ARCHIVÉ - Décision de télécom CRTC 2007-29

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Décision de télécom CRTC 2007-29

  Ottawa, le 3 mai 2007
 

Société TELUS Communications - Demande visant à exclure certains résultats de la qualité du service du plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail du 1er juillet 2002 au 31 décembre 2003

  Référence : 8660-T66-200505159
  Dans la présente décision, le Conseil conclut que la Société TELUS Communications (STC) doit exclure du plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail les indicateurs de qualité du service de détail 2.1A, 2.2A et 2.5 pour les périodes touchées en 2003 par des incendies de forêt, des inondations et une rupture de câble. Le Conseil ordonne à STC de rajuster les résultats des indicateurs 1.5, 2.1B et 2.2B et d'appliquer un crédit aux clients aux abonnés inscrits à la date de la présente décision.
  Les opinions minoritaires des conseillers French, Arpin et Noël sont jointes à la présente.
 

La demande

1.

Le 26 avril 2005, TELUS Communications Inc., maintenant appelée la Société TELUS Communications (STC)1, a déposé une demande d'exclusion enjoignant au Conseil de rajuster les résultats de quatre indicateurs de qualité du service (QS) en raison de trois évènements perturbateurs. En l'occurrence, il s'agissait des incendies de forêt à l'intérieur de la Colombie-Britannique et du sud-ouest de l'Alberta entre la mi-juillet et septembre 2003, d'une rupture de câble à Vancouver le 22 octobre 2003 et des inondations dans le Lower Mainland de la Colombie-Britannique survenues durant la même semaine que la rupture de câble. STC a relevé que ces évènements se sont produits au cours d'un très court laps de temps dans la première période de rajustement tarifaire provisoire, soit du 1er juillet 2002 au 31 décembre 2003. Les quatre indicateurs et les mois concernés en 2003 sont les suivants :
 
  • 2.1A (zone urbaine) et 2.1B (zone rurale), Rapports de dérangement (pannes) réglés en moins de 24 heures (d'août à décembre pour l'indicateur 2.1A, et d'août à novembre pour l'indicateur 2.1B);
 
  • 2.2A (zone urbaine) et 2.2B (zone rurale), Rendez-vous pour réparation respectés (d'août à octobre, et en décembre pour l'indicateur 2.2A, et d'août à décembre pour l'indicateur 2.2B);
 
  • 1.5 - Accès au bureau d'affaires (de juillet à octobre);
 
  • 2.5 - Accès au centre de réparations (de juillet à octobre).
 

Historique

2.

Dans la décision Plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail et questions connexes, Décision de télécom CRTC 2005-17, 24 mars 2005(la décision 2005-17), le Conseil a finalisé un plan de rajustement tarifaire (PRT) concernant la QS de détail pour les grandes entreprises de services locaux titulaires (ESLT). Le Conseil a fixé deux périodes de rajustement tarifaire, soit du 1er juillet 2002 au 31 décembre 2003 et du 1er janvier au 31 décembre 2004, pour le calcul du PRT pour la période provisoire. Il a décidé qu'en vertu du plan définitif, les rajustements tarifaires seraient calculés sur une base annuelle commençant le 1er janvier 2005.

3.

Aucune modification n'a été apportée aux 13 indicateurs QS utilisés dans le PRT provisoire. La valeur globale de rajustement maximale pour tous les indicateurs est toujours fixée à 5 % des revenus du service local, dont la valeur de rajustement maximale pour chaque indicateur représente un treizième de ce montant. Dans ce but, les indicateurs présentant un caractère urbain et rural sont considérés comme un seul indicateur. Le rendement des ESLT sur les indicateurs fait toujours l'objet d'un contrôle mensuel avec des rajustements tarifaires évalués d'après le rendement moyen de chaque indicateur au cours de la période de rajustement tarifaire.

4.

Dans la décision 2005-17, le Conseil a estimé qu'il conviendrait d'adopter un mécanisme en vertu duquel des rendements QS insuffisants pourraient être exclus des résultats QS des ESLT. Le Conseil a conclu également qu'un tel mécanisme d'exclusion devrait être suffisamment souple pour tenir compte des effets des catastrophes naturelles et d'autres évènements perturbateurs qui, de leur nature même, sont imprévisibles et indépendants de la volonté des ESLT. De plus, il a conclu que chaque évènement perturbateur, que ce soit une catastrophe naturelle, un acte de terrorisme ou une interruption de travail, devrait être évalué en fonction des circonstances en cause, et que toute modification des résultats QS aux fins du PRT devrait être effectuée au cas par cas.

5.

Le Conseil a également conclu que les demandes d'exclusion devront comprendre les renseignements suivants : 1) les évènements perturbateurs à l'origine de la demande d'exclusion; 2) les effets des évènements perturbateurs sur des indicateurs QS particuliers; 3) les rajustements proposés à ces résultats QS.

6.

Le Conseil a invité les ESLT à déposer des demandes d'exclusion au plus tard le 25 avril 2005 pour les évènements perturbateurs touchant les indicateurs QS durant la période provisoire du régime de rajustement tarifaire. Il a donné jusqu'au 9 mai 2005 aux parties pour déposer leurs observations et jusqu'au 16 mai 2005 pour les observations en réplique.
 

Processus

7.

Le 25 avril 2005, STC a signifié au Conseil et aux parties intéressées dans l'avis Plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail et questions connexes, Avis public de télécom CRTC 2003-3, 27 mars 2003 (l'avis 2003-3), qu'elle ne pourrait pas, en raison de circonstances indépendantes de la volonté de la compagnie, déposer de demande d'exclusion à cette date, mais prévoyait le faire au plus tard le 27 avril 2005.

8.

Le 26 avril 2005, STC a déposé une demande d'exclusion en vertu du plan provisoire. L'Association des consommateurs du Canada, l'Organisation nationale anti-pauvreté et l'Union des consommateurs (les Groupes de défense des consommateurs) ont déposé des observations le 9 mai 2005. STC a répondu le 16 mai 2005 et a, par la suite, modifié sa réponse le 19 mai 2005.

9.

Le Conseil a adressé des demandes de renseignements à STC le 24 février 2006. Le 22 mars 2006, STC a demandé une prolongation jusqu'au 24 avril 2006 pour répondre aux demandes de renseignements. Le Conseil lui a accordé ce délai et STC a déposé ses réponses le 24 avril 2006.
 

Positions des parties

 

1) Évènements perturbateurs à l'origine de la demande de rajustement ou d'exclusion

 

STC

  Incendies de forêt

10.

Selon STC, la saison des incendies de forêt de 2003 était la plus importante en Colombie-Britannique depuis 50 ans, détruisant une partie importante des installations physiques et laissant plus de 5 000 clients sans service. STC a souligné que le gouvernement de la Colombie-Britannique a déclaré un état d'urgence le 1er août 2003 au niveau de la province, état qui est resté en vigueur jusqu'au 14 septembre 2003.
  Rupture de câble

11.

D'après STC, une tierce partie qui effectuait des travaux de construction sur un terrain adjacent à un conduit de STC a coupé un câble principal à Vancouver, interrompant le service pour environ 10 000 clients et nécessitant un redéploiement de personnel pour rétablir ce service. La compagnie a indiqué que l'accès à 10 000 paires de câble de cuivre pour rétablir le service avait demandé un effort inhabituel, à savoir un grand nombre de techniciens travaillant sans arrêt, creusant à travers 60 pieds de conduit en béton, 14 pieds en dessous du niveau du sol, pour atteindre les câbles de cuivre. Elle a indiqué également que les techniciens, après avoir atteint les câbles, avaient dû les adapter individuellement, les épisser et les tester.
  Inondations

12.

STC a affirmé que, selon Environnement Canada, les pluies semblables aux pluies de mousson, qui sont tombées au rythme de 40 millimètres par heure dans quelques régions, avaient été le « plus grand déluge frappant la côte ouest en 200 ans », brisant des records de précipitations dans de nombreux endroits. Elle a fait valoir que les inondations avaient contraint approximativement 1 200 personnes à évacuer leur domicile à la fin octobre 2003 et causé des dommages aux principales installations de transport de fibre optique entre Whistler et Pemberton.

13.

La société a indiqué que des clients avaient été privés de service pendant de longues périodes, les équipes ayant été incapables d'atteindre les sites endommagés tant que l'eau ne s'était pas retirée et que les routes et les ponts n'étaient réparés. De plus, elle avait fourni des centaines de lignes téléphoniques d'urgence aux centres d'urgence, ce qui avait soustrait le personnel des activités de réparation.
 

Les Groupes de défense des consommateurs

14.

Les Groupes de défense des consommateurs ont convenu que les évènements identifiés par STC répondaient aux critères que le Conseil a définis comme étant des évènements perturbateurs.
 

2) Effets des évènements perturbateurs sur des indicateurs QS particuliers

 

STC

  Incendies de forêt

15.

Selon STC, les incendies de forêt avaient eu des répercussions considérables sur son usine et ses activités, 80 kilomètres (km) de fibre optique, 100 km de câble de cuivre ainsi que les structures de soutènement connexes ayant été endommagés ou détruits. Elle a également fait valoir que la destruction des installations d'électricité provinciales s'était traduite par l'épuisement des batteries de secours et l'interruption du service jusqu'au rétablissement du courant. Par ailleurs, la compagnie a soutenu que les réparations permanentes avaient été retardées par l'embrasement de nouveaux feux.

16.

STC a indiqué que le personnel dans les centres d'urgence avait travaillé 24 heures sur 24 pour rétablir le service. Elle a rajouté que, durant cette période, elle avait reçu un nombre d'appel exceptionnellement élevé, tant des clients demandant des réparations que de particuliers essayant d'avoir des nouvelles sur l'état de leur famille, leurs amis et des biens situés dans les zones touchées.

17.

STC a soutenu que son incapacité à respecter les normes à l'égard des indicateurs qui mesurent les fonctions du centre d'appel, à savoir répondre aux appels faits auprès du centre de réparations dans les 20 secondes (l'indicateur 2.5) et répondre aux appels faits à son bureau d'affaires dans les 20 secondes (l'indicateur 1.5), était directement liée aux incendies de forêt, dont les premiers effets se sont fait sentir en juillet, en août, en septembre et en octobre 2003. Elle a également affirmé que l'indicateur avait été affecté quand les séries d'incendies se sont produites, et l'était encore lorsque les feux ont été maîtrisés et que les clients attendaient le rétablissement du service dans des zones particulières. Selon STC, la durée des appels de réparation pourrait avoir été plus longue que d'habitude en raison de la nature grave et unique des évènements affectant le service.

18.

STC a indiqué que les répercussions négatives des séries d'incendies sur sa capacité à respecter les normes à l'égard des deux indicateurs qui mesurent les fonctions de réparation - les indicateurs 2.1 et 2.2 - s'étaient prolongées et présentaient de multiples facettes pour cinq raisons : 1) un nombre accru de rendez-vous pour les pannes et les réparations du service; 2) des délais pour accéder aux installations endommagées; 3) une durée anormale nécessaire pour réparer les dégâts; 4) une capacité réduite dans les zones qui avaient alloué des ressources pour contribuer à cet effort; et 5) une accumulation de travaux créée aussi bien dans les zones touchées que dans celles qui avaient fourni des ressources destinées aux zones affectées.
  Rupture de câble

19.

Selon STC, la rupture de câble a eu des répercussions négatives sur les activités du centre d'appel en octobre et sur les fonctions de réparation en novembre et en décembre 2003.
  Inondations

20.

STC a affirmé que les inondations avaient eu une incidence sur les fonctions du centre d'appel principalement en octobre mais que leur incidence sur les activités de réparation avait duré plus longtemps et qu'elle s'était poursuivie en novembre et décembre 2003.

21.

Quant aux indicateurs 2.1A et 2.1B, STC a déclaré que le nombre de rapports de dérangements et de pannes réglés avait augmenté de 61 % entre juin et septembre 2003 et était resté élevé pour le reste de 2003.

22.

Concernant l'indicateur 2.2, STC a indiqué que le nombre de commandes de réparations réalisées entre juillet et décembre 2003, à l'exception d'août, était sensiblement plus élevé qu'au cours des autres mois de 2003. Toujours selon STC, le nombre de commandes de réparations effectuées avait augmenté de 37 % entre juin et novembre 2003 et était resté à des niveaux élevés pour le reste de l'année 2003.

23.

En ce qui concerne l'indicateur 2.5, STC a annoncé qu'entre juin et octobre 2003 le volume d'appels reçus au centre de réparations avait augmenté de 43 % et le volume d'appels auxquels le centre de réparations avait répondu avait crû de 32 %. Elle a également fait valoir que l'allongement de la durée de ces appels de clients, qui, selon elle, était inévitable en raison de la gravité des évènements et de l'étendue des dommages matériels et au réseau, se traduisait par la baisse du nombre de ces appels auquel le centre de réparations avait été capable de répondre pendant août 2003.

24.

Pour ce qui est de l'indicateur 1.5, STC a souligné que le bureau d'affaires avait répondu à un nombre élevé d'appels de juillet à octobre 2003. Selon STC, cette augmentation était due aux appels provenant de clients qui avaient choisi de ne pas attendre de réponse d'un centre de réparations surchargé et qui avaient plutôt appelé le bureau d'affaires, ainsi qu'aux appels de particuliers soucieux de leurs amis, de leur famille et de leurs biens.
 

Les Groupes de défense des consommateurs

25.

Selon les Groupes de défense des consommateurs, STC sollicitait des rajustements à ses résultats QS pendant plusieurs mois alors qu'il n'y avait pas d'écart notoire entre le nombre d'incidents traités en 2003 et le nombre enregistré pour les mêmes mois en 2002 ou en 2004.

26.

Les Groupes de défense des consommateurs ont fait valoir que STC tentait de rajuster les résultats d'août à décembre 2003 en ce qui concerne l'indicateur 2.1A, et d'août à novembre 2003 en ce qui a trait à l'indicateur 2.1B, alors que seuls les volumes mensuels de septembre à novembre 2003 différaient considérablement des volumes enregistrés les mêmes mois en 2002 ou en 2004.

27.

Quant à l'indicateur 2.2, les Groupes de défense des consommateurs ont annoncé que STC cherchait à rajuster les résultats d'août à octobre et de décembre 2003 pour l'indicateur 2.2A, et d'août à décembre 2003 pour l'indicateur 2.2B, même si les volumes mensuels de septembre à décembre 2003 étaient supérieurs aux volumes enregistrés en 2002 ou en 2004.

28.

Concernant l'indicateur 2.5, les Groupes de défense des consommateurs ont indiqué que STC tentait de rajuster les résultats QS de cet indicateur pour la période allant de juillet à octobre 2003 alors que, comparés aux mêmes mois de 2002 et de 2004, les volumes d'appels étaient bien plus élevés seulement durant les mois de septembre et d'octobre 2003. De plus, selon eux, si les volumes d'appels pour septembre et octobre 2003 étaient nettement supérieurs au volume d'appels auxquels on avait répondu en 2002 ou en 2004, le volume de réponse aux appels en août 2003 se situait en dessous des volumes enregistrés en 2002 ou en 2004.

29.

D'après les Groupes de défense des consommateurs, bien que STC ait essayé de rajuster les résultats QS s'appliquant à l'indicateur 1.5 pour la période couvrant juillet à octobre 2003, seuls les volumes d'octobre 2003 avaient été nettement supérieurs aux volumes enregistrés en 2002 ou en 2004.

30.

Les Groupes de défense des consommateurs ont déclaré avoir examiné l'information procurée au Conseil dans le cadre des exigences en cours en matière de rapport QS, en plus de revoir le nombre d'incidents présentés par STC. Selon les Groupes de défense des consommateurs, cette information ne cautionnait pas l'étendue ou la durée des répercussions négatives identifiées par STC dans sa demande.

31.

Les Groupes de défense des consommateurs ont relevé, dans la réponse fournie par STC à la lettre du Conseil, datée du 16 juin 2003 et concernant les mesures qu'elle avait prises pour remettre ses résultats QS au niveau minimum fixé par la norme, notamment pour l'indicateur 1.5, que la compagnie avait ajouté de nouveaux représentants au service à la clientèle et qu'elle avait affirmé qu'elle ne pourrait ressentir concrètement l'effet positif de ces nouveaux employés qu'après qu'ils aient occupé ce poste trois mois.

32.

Concernant l'indicateur 2.5, les Groupes de défense des consommateurs ont noté que STC avait indiqué que les ressources réaffectées pour aider à gérer les répercussions causées par plusieurs pannes sérieuses de réseau, des problèmes de stabilité de réseau et des irruptions de virus informatiques avaient affecté ses résultats pour septembre 2003.

33.

Les Groupes de défense des consommateurs ont soutenu que STC avait mentionné, dans son rapport d'exception de novembre 2003, avoir respecté la norme à l'égard de l'indicateur 2.2A pour ce mois-là et qu'elle continuerait à la respecter. Ils ont également relevé que STC s'attendait à respecter la norme à l'égard de l'indicateur 2.2B au 31 décembre 2003. Selon eux, il serait inapproprié de rajuster les résultats de décembre, STC ayant déclaré qu'elle respecterait la norme en décembre.

34.

De plus, les Groupes de défense des consommateurs ont remarqué que STC avait expliqué, dans son rapport d'exception d'octobre 2003, qu'elle avait découvert qu'en ce qui concerne les indicateurs 2.1A et 2.1B ainsi que 2.2A et 2.2B, les types de pannes signalées étaient totalement différents des pannes déclarées précédemment et qu'elle était actuellement en train d'élaborer et de mettre en place des plans d'action pour régler ces nouveaux types de pannes.

35.

Les Groupes de défense des consommateurs ont fait valoir que, d'après l'évaluation des données du volume de STC ainsi que l'explication et les notes tirées des demandes d'exception de résultats QS présentées par STC, et enfin, compte tenu de ses résultats QS inférieurs à la norme s'appliquant à un certain nombre d'indicateurs allant jusqu'à la période couvrant juillet à décembre 2003, il ne serait pas judicieux d'approuver la demande telle que l'a présentée STC.

36.

Les Groupes de défense des consommateurs ont affirmé qu'autrement il conviendrait de rajuster les résultats uniquement pour les périodes suivantes de 2003 : l'indicateur 2.5 (septembre et octobre); l'indicateur 1.5 (octobre); l'indicateur 2.2A (août, septembre et octobre); et les indicateurs 2.2B, 2.1A et 2.1B (août, septembre, octobre et novembre).
 

Réponse de STC

37.

STC a expliqué qu'elle avait suivi un processus rigoureux dans lequel elle avait examiné les évènements perturbateurs et leurs conséquences, envisagé les répercussions possibles des évènements perturbateurs sur ses résultats QS, analysé ses résultats QS et déterminé où et quand les évènements perturbateurs avaient affecté ses résultats QS. Selon STC, ce n'était qu'après avoir déterminé cette cause et ces effets qu'elle en était arrivée à tirer des conclusions sur la durée des répercussions que les évènements perturbateurs ont eu sur ses résultats QS.

38.

STC a déclaré que son analyse a révélé qu'il y avait une différence entre le moment où les évènements perturbateurs avaient touché les indicateurs liés au centre d'appel et celui où ils avaient influencé sur le rendement concernant les indicateurs liés à la fonction de réparation. Selon STC, l'incidence sur le rendement associé au centre d'appel s'était fait sentir plus rapidement, se manifestant entre juillet et octobre 2003, et l'incidence sur le rendement associé aux réparations avait été inévitablement plus longue, soit d'août à décembre 2003. STC a rajouté qu'elle souhaitait des rajustements uniquement pour les mois dans lesquels ses résultats avaient été touchés par des évènements indépendants de sa volonté.

39.

STC a fait valoir qu'il était faux de présumer que la durée des répercussions d'un évènement perturbateur correspondrait exactement à une seule mesure comme le nombre d'incidents du centre d'appel et de l'équipe de réparation enregistré par une compagnie. Elle a ajouté que son rendement pour les quatre indicateurs en question avait été affecté, non seulement par une augmentation du nombre d'appels et de réparations, mais aussi par des facteurs tels que l'inaccessibilité des sites touchés par les évènements perturbateurs, les pannes de services qui prenaient plus de temps à réparer en raison de la nature du dommage causé au réseau, et le redéploiement du personnel d'autres régions de la province pour aider à réparer les dégâts.

40.

STC a noté que les Groupes de défense des consommateurs avaient observé que le nombre d'appels auxquels le centre de réparations avait répondu en juillet et en août 2003 n'était pas supérieur à celui enregistré au cours des mêmes mois en 2002 ou en 2004. STC a également relevé que, sur cette seule base, les Groupes de défense des consommateurs en avaient conclu que les évènements perturbateurs n'avaient pas influé sur son rendement au cours de ces mois.

41.

Selon STC, cette conclusion allait à l'encontre des faits établis dans sa demande sous deux aspects significatifs. Elle a signalé, d'une part, au cours de juillet et d'août 2003, une augmentation considérable du nombre d'appels auxquels le centre de réparations avait renoncé à répondre - et qui, par conséquent, ne figuraient pas au nombre d'appels auxquels on avait répondu - et ces niveaux étaient demeurés élevés jusqu'en octobre 2003. D'autre part, selon STC, son rendement quant à l'indicateur 2.5 avait chuté brutalement passant de plus de 90 % entre février et juin 2003, à 57 % en juillet et à 44 % en août 2003. Toujours selon STC, ce rendement était resté faible, soit à 68 % en septembre et à 66 % en octobre 2003, puis était remonté au-dessus de 80 %, niveau auquel il est resté jusqu'à la fin de 2004.

42.

STC a déclaré qu'en dépit de cette preuve contraire, les Groupes de défense des consommateurs avaient affirmé qu'étant donné que la compagnie n'avait pas répondu à un plus grand nombre d'appels entre juillet et août 2003, les évènements perturbateurs n'avaient pas eu d'incidence sur son rendement à l'égard de cet indicateur, si bien que les mois en question devraient être exclus du rajustement proposé par STC pour ses résultats QS. STC a soutenu que ceci n'était qu'un exemple des conclusions fallacieuses sur la cause et l'effet, où seulement un des nombreux facteurs ayant touché la capacité de STC à respecter les normes s'appliquant aux indicateurs QS a été pris en considération.

43.

STC a indiqué que les Groupes de défense des consommateurs avaient également affirmé que les observations faites par STC dans les rapports d'exclusion qu'elle avait déposés pendant la période où se sont produits les évènements perturbateurs n'insistaient pas sur la gravité des répercussions desdits évènements. STC a soutenu que les rapports d'exclusion servaient à rendre un rapport mensuel immédiat sur les indicateurs QS qui étaient tombés au-dessous de la norme pour un laps de temps déterminé, à donner une brève explication sur la cause du non-respect de la norme, et à proposer un plan d'action pour corriger la situation. Selon STC, il n'était pas question de justifier l'incidence d'un évènement perturbateur puisque les déclarations faites dans un rapport d'exclusion faisaient partie de l'évaluation première et immédiate par les ESLT d'une situation et n'étaient pas censées constituer une analyse complète d'un évènement perturbateur et de ses répercussions.

44.

Selon STC, elle avait ressenti immédiatement les effets des évènements perturbateurs sur ses activités et elle les avait, donc, mentionnés dans quelques rapports d'exclusion à cette époque. Cependant, elle a affirmé que toute l'ampleur des conséquences n'avait été totalement comprise qu'à la fin des évènements et une fois la reprise des activités normales. D'après STC, ce ne fut qu'à ce moment-là qu'elle a été à même de tirer des conclusions sur les répercussions des évènements perturbateurs sur l'ensemble de la série des mesures QS.

45.

D'après STC, les Groupes de défense des consommateurs ont également signalé qu'elle avait mentionné d'autres facteurs dans ses rapports d'exclusion pour expliquer les résultats QS inférieurs à la norme entre juillet et décembre 2003. STC a reconnu que de nombreux facteurs contribuaient au rendement QS d'une ESLT, puisque toute entreprise était touchée par des facteurs externes et internes. Selon STC, étant donné l'ampleur même des évènements perturbateurs et l'omniprésence de l'incidence sur ses activités, il n'était que trop logique d'en conclure que les évènements perturbateurs étaient la cause principale de la détérioration de son rendement.

46.

En réponse aux demandes de renseignements2, STC a fourni de plus amples détails sur la rupture de câble qui s'est produite en octobre 2003. STC a indiqué que les clients et les entrepreneurs effectuant des constructions et des excavations en Colombie-Britannique pouvaient contacter un organisme à but non lucratif, BC One Call, pour repérer des installations de service public avant de creuser. Elle a noté que BC One Call a coordonné les demandes des compagnies membres qui possédaient et exploitaient des installations enfouies, dont STC. La compagnie a fait valoir que BC One Call a transmis les appels aux compagnies membres pour examen et action, au besoin. Elle a également fait valoir que BC One Call a avisé les entrepreneurs qu'ils n'étaient pas libres de creuser tant que toutes les compagnies membres averties ne les avaient pas contactés.

47.

STC a indiqué que BC One Call avait pris contact avec elle pour le site en question le 16 octobre 2003. Selon STC, dans ce cas, l'entrepreneur avait agi sans avoir obtenu son accord.
 

3) Méthode proposée pour rajuster les résultats QS

 

STC

48.

STC a proposé une méthode qui comprenait le rajustement ou la régularisation de ses résultats QS touchés par les évènements perturbateurs afin de : a) faire abstraction des effets des évènements perturbateurs et b) rétablir les résultats QS au niveau auquel ils auraient probablement été sans les évènements perturbateurs. Selon STC, elle n'a pas cherché à exclure l'ensemble des résultats QS s'appliquant à un indicateur donné au cours de la période concernée. Elle a plutôt cherché à soustraire la partie de ses résultats QS qui était logiquement imputable aux évènements perturbateurs. STC a fait valoir qu'une telle approche dresserait un portrait bien plus précis de l'incidence des évènements perturbateurs.

49.

Afin d'évaluer ce que ses résultats QS auraient été sans les évènements perturbateurs, STC a :
 
  • calculé le ratio de son rendement obtenu durant chaque mois de 2003 qui n'avait pas été affecté par les évènements perturbateurs par rapport à son rendement enregistré durant le mois correspondant en 2004;
 
  • calculé la moyenne de ces ratios mensuels pour arriver au ratio mensuel moyen de son rendement enregistré en 2003 comparé à son rendement de 2004;
 
  • rajusté son rendement enregistré durant chacun des mois de 2003 qui a été touché par les évènements perturbateurs.

50.

Il en a découlé, selon STC, que chaque mois en 2003 qui avait été touché par les évènements perturbateurs se trouvait désormais au même ratio correspondant au mois équivalent en 2004 que les mois de 2003 dont les résultats n'avaient pas été modifiés par les évènements perturbateurs. D'après STC, elle a pris en compte les variations saisonnières des résultats QS s'appliquant à ces indicateurs et, par conséquent, cette méthode d'estimation des résultats QS pour les mois touchés se révélait plus exacte que si elle avait utilisé la moyenne des résultats enregistrés en 2003 pour les mois qui n'avaient pas été touchés par les évènements perturbateurs. Elle a soutenu qu'elle avait utilisé cette méthode pour trois des indicateurs. Dans le cas de l'indicateur 2.1, cependant, STC a indiqué qu'elle avait substitué ses résultats de 2002 pour rajuster ceux de 2003 puisque son système de suivi des réparations ne reflétait pas correctement le rendement réalisé durant le deuxième semestre de 2004.
 

Les Groupes de défense des consommateurs

51.

Les Groupes de défense des consommateurs ont déclaré que, même si l'approche de STC semblait, à première vue, raisonnable, il était purement impossible de savoir ou de déterminer quels auraient été les résultats QS sans les évènements perturbateurs, et que l'on pouvait tout au plus avancer des hypothèses ou des suppositions sur ce que les résultats auraient été.

52.

Selon les Groupes de défense des consommateurs, baser le rajustement substitutif sur la moyenne du rendement obtenu entre les mois non concernés de 2003 et de 2004 impliquait qu'il y avait un rapport entre la manière dont le futur rendement d'un indicateur en 2004 reproduisait son rendement passé en 2003 dans les mois non touchés. Les Groupes de défense des consommateurs ont soutenu que le rajustement substitutif présupposait que ce rapport moyen se serait maintenu durant les mois touchés en 2003.

53.

D'après les Groupes de défense des consommateurs, on pouvait trouver un exemple de l'inexactitude d'utilisation du ratio moyen entre 2003 et 2004 en examinant le rajustement de l'indicateur 2.5. Ils ont fait valoir que, si l'approche de STC déterminait un ratio mensuel moyen de 1,0 pour ses résultats de 2003 à 2004, le ratio variait fortement entre les mois. Ils ont soulevé, par exemple, que le ratio des résultats relevé entre janvier 2003 et janvier 2004 était de 0,9 alors que celui relevé entre décembre 2003 et décembre 2004 s'élevait à 1,09, soit un écart d'environ plus ou moins 10 %. Selon eux, la variation des ratios montrait bien qu'il n'y avait pas de rapport constant, si jamais il y en avait un, entre les niveaux de rendement de 2003 à 2004.

54.

Les Groupes de défense des consommateurs ont affirmé qu'une méthode d'approche plus appropriée aurait consisté à retirer des résultats QS la période de temps couverte par les évènements perturbateurs pour les indicateurs concernés. Ils ont ajouté que, si les évènements perturbateurs duraient un mois entier, il faudrait alors ignorer le résultat mensuel pour l'indicateur du calcul utilisé pour déterminer tout rajustement tarifaire en vertu du PRT pour la QS de détail.

55.

Les Groupes de défense des consommateurs ont relevé que cette approche était conforme à la position de STC prise dans l'instance amorcée par l'avis 2003-3, dans laquelle elle avait indiqué que, si l'on accordait un rabais pour un évènement perturbateur, les rajustements au calcul du PRT pouvaient comprendre la suppression des indicateurs QS.

56.

Les Groupes de défense des consommateurs ont soutenu que les rajustements des résultats de STC ne devraient porter que sur la période de temps où les évènements perturbateurs indépendants de sa volonté avaient eu une incidence sur les résultats QS de STC. Selon eux, appliquer des rajustements aux mois où les évènements perturbateurs n'avaient pas influé sur les résultats ébranlerait le principe et les objectifs du PRT de la QS de détail.
 

Réponse de STC

57.

STC a affirmé que sa méthode visait à inclure, plutôt qu'à effacer, les rendements qui auraient été probablement inférieurs à la norme sans les évènements perturbateurs. Elle a soutenu que plusieurs de ses résultats QS sont restés au-dessous de la norme même après les avoir rajustés en fonction des évènements perturbateurs, empêchant donc les dissimulations auxquelles font référence les Groupes de défense des consommateurs.

58.

Concernant l'indicateur 2.2A, STC a signalé que, même si elle avait tenté de rajuster ses résultats QS pour août, septembre, octobre et décembre 2003, tous sauf celui d'août étaient restés inférieurs à la norme même après les rajustements proposés pour répercuter les évènements perturbateurs. De plus, STC a noté que son rendement annuel moyen (RAM) non rajusté pour cet indicateur se montait à 87,7 % et que le RAM rajusté s'élevait à 88,2 %. Selon elle, étant donné que la norme était fixée à 90 %, elle n'avait pas proposé de changement à son rajustement tarifaire pour cet indicateur. De plus, en ce qui concerne les indicateurs 2.2B, 1.5 et 2.1B, tous ses résultats pour chacun des mois touchés par les évènements perturbateurs sont restés inférieurs à la norme même après les avoir rajustés en fonction des évènements perturbateurs, et elle n'avait proposé que des changements différentiels au niveau de son rajustement tarifaire pour ces indicateurs.

59.

Selon STC, si, comme le suggéraient les Groupes de défense des consommateurs, elle avait fait abstraction des résultats pour les périodes touchées par les évènements perturbateurs pour les indicateurs mentionnés auparavant, elle aurait caché les résultats qui auraient été inférieurs à la norme même sans les évènements perturbateurs. STC a soutenu, par exemple, qu'en écartant les résultats du rendement pour l'indicateur 2.2B, elle aurait caché les résultats de 86 % en août, de 85 % en septembre et octobre et de 84 % en novembre et en décembre, tous étant inférieurs à la norme de 90 % pour cet indicateur.

60.

STC a reconnu qu'il était impossible de reconstituer la période pendant laquelle les évènements perturbateurs s'étaient produits ainsi que de faire abstraction de ces évènements, pour pouvoir de façon certaine établir ce que ses résultats auraient été sans lesdits évènements. Cependant, selon STC, ceci ne signifiait pas que la méthode était erronée. Elle a avancé, plutôt, que les résultats rajustés reposaient nécessairement sur des analyses poussées et des estimations minutieuses. STC a affirmé qu'il était certainement possible d'estimer ce qu'auraient été les résultats.

61.

Quant à l'affirmation faite par les Groupes de défense des consommateurs selon laquelle le ratio des résultats obtenus par STC en 2003 et ceux de 2004 pour les mois concernés était différent de celui des mois non touchés, STC a soutenu que son analyse de tendance des données couvrant la période de juillet 2002 à décembre 2004 a prouvé, au contraire, que le rapport s'était vérifié pendant cette période de temps. Elle a noté que les Groupes de défense des consommateurs s'étaient opposés à l'utilisation d'un ratio mensuel moyen pour rajuster les résultats QS puisqu'un tel ratio ne reflétait pas la variabilité entre les ratios mensuels. Selon elle, cette objection était peu judicieuse et elle a affirmé avoir utilisé un ratio mensuel moyen pour rajuster ses résultats QS précisément parce que cette méthode écartait toute variabilité entre les ratios mensuels.

62.

STC a soutenu que sa méthode était valable et ne cachait pas de résultats susceptibles d'être inférieurs à la norme même en l'absence d'évènements perturbateurs. Selon STC, le rajustement des résultats QS dans les mois touchés par les évènements perturbateurs au niveau de ce qu'ils auraient probablement été sans ces évènements était la bonne façon d'éviter les dissimulations des résultats inférieurs à la norme, ce qui aurait pu se produire si ces résultats avaient été simplement exclus, comme les Groupes de défense des consommateurs l'ont suggéré.

63.

STC a soutenu qu'aucun argument relevé dans les observations faites par les Groupes de défense des consommateurs ne pouvait faire obstacle à l'adoption des rajustements proposés à ses résultats QS pour les mois touchés par l'arrivée, pour ainsi dire simultanée, des évènements perturbateurs. Toujours selon STC, les arguments mêmes avancés par les Groupes de défense des consommateurs ont rendu impérative l'adoption de sa proposition par le Conseil, telle qu'elle l'a précisément présentée.

64.

Selon STC, si le Conseil adoptait les rajustements qu'elle a proposés, le RAM s'appliquant à la première période provisoire de deux des indicateurs - 2.5 (83,3 %) et 2.1A (80,3 %) - serait supérieur à la norme fixée à 80 % par le Conseil, et STC n'aurait pas à envisager un rajustement tarifaire pour ces deux indicateurs.
 

Analyse et conclusions du Conseil

65.

Le Conseil note que STC a demandé de rajuster les résultats des indicateurs 1.5, 2.1A et 2.1B, 2.2A et 2.2B, et 2.5 en raison des répercussions de trois évènements perturbateurs survenus en 2003. La période de rajustement demandée varie par indicateur et couvre les mois de juillet à décembre 2003. Le Conseil relève que la demande de rajustement repose sur la méthode proposée par STC, qui recommande de faire abstraction des effets des évènements perturbateurs sur le processus de réparation et sur les fonctions du centre d'affaires en examinant les ratios et les tendances de 2002 et 2004.

66.

Le Conseil estime que la présente demande d'exclusion soulève principalement les quatre questions suivantes :
 
  • Peut-on qualifier les incendies de forêt, les inondations et la rupture de câble d'évènements perturbateurs, en vertu de la décision 2005-17?
 
  • Y a-t-il un lien causal entre les évènements perturbateurs et les résultats QS?
 
  • Quelle méthode devrait-on utiliser, dans ce cas, pour déterminer s'il faut rajuster les indicateurs ou les exclure du PRT?
 
  • Quels indicateurs QS de détail devrait-on rajuster ou exclure du PRT et pendant combien de temps?
 

Peut-on qualifier les incendies de forêt, les inondations et la rupture de câble d'évènements perturbateurs, en vertu de la décision 2005-17?

67.

Le Conseil note que les Groupes de défense des consommateurs ont convenu que les évènements identifiés par STC étaient bien des évènements perturbateurs. Il relève également que deux des trois évènements étaient des catastrophes naturelles. Le Conseil estime que STC a fourni suffisamment de renseignements pertinents sur l'ampleur des incendies de forêt, qui s'est traduite par la déclaration d'un état d'urgence dans toute la province, et sur les inondations dans le Lower Mainland de la Colombie-Britannique pour qualifier ces deux évènements comme imprévisibles et indépendants de la volonté de STC.

68.

D'après le Conseil, il est déraisonnable de tenir STC responsable de la rupture de câble, survenue le 22 octobre 2003, due à la faute commise par un entrepreneur tiers pour n'avoir pas suivi les directives établies.

69.

À la lumière de ce qui précède, le Conseil estime que les trois évènements, à savoir les incendies de forêt, les inondations et la rupture de câble, sont des évènements perturbateurs.
 

Y a-t-il un lien causal entre les évènements perturbateurs et les résultats QS?

70.

Le Conseil observe que plus de 5 000 clients ont été privés de service à la suite des incendies de forêt qui ont commencé en juillet 2003 et qui se sont poursuivis jusqu'en septembre. Il relève également que la rupture de câble à Vancouver le 22 octobre a interrompu le service pour environ 10 000 clients et a nécessité le redéploiement du personnel pour rétablir le service. De plus, les inondations survenues en octobre ont entraîné l'évacuation d'environ 1 200 personnes.

71.

Les trois évènements perturbateurs ont contraint STC à revoir ses priorités et à en fixer d'autres pour rétablir le service auprès des clients dans les plus brefs délais possibles. Les évènements perturbateurs, qui se sont chevauchés dans le temps, ont eu d'importantes répercussions sur la capacité de STC à offrir un service conforme aux normes applicables de la QS de détail. Le Conseil reconnaît le bien-fondé des arguments avancés par STC selon lesquels, d'une part, la remise en état après les inondations était une opération difficile et de longue durée, d'autre part, elle n'avait pas été capable d'accéder et de réparer les dégâts faits dans les installations alors que les incendies de forêt faisaient rages, et enfin la rupture de câble nécessitait le redéploiement du personnel pour rétablir le service.

72.

En ce qui concerne les indicateurs associés au temps de réponse à la fonction de réparations, le Conseil estime que les évènements perturbateurs qui ont causé d'importants dégâts au réseau de STC auraient influé sur la capacité de la compagnie à faire passer ses résultats QS d'inférieurs à égal à la norme fixée pour ces indicateurs.

73.

Le Conseil note que les incendies de forêt ont détruit environ 80 km de fibres optiques et 100 km de câbles en cuivre, ainsi que les structures de soutènement, les installations et l'équipement connexes. Le Conseil constate également que les dommages causés par l'incendie aux installations d'électricité provinciales ont interrompu le service de STC et déchargé sa batterie de secours. Par ailleurs, le Conseil considère que les feux ont retardé les réparations permanentes effectuées par STC dans son usine, de nouveaux incendies s'étant déclarés.

74.

De plus, le Conseil remarque que les inondations dans le Lower Mainland de la Colombie-Britannique ont causé d'importants dégâts aux principales installations de transport de fibre optique entre Whistler et Pemberton et que la rupture de câble a détruit trois câbles de fibre optique contenant 256 fibres et plusieurs câbles en cuivre contenant plus de 10 000 lignes en service.

75.

De plus, le Conseil estime que la réaffectation de ressources provenant d'autres secteurs de la compagnie pour gérer les répercussions des évènements perturbateurs aurait contribué à créer un retard accumulé dans le processus de réparation.

76.

En ce qui a trait à l'indicateur 1.5, le seul indicateur qui n'est pas lié au temps de réponse à la fonction de réparation, le Conseil estime que le principal effet des évènements perturbateurs sur cet indicateur serait une augmentation du nombre et de la durée des appels due aux attentes des clients de voir le service rétabli par STC une fois les feux de forêt maîtrisés, les inondations reculées et la rupture de câble réparée.

77.

À la lumière de ce qui précède, le Conseil estime qu'il y a un lien causal entre les résultats de rendement inférieurs à la norme obtenus par STC et les trois évènement perturbateurs.
 

Quelle méthode devrait-on utiliser, dans ce cas, pour déterminer s'il faut rajuster les indicateurs ou les exclure du PRT?

78.

Le Conseil note que STC a proposé, pour régulariser ses résultats de rendement QS de détail pour les mois touchés par les évènements perturbateurs en 2003, une méthode qui utilisait des résultats pour les indicateurs 1.5, 2.1A, 2.1B, 2.2A, 2.2B et 2.5 basés sur les résultats de 2002 ou de 2004. Si le Conseil estime judicieux d'analyser les résultats de rendement récents comme critère d'évaluation de ce qui pourrait se produire, il considère qu'il ne devrait pas accorder d'exclusion pour les indicateurs dont la probabilité de respecter la norme des indicateurs lors d'un évènement perturbateur était bien mince.

79.

Le Conseil craint que l'utilisation de très faibles résultats QS dans les années de base pour élaborer un ratio avec des résultats non affectés pour 2003 puisse gonfler artificiellement l'amélioration réalisée durant les mois touchés par les évènements perturbateurs. Le Conseil estime que plus l'écart est grand entre les années de base et 2003, plus le ratio est grand, donc plus l'amélioration est grande pour ce qui est des résultats influés par les évènements perturbateurs. Pour cette raison, le Conseil considère inappropriée la méthode proposée par STC.

80.

En outre, le Conseil estime que, le cas échéant, la méthode proposée par STC peut ne pas régulariser de manière exacte les résultats de rendement de juillet à décembre 2003, puisqu'on ne peut pas présumer que les volumes et les types de commandes d'approvisionnement et de réparation dans un mois donné ne correspondent pas les uns aux autres d'une année à l'autre.

81.

D'après ce qui précède, le Conseil refuse la méthode proposée par STC pour déterminer, dans ce cas, s'il faut rajuster les indicateurs ou les exclure du PRT de détail.

82.

Le Conseil estime qu'en examinant les résultats QS à partir de la période précédant directement les évènements perturbateurs, il peut mieux évaluer si oui ou non les évènements ont influé directement sur la capacité de STC à respecter les normes des indicateurs QS. Selon le Conseil, si une ESLT a réussi à respecter ou à dépasser les normes QS appropriées pendant au moins six des douze mois, ou durant les trois mois consécutifs, précédant immédiatement un évènement perturbateur, il serait alors raisonnable de conclure que l'ESLT aurait probablement respecté ses engagements QS sans les évènements perturbateurs.

83.

Le Conseil considère, par conséquent, que si les résultats du rendement QS de détail de STC pour les douze mois avant juillet 2003 démontrent que la compagnie a respecté la norme pendant au moins six des douze mois en question ou au cours des trois mois consécutifs précédant immédiatement juillet 2003, il est probable que STC aurait respecté la norme pour cet indicateur entre juillet et décembre 2003.
 

Quels indicateurs QS de détail devrait-on rajuster ou exclure du PRT et pendant combien de temps?

84.

Le Conseil note que STC a respecté la norme QS de détail s'appliquant aux indicateurs 2.1A, 2.2A et 2.5 au cours de six des douze mois ayant immédiatement précédé les évènements perturbateurs. De plus, le Conseil estime que STC a respecté la norme quant aux indicateurs 2.2A et 2.5 au cours des trois mois complets ayant immédiatement précédé le début des incendies de forêt.

85.

Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime raisonnable de conclure que STC aurait respecté les normes de service s'appliquant à : l'indicateur 2.1A pour les mois d'août, de septembre, d'octobre, de novembre et de décembre; l'indicateur 2.2A pour août, septembre, octobre et décembre; et l'indicateur 2.5 pour juillet, août, septembre et octobre, s'il n'y avait pas eu d'évènement perturbateur. Le Conseil accorde, par conséquent, à STC l'exclusion de ces indicateurs des résultats QS, pour les mois susmentionnés, du calcul du PRT de 2003.

86.

Le Conseil note qu'avant les évènements perturbateurs STC n'avait pas respecté les résultats QS quant aux indicateurs 1.5, 2.1B et 2.2B pour six des douze mois, ou pour les trois mois consécutifs, ayant immédiatement précédé lesdits évènements. Par conséquent, le Conseil estime fort peu probable que STC aurait atteint des résultats supérieurs à la norme pour les indicateurs 1.5, 2.1B et 2.2B sans les évènements perturbateurs.

87.

De ce fait, le Conseil estime que les résultats se rapportant à ces indicateurs ne devraient pas être exclus du PRT. Cependant, selon lui, les évènements perturbateurs auraient eu une certaine incidence sur ces résultats inférieurs à la norme et il faut absolument en tenir compte.

88.

Le Conseil note que, par le passé, STC a prouvé son incapacité à respecter les normes QS de détail s'appliquant aux indicateurs 1.5, 2.1B et 2.2B durant la période provisoire du PRT. Il estime que ces résultats inférieurs à la norme symbolisent un modèle de rendement en deçà de la norme pour ce qui est des indicateurs en question.

89.

Vu ceci, le Conseil estime que, pour les indicateurs 1.5, 2.1B et 2.2B, il est raisonnable de présumer qu'une moyenne des résultats QS obtenus pendant les six mois précédant immédiatement les évènements perturbateurs serait caractéristique des résultats que STC aurait obtenus en l'absence des évènements perturbateurs. Par conséquent, le Conseil juge approprié de remplacer les résultats inférieurs à la norme pour les indicateurs 1.5, 2.1B et 2.2B par la moyenne semestrielle atteinte immédiatement avant les mois concernés, pour chaque indicateur.

90.

À la lumière de ce qui précède, le Conseil ordonne à STC de rajuster les résultats s'appliquant aux indicateurs 1.5, 2.1B et 2.2B de la manière suivante :
 
  • pour l'indicateur 1.5, remplacer ses résultats QS pour les mois de juillet, d'août, de septembre et d'octobre 2003 par 66 %, soit le résultat moyen atteint par la compagnie au cours des six mois ayant immédiatement précédé juillet 2003;
 
  • pour l'indicateur 2.1B, remplacer ses résultats QS pour les mois d'août, de septembre, d'octobre et de novembre 2003 par 75 %, soit le résultat moyen atteint par la compagnie au cours des six mois ayant immédiatement précédé août 2003;
 
  • pour l'indicateur 2.2B, remplacer ses résultats QS pour les mois d'août, de septembre, d'octobre, de novembre et de décembre 2003 par 85 %, soit le résultat moyen atteint par la compagnie au cours des six mois ayant immédiatement précédé août 2003.
 

Conclusions

91.

En résumé, le Conseil ordonne à STC :
 
  • d'exclure les résultats QS s'appliquant aux indicateurs 2.1A, 2.2A et 2.5 du calcul PRT des mois suivants de 2003 : 2.1A (d'août à décembre), 2.2A (d'août à octobre, et décembre) et 2.5 (de juillet à octobre);
 
  • de remplacer les résultats QS s'appliquant à l'indicateur 1.5 pour les mois de juillet à octobre 2003 par 66 %;
 
  • de remplacer les résultats QS s'appliquant à l'indicateur 2.1B pour les mois d'août à novembre 2003 par 75 %;
 
  • de remplacer les résultats QS s'appliquant à l'indicateur 2.2B pour les mois d'août à décembre 2003 par 85 %;
 
  • d'appliquer les crédits aux clients, tels que calculés par suite de la présente décision, aux factures mensuelles des abonnés inscrits à la date de la décision, au plus tard le 3 juillet 2007;
 
  • de lui soumettre au plus tard le 3 juillet 2007 le montant du crédit aux clients par service d'accès au réseau (SAR) et le nombre de SAR utilisé pour calculer le crédit aux clients.

92.

Les opinions minoritaires des conseillers French, Arpin et Noël sont jointes à la présente.
  Secrétaire général
  Ce document est disponible, sur demande, en média substitut, et peut également être consulté en version PDF ou en HTML sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca
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Notes de bas de page :

1 À compter du 1er mars 2006, TELUS Communications Inc. a assigné et transféré tous ses actifs et passifs, dont tous ses contrats de service, à STC.

2 TCC(CRTC)24fév06‑103.

 

Opinion minoritaire du conseiller et vice-président, Télécommunications, Richard French

  Deux questions principales expliquent mon désaccord avec la majorité dans cette affaire et le dossier connexe (CRTC 2007-30). En effet, mon opinion minoritaire porte non seulement sur la mise en oeuvre du plan dans ces deux cas mais aussi sur le plan comme tel et, par conséquent, sur sa mise en application.
  D'abord, le Conseil devrait-il imposer aux entreprises de services locaux titulaires (ESLT) des rajustements tarifaires aux indicateurs de la qualité du service de détail, et peut-il le faire d'une manière utile? L'atteinte de quel objectif d'intérêt public est favorisée par l'application de rajustements tarifaires pour la qualité du service de détail? Compte tenu de l'information disponible, est-il possible pour le Conseil d'appliquer des rajustements tarifaires pour la qualité du service de détail? En d'autres termes, le Conseil dispose-t-il de l'information nécessaire et peut-il prendre les décisions qui s'imposent relativement à l'application de tels rajustements?
  Ensuite, si le Conseil peut et doit appliquer des rajustements tarifaires pour la qualité du service de détail d'après l'ensemble des critères précités, quelles sont les conséquences des rajustements? Les conséquences sont-elles claires? Les rajustements permettent-ils d'atteindre les buts visés? Le plan de rajustement tarifaire pour le service de détail établi par le Conseil est-il efficace?
  Je traiterai ci-après de ces deux questions principales, puis j'exposerai ma position.
  Origines, objectif et faisabilité
  Le plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail établi par le Conseil découle de la deuxième instance sur le plafonnement des prix, laquelle a donné lieu à la Décision de télécom CRTC 2002-34. Le plan provisoire a été présenté dans cette décision. Le plan final a été annoncé dans la Décision de télécom CRTC 2005-17. Le Conseil surveillait depuis de nombreuses années le rendement en termes de la qualité du service des entreprises que nous nommons ESLT. Une grande quantité de rapports étaient rédigés et le CRTC pouvait adresser des reproches, mais, de façon générale, aucun rajustement tarifaire ni aucune autre conséquence pécuniaire ne découlaient de cette surveillance. Au cours de la deuxième instance sur le plafonnement des prix, de nombreuses plaintes quant à la qualité du service offert par les ESLT de 1998 à 2000 ont été portées à l'attention du comité d'audition. Par conséquent, « Le Conseil a indiqué qu'il n'était pas persuadé que les pressions de la concurrence étaient suffisantes pour que les ESLT satisfassent aux normes QS. Le Conseil a conclu qu'il fallait établir des incitatifs pour que les ESLT se conforment aux normes. »1
  C'est donc à partir de certains éléments de preuve et avec les meilleures intentions que le Conseil a entamé un long processus d'application des « incitatifs », afin que les ESLT satisfassent aux normes de qualité du service de détail. Comme il a été mentionné précédemment, un plan provisoire (ne comprenant aucun mécanisme pour l'application de tout rajustement requis) a pris effet le 1er juillet 2002, et un plan final a été présenté dans la Décision de télécom CRTC 2005-17, 24 mars 2005. Je suis d'avis que, malgré les bonnes intentions et les efforts déployés, les tentatives d'application du plan ont permis de constater que celui-ci comporte de graves lacunes.
  En vertu de l'exigence principale du plan, le Conseil devait surveiller et évaluer systématiquement les résultats des gestionnaires d'ESLT en matière de la qualité du service de détail offert à la clientèle. Il était prévu que le Conseil recoure, de façon systématique, à un ensemble d'indicateurs de la qualité du service pour la surveillance et l'évaluation. Lorsque des évènements majeurs (mauvaises conditions météorologiques, incendie, accident, etc.) ont compromis le service, le Conseil a refusé de considérer ces évènements comme une force majeure, traitement qui leur est traditionnellement réservé. Ainsi, lorsque le service a été perturbé à cause d'un évènement exceptionnel, comme dans les cas présents, le Conseil a décidé d'évaluer au cas par cas la façon dont les dirigeants des ESLT ont agi pendant et après les évènements en question. En outre, le Conseil a choisi de prendre une décision ayant des conséquences pécuniaires pour la compagnie. Dans les situations où le Conseil a déterminé que les évènements en question étaient, de façon raisonnable, indépendants de la volonté des gestionnaires d'une ESLT, les conséquences de ces évènements sur le service ont été exclues du plan de rajustement tarifaire, à la demande de l'ESLT.
  Je suis d'avis qu'il faut d'abord s'assurer que le plan s'est révélé nécessaire dans le passé et que le Conseil peut en assurer la gestion.
  Beaucoup de temps s'est écoulé entre la deuxième instance sur le plafonnement des prix, qui visait notamment à améliorer la qualité du service de 1998 à 2000, et la mise en ouvre des rajustements tarifaires (2005). De plus, de nombreux changements se sont produits au cours de cette période quant aux services offerts par les ESLT et à l'environnement concurrentiel. À la fin de 2006, au moins 80 % des foyers canadiens pouvaient bénéficier du service Internet haute vitesse ou du service de téléphonie VoIP, ou de ces deux services, offerts par des entreprises de câblodistribution. Ces fournisseurs de service concurrents accaparent une part importante du marché des ESLT, et ils ont prouvé qu'ils sont en mesure de conserver leurs nouveaux clients. Que des « incitatifs » réglementaires aient été nécessaires ou non afin que les ESLT satisfassent aux normes de qualité du service de détail en 2002, je conclus qu'ils ne sont plus raisonnablement nécessaires, sauf dans les régions où il n'existe qu'un seul fournisseur de services téléphoniques doté d'installations. Je reviendrai sur la question du ciblage des « incitatifs ». Je retiens de la présente discussion que ce n'est qu'une minorité de la clientèle des entreprises de téléphonie canadiennes qui pourrait avoir besoin que le gouvernement intervienne afin de les protéger contre un fournisseur indifférent en position de monopole.
  Abordons maintenant la question de la faisabilité. Une période inadmissible s'est écoulée depuis les évènements qui ont perturbé les services en 2003, lesquels font l'objet de la présente décision, jusqu'au présent. Cette lenteur s'explique par de nombreuses raisons, dont le fait que le personnel du Conseil ait tenté en vain d'obtenir des renseignements lui permettant d'évaluer l'efficacité des dirigeants des ESLT quant à la gestion des conséquences de ces évènements. Cependant, quiconque a déjà eu à gérer des évènements exceptionnels, comme des incendies de forêt, des arrêts de travail ou des inondations, sait que la dernière chose qui nous préoccupe dans de telles situations est de tenir les dossiers afin de permettre à la postérité de nous évaluer. Dans le cas présent, le Conseil, qui n'a pas vraiment d'expérience sur laquelle se fonder pour évaluer les gestionnaires, ne peut qu'essayer de comprendre après coup. Au cours de la période en question, les gestionnaires des ESLT se préoccupaient uniquement de rétablir le service, et ce, avec raison.
  Honnêtement, cette conclusion concerne tout autant l'application systématique des normes relatives à la qualité du service de détail aux fins du rajustement tarifaire en l'absence d'évènements exceptionnels. D'après mon expérience, les entreprises expliquent le fait qu'elles n'aient pas satisfait aux normes par de nombreuses raisons diverses, dont certaines sont même crédibles. Par contre, les chiffres à eux seuls n'indiquent aucun moyen simple de distinguer l'incompétence et la négligence de l'une ou l'autre des nombreuses causes incontrôlables d'un manquement de ce genre. Cette mise en garde s'applique encore plus clairement aux comités composés de membres bien intentionnés qui ne connaissent pas les gestionnaires de l'entreprise, comme le CRTC.
  Je conclus qu'un plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail comporte des lacunes si graves, du point de vue de l'information et de l'analyse, qu'un plan de ce genre ne devrait s'appliquer que lorsque sa nécessité est démontrée hors de tout doute raisonnable, et que son efficacité peut être démontrée. Abordons maintenant la question de l'efficacité.
  Efficacité
  L'efficacité dans quoi? Les pouvoirs dont le Conseil se prévaut touchent la détermination de « tarifs justes et raisonnables ». À ce chapitre, l'objectif du plan consiste à dédommager les clients qui obtiennent un service de qualité inférieure. Dans la Décision CRTC 2005-17, il est pourtant question « d'incitatifs », comme je l'ai mentionné précédemment. Le terme « incitatif » ne peut faire référence qu'au fait d'inciter les gestionnaires des ESLT à prêter attention à la qualité du service, à supposer qu'une conséquence pécuniaire invite davantage les gestionnaires à offrir un bon rendement que des pressions gouvernementales ou de la concurrence. Examinons tour à tour chaque justification.
  Les rajustements tarifaires pour la qualité du service représentent-ils un instrument fiable qui permet de fixer des « tarifs justes et raisonnables »? Penchons-nous sur les crédits aux clients exigés en vertu de la présente décision. Les évènements sur lesquels porte cette décision sont les suivants : les incendies de forêt qui ont fait rage au centre de la Colombie-Britannique et dans le sud-ouest de l'Alberta de la mi-juillet à septembre 2003, la coupure de câble survenue en Colombie-Britannique le 22 octobre 2003 et les inondations qui ont touché le Lower Mainland de la Colombie-Britannique au cours de la même semaine que s'est produite la coupure de câble. En résumé, les clients habitant les secteurs touchés par ces évènements n'ont pas eu de service téléphonique pendant de longues périodes. En avril 2007, le Conseil rend une décision afin de dédommager ces clients. et de nombreux autres clients. Il ordonne aux entreprises d'octroyer à l'ensemble de leurs clients un crédit, dont le montant serait à déterminer. La valeur du crédit correspondrait plus ou moins aux sommes versées antérieurement, lesquelles figurent au tableau ci-dessous. Elle est fixée à partir d'une évaluation fondée sur la sous-performance de l'entreprise par rapport aux normes de qualité du service, lorsque le service n'était pas touché par les évènements perturbateurs en question. En ce qui concerne les clients qui ont subi l'interruption de service découlant de ces évènements exceptionnels, la politique d'exclusion vise précisément à ne pas essayer de les dédommager, puisque de tels évènements sont indépendants de la volonté des ESLT.
  Alors, la somme du crédit est négligeable, il s'est écoulé plus de trois ans avant l'octroi de celui-ci2, et ce sont tous les clients de la compagnie au moment de l'octroi qui ont touché le crédit. Le crédit octroyé n'a donc aucune incidence sur le caractère juste et raisonnable des tarifs applicables aux clients ayant subi l'interruption des services en 2003, et il n'est d'ailleurs pas établi à cette fin. J'avance que, pour la majorité des clients actuels de TELUS n'ayant pas subi l'interruption des services en question, le crédit octroyé ne représente qu'une réduction négligeable des tarifs, laquelle n'est pas liée à l'établissement de tarifs justes et raisonnables ni à des faiblesses du rendement qu'ils auraient subies en ce qui concerne les services offerts par TELUS. Les sommes visées sont simplement trop limitées et trop largement réparties. J'en conclus que ni la présence ni l'absence du crédit ne nuit ou encore ne favorise l'établissement de tarifs justes et raisonnables.
  Le cas visé aux présentes est assez représentatif du fonctionnement du plan. Le tableau ci-après résume les mesures prises jusqu'à maintenant aux termes du plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail.
 

Tableau 1 - Rajustement du tarif applicable aux ESLT pour la qualité du service de détail

 

Entreprise

Période visée par l'octroi du crédit

Total du crédit

Crédit par client des SAR

Date de l'octroi du crédit

Observations

  Bell Aliant

2004

1 525 537 $

1,16 $

Juin/juillet 2006

Application de révision et de modification visant l'annulation de la somme en cours
  Bell Aliant

2005

2 004 361 $

1,53 $

Juin/juillet 2006

Ajouté au crédit de 1,16 $ ci-dessus pour ne former qu'un crédit aux clients de 2,69 $
  MTS Allstream Juillet 2002-décembre 2003

193 340 $

0,29 $

Juin/juillet 2005

  MTS Allstream

2004

128 168 $

0,19 $

Juin/juillet 2005

  TELUS (Québec) Octobre 2002-décembre 2003

148 586 $

0,51 $

Juillet/août 2005

 
  Société TELUS Communications (STC) Juillet 2002-décembre 2003

À finaliser

À finaliser

Dans les 60 jours de la date de la décision, au plus tard  
  Société TELUS Communications (STC)

2004

2 735 509 $

0,76 $

Juillet/août 2006

 
  D'une part, il convient de noter que les crédits aux clients sont très modestes, ce qui soulève d'ailleurs des questions quant aux buts réalisés concernant l'établissement des tarifs justes et raisonnables. D'autre part, il faut comprendre que l'incidence des crédits sur la situation financière des ESLT peut se révéler considérable. Les frais liés au rajustement tarifaire exigé dans la décision visée sont évalués à plusieurs millions de dollars.
  Peut-être que c'est l'incidence sur les ESLT qui est véritablement en cause ici. Peut-être que ce sont les « mesures incitatives » dont il est véritablement question dans cette affaire. Il y a lieu de se demander si une mesure punitive ne motiverait pas davantage les gestionnaires des ESLT, au lieu d'une seule mesure incitative sous forme pécuniaire. Certains croient que les autorités de réglementation doivent appliquer de telles mesures pour s'assurer que les gestionnaires des ESLT assument leurs obligations; cette impression est toutefois très discutable.
  L'application de mesures punitives nécessite que les fautes commises et les comportements susceptibles de mener à l'imposition d'une sanction à l'avenir soient clairement définis. Le Conseil n'est toutefois pas en mesure d'apporter de telles précisions, pour la simple raison qu'il ne dispose pas des renseignements requis et qu'il ne possède pas l'expérience nécessaire pour le faire. Les normes de qualité du service visent à restreindre la complexité infinie des opérations d'une grande société à un ensemble défini de chiffres sur une page. Au fil du temps, l'application rigoureuse de ces normes, par une personne qui possède une vaste expérience personnelle de la complexité de ces opérations, pourrait servir à évaluer le rendement des gestionnaires d'entreprises de télécommunication. Si ces normes, par exemple les normes de qualité du service aux concurrents, étaient susceptibles de donner lieu à un conflit de motivation flagrant chez les dirigeants des ESLT, une autorité de réglementation pourrait tout de même en autoriser l'application, faute de mieux. Les indicateurs de la qualité du service de détail ne comportent aucun conflit de motivation de ce genre. Ces indicateurs ne sont, pour ce qui est du CRTC, qu'un instrument inapproprié et peu instructif visant à « motiver » les dirigeants des ESLT.
  Que faire?
  Comme il a été mentionné, la politique elle-même soulève ces questions, et la mise en application actuelle de la politique permet simplement de les énoncer. Plutôt que de continuer à mettre en oeuvre le plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail, je propose de suspendre les demandes d'exclusion à l'étude et la mise en application systématique du plan, afin de revoir la finalité, la faisabilité et l'efficacité du plan comme tel. De cette façon, l'évolution du marché et les tentatives concrètes de mise en oeuvre du plan (qui sont, à mon avis, tout à fait insatisfaisantes) pourraient être examinées de façon exhaustive. Je n'ai pas abordé la question de l'interruption des travaux comme motif d'exclusion aux termes du plan, un volet du plan qui soulève son lot de problèmes3, ni les directives de la gouverneure en conseil quant à la mise en application de la politique canadienne de télécommunication4, mais ces deux questions seraient pertinentes dans le cadre de la procédure de révision.
  Le CRTC entend généralement mettre en application une politique jusqu'au moment où il décide de la réviser, citant comme justification de cette pratique l'instauration d'une certitude et d'une prévisibilité sur le plan de la réglementation. Je ne remets pas en question la présente politique comme pratique générale. Toutefois, il est évident, compte tenu des commentaires formulés précédemment, que je suis d'avis que la suspension de l'arriéré actuel des demandes n'aura pas d'incidence majeure sur l'une ou l'autre des parties. Les ESLT représentent, en théorie, la seule partie susceptible de subir de plus en plus de répercussions dans cette affaire; leurs points de vue pourraient donc être entendus et le Conseil devrait être tenu de les respecter. Dans la mesure où la procédure mène à la reconnaissance de la finalité, de la faisabilité et de l'efficacité du rajustement tarifaire à l'égard de certains consommateurs, ces derniers toucheront, en bout de ligne, les crédits auxquels ils ont droit aux termes de la politique établie à la suite de la procédure de révision. Les concurrents n'ont aucun intérêt en jeu dans cette affaire. Par conséquent, je suis d'avis que la suspension de la mise en application du plan, en attendant la révision de celui-ci, n'entraînerait pas les répercussions qui découlent généralement du flou réglementaire.
  Il me semble que le CRTC, à l'occasion, prend certaines décisions comme s'il s'agissait de cas faisant jurisprudence en droit commun. Or, il s'agit précisément de l'avantage du concept des tribunaux administratifs que de pouvoir procéder rapidement à des rajustements en fonction de circonstances particulières :
 

[traduction] Lorsque des parties se présentent devant le tribunal dans le cadre d'un nouveau cas soulevant des questions juridiques ou politiques semblables à celles étudiées lors d'un cas antérieur visant les mêmes parties, le tribunal n'est pas lié par le concept de res judicata.Cette souplesse permet au tribunal de continuer à protéger l'intérêt public, à examiner et à approuver certaines modifications d'ordre réglementaire, ainsi qu'à réglementer de façon efficace les relations dynamiques et continues entre les parties. Un tribunal peut autoriser la tenue d'un nouveau procès et présenter une nouvelle conclusion sans qu'un tribunal de droit ne soit tenu d'intervenir. Toutefois, la stabilité au sein d'une industrie est importante et c'est pourquoi un tribunal doit avoir d'excellents motifs pour justifier le renversement de ses propres décisions.

 

Le principe de stare decisis ne s'applique pas aux tribunaux, car un tribunal n'est pas lié par les décisions qu'il a rendues antérieurement dans des cas analogues. Ses décisions peuvent tenir compte du caractère évolutif de son domaine de compétence5.

  J'estime que le Conseil devrait tirer parti de cette souplesse en ce qui concerne le plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail. Il faut procéder à une révision du plan avant toute future mise en application de celui-ci.
  Par ailleurs, j'ajouterais que si j'étais conseiller du CRTC dans le cadre d'un tel examen, je tenterais de déterminer s'il ne serait pas plus judicieux de prendre les ressources destinées au maintien de la qualité du service de détail et de les affecter à la création d'un organisme de protection des consommateurs de services de télécommunication, dont le mandat consisterait à traiter de façon ponctuelle les problèmes auxquels des clients précis font face6. L'expérience et la crédibilité d'un tel organisme pourraient apporter plus de cohérence et favoriser une certaine efficacité auxquelles ne tend pas la forme actuelle du plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail, selon moi. Je tiens à souligner qu'après que j'aie eu rédigé l'essentiel de cette opinion minoritaire, la gouverneure en conseil a pris un décret ordonnant au CRTC de travailler conjointement avec l'industrie pour établir un organisme de protection des consommateurs de services de télécommunication, organisme dont il approuverait les codes de déontologie, les normes et l'administration7. Je suis d'avis qu'il s'agit là d'une avenue qui justifie beaucoup plus l'investissement de temps, d'efforts et d'argent que le plan de rajustement tarifaire pour la qualité du service de détail.
  __________________

Notes de bas de page :

1 Décision de télécom CRTC 2005-17, paragraphe 5. Au paragraphe 91, le Conseil a déclaré ce qui suit : « La non-conformité d'une ESLT à une ou plusieurs de ces normes minimales doit donc déclencher un rajustement tarifaire global pour refléter l'importance de ne pas respecter la qualité du service et encourager les ESLT à éviter ces non-conformités à l'avenir. » (L'italique est de l'auteur).

2 « Le Conseil est d'avis qu'il faut créditer les états de compte des clients le plus tôt possible après la fin de la période de déclaration, car plus le temps s'écoule entre la fin de la période de déclaration et l'application du crédit, plus grande est la possibilité que les clients qui auraient droit à un crédit aient résilié leur service ou aient changé de fournisseur », Décision de télécom CRTC 2005-17, paragraphe 168. En effet.

3 Voir l'opinion minoritaire de la conseillère Andrée Noël dans la Décision de télécom CRTC 2006-27.

4 Décret donnant au CRTC des instructions relativement à la mise en oeuvre de la politique canadienne de télécommunication, C.P. 2006-1534 le 14 décembre 2006, Gazette du Canada Vol. 140, n26 (27 décembre 2006).

5 Sara Blake, Administrative Law in Canada (Markham), Lexis Nexis, Butterworths 4th edition, 2006, 120, op. cit., pp. 133-134.

6 Voir Groupe d'étude sur le cadre réglementaire des télécommunications : Rapport final - 2006 (Ottawa, Industrie Canada, mars 2006), chapitre 6, recommandations 6-2 à 6-4, et comparer les suggestions énoncées dans la Décision de télécom CRTC 2006‑15, Abstention de la réglementation des services locaux de détail, paragraphes 370-373.

7 Décret demandant au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes de faire rapport au gouverneur en conseil concernant les plaintes de consommateurs, C.P. 2007-533.

 

Opinion minoritaire du conseiller et vice-président, Radiodiffusion, Michel Arpin

  J'atteste avoir lu les observations du conseiller French et j'approuve ses conclusions.
 

Opinion minoritaire de la conseillère Andrée Noël

  J'atteste avoir lu les observations du conseiller French et j'approuve ses conclusions.

Mise à jour : 2007-05-03

Date de modification :