ARCHIVÉ -Décision de télécom CRTC 2010-884
Cette page Web a été archivée dans le Web
Information archivée dans le Web à des fins de consultation, de recherche ou de tenue de documents. Les décisions, avis et ordonnances (DAO) archivés demeurent en vigueur pourvu qu'ils n'aient pas été modifiés ou annulés par le Conseil, une cour ou le gouvernement. Le texte de l'information archivée n'a pas été modifié ni mis à jour depuis sa date de mise en archive. Les modifications aux DAO sont indiquées au moyen de « tirets » ajoutés au numéro DAO original. Les pages archivées dans le Web ne sont pas assujetties aux normes qui s'appliquent aux sites Web du gouvernement du Canada. Conformément à la Politique de communication du gouvernement du Canada, vous pouvez obtenir cette information dans un autre format en communiquant avec nous.
Ottawa, le 26 novembre 2010
Différend relatif aux services d’accès au réseau 9-1-1 opposant Bell Canada à la Société TELUS Communications
Numéro de dossier : 8622-B2-201009720
Dans la présente décision, le Conseil conclut que les modalités de service de la STC s’appliquent aux frais facturés en trop en ce qui a trait aux services d’accès au réseau (SAR) 9-1-1 qu’elle a fournis à Bell Canada dans les provinces de l’Alberta et de la Colombie-Britannique. De plus, le Conseil conclut que Bell Canada a fait sa demande de remboursement des frais facturés en trop en mai 2008. En ce qui concerne l’Alberta, le Conseil estime qu’il est nécessaire de déterminer quand Bell Canada a su ou aurait dû savoir à propos de la surfacturation aux termes de la Limitations Act de l’Alberta et que la question devrait être portée devant les tribunaux civils. Pour ce qui est de la Colombie-Britannique, le Conseil conclut que la réclamation de Bell Canada n’est pas visée par le délai de prescription de la période de limitation applicable et ordonne à la STC de créditer à Bell Canada tous les frais de SAR 9-1-1 facturés en trop, conformément à ses modalités de service.
Introduction
1. Le Conseil a reçu une demande de Bell Canada, datée du 11 juin 2010, dans laquelle la compagnie réclamait que le Conseil ordonne à la Société TELUS Communications (STC) de créditer à Bell Canada les frais de services d’accès au réseau (SAR) 9-1-1 que Bell Canada a payés en trop au cours de la période de 2003 à 2009 en Alberta et en Colombie-Britannique, conformément aux modalités de service de la STC.
2. On peut consulter sur le site Web du Conseil le dossier public de l'instance qui a été fermé le 27 août 2010. On peut y accéder à l'adresse www.crtc.gc.ca, sous l'onglet Instances publiques, ou au moyen du numéro de dossier indiqué ci-dessus.
3. Le Conseil estime qu’il doit se prononcer, dans la présente décision, sur les questions suivantes :
I. Les modalités de service de la STC en matière de surfacturation s’appliquent-elles aux frais de SAR 9-1-1 que Bell Canada a payés?
II. Les périodes de limitation applicables en Colombie-Britannique et en Alberta limitent-elles la réclamation de Bell Canada concernant les frais facturés en trop pour les SAR 9-1-1?
I. Les modalités de service de la STC en matière de surfacturation s’appliquent-elles aux frais de SAR 9-1-1 que Bell Canada a payés?
4. En vertu de l’entente d’interconnexion pour la fourniture du service 9-1-1 à une entreprise de services locaux concurrente (ESLC), une ESLC est tenue de remettre mensuellement à une entreprise de services locaux titulaire (ESLT) soit une mise à jour du nombre d’unités de facturation de SAR ou le nombre de numéros de téléphone activés inscrits dans le système de gestion 9-1-1. L’ESLT utilise ce nombre afin de facturer les frais d’accès au réseau 9-1-1 à l’ESLC au taux établi dans le tarif relatif au service 9-1-1 de l’ESLT.
5. Bell Canada, qui agit comme une ESLC en Colombie-Britannique et en Alberta, a indiqué qu’elle avait surestimé le nombre d’unités de facturation de SAR 9-1-1 transmis à la STC entre 2006 et 2009 en Alberta et, entre 2003 et 2009, en Colombie-Britannique. Bell Canada a ajouté qu’elle avait avisé la STC de la situation en mai 2008, qu’elle avait entrepris une vérification de ses unités de facturation de SAR
9-1-1, et qu’à l’issue de cette vérification, elle avait transmis un nombre d’unités de facturation de SAR 9-1-1 révisé à la STC en février 2009.
6. Bell Canada a en outre indiqué que, depuis mars 2009, la STC facture à Bell Canada le nombre d’unités de facturation de SAR 9-1-1 révisé, lequel est sensiblement plus bas que ce qui avait été transmis à la STC, mais que cette dernière avait refusé de créditer à Bell Canada les frais antérieurs facturés en trop, comme elle était tenue de le faire en vertu des modalités de service de la STC[1].
7. La STC est d’avis qu’elle n’a pas de correction à apporter dans ce cas puisque la prétendue erreur a été commise par Bell Canada (l’ESLC), et non par la STC, (l’ESLT) et qu’elle a facturé adéquatement ses services 9-1-1 fournis à Bell Canada en Alberta et en Colombie-Britannique, selon le nombre d’unités de facturation que Bell Canada a fourni. La STC a fait valoir que ses modalités de service ne sont donc pas applicables.
8. La STC a ajouté que le fait de permettre aux ESLC de corriger le nombre d’unités de facturation antérieures contribue à générer une grande incertitude au sein des ESLT puisqu’une ESLT ne pourrait jamais être certaine que les unités de facturation antérieures pour lesquelles elle a été facturée sont exacts.
9. Bell Canada a répliqué que les modalités de service de la STC s’appliquent également aux erreurs commises par une ESLC puisque la facture repose en partie sur les renseignements que l’ESLC a fournis.
Résultats de l’analyse du Conseil
10. Le Conseil note que les modalités de service de la STC prévoient qu’un client qui s’est vu facturer des frais récurrents, qui ne devraient pas avoir été facturés ou qui ont été facturés en trop, devrait recevoir un crédit pour l’excédent des frais rétroactivement à la date où l’erreur s’est produite, sous réserve des périodes de limitation applicables, prévues par la loi.
11. Le Conseil note que cette disposition ne fait aucune distinction quant à la partie qui a commis l’erreur. En outre, le Conseil note que l’article 120.3 des modalités de service de la STC dispose qu’avant de créditer un compte-client, la compagnie est tenue de déterminer, soit d’après ses dossiers ou ceux du client, que le client à été facturé en trop. Le Conseil estime que le libellé de ces dispositions indique clairement que l’article 120 s’applique également à la surfacturation survenue en raison de renseignements erronés fournis par une ESLC.
12. Le Conseil estime également que la position de la STC en ce qui a trait à l’incertitude liée à la possibilité pour une ESLC de corriger la facturation antérieure n’est pas fondée puisqu’une ESLC ne tire aucun avantage à surestimer ses unités de facturation de SAR 9-1-1 et, ce faisant, être facturée en trop.
13. À la lumière de ce qui précède, le Conseil estime que l’article 120 des modalités de service de la STC s’applique aux frais de SAR 9-1-1facturés en trop que Bell Canada a payés.
II. Les périodes de limitation applicables en Colombie-Britannique et en Alberta limitent-elles la réclamation de Bell Canada concernant les frais facturés en trop pour les SAR 9-1-1?
14. Les modalités de service de la STC prévoient que les frais récurrents facturés en trop doivent être crédités rétroactivement à la date où l’erreur s’est produite, sous réserve des périodes de limitation applicables, prévues par la loi.
15. En Colombie-Britannique, la Limitation Act prévoit une seule période de limitation de six ans[2].
16. En revanche, la Limitations Act de l’Alberta, prévoit deux périodes de limitation au cours desquelles un demandeur peut déposer une réclamation : (1) une période de limitation de deux ans qui débute au moment où le demandeur avait été mis au courant ou, dans les circonstances, aurait dû être au courant, des faits précis prévus à l’alinéa 3(1)a)[3] de la Limitations Act de l’Alberta en ce qui a trait à l’existence d’une réclamation; et (2) une période de limitation de dix ans qui débute lorsque la réclamation est faite, sans égard au moment où la réclamation est mise en lumière [4].
17. Bell Canada a indiqué qu’elle veut être remboursée ou créditée pour les frais facturés en trop entre mars 2003 et février 2009, conformément aux dispositions en matière de limitation de six ans de la Colombie-Britannique. Bell Canada fait remarquer qu’elle respecte, en ce qui a trait à l’Alberta, les deux périodes de limitation prévues par la Limitations Act de l’Alberta et, par conséquent, qu’elle devrait avoir droit à un crédit pour les frais de SAR 9-1-1facturés en trop entre janvier 2006 et février 2009.
18. Bell Canada a fait valoir que la date de sa réclamation devrait être mai 2008, moment où elle a avisé adéquatement la STC du différend relatif à la surestimation de ses unités de facturation de SAR 9-1-1. Bell Canada a indiqué qu’une telle approche était tout à fait conforme aux décisions antérieures du Conseil et aux modalités de service de la STC. Elle a également ajouté qu’elle s’est uniquement rendu compte qu’elle avait surestimé ses unités de facturation de SAR 9-1-1 en mai 2008 et a donc rejetté l’allégation de la STC voulant que la période de limitation de deux ans de la Limitations Act de l’Alberta ait été expirée lorsqu’elle a déposé sa réclamation.
19. La STC a indiqué que la réclamation de Bell Canada en ce qui a trait à la prétendue surfacturation en Alberta est sans objet en raison des périodes de limitation de la Limitations Act de l’Alberta. Selon la STC, Bell Canada savait ou aurait dû savoir à propos de la surfacturation dès mars 2003, ou au moins en janvier 2006, lorsque Bell Canada a commencé à transmettre son nombre d’unités de facturation de SAR 9-1-1 en Colombie-Britannique et en Alberta, respectivement.
20. D’après la STC, la question de savoir quand une partie a su ou aurait dû savoir à propos d’une erreur potentielle est un exercice d’appréciation des faits qui relève davantage des tribunaux que du Conseil. La STC a, cependant, indiqué qu’il est clair que Bell Canada aurait dû relever ses propres erreurs pendant qu’elle transmettait ses unités de facturation de SAR 9-1-1.
21. La STC a indiqué qu’à tous égards Bell Canada était au courant d’une éventuelle surfacturation en mai 2008, date à laquelle elle a avisé la STC de la potentielle surestimation de ses unités de facturation de SAR 9-1-1.
22. La STC a indiqué qu’en conséquence Bell Canada devait déposer sa réclamation dans les deux ans à partir de mai 2008, soit mai 2010. Puisque Bell Canada a déposé sa demande le 11 juin 2010, la STC a fait remarquer que Bell Canada a outrepassé la période de limitation, prévue à l’article 120.1 des modalités de service de la STC, pour demander un crédit pour les unités présumément facturées en trop en Alberta.
23. La STC est d’avis que le Conseil devrait utiliser uniquement la date de dépôt officiel pour déterminer si une réclamation a été déposée dans les périodes de limitation applicables. La STC a indiqué que le même principe s’applique tant à la Limitations Act de l’Alberta, qui prévoit que le plaignant doit demander une réparation de façon officielle devant les tribunaux d’Alberta, qu’aux conclusions du Conseil dans la décision de télécom 2010-462.
Résultats de l’analyse du Conseil
24. Le Conseil note qu’afin de déterminer si une période de limitation applicable limite la réclamation d’un client pour un remboursement de frais récurrents facturés en trop, conformément aux modalités de service de la STC, il est nécessaire de déterminer deux dates : (i) date à laquelle les périodes de limitation ont débuté et (ii) date à laquelle la réclamation a été faite.
25. En ce qui a trait à la date à laquelle la réclamation a été faite, le Conseil estime que d’utiliser la date du premier avis d’un différend de la part d’un client à l’ESLT est conforme aux modalités de service de la STC. À cet égard, le Conseil note que les modalités de service de la STC prévoient uniquement qu’un client conteste des frais facturés en trop au cours d’une certaine période de temps. En outre, l’article 121, qui établit la procédure pour contester des frais, ne prévoit pas le dépôt d’une demande officielle auprès du Conseil.
26. Le Conseil estime également qu’une telle approche est conforme à la décision de télécom 2007-10, dans laquelle le Conseil a ordonné aux ESLT d’utiliser la date de l’avis de contestation d’un client ou la date de la décision, selon l’échéance la plus rapprochée, afin de déterminer les crédits applicables aux clients pour la surfacturation. Dans la décision de télécom 2010-462, le Conseil a noté que la date à laquelle MTS Allstream Inc. avait avisé la STC d’un différend était, en l’espèce, la date de sa première intervention dans l’instance ayant mené à la décision de télécom 2007-10. Le Conseil estime toutefois que cela est conforme aux directives de la décision de télécom 2007-10 et ne signifie pas que la seule façon d’aviser une ESLT d’un différend est de déposer une demande officielle auprès du Conseil.
27. Le Conseil estime, donc, que la date à laquelle la réclamation de Bell Canada a été faite devrait être le mois de mai 2008, lorsqu’elle a avisé la STC que ses unités de facturation de SAR 9-1-1 avaient été surestimées.
28. En ce qui a trait au moment où les périodes de limitation applicables ont débuté, le Conseil note, pour la Colombie-Britannique, qu’aucun des frais facturés en trop contestés par Bell Canada n’ont été facturés avant mars 2003. Le Conseil estime, par conséquent, et les parties n’ont pas allégué autrement, que la période de limitation en Colombie-Britannique (c.-à-d., six ans) n’était pas expirée au moment où Bell Canada a avisé la STC de l’erreur en mai 2008.
29. En ce qui a trait à l’Alberta, le Conseil estime qu’afin de déterminer quand la période de limitation de deux ans de la Limitations Act de l’Alberta a débuté et donc si Bell Canada a contesté les frais au cours de cette même période, il est nécessaire de déterminer quand Bell Canada a su ou aurait dû savoir à propos de la surfacturation, aux termes de l’alinéa 3(1)a) de la Limitations Act de l’Alberta. À cet égard, le Conseil note que la STC a avancé au moins deux dates – c.-à-d., mars 2003 et janvier 2006 – auxquelles Bell Canada savait ou aurait dû savoir à propos de la surfacturation, qui, si exacte, voudrait dire que la demande de remboursement de Bell Canada en Alberta serait restreinte par le délai de prescription de la période de limitation de deux ans.
30. Le Conseil estime, toutefois, que la question de savoir à quel moment Bell Canada a été mise au courant de la surfacturation est un mélange factuel et juridique issu des délais de prescription provinciaux, et qu’il serait ainsi plus approprié de porter cette question devant les tribunaux civils plutôt que devant le Conseil. Le Conseil estime, donc, qu’il n’est pas en mesure de déterminer si les délais de prescription applicables de l’Alberta limitent la possibilité de Bell Canada d’être créditée pour la surfacturation des frais 9-1-1 dans cette province.
Conclusion
31. À la lumière de ce qui précède, le Conseil ordonne à la STC de créditer à Bell Canada tous les frais 9-1-1 facturés en trop en Colombie-Britannique pour la période de mars 2003 à février 2009, conformément aux modalités de service de la STC.
Secrétaire général
Documents connexes
- MTS Allstream Inc. – Précisions concernant l’expression « sous réserve des délais de prescription prévus par la loi » des modalités de service de la Société TELUS Communications, Décision de télécom CRTC 2010-462, 8 juillet 2010
- AT&T Global Services Canada Co. – Demande visant un allègement à l'égard de l'application des frais du dispositif d'extension du service de base aux configurations comportant le service de multiplexage DS-1 à DS-0 du réseau numérique propre aux concurrents, Décision de télécom CRTC 2007-10, 15 février 2007
Notes de bas de page :
[1] L’article 120 des modalités de service de la STC traite de la surfacturation.
[2] Limitation Act, R.S.B.C. 1996, c. 266, ss. 3(5).
[3] Le paragraphe 3(1) dispose que :
sous réserve de l’article 11, si un plaignant ne demande pas une ordonnance corrective dans les :
- Deux ans, après la date à laquelle un plaignant savait ou, dans les circonstances, aurait dû savoir,
- que le préjudice pour lequel un plaignant demande une ordonnance corrective s’est produit,
- que le préjudice était attribuable à la conduite de la partie défenderesse,
- que le préjudice, en présumant la responsabilité de la partie défenderesse, nécessite la tenue d’une instance,
- Ou 10 ans après que la réclamation a été faite,
selon la période d’expiration la plus rapprochée, la partie défenderesse, en se servant de la présente loi en défense, a droit d’invoquer l’irresponsabilité, en ce qui a trait à la réclamation.
[4] Limitations Act, R.S.A. 2000, c. L-12, ss. 3(1).
- Date de modification :