Décision de radiodiffusion CRTC 2016-265

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Référence : Demande de la Partie 1 affichée le 5 janvier 2016

Ottawa, le 13 juillet 2016

Atop Broadband Corp.
L’ensemble du Canada

Demande 2015-1398-7

Ajout de ONE World Sports à la Liste de services de programmation et de stations non canadiens approuvés pour distribution

Le Conseil approuve une demande en vue d’ajouter ONE World Sports à la Liste de services de programmation et de stations non canadiens approuvés pour distribution (la liste) et modifie la liste en conséquence. La liste révisée peut être consultée sur le site web du Conseil, www.crtc.gc.ca.

Le Conseil est d’avis que l’ajout de ce service satisfait aux objectifs de politique relatifs à l’entrée de services non canadiens au Canada, puisqu’il ne concurrence pas de services canadiens payants ou spécialisés et bénéficiera aux Canadiens en ajoutant de la diversité à l’offre d’émissions de sports au Canada.

Demande

  1. Atop Broadband Corp. (Atop), en tant que parrain canadien, a déposé une demande en vue d’ajouter ONE World Sports à la Liste de services de programmation et de stations non canadiens approuvés pour distribution (la liste).
  2. Le demandeur décrit ONE World Sports comme un service de créneau (100 % de langue anglaise) diffusant, 24 heures sur 24, une programmation en direct constituée presque exclusivement d’événements sportifs provenant de l’étranger. Son auditoire cible est composé d’hommes et de femmes âgés de 18 à 45 ans qui s’intéressent aux sports et aux sports de créneau d’à travers le monde. Le service est situé à Stamford (Connecticut), et sa programmation provient de plus de 25 différents pays, dont la Grande-Bretagne, l’Australie et la Chine.

Interventions

  1. Le Conseil a reçu des interventions en opposition à la présente demande, de la part de Bell Media Inc. (Bell) et Rogers Media Inc. (Rogers), auxquelles le demandeur a répliqué. Le dossier public de la présente demande peut être consulté sur le site web du Conseil, www.crtc.gc.ca, ou en utilisant le numéro de demande énoncé ci-dessus.

Intervention de Rogers

  1. Rogers s’oppose à la demande parce que, selon lui, ONE World Sports fait directement concurrence à un de ses services spécialisés de catégorie B, Sportsnet World. Il souligne que Sportsnet World et ONE World Sports sont tous deux des services de langue anglaise consacrés principalement au soccer et ciblant le même auditoire, soit la tranche d’âge de 18 à 49 ans.
  2. Rogers indique aussi qu’il y a chevauchement direct entre la programmation de Sportsnet World et celle de ONE World Sports. Les deux services diffusent en effet les matchs de soccer de la Barclays Premier League et de la Bundesliga, ligues professionnelles respectives de l’Angleterre et de l’Allemagne. Rogers mentionne qu’il détient les droits exclusifs au Canada sur la programmation en direct des matchs de la Barclays Premier League (conjointement avec Bell) et de la Bundesliga, et qu’il diffuse sur Sportsnet World, aussi bien en direct qu’en différé, tous les matchs dont il détient les droits. Rogers fait valoir que ONE World Sports, à supposer que sa distribution soit approuvée, aurait l’obligation de supprimer tous les matchs diffusés en direct ou autrement protégés.
  3. En outre, en étudiant la grille horaire de ONE World Sports pour décembre 2015 jointe à la demande, Rogers a constaté que, dans ce seul mois, ONE World Sports avait diffusé 68 matchs de la Barclays Premier League et 22 de la Bundesliga, tous des matchs qui ont été montrés sur Sportsnet World, à l’exception des parties de la Barclays Premier League pour lesquels Bell détient des droits de diffusion exclusifs pour le Canada.
  4. Rogers ajoute que ONE World Sports produit une émission de format magazine sur le soccer, Football Review, qui ressemble aux nombreuses émissions sur le soccer de format magazine diffusées par Sportsnet World. Dans l’ensemble, selon Rogers, le chevauchement entre ONE World Sports et Sportsnet World est beaucoup plus important que le chevauchement entre le service de catégorie B radX et le service d’origine américaine FUEL TV, dont l’inscription sur la liste a été refusée par le Conseil dans Ajout de FUEL TV aux listes des services par satellite admissibles à une distribution en mode numérique, politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2011-289, 3 mai 2011 (la politique réglementaire de radiodiffusion 2011-289) parce que les émissions de sport diffusées par ce service équivalaient à près de 20% des émissions de radX.

Intervention de Bell

  1. Bell s’oppose à la demande, avançant que ONE World Sports ferait directement concurrence à son service spécialisé de catégorie C, The Sports Network (TSN). Il conteste la déclaration d’Atop selon laquelle ONE World Sports ne pose aucune menace aux services de sports autorisés parce que sa programmation provient de l’extérieur du Canada.
  2. Bell fait valoir que les émissions internationales suscitent beaucoup d’intérêt au Canada, que TSN diffuse de nombreux événements sportifs en direct provenant de l’extérieur et que ceux-ci jouissent d’une immense popularité auprès de son auditoire (p.ex. : la Barclays Premier League et la Ligue des champions, la ligue internationale de rugby, et les tournois de tennis du Grand Chelem et de l’APT).
  3. Selon Bell, TSN aurait perdu des droits de programmation au cours des dernières années à cause d’ententes multiterritoriales signées avec des concurrents comme ONE World Sports, sans même avoir eu l’occasion de soumissionner. Bell craint qu’en permettant à des services exploités sur une base multiterritoriale - comme ONE World Sports - de pénétrer le marché canadien, on verra plus fréquemment les services canadiens de programmation de sport se faire refuser les droits sur de la programmation de sports internationale de haute valeur, puisque rien n’empêche ces services étrangers de se procurer des droits numériques pour le Canada.
  4. Par ailleurs, Bell propose que le Conseil soit plus proactif dans sa surveillance des services de programmation non canadiens approuvés pour distribution au Canada. Selon Bell, le mécanisme actuel qui repose sur le dépôt d’une plainte ne suffit pas à garantir que les services de programmation inscrits sur la liste ne fassent toujours pas concurrence, en tout ou en partie, à des services canadiens autorisés. Bell propose que le Conseil introduise un examen systématique pour vérifier régulièrement l’admissibilité de chaque service de la liste.

Réplique d’Atop à l’intervention de Rogers

  1. En réponse à Rogers, Atop indique que la programmation de ONE World Sports, bien que diffusée en anglais, plaît souvent à des groupes ethniques ou nationaux en particulier. Au sujet de l’argument invoqué par Rogers à l’effet que ONE World Sports cible le même auditoire que Sportsnet World (les téléspectateurs de 18 à 49 ans), Atop répond qu’il n’est pas étonnant que ONE World Sports et la plupart des réseaux ciblent cette tranche d’âge puisque, selon les rapports Nielsen, il s’agit du groupe démographique le plus important aux États-Unis, représentant 136 millions de personnes, soit 42 % de la population du pays. Atop en déduit que l’auditoire cible ne devrait pas être considéré comme un facteur afin de déterminer si ONE World Sports fait ou non concurrence à Sportsnet World.
  2. Atop soutient également que la programmation de soccer diffusée par ONE World Sports diffère sensiblement de celle que présente Sportsnet World. Selon ses calculs, alors que 49 % des émissions sur ONE World Sports portent sur le soccer, les matchs de la Barclays Premier League ou de la Bundesliga représentent 52 % seulement de ce contenu, et aucun n’est présenté en direct. ONE World Sports ne détient les droits sur aucun match en direct d’une ligue européenne, mais il détient en revanche des droits de club pour deux équipes de la Barclays Premier League et une de la Bundesliga. Les droits qu’un club octroie à une station lui permettent de diffuser des scènes filmées en coulisse, des entrevues, des nouvelles sur des vedettes à l’intention de leurs fans, et les matchs en reprise après un délai minimum de 48 heures, conformément aux règlements de l’Union des associations européennes de football (UEFA). Ainsi, selon Atop, ONE World Sports ne peut pas contrevenir aux droits détenus par Rogers et Bell. Atop insiste pour dire que ONE World Sports s’en tient rigoureusement aux contrats qu’il signe avec les clubs individuels, et qu’il n’y a par conséquent aucun danger qu’il enfreigne les droits que détiennent Rogers ou Bell.
  3. Atop répète que 51% de la programmation de ONE World Sports porte sur des sports autres que le soccer et que sa programmation n’inclut aucune ligue majeure de sports nord-américaine. Par exemple, le service propose du hockey de la KHL (de Russie), du basketball de le CBA (de Chine), ainsi que du baseball de la Nippon League Baseball (du Japon). Donc, selon Atop, ONE World Sports ajouterait à la diversité avec la couverture de sports pratiqués à l’étranger.
  4. En réponse à l’objection que Rogers formule à l’endroit de l’émission de format magazine Football Review, Atop mentionne que cette émission représente moins de 2 % de la programmation de ONE World Sports. Atop indique que son service serait prêt à supprimer cette émission si elle constituait un obstacle déterminant à l’approbation de sa demande.

Réplique d’Atop à l’intervention de Bell

  1. En réponse à Bell, Atop déclare que ONE World Sports ne fait pas concurrence à TSN pour les raisons suivantes :
    • plus de 40 % de sa programmation provient de regroupements sportifs que TSN ne cible pas;
    • une grande quantité de sa programmation en provenance de différents pays n’est diffusée par personne d’autre en Amérique du Nord;
    • le service ne détient aucun droit pour la diffusion en direct des matchs de la Barclays Premier League ou de la Bundesliga, mais il a conclu des ententes avec des clubs qui couvrent la diffusion en seconde fenêtre de matchs préalablement diffusés en direct ou en différé;
    • une bonne part de sa composante soccer n’a rien à voir avec ces deux ligues.

    Atop indique également qu’il y a une différence importante entre la valeur et la pertinence d’une diffusion en direct, d’une reprise et d’un délai de 48 heures.

  2. Par ailleurs, Atop croit que Bell exagère en disant que les émissions internationales suscitent un grand intérêt au Canada, et qu’il s’agit au mieux d’un créneau attrayant au pays. Il souligne que ONE World Sports ne fait pas concurrence à TSN pour les droits de distribution parce que la programmation qu’il privilégie sur la scène mondiale n’est pas celle que recherche TSN.
  3. Pour ce qui est de la déclaration de Bell voulant que TSN ait perdu des droits de programmation à cause d’ententes multiterritoriales conclues par des concurrents tels que ONE World Sports sans que Bell ait eu la chance de déposer une soumission, Atop fait remarquer que Bell ne fournit aucun exemple à l’appui.
  4. Pour finir, Atop fait valoir que l’opposition de Bell au motif que ONE World Sports pourrait être à la recherche de droits exclusifs pour le Canada est purement hypothétique et que ce que Bell perçoit comme une absence de contrôle n’est pas une raison suffisante pour refuser la demande.

Analyse du Conseil

  1. L’approche du Conseil relative à l’entrée de services non canadiens au Canada consiste à autoriser leur distribution du moment qu’ils ne font pas concurrence à des services canadiens payants ou spécialisés. Cette approche reflète les objectifs de la Loi sur la radiodiffusion au sens qu’elle donne priorité à la distribution de services canadiens tout en reconnaissant la diversité pouvant être ajoutée au système par la disponibilité de services de programmation non canadiens. Cette approche offre un certain soutien aux services canadiens afin que ceux-ci puissent remplir leurs engagements et leurs obligations et favorise les alliances entre des services canadiens et non canadiens semblables en genre, et augmente au même temps la variété et la diversité de choix de programmation pour les Canadiens.
  2. Pour évaluer les demandes en vue d’autoriser la distribution au Canada de services non canadiens de langue française ou anglaise, le Conseil tient compte de facteurs comme le genre et la nature du service, la langue d’exploitation, l’auditoire cible et dans quelle mesure le service non canadien fournit des émissions à un service canadien payant ou spécialisé. L’approche générale du Conseil relative à l’entrée de services non canadiens au Canada consiste à autoriser la distribution des services qui ne concurrencent ni en tout ni en partie des services canadiens payants ou spécialisés. Au moment d’évaluer le degré de concurrence éventuelle d’un service non canadien, le Conseil rappelle qu’il concède toujours une certaine marge de chevauchement dans les émissions et qu’il évalue le degré et l’importance d’un tel chevauchement au cas par cas, examinant les faits spécifiques de chaque cas et se basant sur les commentaires fournis afin de rendre une décision.
  3. Dans le passé, le Conseil a refusé et approuvé d’autres services non canadiens qui avaient un chevauchement en programmation, prenant en considération des faits spécifiques tels que la durabilité du marché, l’aspect créneau de la programmation et les différences importantes mises en emphases, parmi d’autres facteurs contextuels. Le Conseil n’a jamais spécifié un pourcentage particulier d’émissions semblables devant être utilisé comme point de référence afin d’évaluer le caractère concurrentiel de services non canadiens avec des services canadiens payants ou spécialisés.
  4. Après examen du dossier public de la demande compte tenu de cette approche et des interventions reçues, le Conseil estime qu’il doit déterminer si ONE World Sports risque de faire concurrence à Sportsnet World ou à TSN.

Concurrence avec Sportsnet World

  1. Rogers a fait valoir que ONE World Sports concurrence Sportsnet World à cause du chevauchement important d’émissions identiques et semblables entre les deux services, particulièrement à l’égard des émissions de soccer. Alors que ONE World Sports diffuse un montant important de soccer, tel qu’indiqué, il ne détient les droits ni aux émissions en direct, ni à la fenêtre de radiodiffusion de reprise (48 heures après la diffusion en direct), lesquels sont détenus par Sportsnet World pour les matchs de Barclays Premier League et Bundesliga. Il peut seulement diffuser ces matchs suite à l’expiration des droits détenus par Sportsnet World.
  2. Malgré qu’il y a définitivement un chevauchement entre les émissions de soccer diffusées par Sportsnet World et ONE World Sports, le fait que ONE World Sports n’a pas accès aux émissions en direct ou aux premières reprises des matchs de soccer est une différence important qui doit être prise en compte. La programmation sportive perd beaucoup de sa valeur auprès des téléspectateurs après la première diffusion en direct, à plus forte raison la troisième diffusion, cette dernière étant la fenêtre de diffusion pour laquelle ONE World achète les droits. À cet égard, il est improbable que Sportsnet World perde une quantité importante de téléspectateurs de soccer pour cette programmation au profit de ONE World Sports. Par conséquent, alors que le niveau de chevauchement en matière de programmation peut sembler important, le Conseil est d’avis que son incidence ne serait pas importante en raison de la combinaison de fenêtres de diffusion accordées à ONE World Sports et de la valeur éphémère des émissions de sports.
  3. ONE World Sports diffuse également des matchs de soccer de ligues non couvertes par Sportsnet World. Par exemple, 45 % de son contenu de soccer provient de diverses ligues internationales (Division II - Amérique du nord, Australie, Asie et Italie) et ses émissions de type magazine sur le soccer diffèrent de celles diffusées sur Sportsnet World.
  4. Finalement, ONE World Sports n’inclut pas d’émissions de ligues sportives d’intérêt général provenant de l’Amérique du nord, mais de hockey, de basketball et de baseball provenant de la Russie, de la Chine et du Japon respectivement - une programmation que Sportsnet World ne diffuse pas.

Concurrence avec TSN

  1. En s’opposant à la demande de ONE World Sports, Bell a fait valoir que le service non canadien menaçait tout service canadien autorisé, comme TSN. Plus spécifiquement, Bell a allégué que TSN a déjà perdu des droits de programmation en raison d’ententes multiterrioriales d’autres compétiteurs comme ONE World Sports. Bell n’a toutefois fourni aucun exemple à l’appui de cette allégation ou afin de démontrer comment ONE World Sports, en particulier, a concurrencé TSN pour l’obtention de droits d’émissions ou pour des téléspectateurs. Bell n’a également pas précisé s’il existait un chevauchement de programmation entre les deux services, exprimant plutôt une inquiétude générale à l’effet que les services de programmation de sports canadiens se verront plus souvent refuser la possibilité d’obtenir des droits à de la programmation de sports internationaux de grande valeur.
  2. Le Conseil estime qu’il n’y a aucune preuve que des canaux canadiens de sports éprouvent des difficultés à obtenir de la programmation. Les préoccupations de Bell ciblent la possibilité que ONE World Sports devienne éventuellement un plus gros compétiteur en acquérant des droits de programmation exclusifs au Canada. Cependant, une des conditions afin d’être autorisé pour distribution au Canada est que les fournisseurs d’un service non canadien ne peuvent détenir, tenter d’obtenir ni exercer des droits de programmation préférentiels ou exclusifs par rapport à la distribution de programmation au Canada.
  3. De plus, si un service non canadien sur la liste change de format de façon à devenir concurrentiel avec un service canadien, le Conseil peut enlever le service de la liste après avoir mené une instance publique appropriée. De plus, toujours à la suite d’une instance appropriée, le Conseil pourrait déterminer qu’un service a tellement changé qu’il n’est plus le même service qui était originalement ajouté à la liste. Une telle conclusion nécessiterait une réévaluation de la capacité concurrentielle du service et de déterminer s’il devrait demeurer autorisé pour distribution au Canada.
  4. Par conséquent, le Conseil est d’avis que les préoccupations exprimées par Bell sont sans fondement.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil approuve la demande présentée par Atop Broadband Corp. en vue d’ajouter ONE Sports World à la Liste de services de programmation et de stations non canadiens approuvés pour distribution et modifie la liste en conséquence. La liste révisée peut être consultée sur le site web du Conseil, www.crtc.gc.ca et peut être obtenue en version papier sur demande.

Autres questions

  1. Le Conseil est d’avis que la demande de Bell en vue de remplacer le mécanisme de révision des services non canadiens actuellement déclenché par une plainte soit remplacé par un examen régulier de l’admissibilité de chaque service sur la liste dépasse la portée de la présente demande. Si Bell désire porter cette affaire devant le Conseil, il lui faudra déposer une demande séparément.

Secrétaire générale

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