ARCHIVÉ -Décision de télécom CRTC 2010-930

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Référence au processus : Avis de consultation de télécom 2010-165, modifié

Ottawa, le 9 décembre 2010

Classification des fournisseurs de services qui louent de la fibre noire et la mettent en service aux fins de vente

Numéro de dossier : 8665-C12-201004853

Dans la présente décision, le Conseil conclut qu’un fournisseur de services qui loue la fibre noire d’un tiers et la met en service sous forme de fibre blanche au moyen de son propre équipement optique n’exploite ni ne possède une « installation de transmission » et lorsqu’il fournit des services au public au moyen de ces installations, il n’exerce pas des activités à titre d’« entreprise de télécommunication », aux termes de la Loi sur les télécommunications.

Introduction

1.      Le 25 novembre 2009, AboveNet Communications Inc. (AboveNet) a déposé une lettre dans laquelle l’entreprise demandait au Conseil d’enregistrer sa filiale canadienne, AboveNet Canada Inc. (AboveNet Canada), à titre de revendeuse. AboveNet a déclaré que son intention initiale était qu’AboveNet Canada vende des services de fibre optique noire et de fibre optique blanche au Canada. AboveNet a également déclaré que les services de télécommunication visés par la revente proviendraient de la Société TELUS Communications (STC), en vertu d’une entente de location d’installations existantes, ajoutant qu’AboveNet Canada ne possédait ni n’exploitait aucune installation de transmission au Canada.

2.      Dans une lettre datée du 7 décembre 2009, la STC s’est opposée à l’enregistrement d’AboveNet Canada comme revendeuse. La STC a fait valoir, en vertu des faits présentés au Conseil, qu’AboveNet Canada ne répondait pas aux critères lui permettant d’exercer des activités à titre de revendeuse et qu’il y avait lieu de la considérer comme une « entreprise de télécommunication », aux termes de la Loi sur les télécommunications (la Loi).

3.      En mars 2010, le Conseil a publié l’avis de consultation de télécom 2010-165 dans lequel il a lancé un appel aux observations visant à déterminer si un fournisseur de services « exploite » une « installation de transmission » et exerce des activités à titre d’« entreprise de télécommunication », aux termes de la Loi lorsqu’il loue la fibre noire d’une tierce partie et fournit la fibre blanche à des tiers moyennant contrepartie.

4.      Le Conseil a reçu des observations des sociétés suivantes : AboveNet; AT&T Global Services Canada Co. (AGSC); Bell Aliant Communications régionales, société en commandite et Bell Canada (collectivement les compagnies Bell); Cogent Canada Inc., Level 3 Communications LLC, et Verizon Canada Ltd. (collectivement la Coalition); MTS Allstream Inc. (MTS Allstream); NextG Networks Canada Inc. et sa société mère NextG Networks Inc. (collectivement NextG); la STC; TekSavvy Solutions Inc. (TekSavvy) et Yak Communications (Canada) Corp. (Yak).

5.      AboveNet; et AGSC, la Coalition, MTS Allstream, NextG, TekSavvy et Yak (collectivement les autres parties) ont fait valoir qu’un fournisseur de services qui loue de la fibre noire pour fournir des services de télécommunication au public n’est pas une « entreprise de télécommunication ». Les compagnies Bell et la STC ont soutenu qu’un tel fournisseur de services exploite des « installations de transmission » et, par conséquent, exerce des activités à titre d’« entreprise de télécommunication ».

6.      On peut consulter sur le site Web du Conseil le dossier public de l’instance, lequel a été fermé le 28 avril 2010. On peut y accéder à l’adresse www.crtc.gc.ca, sous l’onglet Instances publiques, ou au moyen du numéro de dossier indiqué ci-dessus.

Contexte général et législatif

7.      En juin 1993, le Parlement a adopté la Loi[1] qui, entre autres choses, annulait les dispositions en matière de télécommunication de la Loi sur les chemins de fer. En vertu cette dernière, l’obligation de déposer des tarifs et de respecter d’autres exigences réglementaires s’appliquait aux fournisseurs de services dotés d’installations et, à la suite d’une décision du Conseil[2] rendue en 1992, aux revendeurs (c.-à-d. aux entreprises qui louent une capacité de transmission) qui offrent un service de télécommunication de base de bout en bout au moyen de services ou d’installations de nature interprovinciale qu’ils configurent, et qui exercent un contrôle sur le transport et l’acheminement de ce trafic. Avant la décision rendue par le Conseil en 1992, le revendeur n’était pas une « compagnie » assujettie au cadre de réglementation énoncé dans la Loi sur les chemins de fer.

8.      En vertu de la nouvelle Loi, le Parlement établissait, entre autres choses, la différence entre les revendeurs et les fournisseurs de services dotés d’installations. Dans l’avis public Télécom 93-62, publiée juste avant l’entrée en vigueur de la Loi, le Conseil a indiqué ce qui suit : Afin de respecter, entre autres choses, l’intention du Parlement de faire en sorte que les revendeurs qui ne possèdent pas d’installations de transmission de base ne soient pas assujettis à la réglementation du Conseil, l’article 2 de la Loi contient une série de définitions connexes [...].

9.      La principale définition figurant dans la Loi est celle du terme « entreprise de télécommunication » : Propriétaire ou exploitant d’une « installation de transmission » grâce à laquelle sont fournis [...] des « services de télécommunication » au public moyennant contrepartie[3]. La définition du terme « installation de transmission »[4] ne comprend pas les « appareils de transmission exclus »[5]. Ainsi, seul un fournisseur de services possédant ou exploitant une installation de transmission (combinée ou non à un appareil de transmission exclu) peut être une « entreprise de télécommunication » et peut être assujetti à l’établissement des tarifs et aux autres exigences de la Loi.

10.  Par conséquent, dans l’avis public Télécom 93-62, le Conseil a conclu que les revendeurs ne seraient pas assujettis aux dispositions de la Loi qui concernent les entreprises canadiennes, notamment l’obligation de déposer des tarifs aux fins d’approbation préalable du Conseil.

11.  La distinction entre un revendeur et un fournisseur de services doté d’installations a été abordée de nouveau en 1998, lorsque le Parlement a créé une nouvelle catégorie de fournisseurs de services et qu’il a conféré de nouveaux pouvoirs[6] au Conseil. Comme les nouveaux pouvoirs devaient s’appliquer aux revendeurs et aux fournisseurs de services dotés d’installations, la définition de « fournisseur de services de télécommunication » a été ajoutée à la Loi pour englober les fournisseurs de services de télécommunication de base, dotés ou non d’installations.

Questions

12.  Le Conseil a cerné les deux questions ci-dessous à régler dans la présente décision :

I.       L’équipement optique utilisé par le fournisseur de services pour mettre la fibre noire louée en service constitue-t-il un appareil de transmission exclu ou constitue-t-il, en soi, une « installation de transmission »?

II.    Le fournisseur de services qui raccorde de l’équipement optique à la fibre noire louée pour fournir des services de télécommunication à des tiers exploite-t-il une « installation de transmission »?

I.   L’équipement optique utilisé par le fournisseur de services pour mettre la fibre noire louée en service constitue-t-il un appareil de transmission exclu ou constitue-t-il, en soi, une « installation de transmission »?

13.  La STC a déclaré qu’une pièce d’équipement n’est pas un appareil de transmission exclu à moins qu’il soit destiné uniquement aux fonctions figurant aux points a) à c) de la définition d’un appareil de transmission.

14.  La STC a fait valoir que l’ajout du point a) à la définition d’un appareil de transmission exclu visait à garantir qu’un fournisseur qui exploite de l’équipement réservé à la commutation ne cadre pas dans la définition du terme « entreprise de télécommunication ». En outre, la STC a soutenu que le point b) de la définition d’équipement de communication exclu visait à exclure les fournisseurs de services améliorés, et que le point c) visait à garantir que les entreprises se consacrant uniquement au traitement de données soient exclues.

15.  La STC a déclaré que quoique les dispositifs électroniques utilisés pour mettre la fibre noire en service puissent (i) assurer la commutation, (ii) traiter de l’information et (iii) commander la vitesse de transmission[7], ils assurent également la conversion du signal d’entrée en impulsions lumineuses voyageant dans la fibre pour transmettre de l’information. La STC a soutenu qu’il s’agit de la principale fonction d’une entreprise et qu’elle ne figure pas dans la définition d’appareil de transmission exclu.

16.  La STC a affirmé que les fonctions de l’équipement utilisé pour mettre la fibre noire en service qui convertit des signaux électromagnétiques en signaux lumineux ne peuvent pas être reconnues comme modifiant la « forme », le « code » ou le « protocole » de transmission, tel que ces termes sont définis dans le Newton’s Telecom Dictionary (21e édition, 2005). La STC a également fait valoir que dans une décision rendue en 1984[8] par le Conseil, celui-ci avait déjà établi un lien entre le concept de « mise en forme » et celui d’« édition » et que ce lien devrait préciser la signification du terme « forme » figurant dans la définition d’appareil de transmission exclu.

17.  AboveNet et plusieurs des autres parties ont soutenu que l’équipement optique cadrait avec le point c) de la définition d’appareil de transmission exclu, car sa fonction est de convertir un signal d’entrée en impulsions lumineuses, ce qui constitue la conversion du protocole et de la forme équivalant à la commande de la vitesse, du code, du protocole, du contenu, de la forme de la transmission de l’information codée dans les impulsions lumineuses.

18.  AboveNet a fait valoir que le terme « appareil de transmission exclu » désigne les appareils dotés d’une fonction de transmission. AboveNet a déclaré qu’en vertu de la définition « d’installation de transmission » figurant dans la Loi, il est raisonnable de conclure qu’on vise le support de transmission de base (c.-à-d. le câble de fibre optique), et non l’équipement de transmission connexe raccordé ou lié à la capacité de transmission de base.

Résultats de l’analyse du Conseil

19.  Les parties à la présente instance ont convenu que l’équipement utilisé pour mettre en service la fibre noire réalise, en partie, certaines des opérations figurant dans la définition d’appareil de transmission exclu. Le principal différend vise à déterminer si l’équipement optique[9], dans la mesure où il convertit les signaux électromagnétiques en signaux lumineux, cadre de manière convenable avec la définition d’appareil de transmission exclu.

20.  À cet égard, le Conseil renvoie plus particulièrement au point c) de la définition d’appareil de transmission exclu, énoncé comme suit :

commande de la vitesse, du code, du protocole, du contenu, de la forme, de l’acheminement ou d’autres aspects semblables de la transmission de l’information.

21.  Le Conseil estime qu’il n’y a pas lieu de conclure que le terme « forme » figurant au point c) de la définition d’appareil de transmission exclu signifie uniquement la forme, la taille ou la présentation du message transmis, comme l’a fait valoir la STC. Le Conseil estime que la signification du terme « forme » est large et générale et que l’interprétation restrictive de la STC ne cadre pas avec la signification pure et simple du mot, et de manière plus générale, avec la nature étendue de la définition d’appareil de transmission exclu.

22.  Le Conseil note qu’afin de transmettre l’information au moyen de la fibre optique, on doit convertir les signaux électromagnétiques en signaux lumineux, et que l’équipement optique réalise cette opération. Le Conseil estime de fait que la conversion des signaux électromagnétiques en signaux lumineux requiert la commande de la forme de la transmission de l’information d’une forme compatible avec un support de transmission électromagnétique en une forme compatible avec un support de transmission optique. Par conséquent, le Conseil conclut, de fait, que la fonction de l’équipement optique est de commander la forme de la transmission de l’information.

23.  À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut donc que les fonctions de l’équipement optique utilisé pour mettre en service la fibre noire se limitent à celles figurant dans la définition d’appareil de transmission exclu.

24.  En outre, le Conseil note que même si l’équipement optique utilisé pour mettre en service la fibre noire ne cadre pas dans la définition d’appareil de transmission exclu, il ne pourrait pas, à lui seul, constituer une « installation de transmission ». Tel qu’il a été indiqué précédemment, le terme signifie :

tout système électromagnétique – notamment fil, câble ou système radio ou optique – ou tout autre procédé technique pour la transmission d’information entre des points d’arrivée du réseau, à l’exception des appareils de transmission exclus.

25.  Le Conseil estime que l’équipement optique utilisé pour mettre en service la fibre noire ne pourrait pas, à lui seul, constituer « un système électromagnétique ou tout autre procédé technique pour la transmission d’information entre des points d’arrivée du réseau ». L’équipement optique ne transmet pas lui-même l’information entre des points d’arrivée du réseau.

26.  Compte tenu de l’étendue du terme « appareil de transmission exclu », et du fait qu’une « installation de transmission » est réservée à la « transmission de l’information entre des points d’arrivée du réseau », le Conseil estime qu’une interprétation en vertu de laquelle le terme « installation de transmission » comprend le support de transmission de base, comme l’a soutenu AboveNet, et non l’équipement de transmission connexe, comme l’équipement optique raccordé aux deux extrémités d’une telle installation, correspond mieux à l’intention du Parlement.

27.  À la lumière de tout ce qui précède, le Conseil conclut que l’équipement optique utilisé pour mettre la fibre noire en service n’est pas une « installation de transmission », conformément à l’article 2 de la Loi.

II.   Le fournisseur de services qui raccorde de l’équipement optique à la fibre noire louée pour fournir des services de télécommunication à des tiers exploite-t-il une « installation de transmission »?

28.  Les compagnies Bell ont soutenu que le mot « exploiter » signifie « faire fonctionner ». Elles ont fait valoir que la question ne devrait pas être « qui exploite l’équipement raccordé à l’installation de transmission », mais qui exploite l’installation de transmission elle-même. Elles ont soutenu que la fibre noire est inerte, et que la prestation de fibre noire ne consiste pas à faire fonctionner l’installation de transmission. Les compagnies Bell ont plutôt fait valoir que c’est le locataire (c.-à-d. AboveNet) ou l’utilisateur final qui met la fibre noire en service.

29.  Les compagnies Bell ont fait remarquer que le fait d’accepter les arguments mis de l’avant par AboveNet et les autres parties rendrait dénué de sens les mots « ou exploitant » figurant dans la Loi, permettant ainsi aux entreprises de télécommunication de contourner les règles en matière de propriété et de contrôle étrangers simplement en louant, plutôt qu’en possédant, des installations de transmission.

30.  La STC a fait valoir que le raccordement à l’équipement optique vise à transformer la fibre noire en un système capable de transmettre de l’information.

31.  La STC a déclaré que le seul fait de posséder ou d’exploiter un système permet de définir une personne comme entreprise de télécommunication. La STC a cité un certain nombre de décisions du Conseil (publiées avant l’entrée en vigueur de la nouvelle Loi) pour soutenir l’argument voulant que la Loi actuelle, à l’instar de la Loi précédente, s’applique à certains revendeurs, et non à tous les revendeurs, en fonction de leur mode d’exploitation. La STC a fait valoir que le raccordement d’appareils de transmission exclus ou non à la fibre noire constitue un système d’exploitation et que, par conséquent, cela est conforme à la définition d’une entreprise de télécommunication.

32.  AboveNet et plusieurs des autres parties ont noté que l’entreprise qui loue la fibre noire aux revendeurs exploite la fibre noire dans la mesure où elle est responsable en tout temps de la gestion, de l’entretien et du remplacement de la fibre. Un certain nombre de ces parties ont fait remarquer qu’en fait, les revendeurs (c.-à-d. ceux qui louent la fibre noire) n’ont pas accès à l’installation et ne peuvent pas financer, concevoir, gérer, modifier, entretenir, exploiter l’installation de transmission, ni y transférer des intérêts, qui dans tous les cas demeure détenue et exploitée par l’entreprise de télécommunication dotée d’installations. Par exemple, AGSC a affirmé que (i) le revendeur doit informer le centre de surveillance du réseau exploité par l’entreprise de télécommunication lorsque la transmission est interrompue ou en dérangement, et (ii) le personnel du centre de surveillance du réseau répare l’installation de réseau (fibre) et rétablit le service, et non le personnel du revendeur.

33.  AboveNet a soutenu que le critère utilisé pour définir le terme « exploiter » en vertu de la Loi ne peut pas reposer sur la partie ayant l’intention de faire fonctionner la transmission, comme l’ont fait valoir les compagnies Bell, car toutes les parties de la chaîne, de l’entreprise de télécommunication à l’utilisateur final en passant par le client, réalisent des opérations permettant à l’installation de fonctionner. Le Conseil doit plutôt examiner les mots figurant dans la Loi et les objectifs de la Loi elle-même pour interpréter la signification du terme « exploiter ».

Résultats de l’analyse du Conseil

34.  Le Conseil fait remarquer que la définition du terme « entreprise de télécommunication » fait référence à une personne qui « possède ou exploite une installation de transmission », et la définition du terme « installation de transmission » exclu précisément les appareils visés par la définition d’appareil de transmission exclu.

35.  Selon le Conseil, un fournisseur de services qui raccorde un appareil de transmission exclu à une fibre noire louée exploite un appareil de transmission exclu, et non une installation de transmission. En effet, le Conseil souligne que plusieurs parties ont fait valoir que l’entreprise qui possède la fibre noire louée demeure responsable de la fibre sur le plan opérationnel dans la mesure où elle demeure responsable de la fibre sur le plan de l’accès, de l’entretien, de la réparation et du remplacement.

36.  Le Conseil note l’argument mis de l’avant par les parties voulant que le Parlement ait expressément inclus la définition d’appareil de transmission exclu afin que les revendeurs qui exploitent de tels appareils ne soient pas considérés comme des « entreprises de télécommunication ». En outre, après examen de la totalité de la Loi, ainsi que de son historique législatif, le Conseil est d’avis qu’il est essentiel d’établir une distinction entre les revendeurs et les fournisseurs de services dotés d’installations afin d’interpréter la Loi de manière convenable.

37.  À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut que, dans la mesure où un fournisseur de services utilise de l’équipement optique pour mettre la fibre noire louée en service, celui-ci ne possède ni n’exploite une « installation de transmission » aux termes de la Loi.

Instructions

38.  Les compagnies Bell ont fait valoir que le Conseil ne peut pas s’abstenir d’appliquer les définitions figurant dans la Loi ou de s’appuyer sur les Instructions[10] pour créer des exceptions à la règle canadienne en matière de propriété et de contrôle étrangers.

39.  La STC a soutenu que les Instructions ne concernent pas les questions relatives à la présente décision, et même si c’était le cas, il n’existe aucune raison d’utiliser une source autre que la Loi pour interpréter la Loi, à moins que celle-ci ne soit pas claire. Afin d’étayer cette position, la STC cite Driedger, Construction of Statutes (2e édition, 1983), page 87, où l’auteur écrit :

Aujourd’hui il n’y a qu’un seul principe ou solution : il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.

40.  MTS Allstream a fait valoir que l’industrie canadienne des télécommunications a d’ailleurs établi sa structure en fonction des principes fondamentaux figurant dans l’avis public Télécom 93-62 au sujet de l’interprétation de la définition du terme « entreprise de télécommunication ». Cette décision a permis à divers fournisseurs de services de participer à l’établissement de l’infrastructure des télécommunications au Canada, accroissant ainsi la concurrence dans son ensemble.

41.  Selon plusieurs des autres parties, une décision en vertu de laquelle les revendeurs mettant la fibre noire louée en service deviendraient des entreprises de télécommunication perturberait sur-le-champ l’industrie canadienne des télécommunications qui s’est développée depuis la publication de l’avis public Télécom 93-62, car elle placerait un nombre important de revendeurs en violation de la Loi et ne serait pas conforme aux objectifs de la Loi et des Instructions.

Résultats de l’analyse du Conseil

42.  Le Conseil estime que ni les Instructions ni les objectifs de la politique canadienne de télécommunication figurant à l’article 7 de la Loi ne peuvent modifier la signification des définitions figurant à l’article 2 de la Loi, visées par la présente instance. Néanmoins, les définitions doivent, comme la STC l’a soutenu et comme le Conseil l’a fait dans le cadre de la présente décision, être interprétées dans le contexte de l’ensemble de la Loi, et lues conformément à leur objectif et à l’intention du Parlement.

43.  Le Conseil estime que ses conclusions dans le cadre de la présente décision contribuent à la mise en œuvre des objectifs de la politique de télécommunication énoncés à l’article 7 de la Loi, plus particulièrement aux alinéas 7a), 7c), 7e) et 7f)[11]. En outre, étant donné que les conclusions énoncées dans la présente décision visent à se fier, dans la plus grande mesure du possible, au libre jeu du marché, le Conseil estime que ses conclusions sont conformes aux Instructions.

Conclusion

44.  À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut qu’un fournisseur de services qui loue la fibre noire à laquelle il raccorde de l’équipement optique afin de fournir des services de télécommunication au public n’est pas, pour cette raison, une « entreprise de télécommunication » aux termes de la Loi.

Secrétaire général

Documents connexes



Notes de bas de page :
[1]       La Loi est entrée en vigueur le 25 octobre 1993.

[2]       Voir la décision Télécom 92-11.

[3]     Les entreprises de télécommunication assujetties au pouvoir législatif du Parlement sont les « entreprises canadiennes » assujetties à l’établissement des tarifs et aux exigences connexes en vertu de la Loi.

[4]     Le terme « installation de transmission »  signifie tout système électromagnétique – notamment fil, câble ou système radio ou optique – ou tout autre procédé technique pour la transmission d’information entre des points d’arrivée du réseau, à l’exception des appareils de transmission exclus.

[5]     Le terme « appareil de transmission exclu » signifie tout appareil effectuant une ou plusieurs des opérations suivantes :

a)    commutation des télécommunications;
b)    saisie, réception, mise en mémoire, classement, modification, récupération, sortie ou tout autre traitement de l’information;
c)     commande de la vitesse, du code, du protocole, du contenu, de la forme, de l’acheminement ou d’autres aspects semblables de la transmission de l’information.

[6]    Ces nouveaux pouvoirs étaient d’émettre des licences de service international (article 16.1 à 16.4) et d’exiger la contribution à un fonds servant à favoriser les services de télécommunication de base.

[7]     Tel qu’il est défini aux points a), b), et c), respectivement, de la définition d’appareil de transmission exclu.

[8]     Voir la décision Télécom 84-18.

[9]     Aux fins de la présente décision, le terme « équipement optique » désigne une pièce d’équipement, ou une composante d’un appareil multifonction intégré, qui convertit des signaux électromagnétiques en signaux lumineux, et ne comprend pas toute autre composante d’un appareil intégré pouvant être doté notamment des fonctions suivantes : conversion de protocole, stockage de l’information et acheminement.

[10]    Décret donnant au CRTC des instructions relativement à la mise en œuvre de la politique canadienne de télécommunication, C.P. 2006-1534, 14 décembre 2006 (les Instructions)

[11]   Les objectifs de la politique énoncés dans la Loi, qui sont cités, sont les suivants :

      7a)  favoriser le développement ordonné des télécommunications partout au Canada en un système qui contribue à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure sociale et économique du Canada et de ses régions;
      7c)  accroître l’efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes;
      7e)  promouvoir l’utilisation d’installations de transmission canadiennes pour les télécommunications à l’intérieur du Canada et à destination ou en provenance de l’étranger;
      7f)   favoriser le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication et assurer l’efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire.

 
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