ARCHIVÉ -Décision de télécom CRTC 2011-323
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Ottawa, le 16 mai 2011
Demande de règlement de différend déposée par Triton Global Business Services Inc. concernant le service de facturation et de perception offert par MTS Allstream Inc.
Numéro de dossier : 8622-T125-201102475
Dans la présente décision, le Conseil livre ses conclusions sur une demande de règlement de différend déposée par Triton Global Business Services Inc. (Triton) concernant le service de facturation et de perception offert par MTS Allstream. Plus particulièrement, le Conseil conclut que Triton a enfreint l’article 5.4 de l’entente relative aux services de facturation et de perception (l’entente SFP) ainsi que l’article 1.2 des Lignes directrices relatives à l’aspect technique de la facturation et de la perception. Le Conseil conclut également que Triton n’a pas réussi à démontrer qu’elle a pris les mesures qui s’imposent pour corriger le problème d’absence de validation pertinente. Par conséquent, le Conseil conclut que MTS Allstream a des motifs valables, conformément à l’article 12.2 de l’entente SFP, d’annuler son service à l’égard de Triton.
Introduction
1. Le Conseil a reçu une demande de Triton Global Business Services Inc. (Triton), datée du 2 février 2011, dans laquelle cette entreprise demandait au Conseil de lui accorder rapidement un redressement provisoire et définitif afin de régler le différend qui l’oppose à MTS Allstream Inc. (MTS Allstream) concernant le service de facturation et de perception (SFP) de MTS Allstream.
2. Triton a demandé au Conseil de tenir une audience accélérée afin de déterminer si les mesures prises par MTS Allstream pour résilier l’entente SFP (aussi appelée l’Entente) qu’elle avait conclue avec Triton étaient légales. Triton a également demandé au Conseil de lui accorder un redressement provisoire par voie d’une ordonnance, exigeant de MTS Allstream qu’elle continue à fournir un SFP à Triton conformément à l’Entente en attendant les conclusions du Conseil sur la question. MTS Allstream s’est opposée aux demandes de redressement provisoire et d’audience accélérée de Triton.
3. Le 11 mars 2011, le Conseil a publié l’ordonnance de télécom 2011181, dans laquelle il a approuvé la demande de redressement provisoire de Triton. Le Conseil a donc ordonné à MTS Allstream de recommencer à fournir des SFP à Triton conformément à son Tarif des services d’accès des entreprises et à l’entente SFP. Cette même journée, le Conseil a publié une lettre sur l’organisation et le déroulement de l’audience afin d’informer les deux parties qu’il tiendrait une audience accélérée pour déterminer si MTS Allstream avait des motifs valables, conformément à l’entente SFP et aux tarifs du SFP, pour annuler son service. Cette audience publique a eu lieu le 15 avril 2011[1].
4. On peut consulter sur le site Web du Conseil, le dossier public de l’instance. On peut y accéder à l’adresse www.crtc.gc.ca, sous l’onglet Instances publiques, ou au moyen du numéro indiqué cidessus.
Parties
5. Triton, une entreprise de télécommunication canadienne enregistrée, fournit des services de télécommunication intercirconscriptions au Canada. Plus précisément, elle offre des services de téléphonistes à ses clients, dont des services d’appels à frais virés, des services de facturation à un troisième numéro et des services d’appels occasionnels. MTS Allstream est une entreprise de services locaux titulaire (ESLT) qui offre notamment des SFP.
6. Triton et MTS Allstream ont conclu une entente SFP en 2003. Cette entente a continué d’être en vigueur pendant des périodes successives d’un mois selon les mêmes modalités que celles énoncées dans l’entente de 2003 jusqu’à ce que MTS Allstream y mette fin récemment le 12 janvier 2011.
Questions
7. Un tarif du SFP établit les tarifs et les modalités se rapportant à la facturation et à la perception des frais relatifs aux appels admissibles acheminés sur le réseau du fournisseur de services. Essentiellement, l’ESLT facture les tarifs au client et perçoit les paiements au nom du fournisseur de services, puis remet l’argent encaissé à ce dernier. Les modalités sont régies par le tarif du SFP, l’entente SFP et les Lignes directrices relatives à l’aspect technique de la facturation et de la perception (les Lignes directrices).
8. Le Conseil a cerné les questions cidessous à examiner dans la présente décision :
I. Triton atelle enfreint la même disposition de l’entente SFP à deux reprises?
II. La résiliation de l’entente SFP estelle justifiée?
I. Triton atelle enfreint la même disposition de l’entente SFP à deux reprises?
Contexte
9. Comme il a été mentionné précédemment, MTS Allstream a résilié, le 12 janvier 2011, l’entente SFP qu’elle avait conclue avec Triton, conformément à l’article 12.2 de l’entente SFP, car Triton avait enfreint l’article 1.2 des Lignes directrices lorsqu’elle a omis de valider correctement des appels à deux reprises, soit à la fin de 2007 et à l’automne 2010.
10. La « validation » est définie à l’article 1.2 t) comme le processus selon lequel le fournisseur de service (Triton) doit accéder à une ou à plusieurs bases de données pour prendre connaissance des exigences relatives à l’acheminement d’un appel et doit satisfaire à ces exigences. L’article 1.2 des Lignes directrices prévoit que le fournisseur de services doit veiller à ce que des processus appropriés de facturation à un troisième numéro et aux appels à frais virés soient mis en place pour valider le numéro de téléphone. Cet article prévoit également que la facturation à un troisième numéro et les appels à frais virés doivent être validés dans la base de données appropriée et vérifiés en personne (c.àd. acceptation positive par le client de l’utilisateur final) auprès du client de l’entité de facturation. De plus, l’article 5.4 de l’Entente indique que le fournisseur de services peut seulement soumettre à l’entité de facturation (MTS Allstream) la facturation à un troisième numéro et les appels à frais virés qui ont été validés.
11. L’article 12.2 de l’entente SFP prévoit ce qui suit :
Lorsqu’une partie (la partie en défaut) a reçu un avis de l’autre partie (la partie qui n’est pas en défaut) conformément à l’article 12.1 de l’Entente, même si la partie en défaut a remédié à la situation ou s’est acquittée de son obligation, et advenant que la partie qui n’est pas en défaut juge que la partie en défaut a enfreint la ou les mêmes dispositions de l’Entente pour lesquelles un avis avait été envoyé en premier lieu conformément à l’article 12.1, ou ne s’est pas acquittée de ses obligations relatives à cellesci, la partie qui n’est pas en défaut aura le droit, à sa seule discrétion, de résilier l’Entente, en tout ou en partie, comme il est précisé à l’article 12.8. [Traduction]
Position des parties
12. Les parties au dossier de la présente instance ont convenu qu’afin de valider un appel de manière convenable, Triton doit d’abord interroger la base de données d’information sur les lignes pour établir si le numéro de téléphone figure sur la liste des numéros bloqués pour certains appels. Ensuite, si le numéro n’est pas bloqué, Triton peut acheminer l’appel uniquement si la vérification en personne est valide.
13. Triton a reconnu avoir enfreint en 2007 les dispositions comme l’a mentionné MTS Allstream, indiquant que cette infraction était liée au fait qu’elle avait omis de procéder aux vérifications en personne. Triton a également reconnu qu’on l’avait informé de cette infraction aux dispositions, conformément au paragraphe 12.1 de l’entente SFP, et elle a déclaré qu’elle avait réglé le problème dans le délai imparti.
14. Dans le cadre de l’audience, Triton a également reconnu avoir acheminé en 2010 au moins quelques appels à MTS Allstream aux fins de facturation sans les avoir validés et que les préoccupations soulevées par MTS Allstream pourraient avoir été causées par des fournisseurs tiers acheminant des appels au Canada par le biais de Triton. Dans le cadre du contreinterrogatoire, Triton a admis que dans plusieurs cas, au lieu d’interroger la base de données d’information sur les lignes à chaque appel conformément aux exigences, elle n’effectuait qu’une recherche par numéro par jour. En outre, les réponses de Triton aux demandes de renseignements du Conseil ont confirmé que, même si le code 263 (numéro bloqué pour certains types d’appels) figurait dans la base de données d’information sur les lignes pour de nombreux numéros de téléphone, les appels connexes étaient acheminés à MTS Allstream aux fins de facturation.
15. Toutefois, Triton est d’avis que la prétendue infraction commise en 2010 n’était pas de même nature que celle de 2007. Elle a déclaré que l’infraction commise en 2007 était liée au fait qu’elle n’avait pas mené de vérification en personne en raison d’une panne de son logiciel. En revanche, Triton a déclaré que la prétendue infraction commise en 2010 était liée au fait qu’elle n’avait pas interrogé la base de données d’information sur les lignes, ce qui exigerait des mesures correctives très différentes de celles exigées lors de l’infraction de 2007.
16. Triton a soutenu que l’article 12.1 de l’Entente permettait la résiliation lors de la deuxième infraction de même nature (c.àd. lorsque le fournisseur de services a eu l’occasion de régler le problème dans le cadre de l’article 12.1) dans le contexte d’une relation contractuelle à long terme concernant un service obligatoire, et qu’on devrait interpréter cet article en ce sens. Par conséquent, Triton a fait valoir que les deux cas cités par MTS Allstream ne constituaient pas une infraction à la même disposition permettant d’invoquer les droits de résiliation figurant à l’article 12.2 de l’entente SFP.
17. MTS Allstream a fait valoir que l’infraction commise en 2007 avait été reconnue par les deux parties et n’était pas sujette à litige. En ce qui concerne la prétendue infraction commise en 2010, MTS Allstream était d’avis que cette dernière concernait la même disposition de l’entente SFP que celle commise en 2007, à savoir les deux infractions découlaient du fait que Triton n’avait pas validé les appels de manière convenable.
Résultats de l’analyse du Conseil
18. Compte tenu des faits reconnus par Triton et des circonstances entourant cette instance, le Conseil conclut que Triton a enfreint l’article 5.4 de l’entente SFP et l’article 1.2 des Lignes directrices, en 2007 et en 2010.
19. Le Conseil fait remarquer que l’article 1.2t) de l’entente SFP définit le processus de « validation » en tant que processus unique et comprend toutes les étapes concernant la validation d’un appel. Par conséquent, le Conseil estime que le fait d’avoir omis de valider les appels en 2007 et en 2010, indépendamment du fait que l’omission se rapportait soit au défaut de vérification en personne soit à l’absence d’interrogation de la base de données, constitue une infraction à la même disposition de l’entente SFP.
20. Ainsi, le Conseil conclut que Triton a enfreint la même disposition de l’entente SFP en 2007 et en 2010, ce qui permet d’invoquer les dispositions de résiliation figurant à l’article 12.2 de l’entente SFP.
II. La résiliation de l’entente SFP estelle justifiée?
21. Triton a soutenu que la résolution du différend conformément à l’article 13 de l’Entente constituait une condition préalable à la résiliation, puisqu’il y avait un litige quant à savoir si les dispositions avaient été enfreintes. Triton a fait remarquer qu’on ne lui avait pas fourni suffisamment de renseignements au moment de la résiliation pour lui permettre de comprendre exactement le problème et que, par conséquent, elle n’avait pas eu l’opportunité de régler celuici. En outre, Triton a fait valoir qu’elle avait cherché à plusieurs reprises à engager des discussions avec MTS Allstream à ce sujet, indiquant que puisqu’elle était visée par la résiliation d’une entente importante, elle avait besoin d’un délai plus long pour trouver plus de renseignements au sujet de la prétendue infraction afin de traiter la question de façon pertinente.
22. Dans le cadre de l’audience accélérée, Triton a laissé entendre que le problème était probablement attribuable au fait qu’un fournisseur tiers n’avait pas interrogé de manière convenable la base de données d’information sur les lignes avant de traiter ces appels. Triton a suggéré que le but de la présente instance devrait être d’établir un processus permettant de mettre à l’essai les systèmes de Triton afin de déterminer et de régler tout problème en suspens, non à résilier le contrat.
23. Triton a indiqué que depuis que le problème a été soulevé, elle avait pris les mesures nécessaires pour mettre à niveau son service d’accès par passerelle avec la base de données d’information sur les lignes d’AT&T SNET[2], déclarant qu’elle croyait que les problèmes survenus à l’automne 2010 ne se reproduiraient plus. Triton a ajouté qu’elle avait mis en œuvre une procédure de vérification préalable des dossiers d’appels avant leur envoi à MTS Allstream, pour s’assurer que les clients de MTS Allstream ne soient pas facturés pour un appel qui n’aurait pas dû être pris en compte.
24. MTS Allstream a fait valoir que la résiliation de l’entente SFP reposait sur son désir de se protéger et de protéger ses clients. MTS Allstream a indiqué que l’entente SFP visait à prévenir les appels non validés, ce qui constitue une disposition importante concernant les normes fonctionnelles et la protection des clients. MTS Allstream a prétendu que Triton avait agi sans tenir compte des dispositions de l’entente SFP.
25. MTS Allstream a demandé que la résiliation de l’entente SFP avec Triton entre en vigueur dans les sept jours suivant les conclusions du Conseil en l’espèce. MTS Allstream a fait valoir que Triton n’avait rien fait pour corriger son manquement aux dispositions, et qu’elle avait été informée des mesures mises en œuvre par Triton pour régler le problème uniquement le jour de l’audience.
Résultats de l’analyse du Conseil
26. Le Conseil reconnaît que sans accès obligatoire au SFP de MTS Allstream, Triton pourrait être incapable d’offrir ses services à l’échelle nationale, entraînant ainsi une réduction de la concurrence au sein du marché et le retrait des services fournis par Triton aux utilisateurs finals. Le Conseil fait remarquer la déclaration des deux parties, versée au dossier de l’instance, selon laquelle Triton dispose de solutions de rechange en ce qui a trait à la facturation et à la perception telles que les cartes de crédit ou d’autres arrangements quant à la méthode de facturation. En outre, Triton a indiqué que si le Conseil devait ne pas être favorable à sa demande, elle pourrait se pencher sur ces solutions de rechange ou décider d’interrompre son service dans le territoire de MTS Allstream. Finalement, le Conseil indique qu’aucune preuve n’a été fournie en ce qui a trait à l’incidence négative sur les clients que pourrait avoir l’interruption de services de Triton à l’échelle nationale.
27. Le Conseil reconnaît également l’importance de respecter les dispositions relatives aux normes fonctionnelles et à la protection des consommateurs découlant de l’entente SFP, y compris les répercussions négatives sur les clients de MTS Allstream dont le numéro de téléphone est bloqué pour certains types d’appels, au cas où les directives ne sont pas suivies de façon convenable.
28. Malgré le fait que Triton a assuré qu’un client de MTS Allstream n’aura pas à payer pour un appel qui n’aurait pas dû être acheminé, le Conseil indique que cela ne répond pas aux préoccupations concernant la protection de la vie privée des consommateurs visant le respect de la vie privée, la protection des renseignements personnels et toute autre forme d’usage non autorisé.
29. Le Conseil est préoccupé que MTS Allstream n’ait pas entrepris de discussions avec Triton dès qu’elle a remarqué le problème, en septembre 2010, pour lui permettre de recueillir les faits, déterminer le problème de manière concluante et tenter de trouver une solution. Le Conseil estime que de telles discussions par auraient été importantes pour la protection immédiate de ses clients. Le Conseil est d’avis que ce n’est qu’à l’audience publique que les faits pertinents au différend ont été compris.
30. Même s’il estime que MTS Allstream aurait pu agir de manière plus raisonnable pour résoudre ce différend, le Conseil ne considère pas que les dispositions relatives à la résolution des différends figurant à l’article 13 de l’Entente constituent une condition préalable à la résiliation de l’Entente, conformément à l’article 12.2.
31. Sans égard au fait que les fournisseurs tiers de Triton interrogent la base de données d’information sur les lignes de façon appropriée ou non, le Conseil fait valoir qu’en définitive, il incombe à Triton de veiller au respect des conditions de l’entente SFP dans toutes les activités imparties à un tiers. Le Conseil fait également remarquer que la solution proposée par Triton, visant à vérifier les dossiers d’appels avant de les envoyer à MTS Allstream, pour s’assurer s’ils doivent être envoyés aux fins de facturation et perception, ne permettra pas de régler de manière probante le problème des appels aux numéros bloqués acheminés aux clients abonnés à la fonction « blocage des appels ». Le Conseil estime que cela indique que Triton n’a pas bien compris l’importance de la validation pour la protection des consommateurs et sa responsabilité de garantir une validation appropriée.
Conclusion
32. À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut que MTS Allstream a des motifs valables de résilier l’entente SFP conclue avec Triton conformément à l’article 12.2 de l’Entente. Par conséquent, le redressement provisoire ordonné dans l’ordonnance de télécom 2011181 est sans effet, à compter de 10 jours suivant la date de la présente décision.
Secrétaire général
Document connexe
- Triton Global Business Services Inc. – Demande de redressement provisoire concernant le service de facturation et de perception, Ordonnance de télécom CRTC 2011181, 11 mars 2011
Notes de bas de page :
[1] Conformément à sa lettre sur l’organisation et le déroulement de l’audience, le Conseil a adressé des demandes de renseignements à MTS Allstream et à Triton le 1er avril 2011.
[2] AT&T SNET correspond à American Telephone and Telegraph Southern New England Telephone.
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