caractère essentiel et qu’ils ne devraient donc plus être obligatoires. Plus précisément, le Conseil :

En ce qui concerne la demande de Bell Canada concernant le gel des tarifs de certains services de gros traditionnels, le Conseil :

Introduction

  1. Les services de télécommunication de gros (ci-après appelés « services de gros ») sont les services que les entreprises de télécommunication se fournissent entre elles et font partie intégrante du développement global du système canadien des communications. Bon nombre de services de gros sont fournis par les grandes entreprises de téléphonie titulaires et les entreprises de câblodistribution à leurs concurrents de moindre envergure sur ordre du Conseil.
  2. Dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil a établi le cadre actuel concernant la prescription des services de gros, lequel cadre requiert l’application d’une « évaluation du caractère essentiel » et d’une évaluation des considérations stratégiques pour déterminer si le Conseil devrait prescrire la fourniture d’un service de gros.
  3. La première étape pour l’application de l’évaluation du caractère essentiel est de définir les marchés pertinents pour le service de gros, ce qui comprend les composantes liées au produit et à la géographie. Ces marchés sont généralement délimités en fonction du plus petit groupe de services et de la zone géographique pour lesquels une entreprise peut imposer une hausse de tarifs importante et non transitoire sans perte de profits.
  4. Une fois que les marchés ont été définis (produit et géographie), le Conseil évalue le service de gros en question en fonction des trois conditions de l’évaluation du caractère essentiel, décrites ci-dessousNote de bas de page 1.
    • Condition relative à l’intrant : Le Conseil détermine si l’installationNote de bas de page 2 associée au service de gros en question est un intrant nécessaire pour permettre à une autre entreprise de fournir un service de détail en aval.
    • Condition relative à la concurrence : Le Conseil examine deux éléments : i) les conditions du marché en amont (plus particulièrement, il s’emploie à déterminer si une entrepriseNote de bas de page 3 ou un groupe d’entreprises possède un pouvoir de marché) et ii) l’incidence de tout pouvoir de marché en amont sur la concurrence dans le marché en aval connexe.
    • Condition relative à la reproductibilité : Le Conseil détermine s’il est pratique ou faisable pour les concurrents de reproduire la fonctionnalité d’une installation, par leurs propres moyens ou en recourant à ceux de tiers.
  5. En plus de ce qui précède, le Conseil applique des considérations stratégiques précises pour éclairer, soutenir ou, le cas échéant, infirmer une décision de prescrire la fourniture d’un service de gros. Ces considérations stratégiques sont les suivantes :
    • Bien public : Il faut prescrire le service pour des raisons de bien-être social, de bien-être des consommateurs, de sécurité publique ou de commodité pour le public.
    • Interconnexion : Le service favoriserait le déploiement efficace de réseaux et faciliterait les ententes sur l’interconnexion des réseaux.
    • Innovation et investissement : La prescription ou la non-prescription de l’installation ou du service de gros pourrait influer sur le niveau d’innovation et d’investissement dans les réseaux ou services évolués ou nouveaux pour les entreprises titulaires, les concurrents, ou les deux, ou sur le niveau d’adoption des services évolués ou nouveaux par les utilisateurs de services de télécommunication.
  6. Après avoir réalisé l’évaluation du caractère essentiel et des considérations stratégiques, le Conseil peut également établir les modalités aux termes desquelles un service de gros devrait être prescrit ou ne plus l’être, selon le résultat de l’évaluation.
  7. La décision de s’abstenir de réglementer un service est prise en vertu de l’article 34 de la Loi sur les télécommunications (Loi). En résumé, le Conseil peut s’abstenir de réglementer un service s’il est convaincu que son abstention serait compatible avec la mise en œuvre des objectifs de la politique canadienne de télécommunication, énoncés à l’article 7 de la Loi [paragraphe 34(1)]. Le Conseil doit s’abstenir de réglementer un service s’il est convaincu que le cadre de la fourniture du service en question est suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des usagers [paragraphe 34(2)]. Cependant, le Conseil ne doit pas s’abstenir de réglementer un service s’il conclut que cela aurait vraisemblablement pour effet de compromettre indûment la création ou le maintien d’un marché concurrentiel [paragraphe 34(3)].
  8. Par exemple, dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil a évalué le caractère essentiel de plusieurs services de gros, y compris des lignes locales dégroupées (LLD)Note de bas de page 4, lesquelles sont principalement utilisées pour soutenir la concurrence dans les services de téléphonie locale et d’accès Internet à basse vitesse de détail. Le Conseil a déterminé que les LLD ne satisfaisaient pas aux conditions de l’évaluation du caractère essentiel et qu’il n’existait pas de raison stratégique valable justifiant la nécessité de continuer à imposer la fourniture de ces installations.
  9. Le Conseil a donc décidé que les LLD ne seraient plus obligatoires, sous réserve de l’application d’une période d’élimination progressive de trois ans. Durant cette période, les LLD ont été offertes dans les circonscriptions où il existait une demande pour ce service, selon les tarifs approuvés par le Conseil. Dans les circonscriptions où il n’y avait pas de demande, aucune période d’élimination progressive n’a été nécessaire; les LLD ont immédiatement fait l’objet d’une abstention de la réglementation.

L’instance

  1. Le Conseil a reçu une demande de Bell Canada, datée du 17 mars 2017, dans laquelle l’entreprise lui demandait d’élargir certaines des conclusions qu’il avait tirées dans la politique réglementaire de télécom 2015-326. Plus particulièrement, Bell Canada a demandé ce qui suit au Conseil :
    • de déclarer son service de partage de lignesNote de bas de page 5 de gros non essentiel (c’est-à-dire qu’il le rende non obligatoire) et de s’abstenir de réglementer le service (immédiatement là où il n’y a pas de demande et suivant une période d’élimination progressive là où une demande existe);
    • de déclarer son service de liaisons de raccordement des LLDNote de bas de page 6 de gros non essentiel (c’est-à-dire qu’il le rende non obligatoire) et de s’abstenir de réglementer le service (immédiatement là où il n’y a pas de demande et suivant une période d’élimination progressive là où une demande existe);
    • de geler les tarifs de quatre des services de gros traditionnels de l’entreprise : i) le service de partage de lignes; ii) le service traditionnel d’accès par passerelleNote de bas de page 7 et des boucles sèchesNote de bas de page 8 fournies à l’appui du service d’accès haute vitesse (AHV)Note de bas de page 9; iii) les liaisons de raccordement DS-1 et iv) les liaisons du centralNote de bas de page 10 au réseau numérique propre aux concurrents (RNC)Note de bas de page 11 DS-1.
  2. Les parties suivantes ont participé à l’instance : le Centre pour la défense de l’intérêt public (CDIP), le Consortium des Opérateurs de Réseaux Canadiens Inc. (CORC), TekSavvy Solutions Inc. (TekSavvy) et TELUS Communications Inc. (TCI)Note de bas de page 12.
  3. Les conclusions du Conseil dans la présente instance tiennent compte des objectifs de la politique énoncés à l’article 7 de la Loi, ainsi que des InstructionsNote de bas de page 13.

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait se prononcer sur les questions suivantes dans la présente décision :
    • Le service de partage de lignes de Bell Canada devrait-il demeurer prescrit par le Conseil?Note de bas de page 14
    • Le service de partage de lignes de Bell Canada devrait-il faire l’objet d’une abstention de la réglementation?
    • Le service de liaisons de raccordement des LLD de Bell Canada devrait-il demeurer prescrit par le Conseil?Note de bas de page 15
    • Le service de liaisons de raccordement des LLD de Bell Canada devrait-il faire l’objet d’une abstention de la réglementation?
    • Le Conseil devrait-il geler les tarifs du service de partage de lignes, du service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV, du service de liaisons de raccordement DS-1 et du service de liaisons du central au RNC DS-1?Note de bas de page 16

Le service de partage de lignes de Bell Canada devrait-il demeurer prescrit par le Conseil?

Positions des parties

Description du service
  1. Pour décrire le service de partage de lignes, Bell Canada a fait référence à la décision de télécom 2016-306, dans laquelle le Conseil a noté que le service de partage de lignes permet à un concurrent de fournir des services AHV à ses utilisateurs finals alors que l’entreprise de services locaux titulaire (ESLT) fournit des services vocaux au moyen des mêmes LLD. Bell Canada a fait remarquer que les services vocaux peuvent également être fournis par une entreprise de services locaux concurrente. Bell Canada a indiqué que le service de partage de lignes constitue en fait une LLD partielle, n’offrant pas la fonctionnalité vocale locale qu’offre une LLD à part entière (c’est-à-dire que le service est limité à la fonctionnalité AHV uniquement).
  2. Pour appuyer la proposition de Bell Canada, TCI a fait valoir que le service de partage de lignes offre une fonctionnalité semblable à celle d’une LLD, ce qui en fait un type de service de LLD et, par conséquent, un équivalent sur le plan fonctionnel.
Définition de marché de produits
  1. Bell Canada a signalé que le marché de produits en aval pertinent pour le service de partage de lignes est au moins aussi vaste que le marché des services d’accès Internet filaires de détail. L’entreprise a également indiqué que toute tentative de hausser le prix du service AHV fourni par l’intermédiaire du service de partage de lignes sera renversée par la migration des clients vers d’autres services filaires (soit vers des services semblables à basse vitesse, soit vers des services à haute vitesse). De plus, l’entreprise a reconnu que le marché de produits en amont pour le service de partage de lignes sera plus petit que celui des services de LLD et de liaisons de raccordement des LLD, puisque le service de partage de lignes n’offre qu’une voie de transmission de données à basse vitesse.
  2. TCI a indiqué que le marché de produits pour le service de partage de lignes est un sous-ensemble du marché de produits pour le service des LLD du fait que le service de partage de lignes est un type de service de LLD, et que le service de partage de lignes fait partie du marché de produits en aval pour le service de LLD, défini par le Conseil dans la politique réglementaire de télécom 2015-326 comme « le marché local des services téléphoniques filaires (marché des services de résidence ou d’affaires) »Note de bas de page 17.
  3. Le CDIP a indiqué que la définition avancée par Bell Canada, selon laquelle le marché de produits en aval est aussi vaste que le marché des services d’accès Internet filaires de détail, était trop large. Le CDIP a fait valoir que le marché de produits en aval doit être axé sur la fourniture d’un service d’accès Internet filaire traditionnel à faible coût.
Définition de marché géographique
  1. Bell Canada a indiqué que le marché géographique pour le service de partage de lignes devrait tenir compte de l’endroit où les services sont achetés et utilisés. Étant donné que le service de partage de lignes est fourni par fil de cuivre et est acheté selon un principe de central à central par l’intermédiaire d’espaces de co-implantationNote de bas de page 18, la circonscription devrait être considérée comme le marché géographique; cela est conforme au cadre analytique utilisé par le Conseil à l’égard des LLD. Bell Canada a noté que le Conseil avait déjà appliqué son analyse à un niveau plus général (c’est-à-dire aux tranches de tarification).
  2. TCI a fait valoir que le marché géographique pour le service de partage de lignes est le même que pour le service de LLD, soit la circonscription de l’ESLT.
  3. Le CDIP a indiqué que le marché géographique pour le service de partage de lignes pourrait se limiter aux ménages qui s’abonnent au service téléphonique filaire d’une ESLT. Même s’il n’était pas contre l’idée de définir le marché géographique par circonscription, le CDIP a précisé que l’analyse de Bell Canada de l’évaluation du caractère essentiel à partir de données liées à l’ensemble des marchés de services d’accès Internet de détail et de gros était inappropriée. À cet égard, le CDIP a indiqué qu’une analyse circonscription par circonscription pourrait révéler une demande variée pour le service de partage de lignes, plus particulièrement dans certaines tranches de tarification ou collectivités rurales.
Condition relative à l’intrant
  1. Bell Canada a fait valoir que le service de partage de lignes ne satisfait pas à la condition relative à l’intrant de l’évaluation du caractère essentiel, puisqu’il ne constitue pas un intrant important pour le marché des services d’accès Internet de détail en aval. Plus particulièrement, l’entreprise a signalé ce qui suit :
    • le service de partage de lignes ne constitue pas un moteur important du marché des services d’accès Internet de détail; il ne représente qu’un très faible pourcentage du marché des services d’accès Internet de gros et un pourcentage encore plus faible de l’ensemble du marché des services d’accès Internet de détail;
    • il existe plusieurs équivalents fonctionnels au service de partage de lignes pour la fourniture des services d’accès Internet : auto-approvisionnement, services sans fil, LLD et autres services d’accès de gros;
    • le service de partage de lignes devient désuet; la demande pour ce service a diminué considérablement de 2013 à 2016, tandis que la demande relative aux services utilisés pour fournir les services d’accès Internet de détail et pour l’auto-approvisionnement a augmenté durant la même période.
  2. TCI a indiqué que, même si elle ne remet pas en question que le service de partage de lignes constitue un intrant pour les services en aval, l’absence de demande pour le service de partage de lignes est la raison pour laquelle il ne satisfait pas à la condition relative à l’intrant de l’évaluation du caractère essentiel.
Condition relative à la concurrence
  1. Bell Canada a fait valoir que le service de partage de lignes ne satisfait pas non plus à la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel, soutenant que la concurrence est forte sur le marché des services d’accès Internet de détail aujourd’hui et que l’absence d’un service de partage de lignes obligatoire n’aurait aucune incidence sur la concurrence au sein du marché. Pour appuyer sa position, Bell Canada a précisé que même si le service de partage de lignes a enregistré une baisse importante de 2013 à 2016, le marché des services d’accès Internet de détail a, quant à lui, continué à prospérer.
  2. TCI a indiqué que le retrait de l’accès obligatoire au service de partage de lignes n’aura aucune incidence sur la concurrence globale au sein du marché de détail étant donné l’existence de services de remplacement et la demande déjà en baisse pour le service.
  3. Le CDIP a précisé qu’il y a peu de concurrence sur le marché des services filaires de gros et que les ESLT sont en mesure d’exercer un pouvoir de marché en amont.
Condition relative à la reproductibilité
  1. Bell Canada et TCI ont fait valoir que le service de partage de lignes ne satisfait pas non plus à la condition relative à la reproductibilité de l’évaluation du caractère essentiel, soutenant que le service peut être reproduit en fonction de la croissance d’autres services comme le service AHV de gros.
  2. Le CDIP a signalé que puisque le service de partage de lignes repose sur un service traditionnel des ESLT, il est peu probable qu’il puisse être reproduit par les concurrents.
Considérations stratégiques
  1. De façon générale, Bell Canada et TCI ont indiqué que le service de partage de lignes ne contribue pas à l’innovation ou à l’investissement puisqu’il s’agit d’une technologie traditionnelle rendue désuète par l’existence de plusieurs solutions de rechange. Bell Canada a précisé qu’il serait contre-productif de continuer à prescrire la fourniture de services de gros traditionnels pour lesquels la demande est faible et qui ne peuvent pas être utilisés pour offrir un niveau de service conforme à l’objectif du service universel du Conseil, soit au moins 50 mégabits par seconde pour les téléchargements.
  2. Le CDIP a fait valoir que les politiques concernant les services filaires de gros devraient faciliter l’accès des concurrents aux réseaux, afin que les consommateurs aient un choix accru pour sélectionner le fournisseur de services qui répond le mieux à leurs besoins. Le CDIP s’est dit préoccupé quant au maintien de la disponibilité de services d’accès Internet de gros traditionnels à faible coût, plus particulièrement dans les régions rurales ou éloignées. Il a donc suggéré que le service de partage de lignes puisse être prescrit à titre de service de bien public.

Résultats de l’analyse du Conseil

Description du service
  1. Le Conseil estime que le service de partage de lignes et le service de liaisons de raccordement des LLD sont étroitement liés aux LLD. Le Conseil est d’accord avec la qualification du service de partage de lignes à titre de LLD partielle du fait que le service de partage de lignes n’offre pas la fonctionnalité vocale locale qu’offre une LLD à part entière.
Définition de marché de produits
  1. Dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil estimait que le principal marché de détail en aval pertinent pour les LLD était le marché local des services téléphoniques filaires, y compris les marchés des services de résidence et d’affaires. Bien que le marché potentiel soit le même (puisque les LLD et le service de partage de lignes ont la même zone de couverture), le marché en aval pour le service de partage de lignes est le marché des services d’accès Internet de détail.
  2. En ce qui concerne le marché en amont pertinent, le Conseil a précédemment conclu que les LLD constituaient leur propre marché de produits distinct. Le Conseil estime que la même approche s’applique au service de partage de lignes, c’est-à-dire qu’il constitue son propre marché de produits distinct.
Définition de marché géographique
  1. Le Conseil note que, dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, il a réalisé une évaluation du caractère essentiel des LLD en se fondant sur des données regroupées selon les tranches tarifairesNote de bas de page 19 afin de trouver un équilibre entre l’utilisation de définitions utiles et pratiques pour les marchés de produits et les marchés géographiques, ainsi que le fardeau administratif associé à la collecte et au traitement de grandes quantités de données.
  2. Le Conseil estime que, comme pour les LLD, la circonscription locale est le marché géographique approprié pour le service de partage de lignes; toutefois, le regroupement par tranche tarifaire serait approprié aux fins de l’application de l’évaluation du caractère essentiel.
Application de l’évaluation du caractère essentiel – Condition relative à l’intrant
  1. La demande pour le service de partage de lignes de Bell Canada est faible et a été en baisse de 2013 à 2016. En outre, le nombre d’abonnés au service de partage de lignes en 2016 représentait un très faible pourcentage du nombre d’abonnés à l’ensemble des services d’accès Internet filaires de gros (c’est-à-dire le service de partage de lignes, le service d’accès par passerelle et le service AHV) fournis par Bell Canada. De plus, des solutions de remplacement sur le plan fonctionnel au service de partage de lignes sont accessibles (p. ex. le service AHV de gros).
  2. Compte tenu de la demande de plus en plus faible pour le service de partage de lignes de Bell Canada, ainsi que de l’existence d’autres services de gros de remplacement, le Conseil conclut que la condition relative à l’intrant de l’évaluation du caractère essentiel n’a pas été satisfaite.
Application de l’évaluation du caractère essentiel – Condition relative à la concurrence
  1. Puisque le service de partage de lignes nécessite qu’un concurrent ait recours aux LLD pour fournir un accès Internet haute vitesse à ses utilisateurs finals, et compte tenu de ses conclusions relatives aux LLD dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil estime que les ESLT possèdent un pouvoir de marché en amont relativement à la fourniture du service de partage de lignes.
  2. Toutefois, étant donné la demande de plus en plus faible pour le service de partage de lignes de Bell Canada et le fait que son service de partage de lignes ne représente qu’un très faible pourcentage des abonnés aux services d’accès Internet filaires dans l’ensemble des circonscriptions de Bell Canada en raison de l’existence de solutions de remplacement sur le plan fonctionnel, le Conseil estime que ne plus imposer le service de partage de lignes n’aurait pas de répercussions importantes sur la concurrence dans le marché des services d’accès Internet filaires de détail.
  3. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que le service de partage de lignes ne satisfait pas à la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel.
Application de l’évaluation du caractère essentiel – Condition relative à la reproductibilité
  1. En l’absence de la fourniture d’un service de partage de lignes par les ESLT, les concurrents devraient construire leurs propres réseaux filaires à grande échelle afin de pouvoir fournir un service Internet reproduisant la fonctionnalité du service de partage de lignes. Le Conseil estime qu’un concurrent raisonnablement efficace ne pourrait pas reproduire convenablement la fonctionnalité du service de partage de lignes à une échelle suffisante. Par conséquent, il conclut que le service satisfait à la condition relative à la reproductibilité.
Considérations stratégiques
  1. Le Conseil est d’avis que le service de partage de lignes ne satisfait pas à la condition concernant la considération stratégique relative au bien public puisqu’il n’est pas nécessaire de prescrire le service pour des raisons de bien-être social, de bien-être des consommateurs, de sécurité publique ou de commodité pour le public. En outre, le service de partage de lignes ne satisfait pas à la condition concernant la considération stratégique relative à l’interconnexion puisqu’il s’agit d’un service d’accès et non d’un service d’interconnexion.
  2. Toutefois, comme pour les LLD, les considérations stratégiques relatives à l’innovation et à l’investissement sont pertinentes pour déterminer s’il convient ou non de prescrire le service de partage de lignes. Dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil a déterminé que la décision de ne plus imposer la fourniture de LLD pourrait favoriser l’adoption par les consommateurs de services évolués ou nouveaux. Le Conseil a déterminé que les répercussions positives sur l’investissement et l’innovation appuyaient sa décision de ne plus prescrire l’accès aux LLD. Le Conseil estime que le même raisonnement s’applique au service de partage de lignes –il ne stimule pas l’innovation ou l’investissement dans les réseaux ou les nouvelles technologies et, de ce fait, il ne satisfait pas à cet objectif stratégique.
  3. Compte tenu de ce qui précède, l’examen des considérations stratégiques appuie les conclusions liées à l’application de l’évaluation du caractère essentiel.
Conclusions
  1. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut qu’il serait approprié de ne plus prescrire la fourniture du service de partage de lignes de Bell Canada dans l’ensemble des circonscriptions des territoires de desserte de Bell Canada.
  2. Généralement, un service qui n’est plus prescrit fait l’objet d’une période d’élimination progressive afin de laisser aux concurrents le temps de prendre d’autres dispositions. Compte tenu de la demande relative pour le service, et afin de donner aux abonnés au service le temps d’examiner les possibilités qui s’offrent à eux, le Conseil impose une période d’élimination progressive de deux ans dans les circonscriptions où il existe une demande, et ce, à compter de la date de la présente décision. Dans les circonscriptions où il n’y a pas de demande pour le service de partage de lignes, aucune période d’élimination progressive n’est requise.

Le service de partage de lignes de Bell Canada devrait-il faire l’objet d’une abstention de la réglementation?

Positions des parties

  1. Bell Canada estimait que le service de partage de lignes n’est pas essentiel, et donc que le service devrait fait l’objet d’une abstention de la réglementation immédiatement lorsqu’il n’y a pas de demande actuelle à cet égard. Bell Canada a fait valoir que lorsqu’il y a de la demande pour le partage de lignes, ce service devrait faire l’objet d’une abstention de la réglementation après une période d’élimination progressive d’un an suivant l’annonce de la décision du Conseil.
  2. Bell Canada a précisé que bien qu’elle tente d’offrir un service de partage de lignes faisant l’objet d’une abstention de la réglementation aux abonnés existants, ces derniers auraient la possibilité de passer à d’autres services AHV de gros. Bell Canada a signalé que le service AHV groupé (comme le service d’accès par passerelle) continuerait à être offert sur l’ensemble de ses territoires de desserte.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil a rendu ses décisions d’abstention de la réglementation concernant les LLD, faisant remarquer qu’à défaut de demande actuelle en matière de LLD, l’abstention ne devrait vraisemblablement pas nuire indûment à l’établissement ni au maintien d’un marché concurrentiel.
  2. Le Conseil détermine que ses conclusions relatives à l’abstention de la réglementation concernant les LLD dans les circonscriptions où il n’y a pas de demande actuelle s’appliquent également au partage de lignesNote de bas de page 20. Par conséquent, en vertu du paragraphe 34(4) de la Loi, le Conseil déclare qu’à compter de la date de la présente décision, les articles 25, 29 et 31 ainsi que les paragraphes 27(1), 27(5) et 27(6) de la Loi ne s’appliqueront pas aux circonscriptions où il n’y a pas de demande en matière de partage de lignes. Toutefois, les paragraphes 27(2) et 27(4) de la Loi continueront de s’appliquer pour traiter les questions de discrimination injuste ou de préférence indue. L’article 24 de la Loi continuera également de s’appliquer afin de permettre au Conseil d’imposer des conditions relatives à l’abstention de la réglementation, au besoinNote de bas de page 21.
  3. Dans les circonscriptions où il y a de la demande en matière de partage de lignes, l’abstention de la réglementation à la suite de la période d’élimination progressive est rejetée. Si Bell Canada envisage de continuer à rendre disponible le partage de lignes dans les circonscriptions visées après la période d’élimination progressive, Bell Canada peut choisir de présenter une demande d’abstention, y compris une évaluation appropriée que le Conseil pourrait utiliser pour évaluer la demande d’abstention.
  4. Si, toutefois, l’objectif de Bell Canada est de mettre fin à la disponibilité du partage de lignes, elle devra alors fournir un avis écrit à ses clients et au Conseil, et ce, un an avant la fin de la période d’élimination progressive. Cet avis doit comprendre les renseignements sur les circonscriptions spécifiques qui seront touchées, la date à laquelle le partage de lignes ne sera plus disponible dans ces circonscriptions, et toute autre entente éventuelle dont Bell Canada peut avoir convenu avec les clients des services de gros.

Le service de liaisons de raccordement des LLD de Bell Canada devrait-il demeurer prescrit pas le Conseil?

Positions des parties

Description du service
  1. Bell Canada et TCI ont fait valoir de façon générale que leurs concurrents utilisent seulement les liaisons de raccordement des LLD conjointement avec les LLD ou le service de partage de lignes afin de lier les deux services, mais que celles-ci ne fonctionnent pas de manière indépendante.
Définition de marché de produits
  1. Bell Canada et TCI ont toutes deux indiqué que puisque les liaisons de raccordement des LLD fonctionnent uniquement avec les LLD, le marché de produits pertinent est le même marché utilisé par le Conseil dans la politique réglementaire de télécom 2015-326 pour évaluer le caractère essentiel des LLD, c’est-à-dire le marché local des services téléphoniques filaires, y compris les marchés des services de résidence et d’affaires.
Définition de marché géographique
  1. Bell Canada et TCI ont précisé que, puisque les liaisons de raccordement des LLD peuvent seulement être demandées et utilisées en présence de LLD, leur marché géographique doit être considéré comme le même. Par conséquent, le marché géographique des liaisons de raccordement des LLD est la circonscription.
Condition relative à l’intrant
  1. Bell Canada a indiqué que même si les LLD et les liaisons de raccordement des LLD peuvent demeurer des intrants dans certaines régions (malgré la demande en baisse), il y a peu de demande, voire aucune, dans d’autres régions. L’entreprise a fait valoir qu’en raison de leur étroite association avec les LLD, les liaisons de raccordement des LLD sont assujetties aux mêmes dynamiques de marché que les LLD. L’entreprise a indiqué que les liaisons de raccordement des LLD ne sont pas des intrants essentiels et que le maintien de leur fourniture n’est pas nécessaire en vue de soutenir la concurrence dans la vente au détail dans tout marché local des services téléphoniques filaires.
  2. Bell Canada a également indiqué que les liaisons de raccordement des LLD ne sont pas nécessaires pour permettre aux concurrents de fournir un service de détail des services filaires en aval, compte tenu des nombreuses autres installations (p. ex. fibre, câble, sans fil) disponibles.
  3. En ce qui concerne la baisse en pourcentage dans les LLD de 2013 à 2016, Bell Canada a précisé que les liaisons de raccordement des LLD ont représenté au moins le quart de la baisse en pourcentage de LLD pendant la même période, mais qu’il n’y a eu aucune incidence sur le marché des services filaires.
  4. TCI a indiqué que l’absence de demande actuelle et prévue pour les liaisons de raccordement des LLD l’empêche de satisfaire à la condition relative à l’intrant de l’évaluation du caractère essentiel.
Condition relative à la concurrence
  1. Bell Canada a indiqué que les liaisons de raccordement des LLD sont assujetties aux mêmes fonctionnalités et dynamiques de marché que les LLD, et que le marché des services filaires est concurrentiel et qu’il ne serait pas touché par le retrait de l’obligation. Bell Canada a précisé que dans presque toutes les régions géographiques, les clients résidentiels et les petites et moyennes entreprises peuvent choisir parmi plusieurs fournisseurs de services vocaux. De plus, Bell Canada a fait valoir que les grandes entreprises peuvent obtenir des services vocaux et de données auprès d’un nombre croissant de fournisseurs dotés d’installations.
  2. TCI a indiqué que comme la demande pour les liaisons de raccordement des LLD était faible et en baisse, le retrait des liaisons de raccordement des LLD obligatoires n’aurait pas d’incidence sur la concurrence globale du marché.
Condition relative à la reproductibilité
  1. Dans sa demande, Bell Canada n’a pas précisé si les liaisons de raccordement des LLD respectent la condition relative à la reproductibilité de l’évaluation du caractère essentiel.
  2. TCI a signalé que les abonnements au service AHV de gros ont augmenté de manière constante depuis 2013, tandis que les abonnements aux liaisons de raccordement des LLD ont diminué pendant la même période. Selon l’entreprise, la diminution de la popularité des liaisons de raccordement des LLD démontre la reproductibilité des fonctionnalités fournies par celles-ci à une échelle suffisante.
Considérations stratégiques
  1. Bell Canada et TCI ont indiqué que les liaisons de raccordement des LLD sont une ancienne technologie et que, fondamentalement, les services traditionnels ne stimulent pas l’innovation ou l’investissement continu, plus particulièrement lorsque plusieurs nouvelles solutions de rechange sont offertes. Par conséquent, elles ont soutenu que le fait de rendre les liaisons de raccordement des LLD non obligatoires serait cohérent avec l’objectif stratégique en matière d’innovation et d’investissement.

Résultats de l’analyse du Conseil

Description du service
  1. Les liaisons de raccordement des LLD relient les installations de l’ESLT et les installations d’un concurrent au sein d’un central afin de permettre la fourniture du service de LLD ou de partage de lignes, et elles ne fonctionnent pas de manière indépendante.
Définition de marché de produits
  1. Dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil estimait que les LLD constituent un marché de produits en amont distinct. Comme il n’existe aucune solution de rechange aux liaisons de raccordement des LLD, celles-ci constituent également un marché de produits en amont disctinct.
  2. Le principal marché de détail en aval pertinent des liaisons de raccordement des LLD est le même que celui des LLD, soit le marché local des services téléphoniques filaires (marchés des services de résidence et d’affaires). Lorsqu’elles sont utilisées conjointement avec le service de partage de lignes, le marché en aval pertinent serait celui des services d’accès Internet de détail.
Définition de marché géographique
  1. Étant donné que les liaisons de raccordement des LLD ne sont utilisées que lorsque les LLD sont présentes, le Conseil estime que la définition appropriée du marché géographique des liaisons de raccordement des LLD correspond à la circonscription de l’ESLT visée, mais qu’il serait toutefois approprié d’utiliser des tranches tarifaires pour appliquer l’évaluation du caractère essentiel.
Application de l’évaluation du caractère essentiel – Condition relative à l’intrant
  1. Le Conseil estime qu’en raison de l’étroite association avec les LLD, les liaisons de raccordement des LLD sont assujetties aux mêmes dynamiques de marché que les LLD, lesquelles étaient auparavant considérées comme des intrants non essentiels de la fourniture de services en aval.
  2. Compte tenu de la demande en baisse relative aux liaisons de raccordement des LLD de Bell Canada de 2013 à 2016 et du fait que les services filaires offerts grâce aux LLD peuvent être fournis par d’autres moyens que les liaisons de raccordement des LLD, le Conseil conclut que les liaisons de raccordement des LLD ne satisfont pas à la condition relative à l’intrant de l’évaluation du caractère essentiel.
Application de l’évaluation du caractère essentiel – Condition relative à la concurrence           
  1. Dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil estimait que les ESLT possèdent un pouvoir de marché en amont pour ce qui est de la fourniture des LLDNote de bas de page 22. Compte tenu de leur association avec les LLD, le Conseil estime que les ESLT possèdent également un pouvoir de marché en amont pour ce qui est de la fourniture des liaisons de raccordement des LLD.
  2. Dans son examen de la question visant à établir si la suppression de l’accès obligatoire aux liaisons de raccordement des LLD aurait vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence, le Conseil doit tenir compte de l’incidence des marchés des services téléphoniques filaires locaux et des services d’accès Internet.
  3. Dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil estimait que les LLD ne satisfont pas à la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel étant donné que la suppression de l’accès obligatoire aux LLD ne devrait vraisemblablement pas empêcher ou diminuer grandement la concurrence dans les marchés de détail des services téléphoniques filaires locaux de résidence et d’affaires peu importe la circonscription ou le territoire de desserte des ESLT viséesNote de bas de page 23. De plus, pour ce qui est du marché des services d’accès Internet, le Conseil a déjà évalué la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel en lien avec le service de partage de lignes.
  4. Étant donné que les liaisons de raccordement des LLD fonctionnent uniquement avec les LLD, et compte tenu de la demande en baisse pour les LLD et les liaisons de raccordement des LLD et de la disponibilité des solutions de remplacement fonctionnelles aux LLD, le Conseil conclut que les liaisons de raccordement des LLD ne satisfont pas à la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel.
Application de l’évaluation du caractère essentiel – Condition relative à la reproductibilité
  1. Dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil estimait que les LLD satisfont à la condition relative à la reproductibilité de l’évaluation du caractère essentiel, dans la mesure où il n’est pas pratique ou réalisable pour les concurrents de reproduire les fonctionnalités des LLD.
  2. En l’absence de liaisons de raccordement des LLD, les concurrents ne peuvent pas utiliser les LLD d’une ESLT au central de l’ESLT. Un concurrent ne pourrait donc pas reproduire les fonctionnalités liées aux LLD. Par conséquent, le Conseil conclut que les liaisons de raccordement des LLD satisfont à la condition relative à la reproductibilité de l’évaluation du caractère essentiel.
Considérations stratégiques
  1. Selon le Conseil, depuis que les liaisons de raccordement des LLD sont fournies par les ESLT seulement conjointement avec les LLD et le service de partage de lignes, la suppression de l’accès obligatoire aux liaisons de raccordement des LLD pourrait (comme dans le cas des LLD) favoriser l’adoption par les concurrents de services évolués ou nouveaux (p. ex. service AHV). Par conséquent, le Conseil conclut que les liaisons de raccordement des LLD n’ont pas besoin d’être prescrites pour appuyer la considération stratégique en matière d’innovation et d’investissement.
  2. Compte tenu de ce qui précède, l’examen des considérations stratégiques appuie les conclusions liées à l’application de l’évaluation du caractère essentiel.
Conclusions
  1. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut qu’il serait approprié de cesser de prescrire la fourniture de liaisons de raccordement des LLD de Bell Canada dans toutes les circonscriptions des territoires de desserte de Bell Aliant Communications régionales, société en commandite (maintenant Bell Aliant, une division de Bell Canada [Bell Aliant]), Bell Canada et Télébec, Société en commandite (Télébec).
  2. Étant donné que les liaisons de raccordement des LLD sont utilisées pour les LLD et le service de partage de lignes, et en vue d’accorder suffisamment de temps aux concurrents pour prendre d’autres dispositions, le Conseil met en œuvre une période d’élimination progressive de deux ans à compter de la date de la présente décision dans les circonscriptions où il y a une demande pour le service de liaisons de raccordement des LLD de Bell Canada. Dans les circonscriptions où il n’y a aucune demande actuelle pour les liaisons de raccordement des LLD, aucune période d’élimination progressive n’est requise.

Le service de liaisons de raccordement des LLD de Bell Canada devrait-il faire l’objet d’une abstention de la réglementation?

Positions des parties

  1. Bell Canada estime que les liaisons de raccordement des LLD devraient faire l’objet d’une abstention de la réglementation immédiatement lorsqu’il n’y a aucune demande. Lorsqu’il y a de la demande pour le service, l’abstention ou la suppression devrait être permise le 22 juin 2018 afin que la date coïncide avec la fin de la période d’élimination progressive de trois ans des LLD, comme il est établi dans la politique réglementaire de télécom 2015-326.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Compte tenu de l’utilisation et de l’association des liaisons de raccordement des LLD, le Conseil détermine que ses conclusions concernant l’abstention de la réglementation des LLD dans les circonscriptions où il n’y a aucune demande actuelle peuvent être appliquées aux liaisons de raccordement des LLD. Autrement dit, l’abstention peut être accordée immédiatement dans les circonscriptions où il n’y a pas de demande pour les liaisons de raccordement des LLD, en vertu du paragraphe 34(1) de la Loi.
  2. Par conséquent, en vertu du paragraphe 34(4) de la Loi, le Conseil déclare qu’à compter de la date de la présente décision, les articles 25, 29 et 31 ainsi que les paragraphes 27(1), 27(5) et 27(6) de la Loi ne s’appliqueront pas aux circonscriptions où il n’y a pas de demande pour les liaisons de raccordement des LLD. Toutefois, les paragraphes 27(2) et 27(4) de la Loi continuent de s’appliquer pour traiter les questions de discrimination injuste ou de préférence indue. L’article 24 de la Loi continue également de s’appliquer afin de permettre au Conseil d’imposer des conditions relatives à l’abstention de la réglementation, au besoin.
  3. Dans les zones où il y a de la demande, le Conseil a déterminé précédemment que les LLD doivent toujours être offertes, selon les tarifs approuvés par le Conseil, pendant au moins la période d’élimination progressive. Le Conseil estime que la même approche serait appropriée pour les liaisons de raccordement des LLD.
  4. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que les liaisons de raccordement des LLD font immédiatement l’objet d’une abstention de la réglementation dans les circonscriptions où il n’y a aucune demande actuelle, dans les territoires de desserte de Bell Aliant, Bell Canada et Télébec.
  5. Toutefois, dans les circonscriptions où il y a de la demande pour les liaisons de raccordement des LLD, l’abstention de la réglementation à la suite de la période d’élimination progressive est rejetée. Si Bell Canada envisage de continuer à rendre disponibles les liaisons de raccordement des LLD dans les circonscriptions visées après la période d’élimination progressive, Bell Canada peut choisir de présenter une demande d’abstention concernant la fourniture de liaisons de raccordement des LLD.
  6. Si, toutefois, l’objectif de Bell Canada est de mettre fin à la disponibilité des liaisons de raccordement des LLD, l’entreprise devra alors fournir un avis écrit à ses clients existants et au Conseil, et ce, un an avant la fin de la période d’élimination progressive. Cet avis doit comprendre les renseignements sur les circonscriptions spécifiques, la date à laquelle les liaisons de raccordement des LLD ne seront plus disponibles dans ces circonscriptions, et toute autre entente éventuelle dont Bell Canada peut avoir convenu avec les clients des services de gros.

Le Conseil devrait-il geler les tarifs du service de partage de lignes, du service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV, du service de liaisons de raccordement DS-1 et du service de liaisons du central au RNC DS-1?

Positions des parties

  1. Bell Canada a demandé un gel des tarifs pour quatre services de gros traditionnels (service de partage de lignes, service traditionnel d’accès par passerelle t et boucles sèches fournies à l’appui du service AHV, service de liaisons de raccordement DS-1 et service de liaisons du central au RNC DS-1), lesquels sont semblables aux autres services traditionnels dont les taux ont été gelés par le Conseil dans la politique réglementaire de télécom 2015-326. L’entreprise a indiqué que la demande pour ces services a diminué considérablement entre 2013 et 2016.
  2. Bell Canada a précisé que cette diminution ainsi que le manque d’investissement continu dans ces services exigeaient une réduction de son fardeau réglementaire (c’est-à-dire la mise en œuvre des taux I-XNote de bas de page 24, ce qui demande du personnel et des ressources en matière de TINote de bas de page 25). Bell Canada a fait valoir que les taux actuellement facturés pour ces services traditionnels ont déjà été considérés comme justes et raisonnables par le Conseil.
  3. TCI était en faveur de la demande de gel de tarifs de Bell Canada pour ces services, indiquant que la demande pour ces services traditionnels est en baisse et que ceux-ci sont équivalents sur le plan fonctionnel aux services dont les taux ont été gelés dans le cadre de la politique réglementaire de télécom 2015-326.
  4. Le CORC et TekSavvy se sont opposés à la demande de Bell Canada visant à ce que le Conseil gèle les tarifs pour le service traditionnel d’accès par passerelle et de boucles sèches fournies à l’appui du service AHV pour les raisons suivantes :
    • Les boucles sèches sont un intrant de gros clé pour les services comme l’accès Internet, plus particulièrement dans les circonscriptions où les services haute vitesse par câble (y compris l’accès Internet de tiers) et les services de fibre jusqu’au nœud (FTTN) ne sont pas offerts.
    • Le gel des tarifs pour les services traditionnels d’accès par passerelle et de boucles sèches ne permettrait pas de réduire le fardeau réglementaire. Les tarifs du service d’accès par passerelle de type FTTN et des boucles sèches sont fondés sur les tarifs du service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV. Si on donnait suite à la proposition de Bell Canada, il serait nécessaire de maintenir les coûts des boucles sèches.
    • Les coûts des boucles sèches sont établis en fonction de plusieurs hypothèses et de substituts, dont certains doivent être réexaminés.
  1. Selon TekSavvy, même si le Conseil devait cesser d’exiger de nouvelles études de coûts concernant les boucles sèches, on n’en viendrait pas à geler les tarifs des boucles sèches traditionnelles. TekSavvy a indiqué qu’une demande plus complète pourrait être appropriée, visant par exemple à déterminer si les tarifs des boucles sèches sont justes et raisonnables, sans toucher aux nouvelles études de coûts et portant uniquement sur les hypothèses et les substituts sur lesquels les coûts actuels des boucles sèches sont fondés.
  2. Bell Canada a répliqué que le gel des tarifs du service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV de l’entreprise entraînerait un gel semblable des tarifs du service d’accès par passerelle de type FTTN et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV. Toutefois, comme les études de coûts pour les boucles sèches de type FTTN ne sont actuellement pas requises, il ne va pas de soi que les ressources doivent être consacrées à la réalisation d’une étude de coûts concernant les boucles sèches de type FTTN. De plus, si une étude de coûts des boucles sèches de type FTTN doit être effectuée, leurs tarifs pourraient être séparés de ceux des boucles sèches traditionnelles visés par le gel.
  3. Bell Canada a fait valoir que pour procéder au gel des tarifs des boucles sèches traditionnelles, le Conseil devrait annuler sa politique s’il juge qu’il est nécessaire de réévaluer les tarifs des boucles sèches de type FTTN, puisque le gel des tarifs des services traditionnels ne viserait pas les tarifs des services de type FTTN.

Résultats de l’analyse du Conseil

Liaisons de raccordement DS-1, service de partage de lignes et liaisons du central au RNC DS-1
  1. Dans la présente instance, les éléments de preuve indiquent que la demande pour les liaisons de raccordement DS-1, le service de partage de lignes et les liaisons du central au RNC DS-1 de Bell Canada était faible en 2016 et que la demande pour chacun de ces services traditionnels a diminué considérablement au cours des dernières années.
  2. Le Conseil conclut que les conditions du marché pour les liaisons de raccordement DS-1, le service de partage de lignes et les liaisons du central au RNC DS-1 sont telles qu’un gel des tarifs de ces services permettrait de réduire le fardeau réglementaire tout en maintenant les tarifs à des niveaux justes et raisonnables.
Service traditionnel d’accès par passerelle et boucles sèches fournies à l’appui du service AHV
  1. Des études de coûts doivent être déposées chaque fois qu’une ESLT propose de nouveaux tarifs pour des services fournis par boucles sèches.
  2. Bien que Bell Canada ait présenté une demande visant le gel des tarifs du service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV, elle n’a pas aussi demandé le gel des tarifs du service d’accès par passerelle de type FTTN et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV.
  3. Le Conseil estime que Bell Canada n’a pas justifié de façon satisfaisante sa demande visant à ce que les tarifs de son service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV soient gelés à leur niveau actuel. D’abord, malgré la baisse signalée de la demande pour son service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV de 2013 à 2016, la demande pour ce service en 2016 demeurait considérable.
  4. De plus, Bell Canada n’a pas expliqué correctement comment le gel des tarifs de son service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV permettrait de réduire son fardeau réglementaire. À l’heure actuelle, les tarifs du service d’accès par passerelle de type FTTN et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV sont fondés sur les tarifs du service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV. Si les tarifs pour les services traditionnels étaient gelés, Bell Canada serait vraisemblablement tenue de déposer de nouvelles études de coûts afin d’établir des tarifs pour le service d’accès par passerelle de type FTTN et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV qui ne sont pas fondés sur les tarifs du service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV. Bell Canada n’a pas précisé sur quels autres documents le Conseil pourrait s’appuyer pour déterminer si les tarifs du service d’accès par passerelle de type FTTN et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV de Bell Canada sont justes et raisonnables, conformément au paragraphe 27(1) de la Loi.
  5. Par conséquent, le Conseil n’est pas convaincu que les conditions du marché sont telles qu’un gel des tarifs du service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV de Bell Canada permettrait d’alléger le fardeau réglementaire tout en maintenant des tarifs justes et raisonnables.
Conclusions
  1. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil approuve la demande de Bell Canada concernant le gel des tarifs de son service de liaisons de raccordement DS-1 (dans les territoires de desserte de Bell Aliant, Bell Canada et Télébec), de son service de partage de lignes (dans les territoires de desserte de Bell Canada), et de son service de liaisons du central au RNC DS-1 (dans les territoires de desserte de Bell Canada). Cependant, le Conseil rejette la demande de Bell Canada concernant le gel des tarifs de son service traditionnel d’accès par passerelle et des boucles sèches fournies à l’appui du service AHV (dans les territoires de desserte de Bell Aliant, Bell Canada et Télébec).

Instructions

  1. Les conclusions figurant dans la présente décision sont conformes aux Instructions pour les raisons énoncées ci-dessous.
  2. Les Instructions prévoient que dans l’exercice des pouvoirs et fonctions que lui confère la Loi, le Conseil doit mettre en œuvre les objectifs de la politique énoncés à l’article 7 de la Loi, conformément aux alinéas 1a), 1b) et 1c) des Instructions.
  3. Les questions à l’examen dans le cadre de la présente instance concernent la fourniture des services et leur incidence connexe sur la concurrence au sein du marché en aval de services locaux de détail et de services Internet de détail, notamment la question de savoir si la fourniture des services ne devrait plus être prescrite. Par conséquent, les sous-alinéas 1a)(i) et 1a)(ii)Note de bas de page 26 et les sous-alinéas 1b)(i), 1b)(ii) et 1b)(iv)Note de bas de page 27 des Instructions s’appliquent aux conclusions du Conseil dans la présente instance. Conformément au sous-alinéa 1a)(i), en cessant de prescrire la fourniture des services de partage de lignes et de liaisons de raccordement des LLD, le Conseil se fie, dans la plus grande mesure du possible, au libre jeu du marché comme moyen d’atteindre les objectifs établis à l’article 7 de la Loi.
  4. Conformément au sous-alinéa 1b)(i) des Instructions, le Conseil estime que les mesures de réglementation établies dans la présente décision contribuent à l’atteinte des objectifs de la politique énoncés aux alinéas 7a), 7b), 7c) et 7f) de la LoiNote de bas de page 28.
  5. Conformément aux sous-alinéas 1a)(ii) et 1b)(ii) des Instructions, le Conseil estime que les mesures réglementaires approuvées dans la présente décision, y compris sa décision de geler les tarifs du service de partage de lignes, du service de liaisons de raccordement DS-1 et du service de liaisons du central au RNC DS-1, i) sont efficaces et proportionnelles aux buts visés et ne font obstacle au libre jeu d’un marché concurrentiel que dans une mesure minimale, et ii) ne découragent pas un accès au marché qui est propice à la concurrence et qui est efficace économiquement, ni n’encouragent un accès au marché qui est non efficace économiquement.

Secrétaire général

Documents connexes

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